Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale

Réunion du 12 novembre 2008 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à des auditions dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2009 (mission « Immigration ») sur l'organisation de l'aide juridique aux étrangers dans les centres et locaux de rétention administrative.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

a précisé que ces auditions n'avaient pas pour objet d'examiner les candidatures des associations ayant soumissionné à l'appel d'offres annulé par le juge des référés le 30 octobre 2008, mais qu'elles visaient à mieux comprendre les conditions dans lesquelles la mission d'aide juridique aux étrangers était assurée dans les lieux de rétention.

Debut de section - Permalien
Laurent Giovannoni, secrétaire général du comité intermouvements auprès des évacués

Elle a tout d'abord entendu M. Laurent Giovannoni, secrétaire général du comité intermouvements auprès des évacués (CIMADE), accompagné de M. Damien Nantes, responsable du service défense des étrangers reconduits.

a tout d'abord retracé les conditions dans lesquelles la CIMADE avait été amenée à assumer cette mission d'assistance juridique aux étrangers dans les centres et locaux de rétention afin de permettre l'exercice effectif de leurs droits.

Il a rappelé que les centres de rétention administrative avaient été créés en 1983 à la suite d'une réforme initiée par M. Robert Badinter, garde des sceaux, visant à mettre fin à l'emprisonnement des étrangers interpellés en situation irrégulière, l'éloignement étant désormais prononcé à titre de peine principale. La durée maximale de rétention était alors de sept jours - 24 heures sur décision préfectorale, éventuellement prolongée de six jours par le juge.

Il a expliqué que, dès cette époque, les pouvoirs publics, conscients que l'éloignement par la force posait de nombreuses difficultés, s'étaient tournés vers la CIMADE pour assurer un accompagnement social et psychologique des étrangers retenus. L'expérience passée de la CIMADE, notamment dans les camps de réfugiés à la suite de la décolonisation, l'imposait comme l'intervenant le mieux adapté.

Il a précisé que jusqu'en 2003 le cadre juridique de cette mission d'assistance sociale et psychologique était une convention annuelle, puis pluriannuelle, entre le ministère des affaires sociales et la CIMADE.

a expliqué que les évolutions législatives à la fin des années 80 -création de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière en 1986 et du recours suspensif en 1989- avaient conduit la CIMADE à faire évoluer sa mission vers un rôle de conseil juridique aux étrangers. En 1993, la convention avait été modifiée pour entériner cette évolution.

Il a ensuite évoqué les suites d'un rapport commandé en 1997 par M. Jean-Pierre Chevènement, à l'époque ministre de l'intérieur, afin de dresser un état des lieux sur le dispositif d'éloignement. Parmi les conclusions de ce rapport, figurait le constat que chaque centre de rétention administrative obéissait à des règles de fonctionnement et d'organisation très différentes. Il suggérait une amélioration des conditions matérielles et proposait qu'un décret fixe les normes d'hébergement et précise les responsabilités de chacun des intervenants dans ces lieux de rétention, ce qui fut fait avec la publication du décret du 19 mars 2001.

a observé qu'à l'époque l'élaboration de ce décret avait déjà soulevé quelques débats, le projet initial ne mentionnant pas la mission d'accompagnement juridique. Le décret final avait finalement prévu de confier cette mission à une association à caractère national.

Il a souligné qu'en 2003, une procédure de passation d'un marché public pour une durée de trois ans avait été substituée à celle de la conclusion de gré à gré d'une convention -ce marché ayant été renouvelé en 2006 jusqu'au 31 décembre 2008. Il a reconnu que la CIMADE n'avait pas pris conscience à cette époque des conséquences de ce changement de nature juridique.

Il a ensuite rappelé que le décret du 19 mars 2001 avait été modifié en 2005 pour tenir compte notamment de l'allongement de la durée maximale de rétention, sans remettre en cause l'organisation de l'aide juridique aux étrangers, le ministre de l'intérieur de l'époque ayant donné des garanties à cet égard. Il avait en particulier ouvert les zones d'attente à l'Anafé afin qu'elle y assure une présence permanente et offre sur le modèle de la CIMADE dans les centres de rétention une aide juridique aux étrangers non admis sur le territoire français.

Il a souligné que depuis 2003 les conditions d'exercice de la mission de la CIMADE avaient beaucoup changé en raison de l'augmentation constante du nombre d'étrangers éloignés du territoire et du triplement du nombre de places en centre de rétention, 25.000 à 30.000 étrangers étant désormais reconduits chaque année, contre 5.000 à 10.000 avant 2003. Il a estimé que la CIMADE avait su répondre à cette hausse très importante de l'activité et continuait à assumer correctement sa mission sans être débordée. M. Laurent Giovannoni a cité à cet égard un audit mené en 2006 et 2007 par l'Inspection générale des affaires sociales, dont les conclusions étaient plutôt positives.

Toutefois, consciente de ce changement d'échelle, il a expliqué que la CIMADE avait pris contact avec le Secours catholique dès 2003 pour lui proposer d'assumer cette mission en commun. Progressivement et à la suite de quelques expérimentations en 2006 et 2007, le Secours catholique s'est déclaré favorable à une action commune au printemps 2008.

Toutefois, ces projets ont été remis en cause par l'évolution récente du cadre juridique de l'assistance aux étrangers dans les lieux de rétention.

a indiqué que dès l'automne 2007 des contacts avaient été pris avec le cabinet de M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire afin d'étudier l'ouverture de cette mission à plusieurs associations à caractère national. Il a précisé que jusqu'au printemps 2008, les premiers contacts étaient plutôt positifs, les seules demandes posées par la CIMADE portant sur le caractère national des associations choisies, la non-modification de la nature de la mission et la concertation tout au long du processus.

Toutefois, dès mars 2008, les propositions relatives à une action commune de la CIMADE et du Secours catholique étaient restées sans réponse du ministère.

Il a ajouté que le projet de décret présenté par le ministère au printemps 2008 était globalement convenable, à l'exception des dispositions interdisant à plusieurs associations d'intervenir dans un même centre, ce qui excluait de fait toute possibilité de complémentarité opérationnelle au quotidien.

Observant que ces discussions coïncidaient avec l'incendie du centre de rétention de Vincennes en juin 2008, il a déploré que le décret du 22 août 2008 n'ait finalement tenu aucun compte des remarques de la CIMADE. Il a ajouté que le lancement rapide de l'appel d'offres à la fin du mois d'août et le choix de diviser le marché en huit lots étaient contradictoires avec les affirmations du ministre sur son souhait de partager cette mission entre trois associations au plus.

a particulièrement insisté sur la complémentarité et la coopération des différents intervenants et sur la nécessité de conserver une vision d'ensemble afin en particulier :

- d'assurer le suivi des dossiers complexes, des retenus pouvant par exemple changer de centre de rétention ;

- de suivre les personnes après leur éloignement ;

- d'être en capacité d'agir à plusieurs niveaux (préfet, juge judiciaire, juge administratif).

Il a jugé que les conditions de l'appel d'offres niaient ces exigences et que la procédure de mise en concurrence était inadéquate s'agissant de l'attribution d'une mission relative à l'accès aux droits et à la défense des droits individuels. Il a estimé qu'une délégation de service public serait plus appropriée.

Il a également précisé que l'appel d'offres avait été annulé sur le fond, et non sur la forme, comme cela avait pu être dit, et que le Conseil d'Etat ne s'était pas encore prononcé sur le recours en excès de pouvoir contre le décret.

Il a conclu que dans l'attente d'un nouvel appel d'offres, la CIMADE avait transmis au ministère une demande pour permettre à des associations de se porter candidates conjointement dans un cadre organisé.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », s'est interrogé sur le motif de l'annulation de la procédure de passation du marché par le juge des référés.

Il a également souhaité connaître la nature exacte de l'appel d'offres.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

a demandé :

- quels étaient les moyens humains et matériels de la CIMADE ;

- si cette association était en relation avec d'autres associations que le Secours catholique ;

- comment il envisageait l'avenir.

Répondant à M. François-Noël Buffet, M. Damien Nantes, responsable du service « Défense des étrangers reconduits » à la CIMADE, a indiqué que le juge des référés avait annulé l'appel d'offres en raison de la pondération insuffisante attribuée au critère de l'expertise juridique.

Répondant ensuite à M. Richard Yung, il a indiqué que le budget pour 2008 devrait avoisiner les 4 millions d'euros, correspondant à 65 équivalents temps plein travaillé, auxquels s'ajoutent 30 à 40 bénévoles intervenant dans les centres de rétention administrative, 60 à 80 bénévoles dans les locaux de rétention administrative et 150 à 200 bénévoles pour l'interprétariat.

Debut de section - Permalien
Laurent Giovannoni, secrétaire général du comité intermouvements auprès des évacués

Concernant le travail en coopération avec d'autres associations, M. Laurent Giovannoni a précisé que la CIMADE envisageait de développer des partenariats :

- avec des associations étrangères pour assurer un meilleur suivi des réadmissions dans l'espace Schengen ;

- avec les barreaux ;

- avec des syndicats pour faciliter la récupération des salaires acquis par les étrangers ayant travaillé avant leur placement en rétention.

S'agissant de l'avenir, il a déclaré ne pas disposer d'éléments d'information particuliers, mais qu'il n'était pas nécessaire d'avoir un nouvel appel d'offres pour que la CIMADE continue à exercer sa mission. Il a ajouté que la loi prévoyait cette aide à l'exercice effectif des droits dans les lieux de rétention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

a demandé si la CIMADE s'était portée candidate.

Debut de section - Permalien
Laurent Giovannoni, secrétaire général du comité intermouvements auprès des évacués

a répondu que la CIMADE avait soumissionné le dernier jour pour chaque lot, afin de laisser le dialogue ouvert et de continuer à assurer cette mission essentielle, espérant que le décret serait modifié.

Debut de section - Permalien
Stéphane Maugendre, Mme Florence Boreil, responsable des lieux privatifs de liberté à l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT)

Puis la commission a entendu M. Stéphane Maugendre, président du groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), Mme Florence Boreil, responsable des lieux privatifs de liberté à l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT), et M. Patrick Delouvin, responsable France d'Amnesty international.

Après avoir rappelé qu'il était à la fois président du GISTI et avocat au barreau de Bobigny en Seine-Saint-Denis, M. Stéphane Maugendre s'est demandé si la réalisation de l'objectif de 28.000 éloignements du territoire fixé par M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, passait nécessairement par une diminution des droits des étrangers en rétention.

Il a souligné que les personnes retenues n'étaient pas des délinquants et qu'elles avaient droit à une assistance sociale et juridique, estimant que cette mission ne pouvait faire l'objet d'un appel d'offres. Il a rappelé qu'en l'état du droit, le dispositif actuel d'aide juridictionnelle ne permettait pas une assistance juridique de qualité aux personnes retenues.

Prenant l'exemple récent de personnes de nationalité afghane interpellées à Calais et retenues à Lille en vue d'une procédure d'éloignement, il a insisté sur la nécessité pour les structures chargées de l'accompagnement juridique des personnes retenues d'avoir une compétence nationale, afin de suivre le parcours des personnes retenues et d'offrir la même réponse dans tous les centres de rétention de France.

Il a souligné que les personnes retenues, faute de pouvoir se déplacer, n'avaient pas accès à certains documents essentiels pour leur défense et que les associations compétentes devaient donc effectuer auprès des familles et services, un travail de collecte d'informations essentiel pour établir leur dossier.

Rappelant que la recommandation n° 52 du comité contre le racisme et pour la tolérance du Conseil de l'Europe préconisait à la France de poursuivre l'amélioration des conditions d'assistance sociale et juridique des personnes en centre de rétention, il a noté que la politique gouvernementale n'allait pas dans ce sens.

Après avoir rappelé que l'ACAT luttait contre les mauvais traitements dans tous les lieux de rétention et accompagnait les demandeurs d'asile, Mme Florence Boreil a indiqué que son association faisait partie de celles qui avaient dénoncé le décret du 22 août et l'appel d'offres du ministère de l'immigration.

Elle a déclaré que, sous couvert d'une plus grande transparence et de respect du pluralisme, le ministère de l'immigration voulait transformer la mission actuelle d'assistance aux étrangers retenus en simple mission d'information.

Elle a expliqué qu'en annulant l'appel d'offres en référé, le juge administratif avait considéré que celui-ci, en privilégiant le critère de l'accompagnement social des personnes retenues au détriment de l'assistance juridique, seulement prise en compte à hauteur de 15%, ne garantirait pas en fait la défense des droits des étrangers en rétention.

Elle a déclaré que l'émiettement du marché en huit lots distincts rendrait plus difficile la possibilité, pour les acteurs chargés de l'accompagnement des personnes retenues, d'avoir une action globale.

Précisant que l'ACAT n'avait pas vocation à être candidate à l'appel d'offres, elle a estimé d'une part, qu'une coordination nationale des associations compétentes était nécessaire pour éviter des pratiques différentes selon les centres et d'autre part, qu'il ne fallait pas empêcher l'existence d'un droit de regard extérieur et critique sur le fonctionnement des centres de rétention par l'insertion d'une clause de neutralité et de confidentialité.

Elle a souligné que l'action des pouvoirs publics devait s'inspirer des préconisations émises sur l'accès au droit des personnes retenues, en juillet, par le comité des droits de l'Homme de l'Organisation des Nations unies.

Après avoir rappelé qu'Amnesty international luttait depuis longtemps pour qu'un regard extérieur puisse témoigner sur l'activité de tous les lieux de privation de liberté, M. Patrick Delouvin a précisé que les demandeurs d'asile en centre de rétention ne pouvaient bénéficier que de la procédure prioritaire, moins protectrice des droits.

Il a ainsi rappelé que le délai pour demander l'asile n'était que de cinq jours, que les personnes retenues ne pouvaient pas bénéficier de traduction dans l'accomplissement de leurs démarches, que le recours n'était pas suspensif et que l'office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ne les entendait pas systématiquement.

Rejoignant les propos de Mme Florence Boreil sur la transformation de la mission d'accompagnement des étrangers retenus en simple mission d'information par le décret du 22 août, il a expliqué qu'avec l'intégration d'une clause de confidentialité, le ministre de l'immigration souhaitait probablement empêcher les témoignages sur la réalité de la vie dans les centres de rétention.

Il a estimé qu'il serait pourtant souhaitable que le prochain appel d'offres du ministère de l'immigration présente les garanties demandées par les associations.

Evoquant à son tour la préparation d'un vol « charter » pour reconduire plusieurs personnes de nationalité afghane dans leur pays, il a fait part de ses inquiétudes sur leur sort et souligné que seule la méconnaissance du droit français et européen de plusieurs d'entre elles les avait conduites à refuser de demander l'asile dans le délai de cinq jours.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », a estimé, que contrairement à ce qu'avait laissé entendre M. Stéphane Maugendre, les étrangers retenus pouvaient bénéficier de l'aide juridictionnelle à l'heure actuelle. Il s'est interrogé sur les structures capables de remplacer la CIMADE et a demandé aux trois intervenants s'ils avaient des craintes particulières vis-à-vis de certaines d'entre elles.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

a souhaité savoir quels étaient les membres de la commission d'appel d'offres et a déclaré que cette procédure n'était pas adaptée pour assurer cette mission de service public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Evoquant l'aide juridique existant dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile, M. Jean-René Lecerf a constaté que de nombreuses structures apportaient aujourd'hui une aide juridique aux étrangers et qu'il convenait sans doute d'assurer une continuité entre leurs activités et l'aide juridique dans les centres de rétention.

Debut de section - Permalien
Stéphane Maugendre, Mme Florence Boreil, responsable des lieux privatifs de liberté à l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT)

En réponse à M. François-Nöel Buffet, M. Stéphane Maugendre a noté que le conseil national des barreaux avait signé une convention avec la Cimade pour formaliser leur coopération, mais a constaté que l'absence de permanences d'avocats dans les centres de rétention fragilisait la situation des étrangers retenus.

Debut de section - Permalien
Florence Boreil

a souligné que les associations postulant à l'appel d'offres devaient avoir de solides compétences juridiques, la procédure judiciaire existant pour les étrangers en rétention désireux de faire valoir leurs droits étant une vraie course d'obstacles.

Debut de section - Permalien
Patrick Delouvin

a indiqué que le découpage du marché en huit lots menaçait la compétence et la qualité du travail des associations chargées du suivi des étrangers retenus et qu'il permettrait sans doute d'écarter plus facilement une association émettant des critiques sur le fonctionnement des centres de rétention.

En réponse à M. Jean-René Lecerf, il a constaté que la situation des demandeurs d'asile était variée, distinguant celle du demandeur d'asile hébergé dans un centre d'accueil et accompagné alors qu'il vient d'être débouté de sa demande, de celle d'un étranger sans papier interpellé sur la voie publique et souhaitant demander l'asile.

Il a rappelé qu'en 2007, 1.200 personnes avaient demandé l'asile une fois placées en centre de rétention, dont 800 auraient en fait souhaité effectuer cette demande avant leur placement.

Debut de section - Permalien
Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés

Puis la commission a entendu M. Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés.

a tout d'abord rappelé que Forum Réfugiés, association lyonnaise qui emploie une centaine de salariés et gère environ mille places en centres d'hébergement et centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA), s'occupait principalement des demandeurs d'asile et de questions périphériques telles que les retours volontaires ou les procédures de réadmission. Il a ensuite expliqué que l'association avait, après de nombreux débats en interne, décidé de se porter candidate à l'attribution de deux lots de l'appel d'offres lancé par le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et relatif à la défense des droits des étrangers maintenus en centres de rétention administrative (CRA).

Il a remarqué que la remise en cause de l'exclusivité dont bénéficie la CIMADE était évoquée depuis environ trois ans, mais qu'il était très délicat de se placer en concurrence avec des collègues du monde associatif.

a expliqué cette candidature par le souci de voir une association disposant d'une réelle compétence en droit des étrangers succéder à la CIMADE dans les centres où le mandat de cette dernière ne serait pas renouvelé. Il a précisé que les associations possédant cette compétence étaient peu nombreuses et qu'il était de leur devoir d'assumer cette responsabilité.

S'agissant de cette candidature, il a indiqué que Forum Réfugiés s'était aligné sur les termes du décret et non sur ceux de l'appel d'offres, préférant en particulier viser la mission d'aide à l'exercice effectif des droits plutôt qu'une simple mission d'information.

Il a toutefois regretté que les termes du débat sur les conditions de rétention et d'éloignement du territoire soient brouillés par le face-à-face qui oppose à l'heure actuelle le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire à la CIMADE. Il a rappelé que la France avait une responsabilité particulière au sein de l'Union européenne, car une carte de réfugié (convention de Genève) sur 3,5 délivrée par les 27 pays de l'Union européenne l'est par la France. Or, de nombreux pays européens, y compris l'Italie ou l'Espagne, mettent en oeuvre des standards médiocres en matière d'asile et d'éloignement de leur territoire : à l'heure actuelle, sa crainte principale est de voir les pratiques françaises se rapprocher de celles d'une majorité de pays européens et non l'inverse.

a ainsi vivement souhaité que les passions entourant actuellement les questions relatives à la rétention et à l'éloignement du territoire s'apaisent, car celles-ci créent un climat délétère qui nuit au quotidien au travail et à la motivation des membres de son association.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », l'a interrogé sur le risque d'incohérence que pourrait susciter, dans le traitement des dossiers, l'attribution à une pluralité d'associations de la mission d'assistance aux étrangers maintenus en CRA.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

a souhaité savoir s'il était nécessaire de disposer d'une accréditation particulière pour être candidat à l'appel d'offres lancé par le ministère et a souhaité comprendre quelle était l'origine des divergences constatées entre les différentes associations intervenant dans ces matières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

a enfin relevé que le débat actuel sur le renouvellement de la mission d'aide aux étrangers placés en CRA suscitait de vives tensions entre les différentes associations impliquées dans cette mission, et, rappelant que M. Laurent Giovannoni, secrétaire général de la CIMADE, avait exprimé le souhait de travailler avec d'autres associations, a interrogé M. Olivier Brachet sur les relations qu'entretient Forum Réfugiés avec la CIMADE. Il a également souhaité recueillir l'avis de M. Olivier Brachet sur les associations récemment créées dans le but de répondre à l'appel d'offres lancé par le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Debut de section - Permalien
Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés

A ces questions, M. Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés, citant les exemples de l'accueil des demandeurs d'asile, de celui des mineurs isolés, de l'attribution de l'allocation d'attente ou encore de la formation au français des étrangers, a rappelé que le débat entourant cet appel d'offres s'inscrivait de façon plus générale dans un mouvement, initié il y a une quinzaine d'années, de suppression des monopoles en matière de droit des étrangers : l'appel d'offres actuel constitue de ce point de vue une nouvelle étape de ce processus, avec la suppression de l'exclusivité actuellement détenue par la CIMADE sur la mission d'aide juridique aux étrangers placés en centres de rétention.

Considérant que la fin de ce monopole pouvait également être regardée comme une occasion d'améliorer la gestion des deniers publics, M. Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés, a rappelé que la CIMADE était une association confessionnelle et que Forum Réfugiés, association laïque, était tout aussi compétente et légitime pour assurer la mission d'aide aux étrangers placés en rétention.

Il a également souligné qu'il existait d'énormes différences de moyens et de fonctionnement entre les différents CRA et que l'unité d'intervention de la CIMADE n'avait pas réussi à aplanir ces différences. De ce point de vue, l'octroi de la mission d'aide aux étrangers placés en centres de rétention à plusieurs associations peut renforcer, selon lui, la compétence et la crédibilité du service rendu.

De façon plus générale, M. Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés, a expliqué que les associations actuellement impliquées dans la défense des droits des étrangers étaient toutes, à des degrés divers, traversées par un débat sur la légitimité du principe même de l'éloignement des étrangers. En tant qu'association impliquée à titre principal dans la défense des réfugiés et des demandeurs d'asile, Forum Réfugiés estime que la disparition de toute politique migratoire peut dénaturer les conditions d'octroi de l'asile. A l'inverse, des associations dénient toute légitimité à la notion de frontière et semblent se prononcer en faveur d'une libre-circulation sans conditions des personnes.

Selon M. Olivier Brachet, directeur général de Forum Réfugiés, ce positionnement fondamentalement ambigu d'un certain nombre d'associations nuirait au débat actuel sur l'octroi de la mission d'aide aux étrangers placés en CRA. Il a conclu en rappelant que son association s'inscrit dans une action de longue durée indépendamment des changements de gouvernement.