La réunion est ouverte à 15 h 00
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la prévention des risques s'est réunie à l'Assemblée nationale le mardi 10 novembre 2015.
Elle a procédé à la désignation de son bureau qui a été ainsi constitué :
Jean-Paul Chanteguet, député, président,
Hervé Maurey, sénateur, vice-président.
La commission a également désigné :
Viviane le Dissez, députée,
Michel Raison, sénateur,
comme rapporteurs respectivement pour l'Assemblée nationale et le Sénat.
Je rappelle que le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la prévention des risques a été déposé par le gouvernement le 15 juillet 2015 avec engagement de la procédure accélérée. Il a été adopté par l'Assemblée nationale le 16 septembre dernier et par le Sénat le 26 octobre.
Nos deux assemblées n'étant pas parvenues à un texte identique, le Gouvernement a convoqué la réunion d'une commission mixte paritaire, en application de l'article 45 alinéa 2 de la Constitution. Les nominations ont été effectuées par l'Assemblée nationale le 5 novembre et par le Sénat le 4 novembre. Je constate qu'il n'y a que six députés titulaires et je propose donc que M. Bertrand Pancher, suppléant UDI, devienne titulaire.
Le but de la commission mixte paritaire est de trouver un texte commun sur les dispositions restant en discussion. Le Sénat et l'Assemblée nationale ont adopté des textes différents et notre commission, saisie de ces deux textes, doit rechercher un consensus. Mon sentiment général est que les divergences de fond ne sont pas insurmontables et que nous pourrions trouver un accord : en effet, sur les 25 articles du projet de loi, 19 ont été adoptés conformes, cinq ont été modifiés par le Sénat et un seul, l'article 9, qui a été supprimé par le Sénat, fait l'objet d'un désaccord.
Merci Monsieur le président. Je partage votre sentiment sur la possibilité d'aboutir à un accord sur ce texte. Il s'agit d'un texte technique mais également d'un texte important, notamment s'agissant des OGM et de la sécurité des opérations pétrolières et gazières en mer. Nous disposons de peu de marge de manoeuvre car il s'agit de la transposition de textes européens. Notre rapporteur a effectué un travail important sur ce projet de loi et je tiens à le souligner.
Messieurs les présidents, Monsieur le rapporteur, chers collègues, à mon tour, je souhaite la bienvenue à nos collègues sénateurs, pour cette CMP qui ne va guère rencontrer d'obstacles. L'Assemblée nationale a examiné en septembre dernier le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la prévention des risques. Le Sénat vient à son tour d'achever l'examen de ce texte.
Les projets de loi dits « DDADUE » laissent, par nature, très peu de marge de manoeuvre aux parlementaires nationaux : nous devons prendre acte de directives déjà adoptées au niveau de l'Union, en les transposant de manière à respecter strictement les obligations de la France vis-à-vis des autorités européennes et de ses partenaires.
Mais ces textes nous donnent l'occasion de débattre publiquement de sujets pour lesquels nos concitoyens n'ont peut-être pas toutes les informations nécessaires sur ce qui se décide à Bruxelles. C'est le cas par exemple pour les règles applicables à la culture d'OGM ou aux forages off shore.
L'unité de ce texte est assurée par l'objectif transversal de prévention des risques. Sujet sur lequel nous ne pouvons qu'être d'accord ! L'amélioration de la sécurité des opérations pétrolières et gazières en mer, du contrôle de l'utilisation et du commerce de substances dangereuses, et de l'harmonisation des législations sur les équipements, ont rassemblé facilement nos deux Assemblées.
Je me réjouis de constater que la quasi-totalité des articles ont fait l'objet d'un consensus entre l'Assemblée nationale et le Sénat. De nombreux articles ont été adoptés « conformes » au Sénat ou ont seulement fait l'objet d'amendements rédactionnels.
Nos deux assemblées ont su conjuguer leurs efforts pour améliorer la rédaction du texte initialement proposé et qui, comme tous les textes de transposition de directives, comportait de nombreux problèmes rédactionnels - même si j'observe que, fort heureusement, la qualité rédactionnelle de ce « DDADUE » était dès le départ bien meilleure que celle du texte similaire qui nous avait réunis en 2013.
L'adoption de ce texte en des termes presque identiques par l'Assemblée et le Sénat constitue un signal fort qui permet d'indiquer que la France ne cherche pas à se défausser des responsabilités qui lui incombent en matière de protection de l'environnement, qu'il s'agisse de lutte contre la pollution marine ou de réduction des gaz à effet de serre. A l'approche de la COP21, une telle unanimité est bienvenue.
Un point reste cependant en débat, qui pourrait presque paraître anecdotique au regard des sujets traités par la plupart des autres dispositions. Il s'agit de l'article 9, qui concerne l'encadrement des stockages souterrains de gaz naturel et d'hydrocarbures. Le sujet semble abscons et la matière technique mais j'ai pleinement conscience des inquiétudes que cet article a fait naître chez certaines entreprises concernées.
J'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de l'AFG-gaz en juillet dernier, lors de la préparation du rapport sur le projet de loi. Ceux-ci demandaient alors la suppression de l'article 9. Je souhaite ici rappeler que les craintes dont ils m'avaient fait part à l'époque étaient infondées.
La lecture des débats qui ont eu lieu au Sénat m'a permis de voir que l'AFG-gaz était revenue sur sa position initiale. Leur préoccupation n'est plus désormais de supprimer l'article 9 mais de limiter l'application des mesures prévues par cet article à l'ouverture de nouveaux stockages et de laisser le droit inchangé pour ce qui concerne la fermeture des stockages.
C'est le sens de l'amendement déposé par notre collègue Rémy Pointereau, qui a été adopté suite à un scrutin public mais n'a pas été intégré dans le texte. En effet, l'amendement porté par M. Rémy Pointereau a reçu un avis défavorable du Gouvernement et de la commission du développement durable du Sénat.
Par ailleurs, les parlementaires présents en séance ont jugé que l'article 9 ainsi amendé avait été dénaturé et ont voté contre cet article, qui a été alors supprimé.
C'est pourquoi je demande le rétablissement de l'article 9 dans la version issue de l'Assemblée nationale. Je vous présenterai, lorsque nous examinerons les articles du texte, les objectifs de cet article et je tenterai de remédier aux craintes qui nous ont été communiquées par certains acteurs du secteur. Je vous remercie.
Je vous remercie, Messieurs les présidents, Madame la rapporteure, chers collègues parlementaires. Je n'ajouterai que quelques mots pour indiquer que nous ne sommes certainement pas loin d'aboutir et que le plus simple serait probablement de suivre la rédaction issue des travaux du Sénat.
S'agissant de l'extraction du pétrole en mer, la directive est opportune et nous ne sommes en désaccord ni avec ses dispositions ni avec les mesures de transposition.
En ce qui concerne les OGM, nous ne sommes pas non plus en désaccord mais je regrette tout de même que nous nous éloignions de l'objectif d'une plus grande harmonisation entre les pays européens. Chaque pays pourra, après une acceptation au niveau européen, refuser la culture des OGM sur son territoire. Ce qui me pose problème, ce sont les raisons possibles de refus. Elles pourraient ne pas être fondées uniquement sur des motifs d'ordre scientifique, ce que nous pourrions comprendre, mais il sera possible de refuser des cultures en raison de possibles troubles à l'ordre public. On donnerait ainsi raison aux casseurs et à ceux qui luttent contre nos propres recherches, notamment celles de l'INRA. Je note que certains malfaiteurs ne sont pas condamnés ou à peine.
En ce qui concerne les biocides, des discussions ont déjà eu lieu lors de l'examen du projet de loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt à l'Assemblée nationale. Un avis technique était donné par l'ANSES et le gouvernement devait décider. Désormais, l'avis et la décision de mise en marché des produits relèveraient de l'ANSES. J'ai considéré, ainsi que les sénateurs, qu'il s'agissait là plutôt d'une simplification, d'autant que cet organisme se structure pour séparer ces deux missions. Donc cela nous convient.
S'agissant du stockage en profondeur des hydrocarbures, j'ai souhaité que nous ne procédions pas à une sur-transposition. Nos entreprises souffrent tous les jours de l'alourdissement des normes et nous continuons malgré tout à voter des dispositions qui complexifient la vie de nos entreprises. L'article 9 a donc été modifié au Sénat afin de maintenir dans le code minier les conditions de la fermeture des stockages d'hydrocarbures ou de gaz.
Le gouvernement nous a quelque peu trompés sur cette question car tout ne restera pas à la charge de l'État si nous demeurons dans le code minier. Très peu de stockages sont fermés. Le gestionnaire doit fournir un cahier des charges précis qui doit être agréé puis le mettre en oeuvre, souvent sur plusieurs années. Puis un quitus doit être donné par les services de l'État, qui peut décider de prolonger la surveillance ou demander des modifications. Les procédures sont donc déjà contrôlées. Il ne faut pas compliquer ces procédures et laisser planer des incertitudes sur les entreprises pendant trente années. On peut en effet imaginer que devant la longueur des procédures, des provisions devraient être inscrites au bilan des entreprises et feraient peser un doute sur leur valeur même. Nous sommes opposés à la sur-transposition proposée par le gouvernement pour l'arrêt des stockages souterrains.
Voilà les quelques remarques que je souhaitais faire.
Ce texte transpose des directives européennes et nous devons veiller à ce que le droit français n'impose pas plus de normes que nécessaire. Michel Raison a très bien résumé les propositions qui permettraient de ne pas alourdir les engagements et les responsabilités des entreprises.
J'attire l'attention sur l'article 9, qui régit le statut des sites après la cessation des activités. En vertu de cet article, les entreprises ayant stocké des produits se retrouveraient, pendant vingt ou trente années, quasiment éternellement, responsables de sites fermés, ce qui aurait des conséquences financières considérables. Or, nous constatons que le système fonctionne aujourd'hui avec satisfaction : il n'est pas besoin de l'alourdir.
Par ailleurs, je rappelle qu'en matière d'OGM, nous étions un certain nombre, en commission, à regretter que la France s'éloigne des positions européennes, et que nous ne pouvions que nous en inquiéter.
Je ne vois pas en quoi la proposition du Sénat constituerait une simplification. Modifier la nature d'un produit au cours de sa vie n'est pas une simplification. C'est plutôt une complication.
S'il est vrai que l'article 9 entraîne des conséquences pour les entreprises, nous devons noter qu'il ne s'agit pas de PME, mais de grands groupes industriels qui disposent d'un savoir-faire réel. Ce sont d'ailleurs peut-être eux qui, une fois qu'ils auront abandonné le site, mèneront les contrôles pour le compte de l'État qui devra se substituer à eux pour la gestion ultérieure de ce stockage. C'est une situation très étrange.
Si on souhaite réellement simplifier les règles, autant conserver la même nature des produits : ceux qui relevaient des règles relatives aux ICPE continueront à relever des règles régissant les ICPE et ceux qui relevaient du code minier devront continuer à relever du code minier. D'ailleurs, les règles relatives aux stockages miniers ont évolué et ont été renforcées.
Je crains qu'une limitation du temps pendant lequel l'entreprise est responsable de ses stockages ne décourage le contrôle. Ces stockages ne sont pas anodins et peuvent avoir des répercussions tardives sur un milieu - le sous-sol - qui reste très mal connu.
L'article 9 tend plus à une clarification qu'à une simplification des responsabilités. J'entends bien l'argument selon lequel les entreprises devront provisionner le risque, ce qui ne manquera pas d'apparaître dans les bilans. Mais quand une entreprise mène une activité de ce type, il est logique de provisionner le risque quel qu'il soit.
Sur des investissements de cette nature, je ne vois pas comment nous pourrions justifier auprès de nos citoyens qu'après un délai de dix ans, la responsabilité de ces sites de stockage incombe à l'État, donc à la charge des citoyens. Par comparaison avec d'autres risques énergétiques, il ne me semble pas incohérent d'aller jusqu'à trente ans de responsabilité. Le risque doit être pris en compte par l'entrepreneur dès l'investissement de départ.
Lors des débats à l'Assemblée comme au Sénat, nous nous sommes réjouis de la philosophie du texte et de son engagement. Nous sommes globalement d'accord sur la version du Sénat, sauf sur le point que nos collègues de l'Assemblée nationale viennent très justement de relever : les stockages qui relèvent des règles relatives aux ICPE doivent continuer à relever des règles relatives aux ICPE et ce qui relève du code minier doit continuer à être régi par le code minier.
Je souhaite préciser qu'il ne s'agit pas d'une « sur-transposition » mais plutôt d'une mise en cohérence avec la règlementation française : nombre de stockages sont déjà soumis au code de l'environnement, c'est-à-dire à la législation relative aux ICPE. Je considère donc que nous allons plutôt dans le sens d'une simplification administrative en reconnaissant que ces stockages de gaz relèvent du code de l'environnement.
Cette mesure a bien sûr un coût, puisque le fait de rester dans la nomenclature du code minier permet aux entreprises de voir leur responsabilité dégagée au bout de dix ans. Mais il ne paraît pas anormal que l'entreprise, qui a réalisé des bénéfices pendant de nombreuses années, assume le coût du stockage pendant trente ans. Il ne s'agit pas de PME, mais de grands groupes, dotés d'un savoir-faire, qui doivent assumer leurs responsabilités.
Je vis dans une région minière. J'ai participé, lors de conseils municipaux, à des votes autorisant la fermeture de certains sites, car les communes doivent donner leur aval. Je dois reconnaitre que nous ne connaissions pas, alors, toutes les conséquences de nos votes et nous l'avons compris plus tard.
Les sociétés d'exploitations minières avaient le souci de se désengager le plus vite possible car elles n'avaient plus d'activité. Il était fréquent qu'on abandonne au fond de la mine tous les gros engins qui y avaient travaillé parce qu'on trouvait inutile de les remonter, avec les conséquences que l'on imagine sur la nappe phréatique. Heureusement, les pratiques ont évolué et le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) a mené des contrôles beaucoup plus poussés. Pour autant, qu'une entreprise qui a travaillé sur un site soit responsable de ce qu'elle a fait est un principe sain.
Par ailleurs, lorsqu'on ouvre une décharge d'ordures ménagères, l'entreprise qui l'exploite en est responsable pendant les trente années qui suivent sa fermeture, sans que cela pose le moindre problème.
Si cet article ne constitue pas une « sur-transposition », c'est au moins un cavalier. En effet, la Commission européenne ne nous demande pas de transférer les stockages de gaz du code minier à la législation relative aux ICPE. Je vous propose donc moi aussi de laisser au code minier ce qui relève du code minier. Le chiffre d'une responsabilité de dix ans qui est cité n'est pas figé ; il n'est qu'une moyenne constatée, car nous savons que si la fermeture s'est réalisée sur plusieurs années, la responsabilité peut-être plus longue, en particulier si les pouvoirs publics le souhaitent. Nous pouvons faire confiance à la vigilance de notre fonction publique qui, sur ces sujets, fait preuve d'une grande efficacité. Laissons donc au code minier ce qui est au code minier et contentons-nous de transposer ce que nous avons à transposer.
La commission a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.
Examen des articles
TITRE IER DISPOSITIONS RELATIVES À LA SÉCURITÉ DES OPÉRATIONS PÉTROLIÈRES ET GAZIÈRES
Article 1er à 6, 6 bis, 7 et 8 (Conformes)
Je rappelle que les articles 1er à 6, 6 bis, 7 et 8 sont conformes.
Article 9
Chacun des rapporteurs présente une proposition de rétablissement de l'article 9 supprimé par le Sénat.
Je propose de réintroduire dans le texte un article 9 modifié par rapport au texte initial, afin de laisser sous le régime du code minier ce qui relève actuellement du code minier.
Pour ma part, je propose de réintroduire l'article 9 dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée, qui clarifie le droit applicable.
La commission mixte paritaire rejette la proposition de M. Michel Raison et adopte la proposition de Mme Viviane Le Dissez.
L'article 9 est ainsi rédigé dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.
TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES AUX PRODUITS ET ÉQUIPMENTSÀ RISQUES
Article 11
La commission mixte paritaire adopte l'article 11 dans la rédaction du Sénat.
Article 12
La commission mixte paritaire adopte l'article 12 dans la rédaction du Sénat.
Article 12 bis (Conforme)
TITRE III DISPOSITIONS RELATIVES AUX PRODUITS CHIMIQUES
Articles 13 et 14 (Conformes)
Les articles 13 et 14 sont conformes.
Article 15
La commission mixte paritaire adopte l'article 15 dans la rédaction du Sénat.
TITRE IV DISPOSITIONS RELATIVES À L'ENCADREMENT DE LA MISE EN CULTURE D'ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
Article 18
La commission mixte paritaire adopte l'article 18 dans la rédaction du Sénat.
TITRE VI DISPOSITIONS RELATIVES AUX QUOTAS D'ÉMISSION DE GAZ À EFFET DE SERRE
Article 21
La commission mixte paritaire adopte l'article 21 dans la rédaction du Sénat.
La commission mixte paritaire a adopté, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion.
La réunion est levée à 15 heures 35.