La réunion

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Au cours d'une première séance tenue le matin, la commission procède tout d'abord à l'examen des amendements sur la proposition de loi n° 802 (2013-2014) relative à la prise en compte par le bonus-malus automobile des émissions des particules fines et d'oxydes d'azote et à la transparence pour le consommateur des émissions de polluants automobiles.

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 1 réécrit l'article 1er. Même s'il va dans le bon sens par rapport à la rédaction initiale de l'article, j'y suis défavorable : il alourdit la fiscalité sur la quasi-totalité des véhicules, y compris les plus vertueux, et construit la taxe sur les particules comme une majoration du malus lié au carbone, alors qu'il n'y a pas de corrélation entre les deux types d'émissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Je m'interroge sur l'équilibre financier de ce dispositif : d'expérience, les systèmes de bonus et malus sont souvent mal équilibrés et nécessitent un rattrapage de financement sur l'année suivante. La recette, ici, a-t-elle été évaluée correctement ? Dispose-t-on de données précises sur la structure du parc ? Existe-t-il encore des véhicules qui ne respectent pas la norme euro 1 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Je ne dispose pas de ces données. Cependant, il n'y a pas de prime, mais un simple malus : il n'y a pas d'équilibre à rechercher...

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 1.

Articles additionnels après l'article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 4 alourdit la fiscalité des entreprises et en particulier des petits artisans et commerçants. Et sur la forme, il serait plus judicieux de placer cette mesure fiscale dans la loi de finances : Chantal Jouanno pourra le faire cette semaine. Retrait ou avis défavorable.

La commission demandera le retrait de l'amendement n° 4 et à défaut, y sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 7 rend plus facile le recours au péage urbain pour les collectivités territoriales. Cependant l'article 1609 quater A du code général des impôts prévoit déjà une autorisation par décret en Conseil d'État ; la procédure actuelle me semble correctement encadrée et protectrice des collectivités. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission demandera le retrait de l'amendement n° 7 et à défaut, y sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 6 aligne d'ici 2020 la fiscalité du gazole sur celle de l'essence. Ce ne me semble pas pertinent alors que la taxation du gazole est déjà en hausse dans la loi de finances pour 2015, après la prise en compte implicite d'une composante CO2 dans la fixation de la taxe intérieure de consommation en 2014. Là encore, cette mesure aurait plus sa place dans une loi de finances. Retrait ou rejet.

La commission demandera le retrait de l'amendement n° 6 et à défaut, y sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 5 porte le taux de la taxe générale sur les activités polluantes sur les émissions d'oxyde d'azote (TGAP-air) de 160,8 à 500 en 2017 et 1 000 en 2019. Certes, le sujet est important. Mais avant de voter une hausse de 521 % sur deux ans, une étude d'impact serait bienvenue ! La TGAP-air a déjà été durcie en 2014. Pardon de me répéter : l'amendement est à présenter en loi de finances. Retrait ou avis défavorable.

La commission demandera le retrait de l'amendement n° 5 et à défaut, y sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 3 prévoit une tarification préférentielle sur les autoroutes pour les véhicules les moins polluants. Cela rendrait encore plus complexe la renégociation par l'État des conventions avec les sociétés concessionnaires... Cette idée intéressante se heurterait également à des difficultés techniques. Retrait ou rejet.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

La matière est soumise à la réglementation européenne.

La commission demandera le retrait de l'amendement n° 3 et à défaut, y sera défavorable.

Article 3

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'amendement n° 2 reprend une disposition inscrite à l'article 17 bis du projet de loi de transition énergétique, que nous examinerons prochainement. Inutile de doubler la navette ! Avis défavorable.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 2.

Puis la commission procède à l'examen du rapport de M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, sur la mission « Égalité des territoires et logement » (et articles 52 à 54).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

La mission « Égalité des territoires et logement » est très importante, à la fois parce qu'elle est au coeur des préoccupations des Français, et parce qu'elle représente 13 milliards d'euros de crédits budgétaires - et presque autant de dépenses fiscales. Le programme 147 « Politique de la ville » a quitté le présent budget pour rejoindre la mission « Politique des territoires » ; ce nouveau changement de maquette est regrettable, même si la création du Commissariat général à l'égalité des territoires est une bonne chose.

Le Gouvernement affiche toujours un objectif de 500 000 nouveaux logements par an, dont 150 000 logements sociaux à l'horizon 2017. Or nous sommes loin du compte avec, en septembre dernier, 391 000 logements autorisés et 301 758 mis en chantier sur les douze derniers mois, soit des baisses respectives de 12,5 % et 11,7 % par rapport aux douze mois précédents, qui creusent encore la tendance observée en 2013. L'Union sociale pour l'habitat (USH) estime que 93 000 logements sociaux ont été financés en 2014 sur les 135 000 prévus - les 15 000 autres se répartissant entre les opérations ANRU et l'outre-mer. La conjoncture demeure très morose pour le secteur de la construction, qui avait perdu 27 000 postes en un an à fin juin 2014.

Bien tardivement, le 29 août 2014, le Gouvernement a annoncé un plan de relance de la construction de logements visant à libérer du foncier, à relancer la construction de logements neufs et la réhabilitation de l'ancien, par des mesures concernant la plus-value immobilière sur les terrains à bâtir ou le prêt à taux zéro (PTZ) ; le dispositif « Pinel » remplace le « Duflot », qui ne fut pas un grand succès.

Le volume des autorisations d'engagement comme des crédits de paiement progresse : ceux-ci passent respectivement de 7,8 à 13,66 milliards d'euros, et de 7,626 à 13,427 milliards d'euros, non en raison d'une flambée de la dépense, mais essentiellement d'un changement de périmètre du financement des aides personnalisées au logement. À périmètre constant : l'augmentation est beaucoup plus faible avec environ 100 millions d'euros. Seront-ils suffisants ? Les dépenses de guichet sont par nature difficilement maîtrisables et très liées à la conjoncture.

La programmation pluriannuelle 2015-2017 prévoit une augmentation des crédits de 111 millions d'euros en 2016, puis une baisse de 158 millions d'euros en 2017, ce qui peut surprendre, au regard des ambitions politiques affichées et de la situation économique du pays. Le Gouvernement les justifie cependant par deux mesures d'économies importantes : un nouveau mode de prise en compte des ressources des allocataires d'aides personnelles au logement, économisant 296 millions d'euros en 2016 et 456 millions d'euros en 2017 ; la suppression des aides personnelles au logement « Accession », censée économiser 91 millions d'euros en 2016 et 156 millions d'euros en 2017.

Au 1er janvier 2016 devrait pourtant entrer en vigueur la garantie universelle des loyers, dont on ne sait toujours pas ce qu'elle deviendra : même si le Gouvernement a peu communiqué sur la question, il y a lieu de croire qu'elle disparaîtra et sera remplacée par d'autres mesures comme la caution locative pour les étudiants. Si tel n'était pas le cas, la garantie représentant un coût de 400 à 500 millions d'euros, on serait fondé à s'interroger sur la sincérité des comptes...

Malgré des moyens renforcés, avec une augmentation de 4,5 %, soit près de 60 millions d'euros supplémentaires, le budget du programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » sera insuffisant, puisque la dotation prévue de 1,375 milliard d'euros reste inférieure de 21 millions d'euros à l'exécution 2013. En 2014, la situation est pire encore : les 92 millions d'euros de rallonge dans la loi de finance initiale, la réserve de précaution « dégelée » dès septembre, les redéploiements internes n'ont pas suffi : un décret d'avance a ouvert 56 millions d'euros de crédits au début du mois d'octobre au titre de l'hébergement d'urgence. Las ! Le projet de loi de finances rectificative pour 2014 annonce qu'un décret d'avance devrait encore ajuster les crédits aux besoins en hébergement d'urgence. Et l'article 43 du même projet de loi ouvre 43,8 millions d'euros pour les dépenses liées à l'allocation de logement temporaire. Les crédits 2015 sont donc largement insincères. Il manquera probablement plusieurs dizaines de millions d'euros, même si une estimation précise est difficile à établir.

Sur le programme 109 « Aides à l'accès au logement », le financement du Fonds national d'aide au logement (Fnal) est bouleversé par la mise en oeuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, qui prive la branche famille de la sécurité sociale d'une partie de ses ressources pour alléger les charges pesant sur les entreprises. Le Gouvernement doit donc, à due concurrence, trouver des moyens de financement. C'est l'occasion d'une clarification bienvenue du financement du Fnal, qui sert principalement deux prestations, l'APL et allocation de logement à caractère social (ALS) ; ces deux aides seront financées essentiellement sur des crédits budgétaires, la troisième, l'allocation de logement à caractère familial (ALF), restant prise en charge par le Fonds national des prestations familiales (FNPF).

Les crédits budgétaires 2015 progressent ainsi de 5,9 milliards d'euros, dont 5,7 milliards d'euros à cause de ce changement de périmètre : 4,75 milliards d'euros pour remplacer les sommes qui provenaient précédemment du budget de la sécurité sociale, 300 millions d'euros pour compenser la baisse de cotisations des entreprises au FNAL pour les salariés touchant entre 1 et 1,6 Smic dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, et 671 millions pour compenser le transfert à la sécurité sociale du produit du prélèvement sur les revenus du patrimoine et les produits de placements.

Les autres ressources du FNAL se résument à 2,55 milliards d'euros au titre des cotisations employeurs et 300 millions d'euros issus de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC). Cette dernière est maintenue au niveau de l'an dernier par l'article 53 rattaché, alors que le Gouvernement s'était engagé vis-à-vis d'Action Logement à ne prélever que 150 millions cette année. Ce nouveau changement de pied alimente les interrogations sur l'avenir de la PEEC, dont l'utilisation des moyens échappe de plus en plus aux partenaires sociaux, puisque l'État en dispose en fonction de ses besoins.

Financement du FNAL, financement de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), tout cela se fait au détriment des missions initiales de la PEEC, à savoir l'aide aux salariés pour l'accession à la propriété et les travaux et construction de logements neufs. Les représentants d'Action Logement ont estimé à un milliard d'euros sur cinq ans le manque à gagner en retours sur prêts. La ressource est en train de fondre. Le Gouvernement a autorisé Action Logement à emprunter un milliard d'euros par an auprès de la CDC sur les fonds d'épargne, remplaçant ainsi une activité générant une recette par de l'emprunt. À l'évidence, le modèle économique de ce que nous appelons encore le « 1 % logement » ne va plus résister très longtemps ; et les rapports avec l'État sont aujourd'hui à la limite de la rupture.

La progression réelle des crédits budgétaires destinés au FNAL n'est donc que de 200 millions d'euros. La question est de savoir s'ils seront suffisants car c'est l'État qui garantit l'équilibre du fond... Or, après un report de crédits d'environ 80 millions d'euros de 2013 sur 2014, le report de 2014 sur 2015 devrait atteindre 200 à 250 millions. La progression des crédits est déjà entièrement consommée ! Il faudrait que la dépense n'augmente pas d'un centime pour que la prévision soit sincère... Elle se fonde sur une stabilisation du chômage. Du reste, les prévisions de recettes issues des cotisations sur les salaires ont toujours été surestimées dans les dernières années.

Le Gouvernement justifie le montant qu'il a arrêté par la faible augmentation tendancielle des loyers et des charges, la progression des ressources de la majorité des allocataires avec la revalorisation du SMIC et du RSA et par le changement de mode de calcul des prestations, mesure d'économie estimée à 68 millions d'euros pour l'État et 19 millions d'euros pour la branche famille pour 2015. Mais ce chiffre intègre aussi la transformation des aides personnelles au logement accordées pour l'accession à la propriété en un mécanisme de sécurisation, au profit des acquéreurs qui subiraient une perte d'au moins 30 % de leurs ressources postérieurement à la signature de l'acte. Il est vrai que l'entrée en vigueur de cette disposition a été décalée à 2016 par l'Assemblée nationale. Mais comment le Gouvernement peut-il prétendre soutenir l'accession sociale à la propriété et dans le même temps supprimer les aides qui solvabilisent les acquéreurs aux revenus les plus faibles ? Si le volume des aides diminue, c'est bien sûr dû à la crise, mais ce n'est pas une raison pour les supprimer. Je vous proposerai d'aller plus loin que les députés et de supprimer l'article 52.

Les autorisations d'engagement du programme 135 « Urbanisme, territoire et amélioration de l'habitat », à 522 millions d'euros, baissent de 9 % et les crédits de paiement, à 289 millions d'euros, de 28 %. Sur les aides à la pierre, les autorisations d'engagement, à 400 millions d'euros, reculent de 11 % par rapport à 2014 et les crédits de paiement, à 160 millions d'euros, de 41 %. Les crédits fondent comme jamais... Manifestement, l'État se désengage de la construction de logements sociaux et les crédits budgétaires ne financent plus que les prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Certes, mais bientôt il ne restera plus de crédits du tout ! C'est que le Gouvernement va au bout de la logique. Pour compenser ces baisses, il prévoit de recourir, comme l'an dernier, à un fonds de concours, issu du fonds de péréquation créé à l'article L. 452-1-1 du code de la construction et de l'habitation et géré par la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Cette contribution augmente, de 173 millions d'euros cette année à 216 millions d'euros en 2015.

Le soutien de l'activité est certes également porté par les nombreuses dépenses fiscales. Mais ce sont surtout d'autres acteurs qui interviennent : Action Logement est autorisé à emprunter 1 milliard d'euros par an auprès du fonds d'épargne de la CDC. Cette dernière, banquier des organismes de logement social, totalisait un encours de 137 milliards d'euros fin 2013, année record avec 16,4 millions de prêts nouveaux. En 2014, ces derniers se situent à 11,3 milliards d'euros fin septembre, la dynamique se poursuit donc ; les bailleurs sociaux ont davantage recours à leurs fonds propres - mais cela aura une fin. L'USH a mis en place un mécanisme de mutualisation entre ses adhérents - convention conclue le 22 août 2014 et approuvée par un arrêté publié le 12 septembre 2014. Les collectivités territoriales participent activement à la construction de logements sociaux, mais la baisse de leurs dotations pèsera inévitablement sur leur politique du logement.

L'Agence nationale de l'habitat (ANAH), opérateur du programme 135, est principalement financée par le produit des mises aux enchères de quotas carbone. Avec un plafond fixé par la loi de 590 millions d'euros, elle n'a perçu que 219 millions d'euros à ce titre pour 2013 et ne devrait pas avoir davantage en 2014. Elle perçoit également des recettes issues des certificats d'économie d'énergie. Enfin, 50 millions d'euros devraient lui être versés par Action Logement - il était pourtant prévu que ce transfert cesse à compter de 2013...

L'ANAH devrait disposer des sommes dont elle a besoin en 2015. En revanche, le problème de son financement à long terme n'est pas réglé. En juillet dernier, ayant épuisé ses ressources, elle avait été contrainte de demander aux préfets et aux collectivités territoriales délégataires des aides à la pierre de ne plus traiter que les demandes ultra-prioritaires, celles des ménages les plus modestes dans le cadre de la rénovation énergétique des logements. Est-il raisonnable de financer l'ANAH au moyen d'une ressource aussi fluctuante que la vente des quotas carbone ?

À l'Assemblée nationale, pour rétablir l'équilibre général du budget, le Gouvernement a raboté les crédits de la mission pour aboutir à une diminution nette de 23 millions d'euros en seconde délibération qui tient compte de l'inscription des 7 millions d'euros rendus nécessaires par le rétablissement pour 2015 des aides personnelles au logement « Accession ». Il manque plusieurs centaines de millions d'euros, de 400 à 500 millions d'euros si les besoins du FNAL augmentent. Je vous propose donc de ne pas adopter les crédits de la mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Merci d'avoir rappelé comment l'État ponctionne Action Logement, qui se trouve dès lors contraint d'emprunter à la Caisse des dépôts et consignations (CDC). C'est un détournement de l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). La logique de consolidation des comptes de l'État est battue en brèche. Déjà, certains opérateurs - les agences de l'eau - ont été autorisés sous le ministère de Jean-Louis Borloo à financer des subventions par des prêts sur fonds d'épargne gagés sur des recettes futures. Ce mécanisme, de pure cavalerie, a finalement suscité des inquiétudes et a été supprimé. Les prêts à Action Logement sur fonds d'épargne de la CDC sont autorisés par le ministre de l'économie : tout cela est cousu de fil blanc ! Nous devons être très fermes sur ces questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Dans les Ardennes, comme ailleurs sans doute, la direction départementale des territoires nous a demandé de soutenir l'opération « Habiter mieux » ; mais rapidement, il n'y a plus eu de crédits. C'est un problème pour les personnes aux revenus modestes, comme pour l'activité économique. Bien des entreprises du bâtiment souffrent de la baisse des aides à la pierre.

Je regrette aussi l'abandon des missions d'assistance technique pour raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (ATESAT) fournie par l'État : les petites communes sont aussi des donneurs d'ordre en investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Le fonds de péréquation de la CGLLS est un mécanisme choquant, car il repose sur les cotisations de l'ensemble des organismes d'HLM, dont les seules ressources sont les loyers : désormais les locataires, et non plus la solidarité nationale, financeront la construction de logements sociaux ! Jusqu'à présent, les organismes cotisaient selon leur potentiel financier : seuls ceux qui construisaient peu étaient sollicités. C'est une rupture très grave dans les mécanismes de solidarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Jarlier

Je constate une parfaite inadéquation entre moyens et ambitions. Le Gouvernement a eu une politique de communication très forte autour du programme « Habiter mieux », faisant croire à bien des gens qu'ils pourraient résorber leur précarité énergétique - beau programme en soi qui répond à de très fortes attentes, mais dès juillet, les élus ont dû expliquer aux demandeurs qu'ils avaient préparé un dossier en vain. Les rallonges ne suffisent pas, le financement de l'ANAH est en danger. Il faudra trouver mieux : on ne peut pas continuer ainsi. Il est justifié d'avoir réservé les aides aux plus démunis dans cette situation ; mais ne faisons pas dans ce cas de promesses aux autres !

La perte de l'aide à l'ingénierie que constituait l'ATESAT est regrettable pour les petites communes et ce n'est pas aux départements de s'y substituer : le bloc communal doit assumer ses compétences. Évitons une tutelle d'une collectivité sur une autre. Nous avons aussi un rendez-vous en juillet 2015 sur les services instructeurs : toutes les communes de plus de 10 000 habitants ou participant à une intercommunalité comptant une commune de plus de 10 000 habitants devront assumer elles-mêmes la délivrance des permis de construire, ce qui posera un vrai problème financier. Au moment où l'on parle de fusion d'intercommunalités, c'est un frein certain, car les communes ne veulent pas franchir le seuil fatidique !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

La présentation précise et dynamique de Philippe Dallier montre que les objectifs ne sont pas atteints, en matière de logement mais aussi de logement social.

Le logement reste trop cher. Nous sommes néanmoins moins sévères que vous ; il y a des améliorations : le PTZ amélioré, la TVA à 5,5 % pour l'ensemble des quartiers prioritaires de la politique de la ville, les terrains moins taxés, le dispositif « Pinel » améliorant le « Duflot ». Il doit y avoir une corrélation entre l'action de l'État sur le logement et celle des collectivités territoriales ; construire au plus près du terrain nécessite un accord entre l'État, la région, le département, les communes et leurs groupements. Il est impossible de traiter séparément l'action de l'ANRU, les contrats de ville, le logement social, or ces questions sont désormais trop éclatées, nous privant d'une vision globale. Le logement coûte trop cher, y compris le logement social. Il est naturel de vouloir laisser quelque chose à ses enfants. Tout ce qui pénalise l'accession à la propriété des personnes modestes est un problème majeur. Lors de l'examen des amendements, nous montrerons que nous partageons certaines de vos remarques.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Nous examinons une mission importante, avec 13 milliards d'euros de crédits budgétaires, presque autant de dépenses fiscales. Le logement en France est caractérisé par un prix élevé et un parc vieillissant. Il faudra se pencher sur la corrélation que l'INSEE signale entre les loyers élevés et les aides publiques. Quant aux dépenses fiscales, chaque ministre du logement invente un nouveau dispositif qui remplace le précédent avant même, parfois, sa mise en application. Cette politique est illisible : la fiscalité sur la plus-value immobilière change sans cesse. Malgré le régime favorable pour les terrains à bâtir, toute cela est coûteux et apporte très peu de résultats : on n'a jamais aussi peu construit en France. La suppression du dispositif d'accession à la propriété pour les plus modestes à l'article 52 est un très mauvais signal.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Le dispositif est absurde et injuste : après cinq ans, le logement vendu en accession sociale est retiré du décompte des logements sociaux en vertu de l'article 55 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). Les bailleurs sociaux de ma ville me demandent de mettre en vente des logements sociaux au profit de leurs habitants ; si j'accepte, ces logements sont défalqués du total de nos logements sociaux. Et cela concerne des résidences entières ! Des locataires me font part de leur désir de devenir propriétaires et disent ne pouvoir obtenir de crédit que cette année ; mais le préfet tient son compte et me juge sur un stock, pour lequel ma commune ne répond pas aux exigences alors qu'elle est plutôt bonne élève sur le flux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Avec l'emprunt d'1 milliard d'euros à la CDC, Action Logement a de moins en moins de moyens et met le doigt dans un engrenage de mauvaise gestion. Cela ne durera pas : ses responsables sont à bout, à force de promesses non tenues. Le programme « Habiter mieux », c'est vrai, est victime de son succès - preuve qu'il répond à un vrai besoin. C'était une mauvaise idée d'asseoir une dépense certaine de l'ANAH sur une ressource aussi volatile que des ventes de quotas carbone. Espérons que les crédits seront au rendez-vous pour répondre aux objectifs fixés en 2015. Je partage votre avis sur l'assistance technique aux petites communes.

L'idée de mettre chacun à contribution pour le fonds de péréquation de la CGLLS était bonne ; mais nous pourrions en effet discuter des critères. Lors de la création de la contribution des bailleurs sociaux par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (loi MOLLE), nous avions longuement discuté de son montant, afin que les modalités soient justes. Même si je partage votre avis, Monsieur Boulard, il faut bien trouver un financement là où il n'y a plus de crédits budgétaires. Le PTZ intéresse des demandeurs de plus en plus nombreux. Le dispositif « Pinel » remplace avantageusement le « Duflot » qui ne fonctionnait pas : certes, mais une génération coûtera malgré tout 1,7 milliard d'euros.

Les dépenses fiscales ont-elles un effet inflationniste, de même que celui que relève le rapport de l'INSEE pour les aides personnelles au logement ? Je le crois. Le vendeur intègre dans le prix tout avantage, aide ou incitation fiscale. La bonne formule n'est pas facile à trouver. On pourra à nouveau louer à ses ascendants et descendants, ce qui suscitera peut-être un effet d'aubaine excessif. Je proposerai un amendement pour l'éviter.

Je partage entièrement l'avis de Marie-Hélène Des Esgaulx sur l'article 55 de la loi SRU, mais je n'y peux rien : si un bailleur décide de vendre, la commune risque de passer en dessous du seuil SRU, sans que la destination des logements ou la population ait changé. C'est tout le problème de cette comptabilité en stock qui ne prend suffisamment en compte ni la situation des habitants, ni les flux.

Les crédits nécessaires étant sous-estimés de 400 à 500 millions d'euros - excusez du peu, à l'heure où nous nous efforçons de convaincre Bruxelles de la conformité du budget à nos engagements - j'en propose le rejet.

La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Égalité des territoires et logement ».

Article 52

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je propose de supprimer cet article.

L'amendement de suppression est adopté.

Article 53

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Cet article prévoit de porter à 300 millions d'euros, au lieu des 150 millions promis, le prélèvement exceptionnel sur la PEEC au bénéfice du Fonds national d'aide au logement (FNAL). Je propose de le supprimer : il est temps que le Gouvernement comprenne qu'il ne peut manquer indéfiniment à sa parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je vous suis pleinement : il n'est pas sain de diminuer l'aide à la pierre au profit de l'aide à la personne car la priorité est de construire. Le rapport de l'INSEE me conforte dans l'idée que les aides personnelles au logement ont un effet inflationniste. La construction de logements est en France 30 % plus cher qu'en Allemagne. Pourquoi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Il faut « utiliser le marché contre le marché ». Les mécanismes qui solvabilisent les personnes sont pris en compte par les bailleurs et les vendeurs, qui augmentent leurs prix en conséquence. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas de tels dispositifs mais il faut essayer de trouver le moyen de réguler tout ça.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Il est hallucinant d'entendre que les aides personnelles au logement font monter le prix de la construction...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Au-delà d'en parler ici, je me demande lequel d'entre vous irait publiquement dénoncer les aides personnelles au logement dans sa circonscription ! Le coût de la construction baisse actuellement de près de 20 %, sans que les aides personnelles au logement aient été modifiées, parce que les marges étaient auparavant excessives, faute de concurrence suffisante. Des rentes de situation s'étaient formées. Les aides personnelles au logement sont avant tout le financement des logements sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je pense que Daniel Raoul parlait des loyers, non du coût de la construction. La fondation Abbé Pierre elle-même, avec laquelle nous discutons de ces sujets, s'interroge sur l'effet inflationniste de l'aide personnelle au logement. Dans ma commune, en plein coeur de la Seine-Saint-Denis, un deux-pièces de 50 mètres carrés a été loué 2 000 euros à une famille qui bénéficiait à la fois de l'aide personnelle au logement et d'une allocation de 600 euros au titre de ses enfants de moins de trois ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Le coût de la construction et les loyers sont évidemment liés. Partageant certaines objections du rapporteur, nous nous abstiendrons sur cet amendement.

L'amendement de suppression est adopté.

Article 54

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Je propose d'adopter cet article, car il faut bien trouver l'argent quelque part.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Je déposerai un amendement pour ouvrir un débat public sur le financement de la construction neuve par les loyers des HLM : la taxe n'étant plus modulée en fonction de la situation financière des assujettis, elle est injuste. C'est la première fois dans l'histoire du logement social que le financement de la construction neuve, porté habituellement par le budget général de l'État, est payé par les locataires des logements sociaux. C'est inadmissible !

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption de l'article 54.

Puis la commission procède à l'examen du rapport de M. François Patriat, rapporteur spécial sur les programmes « Accès et retour à l'emploi » et « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » (et articles 62 et 63) et le compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage », et de M. Jean-Claude Requier, rapporteur spécial, sur les programmes « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » et « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » de la mission « Travail et emploi ».

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Dotée pour 2015 de 11,53 milliards d'euros en autorisations d'engagement (stables) et 11,26 millions en crédits de paiement (en hausse), la mission « Travail et emploi » traduit l'engagement du Gouvernement contre le chômage. C'est un budget de soutien à l'emploi et à la reprise économique, ainsi qu'aux réformes inscrites dans la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale. Près de 80 % de ces crédits seront consacrés à des dépenses d'intervention, notamment sur le programme 102 « Accès et retour à l'emploi » et le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi ». La subvention de l'État au fonds de solidarité s'élèvera à 1,7 milliard d'euros. Les moyens du service public de l'emploi seront consolidés : 1,52 milliard d'euros sera versé à Pôle Emploi, comme en 2014, afin de prendre en charge l'augmentation des moyens humains de cet opérateur depuis 2012.

Avec un taux de chômage de près de 23 %, les jeunes sont les premières victimes de la crise économique. Le Gouvernement propose donc 65 000 emplois d'avenir supplémentaires en 2015, notamment dans le secteur marchand. Les dotations de la « garantie jeunes » augmentent, à 148 millions d'euros en autorisations d'engagement et 133 millions en crédits de paiement. Au total, plus de 400 000 contrats aidés supplémentaires seront créés en 2015 pour une dépense de près 3 milliards d'euros. L'article 62 rattaché prévoit en outre que 58 millions d'euros seront prélevés sur les réserves de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) et sur le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), afin de financer certains de ces contrats.

L'accompagnement des mutations économiques et le développement de l'emploi bénéficieront de 5,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 5 milliards d'euros en crédits de paiement, dont 1,3 milliard d'euros pour le développement de l'alternance.

L'architecture du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement de l'apprentissage » sera entièrement rénovée afin de tirer les conséquences de la réforme des aides et du financement de l'apprentissage engagée en 2013.

L'article 63 rattaché crée une aide incitative de 1 000 euros au recrutement d'un apprenti, versée par les régions aux entreprises de moins de 250 salariés sous certaines conditions. M'étant élevé contre la suppression de ces crédits - 800 millions d'euros - l'an dernier, je me félicite qu'ils soient ainsi rétablis pour endiguer la baisse du nombre d'apprentis. Après une réforme majeure de l'apprentissage, il convient désormais de stabiliser les dispositifs existants.

Le budget 2015 créant les conditions d'une amélioration de la situation de l'emploi, je vous propose l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi », du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » ainsi que des articles 62 et 63 sans modification.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Je n'étais pas un spécialiste de ces questions avant d'être chargé de rapporter pour vous ces crédits. J'ai beaucoup appris ! Je partage les principales observations de François Patriat : ce budget de sortie de crise appuiera efficacement la politique de l'emploi du Gouvernement.

Si les autorisations d'engagement de cette mission sont stabilisées, l'augmentation des crédits de paiement vise à soutenir l'emploi des jeunes, des personnes handicapées et des personnes rencontrant des difficultés particulières d'insertion. Le chômage atteignant 10,2 % de la population active au deuxième semestre 2014, il était nécessaire que l'intervention de l'État soit maintenue à un niveau constant...

Responsable autant qu'exigeant, ce budget contribuera néanmoins à la maîtrise des dépenses publiques et accompagnera des réformes importantes, dans le champ du dialogue social notamment. Les crédits du programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations de travail » s'élèveront à 133,54 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 81,62 millions d'euros en crédits de paiement, consacrés pour un dixième environ à la mise en oeuvre du deuxième cycle de la mesure de l'audience des organisations syndicales. Ces crédits financeront également le lancement de la mesure de l'audience des organisations patronales instaurée par la loi du 5 mars 2014.

En 2015 sera mise en oeuvre la réforme du financement des organisations syndicales et patronales, indispensable pour améliorer la transparence. L'article 31 de la loi du 5 mars 2014 crée ainsi un fonds destiné à ce financement, abondé par une contribution des entreprises et une subvention de l'État. Ce fonds, qui sera mis en place au 1er janvier 2015, sera doté de 82 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 34 millions d'euros en crédits de paiement. Il prendra en charge la formation des salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales ainsi que la participation des partenaires sociaux à la conception, la mise en oeuvre et le suivi des politiques publiques du travail et de l'emploi.

Les crédits demandés au programme 111 prennent en compte la prolongation des mandats des conseillers prud'hommes jusqu'en 2017 : le principe en a été voté par le Sénat le 14 octobre 2014, afin de permettre la réforme de leur mode de désignation, qui sera désormais fondé sur l'audience des organisations syndicales et patronales. Cette réforme se traduira par une économie structurelle proche de 100 millions d'euros sur cinq ans.

Le programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » sera doté de 765 millions d'euros en autorisations d'engagement, 771 millions d'euros en crédits de paiement, il est donc en diminution. Dans un effort important de réduction des dépenses, 150 postes seront supprimés en 2015 (930 depuis 2010, soit une baisse de 9 % des effectifs). Les dépenses de personnel, en baisse de 1,73 %, s'élèveront à 628,5 millions d'euros.

Le schéma du programme 155 sera profondément rénové : il comptera 12 actions, contre 6 auparavant. Plus cohérente, cette architecture contribuera à mieux identifier les dépenses en fonction de leur nature.

Si les choix assumés par ce budget sont difficiles, les objectifs sont clairs : réduire le chômage des jeunes, consolider les moyens du service public de l'emploi, accompagner des réformes importantes. Je vous propose donc l'adoption sans modification des crédits de cette mission comme du compte d'affectation spéciale « Financement national de la modernisation et du développement de l'apprentissage » ainsi que des articles 62 et 63 rattachés.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Comment la mesure de l'audience des organisations syndicales sera-t-elle effectuée ? Les élections professionnelles constituent un instrument de mesure fiable : pourquoi et comment ce nouveau dispositif sera-t-il mis en place ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Les résultats des élections professionnelles seront pris pour point de départ.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Les élections prudhommales étant supprimées, il s'agit de déduire les quotas prudhommaux des élections professionnelles.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

S'agissant de l'apprentissage, les mesures prises par le Gouvernement sont bienvenues étant donné le taux de chômage inquiétant des jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

La baisse du nombre d'apprentis est le résultat de la crise, mais aussi de difficultés soulignées par les maîtres d'apprentis, comme les normes, qui interdisent de confier à l'apprenti certains outils, le travail en hauteur, etc. À quoi bon prendre un apprenti s'il n'a le droit de rien faire ? Ces règles ont été assouplies la semaine dernière par les députés. Je salue la réduction du nombre d'organismes collecteurs, un meilleur ciblage des crédits en faveur des CFA, ainsi que l'attribution aux régions de 65 millions d'euros supplémentaires pour accompagner l'apprentissage sur le terrain. Les entreprises de moins de onze salariés recevront désormais 2 000 euros par apprenti embauché. Autant de facteurs qui inciteront les artisans et les chefs d'entreprises à se lancer !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Pour répondre plus complètement à Éric Bocquet : la mesure de l'audience des organisations syndicales reposera sur l'agrégat des résultats des élections professionnelles, du scrutin organisé pour les salariés des très petites entreprises et les employés à domicile, et des élections aux chambres d'agriculture. Les votes de plus de 5,456 millions de salariés ainsi exprimés font apparaître le rapport des forces. Notre collègue sera heureux d'apprendre que la CGT arrive en tête, suivie par la CFDT...

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

En matière d'apprentissage, le Gouvernement est un pompier pyromane : après avoir fortement réduit les dotations aux régions en 2013, infligeant un coup d'arrêt au recrutement, il fait mine désormais d'encourager ce dispositif, très efficace pour l'intégration sur le marché du travail, mais qui nécessite de la cohérence et de la stabilité. D'autant que les entreprises qui recrutent des apprentis sont souvent très petites : elles ne peuvent se contenter de déclarations aléatoires et attendent des actes et de la constance dans l'engagement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Les crédits des missions locales sont augmentés et les maisons de l'emploi sont recentrées sur leurs missions. Ce sont des progrès à souligner.

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi », des articles 62 et 63 et du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage ».

Enfin la commission procède à l'examen du rapport de M. Jean-Claude Boulard, rapporteur spécial, sur la mission « Régimes sociaux et de retraite » et le compte d'affectation spéciale « Pensions » (et article 65).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

L'examen des crédits de la mission « Régime sociaux et de retraite » invite à un voyage au coeur du corporatisme français. Les régimes spéciaux ont des sources très anciennes : on peut citer en particulier la création par Colbert en 1673 de l'établissement national des invalides de la marine (ENIM). Les spécificités de ces régimes étaient alors justifiées par les circonstances économiques : c'était le temps de la vapeur et de la voile. Les circonstances ont changé, les droits ont perduré, au nom du droit acquis, principe de base du corporatisme français. Les efforts pour faire évoluer ces régimes n'ont pas toujours abouti - Alain Juppé s'en souvient... J'en appelle donc à la prudence de tous ceux qui auraient des ambitions réformatrices.

Après avoir fortement augmenté entre 2006 et 2012, les crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » se stabilisent en 2015 à 6,4 milliards et connaissent même une baisse de 1,5 %, grâce à l'harmonisation progressive des taux de cotisations, à une moindre inflation et à l'allongement de la durée de cotisation. Les déficits sont liés essentiellement aux règles spécifiques de calcul des pensions et à l'âge de départ à la retraite. Certes, le facteur démographique joue dans certains cas : chez les marins, le rapport entre cotisants et retraités est de 0,2 cotisant pour un retraité ; la situation est meilleure à la RATP et à la SNCF, où le nombre de cotisant par retraité se rapproche de 1. La tendance, enfin, est à la stabilisation des subventions d'équilibre versées par l'État entre 2015 et 2017 : la dérive financière semble aujourd'hui maîtrisée et les perspectives assainies grâce à ces réformes partielles.

Les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » atteignent 56,8 milliards d'euros en 2015. Ils ont augmenté entre 1990 et 2013 de 18 à plus de 50 milliards d'euros. La progression des dépenses n'est que de 0,6 % en 2015 grâce au décalage de la date de revalorisation du 1er avril au 1er octobre, à la baisse de l'indexation et de l'inflation, à l'allongement des durées de cotisations et enfin aux départs différés. Les fonctionnaires utilisent largement la possibilité qui leur est donnée de travailler plus longtemps, à l'exemple d'un certain conseiller d'État qui, lorsque l'âge de la retraite de ce corps a été ramené de 75 à 70 ans, s'est exclamé : « On vient de briser ma carrière ! ».

Ce ralentissement de la hausse des crédits entre 2015 et 2017 permettra de dégager un fonds de roulement plus important. Fixé à 1 milliard d'euros lors de la création du CAS, il s'élèverait à 2,2 milliards d'euros fin 2015, alors même que les aléas seront certainement très réduits. Enfin, malgré l'idée reçue de la dérive du système, les projections font apparaître un excédent de l'ordre de 67 milliards d'euros en 2050. L'inscription des crédits est plus que sincère : excessive. Or on cherche 1 milliard d'euros pour étaler la baisse des dotations de l'État aux collectivités locales...

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Si le régime général semble se stabiliser, ce n'est pas le cas des principaux régimes spéciaux des mines, de la RATP, de la marine et de la SNCF : leur financement nécessitera 137 milliards d'euros en 2050. Les âges moyens de départ posent problème : justifiés sur certains postes particulièrement exposés à la pénibilité, ils ne le sont pas pour les postes administratifs. La secrétaire du président de la RATP doit-elle vraiment prendre sa retraite à 55 ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Les dépenses liées aux départs à la retraite des militaires auraient apparemment tendance à diminuer. Or le budget des armées, que j'aurai l'honneur de rapporter cet après-midi, prévoit une réduction d'effectifs de 7 500 en 2105, « dont une proportion importante d'officiers qui feront valoir leurs droits à la retraite » affirme le ministère de la défense. Cela ne contredit-il pas ce que notre collègue indique du comportement des fonctionnaires en fin de carrière ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Les départs plus tardifs dans la fonction publique ne résultent-ils pas de l'effet dissuasif des décotes ? Il y a de plus en plus de retraités pauvres en France. Si les conditions de travail de certaines corporations ont évolué, de nouvelles catégories exposées apparaissent : ainsi dans le bâtiment et les travaux publics ou le hard discount, qui impose aux salariés une polyvalence absolue sur des horaires très étendus. Nous devrons bien, dans les années à venir, consacrer une plus grande part de la richesse produite à notre système de retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Le rapporteur spécial dispose-t-il d'une projection de la masse financière représentée par les retraites de la SNCF dans les années à venir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

La tentative de réforme des régimes spéciaux en 2007 n'a pas fait économiser grand-chose : l'alignement sur la durée de cotisation du régime général a été compensé par la concession d'un échelon d'ancienneté supplémentaire, l'élargissement de l'assiette du salaire liquidable, l'intégration de la prime de travail à la prime de fin d'année, et, excusez du peu, l'extension aux hommes des droits à la retraite anticipée au titre de trois enfants. Or, qui a fait cette réforme ? Un ministre laxiste de gauche ? Non : le responsable de ces mesures est Xavier Bertrand.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Des réformes courageuses ont été conduites depuis, et nous bénéficierons bientôt de leurs effets. Les crédits nécessaires à la SNCF baissent de 4,4 % en 2015 ; l'âge de départ des agents administratifs de la RATP passe de 60 à 62 ans : les régimes spéciaux évoluent donc bel et bien même si des écarts importants demeurent. Quant à aller plus loin, la prudence me semble partagée, au-delà des clivages politiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Le rapport mentionne un certain nombre de régimes de retraite éteints, comme le régime des chemins de fer franco-éthiopiens ou celui des ministres du culte en Alsace-Moselle. Le Concordat y est encore en vigueur. Ces personnes sont rémunérées par l'État mais doivent-elles s'acquitter de leurs cotisations pour la pension ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Il y a aussi le régime des anciens marins du métro, ou celui des marines de guerre, célèbre dans l'entre-deux guerres.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Au moment du retour de l'Alsace et de la Moselle à la France, en 1918, le Concordat a été maintenu. L'État paye les salaires des ministres du culte, qui sont curieusement alignés sur ceux de la hiérarchie militaire. Un évêque perçoit un traitement équivalent à celui du colonel. C'est un budget du ministère de l'Intérieur. Le régime de retraites des ministres du culte concerne les anciens d'avant 1918, aujourd'hui disparus. Comme ils n'ont pas de veuves, il n'y a pas lieu de le maintenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

On comptait en 2013 871 bénéficiaires du régime des ministres du culte d'Alsace-Moselle. Il n'existe pas de cotisations patronales ou salariales ; leur régime étant entièrement subventionné par l'État. Quant aux veuves des marines de guerre, c'est une association qui a été créée entre les deux guerres pour lutter contre la suppression de la pension aux veuves lorsqu'elles se remariaient - ce qui favorisait le concubinage. Voilà pourquoi cette pension a été maintenue. Je pourrais vous en dire beaucoup sur l'établissement national de la marine dont j'ai assuré la gestion, au cours de ma carrière.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ».

Elle décide également de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 65.

La réunion est levée à 11 h 05

- Présidence de Mme Michèle André, présidente -

La réunion est ouverte à 14 h 30