La commission entend la présentation du rapport et les recommandations de Mme Jacqueline Panis, rapporteur, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, sur le projet de loi n° 713 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme des retraites.
Nous engageons l'examen du projet de loi portant réforme des retraites, en sachant que notre objectif commun est d'assurer la pérennité d'un système d'assurance vieillesse très lourdement affecté par la dégradation financière des comptes sociaux. Nous connaissons bien les données du problème car notre Mecss nous a fourni les éléments d'information nécessaires à la compréhension du texte. Nous avons 147 amendements à examiner. Je salue la présence d'Eric Woerth et Georges Tron ; nous n'avions plus accueilli de membres du Gouvernement pendant nos travaux depuis la loi « Hôpital, patients, santé, territoires ».
Il n'a jamais été autant question des femmes à l'occasion d'une réforme des retraites. Je remercie la présidente Muguette Dini d'avoir saisi notre délégation sur ce projet de loi.
Dans un contexte restrictif - quarante cotisants pour dix retraités en 1960, quatorze en 2009 -, la délégation a constaté deux évolutions défavorables aux femmes : la remise en cause au niveau européen des avantages familiaux de retraite traditionnellement réservés aux femmes, même si l'introduction de critères objectifs d'interruption de carrière s'efforce de préserver l'essentiel ; la montée du temps partiel, qui concerne 30 % des femmes, et du chômage, qui contrarie l'effet bénéfique sur les pensions de la progression du taux d'activité des femmes.
La réduction des inégalités salariales s'essouffle avec la précarisation de l'emploi féminin. Les différences de pensions entre les sexes sont deux fois plus fortes que les différences de salaires. Les bénéficiaires du minimum contributif sont à 63 % des femmes ; les bénéficiaires du minimum vieillesse, désormais allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), sont à 62 % des femmes.
Le projet de loi repousse à soixante-sept ans l'âge de liquidation à taux plein mais maintient à soixante-cinq ans l'âge d'obtention du minimum vieillesse. C'est une mesure correctrice qui s'ajoute à celles prévues par l'Assemblée nationale, compte tenu de la persistance des écarts de retraites.
L'article 1er introduit ainsi le principe d'« annulation des écarts de pensions entre les hommes et les femmes à l'horizon 2018 » ; la délégation veillera au suivi de cet objectif.
L'article 23 assouplit le régime transitoire avant l'extinction du départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois enfants ayant quinze ans de service.
L'article 30 améliore la prise en compte du congé de maternité pour les droits à la retraite. L'article 29 bis nouveau rétablit l'assurance veuvage qui, selon la fédération des associations de conjoints survivants (Favec), comporte une garantie de ressources mieux adaptée aux jeunes veuves ou veufs que la réversion. La Favec a souhaité que son montant, aujourd'hui de 570 euros, soit porté à un niveau de survie, et que l'on supprime ou rehausse le plafond de ressources qui empêche le cumul d'une réversion du régime général de base avec un revenu d'activité, ce qui peut dissuader le retour à l'emploi.
L'ensemble de ces préoccupations est largement pris en compte dans les recommandations que vous soumet la délégation.
Les inégalités de retraites s'expliquent avant tout par les inégalités de rémunérations. La délégation approuve la nouvelle rédaction de l'article 31, tout en regrettant que cette sanction financière des entreprises n'ait pas été mise en place dès 2006. L'Assemblée nationale a musclé le dispositif en introduisant une obligation de résultats, et non plus seulement de moyens, et en sanctionnant non plus le défaut de rapport de situation comparée mais l'absence d'accord sur l'égalité professionnelle ou de plan unilatéral de réduction des inégalités. Le Gouvernement devra présenter dans les meilleurs délais un projet de loi sur l'égalité professionnelle et salariale, qui sera l'occasion de fusionner les deux filières de négociation. L'article 31 invite également le Gouvernement à définir au niveau réglementaire les critères pour apprécier les efforts de l'entreprise.
On observe une tendance générale à l'alignement de l'âge de la retraite pour les femmes et les hommes. Seuls quelques pays de l'Union européenne ont prévu de maintenir un âge légal de départ plus précoce pour les femmes dans le régime général. La délégation préconise le maintien à soixante-cinq ans du départ à taux plein pour les personnes ayant interrompu durablement leur activité professionnelle pour éduquer leurs enfants ou apporter des soins à un membre de leur famille handicapé, dépendant ou malade. Cette recommandation favoriserait les femmes en fonction d'un critère objectif, tout en prenant en compte l'évolution de notre société.
À plus long terme, il faut réfléchir à une meilleure prise en compte des choix de couple dans l'acquisition et l'éventuel partage des droits à la retraite au moment de la séparation. Pour évaluer le risque de pauvreté des femmes retraitées, il faut prendre en compte non seulement le niveau des pensions mais aussi la situation matrimoniale. Le dispositif allemand du partage des droits au moment du divorce est plus adapté à un système de retraites par points, et son introduction brutale dans notre droit du divorce supposerait une large concertation. En outre, cette initiative ne s'appliquerait qu'aux couples mariés. Mieux vaudrait réfléchir à la constitution de droits à la retraite communs par des couples qui font déjà l'objet d'une imposition fiscale commune de leurs revenus, droits qui pourraient faire prendre conscience des conséquences à long terme d'une séparation et, le cas échéant, être partagés équitablement.
Je félicite la délégation pour son travail, mais je remarque que l'on parle uniquement des femmes. Or il y a aussi des hommes qui interrompent leur activité professionnelle pour éduquer leurs enfants ou s'occuper de leurs parents.
La délégation s'est-elle inquiétée du risque d'inconstitutionnalité de certaines de ses propositions ? Par ailleurs, pendant combien de temps faudra-t-il avoir interrompu sa carrière pour avoir le droit de partir à taux plein dès soixante-cinq ans ?
Les entreprises seront certes sanctionnées financièrement faute d'accord sur l'égalité salariale, mais la date limite à laquelle elles doivent avoir conclu cet accord est repoussée d'un an. Faute d'accord, un simple plan d'action déclinant les seules propositions de l'employeur suffira. Il ne faut pas céder sur ce point. Nous savons bien que si le projet de loi repousse l'entrée en vigueur du dispositif, c'est qu'aucune négociation n'a été engagée.
La délégation a-t-elle chiffré l'impact financier des mesures qu'elle propose ? Quelles mesures de financement propose-t-elle pour préserver l'équilibre financier de la réforme ?
N'en déplaise au Gouvernement, la discrimination demeure, qu'il s'agisse d'égalité professionnelle ou salariale, notamment envers les plus modestes. Nous sommes opposés à cette réforme, notamment en ce qui concerne les femmes ; les quelques aménagements proposés n'empêcheront pas les écueils. Nous y reviendrons dans nos amendements.
La délégation prône le maintien du départ à soixante-cinq ans pour les « personnes » ayant interrompu leur activité pour éduquer leurs enfants ou soigner un parent et ne vise pas uniquement les femmes. Les écarts de pensions entre hommes et femmes sont deux fois plus importants que les écarts de salaires. C'est pourquoi il serait souhaitable de déterminer le salaire de référence en calculant la moyenne des cent meilleurs trimestres plutôt que celle des vingt-cinq dernières années, comme le propose la délégation. Un amendement gouvernemental dans ce sens serait bienvenu.
La retraite est liée au travail, aux cotisations. Le problème des personnes qui arrêtent, souvent volontairement, leur activité professionnelle est réel mais la solution ne passe pas, me semble-t-il, par la retraite...
Cela fait quinze ans que je suis au Sénat et quinze ans que j'entends parler d'égalité salariale, sans voir le moindre résultat. Le Medef a même jugé qu'il y avait trop de lois sur le sujet !
Je regrette que l'on ne parle que des femmes salariées et pas de celles qui travaillent à la maison. Ces dernières élèvent les enfants, adoucissent la vie de leur mari, font souvent du bénévolat : elles fabriquent du bonheur, sans rien demander à la société - et n'ont pas de retraite. Que la délégation ne les oublie pas !
C'est toute la question du salaire parental...
Je ne comprends pas l'idée d'un cumul des droits à la retraite au sein du couple. La tendance est plutôt au développement de droits individuels.
En tant que vice-président de la délégation, j'approuve totalement ces recommandations. Nous devons veiller à ce que la place des femmes dans la société ne recule pas. Beaucoup de femmes se retrouvent en grande difficulté à la mort de leur époux : il est inacceptable qu'elles ne puissent vivre de façon décente !
Le problème vient aussi de l'impossibilité de scolariser les enfants avant trois ans : les mères sont contraintes d'abandonner leur travail faute de mode de garde.
Notre pays est une référence en matière d'accueil des jeunes enfants. Si une collectivité compte 40 000 enfants de moins de trois ans, doit-elle proposer 40 000 places de crèche ?
La politique familiale n'épuise pas la question de la retraite des mères de familles. L'égalité salariale est un problème d'avenir ; certaines femmes ont fait le choix d'interrompre leur carrière pour élever leurs enfants. Ce principe de libre choix est au coeur de la politique familiale.
Je félicite la délégation pour la qualité de son rapport. Nous partageons bien des analyses, mais le sujet déborde celui des retraites. La garde des enfants joue sur le taux d'emploi des femmes. Le Gouvernement crée 200 000 nouvelles places en crèche d'ici 2012 - les besoins sont immenses.
Certaines de vos recommandations sont satisfaites par les textes actuels, d'autres méritent que l'on s'y penche. L'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) prend déjà en compte les carrières fractionnées. Le cas des personnes qui décident de s'interrompre au-delà de la durée du congé parental, ou reviennent sur le marché du travail au bout de dix ou quinze ans, est un autre sujet. Les congés parentaux, qui peuvent être longs et cumulés, sont pris en compte. Le nombre de trimestres des femmes augmente et dépassera celui des hommes dans quelques années, mais ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Le système de solidarité par la retraite compense la cessation provisoire du travail. Mais faut-il prendre en compte dans le calcul de la retraite les interruptions définitives d'activité ? La réponse au problème de la garde d'enfants est ailleurs.
Peut-être faut-il évoluer sur la réversion. Dans le privé, il y a un abattement de 30 % sur le plafond de ressources et la pension de réversion est plus importante que dans le public. Ce sujet a été évoqué avec les syndicats de la fonction publique mais n'a pas abouti.
Nous allons continuer de réfléchir à votre proposition de maintien du départ à soixante-cinq ans dans certains cas mais il ne faut pas créer de nouvelles injustices entre ceux qui auraient choisi de travailler en accumulant des droits à la retraite et ceux qui auraient choisi de cesser. La retraite n'est pas un minima social. Les personnes qui se voient obligées d'interrompre leur activité obtiennent compensation par l'AVPF.
La retraite s'inscrit effectivement dans la continuité du travail : le code des pensions parle d'ailleurs de « salaire différé ». Elle n'a pas vocation à prendre en compte toutes les inégalités en amont.
Il faut tout faire pour imposer l'égalité salariale dans l'entreprise. Nous proposerons un amendement visant à ce que l'effectivité des accords et des plans d'action en la matière soit évaluée. Le sujet fera l'objet d'une loi et de mesures réglementaires. A nous de veiller à l'effectivité des mesures.
Les conditions de vie conjugale évoluent ; à nous d'adapter les dispositifs de solidarité et de cibler le public concerné. Il nous est fort difficile de savoir combien de personnes seraient concernées et donc d'évaluer le coût de nos propositions.
La délégation est très attachée à l'égalité hommes-femmes ; c'est pourquoi nous parlons autant que faire ce peut de « personnes ». Je laisse les questions de constitutionnalité aux juristes et la mesure de l'impact financier aux spécialistes.
Nous n'avons pas souhaité préciser la durée de l'interruption d'activité mais il faudra le faire. Nous sommes également très attachés à l'égalité salariale et à l'égalité professionnelle. Le problème de la garde des enfants n'est pas l'objet du débat mais je remercie le ministre de ses précisions.
La délégation aux droits des femmes est composée d'hommes et de femmes qui travaillent, comme les autres sénateurs, dans les différentes commissions permanentes. Ce n'est pas à nous de réaliser des études d'impact financier, monsieur Vasselle, mais au Gouvernement ! Nous demandons des simulations car la démographie est une science exacte.
Pour l'heure, il n'y a pas d'autonomie économique parfaite entre hommes et femmes. Derrière l'affichage, c'est toujours la vieille mentalité du travail féminin : salaires d'appoint pour travaux d'appoint !
Le Conseil constitutionnel nous a engagés à prendre en compte les inégalités de fait dont pâtissent les femmes. C'est un sujet de longue haleine, qui a connu autant de reculs que d'avancées, un ensemble qui englobe aussi bien l'orientation des filles, l'éducation des garçons que la question du temps partiel...
La délégation a travaillé dans des conditions difficiles, avec des délais contraints. Nous voulons une loi sur l'égalité professionnelle avec de vrais engagements, des « droits propres ». Les femmes doivent cesser d'être les seules perdantes quand la vie à deux se fracasse !
Merci d'avoir resitué le problème des retraites des femmes dans le contexte global des inégalités dont elles sont victimes.
Pour avoir dirigé des hôpitaux pendant trente-cinq ans, j'ai vu nombre de femmes dévouées à leur travail, stressées et fatiguées car elles menaient de front vie professionnelle et vie de famille. Elles sont fatiguées avant les autres. Cette pénibilité doit être reconnue au moment du départ à la retraite.
La commission procède à la désignation de sept candidats titulaires et de sept candidats suppléants appelés à faire partie d'une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008.
Sont désignés comme candidats titulaires : Mme Muguette Dini, M. Alain Gournac, Mme Catherine Procaccia, M. Gérard Dériot, Mmes Raymonde Le Texier, Patricia Schillinger et Annie David et comme candidats suppléants : MM. Gilbert Barbier, Guy Fischer, Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Marc Laménie et Mme Janine Rozier.
La commission mixte paritaire se tiendra jeudi matin à 10 heures à l'Assemblée nationale.
On nous apprend le mardi que la CMP se tiendra jeudi matin ! Cette organisation est déplorable ; pour ma part, je ne pourrai être présente.
Ces conditions de travail sont inadmissibles, d'autant plus que la réforme des retraites aura des répercussions sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale et sur le projet de loi de finances : le calendrier s'annonce chargé.
Je suis rapporteur du texte et je n'ai appris la convocation de la CMP qu'hier ! Ce n'est pas sérieux !
Nous ne pouvons continuer ainsi : il nous faut sans cesse modifier nos agendas !
Puis la commission examine le rapport de M. Dominique Leclerc et le texte proposé pour le projet de loi n° 713 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme des retraites.
Examen du rapport
Voilà plusieurs mois que nous travaillons au sein de cette commission et de la Mecss sur la situation de notre système de retraite et les moyens d'assurer sa pérennité. Le moment est venu d'examiner la réforme présentée par le Gouvernement et adoptée il y a quelques jours par l'Assemblée nationale.
Je ne retracerai pas l'histoire des régimes de retraites ni ne reviendrai sur les causes de la situation actuelle, analysées en détail dans le rapport de la Mecss. Disons seulement que malgré les réformes importantes déjà engagées, notre système de retraite reste gravement menacé par des déséquilibres financiers qui imposent d'urgence une réforme. Les évolutions démographiques, marquées par l'arrivée à l'âge de la retraite des générations de l'après-guerre et l'accroissement continu de l'espérance de vie, ont été aggravées par la crise économique qui a privé la sécurité sociale d'une partie importante de ses recettes. Si nous ne faisons rien, le besoin de financement des régimes de retraite de 38 à 40 milliards demain passera entre 72 et 115 milliards à l'horizon 2050.
Nous pouvons tous nous retrouver sur le constat qu'une telle perspective n'est pas acceptable et qu'il faut agir sans attendre.
Le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale s'articule autour de quatre axes : relèvement de l'âge d'ouverture des droits à la retraite et de l'âge du bénéfice d'une pension à taux plein ; mise en place d'une structure de pilotage des régimes de retraite et renforcement du droit à l'information des assurés ; convergence des différents régimes ; prise en compte de la pénibilité du travail et réforme de la médecine du travail.
Ces dispositions seront complétées par un volet financier qui figurera dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et dans le projet de loi de finances. Il est difficile pour le Parlement d'appréhender globalement une réforme d'une telle ampleur alors même que tous les éléments ne figurent pas dans le même texte. S'il est logique que les dispositions relatives aux recettes figurent dans les textes financiers, il faudra peut-être songer à assortir les réformes essentielles, aux implications financières considérables, de projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale rectificatifs.
La mesure emblématique de ce texte est le relèvement à soixante-deux ans de l'âge d'ouverture des droits à la retraite et à soixante-sept ans de celui de l'annulation de la décote accompagnés d'un relèvement de tous les âges et durées de services dans la fonction publique. Ces mesures sont équilibrées : l'espérance de vie à soixante ans a progressé de plus de quatre ans depuis l'instauration de la retraite à soixante ans ; la plupart des pays développés ont relevé leurs âges de départ à la retraite dans des proportions variables, de sorte que la France est l'un des derniers pays de l'OCDE où l'âge de la retraite reste fixé à soixante ans ; surtout, le Gouvernement, conformément aux préconisations de la Mecss, a assorti cette mesure d'une prise en compte de la pénibilité du travail, de mesures en faveur de l'emploi des seniors, enfin d'une prolongation et d'un élargissement du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue qui permet aux salariés ayant commencé à travailler très tôt de prendre leur retraite avant d'atteindre l'âge de liquidation des droits.
Certes, d'autres choix auraient été possibles, comme maintenir la retraite à soixante ans tout en l'assortissant d'une décote qui aurait été nécessairement élevée. Mais une telle solution, outre qu'elle n'aurait fait que complexifier encore un système de retraite qui ne brille pas par sa simplicité, aurait également conduit à une diminution du niveau des pensions, ce que nous ne voulons pas.
Je souhaite néanmoins que le comité de pilotage des régimes de retraites et le Cor s'attachent à suivre attentivement les effets du relèvement de ces bornes d'âge. Il faudra s'assurer que chacun assume bien ses responsabilités et que les seniors qui devront partir plus tard en retraite ne finissent pas pour autant au chômage.
Il est également essentiel que le relèvement progressif des bornes d'âge n'ait pas pour effet de laisser sans ressources, pour une période plus ou moins longue, des chômeurs en fin de droits. Le Premier ministre a récemment évoqué le problème : il est souhaitable que des réponses soient apportées avant l'adoption du projet de loi, notamment en ce qui concerne l'éventuelle prolongation de l'AER, l'allocation équivalent retraite. Cette question est pour nous essentielle, et nous attendons du Gouvernement qu'il s'emploie, en liaison avec les partenaires sociaux, à éviter tout effet pervers de la réforme.
De même, nous devons être particulièrement attentifs à la borne d'âge d'annulation de la décote. La population prenant aujourd'hui sa retraite à soixante-cinq ans parce qu'elle n'a pas la durée d'assurance requise est extrêmement hétérogène, ainsi que le détaille le rapport écrit. Elle comprend notamment bon nombre de femmes dont la situation a été largement évoquée ces derniers jours. Le rapport du Cor sur les avantages familiaux et conjugaux montre pourtant que la durée d'assurance des femmes rattrapera, et même dépassera dans quelques années, celle des hommes, du fait des majorations liées à la maternité. Toutefois, les chiffres divergent sur le moment où s'effectuera ce rattrapage. Certains parlent de la génération née 1954 tandis que d'autres retiennent celle de 1964, ce qui change substantiellement les données du problème. Il faut travailler à préciser ces données, afin de déterminer quelles mesures doivent être prises. Si l'on ne peut écarter le risque que des mesures favorables réservées aux femmes ne fassent l'objet de contestations au niveau européen, je souhaite néanmoins que l'on progresse sur ce sujet dès à présent.
Comme l'a souligné Mme Panis, la principale inégalité entre les hommes et les femmes tient aux salaires, avec son effet corrélatif sur le montant des pensions. Je crains que la pénalité de 1 % de la masse salariale imposée aux entreprises non couvertes par un accord sur l'égalité professionnelle ne reste, à cet égard, insuffisante.
Pour remédier à l'éclatement institutionnel du dispositif d'assurance vieillesse, le texte crée un comité de pilotage des régimes de retraite dont la mission consistera à veiller au respect des objectifs du système : niveau de vie des retraités, pérennité financière, équité... Afin de renforcer le caractère opérationnel de ce comité et éviter toute confusion avec le Cor, qui conserve toutes ses missions, je vous proposerai de le charger d'un rôle d'alerte comparable à celui que joue le comité d'alerte de l'Ondam. Je vous soumettrai également un amendement visant à inscrire dans le code de la sécurité sociale les principes essentiels qui fondent l'assurance vieillesse, en particulier le choix de la retraite par répartition.
Enfin, je vous proposerai de compléter ces dispositions pour prévoir l'engagement, à compter de 2014, d'une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque d'assurance vieillesse. Si nous ne sommes pas prêts aujourd'hui pour une telle réforme, qui doit reposer sur un large consensus, je crois néanmoins que le moment est venu de prévoir cette réflexion, dont l'organisation sera confiée au comité de pilotage et au Cor, selon un calendrier propre. L'engagement d'un tel processus figurait comme un élément essentiel parmi les conclusions du rapport de la Mecss sur le rendez-vous 2010. La réforme que nous conduisons aujourd'hui est nécessaire face à l'urgence financière. Elle ne doit pas nous empêcher de conduire également une réflexion plus prospective sur notre système de retraite.
J'en viens au droit à l'information, créé par la loi de 2003, qui permet aux assurés de recevoir périodiquement un relevé de situation individuelle puis, à partir de cinquante-cinq ans, une estimation indicative globale du montant futur de leur pension. Le projet de loi renforce ce droit en prévoyant un entretien individuel à la demande de l'assuré. Je vous proposerai d'aller plus loin en prévoyant la communication aux assurés de simulations de leur niveau de retraite dès l'âge de quarante-cinq ans, à l'image de ce qui a cours en Allemagne.
Dans la continuité de la loi Fillon de 2003, le projet de loi contient plusieurs mesures de convergence entre les règles en vigueur dans la fonction publique et celles du secteur privé : alignement progressif en dix ans du taux de cotisations des fonctionnaires sur celui des salariés du privé ; fermeture du dispositif de départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois enfants ayant effectué quinze ans de services - sachant que le dispositif initial a été aménagé à l'Assemblée nationale pour tenir compte des inquiétudes qu'il avait suscitées ; rapprochement des règles applicables au minimum garanti de la fonction publique de celles qui régissent le minimum contributif dans le secteur privé.
A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a complété ces dispositions en ramenant de quinze à deux ans la condition de durée de services nécessaire pour bénéficier d'une pension de retraite dans la fonction publique. Une telle évolution mettra fin aux difficultés des agents quittant la fonction publique sans remplir la condition de quinze ans et qui sont alors affiliés rétroactivement au régime général et à l'Ircantec. J'avoue que je ne comprends pas pourquoi les militaires sont exclus de ce dispositif. Je vous proposerai des amendements et sur ce point, et de simplification de l'architecture des régimes - la fusion, par exemple, des régimes complémentaires d'assurance vieillesse des artisans et des commerçants.
Autre sujet : la situation des polypensionnés, qui reste souvent, en matière de retraite, très défavorable. La présidente de la Cnav et vous-même, monsieur le ministre, nous avez indiqué qu'un calcul de la pension sur les vingt-cinq meilleures années tous régimes confondus ferait beaucoup de perdants. Il faut que les explorations sur cette question progressent rapidement. Les difficultés que rencontrent les polypensionnés rendent d'autant plus nécessaire, me semble-t-il, une réflexion sur la mise en place d'un régime de base aussi universel que possible.
Le texte comporte aussi des mesures destinées à assurer un meilleur suivi individuel en matière de pénibilité, indispensables à une politique de prévention et de réparation. Il donne en outre une base législative aux trois critères retenus par les partenaires sociaux dans leur projet d'accord de 2008 : contraintes physiques marquées, environnement agressif, rythmes de travail. Sont également pris en compte les effets immédiats, c'est-à-dire ceux qui sont observables au moment où l'assuré décide de liquider sa retraite. Le projet de loi institue un dispositif à deux étages : le premier permet aux assurés qui présentent une incapacité permanente d'au moins 20 % au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail ayant entraîné des lésions identiques, de partir à la retraite à soixante ans et de liquider leur pension au taux plein ; le second, ajouté à l'Assemblée nationale, ouvre la possibilité aux assurés qui justifient d'une incapacité permanente d'au moins 10 % en vertu des mêmes critères de bénéficier de ces mêmes droits à condition que leur dossier soit validé par une commission pluridisciplinaire territoriale.
L'Assemblée nationale a en outre prévu la création, à titre expérimental, d'un dispositif visant à constituer un cadre pour la conclusion d'accords collectifs d'allègement ou de compensation de la charge de travail des salariés occupés à des travaux pénibles. Enfin, une pénalité de 1 % de la masse salariale sera infligée aux entreprises non couvertes par un accord ou un plan d'action relatif à la prévention de la pénibilité.
Ces dispositions ont été complétées, toujours à l'Assemblée nationale, par une réforme importante de la médecine du travail, portant en particulier sur la définition des missions et de la composition des équipes des services de santé au travail, sur la gouvernance de ces services et sur la couverture des catégories professionnelles dont la santé au travail est encore insuffisamment suivie.
L'introduction de ces dispositions a suscité de nombreuses incompréhensions. Je vous proposerai plusieurs amendements destinés à lever toute ambiguïté quant au rôle et à l'indépendance des médecins du travail. Je vous proposerai en outre, dans un souci de cohérence, de réorganiser cette partie du texte, afin de mieux distinguer entre prévention et réparation. De même, je vous soumettrai un amendement visant à articuler les missions du nouveau comité scientifique avec celles de l'observatoire de la pénibilité.
La question de la pénibilité relève avant tout des conditions de travail et de l'organisation du temps de travail. Néanmoins, compte tenu du temps que mettent les politiques de prévention à produire leurs effets, le débat sur la prise en compte de la pénibilité à effets différés mérite d'être poursuivi : je vous proposerai que le rapport prévu sur le bilan des mesures adoptées s'empare de la question.
Le texte contient plusieurs mesures relevant de la solidarité : prolongation de l'assurance veuvage au-delà du 31 décembre 2010 ; prise en compte des indemnités journalières de maternité dans le salaire annuel de référence pour le calcul du droit à pension ; création d'une pénalité financière pour les entreprises qui ne soumettraient pas au comité d'entreprise un plan d'action en vue d'assurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ; exclusion du capital de l'exploitation agricole de l'assiette du recouvrement sur succession de l'allocation de solidarité aux personnes âgées. Reste que nous n'échapperons pas à une remise à plat de l'ensemble de ces mécanismes de solidarité, dont nous ne mesurons pas clairement si leurs effets redistributifs vont bien dans le sens recherché.
Rien n'est encore prévu dans le projet de loi pour améliorer la situation des personnes handicapées, qui peuvent certes prétendre à une pension de retraite à cinquante-cinq ans, mais dans des conditions très restrictives - un taux d'incapacité permanente de 80 % pendant toute la durée d'assurance, soit trente et un ans. Outre qu'il leur est très difficile de fournir les justificatifs, est-il vraiment juste d'exiger ce taux de handicap sur toute la période pour ouvrir droit à retraite anticipée ? Sans compter que le calcul de la pension sur la base des vingt-cinq meilleures années leur est très défavorable eu égard aux fréquentes interruptions dans leur vie professionnelle, notamment dans le cas de maladies invalidantes.
Monsieur le Ministre, je souhaiterais savoir quelles améliorations vous envisagez d'apporter à ce dispositif. J'attends que nous puissions, dès aujourd'hui, progresser, au travers des amendements que je propose à ce texte.
J'en viens à l'épargne retraite sur laquelle l'Assemblée nationale a introduit plusieurs articles visant principalement à favoriser le Perco comme outil de son développement. Je vous ferai également quelques propositions sur ce point, en soulignant que l'épargne retraite a vocation à rester un simple complément à côté de la retraite par répartition obligatoire et qu'elle mériterait une réforme d'ensemble, eu égard à sa complexité et à sa faible diffusion dans les PME.
Dernier point : l'équilibre financier de la réforme. Selon les projections du Gouvernement, les régimes de retraite devraient être globalement équilibrés en 2018 même si tous ne le seront pas individuellement. La présidente de la Cnav a ainsi fait état d'un besoin de financement du régime général de 4 milliards d'euros environ à cette date.
Les mesures d'âge et de convergence entre les régimes devraient permettre de couvrir un peu plus de la moitié des besoins. A quoi s'ajoutent : l'engagement de l'Etat employeur de maintenir son effort annuel net à 15,6 milliards ; la perspective d'un basculement progressif des cotisations d'assurance chômage vers l'assurance vieillesse à compter de 2015 ; le traitement des déficits cumulés de 2011 à 2018 par l'utilisation de la ressource et des avoirs du fonds de réserve des retraites ; la mobilisation, enfin, de recettes nouvelles dès 2011 : hausse d'un point de la tranche supérieure de l'impôt sur le revenu, taxation supplémentaire des stock-options et des retraites chapeaux, majoration des prélèvements sur les revenus du capital et du patrimoine, annualisation du calcul des allègements généraux de charges patronales...
Nous aurons l'occasion d'examiner plus en détail ce volet, dont nous ne connaissons pas tous les détails, lors de l'examen des textes financiers. Il suscite plusieurs interrogations, par exemple quant à la pérennité du rendement des recettes prévues. Je regrette d'ailleurs, Monsieur le Ministre, que nous n'ayons pu obtenir de réponse précise à nos demandes d'information et de compléments sur le plan de financement de la réforme. C'est sans doute sur cette question des recettes que la réforme est la moins en phase avec les propositions formulées par la Mecss, qui privilégiait d'autres pistes que celle d'une ponction sur le fonds de réserve des retraites.
Telles sont, mes chers collègues, les dispositions essentielles du projet de loi qui nous est soumis. Je souhaite à présent que le Sénat prenne toute sa part dans la discussion et l'amélioration d'une réforme indispensable pour préserver notre système de retraite par répartition.
Je remercie notre rapporteur d'avoir pris la peine, par souci de clarté, de construire sa présentation par thème plutôt que par article.
Je tiens à féliciter Dominique Leclerc pour la clarté d'un exposé qui conforte nombre des propositions qui ressortaient du rapport de la Mecss. Je continue cependant de m'interroger sur quelques points.
Ne serait-il pas de meilleure politique, plutôt que de retenir un âge, quarante-cinq ans, pour l'information des assurés, alors même que tous n'entrent pas au même âge dans la vie active, de raisonner sur une durée de vie professionnelle, en prévoyant une information au terme de quinze ou vingt ans de vie active ?
En matière de convergence public-privé, je m'interroge sur le maintien de mesures dérogatoires, alors que certains des métiers concernés existent dans le secteur privé comme dans le secteur public. Je partage l'avis de notre rapporteur sur la durée de prise en compte des services pour bénéficier d'une pension de retraite dans la fonction publique : pourquoi exclure les militaires du bénéfice de la durée des deux ans, alors même que les mesures de convergence visent à rapprocher les conditions faites à tous les pensionnés ?
Sur la pénibilité, j'observe que tout reste à envisager sur les maladies professionnelles à effet différé. Je m'interroge en outre, messieurs les ministres, sur la façon dont le Gouvernement entend financer l'amendement voté à l'Assemblée nationale, qui ramène à 10 % le taux d'invalidité en cours de vie active pouvant donner droit à une liquidation à taux plein dès soixante ans.
S'agissant des équilibres financiers, notre rapporteur a rappelé qu'à l'horizon 2018, le déficit de la Cnav restera de 4 milliards, ainsi que nous l'a confirmé sa présidente. D'où je comprends que l'idée est de mutualiser les ressources des différents régimes, option à laquelle je veux bien souscrire pour autant que l'on n'envisage pas de puiser sans compter dans les ressources de l'Agirc-Arrco, géré paritairement par les partenaires sociaux qui ont su consentir les efforts nécessaires pour maintenir l'équilibre de ce régime complémentaire.
François Fillon estimait à 10 milliards, lors de la réforme de 2003, le montant attendu du transfert de cotisations chômage vers les cotisations vieillesse : quelles sont aujourd'hui les estimations du Gouvernement ?
Je souhaite enfin lancer un appel sur certains amendements proposées par notre rapporteur - mesures transitoires pour l'AER ; mesures en faveur des femmes nées dans les décennies 1950-1960 ; mesures en faveur des personnes handicapées ; propositions pour une réforme systémique, enfin : s'ils devaient être frappés par l'article 40, ils ne viendraient pas en séance publique. Je propose donc, pour nous éviter une telle frustration, que nous soutenions notre rapporteur, en les adoptant. Si la commission des finances devait ensuite décider de faire tomber sur eux le couperet, Dominique Leclerc pourrait, en séance, prendre la parole sur les articles concernés, en exhortant le gouvernement à reprendre ces amendements. Cela aura l'avantage d'éviter de donner l'impression que le gouvernement dépose des amendements pour calmer la rue...
Il ne s'agit pas, comme vient de le dire Alain Vasselle, de calmer la rue, mais bien de respecter nos concitoyens qui manifestent leur total désaccord avec cette réforme. Quant à nous, notre désaccord est total sur trois points : nous sommes pour le maintien de l'âge légal à soixante ans, nous sommes pour le maintien à soixante-cinq ans de la liquidation à taux plein, nous sommes pour le maintien des quarante annuités. Certains s'empresseront de nous taxer de démagogie...
Nous leur répondons que nous ne pouvons soutenir une réforme dont non seulement on ignore tout des données financières, puisque nous n'en disposerons qu'avec les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale, mais dont on sait, en revanche, que ce sont les salariés qui en feront, à 85 % ou 90 %, les frais, puisque les autres formes de revenus, en particulier les revenus financiers, ne sont pas mis à contribution - et que l'on ne nous objecte pas le rabotage des niches fiscales, largement insuffisant.
Autant de raisons qui expliquent et justifient assez le mécontentement des Français, qui ont compris que ce sont les plus modestes qui paieront. Les victimes de votre réforme sont connues : ce sont les galériens de l'emploi, les temps partiels, les carrières incomplètes - bien souvent des femmes -, les salariés âgés, « virés » sans ménagements, tous ceux qui exercent des métiers pénibles...
Notre rapporteur nous propose d'aller à une réforme systémique, vers un système par points ou par compte notionnel. Mais je suis membre comme lui de la Mecss : nous nous sommes rendus dans les pays, comme la Suède, où une telle réforme a été appliquée, pour constater que l'on y assiste à un écrasement des retraites, démultiplié par la crise.
A la pression sur les pensions, s'ajoute le gel des salaires. Où est l'équité de cette réforme ? Songeons aux fonctionnaires, dont il est prévu de relever le taux de cotisation salariale de 7,85 % à 10,55 % en dix ans, soit une augmentation de 3 %. Jamais vous n'avez osé aller aussi loin. Oseriez-vous imposer un tel effort aux agriculteurs, aux commerçants et artisans, aux professions médicales ? Vous nous trouverez devant vous en séance ! Pour l'heure, nous voterons contre l'adoption de ce rapport, contre une réforme d'autant plus injuste qu'elle restera inefficace puisque, le rapporteur lui-même l'a rappelé, il faudra rebattre les cartes en 2018.
Permettez-moi tout d'abord de féliciter Dominique Leclerc en qui je vois un nouveau Sisyphe puisque ce n'est pas la première fois qu'il se livre, sur le sujet, à cet exercice difficile : espérons que cette fois, le rocher ne redévalera pas la montagne...
Il n'est nullement question, dans ce texte, de remettre en cause la retraite par répartition. Penser le contraire serait faire au Gouvernement un procès d'intention. L'âge légal est reporté à soixante-deux ans ? Certes, mais notre système demeure parmi les plus favorables des pays développés. J'aurais personnellement préféré que l'on retienne l'âge de soixante-cinq ans. Faut-il rappeler la situation qui prévalait à la naissance du régime, en 1945 ? L'âge légal avait alors été fixé à soixante-cinq ans, alors que l'espérance de vie était du même ordre : on comprend que l'on n'avait à l'époque pas de problème de financement...
L'hypothèse d'un maintien de l'âge légal à soixante ans ? Dominique Leclerc a évoqué la décote. Je tiens, pour moi, que nous n'éviterions pas, dans cette hypothèse, une hausse des cotisations, ce qui reviendrait à priver du bénéfice de la croissance ceux qui y travaillent, pour le réserver à ceux qui n'y travaillent plus.
Certains sont tentés de faire financer par la branche famille les mesures de solidarité envers les femmes qui pourraient, en période transitoire, pâtir de la réforme. Je rappelle, en tant que rapporteur pour les crédits de la branche famille, qu'il faudra bien lui trouver alors des ressources si l'on veut qu'elle continue à financer les avantages familiaux... L'injustice faite aux femmes réside essentiellement dans l'inégalité des salaires. La pénalité de 1 % témoigne de bonnes intentions, mais je crains qu'elle n'ait pas beaucoup d'effet. Sans doute conviendrait-il d'aller plus loin, en conditionnant certains abattements consentis aux entreprises aux efforts qu'elles engagent en faveur de l'égalité salariale.
Pour mieux assurer le droit à l'information, dans nos sociétés où les moyens techniques sont de plus en plus évolués, ne conviendrait-il pas de mettre en place, à terme, un système d'information en ligne qui permettrait aux salariés, mieux que toute clause de rendez-vous, d'être instantanément informés sur leurs droits à pension ?
Est-il bien opportun de prendre en compte la pénibilité dans le calcul des avantages retraite ? Les pays qui se sont engagés dans cette voie ont renoncé. Le Gouvernement est allé le plus loin possible, mais il nous faudra rester attentifs afin que ces dispositions ne soient pas dévoyées, avec la complicité des partenaires sociaux, pour devenir des préretraites déguisées. Et puis, est-il bien moral de dire à des gens : vous exercez un métier pénible ? Eh bien, vous aurez le droit de partir deux ou trois ans plus tôt. Ce départ anticipé empêchera-t-il qu'ils ne meurent prématurément ? C'est pourquoi je tiens, bien plutôt, pour la prévention. Je puis vous citer un exemple éloquent. Celui d'un salarié affecté d'un grave problème d'arthrose aux genoux, pour le soulagement duquel et son médecin et le médecin du travail recommandaient une adaptation de son poste de travail. Eh bien, son patron a préféré le licencier plutôt que de la financer.
Non, mais je dis que traiter la pénibilité en termes de réparations ne pourra qu'accentuer de telles dérives.
Cette réforme fait le pari de l'équilibre financier à 2018. Je souhaite qu'il soit gagné. On sait que le projet de loi de financement de la sécurité sociale, en vertu du principe d'annualité, ne pourra donner toutes les réponses. Qu'en sera-t-il si l'on se rend compte, après 2018, que le recul à soixante-deux ans n'est pas suffisant ? C'est la raison pour laquelle je suis notre rapporteur dans l'idée qu'une réforme systémique est inéluctable à terme.
Le rapporteur tombe dans les lieux communs lorsqu'il traite de l'espérance de vie pour justifier les reports des âges de départ à la retraite. La mortalité infantile s'est écroulée, oui ; mais dire que l'on gagne un trimestre de vie par an, non ! Le gain réel est de 0,65 et ce n'est pas la même chose... Surtout, ce qui importe, c'est la qualité de la vie. Le paradigme sociétal est essentiel, or si l'on considère l'effort à accomplir pour les plus faibles, la réforme est à la fois injuste, inéquitable, brutale - c'est peut-être inévitable... - et inefficace quant à son financement.
Sur les retraites comme sur l'aide sociale, nous avons des propositions, encore faut-il qu'elles soient entendues ! S'agissant de la dette sociale, c'est un très mauvais signal adressé à notre jeunesse que de supprimer le FRR et je rappelle qu'il y avait un consensus naguère au sein de la commission des affaires sociales pour ne pas toucher à ce fonds de réserve. Le financement de la réforme est supporté à 85 % par ceux qui travaillent, à 15 % par les entreprises et les capitaux : cela pose un problème. D'autant que le rendement des recettes prévues n'est pas assuré dans le temps, le rapporteur le souligne lui-même. Plus largement, sur le plan économique, comment se fait le partage des gains de productivité ? Comment modifier une répartition actuellement très inégalitaire ? Sur certains points du texte, nous sommes d'accord. Mais sur d'autres, nous présenterons des amendements, je songe aux handicapés, qu'il faut défendre - et leurs familles aussi ! C'est un problème de société.
N'y voyez pas une tactique politicienne, je le dis par conviction profonde, cette réforme est injuste, brutale et mal financée.
Vous êtes peut-être fatigués d'entendre les chiffres qui dépeignent la situation réunionnaise mais il demeure que 52 % de la population vivent sous le seuil de pauvreté national : 300 000 personnes relèvent de la CMU, 186 000 perçoivent le RMI. Le chômage monte en flèche, l'emploi est de plus en plus précaire, 50 % des moins de vingt-cinq ans, y compris les diplômés, sont sans travail. L'effondrement dans le secteur du BTP est tel qu'on a vu les patrons dans la rue avec les travailleurs ! Les grands travaux qui devaient être engagés ont été arrêtés.
Par conséquent, quelles retraites va-t-on réformer ? Les ouvriers agricoles gagnent 420 euros par mois, les femmes sont au chômage, à l'exception de celles qui travaillent dans la fonction publique, les mères d'enfants handicapés sont obligées de renoncer aux études ou à l'emploi. Quelle retraite peuvent-ils tous espérer ? Outre-mer et surtout à La Réunion, quel impact aura la réforme, puisque dans le meilleur des cas, on perçoit une retraite de misère ?
Comment dire que l'allongement de l'âge de la retraite évitera une baisse des pensions, alors que la grande majorité des travailleurs - je ne parle pas de quelques professions intellectuelles... - ne pourra travailler jusqu'à soixante-sept ans et bénéficier des avantages liés à ce départ tardif. Les salariés s'arrêtent parce que leur santé les lâche ou parce que les entreprises se débarrassent des plus de cinquante-huit ans ! Pendant les neuf années qui les séparent de l'âge futur du départ en retraite, ils seront au chômage ou au RSA ; ils perdront donc des droits à retraite et le niveau de leur pension sera affecté d'autant. Pensez-vous qu'en une décennie, on gagnera huit années de travail réel ? Quelles mesures prenez-vous à cet effet ? Comment maintenir les salariés dans les entreprises jusqu'à soixante-six ou soixante-sept ans ?
Je ne voterai pas le rapport, très complaisant à l'égard du projet du gouvernement, très favorable au texte. Je veux dire un mot des polypensionnés : leur situation est « très défavorable », écrit Dominique Leclerc, qui souligne un problème de calcul. Il estime qu'il « faudrait progresser très rapidement » : je me réjouis ! Mais il ajoute : « dans la documentation » ! Je reste sur ma faim. Monsieur le rapporteur, il faut songer à augmenter l'allure !
La procédure accélérée était-elle pour autant nécessaire, sur un texte si compliqué, si important ? J'aurais préféré une procédure apaisée. Mais vous avez d'autres objectifs, sans doute, que la mise en oeuvre rapide d'une politique des retraites. Quelle est votre raison réelle ? Et fallait-il inclure la médecine du travail dans ce texte ? Elle méritait un texte pour elle ! En quoi est-elle liée à la question des retraites, elle dont la mission est la protection contre les risques professionnels ? Echanger un petit bonus à la sortie contre un préjudice subi tout au long de la vie professionnelle, tel n'est pas l'esprit dans lequel a été mise en place la médecine du travail. Il aurait fallu un large débat sur ce sujet aussi. Ce qui n'aurait pas empêché le Gouvernement de boucler les deux réformes d'ici la fin de l'année. Mais peut-être la médecine du travail doit-elle être utilisée afin que le moins possible de salariés aient accès à une sortie anticipée du travail ?
Quant au financement, l'équilibre sera-t-il atteint en 2018 ? Non. Le régime général sera en déficit de 4 milliards d'euros. Pour parvenir à un semblant d'équilibre, vous faites appel au FRR, autrement dit, vous videz le compte en banque de nos enfants pour équilibrer le nôtre. Est-il raisonnable d'esquiver ainsi ses responsabilités ? Sur la question financière, notre rapporteur nous renvoie aux textes financiers. Mobilisation dés 2011 de recettes supplémentaires, un point d'impôt sur le revenu, une taxation supplémentaire des retraites-chapeau et des stock-options, majoration de la taxation des revenus du capital et du patrimoine... Ecran de fumée ou changement de doctrine à l'occasion du changement de ministre du budget ? Si vous faites véritablement appel à ces nouvelles ressources, il est dommage de ne pas l'avoir fait avant, nous vous le conseillions depuis longtemps. Nous aurions pu gagner du temps !
Un accès à l'information sur ses droits à quarante-cinq ans, cela me paraît un peu tard et je proposerai par amendement que ce soit à quarante ans car à cet âge déjà on peut se préoccuper de sa retraite et prendre des dispositions complémentaires - mais je suis très attachée au système par répartition, je le précise. A ce jour 93 000 entreprises ont mis en place un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) et deux millions de salariés y ont recours. Les sommes ainsi épargnées ont progressé de 49 % en un an. Un mot encore, pour regretter que le conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (Copiesas), créé il y a un an, ne se soit jamais réuni.
Ce rapport conjugue dangereusement certitudes et souhaits. Le rapporteur considère comme évident que l'âge de l'ouverture des droits à la retraite doive passer de soixante à soixante-deux ans, mais lorsqu'il espère qu'il n'y aura pas glissement du fardeau des caisses de retraite vers les caisses d'assurance chômage et le RSA financé par les collectivités locales, c'est un voeu pieux ! L'objectif est de retrouver l'équilibre. Mais Dominique Leclerc précise que le système sera « globalement » équilibré, soulignant qu'il « manquera 4 milliards d'euros au régime général », l'équilibre s'opérant entre les différents régimes. Quel régime complémentaire compensera le déficit ?
Notre rapporteur regrette que des réponses plus précises ne soient pas apportées sur le financement. Mais le refus d'afficher la moindre majoration de taxe ou d'impôt entraîne une incapacité, faute de financements pérennes, à porter une vraie réforme.
Je salue le courage de ceux qui veulent une loi sur les retraites, car chaque orateur soulève un nouvel obstacle, mais on ne résout pas les problèmes en les poussant sous le tapis. Le rapprochement entre les fonctionnaires et le privé est une bonne chose car les premiers ont des avantages considérables, sécurité de l'emploi, cotisations inférieures, possibilité de départ anticipé. Cela compte énormément pour le salarié qui est en perpétuelle recherche d'emploi...
Il y a les problèmes techniques, financiers, démographiques, mais arrêtons la dramatisation ! Aujourd'hui, la société change profondément et la question des retraites est une question politique. Nous sommes devant un choix de société. Les bouleversements sont grands et nous ne sommes plus dans un modèle patriarcal où les enfants prennent en charge leurs parents âgés. Aujourd'hui, la génération qui est en fin d'activité professionnelle aide non seulement la génération précédente qui glisse vers la dépendance, mais aussi les deux générations suivantes. Autre caractéristique actuelle, la fin de l'activité professionnelle ne signifie pas fin de l'activité économique et sociale, on le voit dans les mairies, dans les associations,...
Ce que je redoute, c'est que nous arrivions à un conflit des générations sans même avoir résolu le problème. Les jeunes disent : toutes les difficultés sont pour nous, alors que vous avez eu dans votre vie toutes les facilités.
Les organisations syndicales, professionnelles, sont ouvertes au dialogue, non à une procédure accélérée.
A René Teulade qui donne une note philosophique au débat, je veux répondre que la seule chose stable actuellement, c'est le mouvement. Nous sommes donc obligés de bouger ! Il y a là effectivement un problème de société et j'ai toujours été partisan d'aborder globalement le problème du vieillissement, allongement de la vie, retraite, maladie - songez que 80 % des dépenses de maladie sont effectuées par les plus de soixante-cinq ans... - mais aussi logement, etc. Si l'on veut sauver le système par répartition, il faut agir : c'est ce que dit le Cor. Il y a trois paramètres : la durée de cotisation, que la loi de 2003 a augmentée progressivement ; l'âge légal de départ ; le taux de pension. Si nous ne faisons rien, le taux de pension chutera. Le Cor a insisté sur la nécessité d'agir sur les trois paramètres, pour éviter une chute de 40 % du montant des pensions après 2050. Le gouvernement a pris ses responsabilités car la crise a accéléré un phénomène que les rapports Rocard de 1991, Charpin ou Teulade nous annonçaient clairement.
Sur l'information, le texte prévoit qu'un relevé de situation est adressé au salarié dans sa trente-cinquième année. A cinquante-cinq ans, il s'agit, plus précisément, d'une estimation. L'entretien se fait à quarante-cinq ans et après, lorsque l'intéressé le demande. Cette pratique existe déjà dans les pays voisins, Allemagne ou Suède, parce que les assurés y sont plus exigeants. L'information pourrait être complétée par le conseil ; et si la loi de 2003 a marqué un progrès considérable, il n'est pas suffisant : les caisses ne peuvent désormais plus se borner à leurs missions traditionnelles.
Beaucoup a été fait pour la convergence entre public et privé, mais il faut cheminer prudemment car les régimes ont chacun leur histoire. Les arbitrages successifs dans le passé ont conduit à certaines inégalités. J'ai soutenu la réforme ces dernières années, en 2003 notamment, une réforme importante, comme celle d'aujourd'hui. Elle mène à plus de justice.
Nous sommes le seul pays de l'OCDE à prendre en compte la pénibilité. « Un nouveau droit social », a-t-on dit. Il faut réaliser la portée de ce texte ! Le Gouvernement veut faire un gros effort sur la prévention. Ceux d'entre nous qui ont travaillé sur le mal-être au travail ont bien perçu une véritable dérive dans la façon d'aborder le monde du travail ; ils ont aussi conclu que le monde de l'entreprise a de profondes réformes à opérer. Les exigences posées dans le texte vont dans le bon sens.
Depuis 2004, des mesures ont été prises pour favoriser le maintien des seniors dans l'entreprise. Certes, il reste beaucoup de chemin à parcourir mais ne dites pas que rien n'a été fait !
S'agissant du financement, le chiffre de 4 milliards d'euros de déficit en 2018 nous a été fourni par Danièle Karniewicz : je laisse à la présidente de la Cnav la responsabilité de son chiffrage mais je suppose qu'il n'a pas été établi à la légère. La loi de 2003 a résolu le problème du financement à 60 % : c'est bien pourquoi des rendez-vous étaient fixés tous les quatre ans, afin d'adapter les règles à la conjoncture.
Total désaccord des Français ? Certains manifestent mais nos concitoyens sont conscients des problèmes et beaucoup approuvent le fait que leurs responsables politiques leur proposent des adaptations successives.
Le système contributif repose sur les cotisations des salariés et des employeurs. Je suis d'accord que la réforme ne traite pas la question de la répartition et je suis partisan de réfléchir à une réforme systémique afin que les 13 % de Pib affectés aux retraites soient gérés avec plus de transparence et d'équité ; afin, aussi, que les intéressés puissent effectuer des choix. Vous ironisiez en 2003 sur l'horizon 2030, qui vous semblait trop lointain et abstrait. Vous ironisez aujourd'hui sur 2018, alors que c'est un horizon perceptible. Mais bien entendu, la prospective étant un art difficile, nous n'avons pas la certitude qu'aucune adaptation ne sera nécessaire, en fonction de la conjoncture.
L'espérance de vie était de soixante-cinq ans en 1945. Les choses ont changé et l'espérance de vie en bonne santé a progressé plus rapidement que l'espérance de vie globale. L'entrée dans la dépendance est plus tardive. Par conséquent, oui, l'espérance de vie est un critère essentiel à prendre en compte.
Ne rien faire serait inefficace et je soutiens la réforme d'étape indispensable présentée par le Gouvernement. Nous travaillons, au fil des réformes, pour rendre le système plus équitable.
La Réunion connaît de graves problèmes, auxquels Anne-Marie Payet nous sensibilise depuis plusieurs années, mais la réforme des retraites en elle-même ne saurait les résoudre...
A Bernard Cazeau, je fais remarquer que le monde de l'entreprise est mis à contribution. Nous incitons à de nouveaux comportements. Quant aux polypensionnés, il semble bien que ce cas de figure pose un problème mais je dois dire que depuis janvier dernier, nous avons entendu tout et son contraire sur le sujet. Il serait bon d'avoir rapidement des réponses...
Monsieur Daudigny, la donnée première est la situation économique et sociale du pays. La base perdue lors de la crise ne se rattrapera pas, elle a produit une chute des recettes. C'est pourquoi l'insertion des jeunes, le maintien des seniors dans l'entreprise sont des enjeux importants, comme une plus grande alternance entre études et activité professionnelle dans les filières d'apprentissage.
Le Cor unanime nous a appelé à agir. Il ne suffit pas de brailler que l'on veut la répartition, il faut aussi s'en donner les moyens.
Le rapprochement entre privé et public se fait lentement. Tout n'est pas si simple, car comment quantifier la sécurité de l'emploi ou l'angoisse de chercher du travail ? Si nous y parvenions, ce serait réglé !
Je précise à Alain Vasselle que la modification du seuil de pénibilité de 20 % à 10 % coûte 350 millions d'euros, agriculteurs inclus puisque la mesure leur a été étendue. Ce montant n'a pas été pris sur les cotisations retraite mais sur celles versées à la branche AT-MP.
Si l'on avait voulu prendre uniquement des mesures d'âge, il aurait fallu porter la durée de cotisation à quarante-sept ans. Si l'on choisissait de réduire les pensions, mesure fort impopulaire, il faudrait les diminuer de 20 % entre 2030 et 2040. Voilà les enjeux...
Il est normal que les salariés soient mis à contribution puisque les retraites ne sont pas des prestations sociales mais relèvent d'un régime par répartition. L'effort principal repose sur les actifs, autrement dit dans l'esprit qui a présidé à la création de l'assurance-retraite par le Conseil national de la résistance, sur tous ceux qui participent au système : les salariés, les commerçants, les artisans, les professions libérales....
Il faut donc 4 milliards d'euros de recettes supplémentaires pour continuer à financer le FSV - en en déchargeant la Cnaf - afin de financer la solidarité au sein du régime par répartition. Je signale que les artisans cotisent au même taux que les salariés ; les professions libérales cotisent moins mais leur taux de pension est également plus faible. A salaire équivalent, il n'y a pas de raison de faire de différence entre un salarié de la fonction publique et un salarié du privé. Cela ne signifie pas que l'on stigmatise les fonctionnaires, ni que l'on entend gommer les différences. Ainsi nous n'avons pas modifié la règle des six mois, qui tient compte des conditions de recrutement, des évolutions de carrière différentes du privé, etc.
L'espérance de vie à partir de soixante ans continue de progresser pour les hommes et pour les femmes. Une précision : l'espérance de vie en bonne santé au sens d'Eurostat signifie l'espérance de vie sans affection gênant l'activité quotidienne et elle s'établit à soixante-trois ans. L'Insee calcule quant à lui l'espérance de vie sans incapacité, qui se situe aujourd'hui à soixante-seize ans pour les hommes et quatre-vingt-trois ans pour les femmes. Incontestablement, les gens vivent plus longtemps et en meilleure santé.
Madame Hoarau, la retraite n'a pas vocation à régler toutes les injustices de la société française, passée la soixantaine. Il faut les combattre auparavant ! Non à une approche différente des retraites pour l'outre-mer, dont La Réunion.
C'est un autre débat...
Monsieur Cazeau, le niveau des pensions progresse à la mesure de l'inflation. En revanche, on observe un décalage avec les salaires, car ces derniers augmentent plus rapidement que l'inflation. Les pensions devraient croître d'environ 20 % dans les vingt ans à venir. Ensuite, le report de l'âge légal de départ à la retraite, que vous refusez, entraînera une hausse d'emploi des seniors, que vous souhaitez. L'objectif est de se rapprocher du taux de l'Allemagne, de l'ordre de 40 % à 45 %. D'après les dernières enquêtes de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, la Dares, la culture des chefs d'entreprise est en train d'évoluer : pour eux, un travailleur senior est désormais une personne de cinquante-huit ans, non de cinquante-cinq ans. A nous d'encourager ce mouvement avec les mesures d'âge. La question du chômage ne doit pas inciter à l'immobilisme sur les retraites, il faut avancer sur les deux fronts, sans quoi nous ne parviendrons pas à résorber le déficit.
Pourquoi une procédure accéléré ? Parce que nous sommes pressés ! Ce texte, en lien avec les dispositions de la loi de finances et la loi de financement relatives aux retraites, doit être voté au plus vite pour être applicable dès le début de l'année prochaine. Le débat en souffre-t-il ? Permettez-moi de rappeler que cette réforme a été précédée d'un long débat quand la réforme Balladur et la réforme Fillon avaient respectivement donné lieu à un mois et deux mois et demi de débat. Contrairement à une réforme systémique qui nécessite la formation d'un consensus, cette réforme n'est pas idéologique. Il s'agit d'adapter les règles du jeu du système de retraite par répartition aux évolutions : la progression de l'espérance de vie commande de prendre des mesures d'âge.
Les dispositions sur la médecine du travail sont tout le contraire d'un cavalier ! Elles participent de la prévention de la pénibilité, à laquelle votre rapporteur propose de consacrer un chapitre. Cette évolution va dans le sens des préconisations de MM. Frimat et Dellacherie. Il ne s'agit pas d'une révolution de la médecine de travail, mais d'une évolution pour une meilleure prévention.
J'en viens au financement. En 2018, vous avez raison, la Cnav ne sera pas équilibrée. L'engagement du Gouvernement est de revenir à l'équilibre du solde en 2018, vérifié en 2019 et 2020. Nous proposons un rendez-vous en 2018 pour prendre en compte l'évolution de l'économie. Si la Cnav n'est pas équilibrée, d'autres régimes le sont. D'où le rendez-vous sur la répartition des déficits et des excédents que nous proposons en 2014 -aucune décision n'est prise -, la Cnav supportant des charges, contrairement à d'autres régimes. Il ne s'agit pas de dire que la CNAV sera financée par l'Agirc et l'Arrco. D'autres régimes peuvent être mis à contribution. Notre objectif est d'équilibrer le système de retraite et le financement proposé est pérenne puisqu'il repose à 50 % sur les mesures d'âge.
Pourquoi ne pas avoir pris auparavant des mesures de recettes ? Elles l'ont été ! Les stock-options et les retraites-chapeaux sont soumises à cotisation depuis les deux dernières lois de finances et de financement. J'ai également créé le forfait social sur la participation et l'intéressement qui passera de 2 % à 4 % l'an prochain. Bref, nous n'avons jamais refusé de faire appel à ces recettes : elles correspondent à 4 milliards de recettes nouvelles pour la solidarité dans le domaine des retraites.
Monsieur Teulade, il faut certes arrêter de dramatiser la question des retraites, mais surtout de dramatiser la position de l'autre ! Les retraites nécessitent des réformes régulières pour être adaptées à l'évolution des métiers, de l'économie et de la société. Celle-ci constitue une réforme de société avec le report de l'âge légal et l'intégration de la pénibilité, sans modifier le système de répartition qui est le coeur de notre pacte social. La question de l'âge ressort d'un problème de réglage entre générations. Nous aurions pu avoir un débat serein. Dont acte.
Monsieur Vasselle, notre principe a été de retenir une approche pragmatique. D'où, par exemple, la décision de ne pas remettre en cause le déroulement de carrière qui permet de retenir six mois d'un côté, vingt-cinq meilleures années de l'autre, car le niveau des pensions est équivalent. Les catégories actives de la fonction publique qui, pour la plupart, ont été créées au milieu du XIXe siècle, correspondent à des métiers spécifiques à la fonction publique, par exemple les policiers ou les gardiens de prison. Les mesures d'âge s'appliqueront à la fonction publique. En revanche, certaines catégories actives connaissent des évolutions importantes. Aux termes de l'article 37 de la loi relative à la rénovation du dialogue social, les infirmières ont désormais accès au droit d'option, comme les professeurs des écoles il y a vingt ans.
J'en viens aux militaires et aux titulaires sans droit. La mesure consistant à retenir pour durée deux ans de service, et non quinze, augmentera le nombre de polypensionnés tout en résolvant un certain nombre de difficultés. Premièrement, pas moins de 350 personnes dédiées à temps plein à la gestion des dossiers passent d'un régime à un autre, ce qui correspond à une économie pour le régime général. Ensuite, le problème de la « surcotisation » demandée aux agents publics, qui n'avaient pas les quinze années lors de leur retour au régime général, afin de compenser la différence de taux. Nous avons engagé une réflexion avec la Défense sur les militaires. La mesure, en réalité, concerne seulement 7 % à 8 % d'entre eux. Dans ce cas, faut-il prévoir un alignement direct plutôt qu'ouvrir des droits spécifiques aux militaires dans le régime de la fonction publique ? Ensuite, nous ne sommes pas en mesure d'affirmer qu'une telle mesure ne correspondrait pas à une perte sèche pour les militaires. Nous trancherons, une fois ces questions résolues.
Monsieur Fischer, pour corriger les différences de coût d'acquisition des pensions, nous avons décidé de mettre en place un processus de convergence en prenant garde de ne pas pénaliser le pouvoir d'achat. D'où le choix de l'étaler sur dix ans, avec une augmentation de 0,26 par an, soit en moyenne 6 euros par mois : 4 euros pour la catégorie C, 5 euros pour la catégorie B et 7 euros pour la catégorie A. A considérer l'évolution du pouvoir d'achat des fonctionnaires ces dernières années, nous avons de bonnes raisons de penser que cette hausse sera facilement absorbée. En 2003, la seule année où le point d'indice n'a pas augmenté, le pouvoir d'achat a crû de 0,8 via les mesures catégorielles. Bref, le principe d'augmentation du pouvoir d'achat dans la fonction publique n'est pas remis en cause.
Madame Rozier, le principe de la convergence est dans tous les esprits, ceux des parlementaires comme ceux des organisations syndicales. Les mesures retenues sont équilibrées, telle l'évolution du taux de cotisation qui va dans le sens de l'équité. La mesure « quinze ans et trois enfants » pose un problème au regard du droit communautaire : les dispositifs grecs et italiens ont été retoqués et la France, menacée, a dû ajuster son dispositif. Nous négocions actuellement avec la Commission afin d'éviter la suppression de nos systèmes de bonification à l'égard des mères de famille. Enfin, demander la condition du taux plein pour le minimum garanti par rapport au minimum contributif ne remet pas en cause les spécificités appliquées à la fonction publique. Je rappelle que celui-ci est supérieur de 200 euros au minimum contributif. La montée en puissance du dispositif est également très différente. Soucieux de la convergence, qui va dans le sens d'un régime universel, nous avons voulu avancer sans forcer les choses et, surtout, sans donner aux fonctionnaires le sentiment d'être stigmatisés.
Examen des articles
Article 1er A
L'amendement n° 38 complète cet article, introduit à l'Assemblée nationale, en inscrivant les grands principes gouvernant l'assurance vieillesse, posés dans la loi de 2003, dans le code de la sécurité sociale - objet des trois premiers alinéas - et en précisant, au quatrième alinéa, les objectifs assignés au système de retraite par répartition.
Allonger l'article n'amoindrira-t-il pas sa force ? Son laconisme était très clair.
Ces principes figurent déjà dans la loi. Leur codification leur donnera plus de poids.
Un premier amendement en trompe-l'oeil : à lire les amendements suivants, la retraite par capitalisation n'est pas loin ! N'ayant pas eu le temps d'étudier les amendements proposés, nous réserverons notre vote.
Cette rédaction est meilleure. Peut-être faudra-t-il ajouter en séance publique les objectifs de progression du taux d'emploi des seniors et de réduction des écarts de pensions entre hommes et femmes qui n'ont pas été repris tels quels à l'article 1er par les députés.
Le but est de réaffirmer le choix de la retraite par répartition, pour couper court à certaines inquiétudes. L'article 1er, quant à lui, a un autre objet : décliner les objectifs du comité de pilotage.
L'amendement n° 38 est adopté, les groupes socialiste et CRC-SPG ne prenant pas part aux votes durant toute la séance.
L'article 1er A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 1er
Louis Nègre, par son amendement n° 22, pose un constat intéressant : notre système de retraite est complexe en raison de la multiplicité des régimes. Pour autant, nous avons besoin d'un comité de pilotage. L'avis est défavorable.
L'amendement n° 22 est rejeté.
Mon amendement n° 39 réécrit l'article 1er par coordination avec l'amendement n° 38 et renforce le caractère opérationnel et stratégique des missions du comité de pilotage en lui confiant un rôle d'alerte financière.
Plutôt favorable à l'idée. Néanmoins, l'assurance vieillesse est plus complexe que l'assurance maladie. Il faudrait réfléchir à un mécanisme différent du comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie.
L'amendement n° 39 est adopté.
Pas tout à fait ! L'équité voudrait que les parlementaires soient représentés à la proportionnelle des groupes au sein du comité de pilotage.
L'important est que les mêmes parlementaires siègent au sein du comité d'orientation des retraites, organisme technique, et du comité de pilotage, plus prospectif.
L'amendement n° 30 est rejeté.
Avis défavorable à l'amendement rédactionnel n° 31 de Gilbert Barbier. Il faut en rester à la formulation du code du travail.
L'amendement n° 31 est rejeté.
La nouvelle rédaction de l'article 1er ne fait plus référence à la pénibilité, sujet dont nous reparlerons au titre IV. L'amendement n° 32 de Gilbert Barbier tombe donc.
L'amendement n° 32 est déclaré sans objet.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article additionnel après l'article 1er
Article 1er bis
Par l'amendement n° 41, je préconise la suppression de l'article 1er bis, introduit à l'Assemblée nationale. Prévoir la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur les redéploiements de ressources ou de charges entre les régimes de retraite en 2014 reviendrait à envoyer un mauvais signal aux régimes qui ont pratiqué, pour reprendre l'expression d'Alain Vasselle, la répartition provisionnée, autrement dit ceux qui ont fait le choix courageux d'accumuler des excédents pour faire face aux pressions démographiques. Je pense, entre autres, à l'Agirc et l'Arrco.
Je soutiens le rapporteur : le texte contient pas moins de douze rapports au Parlement....
Quel est l'objectif ? Équilibrer les comptes des régimes de retraite. Nous nous bornons à demander un rapport pour 2014. Rien ne dit, dans cet article, que l'Agirc et l'Arrco, mais aussi la CNRACL et le fonds de solidarité vieillesse seront appelés à financer le régime général. La compensation démographique ne doit pas être taboue, sinon nous n'avancerons jamais sur le chemin du régime universel défendu par M. Leclerc.
Le Gouvernement, même si je ne partage pas son objectif, me semble avoir une position cohérente.
Soit, mais nous sommes loin du régime universel ! La perspective est 2018, avec le lancement de la réflexion en 2014. N'alimentons pas l'angoisse des caisses vertueuses. Si cet article était conservé dans le texte, je pense, comme Alain Vasselle, que les siphonages seraient rapides et inéluctables.
Je soutiens cet amendement : n'en rajoutons pas sur l'Agirc et l'Arrco.
Il n'y a aucune raison de nourrir des angoisses : nous fixons seulement un rendez-vous en 2014 ! Rendre ce sujet tabou tout en défendant le régime notionnel est paradoxal. De plus, il n'y a pas de caisses plus vertueuses que d'autres. La Cnav a d'autres contraintes, notamment le financement de la solidarité. Laissons le sujet ouvert sans oublier que l'Agirc et l'Arrco bénéficieront des mesures d'âge de cette réforme.
Sans adhérer à la philosophie du Gouvernement, je suis sensible aux arguments de bon sens du ministre. Nous n'instaurerons pas un régime universel en jouant au bonneteau, mais en visant la transparence et la convergence. Un rapport en 2014 éclairera la représentation nationale. Supprimer l'article, ce serait replonger dans le non-dit et alimenter la suspicion.
Ne mélangeons pas tout : nous ne sommes pas dans un système unique. Ces échanges renforcent ma conviction que ce rapport, comme le craignent l'Agirc et l'Arrco, ne prépare à court terme le siphonage des caisses excédentaires. Supprimons l'article.
Nous nous inquiétons, comme le rapporteur, des siphonages. Dernier exemple en date : pas moins d'1 milliard prélevé sur les organismes sociaux. Résultat, certains sont contraints d'augmenter les loyers !
L'amendement n° 41 est adopté et l'article 1er bis est supprimé.
Article additionnel après l'article 1er bis
Les mécanismes de compensation vieillesse, étudiés dans un rapport établi par Claude Domeizel et moi-même, ont été instaurés en 1974. La Cour des comptes, dans un rapport de septembre 2010, a rappelé la nécessité de remédier à leurs dysfonctionnements, dénoncés par les régimes eux-mêmes, comme l'a fait la Mecss à plusieurs reprises. La situation, d'après les chiffres de 2007, est la suivante : 10 milliards sont en jeu, les premiers contributeurs sont, dans l'ordre décroissant, la Cnav pour 50 %, déficitaire depuis cinq ans, puis l'Etat - toujours et encore l'Etat -, la CNRACL et la caisse des professions libérales. Le premier bénéficiaire de ce mécanisme est le régime agricole, à 80 %, puis certains régimes spéciaux. Il est grand temps que nous étudions de près ce dossier. La solidarité doit s'exprimer par des transferts, non par des spoliations. D'où le rapport demandé à l'amendement n° 42.
Un autre exemple de siphonage me vient en tête : le fonds de réserve pour les retraites !
Cet amendement soulève une vraie question. Mais pourquoi un rapport sur la seule compensation, et non l'ensemble des transferts et redéploiements ?
L'amendement n° 42 est adopté et devient article additionnel.
Article 3
La rédaction initiale de l'article 3 était meilleure que celle adoptée à l'Assemblée nationale : outre le délai de deux ans, il était prévu que les caisses informent les seuls primo-cotisants qui entrent réellement dans la vie active. D'où cet amendement n° 43.
L'amendement n° 43 est adopté.
Il faut également délivrer une information sur l'épargne retraite, mal connue depuis sa création en 2003 et qui constitue un complément - pas plus, j'y insiste- des régimes obligatoires. Tel est l'objet de l'amendement n° 44.
Est-ce le rôle des caisses que de faire la promotion de la capitalisation ? Certes non.
Nous avons besoin d'une bonne information sur les plans d'épargne retraite populaire, les PERP bancaires, et sur les plans d'épargne retraite collectif, les Perco d'entreprise. Mais ce n'est pas au régime général de la diffuser.
Je ne demande pas aux caisses de vendre un catalogue, mais simplement d'informer sur l'existence de l'épargne retraite. Les caisses doivent évoluer, sinon elles seront dépassées.
Si les caisses délivrent une telle information, leur responsabilité sera engagée. Comment donner une information précise sur cette forêt impénétrable qu'est l'épargne retraite ? Que diront-elles aux jeunes déçus par la réalité du rendement de ces mécanismes ?
Ma vision est peut-être trop prospective, la question n'est pas encore d'actualité. Je baisse la garde.
Tant mieux, car vous étiez en train de faire entrer le loup dans la bergerie.
L'amendement n° 44 est retiré.
L'amendement n° 45 simplifie le dispositif de l'entretien individuel que pourra demander tout assuré à partir de quarante-cinq ans, le code de la sécurité sociale prévoyant déjà la possibilité pour l'assuré de demander à tout moment des informations à son régime.
Je m'interroge sur l'ajout relatif aux « aléas de carrière éventuels ».
Ce n'est pas un ajout mais une formule reprenant toutes les situations décrites dans le texte issu de l'Assemblée nationale. La notion d'aléa de carrière est plus claire et préférable à une énumération qui, par nature, risquerait d'être incomplète.
Mon intention, effectivement, était de retenir une rédaction plus simple.
L'amendement n° 45 est adopté.
Entre le relevé de situation, délivré à trente-cinq ans, et l'estimation précise de sa retraite, communiquée à cinquante-cinq ans, il est judicieux d'indiquer à l'assuré, lors de son entretien individuel à quarante-cinq ans, quelle pourrait être sa pension, selon le nombre d'années qu'il travaillera. L'amendement n° 10 d'Isabelle Debré, qui propose une information à quarante ans, est donc satisfait : retrait, sinon rejet.
Je tiens à cet âge de quarante ans, j'y reviendrai en séance publique, avec un amendement mieux rédigé.
L'amendement n° 10 est retiré.
Je propose que les assurés, lors de leur entretien individuel à quarante-cinq ans, se voient communiquer une simulation du montant potentiel de leur future pension, à législation constante. Les Allemands disposent d'une telle information dès vingt-sept ans : nous devons être capables d'en faire autant, c'est très important pour sensibiliser les assurés.
Il faut veiller à ce que la communication de cette estimation n'engage pas juridiquement les caisses. En Allemagne, l'information est plus facile car le système fonctionne par points. L'information est effectivement importante, nos caisses disposent de simulateurs, mais attention aux conséquences juridiques.
Les personnels des caisses subissent déjà les coups de la RGPP, qui aurait supprimé six mille emplois à ce jour. Ne chargeons pas davantage leur barque !
L'évolution des caisses doit se régler sur les droits des assurés plutôt que sur des critères internes. L'information chiffrée sera purement indicative, il faut effectivement prendre toutes les précautions nécessaires pour qu'elle n'engage pas la responsabilité des caisses, mais nous devons parvenir à faire ce que font nos voisins allemands.
Comment peut-on faire, dans un système par répartition, pour évaluer une pension vingt-deux ans à l'avance ? Ce n'est pas réaliste, ni responsable : je ne voterai pas cet amendement.
Il serait tout de même décevant de ne pas parvenir à faire ce que nos voisins font !
L'amendement n° 46 est adopté.
L'amendement n° 47 est retiré.
Je propose, avec l'amendement n° 48, qu'à cinquante-cinq ans, lors de l'estimation indicative, l'assuré soit informé des dispositifs de cumul emploi-retraite, de retraite progressive et de surcotisation en cas d'emploi exercé à temps partiel.
L'amendement n° 48 est adopté.
L'article 3, modifié, est adopté.
Article 3 septies
La date du 15 octobre prochain paraît évidemment trop avancée pour demander un rapport au Gouvernement. Je propose son report au 1er janvier 2011.
L'amendement n° 50 est adopté.
L'article 3 septies, modifié, est adopté.
Articles additionnels après l'article 3 septies
Nous insérons ici, avec l'amendement n° 51, les dispositions du paragraphe III de l'article 1er, relatives aux polypensionnés.
Votre amendement mentionne les différences « éventuelles » de situations entre les hommes et les femmes : ne pourrait-on supprimer l'adjectif, puisque ces différences de situation sont établies ?
Très juste, je rectifie.
L'amendement n° 51 rectifié est adopté et devient article additionnel.
Notre système d'assurance vieillesse, pérenne depuis soixante-cinq ans, s'il a délivré des pensions d'un niveau satisfaisant jusqu'à nos jours, est menacé par son déficit et les jeunes générations doutent de plus en plus qu'il leur garantisse des pensions décentes : des mesures d'urgence s'imposent, ce texte y pourvoit. Au-delà de ces indispensables mesures paramétrées, cependant, il est souhaitable de tracer des perspectives à plus long terme, pour un système qui retrouve la confiance des jeunes générations, qui soit moins complexe et plus juste.
Avec l'amendement n° 52, je propose qu'à compter de 2014, le comité de pilotage et le Cor organisent une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge du risque vieillesse. Je mentionne, parmi les thèmes de réflexion, la convergence progressive des paramètres des régimes de retraites obligatoires, les conditions de mise en place d'un régime de base universel par points ou en comptes notionnels dans le respect du principe de répartition, ainsi que les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité. Sur la base de l'expertise du Cor, le comité de pilotage pourrait proposer des mesures au Parlement et au Gouvernement, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.
Cet amendement ne risque-t-il pas de donner l'impression que la véritable réforme est à venir et que nous l'esquivons aujourd'hui ?
Cette réflexion est un voeu de la Mecss, l'idée étant d'examiner, notamment à partir des exemples étrangers, les voies et les conséquences d'une réforme systémique.
Effectivement, et une telle réforme ne se ferait pas en quelques mois. Les Suédois ont prévu une mise en place progressive en douze ans, et une transition sur vingt ans. Nous devons envisager de passer d'un système de prestations définies, qui sera durablement déficitaire, à un système de cotisations définies, assorties de droits à pension.
Cette réflexion est très importante, effectivement, mais elle ne doit pas affaiblir la réforme d'aujourd'hui, en accréditant l'idée d'un changement prochain d'orientation, à partir notamment des « mesures » que l'amendement suggère, comme si le principe d'une réforme dite systémique était acquis. Le Gouvernement comprend donc votre intention : voulez-vous bien, dans ces conditions, considérer que votre amendement est d'appel ?
Nous avons besoin de prospective, sans gêner la réforme d'aujourd'hui : c'est bien pourquoi je propose que la réflexion soit engagée à partir de 2014 seulement.
La rédaction de votre amendement risque de laisser croire que les mesures d'aujourd'hui seront sans impact et qu'il faudra réformer véritablement en 2014, avec les « mesures » que vous suggérez. Pourquoi ne pas indiquer seulement que le comité de pilotage proposera une réflexion sur les avantages et les inconvénients d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse ?
L'amendement me semble faire une injonction au Gouvernement comme si les principes d'une retraite par points et de comptes notionnels, étaient déjà retenus, alors qu'on ne connaît pas la majorité politique de 2014 ! Vous faites comme si on allait changer de braquet, à mi-parcours de la réforme.
Cette réflexion est très importante à mener, je demande une courte suspension de séance pour régler la rédaction de cet amendement.
Je comprends parfaitement qu'il faille éviter tout risque de confusion sur la réforme actuelle mais je souhaite que le Gouvernement tienne pleinement compte du débat que nous venons d'avoir : nous attendons une réflexion approfondie sur la réforme systémique. Dès lors, je veux bien retirer l'amendement.
Je suis également pour le débat, mais la perspective d'une réforme systémique aurait pu devenir un chiffon rouge qu'on aurait agité devant les partenaires sociaux : ce n'est pas la vocation de notre commission...
Merci, Monsieur le rapporteur. Ce débat est important mais il est connexe à cette réforme et il doit être consensuel. Le Cor a commencé le travail d'analyse, il faudra poursuivre.
L'amendement n° 52 est retiré.
Article 4
L'amendement n° 2 de suppression de l'article est rejeté.
L'article 4 est adopté sans modification.
Article 5
L'amendement n° 3 de suppression de l'article est rejeté.
L'article 5 est adopté sans modification.
Article 5 bis
Cet article repousse de soixante-cinq à soixante-sept ans l'âge limite pour débuter un mandat de membre des conseils ou des conseils d'administration des caisses de sécurité sociale. Ces mandats étant de cinq ans, ils pourront, avec une limite inchangée, être exercés jusqu'à soixante-dix ans. C'est pourquoi je propose, à l'amendement n° 53, de supprimer l'article.
L'amendement n° 53 est adopté, l'article 5 bis est supprimé.
L'amendement n° 17 devient sans objet.
Je voulais m'assurer que les membres actifs de ces conseils soient traités en équité avec les personnalités qualifiées.