Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 15 novembre 2022 à 15h50

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • logement
  • pénitentiaire
  • rénovation

La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous débutons nos travaux par l'examen de la mission « Cohésion des territoires ». Je salue la présence de trois rapporteurs pour avis : Mme Viviane Artigalas sur le programme « Politique de la ville » et Mme Dominique Estrosi Sassone sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement » et « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » pour la commission des affaires économiques ; et M. Alain Duffourg sur le programme « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » pour la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Blanc

rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » - Les crédits de la mission « Cohésion des territoires » s'élèvent à 17,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP). À périmètre constant, l'augmentation des crédits est de l'ordre de 410,8 millions d'euros, soit une hausse de 2,4 % en CP. Toutefois, compte tenu d'une prévision d'inflation élevée en 2023, les crédits diminuent en volume de 1,9 % en CP.

Bernard Delcros nous ayant déjà présenté, le 25 octobre dernier, les crédits des programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État », j'évoquerai les quatre autres programmes, avec les crédits destinés aux politiques d'hébergement, d'aides au logement, d'urbanisme et de l'habitat, ainsi qu'à la politique de la ville.

Le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » est dédié à la politique d'hébergement et d'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées. Les crédits sur ce programme s'élèvent à 2,8 milliards d'euros. Des crédits importants ont été ouverts en cours d'année 2022, de sorte que ceux qui sont prévus par le projet de loi de finances (PLF) sont en diminution de 131 millions d'euros par rapport à l'exécution 2022, soit une baisse de 4,5 % en euros constants. Une fois de plus, ce programme entame l'année avec des crédits qui pourraient bien apparaître comme sous-évalués en cours d'année, au regard du maintien des besoins à un niveau élevé.

Le plan Logement d'abord, qui visait à faire passer les personnes directement de la rue à un logement, en évitant le passage par un hébergement d'urgence, n'a pas obtenu les résultats espérés. Le nombre de places en intermédiation locative financées par le programme 177, qui était de 33 604 places en 2017, dépassait les 70 000 places à la mi-2022. Les crédits poursuivent leur augmentation cette année, mais, contrairement au quinquennat précédent, le Gouvernement tarde à afficher des objectifs clairs.

Cette navigation à vue est encore plus évidente concernant la politique d'hébergement d'urgence. Le plan précité, malgré ses vertus, n'a pas permis de réduire les besoins en hébergement. Le parc d'hébergement se situe à un niveau historiquement élevé de près de 200 000 logements, soit 40 000 places de plus que le niveau antérieur à la crise sanitaire. Le Gouvernement avait affiché l'objectif de réduire de 14 000 places ce parc en 2023, puisque les effets de la crise sanitaire se sont estompés ; il vient d'y renoncer et de demander l'ouverture de 40 millions d'euros supplémentaires à l'Assemblée nationale.

La crise sanitaire a ainsi révélé des problèmes de mal-logement masqués par l'hébergement chez des tiers, et il est difficilement envisageable de remettre à la rue les personnes qui ont été hébergées. La question des migrants se pose également ; le dispositif national d'accueil géré par le ministère de l'intérieur est saturé ; il engorge le dispositif d'hébergement du programme 177. Pour toutes ces raisons, les besoins en crédits du programme 177 restent importants.

Le programme 109 « Aide à l'accès au logement » comprend, à titre principal, les crédits destinés au financement des aides personnelles au logement (APL). Les crédits demandés pour 2023 s'élèvent à 13,4 milliards d'euros, soit une hausse de 292 millions d'euros en euros courants, mais une diminution de 2 % en volume.

Les APL contribuent de manière importante à réduire le taux d'effort des ménages modestes, c'est-à-dire la part de leurs revenus qui est effectivement consacrée à la dépense de logement. Ce taux d'effort, de l'ordre de 20 % en moyenne avec les aides, serait supérieur à 40 % sans elles. Toutefois, sur le long terme, les prestations sociales couvrent une part de plus en plus réduite des dépenses courantes des ménages, et les dépenses de logement augmentent. Les ménages doivent faire face au poids croissant de l'inflation, malgré les mesures du type « bouclier tarifaire ».

Le Fonds national d'aide au logement (Fnal), qui centralise les crédits des aides au logement, devra certainement être réformé dans les années à venir. Il s'agit d'un fonds dépourvu de personnalité juridique ; en application de la réforme de la loi organique du 28 décembre dernier relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, il ne pourra donc plus recevoir le produit des cotisations employeurs, qui représentent près de 3 milliards d'euros par an. Un nouveau schéma de financement devra être mis en place.

Le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » porte les crédits consacrés à des actions diverses, liées à la construction et l'habitat. Les politiques concernées passent principalement par les dépenses fiscales d'un montant de 15 milliards d'euros, par les fonds de concours et par l'action des opérateurs, en particulier l'Agence nationale de l'habitat (Anah), qui bénéficient du produit de taxes affectées. Les crédits budgétaires relevant de ce programme s'élèvent à 780,8 millions d'euros en CP, soit une hausse de près de 50 % par rapport à 2022.

J'évoquerai d'abord le secteur de la construction, pour lequel il est difficile d'être optimiste. Les tensions sur les approvisionnements consécutives à la crise sanitaire ne constituent plus le problème principal, mais celles sur les prix ne devraient pas s'atténuer en 2023. Les professionnels indiquent leur inquiétude au sujet des permis de construire, de plus en plus difficiles à obtenir ; plus personne ne veut de constructions nouvelles dans sa commune. En outre, la remontée sensible des taux risque de freiner les dépôts de permis de construire dans les mois et années à venir.

Outre la construction neuve, la rénovation du parc existant est le grand défi du secteur du logement. C'est le principal point du budget du programme 135 : la subvention versée à l'Anah passe de 170 millions à plus de 400 millions d'euros ; dans le même temps, le produit des ventes de quotas carbone rapportera 700 millions d'euros, contre 481 millions cette année. L'Anah dispose par ailleurs de 2,3 milliards d'euros sur le programme 174 de la mission « Écologie » pour financer le dispositif MaPrimeRénov'.

Ces crédits sont considérables, mais nécessaires. Il apparaît toutefois que le problème le plus pressant n'est pas budgétaire ; il réside davantage du côté de l'offre de rénovation que de la demande. Il est nécessaire de développer un véritable écosystème de la rénovation globale des logements, nous manquons d'entreprises sur le marché de la rénovation des logements privés. C'est aussi une difficulté pour les particuliers, car la rénovation globale demande des compétences en maîtrise d'ouvrage. Il conviendrait de développer l'aide MaPrimeRénov' Sérénité, qui accompagne de manière plus importante les ménages, sous conditions de ressources. Les banques doivent aussi mieux jouer le jeu ; seules deux banques proposent le prêt avance rénovation (PAR) qui, depuis le 1er janvier 2022, doit permettre à des ménages modestes de financer les travaux de rénovation énergétique de leur résidence principale.

Concernant les logements sociaux, l'objectif de 250 000 logements agréés en 2021 et 2022, annoncé par le précédent gouvernement, a été abandonné. Environ 95 000 logements ont été agréés en 2021, et la réalisation devrait être du même ordre, ou peut-être un peu plus, en 2022. Le secteur est atteint, comme tous les acteurs de la construction, par la hausse des prix à la construction, ainsi que par l'augmentation du taux du livret A, passé en quelques mois de 0,5 à 2 %. Cette hausse entraîne un accroissement des charges financières d'intérêt, car les emprunts sont à taux variable.

Afin d'assurer l'équilibre financier des organismes de logement social à long terme, le précédent gouvernement a proposé de développer les ventes ; celles-ci devaient passer de moins de 10 000 à 40 000 par an ; l'objectif n'a pas été atteint, avec un résultat de 11 000 ventes par an environ. Ce résultat me semble heureux : la mission d'un organisme de logement social est de fournir un parc de logements adapté aux besoins ; et un modèle économique reposant sur la vente se paie à long terme par la perte des recettes liées aux loyers.

Le modèle de financement du logement social devra parvenir à conjuguer deux objectifs : l'accroissement du parc, afin de satisfaire les demandes toujours insatisfaites ; et la rénovation du parc existant. En conséquence, malgré le poids de la réduction de loyer de solidarité (RLS), qui reste de 1,3 milliard d'euros par an, les bailleurs sociaux devront procéder à des investissements massifs.

Un des organismes du secteur, qui joue un rôle essentiel dans son financement, est soumis à une pression particulière ; il s'agit d'Action Logement. D'une part, l'article 16 du PLF le soumet à une contribution de 300 millions d'euros pour financer les aides à la pierre ; et, d'autre part, chose plus importante encore, sa filiale financière, Action Logement Services (ALS), a été classée par l'Insee en administration publique.

Première conséquence : sa dette a été intégrée à la dette publique, augmentant celle-ci de 0,3 point. Nul doute que le ministère de l'économie va désormais porter un regard particulièrement attentif sur la situation d'ALS.

Deuxième conséquence : ALS devrait être bientôt interdite d'emprunt sur plus de douze mois, ce qui remettra en cause partiellement ses plans d'investissement. Cette décision comptable risque d'affecter la participation d'Action Logement aux politiques publiques dont la mise en oeuvre dépend de sa contribution, à commencer par le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).

Les enjeux de construction et de la rénovation ne peuvent être dissociés du nouvel impératif assigné aux collectivités territoriales, celui de la sobriété foncière et du « zéro artificialisation nette » (ZAN).

Le fonds friches, très apprécié en 2021 et 2022, a apporté environ 750 millions d'euros de crédits et a révélé l'étendue des besoins ; mais cela était insuffisant pour atteindre tout le potentiel. Le Gouvernement précise que la réhabilitation des friches sera portée par le fonds d'accélération des investissements industriels dans les territoires. Les modalités et les montants ne sont pas indiqués dans les documents budgétaires et l'on ignore ce qui sera fait concrètement pour la réhabilitation des friches l'an prochain. Ce flou est regrettable, car il entraîne un risque de démobilisation dans un domaine où la vision de long terme est essentielle.

Il en est de même pour la définition d'un modèle de financement du ZAN. J'ai fait des propositions ici même en juin, et le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) nous a présenté, il y a trois semaines, un rapport du plus haut intérêt. Notre mission conjointe de contrôle sur le ZAN a déjà consulté de nombreux acteurs, notamment sur les aspects réglementaires, et formulera bientôt ses conclusions. La question est sensible, il est essentiel que le Gouvernement s'en empare afin de « climatiser » réellement la fiscalité et les ressources des collectivités.

Enfin, dans le cadre du programme 147, les crédits de la politique de la ville s'élèvent à 597,5 millions d'euros en CP, soit une augmentation de 39,6 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022. Ces crédits sont principalement consacrés à une diversité d'actions engagées dans le cadre des contrats de ville. On peut noter une diminution de 3,8 millions d'euros des crédits destinés à l'éducation, au travers du programme de réussite éducative (PRE) et des cités éducatives. Il convient toutefois d'approuver l'intégration à la budgétisation initiale du dispositif « Quartiers d'été », à hauteur de 32,1 millions d'euros ; ce dispositif, depuis trois ans, était financé en cours d'année par des ouvertures de crédits en loi de finances rectificative (LFR).

Ces crédits ne correspondent qu'à une partie de l'action de l'État, qui passe aussi par les crédits de nombreux ministères, dont la traçabilité vers les quartiers n'est pas toujours assurée. Les résultats sont toujours aussi difficiles à percevoir, comme l'avait observé Jean-Louis Borloo lui-même en 2018. Plus de 40 % des adultes de 15 à 64 ans résidant dans les quartiers ciblés par la politique de la ville restent à l'écart du marché de l'emploi, contre moins de 30 % dans les autres quartiers des mêmes unités urbaines ; et les habitants de ces quartiers ont un revenu fiscal moyen égal à moins de la moitié de celui de leur agglomération, ce qui est le signe de la persistance d'une pauvreté relative très importante.

Le programme 147 devrait normalement bénéficier d'une autre ligne budgétaire importante pour la rénovation urbaine, puisque le NPNRU de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) entre dans une phase active, avec des dépenses de l'ordre de 568 millions d'euros dès 2022, qui ont vocation à s'accroître à l'avenir. Cette ligne budgétaire est réduite à un montant symbolique de 15 millions d'euros ; l'État repousse toujours la mise en oeuvre de sa promesse d'apporter 1,2 milliard d'euros au total à ce programme, qui repose donc toujours autant sur les contributions d'Action Logement et des bailleurs sociaux. Sachant les incertitudes qui pèsent sur ces acteurs, cela n'est pas fait pour rassurer.

Compte tenu des considérations précédentes, je propose de nous en remettre à la sagesse du Sénat sur l'adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires » pour les programmes 177, 109, 135 et 147.

Par ailleurs, je dois vous présenter un article rattaché à la mission. L'article 41 ter, introduit sur l'initiative du Gouvernement dans le texte soumis à l'engagement de sa responsabilité devant l'Assemblée nationale, prévoit, au titre de l'année 2023, de ne pas appliquer la règle d'indexation de la réduction de loyer de solidarité en fonction de l'inflation. Cette mesure, déjà mise en oeuvre les années précédentes, a pour objet d'éviter que cette charge sur les bailleurs sociaux ne dépasse les objectifs prévus. Je propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement » et « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires ». - Il s'agit d'un budget de transition, tant en matière de rénovation énergétique que de financement de logement social. Il manque une stratégie, une hiérarchisation des objectifs et des orientations pluriannuelles.

Nous n'avons toujours aucune visibilité sur la RLS. Le dispositif est prorogé pour cette année, mais le Gouvernement n'a pas précisé s'il devenait pérenne.

L'organisme Action Logement a de nouveau été mis fortement à contribution, et contre sa volonté. Il y a toujours cette crainte d'un possible démembrement et d'une prise de contrôle de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) par les services de Bercy, qui auraient ainsi un droit de regard sur son usage. Il s'agit de rester vigilant, comme nous avions pu l'être avec Viviane Artigalas, Valérie Létard et Marie-Noëlle Lienemann dans le cadre de la mission flash, pour alerter sur ce risque de budgétisation de l'organisme. Action Logement doit, plus que jamais, rester autonome et continuer de financer dans la durée la politique du logement.

Sur la rénovation des logements, nous avions indiqué dans la loi Climat et résilience que le calendrier serait difficile à tenir, et cela s'est révélé exact. Les conséquences sont déjà là : des propriétaires retirent leurs biens du marché du logement pour les vendre, faute de disposer des moyens financiers et techniques pour mener à bien la rénovation énergétique des logements, et plus particulièrement les passoires thermiques pour les logements classés F et G. Par ailleurs, le calendrier est également trop contraint pour les logements sous étiquette E.

Concernant le logement social, les bailleurs sociaux n'ont toujours pas de marges de manoeuvre. Leur capacité d'autofinancement est considérablement amoindrie par la RLS, par la hausse du taux du livret A et des taux d'intérêt, et cela est tout à fait préjudiciable à la construction dont nous avons besoin. Comme cela fut signalé à maintes reprises, la crise du logement risque de s'aggraver dans les prochains mois.

C'est la raison pour laquelle, en ma qualité de rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, je donne un avis d'abstention pour ce budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Viviane Artigalas

Concernant le programme « Politique de la ville », il s'agit, là encore, d'un budget de transition en attendant les nouveaux contrats de ville.

On peut quand même se féliciter du budget dédié au dispositif « Quartiers d'été » ; les associations, qui engageaient des actions sans savoir si elles seraient financées, attendaient cela depuis plusieurs années. Autre bonne nouvelle : la pérennité des cités éducatives, avec des financements prévus jusqu'en 2027.

Je me pose la question du financement du renouvellement urbain. Toutes les actions démarrent, et les CP ne sont pas au rendez-vous. L'Anru a suffisamment de trésorerie pour assumer les paiements de cette année et peut-être ceux de l'an prochain. Il faudrait 110 millions d'euros par an de CP pour assurer les 1,2 milliard que l'État doit engager. Nous serons très vigilants sur le sujet.

Cependant, je donne un avis favorable à ce budget de transition.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Duffourg

Concernant le programme 177, 203 000 places ont été pourvues en 2021 dans le cadre du logement des personnes sans abri. Le PLF pour 2023 prévoyait une baisse des crédits, mais le Gouvernement, à la suite de pressions des associations, a fait machine arrière et propose une somme de 40 millions d'euros. Le budget s'élève à 2,8 milliards d'euros.

Le principal problème concerne le nombre de places disponibles. Si j'en crois les associations, entre 15 000 et 30 000 personnes seraient encore dans la rue ; mais si l'on mettait à disposition ces 15 000 ou 30 000 places, il m'a été répondu que cela créerait un appel d'air, avec davantage de demandes encore. Cette année, 100 000 Ukrainiens sont venus sur notre territoire. Ces chiffres s'inscrivent dans le cadre d'une problématique migratoire qui n'a été gérée ni au niveau national ni au niveau européen. Sur les 230 000 places à créer, on distingue 20 % de personnes ayant la nationalité française et 80 % de personnes sans papiers, sans titre de séjour, en situation irrégulière.

J'émets un avis favorable sur ce programme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

La politique du logement navigue entre deux eaux : elle ne trouve de satisfaction ni avec le logement d'urgence, ni avec le neuf, ni avec la rénovation ou la réhabilitation. Néanmoins, il est difficile de s'y opposer, car elle nourrit des espoirs.

En outre, avec la lutte contre la vacance des logements et les tensions liées à la réforme de la taxe d'habitation et à l'objectif ZAN, nous avons besoin d'une conjonction des bonnes volontés et des efforts. Il s'agit d'inciter le Gouvernement à définir des priorités, et ce avec tous les opérateurs - l'Anah, l'Anru et d'autres encore. On constate un appétit d'habiter dans des zones excentrées par rapport aux villes, qu'il s'agisse de petites villes ou de territoires ruraux dès lors que ceux-ci sont bien desservis.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

L'accroissement des crédits pourrait laisser croire que l'effort en faveur du logement est important ; or, sur le terrain, on s'aperçoit qu'il n'en est rien. Lorsque nous avons voté la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan), certains pensaient que le regroupement des opérateurs d'HLM conduirait à améliorer l'efficience de la construction dans notre pays ; si l'on suit les données du rapporteur spécial, c'est l'inverse que l'on observe. Cette approche n'est pas la plus efficace pour répondre aux besoins de logements sur notre territoire.

Pour chacun, il est naturellement essentiel de pouvoir se loger. À défaut, se posent des problèmes sociaux et de désinsertion professionnelle. Quels sont les moyens nécessaires pour relancer la politique du logement ?

Concernant Action Logement, plutôt que d'opérer des ponctions sur le budget, ne vaudrait-il pas mieux demander à l'organisme d'accompagner les opérations directement sur les territoires ?

Nos inquiétudes concernent également l'objectif ZAN et son impact sur la construction. Je doute que l'on puisse répondre à tous les besoins en matière de logement, d'autant qu'un certain nombre de locataires, d'ici peu, seront contraints de quitter les logements ne répondant pas aux prescriptions thermiques. Où vont-ils aller si nous n'avons pas la possibilité de les héberger ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Les artisans nourrissent des inquiétudes concernant la rénovation des logements et MaPrimeRénov'. Avec les économies d'énergie à 1 euro par exemple, certaines personnes se font arnaquer. La concurrence est déloyale par rapport aux artisans et aux entreprises du bâtiment.

Des actions intéressantes sont menées dans le cadre de la politique de la ville ; je pense notamment aux cités éducatives. J'observe toutefois que certains programmes ont été plus ou moins abandonnés. Localement, c'est une préoccupation importante.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Concernant le programme 135, je m'inquiète que l'objectif de 250 000 logements sociaux agréés en 2021 et 2022 soit ramené à 100 000 logements. Pouvez-vous nous en dire davantage à la fois sur la manière dont le Gouvernement justifie cette révision à la baisse et sur les besoins nécessaires ? Dans la gestion de cette pénurie, certains secteurs géographiques sont-ils plus particulièrement touchés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Breuiller

Je n'ai pas bien compris, je l'avoue, la politique du Gouvernement en matière de logement.

Dans toutes les zones touristiques et dans beaucoup de métropoles, l'accès au logement pour les primo-accédants, les étudiants et les jeunes couples est de plus en plus retardé, en raison du faible nombre de logements sociaux et aussi d'Airbnb. A-t-on les chiffres du nombre de logements soustraits à la location familiale, au bénéfice de ces locations saisonnières ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Blanc

Concernant le dispositif ZAN, nous aurons le temps de revenir sur les conséquences financières et fiscales du rapport du CPO. Le ZAN s'entrechoque avec les besoins en logements sociaux de notre pays. Comment construire davantage avec 50 % de foncier en moins dans les dix années à venir ? C'est une question à laquelle nous essaierons de répondre prochainement dans le cadre de la mission conjointe de contrôle présidée par Valérie Létard.

Pour répondre à Michel Canévet, il faut, en effet, commencer à tirer des bilans de la loi Élan. On ne sait pas, par exemple, si les fusions ont bien fonctionné. Nous sommes encore, me semble-t-il, au stade de subir les effets de ces fusions. Il conviendra de procéder à une évaluation.

Quels moyens pour relancer la politique du logement en France ? Dans le rapport, je me suis permis d'insister sur les permis de construire. Il n'y a jamais eu aussi peu de demandes de permis et aussi peu de permis délivrés. C'est un levier intéressant ; il faudrait notamment réfléchir à une simplification des demandes d'autorisation d'urbanisme.

Avec cette nouvelle ponction, il s'agit du énième démembrement d'Action Logement. Par ailleurs, l'Insee demande à ce qu'une partie d'Action Logement soit considérée comme une administration publique, ce qui soumettrait l'organisme aux critères de Maastricht concernant la dette publique et compliquerait beaucoup de choses, ne serait-ce que sa capacité à emprunter.

Le Gouvernement croit beaucoup dans les vertus de la discussion qui va s'ouvrir pour signer une nouvelle convention avec Action Logement, qui a au contraire beaucoup d'inquiétudes. Il serait peut-être temps de crever l'abcès et de sortir de l'ambiguïté. Il serait utile de respecter le paritarisme datant de l'après-guerre, et l'on pourrait demander à Action Logement d'accompagner la politique de logement plutôt que de subir un démembrement.

La montée en puissance de l'Anah doit permettre de porter la rénovation énergétique de manière plus ambitieuse ; mais le contrôle des aides reste un sujet.

Pour répondre à Dominique de Legge, l'objectif était de 250 000 logements sociaux sur deux ans. Le Gouvernement a annoncé 100 000 logements pour chaque année ; en réalité, ce sera moins que cela en logements agréés, sachant que l'agrément ne vaut pas logement réel. La situation est très préoccupante, pour ne pas dire dramatique. En raison de la complexité des procédures, des difficultés pour obtenir des autorisations d'urbanisme, des suites de la crise sanitaire, du coût des matériaux et d'autres freins encore, nous ne répondons pas à la demande de logements sociaux dans notre pays.

Quelle est la politique du Gouvernement en matière de politique de la ville ? Chacun en déduira ce qu'il veut, d'où ma proposition de nous en remettre à la sagesse du Sénat.

La question de la soustraction des logements en zones touristiques est très importante. Concernant Airbnb, nous allons mettre l'accent sur le contrôle. Trop de logements sont dévoyés dans notre pays. Il est grand temps que le législateur se penche sur le sujet. Nous ne savons pas combien de logements sont soustraits à la location familiale - cette question pourrait faire l'objet d'un contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Il faut noter que, dans le cadre de la loi Climat et résilience, les résidences touristiques classées F et G thermiquement ne sont pas concernées par l'obligation de rénovation, contrairement aux logements. Certains préféreront donc continuer à louer leur bien par l'intermédiaire d'Airbnb. Il y a là un trou dans la raquette.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Je ne perçois malheureusement aucun progrès au fil des années. La situation ne s'améliore dans aucun des domaines visés. Les espoirs que nous nourrissons chaque année restent vains.

Par ailleurs, Jean-Baptiste Blanc nous ayant présenté une partie de la mission, après la présentation du rapporteur spécial sur les programmes consacrés à la politique des territoires il y a quelques jours, je cède la parole à Bernard Delcros pour nous rappeler sa proposition.

La commission décide de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur l'adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires ».

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 41 ter

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 41 ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous examinons les crédits de la mission « Justice » et les articles 44 à 44 ter rattachés. Je salue les rapporteurs pour avis de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Il me revient de vous présenter les crédits demandés en 2023 sur la mission « Justice », qui comprend l'ensemble des moyens de la justice judiciaire, de l'administration pénitentiaire, de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et du secrétariat général du ministère de la justice.

Je commencerai cette présentation en me plaçant sous le constat du comité des États généraux de la justice, et en citant les propos de son président, Jean-Marc Sauvé, auditionné la semaine dernière : « La justice est un bateau naufragé. Elle n'a pas coulé à pic, mais elle a pris l'eau progressivement, au fil d'années de restrictions budgétaires. La crise sanitaire a de ce point de vue agi comme un révélateur des dysfonctionnements du service public de la justice, qui connaît une crise majeure. »

Dans ce contexte, les hausses budgétaires significatives constatées depuis 2021 sont absolument essentielles pour remédier aux défaillances de ce service public. L'année 2023 se place dans cette trajectoire, avec une nouvelle hausse des crédits de paiement (CP) de près de 8 %, pour atteindre 11,6 milliards d'euros. En dix ans, le budget de la justice aura ainsi augmenté de 51 %.

La hausse des crédits concerne tous les programmes, à l'exception de celui du Conseil supérieur de la magistrature, et toutes les dépenses. Pour ce qui concerne les dépenses de personnel, 2 253 équivalents temps plein (ETP) seraient créés en 2023. Ils constituent la première tranche du schéma d'emplois très dynamique annoncé par le ministère pour la période 2023-2027, avec la création de 10 016 ETP. À terme, ce serait 1 500 magistrats et 1 500 greffiers supplémentaires qui seraient recrutés, alors que ces métiers connaissent des tensions importantes.

S'agissant des dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention, celles-ci sont également très dynamiques. Cette évolution est due en particulier aux grands chantiers engagés par le ministère de la justice, concernant, par exemple, la mise en oeuvre du plan de transformation numérique de la justice ou le déploiement du plan de création de 15 000 places supplémentaires en détention.

La hausse des crédits alloués à la justice, je le répète, me semble pleinement justifiée au regard du retard accumulé ces dernières décennies. Selon les dernières données publiées par la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (Cepej), la France consacre 72,5 euros par habitant à son système judiciaire, c'est-à-dire près de deux fois moins que l'Allemagne. Elle représente le seul des grands pays européens à consacrer moins de 0,30 % de son PIB à la justice.

Là encore, je ferai miens les propos du président Jean-Marc Sauvé. Pour remédier au manque critique de moyens de la justice, « on ne peut plus continuer d'appliquer une multitude de rustines à une chambre à air dont on n'a pas voulu voir qu'elle était totalement usée ». Une réforme systémique s'impose, tant sur le fond que sur le plan du budget. La future loi de programmation 2023-2027 qui, je l'espère, nous sera prochainement présentée, devra consacrer cette trajectoire.

Bien sûr, il ne s'agit pas de donner un blanc-seing au Gouvernement. L'augmentation significative des moyens du ministère de la justice depuis plusieurs années doit s'accompagner de la diffusion d'une réelle culture de l'évaluation des dépenses réalisées.

Telle que je la conçois, une loi de programmation ne doit pas simplement constituer en la définition d'indicateurs de performance et de lignes de crédits et d'emplois ; elle doit être l'occasion pour le ministère concerné de s'interroger sur le sens des politiques publiques qu'il mène, sur la qualité du service public qu'il soutient et sur sa propre gestion des moyens, budgétaires comme humains. La future loi de programmation des moyens de la justice ne pourra pas à cet égard faire l'économie d'une réflexion sur l'amélioration de la gestion et sur la construction d'indicateurs de suivi fiables. Le ministère s'est trop longtemps retrouvé « dans l'incapacité de relever les défis d'une gestion rigoureuse », pour reprendre de nouveau un constat des États généraux de la justice.

Prenons un exemple : le plan de transformation numérique (PTN) du ministère de la justice. Il était initialement doté de 530 millions d'euros. Il est inconcevable que la Cour des comptes ait dû admettre avoir rencontré d'importantes difficultés pour reconstituer les dépenses budgétaires exécutées au titre de ce plan.

L'informatique fait d'ailleurs partie, avec l'immobilier et la gestion des ressources humaines, des trois enjeux sur lesquels j'ai souhaité un peu plus m'attarder dans le cadre de mes travaux budgétaires.

En effet, si les programmes portés par la mission « Justice » correspondent chacun à l'un des métiers du ministère, ils connaissent des problématiques communes, dont seule la résolution permettra, me semble-t-il, d'améliorer le service public de la justice, en parallèle de réformes de fond.

Je suis en effet convaincu que l'institution judiciaire ne sortira pas de sa crise majeure si elle ne s'interroge pas sur la gestion de ces fonctions support et si le rôle du secrétariat général du ministère n'est pas renforcé en ce sens. Il existe trop souvent une tendance à opposer centralisation et proximité, alors qu'il s'agit de missions différentes. Le fait que le secrétariat général joue un véritable rôle d'impulsion, par exemple sur les projets informatiques, est inséparable de la constitution d'équipes d'informaticiens de proximité dans les juridictions. Ce constat vaut également pour l'immobilier, avec un même impératif, celui de mieux prendre en compte les besoins des usagers de la justice, qu'il s'agisse des personnels, des justiciables ou des professionnels du droit, tels que les avocats.

S'agissant de l'informatique, un deuxième PTN prendra la suite du premier, établi pour la période 2018-2022. Nous avions entendu la Cour des comptes sur sa mise en oeuvre au mois de février dernier. Soyons clairs, le premier PTN était un plan de rattrapage, l'enjeu du deuxième sera de procéder à la modernisation complète du ministère.

Le deuxième PTN reprendra les trois axes du premier, tout en intégrant de nouveaux objectifs. Si les objectifs ont été quasiment atteints sur le premier axe, avec l'équipement de 100 % des agents ayant des fonctions éligibles au télétravail et la mise en oeuvre de la fibre optique dans les 1 500 sites judiciaires, tel n'est pas le cas sur le deuxième axe, celui des applications, et encore moins sur le troisième, l'accompagnement des usagers.

Pour réussir, le deuxième PTN devra non seulement être doté de moyens budgétaires suffisants, mais également tenir compte de plusieurs impératifs. Il devra d'abord pleinement inclure les usagers et leurs besoins, alors que le malaise grandit au sein des juridictions sur la question des outils numériques. Il n'est pas normal que la modification de certains systèmes d'information contraigne désormais les magistrats et les greffiers à ressaisir manuellement d'importants volumes de données. Ensuite, il devra conduire à une véritable interopérabilité des systèmes d'information du ministère. Par exemple, aucune application ne permet aujourd'hui de fournir des données sur le parcours complet des mineurs pris en charge par la justice. Le décloisonnement des applications devra donc s'opérer en interne, mais aussi en externe, avec le ministère de l'intérieur par exemple, et également les professionnels du droit, comme les avocats.

J'en viens à la professionnalisation de la gestion des ressources humaines, émanant également d'une recommandation des États généraux de la justice.

Le pilotage des ressources humaines n'est pas seulement une question d'augmentation des effectifs ; il implique aussi de prendre en compte les questions relatives au vivier de recrutements ou à la revalorisation de certains métiers en perte d'attractivité. Il s'agit là d'un enjeu crucial pour certaines directions.

Ainsi, le directeur de l'administration pénitentiaire nous a confié que le principal défi qui l'attendait ces prochaines années, outre la gestion de la surpopulation carcérale, était celui des ressources humaines. L'ouverture de places de détention supplémentaires, ainsi que l'extension des missions de l'administration pénitentiaire implique en effet de recruter plusieurs centaines de personnes dès 2023. Or la fonction de surveillant pénitentiaire, pourtant essentielle, souffre d'un déficit d'image. L'administration tente d'y apporter une première réponse en jouant sur la rémunération.

C'est également la solution privilégiée par le ministère pour les magistrats, avec l'annonce d'une revalorisation de leur traitement brut de 1 000 euros en moyenne. Cette annonce a surpris les magistrats et les modalités exactes de répartition et de calcul ne sont pas encore connues. D'après les éléments qui nous ont été transmis, l'effort porterait sur la prime modulable, avec l'idée de privilégier les jeunes carrières. Je n'en reste pas moins convaincu que le ministère ne peut pas se contenter d'agir sur la rémunération pour restaurer l'attractivité de ses métiers.

Outre ces enjeux des fonctions support, je me suis également attaché à assurer un suivi des crédits mobilisés pour la mise en oeuvre des réformes que nous avons votées ces dernières années. Je sais l'attachement de notre commission au suivi de l'application des lois, il me semble que cela passe aussi par un suivi de l'application budgétaire.

Je me suis plus particulièrement intéressé à la justice de proximité, à la réforme du code de justice pénale des mineurs, à l'accès au droit ou encore aux dispositions concernant les détenus dans le cadre de la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire. Sur ce dernier point, on peut relever que les crédits alloués au financement des alternatives à l'incarcération atteindraient 53,4 millions d'euros, soit une hausse de 30 % par rapport à 2022. Les équipes dédiées à la surveillance électronique bénéficieraient également d'un renforcement de 27 emplois.

Ce double renforcement des crédits et des personnels tient compte des dispositions adoptées dans la loi précitée. En effet, entrera en vigueur au 1er janvier 2023 la disposition prévoyant une libération sous contrainte de plein droit pour les personnes condamnées à des peines inférieures à deux ans et pour lesquelles le reliquat de peine est inférieur à trois mois, à la condition qu'elles disposent d'un hébergement.

Voilà pour ce qui concerne la présentation de la programmation budgétaire sur la mission « Justice », dont je vous proposerai d'adopter les crédits.

J'en termine en vous présentant rapidement les trois articles rattachés à la mission.

L'article 44 prolonge de deux ans supplémentaires l'expérimentation rendant obligatoire la tentative de médiation préalable pour certaines affaires familiales. J'ai qualifié cette prorogation de « prolongement de la dernière chance », alors que l'expérimentation a débuté il y a déjà six ans.

D'après les données transmises par le ministère, cette prorogation serait accompagnée d'une extension du dispositif, qui pourrait concerner jusqu'à 44 tribunaux judiciaires, contre 11 aujourd'hui. L'objectif est de parvenir à disposer, enfin, de données pour mesurer les effets de cette expérimentation et évaluer l'opportunité de la pérenniser, sous réserve, le cas échéant, d'y apporter des ajustements.

Nous revenons une nouvelle fois sur le problème de l'évaluation : il est grand temps que le ministère s'en préoccupe, et je vous propose donc un avis favorable sur cet article.

L'article 44 bis vise à parachever le volet « recouvrement » de la réforme de l'aide juridictionnelle engagée en 2020. Une partie de cette réforme a consisté à autoriser les avocats commis ou désignés d'office à demander une rétribution, sans avoir déposé au préalable une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide au titre de l'intervention d'un avocat dans des procédures non juridictionnelles. L'article permet de préciser que les bureaux d'aide juridictionnelle seront chargés de constater a posteriori l'éligibilité ou l'inéligibilité à l'une ou à l'autre de ces aides de la personne qui a bénéficié de l'intervention de l'avocat. En cas d'inéligibilité, les bureaux pourront engager une procédure de recouvrement.

Selon le Gouvernement, ce dispositif permettra de recouvrer environ 1 million d'euros chaque année, un montant qui peut de prime abord sembler relativement limité au regard des 641 millions d'euros demandés sur le budget 2023 pour l'aide juridictionnelle. En outre, le montant des sommes effectivement recouvrées par l'État dépendra de la capacité des bureaux à disposer de données précises pour identifier le bénéficiaire. Les développements informatiques permettant aux bureaux d'aide juridictionnelle d'échanger plus facilement sur ce sujet avec les caisses des règlements pécuniaires des avocats (Carpa) et la direction générale des finances publiques (DGFiP) ne seront d'ailleurs pas prêts pour le 1er janvier.

Je vous propose néanmoins un avis favorable sur cet article, qui vise à améliorer le recouvrement par l'État de sommes indûment engagées.

Enfin, l'article 44 ter prolonge jusqu'au 31 décembre 2027 la possibilité de déroger au principe d'encellulement individuel des personnes détenues en maison d'arrêt. Il était tout à fait illusoire que l'État soit en mesure de respecter ce principe au 31 décembre 2022 et ce prolongement était malheureusement attendu de longue date. Au 1er juillet 2022, le taux d'encellulement individuel en maison d'arrêt était de 20,1 %.

Par coordination avec la prorogation de cette dérogation, je vous propose d'adopter un amendement prévoyant de renforcer l'information du Parlement sur l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires et leur impact quant au respect de l'objectif de placement en cellule individuelle. Un tel rapport du Gouvernement au Parlement était prévu au troisième trimestre 2022, je vous propose que deux nouveaux nous soient remis en 2025 et en 2027. Il est en effet à craindre, au regard des dynamiques actuelles, que la France ne puisse pas lever le moratoire en 2027. Par une coïncidence sans doute un peu malheureuse, j'ai auditionné le directeur de l'administration pénitentiaire la semaine pendant laquelle le nombre de personnes détenues en France a atteint un niveau record. Il est clair que le plan « 15 000 places » ne suffira pas à lui seul à lever le moratoire sur l'encellulement individuel. Je partage d'ailleurs son avis sur le fait qu'une politique pénitentiaire ne peut se résumer à une politique immobilière.

Je vous propose donc un avis favorable sur cet article tel que modifié par amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Agnès Canayer

Je souhaite souligner que le constat de la commission des lois va dans le même sens que celui du rapporteur spécial. En effet, les crédits alloués à la justice judiciaire sont en hausse pour la troisième année consécutive, avec une augmentation de plus de 26 % sur trois ans ; nous ne pouvons que nous en féliciter. De plus, on note une pérennisation de 674 postes de contractuels associée à une création de 1 200 nouveaux postes, notamment des magistrats, des greffiers et des assistants juridiques. Cela témoigne d'une bonne dynamique.

Néanmoins, il existe un vrai sujet de structuration et de réorganisation, puisque ces embauches donnent une vision très brouillonne de la justice. L'évaluation de la charge de travail des magistrats devait se terminer à la fin de l'année 2022 ; il en serait de même pour les greffes, car l'outil de gestion et de répartition des emplois de fonctionnaires (Outilgref) ne permet d'avoir accès qu'à une évaluation strictement quantitative. Ces évaluations sont nécessaires pour permettre une plus grande efficacité. En effet, les délais restent le point faible de la justice, avec un délai de cinquante mois pour juger une affaire criminelle en France, ce dont on ne peut se satisfaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

La hausse de 7 % des crédits demandés dans le cadre du projet de loi de finances 2023, après celle de 9 % observée ces deux dernières années, est certes intéressante, mais elle ne suffit pas à rattraper nos voisins allemands. De plus, dans le cadre de la construction de 15 000 places supplémentaires de prison, toutes les places ne seront pas livrées d'ici la fin de l'année, loin de là. Cette situation s'explique non seulement par l'épidémie de covid, mais également par les problèmes d'acceptabilité de la construction d'établissements pénitentiaires et par le prix du foncier.

Un deuxième problème a trait au recrutement, notamment des surveillants pénitentiaires. Les candidats témoignent en effet d'un niveau trop faible. Or il est primordial de recruter suffisamment de surveillants, à la fois pour les maisons d'arrêt existantes et pour celles à construire, et éviter la situation que l'on connaît dans certains établissements de Haute-Garonne avec des taux d'occupation dépassant les 185 %.

Les surveillants pénitentiaires ont vu leurs missions d'accroître. Ils doivent être capables de repérer les signaux faibles, dans le cadre notamment de la radicalisation, et de les transcrire dans des rapports intelligibles en direction des officiers de renseignement.

Les difficultés de logement des surveillants pénitentiaires représentent un frein supplémentaire au recrutement, en raison d'une forme de concurrence exacerbée avec la police, la gendarmerie et les policiers municipaux. Pour pallier cette situation, deux localités sont aujourd'hui proposées par le ministère pour construire des logements : Savigny-sur-Orge et Fleury-Mérogis. Cette proposition est portée depuis quatre ans par le Sénat. Une collaboration avec les offices d'HLM permettrait au ministère de la justice de réaliser une opération pratiquement neutre financièrement. Si la volonté d'action s'est fait attendre, elle semble enfin se manifester.

En conclusion, au regard de cette augmentation de budget annoncée, nous donnerons un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Premièrement, je souhaite souligner que la modernisation des tribunaux et des cités judiciaires est un programme immobilier lourd, qui avance souvent moins vite que prévu. Je prends l'exemple d'une cité judiciaire située à Nancy, qui a été très mal construite dès son origine. Le nouveau bâtiment devant accueillir les magistrats ne semble pas parfaitement adapté aux demandes, avec par exemple des salles de réunion en nombre insuffisant. Avez-vous entendu parler d'autres cas problématiques de construction ou de rénovation de bâtiments ?

Deuxièmement, l'attractivité des postes de surveillants pénitentiaires pose effectivement question, comme il me l'a été confirmé lors de ma visite à la maison d'arrêt de Nancy-Maxéville. Ainsi, des campagnes publicitaires ont eu lieu, afin de valoriser ces fonctions qui étaient pourtant très recherchées vingt-cinq ans auparavant. L'administration pénitentiaire a donc peut-être pris le parti de recruter des candidats ayant un niveau d'entrée plus faible, mais pouvant bénéficier d'un parcours de formation. Partagez-vous ce constat ?

Troisièmement, vous avez souligné que se pose un problème de foncier pour les maisons d'arrêt, mais il en est de même pour les centres éducatifs fermés. La question de l'acceptabilité sociale se pose d'autant plus que ces établissements doivent rester à proximité des villes, afin de ne pas couper les jeunes de leur vie sociale. Ces centres mobilisent presque deux équivalents temps plein travaillé (ETPT) pour un jeune accueilli, ce qui représente d'importants budgets. Néanmoins, j'estime que cette politique doit continuer à être soutenue.

Debut de section - PermalienPhoto de Emmanuel Capus

Je partage l'inquiétude du rapporteur spécial sur l'état actuel de notre système judiciaire. Je souhaiterais poser trois questions.

La première concerne l'aide juridictionnelle : si les crédits augmentent de 4,8 %, il subsiste un retard invraisemblable de paiement dans les territoires. Ainsi, à la cour d'appel d'Angers, les avocats témoignent de retards de paiement de plusieurs mois, voire de plusieurs années, ce qui met en danger l'équilibre financier des cabinets. L'augmentation des crédits permettra-t-elle de résorber ces retards ?

La deuxième question porte sur les aspects financiers : quelles sont les pistes, en dehors du traitement financier qui n'est pas suffisant selon votre rapport, qui permettraient de restaurer l'attractivité du service public de la justice ?

La troisième question a trait au système pénitentiaire. Si 1 958 places de maisons d'arrêt sont livrées en 2023, combien de places doivent être lancées dans les prochaines années ? Et comment expliquer les retards de livraison au regard de l'objectif des 15 000 places ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Je comprends l'avis favorable du rapporteur spécial sur cette mission au vu de l'augmentation significative des crédits. Toutefois, je m'inquiète des évolutions numériques, et en particulier du caractère cloisonné des systèmes informatiques. Existe-t-il une réelle volonté de fluidifier la communication entre la police, la gendarmerie et l'institution judiciaire ? Après le semi-échec du premier PTN, il semble que le ministère de la justice soit en ordre de marche pour améliorer la situation.

S'agissant de l'augmentation significative de la rémunération des magistrats de l'ordre judiciaire, qui se rapprocherait de celle des magistrats de l'ordre administratif, les greffiers connaîtront-ils également une augmentation de leur rémunération ?

En ce qui concerne la surpopulation carcérale, qu'en est-il de la rénovation, tout à fait nécessaire, des établissements existants, même si des besoins nouveaux se font sentir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

S'il convient de saluer l'augmentation de près de 8 % des crédits alloués à la justice, il faut rappeler que la justice française est toujours moins bien lotie que ses homologues en Europe. De même, on ne peut que regretter le manque de suivi des États généraux de la justice, l'accroissement des délais de jugement, une dégradation de la qualité en raison du recours au juge unique et le retard de la mise en oeuvre de l'encellulement individuel.

Ma question concerne l'accès au droit et l'aide juridictionnelle : avez-vous des informations quant au projet de décret visant à revaloriser les rétributions au titre de l'aide juridictionnelle qui serait en cours de rédaction ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Ma question portera sur la rémunération des magistrats et des personnels chargés de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. En effet, lors d'un déplacement au parquet national financier de Paris, dans le cadre de la mission d'information relative à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, les magistrats ont témoigné de la difficulté à recruter du personnel spécialisé dans le domaine de la lutte contre la fraude, qui est pourtant une cause nationale. Avez-vous des informations sur les efforts réalisés en termes de rémunération et de formation de ces personnels ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

N'existerait-il pas certains abus concernant l'aide juridictionnelle, car certains y recourent pour attaquer l'État ou les collectivités ? Cette « politique de guichet » ne pourrait-elle pas être limitée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Meurant

Nous ne pouvons pas faire l'impasse sur les dysfonctionnements qui ne relèveraient pas de critères financiers : les outils informatiques, les circulaires appelant à classer sans suite un certain nombre d'affaires, mais également la procédure judiciaire qui permet à des personnes ayant des avocats désignés d'office de faire appel à leur propre avocat et de passer ainsi une seconde fois en justice, ce qui a pour effet de ralentir les jugements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Blanc

Quelle est la vision du Gouvernement concernant la protection judiciaire de la jeunesse ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

S'agissant des nouveaux bâtiments tels que la cité judiciaire de Nancy, il faut savoir que les dossiers importants de rénovation ou de création de structures judiciaires sont gérés directement par l'agence publique pour l'immobilier de la justice (Apij). Il avait été évoqué dans le cadre des États généraux de la justice l'adaptation de ces entités aux nouveaux usages. Certains constats ont déjà été réalisés pour les bâtiments neufs : si les fonctions support ont été mises en valeur, certains bureaux sont partagés. Or cette organisation pose des problèmes pratiques, notamment pour les auditions de mineurs.

Par ailleurs, en ce qui concerne les difficultés de recrutement dans le secteur de l'administration pénitentiaire, il est vrai que la grille de rémunération doit être retravaillée. L'idée est de faire passer les agents de surveillance de la catégorie C vers la catégorie B, avec des effets sur la rémunération. Un travail de réflexion est en cours sur ce sujet.

S'agissant des centres éducatifs fermés, l'objectif ambitieux fixé depuis plusieurs années est maintenu, en dépit des difficultés. Trois centres éducatifs fermés ont été ouverts en 2022 et dix autres sont en cours, dont certains seront gérés par le biais d'associations, mais cinq projets se heurtent à un refus de permis de construire. Ce point rejoint les questions d'acceptabilité évoquées.

Les retards de paiement dans le cadre de l'aide juridictionnelle sont en grande partie liés à des problèmes informatiques qui sont connus et qui devraient être réglés grâce aux nouveaux applicatifs du ministère, en cours de déploiement.

Lorsque l'on évoque l'attractivité pour les magistrats, la prime ne suffit effectivement pas. Tout l'environnement de travail doit être amélioré, et il existe une réelle lassitude de la part des magistrats face à ces dysfonctionnements. Le garde des sceaux a d'ailleurs développé depuis quelques années les postes de juristes assistants qui ont pour mission de renforcer l'équipe autour du juge et d'améliorer le traitement des affaires.

En ce qui concerne le programme des 15 000 places, les retards sont imputables aux difficultés pour trouver du foncier, à la complexité du chantier ou encore à la pénurie de matériaux et matériels de construction. Ainsi, 2 441 places seront opérationnelles en 2022, 1 958 en 2023, et 24 établissements seront livrés en 2024. Les programmes de rénovation de certains établissements de détention ont été poursuivis en parallèle. La pénurie de certains matériaux a un peu retardé les chantiers. Il faudra encore du temps, mais il convient d'avancer sur la question du foncier, avec les élus locaux également. À propos de la surpopulation carcérale, la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis a fait l'objet d'une réhabilitation complète, de même que le centre pénitentiaire des Baumettes et le centre pénitentiaire de Nantes. Les nouveaux établissements concernent les villes de Caen, Troyes, Avignon et Koné en Nouvelle-Calédonie.

M. Canévet a évoqué la volonté d'assurer une bonne liaison au niveau du secrétariat général du ministère. Cela passera par les outils informatiques, par la communication entre le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur, mais aussi par la direction générale des finances publiques (DGFiP), car certains logiciels, notamment ceux qui permettent le recouvrement des amendes pénales, posent problème. Là encore, des efforts s'imposent, de même que la limitation du turn-over dans les services.

Concernant les greffiers, ils seront également concernés par une revalorisation : un montant de 150 euros par mois en 2023 a été évoqué.

Madame Briquet, des discussions sur la revalorisation de l'aide juridictionnelle sont en cours avec les avocats. La revalorisation est continue sur différents exercices, mais n'atteint toujours pas un niveau satisfaisant du point de vue des avocats.

Madame Vermeillet, je ne dispose pas d'informations précises sur la volonté de recruter des magistrats spécialisés dans le domaine de la fraude et de l'évasion fiscales, mais c'est une nécessité.

Vous demandez, monsieur Bascher, s'il y a des abus de l'aide juridictionnelle. Elle permet avant tout l'accès au droit. Vous avez évoqué un nombre de dépôts de plainte abusif, ce qui n'est pas forcément en lien avec le recours à l'aide juridictionnelle, qui répond à des critères financiers et de patrimoine pour son octroi.

Monsieur Meurant, certains délais restent longs, mais les affaires dont vous parlez ne font pas l'objet d'un ciblage particulier. La justice est largement ankylosée dans beaucoup de domaines, d'où ces retards.

M. Blanc a abordé la question de la PJJ. D'importants crédits concerneront ce secteur en 2023 - 289 millions d'euros sont en particulier alloués au secteur associatif -, et un travail sera accompli avec l'univers associatif, très dynamique, qui permet de trouver des solutions dans les territoires. La PJJ reste une priorité du ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Sur la volonté de l'administration pénitentiaire de faire remonter les surveillants pénitentiaires de la catégorie C à la catégorie B, si elle est pleinement justifiée en termes de rémunération et de technicité des métiers, elle se heurte à une difficulté, celle de devoir disposer du baccalauréat. Un tel critère pourrait renforcer les difficultés de recrutement.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Pouvez-vous nous rappeler votre avis, monsieur le rapporteur spécial ?

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Mon avis est favorable. Si nous voulons obtenir des résultats, il faut une politique d'évaluation et soutenir notre justice.

Photo de Claude Raynal

Nous débutons nos travaux par l'examen de la mission « Cohésion des territoires ». Je salue la présence de trois rapporteurs pour avis : Mme Viviane Artigalas sur le programme « Politique de la ville » et Mme Dominique Estrosi Sassone sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement » et « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » pour la commission des affaires économiques ; et M. Alain Duffourg sur le programme « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » pour la commission des affaires sociales.

Photo de Jean-Baptiste Blanc

rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » - Les crédits de la mission « Cohésion des territoires » s'élèvent à 17,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP). À périmètre constant, l'augmentation des crédits est de l'ordre de 410,8 millions d'euros, soit une hausse de 2,4 % en CP. Toutefois, compte tenu d'une prévision d'inflation élevée en 2023, les crédits diminuent en volume de 1,9 % en CP.

Bernard Delcros nous ayant déjà présenté, le 25 octobre dernier, les crédits des programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l'État », j'évoquerai les quatre autres programmes, avec les crédits destinés aux politiques d'hébergement, d'aides au logement, d'urbanisme et de l'habitat, ainsi qu'à la politique de la ville.

Le programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables » est dédié à la politique d'hébergement et d'accès au logement des personnes sans abri ou mal logées. Les crédits sur ce programme s'élèvent à 2,8 milliards d'euros. Des crédits importants ont été ouverts en cours d'année 2022, de sorte que ceux qui sont prévus par le projet de loi de finances (PLF) sont en diminution de 131 millions d'euros par rapport à l'exécution 2022, soit une baisse de 4,5 % en euros constants. Une fois de plus, ce programme entame l'année avec des crédits qui pourraient bien apparaître comme sous-évalués en cours d'année, au regard du maintien des besoins à un niveau élevé.

Le plan Logement d'abord, qui visait à faire passer les personnes directement de la rue à un logement, en évitant le passage par un hébergement d'urgence, n'a pas obtenu les résultats espérés. Le nombre de places en intermédiation locative financées par le programme 177, qui était de 33 604 places en 2017, dépassait les 70 000 places à la mi-2022. Les crédits poursuivent leur augmentation cette année, mais, contrairement au quinquennat précédent, le Gouvernement tarde à afficher des objectifs clairs.

Cette navigation à vue est encore plus évidente concernant la politique d'hébergement d'urgence. Le plan précité, malgré ses vertus, n'a pas permis de réduire les besoins en hébergement. Le parc d'hébergement se situe à un niveau historiquement élevé de près de 200 000 logements, soit 40 000 places de plus que le niveau antérieur à la crise sanitaire. Le Gouvernement avait affiché l'objectif de réduire de 14 000 places ce parc en 2023, puisque les effets de la crise sanitaire se sont estompés ; il vient d'y renoncer et de demander l'ouverture de 40 millions d'euros supplémentaires à l'Assemblée nationale.

La crise sanitaire a ainsi révélé des problèmes de mal-logement masqués par l'hébergement chez des tiers, et il est difficilement envisageable de remettre à la rue les personnes qui ont été hébergées. La question des migrants se pose également ; le dispositif national d'accueil géré par le ministère de l'intérieur est saturé ; il engorge le dispositif d'hébergement du programme 177. Pour toutes ces raisons, les besoins en crédits du programme 177 restent importants.

Le programme 109 « Aide à l'accès au logement » comprend, à titre principal, les crédits destinés au financement des aides personnelles au logement (APL). Les crédits demandés pour 2023 s'élèvent à 13,4 milliards d'euros, soit une hausse de 292 millions d'euros en euros courants, mais une diminution de 2 % en volume.

Les APL contribuent de manière importante à réduire le taux d'effort des ménages modestes, c'est-à-dire la part de leurs revenus qui est effectivement consacrée à la dépense de logement. Ce taux d'effort, de l'ordre de 20 % en moyenne avec les aides, serait supérieur à 40 % sans elles. Toutefois, sur le long terme, les prestations sociales couvrent une part de plus en plus réduite des dépenses courantes des ménages, et les dépenses de logement augmentent. Les ménages doivent faire face au poids croissant de l'inflation, malgré les mesures du type « bouclier tarifaire ».

Le Fonds national d'aide au logement (Fnal), qui centralise les crédits des aides au logement, devra certainement être réformé dans les années à venir. Il s'agit d'un fonds dépourvu de personnalité juridique ; en application de la réforme de la loi organique du 28 décembre dernier relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, il ne pourra donc plus recevoir le produit des cotisations employeurs, qui représentent près de 3 milliards d'euros par an. Un nouveau schéma de financement devra être mis en place.

Le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » porte les crédits consacrés à des actions diverses, liées à la construction et l'habitat. Les politiques concernées passent principalement par les dépenses fiscales d'un montant de 15 milliards d'euros, par les fonds de concours et par l'action des opérateurs, en particulier l'Agence nationale de l'habitat (Anah), qui bénéficient du produit de taxes affectées. Les crédits budgétaires relevant de ce programme s'élèvent à 780,8 millions d'euros en CP, soit une hausse de près de 50 % par rapport à 2022.

J'évoquerai d'abord le secteur de la construction, pour lequel il est difficile d'être optimiste. Les tensions sur les approvisionnements consécutives à la crise sanitaire ne constituent plus le problème principal, mais celles sur les prix ne devraient pas s'atténuer en 2023. Les professionnels indiquent leur inquiétude au sujet des permis de construire, de plus en plus difficiles à obtenir ; plus personne ne veut de constructions nouvelles dans sa commune. En outre, la remontée sensible des taux risque de freiner les dépôts de permis de construire dans les mois et années à venir.

Outre la construction neuve, la rénovation du parc existant est le grand défi du secteur du logement. C'est le principal point du budget du programme 135 : la subvention versée à l'Anah passe de 170 millions à plus de 400 millions d'euros ; dans le même temps, le produit des ventes de quotas carbone rapportera 700 millions d'euros, contre 481 millions cette année. L'Anah dispose par ailleurs de 2,3 milliards d'euros sur le programme 174 de la mission « Écologie » pour financer le dispositif MaPrimeRénov'.

Ces crédits sont considérables, mais nécessaires. Il apparaît toutefois que le problème le plus pressant n'est pas budgétaire ; il réside davantage du côté de l'offre de rénovation que de la demande. Il est nécessaire de développer un véritable écosystème de la rénovation globale des logements, nous manquons d'entreprises sur le marché de la rénovation des logements privés. C'est aussi une difficulté pour les particuliers, car la rénovation globale demande des compétences en maîtrise d'ouvrage. Il conviendrait de développer l'aide MaPrimeRénov' Sérénité, qui accompagne de manière plus importante les ménages, sous conditions de ressources. Les banques doivent aussi mieux jouer le jeu ; seules deux banques proposent le prêt avance rénovation (PAR) qui, depuis le 1er janvier 2022, doit permettre à des ménages modestes de financer les travaux de rénovation énergétique de leur résidence principale.

Concernant les logements sociaux, l'objectif de 250 000 logements agréés en 2021 et 2022, annoncé par le précédent gouvernement, a été abandonné. Environ 95 000 logements ont été agréés en 2021, et la réalisation devrait être du même ordre, ou peut-être un peu plus, en 2022. Le secteur est atteint, comme tous les acteurs de la construction, par la hausse des prix à la construction, ainsi que par l'augmentation du taux du livret A, passé en quelques mois de 0,5 à 2 %. Cette hausse entraîne un accroissement des charges financières d'intérêt, car les emprunts sont à taux variable.

Afin d'assurer l'équilibre financier des organismes de logement social à long terme, le précédent gouvernement a proposé de développer les ventes ; celles-ci devaient passer de moins de 10 000 à 40 000 par an ; l'objectif n'a pas été atteint, avec un résultat de 11 000 ventes par an environ. Ce résultat me semble heureux : la mission d'un organisme de logement social est de fournir un parc de logements adapté aux besoins ; et un modèle économique reposant sur la vente se paie à long terme par la perte des recettes liées aux loyers.

Le modèle de financement du logement social devra parvenir à conjuguer deux objectifs : l'accroissement du parc, afin de satisfaire les demandes toujours insatisfaites ; et la rénovation du parc existant. En conséquence, malgré le poids de la réduction de loyer de solidarité (RLS), qui reste de 1,3 milliard d'euros par an, les bailleurs sociaux devront procéder à des investissements massifs.

Un des organismes du secteur, qui joue un rôle essentiel dans son financement, est soumis à une pression particulière ; il s'agit d'Action Logement. D'une part, l'article 16 du PLF le soumet à une contribution de 300 millions d'euros pour financer les aides à la pierre ; et, d'autre part, chose plus importante encore, sa filiale financière, Action Logement Services (ALS), a été classée par l'Insee en administration publique.

Première conséquence : sa dette a été intégrée à la dette publique, augmentant celle-ci de 0,3 point. Nul doute que le ministère de l'économie va désormais porter un regard particulièrement attentif sur la situation d'ALS.

Deuxième conséquence : ALS devrait être bientôt interdite d'emprunt sur plus de douze mois, ce qui remettra en cause partiellement ses plans d'investissement. Cette décision comptable risque d'affecter la participation d'Action Logement aux politiques publiques dont la mise en oeuvre dépend de sa contribution, à commencer par le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).

Les enjeux de construction et de la rénovation ne peuvent être dissociés du nouvel impératif assigné aux collectivités territoriales, celui de la sobriété foncière et du « zéro artificialisation nette » (ZAN).

Le fonds friches, très apprécié en 2021 et 2022, a apporté environ 750 millions d'euros de crédits et a révélé l'étendue des besoins ; mais cela était insuffisant pour atteindre tout le potentiel. Le Gouvernement précise que la réhabilitation des friches sera portée par le fonds d'accélération des investissements industriels dans les territoires. Les modalités et les montants ne sont pas indiqués dans les documents budgétaires et l'on ignore ce qui sera fait concrètement pour la réhabilitation des friches l'an prochain. Ce flou est regrettable, car il entraîne un risque de démobilisation dans un domaine où la vision de long terme est essentielle.

Il en est de même pour la définition d'un modèle de financement du ZAN. J'ai fait des propositions ici même en juin, et le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) nous a présenté, il y a trois semaines, un rapport du plus haut intérêt. Notre mission conjointe de contrôle sur le ZAN a déjà consulté de nombreux acteurs, notamment sur les aspects réglementaires, et formulera bientôt ses conclusions. La question est sensible, il est essentiel que le Gouvernement s'en empare afin de « climatiser » réellement la fiscalité et les ressources des collectivités.

Enfin, dans le cadre du programme 147, les crédits de la politique de la ville s'élèvent à 597,5 millions d'euros en CP, soit une augmentation de 39,6 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022. Ces crédits sont principalement consacrés à une diversité d'actions engagées dans le cadre des contrats de ville. On peut noter une diminution de 3,8 millions d'euros des crédits destinés à l'éducation, au travers du programme de réussite éducative (PRE) et des cités éducatives. Il convient toutefois d'approuver l'intégration à la budgétisation initiale du dispositif « Quartiers d'été », à hauteur de 32,1 millions d'euros ; ce dispositif, depuis trois ans, était financé en cours d'année par des ouvertures de crédits en loi de finances rectificative (LFR).

Ces crédits ne correspondent qu'à une partie de l'action de l'État, qui passe aussi par les crédits de nombreux ministères, dont la traçabilité vers les quartiers n'est pas toujours assurée. Les résultats sont toujours aussi difficiles à percevoir, comme l'avait observé Jean-Louis Borloo lui-même en 2018. Plus de 40 % des adultes de 15 à 64 ans résidant dans les quartiers ciblés par la politique de la ville restent à l'écart du marché de l'emploi, contre moins de 30 % dans les autres quartiers des mêmes unités urbaines ; et les habitants de ces quartiers ont un revenu fiscal moyen égal à moins de la moitié de celui de leur agglomération, ce qui est le signe de la persistance d'une pauvreté relative très importante.

Le programme 147 devrait normalement bénéficier d'une autre ligne budgétaire importante pour la rénovation urbaine, puisque le NPNRU de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) entre dans une phase active, avec des dépenses de l'ordre de 568 millions d'euros dès 2022, qui ont vocation à s'accroître à l'avenir. Cette ligne budgétaire est réduite à un montant symbolique de 15 millions d'euros ; l'État repousse toujours la mise en oeuvre de sa promesse d'apporter 1,2 milliard d'euros au total à ce programme, qui repose donc toujours autant sur les contributions d'Action Logement et des bailleurs sociaux. Sachant les incertitudes qui pèsent sur ces acteurs, cela n'est pas fait pour rassurer.

Compte tenu des considérations précédentes, je propose de nous en remettre à la sagesse du Sénat sur l'adoption des crédits de la mission « Cohésion des territoires » pour les programmes 177, 109, 135 et 147.

Par ailleurs, je dois vous présenter un article rattaché à la mission. L'article 41 ter, introduit sur l'initiative du Gouvernement dans le texte soumis à l'engagement de sa responsabilité devant l'Assemblée nationale, prévoit, au titre de l'année 2023, de ne pas appliquer la règle d'indexation de la réduction de loyer de solidarité en fonction de l'inflation. Cette mesure, déjà mise en oeuvre les années précédentes, a pour objet d'éviter que cette charge sur les bailleurs sociaux ne dépasse les objectifs prévus. Je propose de donner un avis favorable à l'adoption de cet article.

Photo de Dominique Estrosi Sassone

rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement » et « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » de la mission « Cohésion des territoires ». - Il s'agit d'un budget de transition, tant en matière de rénovation énergétique que de financement de logement social. Il manque une stratégie, une hiérarchisation des objectifs et des orientations pluriannuelles.

Nous n'avons toujours aucune visibilité sur la RLS. Le dispositif est prorogé pour cette année, mais le Gouvernement n'a pas précisé s'il devenait pérenne.

L'organisme Action Logement a de nouveau été mis fortement à contribution, et contre sa volonté. Il y a toujours cette crainte d'un possible démembrement et d'une prise de contrôle de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) par les services de Bercy, qui auraient ainsi un droit de regard sur son usage. Il s'agit de rester vigilant, comme nous avions pu l'être avec Viviane Artigalas, Valérie Létard et Marie-Noëlle Lienemann dans le cadre de la mission flash, pour alerter sur ce risque de budgétisation de l'organisme. Action Logement doit, plus que jamais, rester autonome et continuer de financer dans la durée la politique du logement.

Sur la rénovation des logements, nous avions indiqué dans la loi Climat et résilience que le calendrier serait difficile à tenir, et cela s'est révélé exact. Les conséquences sont déjà là : des propriétaires retirent leurs biens du marché du logement pour les vendre, faute de disposer des moyens financiers et techniques pour mener à bien la rénovation énergétique des logements, et plus particulièrement les passoires thermiques pour les logements classés F et G. Par ailleurs, le calendrier est également trop contraint pour les logements sous étiquette E.

Concernant le logement social, les bailleurs sociaux n'ont toujours pas de marges de manoeuvre. Leur capacité d'autofinancement est considérablement amoindrie par la RLS, par la hausse du taux du livret A et des taux d'intérêt, et cela est tout à fait préjudiciable à la construction dont nous avons besoin. Comme cela fut signalé à maintes reprises, la crise du logement risque de s'aggraver dans les prochains mois.

C'est la raison pour laquelle, en ma qualité de rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, je donne un avis d'abstention pour ce budget.

Photo de Viviane Artigalas

Concernant le programme « Politique de la ville », il s'agit, là encore, d'un budget de transition en attendant les nouveaux contrats de ville.

On peut quand même se féliciter du budget dédié au dispositif « Quartiers d'été » ; les associations, qui engageaient des actions sans savoir si elles seraient financées, attendaient cela depuis plusieurs années. Autre bonne nouvelle : la pérennité des cités éducatives, avec des financements prévus jusqu'en 2027.

Je me pose la question du financement du renouvellement urbain. Toutes les actions démarrent, et les CP ne sont pas au rendez-vous. L'Anru a suffisamment de trésorerie pour assumer les paiements de cette année et peut-être ceux de l'an prochain. Il faudrait 110 millions d'euros par an de CP pour assurer les 1,2 milliard que l'État doit engager. Nous serons très vigilants sur le sujet.

Cependant, je donne un avis favorable à ce budget de transition.

Photo de Alain Duffourg

Concernant le programme 177, 203 000 places ont été pourvues en 2021 dans le cadre du logement des personnes sans abri. Le PLF pour 2023 prévoyait une baisse des crédits, mais le Gouvernement, à la suite de pressions des associations, a fait machine arrière et propose une somme de 40 millions d'euros. Le budget s'élève à 2,8 milliards d'euros.

Le principal problème concerne le nombre de places disponibles. Si j'en crois les associations, entre 15 000 et 30 000 personnes seraient encore dans la rue ; mais si l'on mettait à disposition ces 15 000 ou 30 000 places, il m'a été répondu que cela créerait un appel d'air, avec davantage de demandes encore. Cette année, 100 000 Ukrainiens sont venus sur notre territoire. Ces chiffres s'inscrivent dans le cadre d'une problématique migratoire qui n'a été gérée ni au niveau national ni au niveau européen. Sur les 230 000 places à créer, on distingue 20 % de personnes ayant la nationalité française et 80 % de personnes sans papiers, sans titre de séjour, en situation irrégulière.

J'émets un avis favorable sur ce programme.

Photo de Jean-François Husson

La politique du logement navigue entre deux eaux : elle ne trouve de satisfaction ni avec le logement d'urgence, ni avec le neuf, ni avec la rénovation ou la réhabilitation. Néanmoins, il est difficile de s'y opposer, car elle nourrit des espoirs.

En outre, avec la lutte contre la vacance des logements et les tensions liées à la réforme de la taxe d'habitation et à l'objectif ZAN, nous avons besoin d'une conjonction des bonnes volontés et des efforts. Il s'agit d'inciter le Gouvernement à définir des priorités, et ce avec tous les opérateurs - l'Anah, l'Anru et d'autres encore. On constate un appétit d'habiter dans des zones excentrées par rapport aux villes, qu'il s'agisse de petites villes ou de territoires ruraux dès lors que ceux-ci sont bien desservis.

Photo de Antoine Lefèvre

L'article 44 ter prolonge jusqu'au 31 décembre 2027 la possibilité de déroger au principe d'encellulement individuel des personnes détenues en maison d'arrêt. Je vous propose un amendement pour renforcer l'information du Parlement sur l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires et leur impact quant au respect de l'objectif de placement en cellule individuelle.

L'amendement n° 1 est adopté.

Photo de Michel Canevet

L'accroissement des crédits pourrait laisser croire que l'effort en faveur du logement est important ; or, sur le terrain, on s'aperçoit qu'il n'en est rien. Lorsque nous avons voté la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan), certains pensaient que le regroupement des opérateurs d'HLM conduirait à améliorer l'efficience de la construction dans notre pays ; si l'on suit les données du rapporteur spécial, c'est l'inverse que l'on observe. Cette approche n'est pas la plus efficace pour répondre aux besoins de logements sur notre territoire.

Pour chacun, il est naturellement essentiel de pouvoir se loger. À défaut, se posent des problèmes sociaux et de désinsertion professionnelle. Quels sont les moyens nécessaires pour relancer la politique du logement ?

Concernant Action Logement, plutôt que d'opérer des ponctions sur le budget, ne vaudrait-il pas mieux demander à l'organisme d'accompagner les opérations directement sur les territoires ?

Nos inquiétudes concernent également l'objectif ZAN et son impact sur la construction. Je doute que l'on puisse répondre à tous les besoins en matière de logement, d'autant qu'un certain nombre de locataires, d'ici peu, seront contraints de quitter les logements ne répondant pas aux prescriptions thermiques. Où vont-ils aller si nous n'avons pas la possibilité de les héberger ?

Photo de Marc Laménie

Les artisans nourrissent des inquiétudes concernant la rénovation des logements et MaPrimeRénov'. Avec les économies d'énergie à 1 euro par exemple, certaines personnes se font arnaquer. La concurrence est déloyale par rapport aux artisans et aux entreprises du bâtiment.

Des actions intéressantes sont menées dans le cadre de la politique de la ville ; je pense notamment aux cités éducatives. J'observe toutefois que certains programmes ont été plus ou moins abandonnés. Localement, c'est une préoccupation importante.

Photo de Dominique de Legge

Concernant le programme 135, je m'inquiète que l'objectif de 250 000 logements sociaux agréés en 2021 et 2022 soit ramené à 100 000 logements. Pouvez-vous nous en dire davantage à la fois sur la manière dont le Gouvernement justifie cette révision à la baisse et sur les besoins nécessaires ? Dans la gestion de cette pénurie, certains secteurs géographiques sont-ils plus particulièrement touchés ?

Photo de Thierry Meignen

L'an dernier, la mission « Investissements d'avenir » est devenue « Investir pour la France de 2030 », à l'issue de l'adoption de la loi de finances initiale pour 2022.

Le Gouvernement avait décidé d'inscrire les crédits destinés au plan « France 2030 », au sein de la mission, par voie d'amendement, sans en changer l'architecture.

Pour mémoire, il s'agit de 34 milliards d'euros qui se sont ajoutés aux 20 milliards d'euros du programme d'investissement d'avenir (PIA) n° 4, qui avait été voté en loi de finances initiale pour 2021.

Les montants du PIA 4 et de France 2030 se sont donc additionnés : 54 milliards d'euros dédiés au financement de l'innovation pour faire de la France une terre d'excellence.

Quant aux logiques qui les sous-tendent, elles sont différentes et viennent se compléter : la logique portée par les PIA se situe en amont, car elle est axée sur la recherche et la conception de l'innovation ; et celle qui anime « France 2030 » se situe en aval car elle est plus axée sur la mise en oeuvre de l'innovation et l'industrialisation.

Rappelons que « France 2030 » cible trois priorités, celles de mieux vivre, mieux produire et mieux comprendre notre monde, qui renvoient à dix objectifs très concrets, tels que faire émerger des réacteurs nucléaires de petite taille, devenir le « leader » de l'hydrogène vert, ou encore produire de 2 millions de véhicules électriques et hybrides d'ici à 2030, et 20 biomédicaments contre les cancers, les maladies chroniques.

En ayant intégré les crédits de « France 2030 » à la mission, en loi de finances initiale (LFI) pour 2022, la mission prend une toute nouvelle orientation qui est celle de soutenir l'ensemble du cycle de vie de l'innovation jusqu'à son déploiement industriel.

Photo de Daniel Breuiller

Je n'ai pas bien compris, je l'avoue, la politique du Gouvernement en matière de logement.

Dans toutes les zones touristiques et dans beaucoup de métropoles, l'accès au logement pour les primo-accédants, les étudiants et les jeunes couples est de plus en plus retardé, en raison du faible nombre de logements sociaux et aussi d'Airbnb. A-t-on les chiffres du nombre de logements soustraits à la location familiale, au bénéfice de ces locations saisonnières ?

Photo de Jean-Baptiste Blanc

Concernant le dispositif ZAN, nous aurons le temps de revenir sur les conséquences financières et fiscales du rapport du CPO. Le ZAN s'entrechoque avec les besoins en logements sociaux de notre pays. Comment construire davantage avec 50 % de foncier en moins dans les dix années à venir ? C'est une question à laquelle nous essaierons de répondre prochainement dans le cadre de la mission conjointe de contrôle présidée par Valérie Létard.

Pour répondre à Michel Canévet, il faut, en effet, commencer à tirer des bilans de la loi Élan. On ne sait pas, par exemple, si les fusions ont bien fonctionné. Nous sommes encore, me semble-t-il, au stade de subir les effets de ces fusions. Il conviendra de procéder à une évaluation.

Quels moyens pour relancer la politique du logement en France ? Dans le rapport, je me suis permis d'insister sur les permis de construire. Il n'y a jamais eu aussi peu de demandes de permis et aussi peu de permis délivrés. C'est un levier intéressant ; il faudrait notamment réfléchir à une simplification des demandes d'autorisation d'urbanisme.

Avec cette nouvelle ponction, il s'agit du énième démembrement d'Action Logement. Par ailleurs, l'Insee demande à ce qu'une partie d'Action Logement soit considérée comme une administration publique, ce qui soumettrait l'organisme aux critères de Maastricht concernant la dette publique et compliquerait beaucoup de choses, ne serait-ce que sa capacité à emprunter.

Le Gouvernement croit beaucoup dans les vertus de la discussion qui va s'ouvrir pour signer une nouvelle convention avec Action Logement, qui a au contraire beaucoup d'inquiétudes. Il serait peut-être temps de crever l'abcès et de sortir de l'ambiguïté. Il serait utile de respecter le paritarisme datant de l'après-guerre, et l'on pourrait demander à Action Logement d'accompagner la politique de logement plutôt que de subir un démembrement.

La montée en puissance de l'Anah doit permettre de porter la rénovation énergétique de manière plus ambitieuse ; mais le contrôle des aides reste un sujet.

Pour répondre à Dominique de Legge, l'objectif était de 250 000 logements sociaux sur deux ans. Le Gouvernement a annoncé 100 000 logements pour chaque année ; en réalité, ce sera moins que cela en logements agréés, sachant que l'agrément ne vaut pas logement réel. La situation est très préoccupante, pour ne pas dire dramatique. En raison de la complexité des procédures, des difficultés pour obtenir des autorisations d'urbanisme, des suites de la crise sanitaire, du coût des matériaux et d'autres freins encore, nous ne répondons pas à la demande de logements sociaux dans notre pays.

Quelle est la politique du Gouvernement en matière de politique de la ville ? Chacun en déduira ce qu'il veut, d'où ma proposition de nous en remettre à la sagesse du Sénat.

La question de la soustraction des logements en zones touristiques est très importante. Concernant Airbnb, nous allons mettre l'accent sur le contrôle. Trop de logements sont dévoyés dans notre pays. Il est grand temps que le législateur se penche sur le sujet. Nous ne savons pas combien de logements sont soustraits à la location familiale - cette question pourrait faire l'objet d'un contrôle.

Photo de Dominique Estrosi Sassone

Il faut noter que, dans le cadre de la loi Climat et résilience, les résidences touristiques classées F et G thermiquement ne sont pas concernées par l'obligation de rénovation, contrairement aux logements. Certains préféreront donc continuer à louer leur bien par l'intermédiaire d'Airbnb. Il y a là un trou dans la raquette.

Photo de Jean-François Husson

Ce qui m'inquiète, c'est que les observations sur cette mission pour 2023 sont quasiment identiques à celles formulées en 2022. Il s'agit tout de même d'un budget très important : 54 milliards d'euros. Je soutiens la demande de notre rapporteur d'essayer d'y voir plus clair et d'associer autrement le Parlement pour suivre et évaluer cette fusion entre les PIA et « France 2030 », opération sur laquelle le Gouvernement a largement communiqué. Il s'agit probablement, dans l'esprit de l'exécutif, d'une manière de passer outre les contraintes liées à la lenteur des procédures politiques et administratives ; il ne saurait pourtant être question de contourner le contrôle nécessaire et légitime du Parlement. Notre rapporteur spécial voit-il des pistes pour enjoindre le Gouvernement à modifier sa façon de procéder dans le cadre de ce PIA et de la mission « France 2030 » ?

Photo de Claude Raynal

Je ne perçois malheureusement aucun progrès au fil des années. La situation ne s'améliore dans aucun des domaines visés. Les espoirs que nous nourrissons chaque année restent vains.

Par ailleurs, Jean-Baptiste Blanc nous ayant présenté une partie de la mission, après la présentation du rapporteur spécial sur les programmes consacrés à la politique des territoires il y a quelques jours, je cède la parole à Bernard Delcros pour nous rappeler sa proposition.

Photo de Gérard Longuet

Quelle est la définition de l'hydrogène vert ?

Photo de Michel Canevet

Comment expliquer que les crédits de la mission - 262,5 millions d'euros en AE - soient aussi faibles ?

Photo de Claude Raynal

J'ai tendance à considérer que nous ne verrons guère les réalisations de cette mission avant la fin. Le comité de suivi, dont nous faisons partie, se réunit une fois par an, ce n'est pas beaucoup... Tout au plus, pourrons-nous voir si quelques opérations auront réussi. Je ne rappellerai pas certains investissements du passé, comme le plan calcul, qui ont eu les succès que l'on sait ! La question n'est pas tant l'argent que la capacité à faire et à mener à bien les projets. Tout ce qui contribuera à améliorer l'évaluation et le suivi, en associant un regard extérieur, est bienvenu.

Photo de Emmanuel Capus

À quoi correspondent les 500 millions d'euros prévus pour le nucléaire dans le cadre de la mission ? Je déplore par ailleurs l'absence de véhicules français fonctionnant au gaz naturel (GNV).

Photo de Christine Lavarde

Depuis des années, on observe un problème de gouvernance et un turn-over assez important au sein du SGPI. De plus, les crédits de la mission sont répartis entre quelques prestataires, comme la CDC, l'ANR ou l'Ademe, qui sont également gestionnaires délégués de certains programmes. Constatez-vous une professionnalisation parallèle à la hausse des crédits ?

Photo de Thierry Meignen

Nous n'en sommes qu'au tout début, Monsieur Husson. Nous posons les premiers pas. La refonte du dispositif va prendre du temps. Progressivement, nous pourrons davantage contrôler. On a toutefois gagné en souplesse et en efficacité. On regrettait l'an passé l'insuffisance des moyens de contrôle. Des progrès ont été faits en la matière.

Monsieur Longuet, la seule définition scientifique dont je dispose pour l'hydrogène vert est succincte. Celui-ci est produit à partir de l'électrolyse de l'eau, en faisant passer un courant électrique dans l'eau.

Photo de Gérard Longuet

L'Europe hésite à reconnaître le nucléaire, dans sa taxonomie, comme une énergie verte. Or pour produire de l'hydrogène vert, on a besoin de quantités d'électricité considérables que seul le nucléaire peut produire ! J'aurais donc aimé que le Gouvernement précise sa conception de l'hydrogène vert.

Photo de Thierry Meignen

Monsieur Capus, les crédits sur le nucléaire concernent de petits réacteurs modulaires destinés à être utilisés à des fins médicales. Je n'ai pas de réponses sur le GNV.

Monsieur Canévet, les crédits que vous mentionnez correspondent à des crédits d'AE. Il s'agit du reliquat qui n'a pas encore été engagé. J'en profite pour préciser que la baisse de 13,08 % des crédits par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 s'explique par un meilleur calibrage des CP.

Madame Lavarde, quatre organismes - l'Ademe, Bpifrance, la CDC et l'ANR - bénéficient des crédits de la mission : il leur appartiendra de reverser ces crédits aux bénéficiaires des projets sélectionnés. Le circuit est ainsi plus court, on y gagne en temps et en réactivité.

Photo de Claude Raynal

Nous examinons les crédits de la mission « Justice » et les articles 44 à 44 ter rattachés. Je salue les rapporteurs pour avis de la commission des lois.

Photo de Antoine Lefèvre

Il me revient de vous présenter les crédits demandés en 2023 sur la mission « Justice », qui comprend l'ensemble des moyens de la justice judiciaire, de l'administration pénitentiaire, de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) et du secrétariat général du ministère de la justice.

Je commencerai cette présentation en me plaçant sous le constat du comité des États généraux de la justice, et en citant les propos de son président, Jean-Marc Sauvé, auditionné la semaine dernière : « La justice est un bateau naufragé. Elle n'a pas coulé à pic, mais elle a pris l'eau progressivement, au fil d'années de restrictions budgétaires. La crise sanitaire a de ce point de vue agi comme un révélateur des dysfonctionnements du service public de la justice, qui connaît une crise majeure. »

Dans ce contexte, les hausses budgétaires significatives constatées depuis 2021 sont absolument essentielles pour remédier aux défaillances de ce service public. L'année 2023 se place dans cette trajectoire, avec une nouvelle hausse des crédits de paiement (CP) de près de 8 %, pour atteindre 11,6 milliards d'euros. En dix ans, le budget de la justice aura ainsi augmenté de 51 %.

La hausse des crédits concerne tous les programmes, à l'exception de celui du Conseil supérieur de la magistrature, et toutes les dépenses. Pour ce qui concerne les dépenses de personnel, 2 253 équivalents temps plein (ETP) seraient créés en 2023. Ils constituent la première tranche du schéma d'emplois très dynamique annoncé par le ministère pour la période 2023-2027, avec la création de 10 016 ETP. À terme, ce serait 1 500 magistrats et 1 500 greffiers supplémentaires qui seraient recrutés, alors que ces métiers connaissent des tensions importantes.

S'agissant des dépenses de fonctionnement, d'investissement et d'intervention, celles-ci sont également très dynamiques. Cette évolution est due en particulier aux grands chantiers engagés par le ministère de la justice, concernant, par exemple, la mise en oeuvre du plan de transformation numérique de la justice ou le déploiement du plan de création de 15 000 places supplémentaires en détention.

La hausse des crédits alloués à la justice, je le répète, me semble pleinement justifiée au regard du retard accumulé ces dernières décennies. Selon les dernières données publiées par la Commission européenne pour l'efficacité de la justice (Cepej), la France consacre 72,5 euros par habitant à son système judiciaire, c'est-à-dire près de deux fois moins que l'Allemagne. Elle représente le seul des grands pays européens à consacrer moins de 0,30 % de son PIB à la justice.

Là encore, je ferai miens les propos du président Jean-Marc Sauvé. Pour remédier au manque critique de moyens de la justice, « on ne peut plus continuer d'appliquer une multitude de rustines à une chambre à air dont on n'a pas voulu voir qu'elle était totalement usée ». Une réforme systémique s'impose, tant sur le fond que sur le plan du budget. La future loi de programmation 2023-2027 qui, je l'espère, nous sera prochainement présentée, devra consacrer cette trajectoire.

Bien sûr, il ne s'agit pas de donner un blanc-seing au Gouvernement. L'augmentation significative des moyens du ministère de la justice depuis plusieurs années doit s'accompagner de la diffusion d'une réelle culture de l'évaluation des dépenses réalisées.

Telle que je la conçois, une loi de programmation ne doit pas simplement constituer en la définition d'indicateurs de performance et de lignes de crédits et d'emplois ; elle doit être l'occasion pour le ministère concerné de s'interroger sur le sens des politiques publiques qu'il mène, sur la qualité du service public qu'il soutient et sur sa propre gestion des moyens, budgétaires comme humains. La future loi de programmation des moyens de la justice ne pourra pas à cet égard faire l'économie d'une réflexion sur l'amélioration de la gestion et sur la construction d'indicateurs de suivi fiables. Le ministère s'est trop longtemps retrouvé « dans l'incapacité de relever les défis d'une gestion rigoureuse », pour reprendre de nouveau un constat des États généraux de la justice.

Prenons un exemple : le plan de transformation numérique (PTN) du ministère de la justice. Il était initialement doté de 530 millions d'euros. Il est inconcevable que la Cour des comptes ait dû admettre avoir rencontré d'importantes difficultés pour reconstituer les dépenses budgétaires exécutées au titre de ce plan.

L'informatique fait d'ailleurs partie, avec l'immobilier et la gestion des ressources humaines, des trois enjeux sur lesquels j'ai souhaité un peu plus m'attarder dans le cadre de mes travaux budgétaires.

En effet, si les programmes portés par la mission « Justice » correspondent chacun à l'un des métiers du ministère, ils connaissent des problématiques communes, dont seule la résolution permettra, me semble-t-il, d'améliorer le service public de la justice, en parallèle de réformes de fond.

Je suis en effet convaincu que l'institution judiciaire ne sortira pas de sa crise majeure si elle ne s'interroge pas sur la gestion de ces fonctions support et si le rôle du secrétariat général du ministère n'est pas renforcé en ce sens. Il existe trop souvent une tendance à opposer centralisation et proximité, alors qu'il s'agit de missions différentes. Le fait que le secrétariat général joue un véritable rôle d'impulsion, par exemple sur les projets informatiques, est inséparable de la constitution d'équipes d'informaticiens de proximité dans les juridictions. Ce constat vaut également pour l'immobilier, avec un même impératif, celui de mieux prendre en compte les besoins des usagers de la justice, qu'il s'agisse des personnels, des justiciables ou des professionnels du droit, tels que les avocats.

S'agissant de l'informatique, un deuxième PTN prendra la suite du premier, établi pour la période 2018-2022. Nous avions entendu la Cour des comptes sur sa mise en oeuvre au mois de février dernier. Soyons clairs, le premier PTN était un plan de rattrapage, l'enjeu du deuxième sera de procéder à la modernisation complète du ministère.

Le deuxième PTN reprendra les trois axes du premier, tout en intégrant de nouveaux objectifs. Si les objectifs ont été quasiment atteints sur le premier axe, avec l'équipement de 100 % des agents ayant des fonctions éligibles au télétravail et la mise en oeuvre de la fibre optique dans les 1 500 sites judiciaires, tel n'est pas le cas sur le deuxième axe, celui des applications, et encore moins sur le troisième, l'accompagnement des usagers.

Pour réussir, le deuxième PTN devra non seulement être doté de moyens budgétaires suffisants, mais également tenir compte de plusieurs impératifs. Il devra d'abord pleinement inclure les usagers et leurs besoins, alors que le malaise grandit au sein des juridictions sur la question des outils numériques. Il n'est pas normal que la modification de certains systèmes d'information contraigne désormais les magistrats et les greffiers à ressaisir manuellement d'importants volumes de données. Ensuite, il devra conduire à une véritable interopérabilité des systèmes d'information du ministère. Par exemple, aucune application ne permet aujourd'hui de fournir des données sur le parcours complet des mineurs pris en charge par la justice. Le décloisonnement des applications devra donc s'opérer en interne, mais aussi en externe, avec le ministère de l'intérieur par exemple, et également les professionnels du droit, comme les avocats.

J'en viens à la professionnalisation de la gestion des ressources humaines, émanant également d'une recommandation des États généraux de la justice.

Le pilotage des ressources humaines n'est pas seulement une question d'augmentation des effectifs ; il implique aussi de prendre en compte les questions relatives au vivier de recrutements ou à la revalorisation de certains métiers en perte d'attractivité. Il s'agit là d'un enjeu crucial pour certaines directions.

Ainsi, le directeur de l'administration pénitentiaire nous a confié que le principal défi qui l'attendait ces prochaines années, outre la gestion de la surpopulation carcérale, était celui des ressources humaines. L'ouverture de places de détention supplémentaires, ainsi que l'extension des missions de l'administration pénitentiaire implique en effet de recruter plusieurs centaines de personnes dès 2023. Or la fonction de surveillant pénitentiaire, pourtant essentielle, souffre d'un déficit d'image. L'administration tente d'y apporter une première réponse en jouant sur la rémunération.

C'est également la solution privilégiée par le ministère pour les magistrats, avec l'annonce d'une revalorisation de leur traitement brut de 1 000 euros en moyenne. Cette annonce a surpris les magistrats et les modalités exactes de répartition et de calcul ne sont pas encore connues. D'après les éléments qui nous ont été transmis, l'effort porterait sur la prime modulable, avec l'idée de privilégier les jeunes carrières. Je n'en reste pas moins convaincu que le ministère ne peut pas se contenter d'agir sur la rémunération pour restaurer l'attractivité de ses métiers.

Outre ces enjeux des fonctions support, je me suis également attaché à assurer un suivi des crédits mobilisés pour la mise en oeuvre des réformes que nous avons votées ces dernières années. Je sais l'attachement de notre commission au suivi de l'application des lois, il me semble que cela passe aussi par un suivi de l'application budgétaire.

Je me suis plus particulièrement intéressé à la justice de proximité, à la réforme du code de justice pénale des mineurs, à l'accès au droit ou encore aux dispositions concernant les détenus dans le cadre de la loi pour la confiance dans l'institution judiciaire. Sur ce dernier point, on peut relever que les crédits alloués au financement des alternatives à l'incarcération atteindraient 53,4 millions d'euros, soit une hausse de 30 % par rapport à 2022. Les équipes dédiées à la surveillance électronique bénéficieraient également d'un renforcement de 27 emplois.

Ce double renforcement des crédits et des personnels tient compte des dispositions adoptées dans la loi précitée. En effet, entrera en vigueur au 1er janvier 2023 la disposition prévoyant une libération sous contrainte de plein droit pour les personnes condamnées à des peines inférieures à deux ans et pour lesquelles le reliquat de peine est inférieur à trois mois, à la condition qu'elles disposent d'un hébergement.

Voilà pour ce qui concerne la présentation de la programmation budgétaire sur la mission « Justice », dont je vous proposerai d'adopter les crédits.

J'en termine en vous présentant rapidement les trois articles rattachés à la mission.

L'article 44 prolonge de deux ans supplémentaires l'expérimentation rendant obligatoire la tentative de médiation préalable pour certaines affaires familiales. J'ai qualifié cette prorogation de « prolongement de la dernière chance », alors que l'expérimentation a débuté il y a déjà six ans.

D'après les données transmises par le ministère, cette prorogation serait accompagnée d'une extension du dispositif, qui pourrait concerner jusqu'à 44 tribunaux judiciaires, contre 11 aujourd'hui. L'objectif est de parvenir à disposer, enfin, de données pour mesurer les effets de cette expérimentation et évaluer l'opportunité de la pérenniser, sous réserve, le cas échéant, d'y apporter des ajustements.

Nous revenons une nouvelle fois sur le problème de l'évaluation : il est grand temps que le ministère s'en préoccupe, et je vous propose donc un avis favorable sur cet article.

L'article 44 bis vise à parachever le volet « recouvrement » de la réforme de l'aide juridictionnelle engagée en 2020. Une partie de cette réforme a consisté à autoriser les avocats commis ou désignés d'office à demander une rétribution, sans avoir déposé au préalable une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide au titre de l'intervention d'un avocat dans des procédures non juridictionnelles. L'article permet de préciser que les bureaux d'aide juridictionnelle seront chargés de constater a posteriori l'éligibilité ou l'inéligibilité à l'une ou à l'autre de ces aides de la personne qui a bénéficié de l'intervention de l'avocat. En cas d'inéligibilité, les bureaux pourront engager une procédure de recouvrement.

Selon le Gouvernement, ce dispositif permettra de recouvrer environ 1 million d'euros chaque année, un montant qui peut de prime abord sembler relativement limité au regard des 641 millions d'euros demandés sur le budget 2023 pour l'aide juridictionnelle. En outre, le montant des sommes effectivement recouvrées par l'État dépendra de la capacité des bureaux à disposer de données précises pour identifier le bénéficiaire. Les développements informatiques permettant aux bureaux d'aide juridictionnelle d'échanger plus facilement sur ce sujet avec les caisses des règlements pécuniaires des avocats (Carpa) et la direction générale des finances publiques (DGFiP) ne seront d'ailleurs pas prêts pour le 1er janvier.

Je vous propose néanmoins un avis favorable sur cet article, qui vise à améliorer le recouvrement par l'État de sommes indûment engagées.

Enfin, l'article 44 ter prolonge jusqu'au 31 décembre 2027 la possibilité de déroger au principe d'encellulement individuel des personnes détenues en maison d'arrêt. Il était tout à fait illusoire que l'État soit en mesure de respecter ce principe au 31 décembre 2022 et ce prolongement était malheureusement attendu de longue date. Au 1er juillet 2022, le taux d'encellulement individuel en maison d'arrêt était de 20,1 %.

Par coordination avec la prorogation de cette dérogation, je vous propose d'adopter un amendement prévoyant de renforcer l'information du Parlement sur l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires et leur impact quant au respect de l'objectif de placement en cellule individuelle. Un tel rapport du Gouvernement au Parlement était prévu au troisième trimestre 2022, je vous propose que deux nouveaux nous soient remis en 2025 et en 2027. Il est en effet à craindre, au regard des dynamiques actuelles, que la France ne puisse pas lever le moratoire en 2027. Par une coïncidence sans doute un peu malheureuse, j'ai auditionné le directeur de l'administration pénitentiaire la semaine pendant laquelle le nombre de personnes détenues en France a atteint un niveau record. Il est clair que le plan « 15 000 places » ne suffira pas à lui seul à lever le moratoire sur l'encellulement individuel. Je partage d'ailleurs son avis sur le fait qu'une politique pénitentiaire ne peut se résumer à une politique immobilière.

Je vous propose donc un avis favorable sur cet article tel que modifié par amendement.

Photo de Agnès Canayer

Je souhaite souligner que le constat de la commission des lois va dans le même sens que celui du rapporteur spécial. En effet, les crédits alloués à la justice judiciaire sont en hausse pour la troisième année consécutive, avec une augmentation de plus de 26 % sur trois ans ; nous ne pouvons que nous en féliciter. De plus, on note une pérennisation de 674 postes de contractuels associée à une création de 1 200 nouveaux postes, notamment des magistrats, des greffiers et des assistants juridiques. Cela témoigne d'une bonne dynamique.

Néanmoins, il existe un vrai sujet de structuration et de réorganisation, puisque ces embauches donnent une vision très brouillonne de la justice. L'évaluation de la charge de travail des magistrats devait se terminer à la fin de l'année 2022 ; il en serait de même pour les greffes, car l'outil de gestion et de répartition des emplois de fonctionnaires (Outilgref) ne permet d'avoir accès qu'à une évaluation strictement quantitative. Ces évaluations sont nécessaires pour permettre une plus grande efficacité. En effet, les délais restent le point faible de la justice, avec un délai de cinquante mois pour juger une affaire criminelle en France, ce dont on ne peut se satisfaire.

Photo de Vincent Eblé

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances pour la mission Culture s'élève à 3,736 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 3,715 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ces chiffres traduisent une progression des crédits de 7,04 % en AE et 7,36 % en CP. Elle dépasse l'hypothèse d'inflation retenue pour 2023 en projet de loi de programmation des finances publiques, 4,3 %, même si celle-ci devrait être remise en question rapidement.

Photo de Alain Marc

La hausse de 7 % des crédits demandés dans le cadre du projet de loi de finances 2023, après celle de 9 % observée ces deux dernières années, est certes intéressante, mais elle ne suffit pas à rattraper nos voisins allemands. De plus, dans le cadre de la construction de 15 000 places supplémentaires de prison, toutes les places ne seront pas livrées d'ici la fin de l'année, loin de là. Cette situation s'explique non seulement par l'épidémie de covid, mais également par les problèmes d'acceptabilité de la construction d'établissements pénitentiaires et par le prix du foncier.

Un deuxième problème a trait au recrutement, notamment des surveillants pénitentiaires. Les candidats témoignent en effet d'un niveau trop faible. Or il est primordial de recruter suffisamment de surveillants, à la fois pour les maisons d'arrêt existantes et pour celles à construire, et éviter la situation que l'on connaît dans certains établissements de Haute-Garonne avec des taux d'occupation dépassant les 185 %.

Les surveillants pénitentiaires ont vu leurs missions d'accroître. Ils doivent être capables de repérer les signaux faibles, dans le cadre notamment de la radicalisation, et de les transcrire dans des rapports intelligibles en direction des officiers de renseignement.

Les difficultés de logement des surveillants pénitentiaires représentent un frein supplémentaire au recrutement, en raison d'une forme de concurrence exacerbée avec la police, la gendarmerie et les policiers municipaux. Pour pallier cette situation, deux localités sont aujourd'hui proposées par le ministère pour construire des logements : Savigny-sur-Orge et Fleury-Mérogis. Cette proposition est portée depuis quatre ans par le Sénat. Une collaboration avec les offices d'HLM permettrait au ministère de la justice de réaliser une opération pratiquement neutre financièrement. Si la volonté d'action s'est fait attendre, elle semble enfin se manifester.

En conclusion, au regard de cette augmentation de budget annoncée, nous donnerons un avis favorable.

Photo de Jean-François Husson

Premièrement, je souhaite souligner que la modernisation des tribunaux et des cités judiciaires est un programme immobilier lourd, qui avance souvent moins vite que prévu. Je prends l'exemple d'une cité judiciaire située à Nancy, qui a été très mal construite dès son origine. Le nouveau bâtiment devant accueillir les magistrats ne semble pas parfaitement adapté aux demandes, avec par exemple des salles de réunion en nombre insuffisant. Avez-vous entendu parler d'autres cas problématiques de construction ou de rénovation de bâtiments ?

Deuxièmement, l'attractivité des postes de surveillants pénitentiaires pose effectivement question, comme il me l'a été confirmé lors de ma visite à la maison d'arrêt de Nancy-Maxéville. Ainsi, des campagnes publicitaires ont eu lieu, afin de valoriser ces fonctions qui étaient pourtant très recherchées vingt-cinq ans auparavant. L'administration pénitentiaire a donc peut-être pris le parti de recruter des candidats ayant un niveau d'entrée plus faible, mais pouvant bénéficier d'un parcours de formation. Partagez-vous ce constat ?

Troisièmement, vous avez souligné que se pose un problème de foncier pour les maisons d'arrêt, mais il en est de même pour les centres éducatifs fermés. La question de l'acceptabilité sociale se pose d'autant plus que ces établissements doivent rester à proximité des villes, afin de ne pas couper les jeunes de leur vie sociale. Ces centres mobilisent presque deux équivalents temps plein travaillé (ETPT) pour un jeune accueilli, ce qui représente d'importants budgets. Néanmoins, j'estime que cette politique doit continuer à être soutenue.

Photo de Didier Rambaud

Le présent projet de loi de finances (PLF) prévoit une majoration de la dotation du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de 5,86 % en AE et de 6,72 % en CP par rapport à 2022, les crédits devant atteindre 800,68 millions d'euros en AE et 798,18 millions d'euros en CP.

D'abord, les crédits dédiés aux établissements d'enseignement supérieur culturel et à l'insertion professionnelle devraient progresser de 36 millions d'euros en AE et de 32 millions en CP.

Quatre objectifs sont poursuivis : réévaluer les bourses sur critères sociaux ; renforcer les subventions de fonctionnement et d'investissement des écoles d'art et d'architecture ; faciliter la mise en oeuvre des grands projets d'investissement de ces mêmes écoles ; et conforter le soutien aux établissements territoriaux d'enseignement supérieur, en ciblant notamment le statut de leurs enseignants.

Toutefois, une interrogation demeure quant à la dynamique baissière du taux d'insertion professionnelle des étudiants dans le domaine du spectacle vivant. Afin de répondre à ce défi, il convient de mettre en place un véritable accompagnement, en déclinant le modèle du Jeune théâtre national (JTN), associé au Conservatoire national supérieur d'art dramatique et au Théâtre national de Strasbourg, qui organise rencontres et auditions, prend en charge une partie des jeunes artistes engagés à la suite des auditions, programme des maquettes de premiers spectacles et élabore un annuaire des artistes issus des onze écoles nationales d'art dramatique.

Par ailleurs, 13 millions d'euros sont fléchés vers des investissements structurants au sein des écoles de la création et du patrimoine. Si cet apport doit être salué, nous rappelons néanmoins l'importance des restes à payer sur des chantiers couverts par le programme 361.

De son côté, le pass culture, déployé dans toute la France depuis mai 2021, étendu en 2022 aux jeunes de 15 ans et plus ainsi qu'aux élèves à partir de la quatrième, sera ouvert aux jeunes de sixième et cinquième en 2023. Le présent PLF prévoit une dotation de 208,5 millions d'euros pour le financement du dispositif, soit une majoration des crédits de 9,5 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2022. Le pass culture représente 25 % des crédits du programme 361 et la société qui le gère est le deuxième opérateur du ministère de la culture, après la Bibliothèque nationale de France (BnF).

Plus de 2,1 millions de jeunes sont aujourd'hui inscrits sur l'application et 14 millions de réservations de produits culturels ont été opérées via le pass, pour un montant total de 235 millions d'euros. Ainsi, 87 % des jeunes concernés ont acquis un bien culturel par cet intermédiaire.

Néanmoins, l'efficacité du dispositif doit encore être améliorée du point de vue qualitatif. En effet, le pass ne saurait se résumer à une simple plateforme d'achat de biens et de services et doit permettre la mise en place d'un véritable parcours culturel. Il s'agira notamment de vérifier que le pass ne serve pas au financement d'achats liés au parcours scolaire et qu'il contribue bien à faire évoluer les pratiques culturelles, l'accent devant être mis sur l'accès au spectacle vivant.

Au-delà de la question de la médiation culturelle, l'accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au pass. À ce titre, seuls 3,7 % des inscrits sur l'application ont déclarés ne pas être scolarisés. Ce ratio est plus faible que le nombre de jeunes non-scolarisés rapporté à l'ensemble de la population visée.

Il est indispensable que le pass culture ne concentre pas l'intégralité de l'effort fourni par l'État en faveur de l'éducation artistique et culturelle. Ainsi, la montée en charge budgétaire de l'application ne doit pas s'effectuer au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement dédiés. Cependant, les indicateurs rattachés au programme mettent en avant une réduction de la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle ainsi qu'une baisse de l'effort en faveur des territoires prioritaires.

Le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère » se concentre, depuis la loi de finances pour 2021, sur le financement des fonctions de soutien du ministère et, dans une moindre mesure, de l'action culturelle internationale. Piloté par le secrétariat général du ministère, il devrait être doté de 813,5 millions d'euros en AE et de 811,5 millions d'euros en CP.

Comme lors de l'exercice précédent, la masse salariale devrait croître en 2023, son coût passant de 493,6 millions d'euros à 516,1 millions d'euros, soit une augmentation de 4,29 %. Je rappelle que 67 % de cette progression résulte de mesures catégorielles. Le plan de rattrapage indemnitaire mis en place commence à permettre au ministère de renforcer son attractivité et d'éviter des vacances de postes prolongées.

Par ailleurs, le projet immobilier Camus, lancé en 2019, prévoit la rénovation des locaux et l'aménagement de nouveaux bureaux au sein du ministère de la culture dont le nombre de sites devrait ainsi passer de sept à trois. Initialement établi à 36,6 millions d'euros, le budget prévisionnel a été actualisé en 2022 pour être porté à 55,43 millions d'euros, la découverte de plomb justifiant pour partie cette évolution.

De plus, l'exercice 2023 devrait voir la dotation numérique du ministère continuer à progresser pour atteindre 26,52 millions d'euros. Cette somme sera notamment dédiée au renforcement de la transformation numérique et de la cybersécurité, ainsi qu'à la mise en place d'outils permettant de renforcer et de fiabiliser le suivi économique de l'activité des secteurs subventionnés, en ciblant notamment la fréquentation des lieux culturels ou la dynamique du spectacle vivant. La mise en place de ces systèmes d'information devrait contribuer à faciliter la gestion des crédits dédiés aux établissements subventionnés et permettre une meilleure prévision budgétaire.

Enfin, je précise que les crédits consacrés à l'action culturelle internationale sont appelés à progresser en deux temps : en loi de finances initiale puis dans le futur collectif de fin de gestion. Une telle méthode peut étonner.

Photo de Emmanuel Capus

Je partage l'inquiétude du rapporteur spécial sur l'état actuel de notre système judiciaire. Je souhaiterais poser trois questions.

La première concerne l'aide juridictionnelle : si les crédits augmentent de 4,8 %, il subsiste un retard invraisemblable de paiement dans les territoires. Ainsi, à la cour d'appel d'Angers, les avocats témoignent de retards de paiement de plusieurs mois, voire de plusieurs années, ce qui met en danger l'équilibre financier des cabinets. L'augmentation des crédits permettra-t-elle de résorber ces retards ?

La deuxième question porte sur les aspects financiers : quelles sont les pistes, en dehors du traitement financier qui n'est pas suffisant selon votre rapport, qui permettraient de restaurer l'attractivité du service public de la justice ?

La troisième question a trait au système pénitentiaire. Si 1 958 places de maisons d'arrêt sont livrées en 2023, combien de places doivent être lancées dans les prochaines années ? Et comment expliquer les retards de livraison au regard de l'objectif des 15 000 places ?

Photo de Sabine Drexler

Comme l'a dit Vincent Éblé, l'inflation et le coût des matières premières vont absorber une part de l'augmentation du budget, ce qui pose problème.

Par ailleurs, nous observons un déséquilibre géographique dans l'attribution des aides puisque davantage de moyens sont déployés en Île-de-France.

Enfin, les crédits attribués aux collectivités et aux particuliers restant stables, le petit patrimoine restera le grand oublié de ce budget, ce que nous déplorons.

Photo de Michel Canevet

Je comprends l'avis favorable du rapporteur spécial sur cette mission au vu de l'augmentation significative des crédits. Toutefois, je m'inquiète des évolutions numériques, et en particulier du caractère cloisonné des systèmes informatiques. Existe-t-il une réelle volonté de fluidifier la communication entre la police, la gendarmerie et l'institution judiciaire ? Après le semi-échec du premier PTN, il semble que le ministère de la justice soit en ordre de marche pour améliorer la situation.

S'agissant de l'augmentation significative de la rémunération des magistrats de l'ordre judiciaire, qui se rapprocherait de celle des magistrats de l'ordre administratif, les greffiers connaîtront-ils également une augmentation de leur rémunération ?

En ce qui concerne la surpopulation carcérale, qu'en est-il de la rénovation, tout à fait nécessaire, des établissements existants, même si des besoins nouveaux se font sentir ?

Photo de Sylvie Robert

Je souscris aux propos des deux rapporteurs spéciaux. Le pass culture doit représenter un point de vigilance puisque cette société par actions simplifiée (SAS) représente un budget très important au sein du ministère de la culture. Une analyse qualitative devrait être conduite sur la question de l'éducation artistique et culturelle, notamment en ce qui concerne la part collective. En effet, les jeunes procèdent à des choix significatifs et la diversification parait importante.

J'en viens à la question énergétique. Pour les grands opérateurs de l'État tels que l'Opéra de Paris, les montants estimés sont assez préoccupants. Il faudra faire des choix. J'ai entendu parler de réduction de marge artistique dans certains établissements, ce qui représente un danger pour les mois à venir.

Pour conclure, votre présentation se rapproche de la philosophie du rapport pour avis que je présenterai la semaine prochaine à la commission de la culture.

Photo de Isabelle Briquet

S'il convient de saluer l'augmentation de près de 8 % des crédits alloués à la justice, il faut rappeler que la justice française est toujours moins bien lotie que ses homologues en Europe. De même, on ne peut que regretter le manque de suivi des États généraux de la justice, l'accroissement des délais de jugement, une dégradation de la qualité en raison du recours au juge unique et le retard de la mise en oeuvre de l'encellulement individuel.

Ma question concerne l'accès au droit et l'aide juridictionnelle : avez-vous des informations quant au projet de décret visant à revaloriser les rétributions au titre de l'aide juridictionnelle qui serait en cours de rédaction ?

Photo de Jean-François Husson

D'abord, je m'interroge sur les difficultés liées à la désaffection relative du public suite à la crise sanitaire, notamment pour certains spectacles ou manifestations.

Par ailleurs, les dépenses énergétiques sont liées à la hausse du prix des énergies mais aussi à l'existence de bâtiments de moins en moins adaptés, ce qui souligne le vieillissement des grands équipements à travers notre pays, auquel on ne répondra que par un programme ambitieux de remise à niveau.

Quant aux dépenses de personnel, elles ont pu augmenter en raison de soutiens apportés pour maintenir l'offre culturelle pendant la crise sanitaire, certaines structures pouvant rencontrer des difficultés à réduire la voilure.

Photo de Sylvie Vermeillet

Ma question portera sur la rémunération des magistrats et des personnels chargés de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. En effet, lors d'un déplacement au parquet national financier de Paris, dans le cadre de la mission d'information relative à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, les magistrats ont témoigné de la difficulté à recruter du personnel spécialisé dans le domaine de la lutte contre la fraude, qui est pourtant une cause nationale. Avez-vous des informations sur les efforts réalisés en termes de rémunération et de formation de ces personnels ?

Photo de Michel Canevet

Au sujet de Notre-Dame de Paris, vous avez écrit dans votre rapport : « le financement des travaux de conservation et de restauration de la cathédrale relève quasi intégralement du mécénat (...) ce qui semble trahir l'intention des donateurs ». Aurait-il fallu que d'autres crédits soient déployés ? Pourtant, le montant des donations dépasse déjà celui des travaux. Où en est-on de l'avancement de ce chantier, notamment d'un point de vue financier ? La trajectoire financière est-elle respectée ?

Ensuite, j'aimerais aborder la question de la redevance archéologique que paye tout acquéreur de terrain et qui sert notamment à effectuer des travaux préliminaires de fouille. Cependant, lorsqu'il faut engager des travaux de fouille archéologique approfondis, leur coût très élevé pèse sur la faisabilité des opérations à venir. Au sein du ministère de la culture, des lignes de crédits permettent-elles d'accompagner ces propriétaires de terrains ? La solidarité nationale au titre de la redevance archéologique ne devrait-elle pas intervenir ?

Enfin, le pass culture ne serait-il pas plus efficient s'il était géré par les départements ? L'État en région, à travers ses directions régionales situées dans les préfectures, est-il vraiment outillé pour accompagner un tel dispositif ? Ne devrait-on pas préférer des actions de proximité et penser la décentralisation du pass pour le rendre plus opérant ?

Photo de Jérôme Bascher

N'existerait-il pas certains abus concernant l'aide juridictionnelle, car certains y recourent pour attaquer l'État ou les collectivités ? Cette « politique de guichet » ne pourrait-elle pas être limitée ?

Photo de Eric Jeansannetas

Les festivals et le spectacle vivant se remettent difficilement de la crise sanitaire et pourraient connaitre une nouvelle crise, liée à la conjoncture particulière des jeux Olympiques et Paralympiques et à l'absence prévue de personnel de sécurité. J'espère que pendant l'été 2024, le rideau ne sera pas baissé sur l'ensemble des festivals. En attendant, tout le secteur est en émoi et les organisateurs préviennent qu'ils ne se remettraient pas d'une telle situation.

Le ministère procède-t-il à une étude d'impact ? Une compensation est-elle prévue en direction des organisateurs de spectacles ? Ces manifestations seront aussi une vitrine de la France lors des Jeux Olympiques et Paralympiques et un territoire vidé de l'ensemble de ses animations musicales et festives de l'été représenterait une aberration.

Photo de Sébastien Meurant

Nous ne pouvons pas faire l'impasse sur les dysfonctionnements qui ne relèveraient pas de critères financiers : les outils informatiques, les circulaires appelant à classer sans suite un certain nombre d'affaires, mais également la procédure judiciaire qui permet à des personnes ayant des avocats désignés d'office de faire appel à leur propre avocat et de passer ainsi une seconde fois en justice, ce qui a pour effet de ralentir les jugements.

Photo de Didier Rambaud

En ce qui concerne le pass culture, je partage les points de vigilance soulevés par Sylvie Robert. Je suis convaincu qu'il s'agit d'un formidable dispositif d'éveil culturel, qui a eu du mal à monter en puissance en raison des confinements et de la crise sanitaire. À ce titre, nous mènerons, Vincent Éblé et moi, une mission de contrôle en début d'année, qui nous permettra d'affiner le suivi du dispositif.

De plus, j'ajoute un autre point de vigilance s'agissant des jeunes qui vivent dans les quartiers difficiles et les zones rurales. Nous le savons, ces derniers subissent une double peine : l'absence de transport et d'offre culturelle. À ce titre, il faudrait réfléchir aussi à la possibilité de le coupler avec une carte transport par exemple.

Pour répondre à Michel Canévet, je parlerais plutôt de complémentarité avec des dispositifs pouvant être mis en place par des collectivités locales, des départements, des agglomérations ou des petites communes, avant de chercher à déconcentrer le dispositif. Celui-ci est enfin monté en puissance et cette année d'observation sera importante, pour savoir si les objectifs d'éveil culturel auprès du plus grand nombre possible de jeunes sur le plus de territoires possibles seront atteints.

Photo de Jean-Baptiste Blanc

Quelle est la vision du Gouvernement concernant la protection judiciaire de la jeunesse ?

Photo de Vincent Eblé

S'agissant du patrimoine, la question du déséquilibre géographique n'est pas nouvelle. De plus, il faut bien reconnaître que, parmi les monuments très coûteux appartenant à l'État, un certain nombre se trouvent à Paris. À titre d'exemple, les coûts de restauration du Grand Palais ont beaucoup fait gloser dans la presse, mais quand un monument de cette importance nécessite de lourds travaux d'investissement, la mobilisation des crédits devient nécessaire pour assumer ces charges, même si un examen attentif du programme et des modalités de restauration doit être conduit afin de ne pas être dans l'excès.

Les crédits pour les collectivités sont stables et, depuis sa création, le fonds incitatif et partenarial a même permis de soutenir 576 opérations dans les régions. Il sera doté de 2 millions d'euros supplémentaires en 2023. Il faudra cependant nous montrer vigilants quant au risque que des fonds en provenance notamment du Loto du patrimoine ne servent en réalité qu'à compenser une baisse des crédits déconcentrés.

En ce qui concerne Notre-Dame de Paris, nous sommes rassurés par le montant des dons, suffisant pour couvrir les charges. Cependant, financer entièrement par des dons une opération de restauration qui relève d'une compétence directe de l'État peut poser un problème philosophique, d'autant que l'État devrait percevoir environ 140 millions d'euros de recettes de TVA sur le coût des travaux financés par les contributions volontaires des donateurs. Ainsi, non seulement l'opération ne lui coute rien, mais elle lui rapporte. Pourtant, en 2019, le ministre de la culture de l'époque, Franck Riester, s'était engagé devant le Sénat à ce que l'établissement public en charge de superviser les travaux ne soit pas financé par les crédits des donateurs. Or l'État ne finance par un centime du fonctionnement de celui-ci.

J'en viens aux opérateurs et à la question de l'emploi. Globalement, nos interlocuteurs, parmi lesquels ceux de la Philharmonie de Paris, ont fait part de leurs difficultés à recouvrer le niveau d'emploi post crise, en raison du défaut de mobilisation des professionnels, singulièrement dans les segments couverts par les intermittents du spectacle. En effet, nombre de techniciens qui s'étaient détournés de leur métier d'origine en raison de la crise n'y reviennent pas. On observe donc une pénurie d'opérateurs dans tous les métiers et une vraie difficulté pour les opérateurs à couvrir leurs besoins en la matière.

Pour répondre à Éric Jeansannetas, l'aide de 10 millions d'euros créée pendant la crise sanitaire pour les festivals se voit pérennisée, ce qui semble rassurant tant que le retour des publics ne s'avère pas certain. Nous constatons pour ces publics une différenciation sensible selon les établissements et leur typologie. Ainsi, les sites patrimoniaux, monuments et musées ont pour l'essentiel retrouvé leurs volumes. Cependant, la situation est différente pour le secteur de la création, des grandes manifestations et du spectacle vivant. Là aussi, les difficultés sont variables en fonction du type d'offres et de la présence ou non de publics internationaux. Toutefois, de manière générale, nous devrions revenir rapidement à une situation proche de la normale.

Enfin, la redevance d'archéologie préventive finance les phases de diagnostic, qui sont très bien prises en charge et sont confiées à l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap). En revanche, lorsqu'elle s'avère nécessaire, la phase de fouilles n'est pas financée, ce qui peut constituer une difficulté pour certains opérateurs.

Notre avis sur les crédits de la mission est favorable.

Photo de Antoine Lefèvre

S'agissant des nouveaux bâtiments tels que la cité judiciaire de Nancy, il faut savoir que les dossiers importants de rénovation ou de création de structures judiciaires sont gérés directement par l'agence publique pour l'immobilier de la justice (Apij). Il avait été évoqué dans le cadre des États généraux de la justice l'adaptation de ces entités aux nouveaux usages. Certains constats ont déjà été réalisés pour les bâtiments neufs : si les fonctions support ont été mises en valeur, certains bureaux sont partagés. Or cette organisation pose des problèmes pratiques, notamment pour les auditions de mineurs.

Par ailleurs, en ce qui concerne les difficultés de recrutement dans le secteur de l'administration pénitentiaire, il est vrai que la grille de rémunération doit être retravaillée. L'idée est de faire passer les agents de surveillance de la catégorie C vers la catégorie B, avec des effets sur la rémunération. Un travail de réflexion est en cours sur ce sujet.

S'agissant des centres éducatifs fermés, l'objectif ambitieux fixé depuis plusieurs années est maintenu, en dépit des difficultés. Trois centres éducatifs fermés ont été ouverts en 2022 et dix autres sont en cours, dont certains seront gérés par le biais d'associations, mais cinq projets se heurtent à un refus de permis de construire. Ce point rejoint les questions d'acceptabilité évoquées.

Les retards de paiement dans le cadre de l'aide juridictionnelle sont en grande partie liés à des problèmes informatiques qui sont connus et qui devraient être réglés grâce aux nouveaux applicatifs du ministère, en cours de déploiement.

Lorsque l'on évoque l'attractivité pour les magistrats, la prime ne suffit effectivement pas. Tout l'environnement de travail doit être amélioré, et il existe une réelle lassitude de la part des magistrats face à ces dysfonctionnements. Le garde des sceaux a d'ailleurs développé depuis quelques années les postes de juristes assistants qui ont pour mission de renforcer l'équipe autour du juge et d'améliorer le traitement des affaires.

En ce qui concerne le programme des 15 000 places, les retards sont imputables aux difficultés pour trouver du foncier, à la complexité du chantier ou encore à la pénurie de matériaux et matériels de construction. Ainsi, 2 441 places seront opérationnelles en 2022, 1 958 en 2023, et 24 établissements seront livrés en 2024. Les programmes de rénovation de certains établissements de détention ont été poursuivis en parallèle. La pénurie de certains matériaux a un peu retardé les chantiers. Il faudra encore du temps, mais il convient d'avancer sur la question du foncier, avec les élus locaux également. À propos de la surpopulation carcérale, la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis a fait l'objet d'une réhabilitation complète, de même que le centre pénitentiaire des Baumettes et le centre pénitentiaire de Nantes. Les nouveaux établissements concernent les villes de Caen, Troyes, Avignon et Koné en Nouvelle-Calédonie.

M. Canévet a évoqué la volonté d'assurer une bonne liaison au niveau du secrétariat général du ministère. Cela passera par les outils informatiques, par la communication entre le ministère de la justice et le ministère de l'intérieur, mais aussi par la direction générale des finances publiques (DGFiP), car certains logiciels, notamment ceux qui permettent le recouvrement des amendes pénales, posent problème. Là encore, des efforts s'imposent, de même que la limitation du turn-over dans les services.

Concernant les greffiers, ils seront également concernés par une revalorisation : un montant de 150 euros par mois en 2023 a été évoqué.

Madame Briquet, des discussions sur la revalorisation de l'aide juridictionnelle sont en cours avec les avocats. La revalorisation est continue sur différents exercices, mais n'atteint toujours pas un niveau satisfaisant du point de vue des avocats.

Madame Vermeillet, je ne dispose pas d'informations précises sur la volonté de recruter des magistrats spécialisés dans le domaine de la fraude et de l'évasion fiscales, mais c'est une nécessité.

Vous demandez, monsieur Bascher, s'il y a des abus de l'aide juridictionnelle. Elle permet avant tout l'accès au droit. Vous avez évoqué un nombre de dépôts de plainte abusif, ce qui n'est pas forcément en lien avec le recours à l'aide juridictionnelle, qui répond à des critères financiers et de patrimoine pour son octroi.

Monsieur Meurant, certains délais restent longs, mais les affaires dont vous parlez ne font pas l'objet d'un ciblage particulier. La justice est largement ankylosée dans beaucoup de domaines, d'où ces retards.

M. Blanc a abordé la question de la PJJ. D'importants crédits concerneront ce secteur en 2023 - 289 millions d'euros sont en particulier alloués au secteur associatif -, et un travail sera accompli avec l'univers associatif, très dynamique, qui permet de trouver des solutions dans les territoires. La PJJ reste une priorité du ministre.

Photo de Alain Marc

Sur la volonté de l'administration pénitentiaire de faire remonter les surveillants pénitentiaires de la catégorie C à la catégorie B, si elle est pleinement justifiée en termes de rémunération et de technicité des métiers, elle se heurte à une difficulté, celle de devoir disposer du baccalauréat. Un tel critère pourrait renforcer les difficultés de recrutement.

Photo de Claude Raynal

Pouvez-vous nous rappeler votre avis, monsieur le rapporteur spécial ?

Photo de Antoine Lefèvre

Mon avis est favorable. Si nous voulons obtenir des résultats, il faut une politique d'évaluation et soutenir notre justice.

Photo de Didier Rambaud

Ce nouvel article et le suivant ont été ajoutés par l'Assemblée nationale. Ils prévoient la préparation de rapports sur le pass culture et les territoires ultramarins.

Photo de Vincent Eblé

Notre tradition étant de ne pas nous montrer favorables aux rapports, nous proposons deux amendements de suppression.

L'amendement n° 1 est adopté.

Photo de Roger Karoutchi

Le PLF prévoit 705 millions d'euros en CP au titre de la mission « Médias, Livre et industries culturelles », soit une progression de 4 %. Sur la seule partie presse et médias, financée à hauteur de 371 millions d'euros en CP, la hausse est d'environ 6 %. Le secteur semble donc plutôt favorisé. J'aurai toutefois quelques commentaires.

D'abord, un mot sur l'Agence France-Presse (AFP), dont la situation semble se régulariser. En effet, l'Agence obtient des ressources relativement importantes pour les vidéos et les équilibres se mettent en place.

Ensuite, en ce qui concerne les aides à la presse, qui représentent 197 millions d'euros, j'observe une absence de volonté de changement, alors qu'on évoque régulièrement une réforme ambitieuse et qu'on nous explique qu'il faut modifier le système, dans une période où la presse papier est en difficulté. À titre d'exemple, l'aide pour le transport postal reste inchangée, ce qui parait absurde et pose question quant à l'empreinte carbone.

J'observe enfin que certains ne réussissent à survivre que grâce à ce système d'aide et notamment via les aides consacrées au pluralisme.

Cette question est devenue un tabou et, depuis des décennies, ces aides sont considérées comme une nécessité absolue. J'ajoute que certains hebdomadaires ou magazines n'en reçoivent pas alors qu'ils ne paraissent pas moins éligibles que d'autres... Ainsi, le budget reste globalement correct mais les réformes et les aides aux mutations de la presse demeurent très insuffisantes. On continue de croire que le journal papier représente la presse quand bien même nombre d'organes connaissent de graves difficultés parce qu'ils n'ont pas abordé la révolution numérique à temps.

De la même manière, il faudrait conduire une analyse poussée des crédits dédiés à l'expression radiophonique. Tout cela manque de modernité, de vigueur et de réforme et on ne parvient pas à sortir du même système d'aide, l'État s'étant transformé en une sorte d'immense guichet.

En ce qui concerne le programme « Livre et industrie culturelle », l'action « Livre et lecture » représente 304 millions d'euros en AE. Cependant, je rappelle que nous n'avons pas de vision globale des crédits dédiés à la lecture, qui sont répartis sur plusieurs programmes budgétaires

Globalement, les bibliothèques considèrent qu'elles sont revenues à un meilleur équilibre que pendant les années de confinement, en termes de fréquentation et d'équipement.

Cependant, j'avais déjà signalé le problème de la BnF, qui s'aggrave. En effet, plus des deux tiers des montants dédiés à l'action « Livre et lecture », soit 232 millions d'euros, financent la BnF. Il s'agit bien sûr d'un monument en soi, ce qui coûte cher. Ainsi, des travaux nécessaires et considérables de réaménagement et de modernisation sont déjà engagés. À ce titre, nous avons reçu ses responsables, qui cherchent à trouver des mécènes et des crédits hors budget de l'État, ce qui semble très difficile. Afin de rationaliser les dépenses de personnel, a également été mis en place un nouveau système de lecture offrant moins de possibilités d'obtenir rapidement les ouvrages, alors que la BnF était l'exemple type de la grande bibliothèque où les chercheurs ont accès à tous les documents. Si cet équipement reste l'un des meilleurs, il doit aujourd'hui être complété par la construction d'un nouveau pôle de conservation des collections, qui sera situé à Amiens, puisqu'on ne parvient plus à conserver la totalité des documents. La BnF est bien gérée mais ses responsables considèrent que les prévisions faites lors de sa création ont été sous estimées. En effet, chacun prévoyait que tout serait rapidement numérisé, qu'il y aurait beaucoup moins de livres, de journaux ou d'archives papier, mais ce n'est pas le cas. La BnF fait donc face à de vrais défis mais l'on peut comprendre que les autres équipements dédis à la lecture, notamment en province, ne soient pas satisfaits de cette répartition des fonds.

J'en viens au Centre national musique (CNM), dont les crédits s'élèvent à 28 millions d'euros. Le centre doit bénéficier des ressources issues de la vente des billets mais les publics reviennent moins qu'on ne l'imaginait. Les responsables du Centre prévoient une impasse de financement de 10 millions d'euros en 2023 mais pensent pouvoir faire face en ayant recours à des redéploiements de crédits budgétaires. Cependant, à partir de 2024, ils ne pourront plus s'en sortir et demandent donc une réforme. Nous les reverrons en 2023.

Quant au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), il perçoit 710 millions d'euros grâce à la taxe sur les plateformes numériques. Mais la dépense fiscale explose et devrait atteindre 587 millions d'euros en 2023. Je note que dans le cadre du projet France 2030, 350 millions d'euros seront dédiés vers le cinéma, ces crédits étant appelés à être complétés par une intervention des collectivités territoriales et du secteur privé, afin de parvenir à un financement total de 2 milliards d'euros, ce qui représente une somme considérable. Je finirai en donnant l'exemple des aides attribués à la réalisation de la série Lupin ; est-ce à l'argent public de financer une série diffusée sur Netflix ?

Pour conclure sur cette mission, je propose un vote positif sur ces crédits.

J'en viens à présent à l'audiovisuel public et souhaiterais commencer par rappeler qu'en juin 2022, nous avons présenté avec M. Hugonet un rapport d'information consacré à sa réforme.

Pendant la campagne présidentielle, le candidat Président de la République a annoncé la suppression de la contribution à l'audiovisuel public. Nous en avons pris acte mais il faut à présent trouver des solutions pour définir un nouveau financement. Les présidents de chaines s'étaient dits prêts à l'accepter si on leur garantit constitutionnellement leurs crédits, ce qui n'est évidemment pas possible.

Le Gouvernement aura recours, dans un premier temps, à une fraction du produit de la TVA et la dotation accordée aux sociétés de l'audiovisuel public passera de 3,7 milliards d'euros à 3,8 milliards d'euros cette année, ce qui représente une augmentation de 3 %, qui prend en compte l'inflation.

Depuis 2017, une réforme de l'audiovisuel public doit avoir lieu. Il s'agirait dans un premier temps de délimiter le périmètre, avant de débattre des missions du service public et de les définir. Alors, nous pourrions évaluer la masse financière nécessaire. Pourtant, rien n'a été fait et la ministre annonce des consultations qui doivent se tenir jusqu'en avril... On nous parle d'un texte depuis cinq ans et Franck Riester en avait porté un, qu'il avait présenté à l'Assemblée nationale mais pas au Sénat. Nous avons également demandé à la ministre si des propositions seraient faites lors du débat budgétaire mais ce ne sera pas le cas, leur objectif demeurant pour l'instant de stabiliser ce budget à hauteur de 3,8 milliards d'euros. Ainsi, les contrats d'objectifs et de moyens (COM) qui seront conclus dans les semaines seront élaborés sans directive du Gouvernement quant à ce que devraient être l'audiovisuel public et sa réforme.

Si Radio France comme France Médias Monde ont plutôt bien conduit leurs réformes, les navires amiraux tels que France Télévisions considèrent qu'il faut les laisser décider seuls des réformes à mener. J'évoquerai à titre d'exemple les filiales créées par France Télévisions sur le cinéma, l'une au sein de France 2 et l'autre au sein de France 3, chacune comptant quelques agents. La simple fusion de ces deux entités semble compliquée et il faudrait leur laisser deux à trois ans pour y parvenir.

Je m'avoue assez désabusé sur ces questions de réforme annoncée qui n'a jamais lieu. Je me sens donc partagé quant à l'avis à donner sur les crédits du compte de concours financiers (CCF). D'un côté, il faut bien que l'audiovisuel public vive et je serais donc tenté de me dire favorable, à condition que l'État s'engage à réformer. D'un autre côté, je serais tenté d'exercer une certaine pression. Pour résumer, je ne suis pas enthousiaste et ne formulerai pas un oui clair et massif.

Photo de Jean-Raymond Hugonet

Le budget 2023 est forcément un budget de statu quo et de transition puisque le Président de la République a dynamité la contribution à l'audiovisuel public. Je souligne toutefois que je n'ai vu personne, ni à Paris ni sur le territoire national, manifester pour payer sa redevance de 138 euros...

Demain, je proposerai à la commission de la culture un avis favorable sur les crédits du CCF. D'abord, parce qu'il n'y a pas eu de remise en cause de l'existence de ce CCF, même si la source de financement a changé. Le problème qui se pose relève d'une question de technique et de législation fiscale. En effet, des entreprises qui n'étaient pas assujetties à la TVA le sont maintenant et pour d'autres il s'agit du contraire.

De plus, la taxe sur les salaires implique une charge très importante, qui représente 42,6 millions d'euros pour toutes les structures de l'audiovisuel public. Enfin, la question de la compensation de l'inflation et du niveau de cette compensation se pose, mais cela touche l'ensemble du budget 2023.

En ce qui concerne la partie des taxes sur les salaires et la TVA, des équilibres ont été trouvés et le Gouvernement s'est montré assez magnanime ; le compte y est. En revanche, l'évaluation de l'inflation semble insuffisante. A ce bémol près, il s'agit d'un budget qui s'inscrit dans la continuité, malgré la légère augmentation de 3 %, qui s'explique en raison des problèmes fiscaux posés.

Les cinq structures de l'audiovisuel public se retrouvent dans le vide, puisqu'on leur demande une projection alors qu'elles n'ont aucune visibilité en l'absence de réforme. Ainsi, nous prévoyons qu'il y aura début décembre un avenant aux COM pour 2023, qui là aussi relève du bricolage. Cependant, nous aurons d'autres occasions de mettre la pression sur le Gouvernement pour qu'une réforme voie le jour. Si l'année prochaine il n'y a toujours pas de réforme, nous préconiserons un avis différent mais il serait mal venu aujourd'hui, alors que ces structures sont dans l'incertitude, que le Sénat envoie un signe négatif. De plus, le rapport que nous avons remis conjointement au moins de juin a acté certaines choses, notamment le rapprochement entre les structures de l'audiovisuel public. Le moment où chacun aura compris l'importance de ces sujets se rapproche.

Photo de Antoine Lefèvre

L'article 44 ter prolonge jusqu'au 31 décembre 2027 la possibilité de déroger au principe d'encellulement individuel des personnes détenues en maison d'arrêt. Je vous propose un amendement pour renforcer l'information du Parlement sur l'exécution des programmes immobiliers pénitentiaires et leur impact quant au respect de l'objectif de placement en cellule individuelle.

L'amendement n° 1 est adopté.

Photo de Roger Karoutchi

Je ne comprends pas que le Gouvernement ne veuille pas faire de réforme. En effet, nous ne pourrons avoir recours au financement par les parts de TVA que jusqu'en 2024. Il faut donc que quelque chose advienne !

Photo de Jean-François Husson

Je voudrais évoquer la question du financement du cinéma français, qui semble relativement préoccupante. En effet, la dépense fiscale est élevée et différents acteurs tels que les collectivités ou le secteur privé doivent participer. Il faudrait s'interroger sur ce modèle au regard des évolutions du cinéma.

Par ailleurs, je voulais poser une question à laquelle Roger Karoutchi a répondu, sur les perspectives de réforme de l'audiovisuel public. Celle-ci est donc remise à une date butoir de 2025 et je suis assez inquiet. De plus, la manière dont il a été mis fin à la redevance audiovisuelle et aux engagements pris, y compris devant la représentation nationale, ne semble pas très convenable.

Photo de Michel Canevet

Monsieur Karoutchi, vous évoquiez la révolution numérique de la presse et l'impact carbone de la distribution journaux. Dans votre esprit, faudrait-il supprimer totalement le support papier ? Cela serait à mon avis regrettable. D'abord parce que certains de nos concitoyens aiment l'utiliser. Par ailleurs, en Bretagne, les journaux sont récupérés par les écoles, qui collectent ainsi de l'argent, avant d'être transformés en ouate de cellulose, qui sert d'isolant thermique pour nos habitations. Je ne voudrais pas que cette filière économique soit mise en péril...

Photo de Thierry Meignen

L'an dernier, la mission « Investissements d'avenir » est devenue « Investir pour la France de 2030 », à l'issue de l'adoption de la loi de finances initiale pour 2022.

Le Gouvernement avait décidé d'inscrire les crédits destinés au plan « France 2030 », au sein de la mission, par voie d'amendement, sans en changer l'architecture.

Pour mémoire, il s'agit de 34 milliards d'euros qui se sont ajoutés aux 20 milliards d'euros du programme d'investissement d'avenir (PIA) n° 4, qui avait été voté en loi de finances initiale pour 2021.

Les montants du PIA 4 et de France 2030 se sont donc additionnés : 54 milliards d'euros dédiés au financement de l'innovation pour faire de la France une terre d'excellence.

Quant aux logiques qui les sous-tendent, elles sont différentes et viennent se compléter : la logique portée par les PIA se situe en amont, car elle est axée sur la recherche et la conception de l'innovation ; et celle qui anime « France 2030 » se situe en aval car elle est plus axée sur la mise en oeuvre de l'innovation et l'industrialisation.

Rappelons que « France 2030 » cible trois priorités, celles de mieux vivre, mieux produire et mieux comprendre notre monde, qui renvoient à dix objectifs très concrets, tels que faire émerger des réacteurs nucléaires de petite taille, devenir le « leader » de l'hydrogène vert, ou encore produire de 2 millions de véhicules électriques et hybrides d'ici à 2030, et 20 biomédicaments contre les cancers, les maladies chroniques.

En ayant intégré les crédits de « France 2030 » à la mission, en loi de finances initiale (LFI) pour 2022, la mission prend une toute nouvelle orientation qui est celle de soutenir l'ensemble du cycle de vie de l'innovation jusqu'à son déploiement industriel.

Photo de Jean-Claude Requier

Ma question concerne la publicité sur France Télévisions. Normalement, après 20 heures, il ne devrait pas y en avoir. Cependant, après le journal télévisé, on assiste à quarante-cinq minutes de petits bouts de séquences entrecoupés par des parrainages publicitaires et cette plage s'étend de plus en plus. Comme cela est-il permis ?

Photo de Jérôme Bascher

Quel est le manque à gagner entrainé par l'absence de publicité sur les chaînes publiques ?

Photo de Roger Karoutchi

D'abord, en ce qui concerne la réforme de l'audiovisuel, je n'y crois plus. Rien ne sera fait et, comme en 2024 nous ne pourrons plus avoir recours à la TVA, nous bricolerons ! La réforme ne semble se profiler nulle part, ni dans les chaînes ni au Gouvernement. En effet, personne ne veut se poser la question du périmètre de l'audiovisuel public, car elle pourrait avoir des conséquences et remettre en cause les missions comme le nombre de chaînes.

Je ne suis pas favorable à la disparition du support papier. Toutefois, les jeunes n'achètent plus de journaux et lisent la presse sur leur téléphone. Mais les aides à la presse visent principalement la presse papier et très peu le numérique.

Sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, la publicité a été supprimée après 20 heures sur les chaînes publiques : l'objectif était que les programmes puissent commencer à 20 h 30. Mais aujourd'hui, ils commencent à 21h10 voire plus tard ! Comme la loi permet des parrainages publicitaires, les chaines enchaînent la diffusion de petits programmes courts parrainés par des annonceurs et les films ne commencent qu'après ; c'est pourquoi nous avons proposé avec Jean-Raymond Hugonet de supprimer tout parrainage publicitaire après 20 h 30. Le service public ne doit pas dépendre de l'audimat et donc de la publicité. Pour France Télévisions, les recettes publicitaires s'élèvent à 381 millions d'euros dont 97 millions d'euros au titre des parrainages ; pour Radio France, les recettes publicitaires s'élèvent à 60 millions, dont 6 millions au titre de parrainages, c'est considérable. Si nous avions procédé à une réforme de l'audiovisuel public en redéfinissant le périmètre des missions, nous n'en serions pas là.

J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles » et un avis de sagesse positive pour l'adoption des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

Photo de Jean-François Husson

Ce qui m'inquiète, c'est que les observations sur cette mission pour 2023 sont quasiment identiques à celles formulées en 2022. Il s'agit tout de même d'un budget très important : 54 milliards d'euros. Je soutiens la demande de notre rapporteur d'essayer d'y voir plus clair et d'associer autrement le Parlement pour suivre et évaluer cette fusion entre les PIA et « France 2030 », opération sur laquelle le Gouvernement a largement communiqué. Il s'agit probablement, dans l'esprit de l'exécutif, d'une manière de passer outre les contraintes liées à la lenteur des procédures politiques et administratives ; il ne saurait pourtant être question de contourner le contrôle nécessaire et légitime du Parlement. Notre rapporteur spécial voit-il des pistes pour enjoindre le Gouvernement à modifier sa façon de procéder dans le cadre de ce PIA et de la mission « France 2030 » ?

Photo de Gérard Longuet

Quelle est la définition de l'hydrogène vert ?

Photo de Michel Canevet

Comment expliquer que les crédits de la mission - 262,5 millions d'euros en AE - soient aussi faibles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

J'ai tendance à considérer que nous ne verrons guère les réalisations de cette mission avant la fin. Le comité de suivi, dont nous faisons partie, se réunit une fois par an, ce n'est pas beaucoup... Tout au plus, pourrons-nous voir si quelques opérations auront réussi. Je ne rappellerai pas certains investissements du passé, comme le plan calcul, qui ont eu les succès que l'on sait ! La question n'est pas tant l'argent que la capacité à faire et à mener à bien les projets. Tout ce qui contribuera à améliorer l'évaluation et le suivi, en associant un regard extérieur, est bienvenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Emmanuel Capus

À quoi correspondent les 500 millions d'euros prévus pour le nucléaire dans le cadre de la mission ? Je déplore par ailleurs l'absence de véhicules français fonctionnant au gaz naturel (GNV).

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Lavarde

Depuis des années, on observe un problème de gouvernance et un turn-over assez important au sein du SGPI. De plus, les crédits de la mission sont répartis entre quelques prestataires, comme la CDC, l'ANR ou l'Ademe, qui sont également gestionnaires délégués de certains programmes. Constatez-vous une professionnalisation parallèle à la hausse des crédits ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Meignen

Nous n'en sommes qu'au tout début, Monsieur Husson. Nous posons les premiers pas. La refonte du dispositif va prendre du temps. Progressivement, nous pourrons davantage contrôler. On a toutefois gagné en souplesse et en efficacité. On regrettait l'an passé l'insuffisance des moyens de contrôle. Des progrès ont été faits en la matière.

Monsieur Longuet, la seule définition scientifique dont je dispose pour l'hydrogène vert est succincte. Celui-ci est produit à partir de l'électrolyse de l'eau, en faisant passer un courant électrique dans l'eau.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

L'Europe hésite à reconnaître le nucléaire, dans sa taxonomie, comme une énergie verte. Or pour produire de l'hydrogène vert, on a besoin de quantités d'électricité considérables que seul le nucléaire peut produire ! J'aurais donc aimé que le Gouvernement précise sa conception de l'hydrogène vert.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Meignen

Monsieur Capus, les crédits sur le nucléaire concernent de petits réacteurs modulaires destinés à être utilisés à des fins médicales. Je n'ai pas de réponses sur le GNV.

Monsieur Canévet, les crédits que vous mentionnez correspondent à des crédits d'AE. Il s'agit du reliquat qui n'a pas encore été engagé. J'en profite pour préciser que la baisse de 13,08 % des crédits par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 s'explique par un meilleur calibrage des CP.

Madame Lavarde, quatre organismes - l'Ademe, Bpifrance, la CDC et l'ANR - bénéficient des crédits de la mission : il leur appartiendra de reverser ces crédits aux bénéficiaires des projets sélectionnés. Le circuit est ainsi plus court, on y gagne en temps et en réactivité.

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter sans modification les crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances pour la mission Culture s'élève à 3,736 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 3,715 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ces chiffres traduisent une progression des crédits de 7,04 % en AE et 7,36 % en CP. Elle dépasse l'hypothèse d'inflation retenue pour 2023 en projet de loi de programmation des finances publiques, 4,3 %, même si celle-ci devrait être remise en question rapidement.

La mission « Culture » ne résume pas le financement public de la culture et de la communication. Celui-ci devrait atteindre environ 16,5 milliards d'euros en 2022, soit 1,9 milliard de plus qu'en 2019, dernier exercice avant le déclenchement de la crise sanitaire. Cette estimation large intègre les crédits budgétaires et les dépenses fiscales destinés directement et indirectement à la culture et à la communication.

Les crédits prévus en loi de finances initiale pour le programme 131 dédié à la création devraient dépasser le milliard d'euros pour atteindre 1,011 milliard d'euros en AE et 1,006 milliard d'euros en CP. Les dotations sont ainsi majorées de 10 %.

Si la progression des crédits peut être, en première analyse, saluée dans un contexte de reprise délicate de l'activité, l'action du ministère dans le domaine de la création semble brouillée tant par la multiplication des objectifs assignés (16 sous actions pour les actions 01 et 02) et des labels que, dans certains cas, par le caractère résiduel pour ne pas dire marginal qu'elle peut revêtir dans les territoires, où elle se résume à un financement complémentaire des politiques territoriales.

La fin du plan de relance ne signifie par ailleurs pas celle des inquiétudes pour l'ensemble du secteur, confronté à un effet de ciseaux entre reprise progressive mais lente de l'activité et progression du coût des dépenses contraintes, notamment énergétiques. La perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 constitue aujourd'hui une source supplémentaire d'anxiété avec la probabilité renforcée d'annulations de festivals et de concerts, en raison d'un manque de forces de l'ordre et de sociétés privées pour en assurer la sécurité.

Le présent projet de loi de finances prévoit de poursuivre le programme de commande publique « Mondes nouveaux » mis en place dans le cadre du plan de relance. 10 millions d'euros seront dédiés à ce dispositif, qui vise notamment à faire entrer la culture dans des zones où elle n'est plus assez présente : espaces ruraux, périphéries urbaines ou coeurs de ville dégradés. Il conviendra cependant d'être vigilant sur la réalité de l'accompagnement des artistes, la complémentarité avec le 1 % culture et le droit de suite que le ministère doit avoir sur les oeuvres ainsi financées, s'agissant notamment des arts visuels.

Le projet de loi de finances vise également à financer les surcouts énergétiques. Pour les opérateurs du programme, ceux-ci étaient estimés lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2023 à 13 millions d'euros, en progression de 131 % par rapport à 2022. Ce montant devrait être révisé à la hausse dans les prochaines semaines. Il ne sera pas intégralement compensé par la hausse de la dotation prévue dans le projet de loi de finances. Cette absence de compensation intégrale devrait induire une réduction des marges artistiques, soit la part des budgets dédiée à la création, des établissements : 30 % en 2023 et 50 % en 2024. La fermeture de certains opérateurs à la rentrée 2023 est une hypothèse crédible, faute de pouvoir produire certains spectacles.

Dans le cadre de l'action 06, dédiée au soutien à l'emploi, 12,7 millions d'euros financent des mesures nouvelles, dont 7 millions d'euros sont fléchés vers le Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (Fonpeps). Cette progression s'inscrit dans une trajectoire haussière révélatrice d'une sous-budgétisation à l'oeuvre depuis 2019. Dans ces conditions, nous nous interrogeons sur la fiabilité de la prévision budgétaire pour 2023, même si un retour à la normale semble envisageable après trois exercices marqués par la crise sanitaire.

S'agissant du programme 175 « Patrimoines », il devrait être doté de 1,11 milliard d'euros en AE et d'1,10 milliard d'euros en CP en 2023, ce qui représente une progression de plus de 7 % dans les deux cas.

Ce financement est complété par des soutiens hors budget qui mobilisent nos concitoyens. D'abord, le Loto du patrimoine, pour lequel le ministère dégèle ensuite la réserve de précaution chaque année. Il a permis de dégager 100 millions d'euros en quatre ans. Ensuite, les dons pour Notre-Dame de Paris s'élèvent à 849 millions d'euros et devraient dépasser le coût des travaux, estimé à 703 millions d'euros. À ce titre, je rappelle que l'État ne contribue pas budgétairement alors que, depuis la loi de séparation de 1905, l'entretien des cathédrales lui incombe. De plus, compte tenu du prélèvement de la TVA sur le coût des travaux, cette opération représentera même des recettes nettes.

La progression des crédits dédiés au programme 175 relève pour 48,7 % de mesures destinées à tenir compte de l'inflation et de la hausse des coûts, qu'il s'agisse de majorations de dotation de fonctionnement ou de dotation d'investissement. Sur les 37,4 millions d'euros dédiés à cet objectif, 63,4 % sont fléchés vers les opérateurs. La majoration des coûts est déjà constatée sur plusieurs chantiers encadrés par l'État. S'agissant des coûts énergétiques, les dépenses d'électricité du ministère et de ses opérateurs pourraient augmenter en 2023, de 128 à 285 % selon les estimations.

Au-delà de la hausse des dépenses contraintes, nous observons une augmentation conséquente des prix d'acquisition des oeuvres les plus importantes, qui auraient vocation à enrichir les collections publiques. En effet, les niveaux d'adjudication dans les ventes aux enchères s'établissent désormais régulièrement à un niveau au moins quatre à dix fois supérieur à celui des estimations.

Enfin, si la reprise de la fréquentation des établissements publics dédiés au patrimoine a été plus importante que prévue en 2022, l'horizon ne semble pas totalement dégagé en raison de plusieurs incertitudes : l'effet de l'inflation sur les dépenses culturelles, l'absence de retour de la clientèle chinoise et la perspective d'une fermeture le temps des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Le présent projet de loi de finances (PLF) prévoit une majoration de la dotation du programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de 5,86 % en AE et de 6,72 % en CP par rapport à 2022, les crédits devant atteindre 800,68 millions d'euros en AE et 798,18 millions d'euros en CP.

D'abord, les crédits dédiés aux établissements d'enseignement supérieur culturel et à l'insertion professionnelle devraient progresser de 36 millions d'euros en AE et de 32 millions en CP.

Quatre objectifs sont poursuivis : réévaluer les bourses sur critères sociaux ; renforcer les subventions de fonctionnement et d'investissement des écoles d'art et d'architecture ; faciliter la mise en oeuvre des grands projets d'investissement de ces mêmes écoles ; et conforter le soutien aux établissements territoriaux d'enseignement supérieur, en ciblant notamment le statut de leurs enseignants.

Toutefois, une interrogation demeure quant à la dynamique baissière du taux d'insertion professionnelle des étudiants dans le domaine du spectacle vivant. Afin de répondre à ce défi, il convient de mettre en place un véritable accompagnement, en déclinant le modèle du Jeune théâtre national (JTN), associé au Conservatoire national supérieur d'art dramatique et au Théâtre national de Strasbourg, qui organise rencontres et auditions, prend en charge une partie des jeunes artistes engagés à la suite des auditions, programme des maquettes de premiers spectacles et élabore un annuaire des artistes issus des onze écoles nationales d'art dramatique.

Par ailleurs, 13 millions d'euros sont fléchés vers des investissements structurants au sein des écoles de la création et du patrimoine. Si cet apport doit être salué, nous rappelons néanmoins l'importance des restes à payer sur des chantiers couverts par le programme 361.

De son côté, le pass culture, déployé dans toute la France depuis mai 2021, étendu en 2022 aux jeunes de 15 ans et plus ainsi qu'aux élèves à partir de la quatrième, sera ouvert aux jeunes de sixième et cinquième en 2023. Le présent PLF prévoit une dotation de 208,5 millions d'euros pour le financement du dispositif, soit une majoration des crédits de 9,5 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2022. Le pass culture représente 25 % des crédits du programme 361 et la société qui le gère est le deuxième opérateur du ministère de la culture, après la Bibliothèque nationale de France (BnF).

Plus de 2,1 millions de jeunes sont aujourd'hui inscrits sur l'application et 14 millions de réservations de produits culturels ont été opérées via le pass, pour un montant total de 235 millions d'euros. Ainsi, 87 % des jeunes concernés ont acquis un bien culturel par cet intermédiaire.

Néanmoins, l'efficacité du dispositif doit encore être améliorée du point de vue qualitatif. En effet, le pass ne saurait se résumer à une simple plateforme d'achat de biens et de services et doit permettre la mise en place d'un véritable parcours culturel. Il s'agira notamment de vérifier que le pass ne serve pas au financement d'achats liés au parcours scolaire et qu'il contribue bien à faire évoluer les pratiques culturelles, l'accent devant être mis sur l'accès au spectacle vivant.

Au-delà de la question de la médiation culturelle, l'accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au pass. À ce titre, seuls 3,7 % des inscrits sur l'application ont déclarés ne pas être scolarisés. Ce ratio est plus faible que le nombre de jeunes non-scolarisés rapporté à l'ensemble de la population visée.

Il est indispensable que le pass culture ne concentre pas l'intégralité de l'effort fourni par l'État en faveur de l'éducation artistique et culturelle. Ainsi, la montée en charge budgétaire de l'application ne doit pas s'effectuer au détriment des moyens qui lui sont traditionnellement dédiés. Cependant, les indicateurs rattachés au programme mettent en avant une réduction de la part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle ainsi qu'une baisse de l'effort en faveur des territoires prioritaires.

Le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère » se concentre, depuis la loi de finances pour 2021, sur le financement des fonctions de soutien du ministère et, dans une moindre mesure, de l'action culturelle internationale. Piloté par le secrétariat général du ministère, il devrait être doté de 813,5 millions d'euros en AE et de 811,5 millions d'euros en CP.

Comme lors de l'exercice précédent, la masse salariale devrait croître en 2023, son coût passant de 493,6 millions d'euros à 516,1 millions d'euros, soit une augmentation de 4,29 %. Je rappelle que 67 % de cette progression résulte de mesures catégorielles. Le plan de rattrapage indemnitaire mis en place commence à permettre au ministère de renforcer son attractivité et d'éviter des vacances de postes prolongées.

Par ailleurs, le projet immobilier Camus, lancé en 2019, prévoit la rénovation des locaux et l'aménagement de nouveaux bureaux au sein du ministère de la culture dont le nombre de sites devrait ainsi passer de sept à trois. Initialement établi à 36,6 millions d'euros, le budget prévisionnel a été actualisé en 2022 pour être porté à 55,43 millions d'euros, la découverte de plomb justifiant pour partie cette évolution.

De plus, l'exercice 2023 devrait voir la dotation numérique du ministère continuer à progresser pour atteindre 26,52 millions d'euros. Cette somme sera notamment dédiée au renforcement de la transformation numérique et de la cybersécurité, ainsi qu'à la mise en place d'outils permettant de renforcer et de fiabiliser le suivi économique de l'activité des secteurs subventionnés, en ciblant notamment la fréquentation des lieux culturels ou la dynamique du spectacle vivant. La mise en place de ces systèmes d'information devrait contribuer à faciliter la gestion des crédits dédiés aux établissements subventionnés et permettre une meilleure prévision budgétaire.

Enfin, je précise que les crédits consacrés à l'action culturelle internationale sont appelés à progresser en deux temps : en loi de finances initiale puis dans le futur collectif de fin de gestion. Une telle méthode peut étonner.

Debut de section - PermalienPhoto de Sabine Drexler

Comme l'a dit Vincent Éblé, l'inflation et le coût des matières premières vont absorber une part de l'augmentation du budget, ce qui pose problème.

Par ailleurs, nous observons un déséquilibre géographique dans l'attribution des aides puisque davantage de moyens sont déployés en Île-de-France.

Enfin, les crédits attribués aux collectivités et aux particuliers restant stables, le petit patrimoine restera le grand oublié de ce budget, ce que nous déplorons.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Je souscris aux propos des deux rapporteurs spéciaux. Le pass culture doit représenter un point de vigilance puisque cette société par actions simplifiée (SAS) représente un budget très important au sein du ministère de la culture. Une analyse qualitative devrait être conduite sur la question de l'éducation artistique et culturelle, notamment en ce qui concerne la part collective. En effet, les jeunes procèdent à des choix significatifs et la diversification parait importante.

J'en viens à la question énergétique. Pour les grands opérateurs de l'État tels que l'Opéra de Paris, les montants estimés sont assez préoccupants. Il faudra faire des choix. J'ai entendu parler de réduction de marge artistique dans certains établissements, ce qui représente un danger pour les mois à venir.

Pour conclure, votre présentation se rapproche de la philosophie du rapport pour avis que je présenterai la semaine prochaine à la commission de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

D'abord, je m'interroge sur les difficultés liées à la désaffection relative du public suite à la crise sanitaire, notamment pour certains spectacles ou manifestations.

Par ailleurs, les dépenses énergétiques sont liées à la hausse du prix des énergies mais aussi à l'existence de bâtiments de moins en moins adaptés, ce qui souligne le vieillissement des grands équipements à travers notre pays, auquel on ne répondra que par un programme ambitieux de remise à niveau.

Quant aux dépenses de personnel, elles ont pu augmenter en raison de soutiens apportés pour maintenir l'offre culturelle pendant la crise sanitaire, certaines structures pouvant rencontrer des difficultés à réduire la voilure.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Au sujet de Notre-Dame de Paris, vous avez écrit dans votre rapport : « le financement des travaux de conservation et de restauration de la cathédrale relève quasi intégralement du mécénat (...) ce qui semble trahir l'intention des donateurs ». Aurait-il fallu que d'autres crédits soient déployés ? Pourtant, le montant des donations dépasse déjà celui des travaux. Où en est-on de l'avancement de ce chantier, notamment d'un point de vue financier ? La trajectoire financière est-elle respectée ?

Ensuite, j'aimerais aborder la question de la redevance archéologique que paye tout acquéreur de terrain et qui sert notamment à effectuer des travaux préliminaires de fouille. Cependant, lorsqu'il faut engager des travaux de fouille archéologique approfondis, leur coût très élevé pèse sur la faisabilité des opérations à venir. Au sein du ministère de la culture, des lignes de crédits permettent-elles d'accompagner ces propriétaires de terrains ? La solidarité nationale au titre de la redevance archéologique ne devrait-elle pas intervenir ?

Enfin, le pass culture ne serait-il pas plus efficient s'il était géré par les départements ? L'État en région, à travers ses directions régionales situées dans les préfectures, est-il vraiment outillé pour accompagner un tel dispositif ? Ne devrait-on pas préférer des actions de proximité et penser la décentralisation du pass pour le rendre plus opérant ?

Debut de section - PermalienPhoto de Eric Jeansannetas

Les festivals et le spectacle vivant se remettent difficilement de la crise sanitaire et pourraient connaitre une nouvelle crise, liée à la conjoncture particulière des jeux Olympiques et Paralympiques et à l'absence prévue de personnel de sécurité. J'espère que pendant l'été 2024, le rideau ne sera pas baissé sur l'ensemble des festivals. En attendant, tout le secteur est en émoi et les organisateurs préviennent qu'ils ne se remettraient pas d'une telle situation.

Le ministère procède-t-il à une étude d'impact ? Une compensation est-elle prévue en direction des organisateurs de spectacles ? Ces manifestations seront aussi une vitrine de la France lors des Jeux Olympiques et Paralympiques et un territoire vidé de l'ensemble de ses animations musicales et festives de l'été représenterait une aberration.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

En ce qui concerne le pass culture, je partage les points de vigilance soulevés par Sylvie Robert. Je suis convaincu qu'il s'agit d'un formidable dispositif d'éveil culturel, qui a eu du mal à monter en puissance en raison des confinements et de la crise sanitaire. À ce titre, nous mènerons, Vincent Éblé et moi, une mission de contrôle en début d'année, qui nous permettra d'affiner le suivi du dispositif.

De plus, j'ajoute un autre point de vigilance s'agissant des jeunes qui vivent dans les quartiers difficiles et les zones rurales. Nous le savons, ces derniers subissent une double peine : l'absence de transport et d'offre culturelle. À ce titre, il faudrait réfléchir aussi à la possibilité de le coupler avec une carte transport par exemple.

Pour répondre à Michel Canévet, je parlerais plutôt de complémentarité avec des dispositifs pouvant être mis en place par des collectivités locales, des départements, des agglomérations ou des petites communes, avant de chercher à déconcentrer le dispositif. Celui-ci est enfin monté en puissance et cette année d'observation sera importante, pour savoir si les objectifs d'éveil culturel auprès du plus grand nombre possible de jeunes sur le plus de territoires possibles seront atteints.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

S'agissant du patrimoine, la question du déséquilibre géographique n'est pas nouvelle. De plus, il faut bien reconnaître que, parmi les monuments très coûteux appartenant à l'État, un certain nombre se trouvent à Paris. À titre d'exemple, les coûts de restauration du Grand Palais ont beaucoup fait gloser dans la presse, mais quand un monument de cette importance nécessite de lourds travaux d'investissement, la mobilisation des crédits devient nécessaire pour assumer ces charges, même si un examen attentif du programme et des modalités de restauration doit être conduit afin de ne pas être dans l'excès.

Les crédits pour les collectivités sont stables et, depuis sa création, le fonds incitatif et partenarial a même permis de soutenir 576 opérations dans les régions. Il sera doté de 2 millions d'euros supplémentaires en 2023. Il faudra cependant nous montrer vigilants quant au risque que des fonds en provenance notamment du Loto du patrimoine ne servent en réalité qu'à compenser une baisse des crédits déconcentrés.

En ce qui concerne Notre-Dame de Paris, nous sommes rassurés par le montant des dons, suffisant pour couvrir les charges. Cependant, financer entièrement par des dons une opération de restauration qui relève d'une compétence directe de l'État peut poser un problème philosophique, d'autant que l'État devrait percevoir environ 140 millions d'euros de recettes de TVA sur le coût des travaux financés par les contributions volontaires des donateurs. Ainsi, non seulement l'opération ne lui coute rien, mais elle lui rapporte. Pourtant, en 2019, le ministre de la culture de l'époque, Franck Riester, s'était engagé devant le Sénat à ce que l'établissement public en charge de superviser les travaux ne soit pas financé par les crédits des donateurs. Or l'État ne finance par un centime du fonctionnement de celui-ci.

J'en viens aux opérateurs et à la question de l'emploi. Globalement, nos interlocuteurs, parmi lesquels ceux de la Philharmonie de Paris, ont fait part de leurs difficultés à recouvrer le niveau d'emploi post crise, en raison du défaut de mobilisation des professionnels, singulièrement dans les segments couverts par les intermittents du spectacle. En effet, nombre de techniciens qui s'étaient détournés de leur métier d'origine en raison de la crise n'y reviennent pas. On observe donc une pénurie d'opérateurs dans tous les métiers et une vraie difficulté pour les opérateurs à couvrir leurs besoins en la matière.

Pour répondre à Éric Jeansannetas, l'aide de 10 millions d'euros créée pendant la crise sanitaire pour les festivals se voit pérennisée, ce qui semble rassurant tant que le retour des publics ne s'avère pas certain. Nous constatons pour ces publics une différenciation sensible selon les établissements et leur typologie. Ainsi, les sites patrimoniaux, monuments et musées ont pour l'essentiel retrouvé leurs volumes. Cependant, la situation est différente pour le secteur de la création, des grandes manifestations et du spectacle vivant. Là aussi, les difficultés sont variables en fonction du type d'offres et de la présence ou non de publics internationaux. Toutefois, de manière générale, nous devrions revenir rapidement à une situation proche de la normale.

Enfin, la redevance d'archéologie préventive finance les phases de diagnostic, qui sont très bien prises en charge et sont confiées à l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap). En revanche, lorsqu'elle s'avère nécessaire, la phase de fouilles n'est pas financée, ce qui peut constituer une difficulté pour certains opérateurs.

Notre avis sur les crédits de la mission est favorable.

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Culture ».

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 41 quater (nouveau)

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Ce nouvel article et le suivant ont été ajoutés par l'Assemblée nationale. Ils prévoient la préparation de rapports sur le pass culture et les territoires ultramarins.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

Notre tradition étant de ne pas nous montrer favorables aux rapports, nous proposons deux amendements de suppression.

L'amendement n° 1 est adopté.

La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter l'article 41 quater.

Article 41 quinquies (nouveau)

L'amendement n° 2 est adopté.

La commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter l'article 41 quinquies.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le PLF prévoit 705 millions d'euros en CP au titre de la mission « Médias, Livre et industries culturelles », soit une progression de 4 %. Sur la seule partie presse et médias, financée à hauteur de 371 millions d'euros en CP, la hausse est d'environ 6 %. Le secteur semble donc plutôt favorisé. J'aurai toutefois quelques commentaires.

D'abord, un mot sur l'Agence France-Presse (AFP), dont la situation semble se régulariser. En effet, l'Agence obtient des ressources relativement importantes pour les vidéos et les équilibres se mettent en place.

Ensuite, en ce qui concerne les aides à la presse, qui représentent 197 millions d'euros, j'observe une absence de volonté de changement, alors qu'on évoque régulièrement une réforme ambitieuse et qu'on nous explique qu'il faut modifier le système, dans une période où la presse papier est en difficulté. À titre d'exemple, l'aide pour le transport postal reste inchangée, ce qui parait absurde et pose question quant à l'empreinte carbone.

J'observe enfin que certains ne réussissent à survivre que grâce à ce système d'aide et notamment via les aides consacrées au pluralisme.

Cette question est devenue un tabou et, depuis des décennies, ces aides sont considérées comme une nécessité absolue. J'ajoute que certains hebdomadaires ou magazines n'en reçoivent pas alors qu'ils ne paraissent pas moins éligibles que d'autres... Ainsi, le budget reste globalement correct mais les réformes et les aides aux mutations de la presse demeurent très insuffisantes. On continue de croire que le journal papier représente la presse quand bien même nombre d'organes connaissent de graves difficultés parce qu'ils n'ont pas abordé la révolution numérique à temps.

De la même manière, il faudrait conduire une analyse poussée des crédits dédiés à l'expression radiophonique. Tout cela manque de modernité, de vigueur et de réforme et on ne parvient pas à sortir du même système d'aide, l'État s'étant transformé en une sorte d'immense guichet.

En ce qui concerne le programme « Livre et industrie culturelle », l'action « Livre et lecture » représente 304 millions d'euros en AE. Cependant, je rappelle que nous n'avons pas de vision globale des crédits dédiés à la lecture, qui sont répartis sur plusieurs programmes budgétaires

Globalement, les bibliothèques considèrent qu'elles sont revenues à un meilleur équilibre que pendant les années de confinement, en termes de fréquentation et d'équipement.

Cependant, j'avais déjà signalé le problème de la BnF, qui s'aggrave. En effet, plus des deux tiers des montants dédiés à l'action « Livre et lecture », soit 232 millions d'euros, financent la BnF. Il s'agit bien sûr d'un monument en soi, ce qui coûte cher. Ainsi, des travaux nécessaires et considérables de réaménagement et de modernisation sont déjà engagés. À ce titre, nous avons reçu ses responsables, qui cherchent à trouver des mécènes et des crédits hors budget de l'État, ce qui semble très difficile. Afin de rationaliser les dépenses de personnel, a également été mis en place un nouveau système de lecture offrant moins de possibilités d'obtenir rapidement les ouvrages, alors que la BnF était l'exemple type de la grande bibliothèque où les chercheurs ont accès à tous les documents. Si cet équipement reste l'un des meilleurs, il doit aujourd'hui être complété par la construction d'un nouveau pôle de conservation des collections, qui sera situé à Amiens, puisqu'on ne parvient plus à conserver la totalité des documents. La BnF est bien gérée mais ses responsables considèrent que les prévisions faites lors de sa création ont été sous estimées. En effet, chacun prévoyait que tout serait rapidement numérisé, qu'il y aurait beaucoup moins de livres, de journaux ou d'archives papier, mais ce n'est pas le cas. La BnF fait donc face à de vrais défis mais l'on peut comprendre que les autres équipements dédis à la lecture, notamment en province, ne soient pas satisfaits de cette répartition des fonds.

J'en viens au Centre national musique (CNM), dont les crédits s'élèvent à 28 millions d'euros. Le centre doit bénéficier des ressources issues de la vente des billets mais les publics reviennent moins qu'on ne l'imaginait. Les responsables du Centre prévoient une impasse de financement de 10 millions d'euros en 2023 mais pensent pouvoir faire face en ayant recours à des redéploiements de crédits budgétaires. Cependant, à partir de 2024, ils ne pourront plus s'en sortir et demandent donc une réforme. Nous les reverrons en 2023.

Quant au Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), il perçoit 710 millions d'euros grâce à la taxe sur les plateformes numériques. Mais la dépense fiscale explose et devrait atteindre 587 millions d'euros en 2023. Je note que dans le cadre du projet France 2030, 350 millions d'euros seront dédiés vers le cinéma, ces crédits étant appelés à être complétés par une intervention des collectivités territoriales et du secteur privé, afin de parvenir à un financement total de 2 milliards d'euros, ce qui représente une somme considérable. Je finirai en donnant l'exemple des aides attribués à la réalisation de la série Lupin ; est-ce à l'argent public de financer une série diffusée sur Netflix ?

Pour conclure sur cette mission, je propose un vote positif sur ces crédits.

J'en viens à présent à l'audiovisuel public et souhaiterais commencer par rappeler qu'en juin 2022, nous avons présenté avec M. Hugonet un rapport d'information consacré à sa réforme.

Pendant la campagne présidentielle, le candidat Président de la République a annoncé la suppression de la contribution à l'audiovisuel public. Nous en avons pris acte mais il faut à présent trouver des solutions pour définir un nouveau financement. Les présidents de chaines s'étaient dits prêts à l'accepter si on leur garantit constitutionnellement leurs crédits, ce qui n'est évidemment pas possible.

Le Gouvernement aura recours, dans un premier temps, à une fraction du produit de la TVA et la dotation accordée aux sociétés de l'audiovisuel public passera de 3,7 milliards d'euros à 3,8 milliards d'euros cette année, ce qui représente une augmentation de 3 %, qui prend en compte l'inflation.

Depuis 2017, une réforme de l'audiovisuel public doit avoir lieu. Il s'agirait dans un premier temps de délimiter le périmètre, avant de débattre des missions du service public et de les définir. Alors, nous pourrions évaluer la masse financière nécessaire. Pourtant, rien n'a été fait et la ministre annonce des consultations qui doivent se tenir jusqu'en avril... On nous parle d'un texte depuis cinq ans et Franck Riester en avait porté un, qu'il avait présenté à l'Assemblée nationale mais pas au Sénat. Nous avons également demandé à la ministre si des propositions seraient faites lors du débat budgétaire mais ce ne sera pas le cas, leur objectif demeurant pour l'instant de stabiliser ce budget à hauteur de 3,8 milliards d'euros. Ainsi, les contrats d'objectifs et de moyens (COM) qui seront conclus dans les semaines seront élaborés sans directive du Gouvernement quant à ce que devraient être l'audiovisuel public et sa réforme.

Si Radio France comme France Médias Monde ont plutôt bien conduit leurs réformes, les navires amiraux tels que France Télévisions considèrent qu'il faut les laisser décider seuls des réformes à mener. J'évoquerai à titre d'exemple les filiales créées par France Télévisions sur le cinéma, l'une au sein de France 2 et l'autre au sein de France 3, chacune comptant quelques agents. La simple fusion de ces deux entités semble compliquée et il faudrait leur laisser deux à trois ans pour y parvenir.

Je m'avoue assez désabusé sur ces questions de réforme annoncée qui n'a jamais lieu. Je me sens donc partagé quant à l'avis à donner sur les crédits du compte de concours financiers (CCF). D'un côté, il faut bien que l'audiovisuel public vive et je serais donc tenté de me dire favorable, à condition que l'État s'engage à réformer. D'un autre côté, je serais tenté d'exercer une certaine pression. Pour résumer, je ne suis pas enthousiaste et ne formulerai pas un oui clair et massif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Raymond Hugonet

Le budget 2023 est forcément un budget de statu quo et de transition puisque le Président de la République a dynamité la contribution à l'audiovisuel public. Je souligne toutefois que je n'ai vu personne, ni à Paris ni sur le territoire national, manifester pour payer sa redevance de 138 euros...

Demain, je proposerai à la commission de la culture un avis favorable sur les crédits du CCF. D'abord, parce qu'il n'y a pas eu de remise en cause de l'existence de ce CCF, même si la source de financement a changé. Le problème qui se pose relève d'une question de technique et de législation fiscale. En effet, des entreprises qui n'étaient pas assujetties à la TVA le sont maintenant et pour d'autres il s'agit du contraire.

De plus, la taxe sur les salaires implique une charge très importante, qui représente 42,6 millions d'euros pour toutes les structures de l'audiovisuel public. Enfin, la question de la compensation de l'inflation et du niveau de cette compensation se pose, mais cela touche l'ensemble du budget 2023.

En ce qui concerne la partie des taxes sur les salaires et la TVA, des équilibres ont été trouvés et le Gouvernement s'est montré assez magnanime ; le compte y est. En revanche, l'évaluation de l'inflation semble insuffisante. A ce bémol près, il s'agit d'un budget qui s'inscrit dans la continuité, malgré la légère augmentation de 3 %, qui s'explique en raison des problèmes fiscaux posés.

Les cinq structures de l'audiovisuel public se retrouvent dans le vide, puisqu'on leur demande une projection alors qu'elles n'ont aucune visibilité en l'absence de réforme. Ainsi, nous prévoyons qu'il y aura début décembre un avenant aux COM pour 2023, qui là aussi relève du bricolage. Cependant, nous aurons d'autres occasions de mettre la pression sur le Gouvernement pour qu'une réforme voie le jour. Si l'année prochaine il n'y a toujours pas de réforme, nous préconiserons un avis différent mais il serait mal venu aujourd'hui, alors que ces structures sont dans l'incertitude, que le Sénat envoie un signe négatif. De plus, le rapport que nous avons remis conjointement au moins de juin a acté certaines choses, notamment le rapprochement entre les structures de l'audiovisuel public. Le moment où chacun aura compris l'importance de ces sujets se rapproche.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je ne comprends pas que le Gouvernement ne veuille pas faire de réforme. En effet, nous ne pourrons avoir recours au financement par les parts de TVA que jusqu'en 2024. Il faut donc que quelque chose advienne !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Je voudrais évoquer la question du financement du cinéma français, qui semble relativement préoccupante. En effet, la dépense fiscale est élevée et différents acteurs tels que les collectivités ou le secteur privé doivent participer. Il faudrait s'interroger sur ce modèle au regard des évolutions du cinéma.

Par ailleurs, je voulais poser une question à laquelle Roger Karoutchi a répondu, sur les perspectives de réforme de l'audiovisuel public. Celle-ci est donc remise à une date butoir de 2025 et je suis assez inquiet. De plus, la manière dont il a été mis fin à la redevance audiovisuelle et aux engagements pris, y compris devant la représentation nationale, ne semble pas très convenable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Monsieur Karoutchi, vous évoquiez la révolution numérique de la presse et l'impact carbone de la distribution journaux. Dans votre esprit, faudrait-il supprimer totalement le support papier ? Cela serait à mon avis regrettable. D'abord parce que certains de nos concitoyens aiment l'utiliser. Par ailleurs, en Bretagne, les journaux sont récupérés par les écoles, qui collectent ainsi de l'argent, avant d'être transformés en ouate de cellulose, qui sert d'isolant thermique pour nos habitations. Je ne voudrais pas que cette filière économique soit mise en péril...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Ma question concerne la publicité sur France Télévisions. Normalement, après 20 heures, il ne devrait pas y en avoir. Cependant, après le journal télévisé, on assiste à quarante-cinq minutes de petits bouts de séquences entrecoupés par des parrainages publicitaires et cette plage s'étend de plus en plus. Comme cela est-il permis ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Bascher

Quel est le manque à gagner entrainé par l'absence de publicité sur les chaînes publiques ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

D'abord, en ce qui concerne la réforme de l'audiovisuel, je n'y crois plus. Rien ne sera fait et, comme en 2024 nous ne pourrons plus avoir recours à la TVA, nous bricolerons ! La réforme ne semble se profiler nulle part, ni dans les chaînes ni au Gouvernement. En effet, personne ne veut se poser la question du périmètre de l'audiovisuel public, car elle pourrait avoir des conséquences et remettre en cause les missions comme le nombre de chaînes.

Je ne suis pas favorable à la disparition du support papier. Toutefois, les jeunes n'achètent plus de journaux et lisent la presse sur leur téléphone. Mais les aides à la presse visent principalement la presse papier et très peu le numérique.

Sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, la publicité a été supprimée après 20 heures sur les chaînes publiques : l'objectif était que les programmes puissent commencer à 20 h 30. Mais aujourd'hui, ils commencent à 21h10 voire plus tard ! Comme la loi permet des parrainages publicitaires, les chaines enchaînent la diffusion de petits programmes courts parrainés par des annonceurs et les films ne commencent qu'après ; c'est pourquoi nous avons proposé avec Jean-Raymond Hugonet de supprimer tout parrainage publicitaire après 20 h 30. Le service public ne doit pas dépendre de l'audimat et donc de la publicité. Pour France Télévisions, les recettes publicitaires s'élèvent à 381 millions d'euros dont 97 millions d'euros au titre des parrainages ; pour Radio France, les recettes publicitaires s'élèvent à 60 millions, dont 6 millions au titre de parrainages, c'est considérable. Si nous avions procédé à une réforme de l'audiovisuel public en redéfinissant le périmètre des missions, nous n'en serions pas là.

J'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles » et un avis de sagesse positive pour l'adoption des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles ».

La commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

La réunion est close à 18 h 55.