Comme chaque année, le bureau de notre commission s'est réuni à la fin du mois de janvier pour évoquer principalement le programme de contrôle pour l'année en cours.
Mais avant d'aborder le contrôle, le bureau a évoqué l'agenda législatif de la commission pour les semaines à venir. Sans trop m'étendre, je voudrais relever deux rendez-vous traditionnels : le projet de programme de stabilité, qui sera présenté au Parlement mi-avril avant d'être transmis fin avril ou début mai aux autorités de l'Union européenne et le projet de loi de règlement, qui sera délibéré en Conseil des ministres à la fin du mois de mai. Le bureau ayant souhaité que nous mettions l'accent sur la loi de règlement, je serai amenée, en lien avec le rapporteur général, à vous faire des propositions sur ce sujet et, dans cette perspective, je suis bien entendue ouverte à toutes les suggestions que vous pourriez formuler.
J'en viens maintenant aux travaux de contrôle. J'indique, en premier lieu, que le bureau a décidé de constituer une délégation qui se rendra en Espagne et au Portugal, pendant l'interruption des travaux du Sénat du mois d'avril, afin de se rendre compte de la manière dont ces pays ont mis en oeuvre leurs programmes de redressement et des incidences des politiques conduites sur leur économie, leur situation sociale et leur compétitivité.
Il me paraît tout à fait indispensable de multiplier les contacts politiques bilatéraux au sein de la zone euro et de comprendre comment nos partenaires abordent des difficultés et relèvent des défis semblables à ceux auxquels nous sommes confrontés.
Avec nos homologues de l'Assemblée nationale, le rapporteur général et moi nous rendrons d'ailleurs prochainement à Bruxelles et Berlin. En outre se tient aujourd'hui à Bruxelles la conférence interparlementaire sur la gouvernance économique et financière en Europe, dite de « l'article 13 du TSCG ». Hier était organisée également à Bruxelles la « semaine parlementaire du semestre européen ». Nous y sommes représentés par Richard Yung et Fabienne Keller, le rapporteur général s'y étant rendu hier matin.
En second lieu, le bureau de notre commission a constaté que deux commissions permanentes et une délégation avaient déjà organisé ce que le président du Sénat appelle le « Sénat hors les murs », qui consiste à se déplacer pour étudier sur le terrain une question particulière ou pour préparer l'examen d'un projet de loi.
Nous avons décidé que la commission des finances, qui a déjà une longue tradition de séminaire, pouvait s'inscrire dans cet exercice et transmettre une proposition au président du Sénat.
Il nous a semblé utile de choisir une destination qui nous permettrait d'étudier la mise en oeuvre du pacte de responsabilité et des avantages fiscaux et sociaux qu'il procure aux entreprises, ainsi que d'approfondir le sujet de la fiscalité des entrepreneurs. A cet égard, et en fonction des discussions que nous aurons avec la présidence, la possibilité d'aller à Toulouse pourrait être étudiée. Ce déplacement pourrait avoir lieu au mois de mai. Il se substituerait à notre habituel séminaire, les deux exercices étant trop proches pour être conduits tous les deux.
Je voudrais conclure en évoquant les travaux de contrôle des rapporteurs spéciaux et les groupes de travail qui sont envisagés pour cette année. Le bilan de la mise en oeuvre du programme de l'année dernière vous a été distribué. Comme vous le constatez, le programme a globalement été tenu et les rapporteurs spéciaux ont présenté à la commission des communications qui ont donné lieu à des rapports d'information ou à des insertions dans leur rapport spécial.
Comme chaque année - et 2015 n'échappera pas à la règle - la réalisation du programme de contrôle est soumise à des aléas qui sont d'une part le calendrier législatif et d'autre part les structures temporaires de type commission d'enquête, mission commune d'information ou commission spéciale.
Pour 2015, il vous est présenté un programme comprenant les contrôles proposés par les rapporteurs spéciaux, que vous retrouvez sans le document qui vous a été distribué.
Nous avons par ailleurs demandé, comme chaque année, des enquêtes à la Cour des comptes.
Enfin, nous avons décidé de constituer des groupes de travail sur deux sujets qui ont particulièrement retenu l'attention pendant la discussion budgétaire.
Le premier a trait à la question du logement et du marché immobilier, qui nous est apparue prioritaire en raison du coût de cette politique publique et de l'ampleur des besoins à satisfaire. Un groupe pourrait s'intéresser aux différents volets de cette politique et nous avons pensé qu'il pourrait s'organiser autour du rapporteur général, du rapporteur spécial des crédits du logement Philippe Dallier et du rapporteur spécial des crédits de la ville Daniel Raoul. Pourraient s'ajouter à ce noyau les commissaires intéressés, dans le respect de l'équilibre entre les groupes et avec la contrainte de ne pas constituer un groupe pléthorique.
Deuxième sujet : les conséquences du développement de l'économie numérique sur les assiettes fiscales et le recouvrement de l'impôt. Pour traiter ce thème, nous vous proposons de désigner Philippe Dallier et Albéric de Montgolfier, qui avaient engagé sous la mandature précédente un contrôle sur le rôle de la direction générale des finances publiques face à la fraude sur Internet, qui pourrait se poursuivre dans ce nouveau cadre. Ils seraient rejoints par les rapporteurs spéciaux de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » Thierry Carcenac et Michel Bouvard, compétents pour contrôler les moyens des services fiscaux, et par les rapporteurs spéciaux de la mission « Economie » Jacques Chiron et Bernard Lalande, investis dans le suivi de l'économie numérique.
A ces deux groupes s'ajouteraient deux autres chantiers. En premier lieu, l'évaluation des pouvoirs de sanction des régulateurs financiers, confiée à Claude Raynal et Albéric de Montgolfier et que nous avons évoquée lors de nos auditions en commission la semaine dernière ; en second lieu, l'évaluation du mode de financement de l'audiovisuel public. J'ai été sollicitée par la présidente de la commission de la culture pour que nous engagions un travail conjoint sur ce thème. Je vous propose de répondre favorablement à sa demande et, avec l'accord du rapporteur spécial de la mission « Médias » François Baroin, de désigner André Gattolin rapporteur. Il travaillerait en binôme avec notre collègue Jean-Pierre Leleux. Si vous étiez favorables à la désignation d'André Gattolin, seriez-vous également d'accord pour lui conférer, dans le cadre de cette mission, les pouvoirs d'enquête dont dispose le rapporteur spécial ? Conformément à l'article 57 de la LOLF, ces pouvoirs en matière de contrôle du financement de l'audiovisuel public seraient accordés pour une durée limitée, avec un terme que je vous propose de fixer au 15 juillet.
Il en est ainsi décidé.
Pour avoir été percepteur, j'ai quelques compétences sur la question du recouvrement de l'impôt et suis tout disposé à les mettre au service du groupe de travail sur les modalités de recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique.
Je remercie François Baroin de me permettre d'enquêter sur un domaine de son ressort. Ce sont des dossiers qu'avec Jean-Pierre Leleux j'avais suivis au sein de la commission de la culture.
La commission donne acte de sa communication à la présidente et adopte le programme de contrôle dont la teneur suit :
Richard Yung La délivrance des visas Administration générale et territoriale de l'État Hervé Marseille Le financement de l'organisation des élections Affaires européennes
et
Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales François Marc
Alain Houpert Yannick Botrel Les relations entre le budget communautaire et le budget national à travers la PAC (refus d'apurement et cofinancements) Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales Alain Houpert Yannick Botrel Les soutiens à la filière forêt-bois
Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : audition pour suite à donner programmée le 3 mars 2015) Aide publique au développement Fabienne Keller Yvon Collin Les financements en matière de lutte contre le changement climatique en faveur des pays les moins avancés Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation Marc Laménie La journée défense et citoyenneté (JDC)
Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : remise du rapport au premier semestre 2016) L'Institution nationale des invalides (INI) Culture Vincent Eblé Les dépenses fiscales relatives à la rénovation des monuments historiques Défense Dominique de Legge Les missions intérieures et de souveraineté : le coût pour la défense des actions interministérielles Direction de l'action du Gouvernement Michel Canevet L'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information (ANSSI) Écologie, développement et mobilité durables
CAS : Aides à l'acquisition de véhicules propres
Transports
BA : Contrôle et exploitation aériens Jean-François Husson
Marie-Hélène Des Esgaulx
Vincent Capo-Canellas La politique relative à la qualité de l'air Le sauvetage en mer (poursuite du contrôle engagé en 2014) La maîtrise des dépenses de personnel à la direction générale de l'aviation civile (DGAC) Égalité des territoires et logement Philippe Dallier Les aides personnelles au logement (Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : remise du rapport avant le 15 juillet 2015) Enseignement scolaire Gérard Longuet Les heures supplémentaires
dans le second degré Immigration, asile et intégration Roger Karoutchi Les centres de rétention administrative Justice Antoine Lefèvre La protection judiciaire de la jeunesse (Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : rapport remis le 9 octobre 2014 et audition pour suite à donner organisée le 14 janvier 2015) Outre-mer Teura Iriti Georges Patient Le fonds exceptionnel d'investissement (FEI) Recherche et enseignement supérieur Philippe Adnot Le contrôle des conditions de maintien des droits des étudiants boursiers (poursuite du contrôle engagé en 2014) Le bilan de l'autonomie financière des universités (Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : remise du rapport en juin 2015) Les sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT) Relations avec les collectivités territoriales Charles Guené Jean Germain L'association des collectivités territoriales à la maîtrise des finances publiques : deux exemples européens Remboursements et dégrèvements Marie-France Beaufils Le profil des bénéficiaires du CICE Santé Francis Delattre Suivi du contrôle de l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) Le fonds CMU (couverture maladie universelle) (Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : remise du rapport avant le 15 mai 2015) Sécurités (Gendarmerie nationale et Police nationale) Philippe Dominati Les moyens consacrés au renseignement au sein des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » Sécurités (Sécurité et éducation routières)
CAS : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers Vincent Delahaye La politique d'implantation des radars Sécurités (Sécurité civile) Jean Pierre Vogel Le programme « ANTARES » (Adaptation Nationale des Transmissions aux Risques et aux Secours) Solidarité, insertion et égalité des chances Éric Bocquet Les établissements et services d'aide par le travail (ESAT)
poursuite du contrôle engagé en 2014) Sport, jeunesse et vie associative Claude Raynal Le soutien financier de l'État aux fédérations sportives : légitimité, équité, efficacité Travail et emploi François Patriat
II. Autres enquêtes demandées à la Cour des comptes
Philippe Dallier Le recours aux consultants extérieurs par l'État
Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : audition pour suite à donner programmée le 4 mars 2015) Albéric de Montgolfier, rapporteur général Les enjeux et les leviers de la maîtrise de la masse salariale de l'État
Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : remise du rapport avant le 15 juillet 2015) François Marc Le Crédit immobilier de France
Enquête demandée à la Cour des comptes dans le cadre de l'art. 58-2 de la LOLF : remise du rapport avant le 15 septembre 2015) Albéric de Montgolfier, rapporteur général La gestion de la fonction publique d'État
III. Autres contrôles
Jacques Chiron
Philippe Dallier
Jacques Genest
Bernard Lalande
Puis la commission procède à l'examen du rapport de M. Charles Guené et élabore le texte de la commission sur le projet de loi n° 222 (2014-2015) ratifiant l'ordonnance n° 2014-1335 du 6 novembre 2014 relative à l'adaptation et à l'entrée en vigueur de certaines dispositions du code général des collectivités territoriales, du code général des impôts et d'autres dispositions législatives applicables à la métropole de Lyon.
EXAMEN DU RAPPORT
Il y a tout juste un an, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles.
L'article 26 de la loi prévoit la mise en place, au 1er janvier 2015, d'une nouvelle collectivité territoriale - la métropole de Lyon - résultant de la fusion de la communauté urbaine de Lyon et de la portion du département du Rhône comprise sur son périmètre. La commission des finances s'était intéressée à la création de cette nouvelle collectivité territoriale, notamment lors de l'examen du rapport pour avis de notre collègue Jean Germain.
Cette nouvelle collectivité territoriale n'est ni un département, ni un établissement public de coopération intercommunale (EPCI), mais une collectivité sui generis. Ce statut particulier emporte naturellement de nombreuses conséquences et nécessite d'ajuster les dispositions législatives existantes en matière de fiscalité locale, de concours financiers de l'État, de fonds de péréquation ou de règles budgétaires et comptables.
En raison du caractère technique de ces dispositions, le Gouvernement avait souhaité légiférer par ordonnance sur ces différentes questions.
L'habilitation ouvrait notamment la possibilité de « préciser et compléter » les règles budgétaires, financières, fiscales, comptables et relatives aux concours financiers de l'État applicables à la métropole de Lyon et à ses communes membres. En matière fiscale, elle autorisait en particulier la répartition du produit de certaines impositions départementales, le partage des compensations d'exonérations de fiscalité locale, ainsi que des compensations de la réforme de la taxe professionnelle. En matière de concours financiers, elle permettait notamment de définir les modalités de partage de la dotation de compensation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) entre la métropole de Lyon et le département du Rhône et les modalités de calcul du potentiel fiscal et financier de la métropole de Lyon.
L'ordonnance du 6 novembre 2014, qui vous a été distribuée, a été prise sur le fondement de cette habilitation et le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui vise à ratifier cette ordonnance.
Le seul dépôt du projet de loi de ratification, dans le délai prescrit par l'habilitation, permet d'éviter la caducité de l'ordonnance. Sa ratification, en revanche, a pour effet de la transformer rétroactivement en texte de valeur législative. Aux termes de l'arrêt du Conseil d'État du 8 décembre 2000, l'« ordonnance acquiert valeur législative à compter de sa signature ».
J'en viens aux dispositions de cette ordonnance.
En matière de fiscalité, la principale difficulté posée par la création de la métropole de Lyon réside dans le fait qu'elle n'est ni un EPCI, ni un département. Dès lors, les dispositions qui s'appliquent aux métropoles et aux départements ne lui sont pas applicables par défaut.
Les articles 1er à 22 visent donc à adapter le droit existant en matière de fiscalité locale à ce statut particulier. Sont ainsi concernées : les règles de liaison des taux ; les commissions départementales des impôts et des valeurs locatives ; la perception de diverses taxes locales, dès lors que des mesures de coordination étaient nécessaires ; la répartition des produits perçus en compensation de différents transferts de compétences, des allocations compensatrices d'exonérations d'impositions directes locales et des compensations de la réforme de la taxe professionnelle. Ce partage s'est fait en fonction des bases fiscales ou selon une clé de répartition définie par la commission locale chargée de l'évaluation des charges et des ressources qui, comme vous l'imaginez, a beaucoup travaillé sur le sujet.
Au total, la métropole de Lyon percevra entre 70 % et 80 % environ des principales ressources fiscales de l'ancien département du Rhône et un peu moins de 60 % des compensations de la réforme de la taxe professionnelle.
Relevons que l'article 7 prévoit une période transitoire pour la perception de la part départementale de la taxe d'aménagement par la métropole de Lyon : pour les exercices 2015 et 2016, ce produit continuera à être perçu par le département du Rhône mais sera pris en compte dans le calcul de la dotation de compensation métropolitaine. Ceci s'explique par des difficultés informatiques.
Soulignons par ailleurs que les dispositions de l'article 9, qui étendait à la métropole de Lyon les dispositions applicables aux EPCI à fiscalité propre en matière de taxe de séjour, ont déjà été pratiquement entièrement réécrites par la loi de finances pour 2015.
J'en viens aux dispositions relatives aux concours financiers.
La métropole de Lyon est éligible à l'ensemble des concours financiers et dispositifs de péréquation dont bénéficient les départements et les communautés urbaines. Par exemple, dès 2015, la métropole de Lyon perçoit les versements au titre du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) dans les conditions de droit commun.
Toutefois, il n'est pas toujours possible de calculer le montant de chaque dotation que la métropole de Lyon pourrait désormais percevoir. Il est alors nécessaire de définir une répartition pérenne de la dotation jusqu'alors perçue par le seul département du Rhône.
Cette répartition a été prévue, dans certain cas, par la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite loi MATPAM : ainsi, la DGF du département du Rhône est répartie entre les deux collectivités territoriales en fonction de leur population respective. Dans d'autres cas, la clé de répartition est fixée par l'ordonnance : c'est le cas en particulier de la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC), répartie proportionnellement à la surface respective des collèges sur chaque territoire.
La loi MAPTAM a en outre prévu que les transferts de compétences entre le département du Rhône et la métropole de Lyon étaient compensés grâce à une dotation de compensation métropolitaine.
Pour calculer cette dotation de compensation métropolitaine, l'ensemble des recettes réelles de fonctionnement perçues en 2013 par le département du Rhône ont été réparties, par construction, entre la métropole de Lyon et le département du Rhône. Certains concours ne pouvant être territorialisés a priori, l'ordonnance a prévu des critères de répartition de ces recettes pour le calcul de la dotation de compensation métropolitaine.
En application de ces critères, la commission locale chargée de l'évaluation des ressources et des charges, créée par la loi MAPTAM, a déterminé précisément les clés de répartition.
La dotation de compensation métropolitaine permet, à l'issue de ce travail de répartition, d'égaliser les taux d'épargne du département du Rhône et de la métropole de Lyon après transferts de compétences. En application de ces dispositions, la métropole de Lyon verse une dotation de compensation métropolitaine annuelle de 75 millions d'euros au département du Rhône.
Enfin, dans certains cas, la métropole de Lyon ne peut être éligible à un concours dans les conditions de droit commun dès sa création, dans la mesure où il est versé en fonction de critères non disponibles, notamment parce qu'ils ne peuvent pas être territorialisés. C'est le cas par exemple des concours versés par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ou du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI).
L'ordonnance prévoit donc un régime transitoire, de deux ans maximum, pendant lequel le département du Rhône, dans ses limites territoriales antérieures à la création de la métropole de Lyon, continue de percevoir les concours de la CNSA et du FMDI. Ces concours sont ensuite répartis entre les deux collectivités territoriales selon des critères fixés par l'ordonnance.
Un mot sur la péréquation. Si la métropole de Lyon est éligible à l'ensemble des mécanismes de péréquation départementaux, il n'en est pas moins nécessaire de préciser les modalités de calcul du potentiel financier de ces deux nouvelles collectivités territoriales, et notamment d'isoler les ressources départementales de la métropole de Lyon de ses ressources intercommunales, ainsi que de prendre en compte la dotation de compensation métropolitaine.
Je tiens à souligner que la création de la métropole de Lyon, soit un département particulièrement urbain, et d'un département du Rhône rural et privé de son territoire métropolitain, pourrait, si un tel schéma venait à se généraliser, avoir des effets considérables sur les mécanismes de péréquation départementaux. Il serait alors de plus en plus difficile de comparer entre eux des départements devenus très hétérogènes et une remise à plat de la péréquation au niveau départemental devrait alors sans doute être envisagée.
Telles sont les observations qu'appelle ce projet de loi, que je vous propose tel que modifié par un amendement rédactionnel et de précision.
Je suis heureux de constater qu'il peut se bâtir une véritable métropole intégrée à Lyon, où les élus se sont montrés capables de régler, sans que se fassent entendre des voix discordantes, les questions difficiles associées à un tel projet. Je m'en félicite et je regrette ici encore, comme je le fais depuis des années, que Paris soit incapable de faire de même.
Pardonnez-moi de faire entendre une voix discordante : mon groupe n'a pas souscrit à la création des métropoles. L'ordonnance mérite que l'on y regarde de près et nous réservons notre décision sur le vote final.
J'irai dans le même sens que Philippe Dallier. Il m'intéresserait cependant d'avoir quelques précisions sur le mode de répartition du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP), dont le mode de calcul n'est pas simple, et qui était auparavant réparti par le département.
Y aura-t-il donc un projet de loi pour chaque métropole ? Verra-t-on naître un droit lyonnais, un droit toulousain, un droit marseillais, un droit bordelais... Et pourquoi pas, ensuite, un droit pour chaque région, pour chaque département - si les départements continuent d'exister...
Avez-vous relevé des éléments notables dans la répartition des ressources entre métropole et département pour cette année ?
Entre Philippe Dallier et Marie-France Beaufils, il est en effet quelques discordances, je ne puis qu'en prendre acte.
Pour la répartition de la compensation du FDPTP, le montant revenant à la métropole a été fixé à partir d'une moyenne des dernières années ; ce montant sera réparti par le conseil métropolitain et non plus par le conseil général.
Il est vrai, monsieur Requier, que l'on risque d'avoir un peu de sur-mesure. Mais hors cela, le droit commun reste la règle.
La question de M. Germain est pointue...
Si l'on s'en était tenu à la répartition entre région et département qui prévalait auparavant, le nouveau département du Rhône ne pourrait pas vivre. Comment a-t-on procédé ?
Cela a fait l'objet d'un consensus. Le point d'équilibre est atteint grâce à la dotation de 75 millions. Au terme de deux années de fonctionnement, on dressera un bilan.
Je reviens sur la dotation de 75 millions. Combien d'habitants comptera le nouveau département du Rhône ? Et quelle sera, au terme de ces deux années, sa viabilité ?
Une part de 70 % à 80 % des ressources de l'ancien département, qui comptait 1,7 million d'habitants, vont à la métropole de Lyon, qui en comptera 1,3 million, tandis que le département nouveau, qui comptera 471 000 habitants, pourra compter sur une dotation complémentaire de 75 millions d'euros.
La dotation est pérenne. Si des ajustements se révélaient nécessaires, la commission locale d'évaluation des charges serait appelée à s'y pencher.
Il s'agit de répartir des ressources entre la métropole et le département. Il n'y a donc pas d'impact en principe sur l'enveloppe normée. En revanche, se posera la question que j'ai soulevée s'agissant de la péréquation. Si le schéma retenu dans le Rhône se généralisait, il pourrait y avoir un impact.
Sur 100 départements, 60 sont ruraux, 40 urbains. Il est clair qu'une modification dans cette répartition changera la donne. Il faudra en mesurer les conséquences.
Définir ce que sont un département urbain et un département rural est délicat, sinon impossible. Dans les départements qui comptent une métropole, que restera-t-il du département ? Dans l'Isère, la région de Grenoble est un territoire très urbain, mais qu'adviendra-t-il du reste du département ?
Je suis sénateur de l'Isère et ne partage pas cette analyse. Il y a une grande métropole, mais tout le secteur du nord de l'Isère, vers Valence et la Drôme, reste rural. Pour assurer la solidarité territoriale, le département garde toute sa place.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
L'article unique est adopté sans modification.
L'amendement portant article additionnel après l'article unique est adopté et devient l'article 2.
Le projet de loi ainsi modifié est adopté.
La séance est suspendue à 9 h 40.
La séance est reprise à 10 h 06.
Enfin, la commission entend M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, président du Conseil des prélèvements obligatoires, sur l'étude réalisée par le Conseil des prélèvements obligatoires, à la demande de la commission des finances du Sénat en application de l'article L. 351-3 du code des juridictions financières, sur les réformes de l'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée (CSG).
Nous accueillons Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, en sa qualité de président du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO). En novembre 2013, à l'initiative de Philippe Marini et François Marc, la commission des finances du Sénat a sollicité l'expertise du CPO afin qu'il réalise, comme indiqué dans la lettre de saisine, « une étude relative à l'élargissement de l'assiette de l'imposition des revenus, en examinant la faisabilité technique et juridique d'une fusion des assiettes de l'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée (CSG) ». La mission du CPO est d'ordre technique ; il ne lui appartient pas de trancher la question de l'opportunité de la fusion des deux grands impôts sur le revenu. Il ne lui incombe pas davantage d'apprécier s'il convient de rendre notre système fiscal plus ou moins progressif mais il peut éclairer le débat par ses analyses et préciser « si cette fusion des assiettes de l'impôt sur le revenu et de la CSG pourrait permettre de faire évoluer le partage actuel entre l'imposition des revenus au taux proportionnel et l'imposition en fonction d'un barème progressif et, à défaut d'une fusion, dans quelle mesure un tel barème pourrait être appliqué aux revenus soumis à la CSG ». La discussion ne peut être circonscrite aux questions de principe, de philosophie ou de théorie fiscale. Ainsi, il a été demandé au CPO d'évaluer « les effets économiques et budgétaires des différentes hypothèses pouvant être envisagées dans ce cadre ainsi que leurs conséquences sur le financement de la protection sociale ». Ce dernier point est essentiel puisque la CSG constitue une ressource majeure de la sécurité sociale. Il justifie la présence aujourd'hui du rapporteur général de la commission des affaires sociales, Jean-Marie Vanlerenberghe.
Par ailleurs, je déplore la parution ce matin dans le journal Les Échos d'un article faisant état de manière anticipée des conclusions du rapport du CPO. Comme toutes les fuites, il nous sera difficile d'en retrouver l'origine. En tout état de cause, elle n'honore pas leurs auteurs et je remercie les journalistes présents qui, eux, ont attendu sa présentation officielle.
Je regrette comme vous cette fuite. Je présenterai les principales conclusions de notre rapport Impôt sur le revenu, CSG : quelles réformes ?, aux côtés de Catherine Démier, secrétaire générale du CPO, de Vincent Léna, rapporteur général de cette étude, ainsi que de certains des rapporteurs particuliers qui ont contribué à ce travail.
La mission confiée au CPO consistait à explorer les possibilités d'élargir l'assiette de l'imposition des revenus, à examiner la faisabilité technique et juridique d'une fusion des assiettes de l'impôt sur le revenu et de la CSG, et enfin à analyser l'impact de cette fusion sur le partage actuel de l'imposition des revenus entre un taux proportionnel, propre à la CSG, et un barème progressif qui est l'une des particularités de l'impôt sur le revenu. Enfin, à défaut de cette fusion, il était demandé au CPO d'étudier dans quelle mesure un barème progressif pourrait être appliqué aux revenus soumis à la CSG.
Le CPO a choisi de remettre un rapport présentant de nombreuses options ayant fait l'objet d'un consensus en son sein. Un grand nombre de pistes ont été ouvertes, dont certaines ne sont pas apparues souhaitables in fine. Le rapport proposé est en quelque sorte un « menu à la carte », d'où son titre qui, délibérément, vise des « réformes » au pluriel.
Notre système d'imposition des revenus, modelé par une longue histoire, a vieilli, et il est devenu peu lisible. Le rendement de l'impôt sur le revenu s'est affaibli, avec toutefois un ressaut constaté depuis 2010. Sa base est étroite, vu les nombreuses dépenses fiscales qui l'affectent et le nombre de foyers qui n'y sont pas assujettis. Quant à la CSG, son taux proportionnel est passé de 1 % en 1991 à 7,5 % pour les revenus d'activité, sans compter les autres prélèvements sociaux. Dès 1998, le produit de la CSG a dépassé celui de l'impôt sur le revenu. Chacune de ces deux impositions a sa logique propre ; leur dualité aboutit à un système de prélèvements sur les revenus des ménages peu compréhensible et dont l'acceptabilité devient problématique. Ce système est si peu lisible qu'il est courant d'entendre dire que moins de la moitié des Français paient des impôts sur leur revenu. En réalité, presque tout le monde en acquitte, au travers de la CSG.
La progressivité globale du système socio-fiscal s'est réduite du fait de la diminution de la part relative de l'impôt sur le revenu dans l'ensemble des prélèvements obligatoires sur les personnes. Il faut d'ailleurs noter que la progressivité de l'impôt sur le revenu s'infléchit dans le dernier centile des revenus et s'inverse pour le dernier millime, soit 4 000 foyers environ, ce qui est toutefois compensé par l'assujettissement des revenus du capital aux prélèvements sociaux, au taux de 15,5 % depuis le 1er juillet 2012. Contrairement à ce que l'on pense généralement, la CSG comporte une certaine dose de progressivité : elle a remplacé des cotisations qui étaient dégressives ; elle comprend des exonérations ou des taux réduits sur les revenus de remplacement ; elle n'est que partiellement déductible des revenus imposables ; enfin des taux plus élevés sont appliqués aux revenus du patrimoine, détenus généralement par les ménages aisés. Mais ces taux se différenciant en fonction des types de revenus concernés et non de leur niveau, cette progressivité reste limitée. Au demeurant, si la fiscalité des revenus reste globalement progressive, c'est davantage par les prestations sociales que par les prélèvements que s'opère la redistribution.
Une réforme, souhaitable, de l'imposition des revenus suppose le respect d'un certain nombre de principes. Il faut d'abord exclure une imposition individualisée qui ne tiendrait pas compte du caractère conjugal et familial des revenus. Dans notre système, le quotient conjugal prend en compte la capacité contributive au niveau du foyer, tandis que le quotient familial assure une redistribution horizontale en allégeant les charges de famille liées aux enfants. Une fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG devrait respecter ce principe.
En outre, sur le fondement de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le Conseil constitutionnel a posé le principe du caractère progressif de l'imposition des revenus des personnes physiques. Dès lors, un impôt unique résultant d'une fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG, sans barème progressif - autrement dit une flat tax - serait inconstitutionnel. Si la CSG peut comporter un taux proportionnel, propre à chaque catégorie de revenus, c'est en raison de l'existence parallèle d'un impôt sur le revenu progressif. Il serait donc également impossible, soit de réduire trop fortement la progressivité de l'impôt sur le revenu ou son rendement, soit d'augmenter trop sensiblement le taux proportionnel de la CSG.
Il conviendrait aussi de modérer les effets de seuil qui affectent les bas revenus, lorsqu'ils entrent dans le barème de l'impôt sur le revenu. En effet, un ménage qui y devient assujetti perd brutalement un certain nombre d'avantages - par exemple l'exonération de la redevance audiovisuelle et de la taxe d'habitation - et voit ses prestations sociales fortement diminuer, en particulier les aides au logement.
Enfin, toute réforme affectant la CSG devrait garantir qu'une part significative de son produit demeurera affectée à la sécurité sociale.
La réforme du système d'imposition des revenus a fait l'objet de nombreuses réflexions parlementaires, académiques ou administratives. En qualité de membre de la commission des finances de l'Assemblée nationale, j'ai présenté en 2007 un rapport sur la fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG. Je citerai aussi le rapport inter-administratif transmis au Parlement en 2012 sur les conditions de faisabilité de la fusion entre ces deux impôts et l'ouvrage collectif Pour une révolution fiscale, paru en 2011. À partir des travaux existants, le CPO a examiné deux scénarios de fusion, c'est-à-dire de création d'un impôt unique, soit à partir d'un impôt sur le revenu rénové, soit à partir d'une CSG rendue progressive. Une voie médiane a également été explorée.
L'absorption de la CSG dans un grand impôt sur le revenu suppose de corriger préalablement les défauts les plus marqués de l'impôt sur le revenu actuel, c'est-à-dire son assiette mitée, sa concentration et son mode de perception décalé.
Il conviendrait d'harmoniser l'assiette de l'impôt sur le revenu avec celle de la CSG et de la dizaine de taxes qui lui sont associées : la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA), le prélèvement social... Une difficulté provient de ce que l'impôt sur le revenu est assis sur le revenu net global, alors que la CSG est assise sur le revenu brut catégoriel. Il faudrait aussi définir des modalités nouvelles de prise en compte du quotient conjugal et des charges d'éducation grâce à des techniques fiscales telles que des abattements, des réductions ou des crédits d'impôt. La fusion des impôts devrait conduire à diminuer le poids et le nombre des niches fiscales. Enfin, les modalités différentes de recouvrement de l'impôt sur le revenu, de la CSG et de ses taxes additionnelles posent la question de la généralisation de la retenue à la source.
La fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG entraînerait des transferts de charge importants entre contribuables. Toute réforme fiscale d'envergure, même à prélèvements constants, crée des gagnants et des perdants puisqu'il s'agit précisément de répartir autrement la charge de l'impôt. Elle engendre aussi des « coûts de transition ». Le législateur a toutefois la faculté de prévoir des compensations partielles ou temporaires, telles que l'étalement de la charge de double imposition correspondant à l'année de transition, la réduction progressive des dépenses fiscales, ou l'échelonnement de la charge financière pour ceux qui y perdent le plus. Dans le contexte budgétaire actuel, le CPO considère qu'une fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG est possible mais serait plus facilement envisageable à l'issue d'un processus progressif de rapprochement des règles et de l'assiette des deux impôts.
Le deuxième scénario consisterait à créer une imposition unifiée sur la base d'une CSG progressive. Si la mise en place d'une CSG comportant un barème progressif pour tous les revenus ne soulève pas de difficultés insurmontables, la nécessité d'une familialisation et l'impossibilité de faire disparaître toutes les niches fiscales ne permettent guère d'envisager la disparition totale de l'impôt sur le revenu. Il serait possible, pour prendre en compte les capacités contributives du foyer, de créer des abattements correspondant aux charges familiales mais cela remettrait en cause la simplicité du mode de calcul et de prélèvement de la CSG. La question des niches fiscales et des avantages accordés à certaines professions ne se poserait pas moins que dans le scénario précédent. Le nouvel impôt devrait, lui aussi, être prélevé à la source.
À la question posée par votre commission de savoir si l'instauration d'une CSG progressive constitue une alternative à une fusion sur la base de l'impôt sur le revenu, le CPO montre que cette voie est complexe et plutôt difficile.
Reste une voie médiane. À défaut d'une réforme radicale, on pourrait, sans remettre en cause la dualité de notre système d'imposition des revenus, lui donner une plus grande lisibilité grâce à un ensemble cohérent de réformes, opérées à prélèvement constant. Parmi ces pistes, l'élargissement de la base de l'impôt sur le revenu constitue une priorité : le CPO recommande de supprimer un nombre significatif des 190 dépenses fiscales qui réduisent le rendement de cet impôt de 34 milliards d'euros. Des objectifs chiffrés pourraient être fixés, par exemple une réduction de 10 % par an de leur montant.
Autre piste : l'imposition contemporaine des revenus. Le décalage dans le temps du paiement de l'impôt pénalise les contribuables les plus modestes et ceux qui connaissaient de fortes variations de revenus. Il présente des inconvénients pour le pilotage de la politique macro-économique. Le CPO suggère que, parallèlement aux montants de CSG précomptés chaque mois sur les salaires, les contribuables paient des acomptes d'impôt sur le revenu au titre des revenus de l'année en cours, avec une régularisation en septembre de l'année suivante. On rapprocherait ainsi l'impôt sur le revenu de la CSG. Des mesures devraient être prises pour lisser les effets de l'année de transition.
D'autres possibilités ont été explorées dans le rapport : imposition individuelle optionnelle à l'impôt sur le revenu, plafonnement du quotient conjugal à l'instar du quotient familial, adaptation de la fiscalité des familles et réexamen de certaines demi-parts... Je n'évoquerai que les sujets les plus importants.
Tout d'abord, ne faudrait-il pas rendre la CSG universelle et plus progressive ? Aujourd'hui, les retraités ou les chômeurs modestes bénéficient d'une exonération ou d'un taux réduit de CSG. L'instauration d'une CSG minimale, au taux de 1 % par exemple, renforcerait la cohésion sociale puisque tout le monde paierait un impôt, même symbolique, sur le revenu. Les allocations correspondantes seraient augmentées à due concurrence. L'autre piste serait de faire bénéficier du taux réduit de CSG les revenus modestes des salariés. Pour aller dans le sens de l'universalité, pourquoi ne pas fusionner les taxes additionnelles à la CSG, à savoir la CSA, la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (CASA), les prélèvements sur les revenus du patrimoine ?
À l'origine, la CSG n'était pas déductible, en application de la règle fiscale selon laquelle les impôts de même nature ne sont pas déductibles entre eux. La déductibilité partielle de la CSG est un avantage fiscal qui va croissant au fur et à mesure que les revenus s'élèvent. Elle ne bénéficie guère aux ménages modestes et pas du tout à ceux qui ne paient pas l'impôt sur le revenu. Elle est source de confusion et empêche une articulation claire entre l'impôt sur le revenu et la CSG. Selon une simulation, la non-déductibilité totale de la CSG aurait accru en 2014 le rendement de l'ensemble de l'imposition sur le revenu de 11,2 milliards d'euros. Le CPO ayant fait le choix de raisonner à rendement constant, la généralisation de la non-déductibilité pourrait être neutralisée, soit par une réforme du barème de l'impôt sur le revenu, soit par une baisse des taux de la CSG, par exemple de 7,5 % à 6,6 % pour son taux normal sur les revenus d'activité.
Enfin, le CPO s'est attaché à rechercher une meilleure cohérence du système socio-fiscal pour les bas revenus. L'un des moyens de lisser les effets de seuil serait de mettre en place un système de « sortie en sifflet » de chaque mesure fiscale ou sociale en faveur des revenus modestes. Le recours au revenu fiscal de référence, qui reflète plus fidèlement la capacité contributive du foyer que la cotisation d'impôt sur le revenu ou la non-imposabilité, pourrait être généralisé.
Le panorama des réformes envisageables pour corriger les défauts de l'imposition des revenus en France est vaste, et je veux terminer par quelques considérations de méthode. Si toute réforme fiscale d'envergure entraîne des transferts de charges entre ménages, il est possible de les amortir ou de les étaler dans le temps : un « filet fiscal » garantirait ainsi qu'à revenu inchangé, le niveau d'imposition n'augmenterait pas sensiblement d'une année à l'autre. Les exemples étrangers nous enseignent aussi que la préparation et la mise en oeuvre des réformes doivent être étalées sur plusieurs années.
Ce rapport est particulièrement bienvenu en ce centenaire de la réforme Caillaux instaurant l'impôt sur le revenu. En cent ans, le système fiscal français est devenu toujours plus complexe. La commission des finances a saisi le CPO alors que le Premier ministre Jean-Marc Ayrault annonçait une « remise à plat » de la fiscalité restée lettre morte, puisque les conclusions du groupe de travail sur la fiscalité des ménages ont été très modestes. Le gouvernement Valls s'est finalement contenté de supprimer la première tranche de l'impôt sur le revenu et d'amplifier le mécanisme complexe de la décote. Le rapport du CPO montre combien il serait difficile de fusionner l'impôt sur le revenu et de la CSG. Il lève en revanche certains tabous, rappelant par exemple que, contrairement à une idée répandue, la CSG est bel et bien progressive, puisqu'elle comprend des taux différenciés et que certains revenus en sont exonérés.
Vous appelez, Monsieur le Premier président, à rapprocher les assiettes de l'impôt sur le revenu et de la CSG. Pour quelles catégories de revenus serait-ce le plus simple et pour lesquelles serait-ce le plus complexe ?
Le CPO avance l'idée d'un taux minimum de CSG pour tous, 1 % par exemple, afin de renforcer l'universalité de cette imposition. Avez-vous évalué les conséquences financières d'une telle mesure ?
Vous préconisez aussi la non-déductibilité intégrale de la CSG, ce qui exigerait des compensations. La part déductible de la CSG étant déjà prépondérante, ne serait-il pas plus simple et plus logique de la rendre intégralement déductible, dans la mesure où les hausses de la CSG sont venues remplacer des cotisations sociales ?
Quelle forme prendrait exactement l'imposition contemporaine des revenus, à défaut d'un prélèvement à la source ?
Je partage l'essentiel du constat formulé dans le rapport s'agissant du système actuel d'imposition sur le revenu. Il offre, par ailleurs, de nombreuses pistes de réflexion, qui nous seront précieuses alors que les rentrées fiscales de l'impôt sur le revenu diminuent de façon inquiétante - j'ai d'ailleurs adressé au ministère de l'économie et des finances un questionnaire portant notamment sur les recettes d'impôt sur le revenu, en vue d'une audition en commission le 11 février prochain.
Le rapport du CPO démontre la difficulté qu'il y a à fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG. Je suis moi-même parvenu à la même conclusion : une telle réforme, qui aurait un intérêt en termes de rendement, s'opposerait à la justice fiscale. Vous suggérez de revoir le taux de la CSG sur les revenus de remplacement : nous avons déjà eu ce débat lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2015. Est-il exact de dire que les prélèvements et les prestations font système, alors que certaines prestations sociales ne sont pas contributives, et que la part fiscale du financement de la sécurité sociale augmente ?
Vous avez évoqué, Monsieur le Premier président, la question des quotients familial et conjugal. Existe-t-il des pays qui ont abandonné l'imposition familiale pour un impôt individualisé ? Un récent rapport de Catherine Coutelle, au nom de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, a souligné que le quotient conjugal a un rôle « désincitatif » en décourageant les femmes de travailler. Qu'en pense le CPO ? Un plafonnement suffirait-il à corriger cet effet pervers ?
Votre rapport évoque enfin l'idée, fort originale, de valoriser le travail domestique via un « revenu fictif », afin de prendre en compte le niveau de vie réel des ménages. Des pays étrangers se sont-ils engagés dans cette voie ?
La différence d'assiette entre l'impôt sur le revenu et la CSG constitue l'un des obstacles les plus importants à leur fusion. Certains s'y opposent même parce qu'ils craignent que le mitage de l'impôt sur le revenu ne s'étende à la CSG... Je ne peux donc que vous inciter à poursuivre le travail d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, afin de rapprocher les bases. Une des différences d'assiette réside également dans la prise en compte des frais professionnels. S'agissant de la CSG, le taux de l'abattement a déjà été sensiblement réduit pour s'établir à 1,75 % ; il serait difficile d'aller en-deçà.
Le CPO raisonne sur la base d'un rendement fiscal constant. De ce point de vue, rendre la CSG universelle en créant un taux minimal supposerait des compensations.
Il est plus simple de rendre la CSG non déductible, quitte à diminuer son taux ou celui de l'impôt sur le revenu, que de prévoir sa déductibilité intégrale, laquelle renforcerait la complexité du dispositif et atténuerait la progressivité de l'impôt sur le revenu.
Quant à la redistribution, de nombreux travaux démontrent qu'elle est davantage assurée en France par les prestations que par l'imposition, dans un ratio de 60 à 40. Notre système est globalement redistributif : il assure une diminution des inégalités de 40 % entre les 10 % de ménages les plus aisés et les 10 % les plus modestes. La France est ainsi l'un des pays qui assure la plus forte redistribution, comme le CPO l'avait montré dans un rapport de 2010 sur la progressivité des prélèvements obligatoires sur les ménages.
La plupart des pays comparables à la France pratiquent le paiement individualisé de l'impôt. Si le Conseil constitutionnel exige que l'on prenne en compte les revenus du foyer et sa composition, les quotients conjugal et familial pourraient être remplacés par des abattements ou des crédits d'impôt. Je vous renvoie à notre rapport pour prendre connaissance des exemples étrangers auxquels nous faisons référence.
Le CPO n'a pas retenu la piste d'une valorisation du travail domestique, pas plus que celle des loyers fictifs pour les propriétaires, qui sont présents dans le débat public. De tels mécanismes ajouteraient à la complexité et poseraient un problème de pédagogie évident.
L'imposition contemporaine n'implique pas le prélèvement à la source ; elle peut se faire sans tiers payeurs, et s'appliquer aussi aux revenus non salariaux. Reste le problème de l'« année blanche », pour passer de l'année n-1 à l'année n et dont le coût est chiffré dans le dernier rapport du CPO entre 5 et 10 milliards d'euros, liés à la prise en considération des dépenses fiscales. Le contexte budgétaire contraint réduit notre capacité à faire des réformes de ce type.
Vous avez exclu l'hypothèse d'une flat tax, en vous appuyant sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Le débat sur le mode de perception de l'impôt sur le revenu est-il toujours d'actualité, alors que la déclaration pré-remplie et la mensualisation ont grandement facilité son recouvrement ?
Vous avez mentionné l'universalité de l'impôt. Quid des revenus sociaux ? N'est-ce pas un élément de citoyenneté de payer des impôts ? Certains cumulent ainsi, sans être imposés, plus de revenus que d'autres par leur travail. Ne faudrait-il pas y mettre bon ordre, au lieu de diminuer toujours le nombre de redevables de l'impôt sur le revenu ?
Les dépenses fiscales liées à l'impôt sur le revenu représentent 34 milliards d'euros : c'est beaucoup. Les réductions au titre des dons pourraient gagner en lisibilité. Comment lutter contre la fraude qui existe toujours, malgré les nouveaux modes de déclaration ?
L'une des conclusions de votre rapport est que l'imposition gagnerait en lisibilité si l'impôt sur le revenu était débarrassé d'un bon nombre de niches fiscales. Mais la première maxime que j'ai apprise en arrivant dans cette commission, c'est que chaque niche fiscale est gardée par un chien féroce ! Le CPO a-t-il des propositions à faire en cette matière ?
Pourquoi ne pas mettre en place une flat tax, c'est-à-dire impôt à taux unique appliqué à tous les contribuables, dont on ignore souvent qu'il fut inventé par Vauban, sous la forme d'une dîme royale ? La flat tax a été établie avec bonheur en Russie à 13 %, à Hong Kong à 11 %, à Singapour, dans les pays de l'Est et certains États des États-Unis. En France, la CSG rapporte plus que l'impôt sur le revenu dont le taux est progressif ! C'est dans ce type de cas que la baisse des impôts augmente les recettes, à condition que tout le monde paie et dans la mesure où les fraudes diminuent. Un pallier pourrait également être créé pour ceux qui ne payaient pas d'impôt sur le revenu. On augmenterait ainsi le niveau de vie de tout le monde, on stimulerait l'investissement et l'embauche, on résoudrait enfin nos problèmes de croissance et d'emploi ! Sans compter qu'avec un taux unique de 10 %, l'impôt sur le revenu rapporterait 100 milliards d'euros au lieu de 69, auxquels s'ajouteraient 30 à 40 milliards d'euros si l'on supprimait les niches fiscales.
Bercy a fait des progrès incontestables dans le recouvrement de l'impôt sur le revenu. Dans notre rapport sur la retenue à la source, nous avons montré que, compte tenu de ces progrès, la mise en place de ce mode de perception n'aurait pas un grand intérêt si elle n'était accompagnée d'une réforme d'ampleur. Le problème principal reste que les contribuables payent l'impôt sur leurs revenus de l'année précédente, même s'ils peuvent demander à moduler les prélèvements.
La fusion entre l'impôt sur le revenu et la CSG répondrait à votre souci, Monsieur Doligé, de rendre l'impôt universel. Mais cela nécessite des travaux préalables ; il ne suffit pas d'appuyer sur un bouton.
Les dépenses fiscales représentent 34 milliards d'euros. Nous pouvons les identifier, en estimer le coût, mais c'est au législateur de choisir leur sort. Les réductions au titre des dons représentent 1,5 milliard d'euros - ce n'est pas rien ! La fraude à l'impôt sur le revenu peut exister même si elle est difficilement chiffrable. Mais un gros travail a été fait, et ce n'est pas forcément sur cet impôt que la fraude est la plus importante - je pense à la TVA intracommunautaire, par exemple.
Encore une fois, il n'appartient pas au CPO ou à la Cour des comptes de désigner les niches fiscales à supprimer : nous pouvons seulement en évaluer l'efficience, qui n'est pas toujours démontrée. La culture de l'évaluation reste insuffisante dans notre pays. Les résultats de bien des politiques publiques au regard de leur coût ne sont pas satisfaisants.
Oui, ou la formation professionnelle. Chacun sait que ce sont les plus éloignés de l'emploi qui en profitent le moins, ce qui est pour le moins problématique...
La flat tax se heurterait à la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel concernant l'interprétation de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et du préambule de 1946 - nous vous ferons parvenir à ce sujet un rapport particulier très éclairant de Jean-Luc Matt. Si le Conseil constitutionnel a admis le caractère proportionnel de la CSG, c'est parce que l'impôt sur le revenu apportait suffisamment de progressivité.
Oui, bien sûr.
Je suis surpris que l'on discute encore de l'opportunité d'un impôt universel sur le revenu : n'était-ce pas l'une des propositions de campagne du Président de la République ? En n'honorant pas ses promesses, on entretient la défiance des citoyens vis-à-vis du monde politique.
Monsieur le Premier président, vous avez à peine effleuré la question de l'entrée dans le barème de l'impôt sur le revenu. Notre fiscalité est trop concentrée, et cela contribue d'ailleurs à expliquer que l'impôt sur le revenu ait rapporté 6 milliards de moins en 2014, par rapport à la prévision initiale. Et l'on vient encore de supprimer sa première tranche, pour un coût de 3,5 à 3,7 milliards d'euros, soit exactement ce qu'on ôte aux collectivités territoriales en 2015 ! Ce choix est-il bien judicieux ?
Sur ce sujet, je me souviens d'une phrase du président Mitterrand, comparant la conduite automobile et celle des affaires publiques : « Par temps de verglas, je déconseille de freiner fortement. » Je me félicite quant à moi de ce coup de frein subtil que propose ce rapport. Le CPO recommande ainsi « un ensemble de réformes plutôt qu'une réforme d'ensemble », qui serait plus acceptable pour la société. Il a raison : les Français n'attendent pas une révolution fiscale, qui ne serait d'ailleurs possible qu'en début de mandat.
Ce rapport illustre toute la difficulté du travail parlementaire : la presse commente déjà le rapport et nous n'en prenons connaissance qu'en arrivant en commission... J'ai tout de même noté vos trois grandes préconisations : l'imposition contemporaine des revenus, l'universalisation de la CSG et la suppression de sa déductibilité. L'imposition contemporaine présente bien des difficultés, mais globalement, les Français la souhaitent. Pourquoi reculer ? Pour la plupart des foyers, l'année de transition ne poserait pas de problème : beaucoup peuvent supporter une hausse temporaire de 1 000 euros, voire de 2 000 euros de leur impôt. Pour les autres, il ne serait nullement contraire à l'équité fiscale de prévoir un régime différencié, progressif. On pourrait envisager un décalage d'un trimestre par an sur quatre ans. N'oublions pas que l'impôt sur le revenu ne constitue qu'une part relativement faible de nos prélèvements obligatoires.
Les réflexions du CPO rejoignent, sur de nombreux points, les débats que nous avions eus dans le cadre du groupe de travail sur la fiscalité des ménages. Vous avez évoqué la question des niches fiscales ; y a-t-il d'autres raisons au faible rendement de l'impôt sur le revenu ? Ne pourrait-on pas améliorer la progressivité de l'impôt, pour plus de justice fiscale ? Pas plus que Jean Germain, je n'ai pu prendre connaissance du rapport avant cette réunion, mais j'ai lu Les Echos... La transformation des cotisations sociales en une imposition de plus en plus lourde m'inquiète pour l'avenir du financement de la protection sociale, qui serait menacée par l'absence de ressources dédiées.
Le montant de 5 à 10 milliards d'euros pour le coût de l'« année blanche » est-il fiable ? Peut-il s'étaler ? Comment absorber un tel montant ?
L'universalité de l'impôt est un principe essentiel et notre devoir est d'ailleurs de simplifier la vie de nos concitoyens, de simplifier notre législation comme notre système fiscal. C'est pour cela que j'étais favorable à la fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG. Même si j'entends bien les difficultés, je pense qu'il faudra avancer sur ce sujet. J'ai en revanche plus de mal à comprendre la non-déductibilité de la CSG, qui équivaut à faire payer de l'impôt sur l'impôt.
La flat tax existe dans de nombreux pays, notamment la zone euro. L'impôt progressif est une idée ancienne, puisqu'il s'agit de la deuxième proposition du Manifeste du parti communiste de 1848. S'y opposer fait aussi passer aujourd'hui pour une position libérale, voire ultralibérale.
Je voudrais aborder la question de l'universalité de l'impôt. Lorsque l'impôt sur le revenu dû par un foyer n'excède pas 61 euros, il n'est pas recouvré. Combien de contribuables sont-ils concernés ? J'ai proposé, à plusieurs reprises, un amendement pour m'opposer à cette pratique : c'est un honneur de payer l'impôt. Les impôts locaux sont d'ailleurs recouvrés en-dessous de cette somme ; alors comment comprendre l'argument de l'administration, selon laquelle cela coûterait trop cher de recouvrer l'impôt sur le revenu en-dessous de ce seuil ? Ma position n'est ni réactionnaire, ni ultralibérale. Que penseriez-vous si M. Dassault, à force de niches fiscales, en venait à réduire son impôt sur le revenu à 60 euros, qui ne seraient donc pas prélevés ?
Ne serait-il pas plus difficile de s'atteler à la réforme de l'impôt sur le revenu sans passer par une revue d'ensemble de notre système fiscal, qui est à considérer comme un tout ? En finances publiques, tout se tient ; et nous aurions bien besoin d'un nouveau pacte de « vivre-ensemble » fiscal.
Le Premier président de la Cour des comptes ou le président du CPO n'a pas à commenter les programmes politiques ni les décisions souveraines prises par le Parlement, comme la suppression de la première tranche de l'impôt sur le revenu. La Cour des comptes appréciera les conséquences de cette dernière mesure ; mais elle ne veut pas se hausser au-dessus de la condition qui est la sienne.
L'entrée dans le barème de l'impôt sur le revenu représente un vrai choc pour certains contribuables, compte tenu des avantages qu'ils perdent ainsi. Certes, la suppression d'une tranche concentre l'impôt sur les autres contribuables. Toutefois le rendement de l'impôt sur le revenu a plutôt augmenté ces dernières années, grâce à la remise en cause de niches fiscales, de certaines demi-parts, du fait de la création d'une tranche à 45 % et de l'élargissement de l'assiette.
Je regrette moi aussi la fuite des conclusions du rapport dans Les Échos, indépendante bien sûr de la volonté du CPO ; il est certes difficile de découvrir un tel rapport le jour même - mais nous pouvons revenir pour répondre à vos questions. L'imposition contemporaine est selon le CPO une piste intéressante, peut-être souhaitée par nos concitoyens, sûrement souhaitable. Comme je l'ai dit, elle n'implique pas de mettre en place un prélèvement à la source, qui poserait un problème de confidentialité, ferait peser une charge sur les entreprises, et supposerait que l'on décide qui, des Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) ou de la direction générale des finances publiques (DGFiP), serait chargé du recouvrement. Reste la question de l'année de transition, les niches fiscales soulevant le problème le plus épineux : il en coûterait 5 à 10 milliards d'euros pour ne pas modifier le comportement des contribuables. Les effets du passage à l'imposition contemporaine peuvent aussi être lissés sur plusieurs années, et un « filet fiscal » pourrait empêcher que certains ménages ne voient trop brusquement augmenter leurs impôts.
Le CPO insiste sur la nécessité, en cas de fusion, de sanctuariser la part à destination de la protection sociale.
La question de la déductibilité de la CSG se pose depuis l'origine. La non-déductibilité s'est imposée, puisque la CSG n'est pas considérée comme une cotisation mais fait partie des « impositions de toutes natures ». Une déductibilité intégrale aurait des incidences sur le sens de la progressivité de l'impôt.
S'agissant d'une flat tax, il ne m'appartient pas de commenter la jurisprudence du Conseil constitutionnel. En revanche, monsieur Houpert, il convient de mettre en regard le coût de recouvrement d'un impôt et ce qu'il rapporte : si Bercy, qui raisonne en rendement, a pris cette décision, ce doit être pour de bonnes raisons. Certes, d'autres impôts sont recouvrés même si leur montant est inférieur - mais ils le sont parfois à la source et donc à un coût bien inférieur. Le renforcement de l'universalité de la CSG répondrait à votre préoccupation.
Sans doute la question de l'impôt sur le revenu doit-elle être appréhendée dans un contexte plus global, monsieur Guené. Mais toute réforme nécessite du temps et des étapes certaines - pouvant être franchies sans plus attendre, comme celles que nous vous proposons, préalables nécessaires à une réforme plus globale.
À défaut de flat tax, ne pourrait-on pas fixer le taux maximal à 30 %, supprimer les niches fiscales et faire payer des impôts à tous ?
Vous devez soumettre cette proposition au Parlement : il n'appartient ni au CPO, ni à la Cour des comptes de prendre ce genre de décision. Certes, l'équité exige que tous soient concernés par l'impôt ; mais la CSG, qui est une imposition sur le revenu, est payée par plus 90 % des Français.
L'idée d'une imposition contemporaine des revenus est intéressante, mais attention à ne pas remettre en cause, pour l'année de transition, des déductions fiscales comme celle qui bénéficie à l'emploi à domicile. Nous savons quelles en seraient les conséquences. Il y a des solutions pour que la transition ne soit préjudiciable ni au rendement de l'impôt, ni au contribuable.
Vous proposez de fusionner la CSA et la CASA : j'en avais moi-même fait la suggestion au Gouvernement, dans un souci de lisibilité, mais on ne voulait manifestement pas faire contribuer de la même façon les retraités et les autres. Y a-t-il des obstacles autres que politiques à la fusion des cinq prélèvements sociaux sur les revenus du capital ?
Techniquement, ce n'est pas très compliqué. Le cas de la CRDS est différent, car c'est une imposition censément temporaire...
Que pensez-vous de l'idée d'inclure les prestations sociales dans l'assiette de l'impôt sur le revenu ?
Cela relève essentiellement du débat politique.
Des études existent à ce sujet.
Merci de ces éclaircissements. Nous réfléchirons à de nouvelles modalités de transmission des rapports du CPO, afin que nos collègues puissent en prendre connaissance en temps utile.
La réunion est levée à 12 h 00.