Je voudrais rappeler brièvement et schématiquement l'histoire de ce qu'il est convenu d'appeler : le « rabais britannique ».
Il peut être utile en effet, dans le cadre des perspectives financières 2014-2020 et des négociations auxquelles elles vont donner lieu, de s'interroger sur ces dispositions.
L'entrée de la Grande-Bretagne dans la Communauté a marqué l'arrivée d'un pays dont les structures économiques différaient à bien des égards de celles de ses nouveaux partenaires, notamment en matière agricole.
L'agriculture britannique était composée de grandes exploitations de bonne productivité, mais peu exportatrices. En revanche, les importations de produits agricoles par la Grande-Bretagne étaient très importantes, en provenance en grande partie des pays du Commonwealth.
Or, les importations étant taxées, 90 % de ces taxes FEOGA étaient payées par la Grande-Bretagne à une époque où la PAC représentait 75 % du budget de l'Union. Inversement, l'agriculture britannique était peu subventionnée. Le Royaume-Uni participait donc pour une part importante aux ressources de la Communauté et recevait peu en retour. Le fameux « juste retour ».
L'importance des importations générait des prélèvements agricoles élevés ainsi que des droits de douane. De même, en raison de la part importante de la consommation dans le PNB britannique, les recettes de TVA à reverser à la Communauté étaient également importantes.
À l'inverse, les agriculteurs étaient peu nombreux, le marché agricole était bien structuré et comptait peu de production excédentaire, et donc l'agriculture britannique recevait peu de la Communauté.
La Grande-Bretagne contribuait pour 24 % au budget de la Communauté, recevait 10 % des dépenses de celle-ci, alors qu'elle représentait 14 % du produit de la Communauté.
En outre, la Grande-Bretagne n'était pas aussi riche qu'on eut pu le croire. À l'époque, elle figurait au 2e rang des pays de la Communauté pour ce qui concerne le PIB par habitant. Objectivement, un dédommagement de la Grande-Bretagne paraissait légitime. Ses partenaires le reconnaissaient, mais n'étaient pas pressés d'en tirer des conclusions.
La Grande-Bretagne est entrée dans la Communauté le 1er janvier 1973. Dès 1974, M. Wilson dénonçait la situation que je viens de décrire.
À la fin de cette même année, les 9 et 10 décembre 1974, la Communauté reconnaissait la « situation inacceptable » dans laquelle se trouve le Royaume-Uni.
En 1975, la Communauté accepte la mise en place d'un « mécanisme correcteur » au profit de tout État membre qui serait placé dans une situation trop défavorable. Ce dispositif ne sera jamais appliqué.
Ce n'est qu'après 1980 que le Royaume-Uni recevra pour la première fois un chèque de compensation au titre de la politique régionale européenne. Ceci selon les indications du sommet de Dublin des 29 et 30 novembre 1979.
Cette « solution » présentait l'avantage de ne rien figer dans le marbre et de pouvoir en rediscuter chaque année. Mais c'était sans compter avec la persévérance de la Grande-Bretagne. Toutefois, ce n'est qu'en 1984, au sommet de Fontainebleau, que fut décidé le principe d'un versement annuel. En fait, une diminution (rabais) du montant de la cotisation britannique. Ce mécanisme entra en vigueur en 1985, 12 ans après l'entrée de la Grande-Bretagne dans la Communauté.
L'Allemagne, autre contributeur important, se voyait également diminuer sa cotisation. Plus tard, d'autres pays profiteront aussi de ce mécanisme.
Le mode de calcul était en fait assez complexe, et il le deviendra encore plus au fur et à mesure que l'environnement budgétaire de la Communauté évoluera :
- L'introduction en 1988 d'une nouvelle ressource budgétaire fondée sur le PNB (aujourd'hui RNB),
- l'augmentation des frais de perception des ressources propres,
ont ainsi conduit à revoir le règlement.
Par ailleurs, l'élargissement a également influencé le montant du rabais britannique.
En 2005, Tony Blair a concédé une diminution de son chèque, progressivement jusqu'en 2014. C'est la réforme de 2007. Toutefois, Tony Blair a obtenu que l'ajustement à la baisse ne dépasse pas 10,5 milliards d'euros.
Autres éléments de complexité :
L'Allemagne, étant le premier contributeur net, n'a pas admis que sa participation au rabais britannique soit de 100 % de ce que donnaient les calculs. Par ailleurs, d'autres pays ont emboîté le pas de l'Allemagne, considérant que leur contribution était excessive.
La Suède, les Pays-Bas, l'Autriche obtinrent ainsi une réduction des trois quarts de leur part dans le financement du rabais britannique. Il en est résulté inversement une augmentation de la participation au rabais britannique des autres États dont la France, qui est aujourd'hui le premier contributeur, 27 % en 2010.
On atteint ainsi un sommet de complexité, en même temps que l'on peut s'interroger sur la pertinence et la permanence aujourd'hui de la situation qui avait justifié l'instauration du rabais britannique. En effet, si, objectivement, on a pu comprendre que la structure de l'économie britannique était défavorable à ce pays quant au déséquilibre des sommes versées et des sommes reçues, on est tout de même fondé aujourd'hui à poser plusieurs questions au regard des grands principes fondateurs de l'Union : cohésion économique, solidarité entre États, ressources propres, autonomie financière, universalité du budget, transparence des comptes.
Dès le début, dans le traité de Rome, sont affirmés les principes de cohésion économique et sociale, et de solidarité entre États membres.
Ces objectifs fondamentaux demeurent.
Si l'on peut comprendre qu'au lendemain de son entrée, la Grande-Bretagne était fondée à demander un rabais le temps de réorganiser les grandes orientations de son économie, on peut aussi considérer que ce système de rabais n'a pas de raison d'être définitif, mais doit être conçu plutôt comme une aide à la transition vers un système plus cohérent avec l'Union européenne.
Les temps ont changé depuis Fontainebleau, le Royaume-Uni est devenu l'un des pays les plus riches de l'Union européenne, le seul à disposer d'une rente pétrolière ; par ailleurs, la City est devenue l'une des principales places financières mondiales.
Durant les décennies 80 et 90, la croissance du Royaume-Uni a été supérieure à celle de la France et de l'Allemagne. La crise a quelque peu remis en cause cette évolution, mais par habitant et exprimé en standard de pouvoir d'achat, le PIB britannique reste supérieur au PIB français et au PIB allemand alors que la contribution nette de la France au financement du budget de l'Union, exprimée en proportion du PNB, a considérablement augmenté en 10 ans. Quant à la contribution brute de notre pays, sa part est aujourd'hui près de deux fois celle du Royaume-Uni et la France est le premier payeur du chèque britannique.
Par ailleurs, la politique agricole commune n'occupe plus la même place dans le budget de l'Union, on est passé de 75 % à 45 % environ. En outre, d'une façon générale, la PAC a évolué dans le sens souhaité par les Britanniques : ouverture des marchés, aides à la personne plutôt que soutien des prix.
Le Royaume-Uni profite beaucoup plus de la PAC aujourd'hui que lorsqu'il est entré dans la Communauté. Si l'on procède à une analyse bilatérale, le chèque français au rabais britannique (1,3 à 1,7 milliard d'euros par an) est supérieur à ce que le Royaume-Uni paie pour la partie française de la PAC.
Par ailleurs, le principe des ressources propres consacré par le traité de Maastricht est toujours en vigueur ; elles sont même censées financer intégralement le budget de l'Union. Or, si les prélèvements agricoles et les droits de douane vont tous à la Communauté, leur part a diminué sensiblement et ils sont complétés par des contributions de chaque État (TVA, ressource RNB sont des versements directs des États).
Le chèque britannique demeure non conforme au principe toujours en vigueur de l'autonomie financière de l'Union européenne.
En outre, le principe d'universalité, selon lequel des recettes ne peuvent pas être affectées à des dépenses en vigueur depuis le règlement financier de décembre 1977, est mis à mal par le rabais britannique puisqu'une partie des contributions des États est attribuée à l'un d'entre eux.
Le principe de péréquation n'est pas compatible avec le principe d'universalité.
Enfin, la Cour des comptes européenne a fait remarquer à plusieurs reprises que le rabais britannique n'était pas compatible avec le principe de transparence en raison de la complexité de son calcul qui, au demeurant, repose sur des notions de « charge budgétaire excessive » et de « prospérité relative » qui n'ont jamais reçu de définition précise et qui relèvent davantage d'une appréciation politique tant il se révèle impossible de déterminer exactement les positions nettes effectives des différents États membres.
La notion de solde net à laquelle s'est toujours référé le Royaume-Uni est donc contestable, difficile à chiffrer objectivement, susceptible de calculs très différents et, surtout, elle ne prend pas en compte l'ensemble des gains et des pertes économiques et politiques liés à l'appartenance à l'Union.
Si l'on intègre ces notions, un rapport du Parlement européen de 1998, rédigé par M. Klaus Gretschmann, affirme même que, de plus grand débiteur net, le Royaume-Uni devient le plus grand bénéficiaire net des États considérés.
Enfin, si le Royaume-Uni continue à présenter sa situation comme déficitaire sans rabais, il convient de remarquer que c'est en grande partie parce que sa situation d'origine en matière de commerce extérieur n'a pas beaucoup évolué et reste atypique dans l'Union (propension forte à importer des denrées alimentaires en dehors de l'Union). De plus, l'Union européenne continue d'offrir des contingents tarifaires particuliers à de nombreux pays du Commonwealth : Australie, Canada, Nouvelle Zélande.
L'ensemble de ces considérations conduit à souhaiter que le rabais britannique, qui, au surplus, profite à un pays non membre de la zone euro, techniquement contestable, politiquement de moins en moins justifié, ne soit plus envisagé comme une rente définitive mais comme une aide à l'intégration communautaire qui doit progressivement s'éteindre.
Ce doit être un des enjeux des négociations du futur cadre financier 2014-2020.
On doit toutefois être conscient des difficultés de l'exercice :
en cette matière, les décisions doivent être prises à l'unanimité ;
il ne faut pas, pour nous, Français, que la contrepartie soit préjudiciable à la PAC ;
il est probable que d'autres pays auront intérêt à soutenir la Grande-Bretagne.
Voilà donc de belles empoignades, de belles crises, de longues nuits de négociations, de déclarations péremptoires de chefs d'État en perspective, comme seule l'Europe en a le secret.
Quel est finalement le montant global du chèque britannique et quelle part en assume-t-elle ?
La part de la France a varié, récemment, entre 1,3 et 1,7 milliard d'euros. Elle représente environ 27 % du montant global du chèque britannique.
Ce n'est pas négligeable ! Et comment peut-on remettre en cause cette dépense ?
La meilleure occasion de remise en cause est la prochaine négociation du cadre des perspectives financières 2014-2020 avec le risque que cela comporte d'une contestation, en parallèle, de la PAC. À cet égard, les choses ont d'ailleurs bien changé depuis trois ans. Il faudrait obtenir au minimum une reconduction de cette politique. Pour cette raison, on ne peut pas demander la suppression immédiate, pure et simple, du rabais, mais sa disparition progressive, en ciseau. Cela peut être étalé jusqu'en 2020. L'absence de marges de manoeuvre budgétaire disponibles rend les choses plus difficiles.
Un autre paquet qui peut être mis sur la table à l'occasion des négociations est celui des politiques de cohésion et de développement régional. Au début des années 1980, le montant des aides régionales consenties à la Grande-Bretagne était renégocié chaque année afin de corriger le solde britannique. En réalité, il y a deux options possibles : soit adopter une position consistant à dénoncer le caractère intolérable du rabais et tenter d'obtenir sa suppression en ciseau, soit accepter sa pérennisation pour protéger la PAC.
Avec ce rapport, nous disposons d'un argumentaire complet et bien construit. Mais la position que nous défendons sur ce problème du rabais britannique est-elle franco-française ou avons-nous des alliés ?
Il faut avoir à l'esprit qu'en matière de PAC, parmi les contributeurs nets au budget européen, il y a plus de pays qui payent que de pays qui reçoivent. L'Allemagne, par ailleurs, a obtenu des accommodements particuliers quant au rabais britannique et en profite assez largement. Elle a donc intérêt, dans une certaine mesure, à ce que le rabais soit maintenu et celui-ci risque ainsi, probablement, de ne pas être unanimement dénoncé. Il y aura vraisemblablement une sorte de grand marchandage entre la politique de cohésion, la PAC, le rabais britannique, l'intérêt étant de pouvoir remettre en discussion ce dernier, contesté par ailleurs par le Parlement européen, dans le contexte d'une négociation globale.
À l'issue du débat, la commission des affaires européennes a autorisé, à l'unanimité, la publication du rapport, paru sous le numéro 603 et disponible sur Internet à l'adresse suivante :
www.senat.fr/europe/rap.html
Conformément au règlement du Sénat, notre commission est chargée d'examiner la proposition de résolution européenne n° 565 (2010-2011) déposée par Jacques Legendre le 31 mai 2011.
En moins d'un an, le Parlement français a adopté plusieurs dispositions tendant à encadrer le développement du livre numérique. Elles font suite à une réflexion foisonnante et à plusieurs rapports parlementaires et administratifs sur la régulation du prix du livre numérique. On citera notamment les travaux de la commission constituée sous la présidence de M. Bruno Patino, qui a remis son rapport le 30 juin 2008, et qui plaide pour une mesure normative permettant aux ayants-droit de conserver la maîtrise du prix du livre dans l'univers numérique.
Le rapport Patino posait ainsi les données du débat : « L'entrée dans l'ère numérique semble se produire plus tardivement pour le livre que pour d'autres industries culturelles. Pourtant, plusieurs secteurs de l'édition comme les livres professionnels, pratiques ou de référence, sont déjà largement dématérialisés. Cette évolution n'a, pour l'instant, remis en cause ni le modèle commercial, ni la relation avec les auteurs, ni les usages des lecteurs. Mais qu'en serait-il si une accélération, voire un basculement dans le numérique se produisait ? Une telle hypothèse, si elle ne peut être prédite avec certitude, mérite que les acteurs du secteur s'y préparent, compte tenu de ses possibles effets sur une économie du livre aux équilibres précaires. [...] Une vigilance particulière doit notamment être portée à la concurrence nouvelle qui pourrait s'exercer entre les détenteurs de droits (auteurs et éditeurs), dont la rémunération de la création doit être préservée et valorisée, et les détenteurs d'accès et de réseaux, qui n'ont pas nécessairement intérêt à la valorisation des droits de propriété intellectuelle ». Les livres ne sont pas des biens commerciaux comme les autres. Il doit en être de même pour les livres numériques, la différence de support ne modifiant pas la nature particulière de ces oeuvres de l'esprit.
Ces réflexions ont donc conduit le Parlement français à légiférer dans une matière où la France a été traditionnellement pionnière. Sa législation sur le livre papier a été souvent imitée depuis la loi du 10 août 1981, dite « loi Lang », entrée en application le 1er janvier 1982, et qui a instauré le système du prix unique du livre.
Le Sénat a été l'initiateur résolu de cette nouvelle législation guidée par les principes suivants :
- la propriété intellectuelle doit demeurer la clé de voûte de l'édition, et les éditeurs doivent conserver un rôle central dans la détermination des prix ;
- le maillage culturel de notre territoire, auquel contribuent la diversité de l'édition française et la multiplicité des librairies, doit être préservé.
En premier lieu, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2011, trois amendements identiques sénatoriaux ont été adoptés, avec les réticences du Gouvernement et les hésitations de la commission des finances, afin d'appliquer au livre numérique le même taux réduit de TVA dont bénéficie le livre « papier ». Ces amendements sont devenus l'article 25 de la loi de finances pour 2011.
En second lieu, nos collègues Catherine Dumas et Jacques Legendre, auteurs de la présente proposition de résolution, ont déposé le 8 septembre 2010 une proposition de loi relative au prix du livre numérique. Inspirée directement par la loi du 10 août 1981 relative au prix du livre, cette proposition tend à transposer au livre numérique dit « homothétique » les principes de cette loi à savoir prix unique fixé par l'éditeur et obligation pour les distributeurs de vendre le livre à ce prix.
Cette proposition de loi est devenue la loi du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique.
Le Sénat a donc adopté à deux reprises en moins de six mois des positions très fortes en faveur du livre numérique. La présente proposition de résolution en est le prolongement direct et se fait l'écho des débats qui ont animé notre assemblée. Son objet est néanmoins plus large.
Elle reprend les principaux termes de l'action du Sénat (TVA à taux réduit, protection des éditeurs et auteurs face aux distributeurs), tout en élargissant la problématique à l'ensemble de la diversité culturelle, le livre numérique n'étant qu'un aspect. Elle est présentée par Jacques Legendre, président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, comme il s'y était engagé en séance publique lors de l'adoption des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative au prix du livre numérique.
L'objet de la résolution est de convaincre les institutions européennes et nos partenaires que les activités économiques sur l'Internet doivent être régulées et encadrées, de la même manière que dans le monde physique, dès lors que le jeu libre du marché risque de nuire à la promotion et à la préservation de la diversité culturelle. Surtout lorsque le jeu libre du marché est en réalité faussé par la concurrence fiscale déloyale de certains États membres, en particulier le Luxembourg. Il faut accompagner la transition du monde physique vers le monde numérique.
Les termes de la proposition de résolution sont très volontaires et reflètent l'intensité des débats au Sénat :
- protection de la propriété intellectuelle et rémunération juste et équitable des auteurs ;
- refus d'assimiler les biens culturels diffusés par voie électronique à des prestations de services ;
- crainte d'un transfert de la valeur-ajoutée en aval de la filière et condamnation de la tendance à la constitution d'un oligopole de distributeurs, au détriment de la rémunération nécessaire des éditeurs et des auteurs ;
- mise en place d'un cadre de régulation favorable au maintien de la diversité de la création.
Ce texte tend en conséquence à demander une modification de la législation communautaire, en particulier de la législation relative à la TVA et de la directive du 12 décembre 2006 sur les services dans le marché intérieur. Cette directive considère en effet les biens culturels diffusés par voie électronique comme des prestations de services. Il en découle l'interdiction d'appliquer un taux de TVA et d'imposer des règles extraterritoriales en matière de fixation du prix.
La proposition de résolution est enfin et surtout une déclaration politique importante au moment où la France va devoir défendre auprès de la Commission européenne le bien fondé de la loi sur le prix du livre numérique et l'application du taux réduit de TVA.
En effet, ces deux mesures seraient contraires au droit communautaire, et en particulier à la liberté d'établissement et à la liberté de prestation de services, selon la Commission européenne. Le Sénat les a d'ailleurs adoptées en connaissance de cause comme le montrent les débats en séance publique devant les deux assemblées. Surtout, la Commission européenne a rendu deux avis circonstanciés, à la demande du Gouvernement, sur la compatibilité de la proposition de loi relative au prix du livre numérique avec le droit communautaire.
Je vous propose d'adopter la proposition de résolution en lui apportant plusieurs modifications rédactionnelles dans un souci de synthèse. La version modifiée vous a été transmise vendredi. Je vous suggère encore une petite modification afin de citer la directive sur le commerce électronique. Sur le fond, je vous propose d'approuver les principaux objectifs de la résolution qui sont conformes aux traités.
Les discussions qui ont commencé avec les institutions européennes seront délicates, les mesures nationales précitées heurtant très probablement le droit communautaire. Le texte s'inscrit également dans le débat plus large, initié par la France, de la nécessaire harmonisation ou convergence de la fiscalité européenne lorsque les facteurs de production sont mobiles.
C'est en connaissance de cause que le Sénat porte le débat au niveau européen. La Commission européenne partage les objectifs défendus. Reste à la convaincre du bien fondé et de l'utilité des mesures préconisées. A cet égard, le Parlement européen a adopté récemment deux résolutions qui rejoignent les préoccupations du Sénat. Elles sont citées dans la proposition de résolution.
Pour conclure, je crois que cette proposition de résolution, très générale, fixe la grille de lecture de notre assemblée avant la présentation par la Commission européenne de plusieurs initiatives législatives, conformément à sa communication intitulée une « Stratégie numérique pour l'Europe » adoptée le 26 août 2010. A cet égard, le collège des commissaires a adopté la semaine dernière une proposition de directive sur les oeuvres orphelines. C'est à l'aune de cette proposition de résolution que nous devrons examiner ces propositions.
Nous approuvons cette proposition de résolution européenne de la même manière que nous avions approuvé la proposition de loi relative au prix du livre numérique. Il est essentiel que ce texte mette en avant la défense des droits d'auteur et de la propriété intellectuelle. Avez-vous apporté des modifications de fond à la proposition de résolution ?
Non, il s'agit seulement de modifications rédactionnelles ou de précision. Le texte est plus ramassé, ce qui lui donne plus de force.
J'ai cru comprendre que la Commission européenne avait pour ambition de présenter un code communautaire de la propriété intellectuelle. Il lui faudra beaucoup de courage et de ténacité, les États membres en ayant des conceptions très différentes.
Des dispositions sont-elles prévues pour tenir compte de la situation particulière des publications scientifiques ou des abonnements ?
L'article 2 de la loi du 26 mai 2011 sur le prix du livre numérique répond directement à cette question en excluant le principe du prix unique pour ce type de publications.
Cette proposition de résolution est un acte politique important dans la phase de discussion qui va s'engager avec la Commission européenne.
La commission des affaires européennes a alors adopté la proposition de résolution ainsi modifiée, à l'unanimité :
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu l'article 167 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,
Vu la stratégie « Europe 2020 » de l'Union européenne du 19 mai 2010,
Vu le Livre vert de la Commission intitulé « Libérer le potentiel des industries culturelles et créatives » du 27 avril 2010 (COM (2010) 183) et la résolution du Parlement européen du 12 mai 2011 adoptée en réponse audit Livre vert (2010/2156 (INI)),
Vu la communication de la Commission intitulée « Une stratégie numérique pour l'Europe » du 26 août 2010 (COM (2010) 245),
Vu la résolution du Parlement européen du 12 mai 2011 sur les dimensions culturelles des actions extérieures de l'Union européenne (2010/2160 (INI)),
Considérant les engagements internationaux de la France et de l'Union européenne au titre de la convention de l'UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles du 20 octobre 2005,
Considérant que, dans ses conclusions adoptées le 28 mai 2011, le G8 a prôné le respect des droits de propriété intellectuelle sur Internet ainsi que la création d'un « environnement dans lequel Internet peut prendre son essor d'une manière équilibrée »,
Jugeant équilibrées les conclusions du rapport de M. Jean-Michel HUBERT, remis au Premier ministre le 1er octobre 2010, sur « les perspectives pour une Europe numérique »,
Considérant que la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 sur le prix du livre numérique, fondatrice pour la régulation des industries culturelles à l'ère numérique, revêt le caractère d'une disposition impérative et répond à un impérieux motif d'intérêt général - la protection de la diversité culturelle - consacré par la convention de l'UNESCO précitée ainsi que par les traités et la jurisprudence européenne,
Considérant que, de la même manière que les biens culturels physiques, les biens culturels diffusés par voie électronique ne doivent pas être assimilés à des biens ou des services commerciaux quelconques et qu'il revient à l'Union de créer les conditions d'une offre de biens et services culturels numériques légale, diverse, abondante et attractive,
Estime que la Commission européenne, si elle se préoccupe légitimement des intérêts des consommateurs, doit aussi développer une vision politique et stratégique ambitieuse bénéficiant aux industries, entrepreneurs, salariés, créateurs et citoyens européens,
Constate qu'à l'inverse, l'absence d'un cadre réglementaire fort conforte le développement d'un oligopole de multinationales fondé sur une stratégie de concurrence fiscale déloyale au sein de l'Union, au détriment du marché de l'emploi et des finances publiques de la majorité des États membres,
Demande au Gouvernement de « poursuivre le travail de conviction entamé auprès des institutions européennes et de nos partenaires des autres États membres de l'Union européenne », comme s'y est engagé le ministre de la culture et de la communication au Sénat le 5 mai 2011, lors de l'adoption de la loi du 26 mai 2011 précitée relative au prix du livre numérique,
Souligne en ce sens la nécessité de tirer toutes les conséquences des engagements internationaux en faveur de la diversité culturelle et de défendre auprès des institutions européennes l'application effective de la Convention de l'Unesco précitée,
Demande au Gouvernement de convaincre la Commission, le Parlement européen et les autres États membres de l'urgence :
d'une harmonisation des taux de TVA, afin que les services en ligne diffusant des livres, de la presse, des films ou de la musique puissent bénéficier d'un taux réduit,
d'une révision de la directive n° 2006/123/CE du 12 décembre 2006 dite « services », afin que les biens culturels électroniques ne soient plus traités comme des prestations de services, et d'une révision de la directive n° 2000/31/CE du 8 juin 2000 dite « commerce électronique », afin que la spécificité des biens culturels soit prise en compte,
d'un renforcement de la compétitivité, des capacités de création et de développement des acteurs européens de la culture,
d'une défense résolue de cette conception de la diversité culturelle à l'ère numérique dans le cadre des négociations commerciales multilatérales et bilatérales engagées par l'Union,
Insiste pour que cette politique respecte la propriété intellectuelle, garantisse aux auteurs une rémunération juste et équitable et se préoccupe, par ailleurs, de la protection des données personnelles et de la sécurité des systèmes,
Nous avons été saisis d'une proposition de résolution présentée par notre collègue Richard Yung et les membres du groupe socialiste.
Là également, pour permettre à la commission des lois de se saisir, éventuellement, avant la fin de la session, nous avons dû inscrire cette proposition très rapidement à notre ordre du jour.
Et je remercie notre collègue Robert del Picchia d'avoir accepté de faire diligence pour rapporter ce texte.
Je donne la parole à Richard Yung, auteur de la proposition de résolution.
Cette proposition de résolution européenne peut paraître anticiper les conclusions du groupe de suivi de l'espace Schengen que nous avons mis en place sur le modèle de ce que nous avons pu observer en Italie. Mais il ne nous semblait pas possible de rester inactifs alors que le Conseil européen doit adopter une position le 24 juin prochain. Dans ce contexte, il est nécessaire que le Sénat fasse connaître son point de vue.
Je rappelle que dans le cadre des règles de l'espace Schengen, il est déjà possible, dans certaines circonstances, de rétablir des contrôles aux frontières intérieures. Ces clauses dites de sauvegarde ont d'ailleurs déjà été utilisées, à plusieurs reprises, dans le passé.
Aujourd'hui, l'arrivée de migrants tunisiens, puis libyens sur l'île de Lampedusa constitue le prétexte à un débat sur la révision des clauses de sauvegarde. Je veux souligner que ces migrants sont soit des jeunes Tunisiens qui ont été formés et qui espèrent trouver un emploi en Europe, soit des ressortissants libyens demandeurs d'asile en raison des menaces qui pèsent sur eux, ou encore des ressortissants de pays subsahariens. L'Italie, confrontée à cette arrivée de migrants sur son territoire, leur a délivré des laissez-passer provisoires leur permettant de circuler dans l'espace européen. Cette initiative italienne a mis sur la table le problème de la gestion commune d'une arrivée massive de migrants. Dans ce contexte, la France et l'Italie ont saisi la Commission européenne d'une demande de révision des règles de Schengen. A tort, la Commission européenne a accepté de mettre cette question à l'ordre du jour. Deux questions sont posées : l'une relative au rétablissement du contrôle des frontières intérieures, l'autre portant sur une gestion intergouvernementale des flux migratoires qui empêche toute clarification.
Les réactions aux propositions de la Commission européenne ont été assez variées, mais une inquiétude très forte a été exprimée au Parlement européen sur les menaces qu'elles feraient peser sur le principe de la libre circulation.
C'est pourquoi nous souhaitons que le Sénat rappelle son attachement au principe de la libre circulation qui constitue un acquis majeur de la construction européenne. Toute mise en cause de ce principe aurait des conséquences économiques graves et nourrirait un risque de mesures de rétorsion de la part de pays tiers.
Notre proposition de résolution européenne comporte trois volets :
- elle souligne que des mécanismes existent déjà pour faire face à des circonstances exceptionnelles ;
- elle appelle à ne pas remettre en cause les acquis de la libre circulation ;
- elle demande une communautarisation de l'évaluation des politiques relatives à l'espace Schengen.
Sur ce dernier point, je veux souligner qu'il y a là un véritable enjeu. Il faut réviser le règlement dit Dublin II, qui affirme la compétence en matière d'asile du premier pays d'arrivée. La Cour de justice de l'Union européenne vient de reconnaître que la Grèce, en raison des défaillances de son système d'asile, n'était pas en mesure de reprendre sur son sol des demandeurs primo-arrivants. Par ailleurs, il doit être possible de mettre en oeuvre le dispositif de protection temporaire, prévu par une directive de 2001 qui permet une gestion commune en cas d'afflux massif de migrants. L'application de cette directive devrait aussi amener à distinguer entre les demandeurs d'asile et les migrants illégaux qui doivent être reconduits dans leurs pays, sous réserve d'un traitement correct. Enfin, il paraît indispensable que les aides de l'Union européenne à la Tunisie et l'Égypte, qui font face à un afflux massif de réfugiés en provenance de Libye, soient beaucoup plus fortes.
Notre collègue Robert del Picchia ne pouvant nous rejoindre qu'un peu plus tard, il m'a demandé de vous donner communication de son rapport.
1. Rappel du contexte
L'espace Schengen est un espace de libre circulation dans lequel les États signataires ont aboli toutes leurs frontières internes pour une frontière extérieure unique où sont effectués les contrôles d'entrée selon des procédures identiques. Des règles et des procédures communes sont appliquées en particulier dans le domaine des visas pour séjours de courte durée et des contrôles aux frontières.
Afin de garantir la sécurité au sein de l'espace Schengen, la coopération et la coordination entre les services de police et les autorités judiciaires ont été renforcées. La coopération Schengen a été intégrée au cadre juridique de l'Union européenne par le traité d'Amsterdam en 1997. L'espace Schengen s'est peu à peu étendu à la quasi-totalité des États membres. Chypre ayant demandé un délai supplémentaire, la Bulgarie et la Roumanie sont les derniers nouveaux États membres à faire l'objet d'une procédure d'évaluation en vue de leur entrée dans l'espace Schengen.
La décision des autorités italiennes de délivrer aux Tunisiens arrivés clandestinement en Italie entre les mois de janvier et d'avril 2011 des titres de séjour provisoires pour raisons humanitaires d'une durée de six mois a soulevé une polémique sur la possibilité, pour les titulaires du titre de séjour, de circuler librement dans l'espace Schengen ainsi que sur le manque de solidarité intra européenne en matière de gestion des flux migratoires.
Par une lettre conjointe en date du 26 avril 2011, le président de la République et le président du Conseil des ministres italien ont saisi la Commission européenne, demandant plusieurs aménagements, tant des règles applicables à l'espace Schengen (code frontières Schengen) que de la politique commune en matière d'immigration et d'asile. Le Conseil Justice et affaires intérieures s'est réuni le 12 mai 2011. Il a examiné la communication de la Commission européenne sur les migrations du 4 mai, qui avait fait suite aux demandes françaises et italiennes d'adapter la politique européenne en matière de migration. Un conseil européen se tiendra sur le sujet de l'espace Schengen le 24 juin.
L'attention se focalise notamment sur la possibilité de restaurer les contrôles systématiques aux frontières intérieures en cas d'afflux massif d'immigrants ou en cas de défaillance d'un État membre dans la surveillance des frontières extérieures dont il a la charge (clause de sauvegarde). Actuellement, sauf cas d'urgence, la clause de sauvegarde ne peut être actionnée qu'en cas de menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure.
La communication de la Commission européenne va au-delà de la seule question des contrôles aux frontières et porte également sur la mise en oeuvre d'une véritable politique européenne de l'immigration et de l'asile ainsi que sur la mutualisation des moyens humains et matériels des États membres. Elle devrait être suivie de propositions détaillées.
2. Que demande la proposition de résolution ?
Tout d'abord, elle rappelle l'attachement au principe de la liberté de circulation et à l'espace sans frontière de Schengen. Ensuite, elle s'oppose à toute modification de l'acquis Schengen tendant à l'élargissement des clauses dites de sauvegarde, qui permettent aux États membres de rétablir des contrôles aux frontières intérieures.
Les auteurs de la proposition considèrent que la réintroduction de contrôles temporaires aux frontières intérieures en cas de défaillance d'un État membre à contrôler son segment de frontière extérieure ou en raison d'une pression migratoire illégale forte, imprévue mais non extraordinaire, constitue une remise en cause de l'acquis Schengen et, par là-même, de la liberté de circulation.
Ils condamnent le rétablissement des contrôles à ses frontières intérieures par un État membre sur la base d'une décision unilatérale. Ils demandent l'application de sanctions contre les irrégularités graves constatées dans l'application de l'acquis Schengen.
La proposition demande, par ailleurs, aux États membres d'accepter la communautarisation du système de l'évaluation de l'application des règles Schengen. Elle souligne la nécessité d'un contrôle parlementaire et démocratique de l'agence européenne Frontex. Enfin, elle estime que le débat autour de la révision de la réglementation Schengen ne doit pas être instrumentalisé par les États membres pour retarder l'entrée dans l'espace Schengen de la Roumanie et de la Bulgarie, qui remplissent désormais les critères techniques demandés aux autres États membres parties prenantes.
3. Quelle appréciation pouvons-nous porter ?
Nous ne pouvons que partager l'attachement au principe de liberté de circulation. Nous pouvons aussi souscrire pleinement à l'idée que l'espace Schengen est l'une des réalisations les plus concrètes de l'Union européenne. Je relève que cette position est aussi partagée par le Gouvernement qui a clairement indiqué qu'il s'agissait de réformer Schengen et non de le remettre en cause.
De même, je peux rejoindre les auteurs de la proposition de résolution sur le renforcement des mécanismes d'évaluation qui sont un facteur essentiel de confiance mutuelle entre les États membres, et sur la nécessité du contrôle parlementaire de l'agence Frontex.
Pour le reste, j'avoue avoir une forte divergence d'appréciation avec les auteurs de la proposition de résolution. Être attaché à Schengen, cela implique aussi de veiller à ce que cet espace fonctionne de manière efficace et qu'ils reçoivent la confiance de nos concitoyens sur la réalité du contrôle de nos frontières. En particulier, il me paraît légitime de réfléchir aux conditions de mise en oeuvre des clauses de sauvegarde. Les propositions faites par la Commission européenne me paraissent une bonne base de discussion pour faire évoluer le cas échéant les règles en vigueur afin de les adapter aux réalités. Il ne me paraît donc pas souhaitable de les écarter a priori comme le fait la proposition de résolution.
Il faut bien sûr intégrer cette réflexion dans un cadre plus large d'une véritable politique européenne de l'immigration et de l'asile. Il faut aussi renforcer la mutualisation des moyens entre les États membres et les capacités opérationnelles de l'agence Frontex.
Enfin, si la Bulgarie et de la Roumanie on vocation à intégrer l'espace Schengen, cela n'est envisageable que si toutes les conditions sont réunies en particulier pour assurer un contrôle efficace et sûr des frontières extérieures. Il y a là un enjeu essentiel auquel nos concitoyens sont légitimement attentifs. On ne peut donc se fonder sur les seuls critères techniques. Il faut avoir toutes les assurances sur ce point crucial. Or je rappelle que ces deux pays font encore l'objet d'un mécanisme de coopération et de vérification sur les questions de justice et d'affaires intérieures qui, jusqu'à présent n'a pas montré des progrès décisifs notamment sur la lutte contre la corruption. Nous devons donc être ouverts mais aussi vigilants sur l'évolution de ce dossier.
Toutes ces questions sont très importantes. C'est pourquoi notre commission des affaires européennes a mis en place avec son homologue de l'Assemblée nationale un groupe de suivi des accords de Schengen. Ce groupe s'est réuni une première fois à l'Assemblée nationale le 31 mai. Il se réunit à nouveau aujourd'hui ici-même. En particulier, il lui revient d'examiner les conditions de mise en oeuvre des clauses de sauvegarde et de réfléchir à la nécessaire mutualisation des moyens.
A travers les auditions qu'il conduit, le groupe de suivi va recueillir des informations très utiles et forger des éléments d'appréciation qu'il soumettra à notre commission. Celle-ci pourra alors examiner sereinement les propositions qui seront faites. Elle le fera, j'en suis sûr, animée par la volonté de consolider Schengen et non pas d'affaiblir cet espace de libre circulation.
Outre mon désaccord sur le fond avec plusieurs affirmations contenues dans la proposition de résolution, il me paraît donc nécessaire de laisser le groupe de suivi poursuivre ses travaux sans préjuger de ses conclusions. Chacun pourra se forger son opinion sur les conditions de fonctionnement de l'espace Schengen et faire valoir son point de vue.
Pour l'ensemble de ces motifs, je ne pense pas que la commission des affaires européennes puisse adopter la proposition de résolution qui nous est soumise.
Notre proposition n'a pas pour objet de vider de son contenu le groupe de suivi de l'espace Schengen. Nous souhaitons donner une orientation avant que le Conseil européen ne se prononce. Mais cela n'empêchera pas le groupe de suivi de poursuivre ses travaux et de formuler des propositions.
Nous transmettrons le compte rendu de nos débats au groupe de suivi. Je vous propose de procéder au vote sur la proposition de résolution, car il apparaît que, s'il existe plusieurs points d'accord, il y a aussi certaines divergences de fond. J'informe la commission que j'ai reçu un certain nombre de délégations de vote.
J'indique que notre groupe a également déposé des délégations de vote. Je suis surpris que vous ne les ayez pas reçues.
Si la proposition de résolution est adoptée, elle sera transmise à la commission des lois qui sera appelée à statuer. Dans ces conditions, n'est-il pas envisageable de voter sur le principe de la transmission à la commission des lois sans se prononcer sur le fond ?
Je rappelle que, en application du Règlement, la proposition sera, dans tous les cas, transmise à la commission des lois. Si nous l'adoptons, la commission des lois disposera d'un délai d'un mois pour se prononcer. Si nous la rejetons, elle ne sera pas enfermée dans un délai pour s'en saisir. Par exemple, elle pourra le faire au début de la prochaine session ordinaire.
Je dois constater que le Règlement ne prévoit pas la simple transmission d'un texte par la commission des affaires européennes.
Je ne peux prendre en compte que les seules délégations de vote qui m'ont été officiellement transmises. Je souligne que ces délégations sont adressées au Président du Sénat, et non pas au Bureau de notre commission, qui n'a pas compétence pour cela. Je me dois d'appliquer le Règlement.
Je vous prie d'excuser mon retard qui ne m'a pas permis de vous donner personnellement communication de mon rapport. Compte tenu de l'ordre du jour du Sénat et des nombreuses obligations que nous avons actuellement, je suis surpris de l'urgence dans laquelle cette proposition de résolution européenne a été inscrite à l'ordre du jour. J'aurais, pour ma part, souhaité disposer de plus de temps pour l'examiner.
Je rappelle que l'inscription de la proposition à l'ordre du jour a été décidée par le Bureau de la commission.
Le Règlement du Sénat prévoit qu'en principe la commission des affaires européennes doit se réunir le jeudi. Or, de manière systématique, ses réunions se tiennent le mardi ou le mercredi, en interférence avec les autres commissions. Nous ne pouvons pas suivre. La commission des affaires européennes doit faire face à des impératifs de plus en plus nombreux. Elle doit se donner les moyens d'exercer ses missions dans de bonnes conditions.
Nous devons arbitrer entre deux inconvénients : celui que vous avez mentionné et le risque d'une présence plus clairsemée le jeudi, certains de nos collègues étant appelés à rejoindre leur département.
Nous devrions coordonner notre agenda avec celui de la commission des affaires étrangères.
Pourquoi seulement la commission des affaires étrangères alors que la plupart d'entre nous sont inscrits dans d'autres commissions ? Pour ma part, il me semble que l'on ne devrait être membre que de la seule commission des affaires européennes. L'appartenance à deux commissions en même temps devient ingérable. Je rappelle par ailleurs que le Règlement du Sénat autorise des dérogations au principe de réunions fixées le jeudi et qu'il n'est pas toujours possible de se réunir le jeudi compte tenu des obligations locales de nombreux collègues.
Vos interventions font état de réelles difficultés dont nous devrons nous saisir dès le début de la prochaine mandature. Je ferai écho de notre débat auprès du Président de la commission.
La commission des affaires européennes a rejeté la proposition de résolution n° 582 par huit voix contre quatre.
Le Sénat,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu l'article 3.2 du traité sur l'Union européenne,
Vu l'article 26.2 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,
Vu les deux premiers chapitres du titre V sur l'espace de liberté, de sécurité et de justice du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,
Vu le règlement (CE) N°562/2006 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (« code frontières Schengen ») du 15 mars 2006,
Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un mécanisme d'évaluation destiné à contrôler l'application de l'acquis de Schengen 16 novembre 2010,
Vu la communication de la Commission européenne intitulée « Communication sur la migration » du 4 mai 2011 (COM (2011)248),
Vu le Rapport 2010 sur l'immigration et l'asile du 24 mai 2011 (COM(2011) 291),
rappelle son attachement au principe de la liberté de circulation et à l'espace sans frontière de Schengen, qui est l'une des réalisations les plus concrètes de l'Union européenne,
s'oppose à toute modification de l'acquis Schengen tendant à l'élargissement des clauses dites de sauvegarde, qui permettent aux États membres de rétablir des contrôles aux frontières intérieures,
considère que la réintroduction de contrôles temporaires aux frontières intérieures en cas de défaillance d'un État membre à contrôler son segment de frontière extérieure ou en raison d'une pression migratoire illégale forte, imprévue mais non extraordinaire, constitue une remise en cause de l'acquis Schengen et, par là-même, de la liberté de circulation,
condamne le rétablissement des contrôles à ses frontières intérieures par un État membre sur la base d'une décision unilatérale,
souhaite à ce que les irrégularités graves constatées dans l'application de l'acquis Schengen puissent être sanctionnées,
demande aux États membres d'accepter la communautarisation du système de l'évaluation de l'application des règles Schengen en adoptant la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2010 portant création d'un mécanisme d'évaluation destiné à contrôler l'application de l'acquis de Schengen,
souligne la nécessité d'un contrôle parlementaire et démocratique de l'agence européenne pour la gestion et la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne (FRONTEX),