Séance en hémicycle du 28 octobre 2014 à 22h15

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (projet n° 6, texte de la commission n° 43, rapport n° 42).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord d’excuser mon retard, consécutif aux événements de la journée. N’y voyez pas un geste de désinvolture de ma part à l’égard du Sénat : vous savez la passion que j’ai pour les débats de la Haute Assemblée, et vous connaissez mon désir d’y être toujours présent et, bien entendu, ponctuel.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

M. Bernard Cazeneuve, ministre. J’avais initialement prévu de vous présenter la réforme des régions, conformément à l’intervention qui m’avait – comme toujours – été très méticuleusement préparée par les membres de mon cabinet. Toutefois, pour avoir participé au débat de cet après-midi et pour avoir été sensible à la spontanéité et au talent d’un certain nombre d’intervenants

Sourires.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Le premier point sur lequel je veux apporter des réponses concerne la cohérence globale de ce que nous faisons. Il est toujours difficile d’engager une réforme territoriale, parce que, comme l’ont exprimé l’ensemble des orateurs qui se sont succédé cet après-midi, vouloir réformer les territoires, c’est toucher à des singularités. C’est toucher à la diversité de la France et, parfois, à des habitudes ancrées et à des fonctionnements établis.

Il faut toujours une part d’audace, une prise de risque pour mettre en œuvre une réforme des territoires dans la République qui est la nôtre. C’est à ce point vrai que, dans notre pays, où l’on a beaucoup parlé de la réforme des territoires, on a finalement peu réformé ces derniers. De nombreux rapports parlementaires ont été rédigés sans qu’il ait forcément été donné suite aux ambitions qu’ils portaient.

À cet égard, le Gouvernement a souhaité que la présente réforme territoriale ne se réduise pas à des projets que l’on verbalise. Il a souhaité que l’on mette l’ouvrage sur le métier, que l’on engage des actions. Par conséquent, il a voulu prendre sa part de risque.

Pour ce qui concerne la cohérence de la réforme, il faut considérer un ensemble de textes législatifs, dont certains ont d'ores et déjà été examinés et votés par le Parlement et dont les autres sont appelés à l’être : articulés les uns aux autres, ils donnent à la réforme territoriale sa cohérence et sa force.

D'abord, nous avons voulu doter notre pays de métropoles puissantes, portant des politiques ambitieuses qui leur permettent de rayonner en Europe. En France, beaucoup de nos grandes villes, de nos agglomérations avaient besoin du territoire pertinent pour leurs ambitions intercommunales, mais également pour leurs ambitions économiques et de développement. C’est la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, adoptée voilà quelques mois par la représentation nationale, qui a donné à notre pays la possibilité de se doter de métropoles. Au reste, un certain nombre se constituent et engagent d'ores et déjà des réformes positives.

Je pense à la métropole de Lyon, dont certains représentants sont présents dans cet hémicycle. Je salue l’esprit d’imagination et d’initiative les ayant conduits à fusionner les conseils généraux avec la métropole lyonnaise constituée, contribuant ainsi à la modernisation d’un territoire qui compte en France et qui, sous l’impulsion des sénateurs Gérard Collomb, maire de Lyon, et Michel Mercier, alors président du conseil général du Rhône, a démontré sa capacité à porter de grandes politiques ambitieuses en matière de développement des transports urbains, des pôles de compétitivité, des énergies de demain, ou encore des grands pôles universitaires.

Dans ce contexte, nul ne conteste l’intérêt de la loi précitée ni les opportunités qu’elle offre.

Nous avons également décidé de créer de grandes régions – c’est l’objet du texte qui vous est présenté aujourd'hui. Nous avons décidé de clarifier la répartition des compétences entre celles-ci et les départements et de permettre à des intercommunalités puissantes de se constituer, de manière à mailler le territoire – c’est l’objet du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Notre ambition est également d’organiser l’administration territoriale de l’État qui a perdu beaucoup d’emplois pour lui permettre de gagner en proximité et en efficacité, de monter en gamme et d’offrir aux territoires les services dont ils ont besoin et aux élus des collectivités territoriales les plus importantes le concours et le soutien dont ils peuvent ressentir la nécessité.

Je centrerai donc mon propos sur deux sujets : premièrement, la réforme des régions, en répondant à un certain nombre d’interrogations qui ont été évoquées et, deuxièmement, la réforme de l’administration territoriale de l’État, sur laquelle Bruno Retailleau, appelant à une réforme ambitieuse et à la définition d’un calendrier, a demandé des explications. Je veux, sur ces sujets, lui apporter les réponses qui permettront de nourrir notre débat.

D'abord, pour ce qui concerne la réforme des régions, nous partons du principe que les régions qui ont appris à collaborer entre elles depuis longtemps, en développant des pôles de compétitivité, de grandes politiques de transport ou en engageant des actions pour la transition énergétique, doivent, demain, pouvoir le faire plus facilement, en se regroupant. En effet, elles doivent pouvoir atteindre une taille critique qui leur permette de compter davantage en Europe, où les régions sont de véritables collectivités d’investissement, une taille de nature à créer les conditions de la compétitivité et de la croissance dans les territoires.

En moyenne, la population des régions françaises est légèrement supérieure à 2 millions d’habitants. Dans les autres pays européens, la taille critique des régions est plus significative : la population des provinces italiennes s’élève à un peu plus de 4 millions d’habitants et celle des Länder allemands à un peu plus de 5 millions d’habitants. Après la réforme que nous aurons menée à bien, les régions françaises compteront, en moyenne, un peu plus de 4 millions d’habitants. Par conséquent, en termes de taille, de masse critique, de capacité d’investissement, nous aurons rejoint les grandes régions européennes.

Cela dit, je veux insister sur le fait que la taille n’est pas tout. §

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Je vous le dis bien volontiers, pour avoir quelque expérience sur ce point ! Par conséquent, les régions que nous allons constituer doivent aussi avoir les moyens d’investir, de compter, de se développer.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Et, lorsque je regarde la carte des régions qui est soumise à la délibération de votre assemblée, je constate que toutes les régions compteront des métropoles et au moins quatre pôles de compétitivité, lesquels garantiront, demain, leur capacité à tenir le pari de la croissance, dans les domaines de l’innovation, du transfert de technologies, de l’investissement dans la recherche fondamentale. Cette réforme procède donc de la volonté de nous doter de régions plus fortes, de taille plus significative dans la compétition européenne et qui puissent porter des politiques publiques ambitieuses.

À l’issue des travaux du Sénat, il semble que la carte qui lui a été présentée par le Gouvernement – carte modifiée par l’Assemblée nationale lors des débats de l’été – ne lui agrée pas totalement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Lors de l’examen du texte en première lecture, j’ai beaucoup entendu dire dans cette enceinte qu’il existait une carte parfaite, que le Gouvernement n’avait pas choisie pour on ne sait quelles raisons obscures, dont le Sénat était le barycentre.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Depuis, j’ai pu constater, lors des débats qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale, qu’il y avait autant de cartes pertinentes que de parlementaires pour les défendre… En effet, la carte pertinente est fréquemment le résultat du croisement entre plusieurs préoccupations, généralement très nobles, mais très différentes selon les territoires où elles sont exprimées.

Ces considérations peuvent tenir aux équilibres politiques, qui intéressent toujours les parlementaires de façon extrêmement vive, quelle que soit leur sensibilité : on ne peut faire de la politique avec passion et désintérêt sans se préoccuper ne serait-ce qu’un tout petit peu de ce que sera le résultat électoral des évolutions institutionnelles préconisées.

D’autres éléments, qui tiennent à l’histoire et à l’identité des territoires, peuvent conduire certaines régions à ne pas souhaiter s’allier à d’autres, alors que d’autres régions désirent s’unir à elles.

Une dernière série de considérations tient au potentiel fiscal, à la richesse fiscale de régions qui, ayant force et capacité d’investissement, ne sont cependant pas certaines de pouvoir assurer le développement de régions avoisinantes, moins favorisées, avec lesquelles elles auront fusionné.

Ces différentes considérations, prégnantes en tous points du territoire, peuvent faire naître des conceptions elles-mêmes différentes de la carte idéale. Je me suis même demandé, à l’occasion de la première lecture du projet de loi au Sénat, si la Haute Assemblée, dans sa grande sagesse, n’avait pas jugé préférable, tant était ancrée la conviction selon laquelle il y avait autant de cartes possibles que de sénateurs, de ne pas tenter de dessiner de carte plutôt que de risquer de se perdre en la dessinant !

En définitive, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez décidé d’accoucher d’une carte, …

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

… et celle-ci diffère de la carte choisie par l’Assemblée nationale sur deux points. D’une part, vous ôtez l’Alsace de la grande région Est, pour des raisons que je respecte et qui méritent que nous revenions dessus à l’occasion de nos discussions à venir. D’autre part, vous avez souhaité disjoindre les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon.

Je sais par ailleurs que d’autres amendements, soulevant d’autres questions, seront soumis à notre examen. Il se pourrait ainsi qu’au terme de notre débat nous aboutissions à un nombre de régions équivalent, ou presque, à celui qui existait avant la présentation du projet de réforme !

Protestations sur certaines travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Bien entendu, ce n’est absolument pas ce que souhaite le Gouvernement !

Je voudrais m’arrêter un instant sur les deux modifications de la carte du Gouvernement qui ont été proposées. En effet, j’ai entendu certains parlementaires – Jacques Mézard s’est exprimé sur le sujet, ainsi que Bruno Retailleau et François Zocchetto – affirmer que quiconque s’intéressait au débat animé d’un esprit d’écoute ne pouvait sortir des discussions au Sénat que convaincu de la pertinence de la carte adoptée par la commission spéciale. Autrement dit, le débat n’était pour eux sincère que si nous abandonnions les positions qui étaient les nôtres pour adopter intégralement celles de la Haute Assemblée !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Je comprends qu’une telle position satisfasse la majorité constatée dans cet hémicycle, mais ce n’est pas la mienne, monsieur Retailleau !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

En effet, le débat n’a de véritable intérêt – au plan parlementaire comme au plan politique – que s’il conduit chacun, fort de ses convictions, à aller au bout de son raisonnement, tout en essayant, dans ce mouvement, de bâtir un compromis avec l’autre qui éventuellement ne pense pas comme lui.

S’agissant tout d’abord de l’Alsace, je comprends parfaitement les Alsaciens, attachés qu’ils sont à leur histoire et à leur identité.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Cette préoccupation, ancienne et profonde, a d’ailleurs conduit ceux de nos plus éminents historiens qui se sont intéressés de près à l’Alsace – je pense notamment à Jean-Marie Mayeur – à la définir comme une « région mémoire ». Il faut y voir le signe que, pour les Alsaciens, la question de l’identité, de l’histoire, des racines, a toujours prévalu, amenant l’État central à entretenir avec le territoire des relations toujours subtiles, mais qui ont dû être équilibrées.

Figurez-vous qu’en 1701, de retour d’un voyage en Alsace, le contrôleur général des finances du Roi s’était senti obligé d’écrire à l’intendant pour le mettre en garde, en utilisant cette formule : « Il ne faut point toucher aux usages de l’Alsace ». Plusieurs siècles après, une préoccupation similaire semble s’exprimer autour du même sujet, à savoir l’identité alsacienne et la peur, parfaitement compréhensible, de voir l’Alsace, une fois intégrée à une grande région, perdre une partie de son identité et de ses atouts.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

C’est en tout cas, tel que vos collègues de l’Assemblée nationale l’ont exprimé, le dernier témoignage alsacien dont je dispose. Mais, bien évidemment, je serai très heureux de pouvoir en entendre d’autres !

Cet après-midi encore, des députés de l’Alsace évoquaient devant moi l’identité, les racines de ce territoire et, dans le même temps, l’existence d’un projet territorial visant à créer une collectivité unique et susceptible, ce faisant, de permettre une synthèse.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Nous en débattrons dans les heures à venir, mais, dès lors que l’on est attaché à l’identité et à l’histoire de l’Alsace, la préoccupation centrale, me semble-t-il, doit être celle de Strasbourg et de son rôle de capitale européenne qu’il ne faudrait pas altérer…

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

M. Bernard Cazeneuve, ministre. … en donnant le sentiment que, si nous considérons Strasbourg digne d’être capitale européenne, nous ne lui faisons pas suffisamment confiance pour en faire la capitale d’une grande région.

Applaudissementssur plusieurs travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Certains ici, avec qui j’ai eu l’occasion de m’entretenir et de travailler sur ses sujets au cours des dernières années – je pense à Fabienne Keller, à votre ancien collègue Roland Ries, ou encore à Jacques Bigot, que salue ici – savent à quel point les attaques contre Strasbourg sont nombreuses. Elles émanent de parlementaires européens ou des institutions mêmes de l’Union européenne, les uns et les autres ayant tendance à considérer que l’existence de deux capitales, Bruxelles et Strasbourg, est extraordinairement contraignante pour les parlementaires européens et, par conséquent, que le rôle de Strasbourg doit être reconsidéré.

Des démarches ont même été engagées devant un certain nombre de cours de l’Union européenne, et il a fallu la mobilisation des gouvernements successifs pour qu’elles n’aboutissent pas. Je me souviens également des efforts que j’ai déployés, en qualité de ministre délégué aux affaires européennes, notamment avec le président de région Philippe Richert, afin de permettre le déblocage de moyens depuis longtemps attendus et nécessaires à Strasbourg pour qu’elle affirme sa vocation de capitale européenne.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis convaincu que Strasbourg ne serait pas moins forte dans l’affirmation de son rôle européen si elle devenait la capitale d’une grande région qui puisse servir en quelque sorte de pont avec les Länder allemands et contribuer ainsi à la constitution d’un véritable axe européen, dont elle serait le pivot. Strasbourg capitale de région serait confortée dans son statut de capitale de l’Union européenne.

Mais nous aurons ce débat, mesdames, messieurs les sénateurs. Nous évoquerons tous ces sujets ensemble, dans le respect mutuel de nos positions respectives. Je suis effectivement très loin de considérer que les positions défendues par les parlementaires alsaciens doivent être balayées d’un revers de main.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Il nous faudra donc aller au bout de l’échange.

S’agissant maintenant de Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, songez, mesdames, messieurs les sénateurs, que ces deux régions rassemblées auraient un poids démographique légèrement supérieur à 4, 5 millions d’habitants et seraient fortes de deux grandes métropoles et dotées d’une capacité à développer leurs relations avec la Catalogne. Cela permettrait d’affirmer la vocation méditerranéenne de l’ensemble, tout en articulant mieux les nombreux pôles de compétitivité créés dans chacune des régions actuelles et ayant déjà appris à travailler les uns avec les autres.

Ce sont là autant de considérations économiques qui nous poussent à ne pas suivre le Sénat dans sa proposition. Mais, sur ce sujet également, nous souhaitons que la discussion ait lieu.

Le fait que le Gouvernement dispose d’une carte cohérente à laquelle il tient précisément en raison de cette cohérence ne signifie pas qu’il n’est pas désireux de débattre des propositions de la Haute Assemblée. Nous tenons simplement à mener le débat à son terme, dans le respect des positions de chacun.

J’en viens à une autre modification apportée, celle qui a trait à la représentation des petits départements dans les grandes régions.

Ce sujet, je le sais, est très cher au sénateur Jacques Mézard, celui-ci ayant présenté, à l’occasion de la première lecture du texte, un amendement visant à porter à cinq le nombre minimum de conseillers régionaux des départements de petite taille inclus dans de grandes régions.

Le Gouvernement comprend parfaitement cette préoccupation et la juge tout à fait légitime. Notre seule et unique réserve, face à une telle évolution, est de nature constitutionnelle. J’ai déjà eu l’occasion de l’exposer, toujours en première lecture. La Constitution n’ayant pas été modifiée pendant l’été, notre analyse à propos de cette difficulté constitutionnelle n’a pas fondamentalement changé non plus et je ne peux, par souci d’honnêteté et de rigueur intellectuelle, que renouveler cette réserve aujourd'hui.

Il est un troisième sujet sur lequel vous avez fait évoluer le projet de loi : le droit d’option.

Le texte adopté par l’Assemblée nationale exigeait une majorité des trois cinquièmes pour que chacune des collectivités concernées par le droit d’option approuve le détachement d’un département désireux de quitter une région fusionnée. Du fait de l’adoption d’un amendement dans le cadre des travaux de la commission spéciale, le texte prévoit maintenant une majorité qualifiée inversée au niveau de la région de départ : celle-ci doit donc se prononcer à la majorité des trois cinquièmes, non pas pour accepter le départ, mais pour le refuser.

Un autre amendement, présenté par le groupe socialiste, vise à instaurer un vote à la majorité simple dans toutes les collectivités locales concernées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le droit d’option ne doit pas créer un droit à l’instabilité territoriale. Il doit néanmoins offrir une certaine souplesse aux territoires désireux de s’adapter. C’est pourquoi nous regardons avec un grand intérêt l’amendement présenté par le groupe socialiste.

Voilà pour les principales modifications apportées au projet de loi. D’autres sont évidemment proposées, et nous en débattrons tout au long de l’examen des amendements. Mais je ne souhaite pas être trop long et m’arrêterai donc là sur ce texte relatif aux régions.

J’en viens maintenant à la réforme de l’administration territoriale de l’État, car, certaines interrogations ayant été formulées – comme toujours avec talent – par Bruno Retailleau, je tiens à y répondre de manière précise.

Tout d’abord, monsieur Retailleau, vous avez évoqué une aporie de l’administration territoriale de l’État, qui devrait nous conduire à enclencher une réforme, sauf à voir finalement disparaître cette même administration territoriale, l’appauvrissement venant, selon vous, ajouter ses conséquences à celles d’une moindre proximité.

Je veux simplement vous rappeler quelques faits.

Effectivement, l’administration territoriale de l’État a beaucoup perdu de sa force au cours des dernières années. Entre 2009 et 2012, plus de 2 500 emplois ont été supprimés en son sein. Si je considère les effectifs perdus annuellement au cours du précédent quinquennat, leur niveau s’établissait en moyenne – ces chiffres peuvent être vérifiés par chacun d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs – à 600 suppressions nettes d’emplois par an dans l’administration territoriale de l’État.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Le budget que j’ai présenté, hier, à l’Assemblée nationale, s’agissant de l’ATE, acte une diminution de 180 emplois pour cette année, objectif qui pourra être atteint grâce à la mutualisation que nous allons engager au travers des plateformes interdépartementales de services publics. Ces dernières, à l’instar des plateformes interdépartementales de naturalisation qui ont été créées dans un certain nombre de régions, permettront de réduire les effectifs sans affecter le service public, c'est-à-dire sans remettre en cause des services publics de front office nécessaires à la qualité de vie et à la proximité entre habitants et administration.

La déflation d’effectif est donc réduite de manière très importante et nous pourrons encore optimiser tout cela si la dynamique de la réforme de l’administration territoriale de l’État se met en place.

Je tenais également à signaler que la révision générale des politiques publiques, la RGPP, et la réorganisation de l’administration territoriale, la REAT, ont été menées sans aucune revue des missions de l’administration de l’État et, comme nous avons déjà eu l’occasion d’en parler ensemble, sans véritable acte de déconcentration.

Nous souhaitons, nous, réaliser cette revue et poser cet acte de déconcentration. Nous sommes donc engagés, avec les secrétaires généraux des différents ministères, en particulier celui du ministère de l’intérieur, ainsi que le secrétaire général du Gouvernement, lequel joue un rôle particulier en matière de gestion de l’administration territoriale de l’État depuis la création des directions départementales interministérielles, ou DDI, dans un travail devant nous conduire jusqu’à la fin de l’année 2014.

Il s’agit d’un travail extrêmement méticuleux, consistant, mission par mission, ministère par ministère, à identifier ce qui doit relever respectivement de l’administration centrale de l’État, de l’administration déconcentrée de l’État, d’un mouvement de déconcentration de la première vers la seconde ou encore d’autres structures, en raison de doublons ou d’enchevêtrements pouvant exister entre l’État et les collectivités locales. Dans ce cadre, l’État pourrait reprendre certaines missions et les collectivités locales en exercer d’autres à leur tour.

Cette revue des missions est en cours. Elle conduira, d’ici à la fin de l’année, à clarifier ce paysage et à mettre en place une véritable charte de la déconcentration. Cette charte donnera aux préfets des pouvoirs nouveaux. M. Retailleau, lors du débat de cet après-midi, laissait entendre que M. le Premier ministre voulait ainsi « recentraliser ». Il n’en est pas question ! D’ailleurs, vous ne trouverez pas un alinéa dans les textes soumis à la délibération de votre assemblée qui procède d’un transfert de compétences même partiel des collectivités locales vers l'État, ce qui traduirait effectivement une volonté de recentralisation.

M. Gérard Longuet proteste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Dès lors que la décentralisation au profit des collectivités locales a été actée par un ensemble de lois, la recentralisation ne pourrait se faire que par de nouveaux actes législatifs procédant de ce transfert de compétences. Or vous ne trouverez pas un alinéa dans le projet de loi présenté par le Gouvernement qui témoigne de cette ambition.

Ce que nous voulons faire, en revanche – cela avait d'ailleurs été souhaité par la précédente majorité, qui n’avait pas pu aboutir pour des raisons sans doute explicables -, c’est donner aux préfets, à compétences identiques pour l’État, quitte à ce que ces compétences soient redistribuées entre l’administration centrale et l’administration déconcentrée, davantage de pouvoir interministériel dans le domaine des nominations et dans celui du budget, pour avoir une gestion de l’administration déconcentrée de l’État au plus près des territoires, encore une fois, à périmètre des compétences de l’État inchangé.

En résumé, je veux dire à toutes les sénatrices et à tous les sénateurs qui se sont légitimement interrogés sur ces questions, et de façon approfondie, que, premièrement, il y aura une revue des missions ; deuxièmement, il y aura un acte de déconcentration ; troisièmement, il n’y aura pas de recentralisation ; quatrièmement, les compétences nouvelles que nous donnerons aux préfets pour les dimensions interministérielle et budgétaire le seront dans le strict respect de la loi organique relative aux lois de finances, dans le cadre du périmètre des compétences d’ores et déjà exercées par l’État.

Je voulais donner ces précisions au Sénat parce que vous avez eu raison, sur toutes les travées, de vous poser la question de l’indispensable cohérence entre la réforme de l’État et la réforme territoriale que nous engageons. Sans cette cohérence, nous passerons à côté de l’objectif et donc de la réussite de cette réforme. Il ne peut pas y avoir de réforme ambitieuse des territoires sans une réforme ambitieuse de l’administration territoriale de l’État. Il ne peut pas y avoir de réforme ambitieuse de l’État sans une réflexion allant jusqu’à la définition des implantations des administrations de l’État dans le cadre infradépartemental.

Là aussi, pour ce qui concerne la carte des maisons de l’État, celle des sous-préfectures, l’idée est de confier un mandat de gestion aux préfets des régions de manière à faire en sorte que, en très étroite liaison avec les présidents des collectivités locales et les parlementaires, mais aussi avec les organisations syndicales, nous définissions la cartographie des services publics dont notre pays a besoin pour demain.

Voilà quel est l’esprit de la réforme. Voilà ce que nous voulons faire. Je ressens, à travers les interventions de cet après-midi, la volonté du Sénat que le débat aille à son terme, qu’il permette d’affronter toutes les questions, d’épuiser tous les sujets en allant au fond des choses. Vous pouvez compter sur ma présence, bien sûr, mais aussi et surtout sur ma détermination à faire en sorte que les débats se passent dans un bon esprit, dans le respect des positions de chacun et avec la volonté de construire autant que faire se pourra des compromis utiles.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Madame la présidente, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je tiens à signaler que ma présence à cette tribune est un peu singulière puisque je n’étais pas le rapporteur de ce projet de loi en première lecture. À la faveur des élections qui viennent de se dérouler au Sénat, la majorité ayant changé et notre collègue Michel Delebarre ayant décidé de passer la main, la commission spéciale m’a fait l’honneur de me désigner comme rapporteur.

L’exercice est à la fois sympathique et difficile. En effet, en deuxième lecture, nous sommes tenus par la règle particulière dite « de l’entonnoir », ce qui nous interdit à ce stade d’aborder les modifications importantes qui auraient dû être décidées dès la première lecture.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous sommes donc en mesure d’apporter des modifications au texte voté par l’Assemblée nationale, sans toutefois pouvoir remettre en cause son intégralité.

Je voudrais rappeler la philosophie qui est à l’origine de ce texte, à savoir la volonté de regrouper les régions et donc d’en réduire le nombre - pourquoi pas, nous n’y sommes pas hostiles -, mais aussi de supprimer les départements et de mettre en place de grandes intercommunalités susceptibles de venir se substituer à ces derniers.

C’est dans cet esprit que le projet de loi nous a été soumis en première lecture. La modification des échéances électorales traduisait d'ailleurs très clairement la volonté de supprimer les départements, en reportant l’élection départementale de mars prochain à la fin de l’année 2015, concomitamment à celle des régions.

Le Sénat a été saisi en première lecture selon un calendrier très contraint, puisque le dépôt du projet de loi sur le bureau du Sénat n’a précédé que de quatorze jours l’ouverture des discussions en séance publique. Un tel délai n’a pas permis à notre assemblée, en tout cas à la minorité à laquelle j’appartenais à l’époque, mais également à d’autres, de procéder au débat approfondi et serein nécessaire aux enjeux portés par cette réforme.

Dans ce délai très court, même si, au bout du compte, l’institution sénatoriale n’a pas voté de texte, la commission spéciale a malgré tout travaillé, ce qui a permis un certain nombre d’avancées.

Nous n’avons pas voté de texte en première lecture parce que nous n’étions pas d’accord avec la philosophie de départ. Nous suivions plutôt la voie choisie par nos collègues Raffarin et Krattinger, qui travaillaient à la réduction du nombre de régions, mais en s’appuyant sur les départements - c’était la grande différence.

Le texte a ensuite été transmis à l’Assemblée nationale, qui a apporté des modifications au texte initial du Gouvernement. L’Assemblée nationale a ainsi décidé de modifier la carte des régions, en regroupant Poitou-Charentes, Limousin et Aquitaine, en assurant le rattachement de la Picardie au Nord - Pas-de-Calais et en regroupant Champagne-Ardenne, Alsace et Lorraine.

L’Assemblée nationale a en outre introduit des modifications de moindre importance à l’article 2.

Elle a surtout imposé des limites au regroupement volontaire des collectivités territoriales, singulièrement à l’article 3, puisqu’elle a décidé l’abrogation, à compter du 1er janvier 2016, date d’entrée en vigueur de la nouvelle carte régionale, des dispositions relatives au regroupement des départements.

Elle a par ailleurs introduit une majorité qualifiée des trois cinquièmes des suffrages exprimés, précédemment évoquée, pour l’adoption des délibérations concordantes dans le cadre du droit d’option d’un département et pour la fusion de deux régions.

Serait également fixée par la loi, et non plus par décret en Conseil d’État, toute modification des limites régionales, le recours à ces dispositions étant limité jusqu’au 1er mars 2019, afin de stabiliser les règles électorales au moins un an avant l’organisation des fameuses élections régionales de 2020 qui devaient consacrer la disparition du département.

Le projet de loi ainsi modifié est revenu devant le Sénat en deuxième lecture. La commission spéciale l’a amendé sur plusieurs points. Elle a d’abord réaffirmé, à l’article 1er A, la philosophie de l’actuelle majorité sénatoriale concernant la vocation des régions, des départements et de nos communes, tout en rappelant le rôle singulier des intercommunalités.

La commission spéciale a évidemment modifié, à l’article 1er, la carte des régions votée à l’Assemblée nationale, qui est au cœur de nos débats.

Nous avons annulé le regroupement de l’Alsace avec les régions Champagne-Ardenne et Lorraine.

La commission a été animée par la volonté de permettre à nos collègues alsaciens, engagés de longue date dans un projet de collectivité unique, d’aboutir dans leur démarche.

Mme Catherine Troendlé acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission spéciale a également décidé de revenir à la proposition qu’elle avait formulée au Sénat en première lecture, à savoir que les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon restent seules.

À l’article 2, nous avons apporté des modifications portant notamment sur la consultation des conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, les CESER. Nous aurons l’occasion d’entrer dans le détail au moment de la discussion des articles.

À ce stade de la discussion, il me paraît important d’évoquer l’article 3. En effet, nous avons assoupli les modalités de fusion des collectivités territoriales.

Tout d’abord, et c’est l’élément majeur, nous avons rétabli la suppression de l’obligation d’organiser une consultation référendaire locale en cas de projet de fusion, qu’il s’agisse de plusieurs départements, d’un département et d’une région, ou du changement de région d’un département. Cette disposition a été adoptée quasiment à l’unanimité par le Sénat. Il faut dire que cela correspondait à la position de la commission spéciale en première lecture. Bien sûr, l’initiative locale reste possible et les élus qui souhaiteraient organiser cette consultation pourraient naturellement le faire.

Le droit d’option d’un département a également été modifié. Ainsi, le département et la région d’accueil devraient se prononcer à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés dans chacune de leur assemblée délibérante ; la région d’origine bénéficierait – c’est nouveau - d’un droit de veto par l’adoption d’une délibération à la même condition de majorité ; la modification des limites territoriales ainsi décidée serait ensuite validée par décret, pour en tirer immédiatement les conséquences, notamment électorales.

La fixation d’une majorité qualifiée des trois cinquièmes, sans entrer dans le débat, est aussi une façon de sécuriser juridiquement les choix des élus locaux en la matière. Il ne s’agit pas là d’un sujet mineur : la fusion de départements ou le changement de région d’un département sont des décisions importantes ; il convient d’en sécuriser les conditions.

La commission spéciale est également revenue sur la date de 2019 et a fixé au 31 décembre 2016 l’échéance du délai limite pour procéder à ces fusions et changements.

Après la carte régionale, j’en viens au second grand volet de ce texte, à savoir la représentation politique des territoires et le calendrier électoral.

En première lecture, un accord a été trouvé sur l’introduction des modalités de remplacement des conseillers départementaux – ce sont les articles 9 à 11 - et sur l’assimilation de la métropole de Lyon à une section départementale pour l’application des règles relatives à l’élection des conseillers régionaux – c’est l’article 5. Des désaccords demeurent, malgré des rapprochements entre les positions des deux assemblées actés dès la commission spéciale.

S'agissant du nombre de conseillers régionaux, la commission spéciale a suivi l’Assemblée nationale.

Dans un premier temps, la commission des lois de l’Assemblée nationale partageait la position initiale du Gouvernement et avait maintenu le plafonnement à 150 du nombre de conseillers régionaux, y compris pour les régions dont les limites territoriales n’étaient pas modifiées – il s’agit de l’article 6. Cependant, en séance publique, sur l’initiative du rapporteur et avec l’accord du Gouvernement, l’Assemblée nationale a supprimé tout plafonnement du nombre des élus régionaux.

Cette décision, qui conduit à maintenir le nombre actuel de conseillers régionaux en métropole, a été confirmée par la commission spéciale, la semaine dernière. Toutefois, lors de la réunion qu’elle a tenue pendant la suspension, la commission spéciale a, sur mon initiative, modifié ce dispositif : elle a réduit le nombre des élus régionaux, à rebours du principe adopté par l’Assemblée nationale, mais tout en s’assurant que la représentation demeurerait suffisante. En particulier, elle a décidé, sur ma proposition, de maintenir le nombre de 209 conseillers régionaux pour la région d’Île-de-France, une région phare qui, dans son périmètre actuel, mais il restera inchangé, compte plus de 12 millions d’habitants.

Une seconde question importante se pose : la garantie d’un nombre minimal de sièges pour assurer la représentation de tous les départements au sein du conseil régional. Le mode de scrutin actuel, en vigueur depuis 2003, est régional mais comporte une obligation de présentation des candidats par section départementale. Il ne s’agit donc que de candidats, et non de sièges, de sorte qu’un département pourrait ne compter qu’un nombre très limité de représentants, voire aucun, au sein du conseil régional.

L’Assemblée nationale souhaite, comme le Gouvernement, que le nombre de sièges garantis s’établisse à deux. Je rappelle que la position de la commission spéciale consiste à maintenir l’effectif de cinq, de manière à tenir compte, en plus du critère démographique, de la composition du territoire.

En effet, la mission particulière de représentation des collectivités territoriales qui est dévolue au Sénat nous impose de faire prévaloir cette considération, qui est d’importance. Si l’on prenait en compte exclusivement le critère démographique, la représentation des territoires ruraux pourrait un jour être mise en difficulté. Considérera-t-on qu’ils n’ont pas besoin d’élus, parce qu’ils ne comptent pas suffisamment d’habitants ? Cela est inacceptable dans une vision cohérente et unie de notre pays !

En ce qui concerne la modification du calendrier électoral, un désaccord est apparu en première lecture. La commission spéciale a pris acte de la volonté du Gouvernement, exprimée par le Premier ministre dès le mois de septembre dernier, puis confirmée la semaine dernière par le dépôt d’un amendement en commission, de maintenir les élections départementales au mois de mars prochain. Cette mesure, qui a été votée, est d’autant plus opportune que, au même moment, le Gouvernement semble avoir décidé d’abandonner, au moins dans l’immédiat, l’idée de supprimer les départements – c’est ce que j’ai compris encore cet après-midi.

Compte tenu de cette modification de date, j’ai déposé un amendement tendant à sécuriser les candidats aux prochaines élections départementales pour ce qui est de leurs comptes de campagne. En effet, même si le changement de date un temps annoncé n’est jamais entré en vigueur, il convient d’apporter aux candidats toutes les garanties nécessaires de ce point de vue.

Enfin, la commission spéciale ayant souhaité un texte aussi simple que possible, clair et centré sur l’organisation des régions et des départements, ainsi que sur la représentation électorale en leur sein, elle a supprimé les articles 12 bis, 12 ter, 13 et 14 introduits par l’Assemblée nationale. Non qu’elle les ait jugés inintéressants ou non pertinents sur le fond, mais leur lien avec le projet de loi était ténu et chacun d’eux aurait mérité une discussion spécifique, dans le cadre d’un autre texte.

Tels sont, madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les résultats des délibérations de la commission spéciale et du travail que j’ai essayé d’accomplir, à l’occasion de cette deuxième lecture, avec la complicité active de l’ensemble des mes collègues commissaires !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC, ainsi que sur quelques travées du RDSE et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Navarro

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai, certes, l’honneur d’être le premier orateur des groupes, mais je suis bien obligé de dire qu’il s’agit à mes yeux d’un faux débat.

De l’avis général, monsieur le ministre, vous êtes hors sujet, le Gouvernement auquel vous appartenez ayant pris le problème à l’envers. Le véritable handicap des régions françaises n’est pas leur taille, contrairement à ce que vous nous avez dit : elles sont bien plus grandes que la moyenne des régions européennes. Ainsi, le « Midi-Roussillon » que vous prétendez créer, serait aussi grand que l’Autriche, pays divisé en neuf régions, et plus grand que treize États européens !

À la vérité, la faiblesse des régions françaises tient à leur manque de moyens par rapport à leurs homologues euroépennes, ainsi qu’à leurs compétences, très réduites. Quand les Länder allemands investissent près de 10 milliards d’euros par an dans l’innovation, les régions françaises, elles, ne peuvent dépasser les 500 millions d’euros : voilà le vrai problème !

Une bonne réforme territoriale, indispensable pour moderniser notre pays, donnerait aux régions des compétences claires et des moyens financiers adéquats pour les exercer pleinement. Telle est la question centrale, stratégique ; le reste, tout le reste, n’est que cinéma !

Monsieur le ministre, vous mettez la charrue devant les bœufs !

L’urgence est de mettre le couple régions-PME au cœur de l’action économique sur les territoires et de régionaliser l’action publique. Il faut mettre les ressources des régions en cohérence avec leurs compétences, en leur attribuant, dès 2015, 70 % de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. C’est cela dont la France a besoin, et vite !

Or votre réforme territoriale, telle qu’elle se présente actuellement, éloigne dramatiquement les citoyens de leurs élus. En effet, non seulement on nous vend des régions obèses, mais on menace aussi de supprimer tous les départements.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Navarro

Pourquoi vouloir appliquer le même régime à l’ensemble de notre pays ? Embrasser la modernité, c’est accepter la diversité, car nos différences sont une richesse. Ainsi, un département comme la Lozère doit être non seulement maintenu, mais surtout renforcé, tandis que, dans les zones urbaines, le département doit disparaître.

Sur ce point, le Gouvernement a changé d’avis ; mais comment décider de fusionner des régions dans l’ignorance de ce qui se passera ensuite ? En effet, je n’ai pas le même avis sur la fusion de l’Aquitaine, du Limousin et de Poitou-Charentes selon que l’on maintient vingt départements ou que l’on en conserve un seul. Au demeurant, imaginer Guéret appartenir à une région maritime me laisse songeur…

J’en viens à la question des économies. Monsieur le ministre, vous montrez du doigt, comme vos prédécesseurs, le coût des élus. Or, ce qui coûte, en vérité, ce sont les doublons entre les régions et les missions opérationnelles de l’État déconcentré. Sérieusement, qui peut croire que la disparition de huit régions sur près de quarante mille collectivités territoriales permettra de réduire le coût du millefeuille territorial, surtout lorsque l’on sait que les régions représentent la plus petite masse financière ?

Je souhaite, avant de conclure, insister sur l’indispensable refonte des circonscriptions pour les élections européennes. En effet, si la région Limousin est fusionnée avec Poitou-Charentes et Aquitaine, elle ne pourra plus décemment voter dans la circonscription Centre, comme c’est le cas actuellement, alors qu’une autre partie de ce nouvel ensemble voterait, elle, dans la circonscription Ouest !

La création de grandes régions est donc l’occasion unique de donner aux élections européennes un ancrage territorial qui ait du sens pour les citoyens. Cette réforme, il ne faut pas attendre les prochaines élections européennes pour la faire ; c’est pourquoi j’ai déposé un amendement tendant à aligner les circonscriptions pour les élections européennes sur les régions nouvellement délimitées. Cela me semble être la seule utilité de cette loi !

Monsieur le ministre, la démocratie française, contrairement à d’autres démocraties européennes, n’est pas construite sur des syndicats et des partis politiques forts. Dans ces conditions, supprimer des élus, c’est supprimer une courroie essentielle au fonctionnement de notre démocratie. Un élu n’est pas un coût, c’est un investissement !

Les citoyens français doivent avoir une porte à laquelle frapper : sans cela, leur désespoir sera aggravé et nous donnerons notre pays à l’extrême droite !

Applaudissements sur quelques travées du RDSE et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je voudrais, pour commencer, saluer le travail de notre commission spéciale, qui a adopté, de surcroît à une large majorité, un texte sur lequel portera notre débat. Ce succès constitue, il me semble, un très bon signal pour notre assemblée. En effet, le Sénat doit faire entendre sa voix sur ce projet de loi modifiant l’organisation de notre territoire, ce qu’il n’a pas pu totalement faire en première lecture.

La volonté de notre chambre de peser sur ce texte n’enlève rien à la réalité à laquelle nous sommes confrontés : une méthode totalement inadaptée, imposée par un gouvernement qui mène une réforme territoriale à l’envers.

En effet, alors que tout le monde s’accordait sur la nécessité d’une évaluation globale des strates de collectivités territoriales, la logique de la réforme a totalement dérapé : nous parlons aujourd’hui de la taille des régions et de la date des élections départementales et régionales, qui ne sont pourtant pas le fond du problème !

Non, le problème réside dans la répartition des compétences, qui n’est pas encore abordée. Quels seront les rapports entre les métropoles et les régions ? Comment seront respectés les nouveaux équilibres entre les territoires urbains et les territoires ruraux ? Il n’y a eu aucune évaluation, aucun examen approfondi de ces questions, pourtant essentielles.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

À la vérité, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui est plutôt révélateur du flou dont fait preuve le Gouvernement en ce qui concerne l’acte III de la décentralisation qu’il avait annoncé. C’est une navigation à vue, sans réel cap.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

M. Henri Tandonnet. Ce projet de loi souffre, de surcroît, d’un défaut majeur : il tend à imposer une nouvelle délimitation des territoires sans que ceux-ci aient été préalablement consultés.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

Le constat s’impose : nous sommes actuellement pris dans un piège procédural dont nous devrons bien pourtant sortir, et par le haut.

Cela étant, la commission spéciale a réussi à adopter un texte retravaillé dans le bon sens en dégageant un consensus sur plusieurs sujets.

D’abord, elle a décidé de maintenir les élections départementales en mars 2015 et de fixer les élections régionales à la fin de l’année 2015. Le groupe UDI-UC est majoritairement d’accord sur ce calendrier.

Ensuite, la commission spéciale s’est entendue sur un minimum obligatoire de cinq conseillers régionaux issus de chaque département, alors que l’Assemblée nationale avait retenu le chiffre de deux conseillers. Ce minimum de cinq conseillers par département semble nécessaire afin de garantir la représentation des territoires et non pas seulement celle de la population. Il permettra de préserver un équilibre territorial, à l’heure où la fracture entre les métropoles et les territoires ruraux ne cesse de s’accentuer. Sans un tel minimum, je ne vois pas comment des départements comme la Dordogne ou le Lot-et-Garonne pourraient se faire entendre dans une future région comprenant l’Aquitaine, le Limousin et Poitou-Charentes.

Nous nous sommes également accordés sur un principe que le groupe UDI-UC défend tout particulièrement : le droit d’option des départements, introduit en première lecture par le Sénat.

À cet égard, nous avons fait adopter par la commission spéciale un amendement qui assouplit le dispositif voté par l’Assemblée nationale pour permettre à un département de changer de région d’appartenance. Il est désormais prévu que la région d’origine puisse s’opposer à ce changement de rattachement si et seulement si cette opposition réunit une majorité des trois cinquièmes de l’assemblée.

Ce droit d’option pourra être exercé dans un laps de temps court, mais suffisant : jusqu’à la fin de l’année 2016. Ainsi, nos collectivités territoriales ne seront pas laissées trop longtemps dans l’expectative.

Enfin, une nouvelle carte a été adoptée, dont nous continuerons de débattre longuement ces prochains jours. Je maintiens la position que j’ai exprimée en première lecture : j’en suis convaincu, il aurait fallu aborder la question du redécoupage de manière plus nuancée, en acceptant de raisonner à l’échelle des départements et non pas seulement par blocs régionaux figés. Cette méthode aurait permis une orientation des régions intermédiaires vers leur capitale régionale naturelle. D’où l’importance de ce droit d’option assoupli pour les départements.

À défaut de pouvoir faire prévaloir une logique fondée sur les bassins de vie, le groupe UDI-UC a souhaité déposer des amendements tendant à établir une nouvelle carte aussi équilibrée et porteuse que possible.

En particulier, j’ai soutenu devant la commission spéciale la proposition d’une grande région Sud-Ouest composée d’Aquitaine et de Midi-Pyrénées. Cette solution, qui me paraît assez cohérente, est fondée sur une logique culturelle, mais aussi économique et sociale, puisqu’elle s’organise autour de l’aérospatiale et de l’agroalimentaire. Cette logique est illustrée notamment par le succès de la marque « Grand Sud-Ouest » développée par Toulouse et Bordeaux. Malheureusement, la commission spéciale ne m’a pas entendu.

M. Roland Courteau s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

Le groupe UDI-UC, qui appartient à la nouvelle majorité sénatoriale, souhaite rester constructif tout au long des débats que nous mènerons ces prochains jours afin d’adopter un texte alternatif par rapport à celui de l’Assemblée nationale et dont l’équilibre, je l’espère, sera conservé durant la suite de la navette.

Ce redécoupage, monsieur le ministre, reste source d’interrogations nombreuses et ne nous rassure pas du tout quant à l’avenir de nos territoires, notamment les plus ruraux.

Après de multiples hésitations, vous avez finalement annoncé pour l’avenir de nos départements des mesures réservant trois catégories de conseils départementaux. Cela laisse craindre un système à trois vitesses.

Si seuls les départements ruraux sont maintenus dans leur fonctionnement actuel après 2020, la question se pose de la définition d’un département rural.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. Bruno Retailleau applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

Voici quelques exemples qui montrent la diversité des approches : dix départements « hyper-ruraux » ont été identifiés par notre collègue Alain Bertrand ; une trentaine de départements ont participé aux travaux de l’ADF, l'Association des départements de France, sur les nouvelles ruralités ; 90 % des départements sont considérés comme « non urbains » par l’Association des petites villes de France.

Autant d’exemples que je souhaitais vous rappeler afin que le monde rural ne soit pas considéré comme un ensemble secondaire, mais bel et bien comme le contraire, c’est-à-dire une part importante de la géographie, de l’activité et de l’identité de notre territoire. À ce titre, il mérite non pas d’être classifié, mais d’être soutenu. N’oublions pas que le monde rural nourrit nos métropoles et que la question essentielle est celle de la solidarité entre les territoires décentralisés.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

M. René Vandierendonck. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par un constat : contrairement à certaines rumeurs qui ont beaucoup circulé

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

… de laisser procéder à deux lectures de ce texte, et de faire en sorte que la première lecture du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République intervienne avant la fin de l’année. C’est l’engagement qui avait été pris et il est honoré ; je voulais en donner acte au Gouvernement.

Les différentes interventions sont à cet égard significatives des craintes que le processus de réforme a fait planer sur l’avenir des départements, …

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

M. René Vandierendonck. … dont j’ai clairement dit qu’elles étaient infondées. Prenez l’article liminaire, introduit par la commission spéciale. Sa portée juridique n’en fait pas une œuvre incomparable

M. le président de la commission spéciale et M. le rapporteur le confirment.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

La création d’une région forte, qui atteigne une taille critique, vous la vouliez tous ! Dois-je le rappeler, le fameux rapport Raffarin-Krattinger fixait à dix le nombre des régions, insistant sur la nécessité de respecter le caractère stratégique de leurs compétences.

Et je me rappelle Pierre Mauroy présentant, pour la communauté urbaine de Lille, la première carte du rapport du comité pour la réforme des collectivités locales remis par Édouard Balladur avec, pour sous-titre, cette formule : « Il est temps de décider ». Vous vous en souvenez, monsieur le président de la commission spéciale…

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Alors, oui, j’éprouve un certain respect pour ceux qui, sur des questions dont on voit qu’elles agitent le débat public depuis quelques décennies, œuvrent pour qu’une décision puisse intervenir, sachant que la deuxième lecture devrait permettre, du moins je l’espère, quelques ajustements de la carte des régions et des limites territoriales.

Encore que, quand le Sénat laisse passer la première lecture, il ne faut pas s'attendre à ce que les ajustements de deuxième lecture soient miraculeux… Mais enfin, si un consensus apparaît, le Premier ministre a dit – ainsi que vous-même, monsieur le ministre – que des tels ajustements seraient possibles.

À partir du moment où la question de l’avenir des départements est, me semble-t-il, posée plus clairement, je pense que nos amendements peuvent porter sur les conditions du droit d’option – c'est l’essentiel des propositions que le groupe socialiste fera dans le cadre de la discussion –, et je vous remercie, monsieur le ministre, des propos que vous avez tenus sur ce point. En effet, vous confirmez qu’il faut favoriser d’éventuels regroupements de départements, qu’il faut permettre à des départements de faire démocratiquement un certain nombre de choix alternatifs s’agissant de leur région d’appartenance.

L’Assemblée nationale a « verrouillé » – j’assume le terme – le dispositif en posant l’exigence d’une majorité des trois cinquièmes s'appliquant à la région de départ, à la région d’arrivée et, bien sûr, au département concerné.

Le président de la commission spéciale, Jean-Jacques Hyest, et le rapporteur, François-Noël Buffet, ont à mon avis fait avancer le débat en transformant la règle des trois cinquièmes en veto pour la région de départ

M. le président de la commission spéciale acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Pour le reste, c’est-à-dire sur la carte elle-même, la déontologie imposant, lorsque l’on parle au nom de son groupe, que l’on s’abstienne de commentaires trop « géolocalisés ».

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

, je me conterai de dire que la première mouture de la carte du Gouvernement me convenait parfaitement !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. René-Paul Savary applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, m’inspirant d’une remarque de M. le ministre, je m’écarterai sciemment du texte que j’avais préparé pour mieux tenir compte de nos derniers échanges avec le Premier ministre et des prises de position des uns et des autres, le tout remis en perspective.

On peut être à peu près d’accord, me semble-t-il, pour dire que la situation, ce soir, est relativement simple. Nous avons maintenant de grandes régions, qui ne bougeront plus beaucoup, et, surtout, des départements qui sauvent très bien leur peau, si vous me permettez l’expression, pour la raison que les élus communaux, qui ne voulaient pas hériter des compétences sociales des départements, les ont finalement soutenus.

La perspective n’est donc pas celle d’une disparition à relativement brève échéance des départements, mais plutôt celle de leur maintien. Et l’on ne s'achemine probablement pas non plus vers la coexistence de trois ou quatre systèmes départementaux différents.

Par ailleurs, nous avons des intercommunalités dont la taille pourrait se trouver plus réduite – sur ce point, la porte a été ouverte à un assouplissement.

Mais je me tourne vers le Gouvernement : attention, monsieur le ministre, à ce que la montagne n’accouche pas d'une souris !Les citoyens de ce pays risquent d’aller très vite à la conclusion fâcheuse que tous ces débats n’auront finalement pas abouti à grand-chose : les départements ? On les retrouve. Les intercommunalités ? Elles ne sont pas vraiment plus grandes. Il n’y a bien que pour les régions que cela change, puisque leur nombre diminue, peu, du reste.

À nous donc de tenir un discours plus enthousiaste et plus résolu sur l’intérêt de cette réforme et de ce texte, qui trouvera son prolongement, nous l’avons dit cet après-midi, dans celui que soutiendra Marylise Lebranchu.

Je voudrais maintenant vous livrer quelques réflexions, sur la base de ce qui précède. D’abord, concernant la carte, on peut considérer que l’on a six ou sept régions qui font à peu près consensus ou qui, du moins, ne suscitent pas d’opposition. Certaines n’avaient sans doute jamais imaginé se retrouver « mariées » en octobre de cette année, mais on ne constate pas, globalement, d’animosité : tout le monde, ou presque, est prêt à se lancer.

Reste les cas, plus compliqués, de trois ou quatre régions sur lesquelles porteront essentiellement les débats, même si les propos de M. le ministre font bien sentir que les lignes bougeront assez peu.

Je m’arrêterai sur deux situations vraiment particulières. Cela a été très peu dit, mais la grande bizarrerie de cette carte, c'est que l’ouest de la France ne bouge pas : nous avons trois régions – Bretagne, Pays de la Loire, Centre – qui demeurent inchangées.

Le ministre Bernard Cazeneuve a pourtant bien insisté à l’instant sur l’enjeu majeur, vital pour les territoires français, que constituent des régions plus grandes et adaptées à la compétition libérale internationale. Mais le Gouvernement, qui a proposé des cartes et des fusions, a considéré que la région Centre pouvait demeurer telle quelle, sans métropole, et que les régions Bretagne et Pays de la Loire pouvaient rester distinctes. Or je rappelle que ce sont précisément les deux seules régions à avoir déjà fusionné leurs universités…

Pour autant, si l’État a effectivement évité ainsi d’aller au-devant des problèmes, je ne veux pas le stigmatiser à l’excès. En effet, cette situation est d'abord de la responsabilité des élus de l’Ouest, qui n’ont pas été capables de se mettre autour d’une table pour trouver une réponse à une situation assez complexe, il est vrai. Entre ceux qui voulaient la Bretagne historique et ceux qui voulaient la fusion, il fallait un vrai travail en commun, ce qui n’a pas été fait.

Les grands élus de l’Ouest sont donc responsables de ce statu quo assez préjudiciable. Songez que nous avons un axe d’aménagement Nantes-Rennes qui impacte l’ensemble du territoire, mais sans qu’aucun schéma prescriptif ne l’englobe !

L’avenir dira si le raisonnement développé à l’instant par Bernard Cazeneuve est juste. En termes économiques, les petites régions se trouvent aujourd'hui, dans l’ensemble, en situation de faiblesse. Je note que la région Pays de la Loire convoque une réunion d’urgence ce mois-ci en raison de la forte baisse des dotations au titre de son contrat de projets État-région. Quid, demain, de la région Centre ?

Tout le monde, ici, parle d’égalité territoriale, mais encore faudrait-il analyser – au cours des prochains mois, des prochaines années – ce qui restera de cette égalité des chances lorsqu’il s'agira de faire du lobbying au niveau européen… Où sera l’égalité des chances entre des régions comprenant dix ou douze départements et d’autres n’en réunissant que quatre, avec des moyens différents, y compris dans le rapport avec l’État, qui est aussi, parfois, un rapport de force…

Cela ne traduit pas une logique d’égalité territoriale, même si l’on considère que la diversité des territoires français, dont il faut évidemment tenir compte, s'oppose à la formation systématique de grandes régions de taille comparable.

Au fond, je crois que la sagesse serait de donner du temps au temps. La situation n’est pas obligatoirement appelée à se prolonger, une porte a été ouverte – ne serait-ce qu’avec le nom de la région Centre, qui deviendrait Centre - Val de Loire –…

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

… et plusieurs possibilités sont sur la table. L’une d’entre elles, que le Gouvernement avait écartée, ne voulant s'en tenir qu’aux fusions de régions, consistait à créer deux grandes régions, l’une sur l’axe ligérien, l’autre autour de la Bretagne et de l’Atlantique. Cette possibilité est toujours sur la table, et il faudra y revenir. La loi ne doit pas figer pour cinquante ans le découpage territorial français !

Face à cette diversité française qui mérite donc des réponses diversifiées, je trouve qu’il y a tout de même encore beaucoup d’idéologie dans le discours de ceux qui s’opposent à toute diversification des compétences et des modes de fonctionnement.

À cet égard, la question alsacienne est révélatrice de la difficulté assez spécifiquement française à considérer que l’on peut avoir des réponses différentes tenant compte de la réalité des territoires. C’est très bien de prendre l’exemple allemand, et cela a été fait cet après-midi encore. Mais, justement, en Allemagne, certaines régions se réduisent à la taille d’une ville. Considérer que Strasbourg perdra son statut de capitale parce qu’elle appartient à une petite région, c’est donc nier l’exemple allemand.

La diversité européenne est bien plus grande ! Ainsi, quand on a une adhésion aussi claire des élus régionaux, des élus départementaux et du peuple, qui s’est exprimé par référendum, même si l’un des deux départements n’avait pas voté favorablement, il faut faire confiance à ce que dit le territoire et, en l’occurrence, donner à l’Alsace le statut de collectivité territoriale unique.

Si nous n’y parvenons pas à l’occasion de la présente réforme, nous donnerons l’image d’une France figée idéologiquement, incapable d’accepter la diversité de ses territoires et de forger des réponses un peu complexes.

Aujourd'hui, si les propos tenus par Manuel Valls cet après-midi m’inquiètent quelque peu, je suis davantage troublé par ceux de Bernard Cazeneuve ce soir. J’y perçois le retour d’une forme de verrouillage, d’une conception technocratique de la construction administrative française. On revient presque au temps de Serge Antoine, pour ceux qui se souviennent de la manière dont les circonscriptions d’action régionale et les régions ont été conçues voilà à peu près cinquante ans. La France et le monde ont évolué : on ne peut plus fonctionner ainsi.

Quant à la rigueur intellectuelle de l’État, disons-le clairement, elle est souvent à géométrie variable. C’est la raison pour laquelle nous demandons plus de souplesse. Au sein de la commission spéciale, y compris en première lecture, nous avons essayé de trouver des compromis ou des visions communes. À cet égard, je souscris aux propos tenus par Henri Tandonnet.

Pourquoi évoquer sans cesse une instabilité, une « boîte de Pandore », qui n’existe pas ? Il s’agit simplement de trouver l’organisation territoriale permettant de libérer les énergies et de respecter la dynamique des territoires.

Ainsi, seules les souplesses du dispositif permettront de trouver une solution à terme, et pas seulement d’ici à la fin de l’année 2016 ! Pourquoi nous limiter dans le temps, alors que de nouvelles régions vont émerger et que le territoire change en permanence ?

Oui, il nous faut trouver les dispositifs permettant de forger peu à peu une construction territoriale française qui corresponde au mieux à l’intérêt des habitants, aux dynamiques économiques, ainsi qu’au respect des identités culturelles et historiques.

Le premier élément est effectivement le droit d’option départemental, que nous avons très clairement inscrit dans le texte en première lecture, en adoptant un amendement défendu par M. Jacques Mézard et soutenu par le groupe écologiste, selon lequel le département et la région d’accueil se mettent d’accord, le territoire quitté n’ayant pas vraiment son mot à dire.

Ce dispositif a été fortement remis en cause par l’Assemblée nationale. La commission spéciale y est revenue, en réduisant le pouvoir de veto de la région quittée. Toutefois, certains amendements témoignent encore de la volonté de faire marche arrière, en fixant à 50 % et non plus à 60 % la proportion de la population nécessaire pour que la région quittée puisse s’oppose à l’initiative. Pour notre part, nous refuserons tout renforcement de la capacité d’opposition de la région quittée.

Contrairement à ce que l’on entend trop souvent, le droit d’option n’est pas le problème de la Loire-Atlantique. Non, le problème tient au fait que Nantes et l’ensemble du département ne souhaitent pas rejoindre la région Bretagne sans leur aire d’influence. Tel est la difficulté sur laquelle butent aujourd'hui les élus de l’Ouest. Toutefois, dans d’autres départements, le droit d’option peut jouer, et il convient donc d’introduire une certaine souplesse.

Il faut également faciliter la fusion des départements. Sur ce point, je considère que le débat avance, comme en témoigne la conclusion de l’intervention de Manuel Valls cet après-midi. Une telle évolution est aujourd'hui à l’œuvre en Savoie. Nous pourrions même assister à certaines constructions correspondant à des identités culturelles et historiques, mais à l’initiative de départements et non pas de régions. Une telle hypothèse n’a peut-être pas été suffisamment explorée. Se dire que, demain, on aura moins de régions et moins de départements est aussi une manière de rationaliser le fonctionnement administratif français. Sur ce point, il faut avancer encore plus. Selon moi, ce sujet, qui n’était pas, au départ, au centre du débat, prend une importance de plus en plus grande. Il nous faudra y revenir.

Mais je vais plus loin.

L’année dernière, c'est-à-dire il y a bien longtemps

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

De même, lorsque j’évoque le bicamérisme, je sens bien que nous, écologistes, sommes un peu en avance sur notre temps ! Toutefois, les choses évoluent très vite.

Le bicamérisme dont je parle existe ailleurs en Europe. Il s’agit d’avoir deux chambres, l’une dotée d’une majorité élue au suffrage universel direct, à la proportionnelle – le scrutin régional a fait globalement ses preuves –, et une autre représentant les territoires. Une telle organisation permet de répondre à une question très présente dans nos débats : comment concilier des axes clairs de politique régionale – c’est le conseil régional, élu au suffrage direct, qui les définirait – et assurer la représentation, dans leur diversité, des territoires, surtout si la région résulte, demain, de la fusion des départements ? Pour y parvenir, il n’est peut-être même pas nécessaire de changer la Constitution !

Voilà ce à quoi nous pourrions travailler. Nous, écologistes, défendons, pour les grandes régions, une vision bicamériste.

Pour conclure, j’en reviens à la question du référendum. Ne pas considérer que les citoyens ont leur place dans ce débat, c’est tout de même assez étrange. Je viens d’un département où la question est extrêmement présente dans le débat public et médiatique. Dans ces conditions, pourquoi sénateurs et députés refuseraient-ils toute initiative populaire référendaire permettant de la trancher ? Voilà une autre vraie bizarrerie du débat !

Si l’intervention de M. le Premier ministre m’a laissé sur ma faim, celle de M. Bernard Cazeneuve m’a particulièrement inquiété. Permettez-moi de reprendre, mes chers collègues, l’image utilisée cet après-midi pour illustrer nos questionnements : allons-nous franchir la rivière ou bien rester au milieu du gué ?

J’ai l’impression que, finalement, vous n’avez pas envie de quitter la rive actuelle, celle d’un certain modèle de fonctionnement français, allergique à la diversité, confondant égalité et unicité, une culture française administrative et politique qui n’est pas un atout dans un monde en mouvement !

MM. Jean Desessard et Henri Tandonnet applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, un constat s’impose : le changement de majorité de notre Haute Assemblée n’aura pas infléchi si peu que ce soit le rythme imprimé à l’examen de ce texte. La précipitation reste de mise et les engagements d’hier sont aujourd’hui bien oubliés par certains.

En effet, si le Sénat avait décidé de mettre en place une commission spéciale pour l’examen de ce projet de loi, ce n’était pas pour que cette commission se contente de débattre de la seule délimitation du territoire de nos régions. La commission des lois aurait pu se charger de cet aspect, et même très bien.

Compte tenu des enjeux liés au renforcement des futures régions, cette commission spéciale avait pour vocation d’examiner toutes les conséquences, sur les plans économique, social, culturel, financier, et, bien entendu, institutionnel et juridique, sans oublier le développement durable, d’une refonte de la délimitation des territoires régionaux.

Cet objectif, que nous nous étions alors majoritairement fixé, avait été mis en évidence, en particulier, par l’extrême indigence des éléments contenus dans l’étude d’impact.

Or, en deuxième lecture, nous avions la possibilité d’enrichir notre réflexion par des auditions supplémentaires, pour mieux éclairer ces enjeux, et surtout veiller au respect de la loi dans la procédure mise en œuvre.

Il n’en a rien été.

La commission spéciale a même, en de telles circonstances, fermé les yeux sur la légalité, puisqu’elle n’a pas exigé l’application de l’article L. 4122-1 du code général des collectivités territoriales, lequel précise que « les limites territoriales des régions sont modifiées par la loi après consultation des conseils régionaux et des conseils départementaux intéressés. »

L’examen du regroupement des régions se sera donc fait sur un coin de table, en commission, à l’instar de ce qui avait été fait à l’Élysée, dans des conditions ubuesques, à la veille de la première lecture.

La droite, qui critiquait, en juin dernier, la méthode, la met aujourd’hui en œuvre sans état d’âme. Au passage, elle a oublié son vote en faveur de la motion référendaire demandant l’organisation d’un référendum sur ce texte de loi…

Chacun peut le constater, l’influence des baronnies régionales reste toujours aussi forte dans le projet de notre commission. C’est particulièrement vrai pour l’Alsace, dont les élus exercent une certaine pression au nom d’enjeux n’ayant rien à voir avec l’intérêt général. Ces parlementaires vont même jusqu’à proposer de faire passer par la loi la fusion de leurs collectivités départementales et régionale, fusion qui a pourtant été rejetée par les citoyens alsaciens.

C’est devenu une manie, pour la droite, de faire avaliser par la loi ce que le peuple refuse par référendum. Elle l’a déjà fait en 2005 s’agissant du Traité européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Ce refus de prendre en compte l’avis de la population n’est malheureusement pas l’apanage de la droite. En effet, le texte issu de la majorité socialiste de l’Assemblée nationale a été presque totalement repris par notre commission. Il est particulièrement marqué par son autoritarisme, son caractère technocratique et son refus du dialogue avec les élus et les citoyens.

Ainsi, après la non-consultation des conseils régionaux et généraux concernés par les fusions de régions, l’alliance de l’UMP et du PS est aujourd’hui de nouveau à l’œuvre, je suis bien obligé de la constater, pour ôter tout pouvoir d’intervention aux citoyens dans ce processus de modification des territoires de la République.

L’obligation de référendums locaux est ainsi supprimée. Pour notre part, nous refusons ce recul démocratique, tout comme nous refusons les fusions de régions fondées sur des visions dépassées, ne s’appuyant sur aucune réalité objectivement démontrée.

Chacun sait pourtant que tout regroupement, dans quelque domaine que ce soit, doit d’abord s’appuyer sur des relations existantes. Or aucun examen sérieux n’a été entrepris s’agissant des liens entretenus entre les différents territoires régionaux.

Pour se regrouper, il faut ensuite s’appuyer sur une relation souhaitée par les parties prenantes, en un mot se mettre d’accord sur un projet partagé. Or personne n’évoque cet aspect ! Les seuls arguments avancés sont des souhaits : devenir plus gros et dépenser moins !

Aux yeux de certains, développer de nouveaux services à la population serait presque devenu un objectif incongru. Pourtant, pour réussir un regroupement, il est nécessaire d’apprécier les éléments relationnels existants et ceux qu’il s’agit de construire.

En termes d’évolution des organisations, nous avons appris depuis longtemps que, si ce travail préalable n’est pas fait, l’échec est assuré. Il l’est également si l’ensemble des intervenants ne sont pas associés au processus de transformation.

Ainsi, sans une association étroite, sans une concertation approfondie avec les citoyens, des partenaires économiques et sociaux, des élus locaux et des personnels territoriaux, rien ne se construira durablement. Le risque est grand de voir se développer les concurrences, les appétits égoïstes et les réseaux identitaires de chaque territoire, en flattant finalement plus les différences que ce qui rassemble.

Cela commence malheureusement à se produire, chacun peut s’en rendre compte. Pour notre part, nous ne saurions nous résoudre à laisser éclater notre République sous les coups des égoïsmes et de la mise en concurrence des territoires.

Avant même d’organiser cette nouvelle carte des régions, la logique aurait voulu que nous examinions en priorité les fonctions et les compétences de ces nouvelles collectivités régionales, pour déterminer l’espace qu’elles devraient occuper.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Avant de réfléchir aux périmètres de ces nouvelles institutions locales, il aurait fallu également s’interroger sur les moyens financiers et humains dont elles pourront disposer pour exercer leurs nouvelles compétences.

En fait, avec ce texte bâclé, nous faisons le contraire de ce qu’il conviendrait de faire. Pour autant, à partir d’études sérieuses et d’objectifs clairement définis, des évolutions territoriales sont à l’évidence nécessaires et possibles. Mais, pour les mettre en œuvre, encore faut-il associer l’ensemble des forces sociales intéressées et organiser un véritable débat national, qui serait tranché par une consultation populaire à la hauteur des enjeux portés par une telle réorganisation de notre République.

Car il ne faut pas cacher aux citoyens, comme certains nous y invitent, que des régions de grande taille, disposant de compétences très élargies et d’un pouvoir réglementaire, portent le germe d’une organisation fédéraliste se substituant à notre République une et indivisible.

D’ailleurs, cette idée n’est-elle pas déjà dans de nombreuses têtes ? Certains passent en effet leur temps, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, à comparer nos régions aux Länder allemands, évoquant leur action et leur puissance respectives, mais oubliant de dire qu’ils sont non pas l’expression d’une République dont l’organisation est décentralisée, mais les structures politiques d’un État fédéral, où les lois ne sont pas les mêmes suivant que l’on habite à l’ouest ou à l’est du pays.

En fait, derrière ce redécoupage des régions, sous couvert de renforcer l’attractivité de leur territoire, se cache un projet politique bien plus vaste, celui d’une réorganisation complète de notre République.

C’est un chambardement de nos institutions locales qui se prépare. Il vise à faire disparaître à moyen terme bon nombre de collectivités locales, de la commune à la région, en passant par les départements, pour faire disparaître autant d’assemblées élues, lieux d’expression de la souveraineté populaire.

C’est un recul démocratique sans précédent, et nous allons évidemment le combattre avec détermination.

En effet, personne ne peut croire que l’on va renforcer la démocratie dans notre pays ou répondre à la crise de la représentation, qui s’élargit, en réduisant le nombre d’assemblées élues, en réduisant le nombre d’élus locaux de proximité, pour la plupart bénévoles, en éloignant toujours plus les citoyens des lieux de décision et de pouvoir.

Au contraire, la concentration des pouvoirs annoncée favorisera, on le sait, la professionnalisation renforcée du mandat d’élu et réduira la possibilité des citoyens issus des classes populaires d’accéder à ces fonctions.

L’oligarchie financière et technocratique envahira peu à peu l’ensemble de la sphère politique, y compris au niveau local. Il deviendra alors possible de faire taire l’expression des besoins et des attentes de nos concitoyens pour permettre une réduction drastique de la dépense publique au profit de l’ouverture au marché de pans entiers de l’action publique actuelle.

Ce faisant, nous transformerons le citoyen, usager actuel, en client potentiel.

À l’objectif de tendre vers l’égalité et de répondre aux besoins de chacun se substituera une réponse inégalitaire : à chacun selon ses moyens. Voilà la France que vous nous préparez ! Ce sera destructeur pour notre pacte social, pour notre pacte républicain.

Déjà, nous voyons poindre en Europe cet éclatement du cadre national, en Italie du Nord, en Catalogne ou en Écosse. Notre pays n’est pas à l’abri.

Le danger est devant nous, avec ce texte bien sûr, mais aussi avec celui qui va suivre, le projet de nouvelle organisation territoriale de la République.

Reconnaissons que ce deuxième texte, par son intitulé, annonce la couleur. Mais il ouvre la porte à d’autres changements, qui, eux, ne sont pas encore annoncés et qui suivront.

Faisant suite à la loi Sarkozy de réforme territoriale de décembre 2010, la loi d’affirmation des métropoles, promulguée en janvier dernier, s’est inscrite dans ses pas, pour toujours plus réduire l’influence des institutions locales et rendre possible la disparition programmée des départements et des communes.

Notons à ce propos que la droite semble oublier que c’est elle qui a ouvert le ban de la disparition des départements, qu’elle fait mine de contester aujourd’hui.

En effet, le conseiller territorial, cet élu hybride siégeant au niveau départemental et régional, était alors institué pour mieux organiser – pour reprendre le bon mot d’Édouard Balladur – « l’évaporation » à venir des départements.

En revanche, et nous le regrettons, la filiation avec la commission Balladur se retrouve aussi – c’est évident – avec l’objectif gouvernemental de faire disparaître les départements à l’horizon 2020 en utilisant la même méthode : celle de la dévitalisation et de la mort à petit feu.

À cet égard, monsieur le ministre, vos propos ne nous ont pas rassurés.

Et pourtant, je me souviens qu’en 2009 le parti socialiste et l’association des élus socialistes s’étaient prononcés contre les propositions de cette commission Balladur et qu’alors, ensemble, nous avions combattu la réforme de 2010.

Cela, évidemment, c’était avant !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Une chose est ainsi plus claire. En effet, depuis plusieurs mois, certains élus et responsables socialistes nous ont fait le reproche d’avoir eu le même type de vote que la droite, sur certains textes de loi, en feignant d’ignorer que nos raisons étaient diamétralement opposées.

Aussi, qu’il nous soit permis, sur ces textes de déconstruction de nos institutions locales, de noter que les désaccords de la droite avec le Gouvernement ne sont plus aussi évidents. Nous le verrons très certainement au moment du vote de ce texte.

Ainsi, nous venons d’évoquer une certaine filiation s’agissant de la disparition programmée des départements, mais nous pouvons malheureusement noter qu’il en est de même concernant l’avenir de nos communes.

En matière d’intercommunalité, le renforcement des compétences obligatoires et l’élargissement des territoires annoncés vont se faire dans le prolongement de la loi de 2010, qui renforçait déjà ces prérogatives et ces limites.

Ainsi, une proposition de loi de Jacques Pélissard sur l’avenir des communes, visant à accélérer leur fusion et à faire ainsi disparaître des milliers d’entre elles, donc des milliers d’élus, vient prochainement en débat à l’Assemblée nationale.

Certains estiment même que cela pourrait toucher près de 10 000 communes et donc plusieurs dizaines de milliers d’élus locaux, au motif de leur perte de moyens financiers et donc de leur capacité d’intervention.

Or il semblerait qu’un amendement au projet de loi de finances soit d’ores et déjà prêt pour accompagner cette proposition favorisant les regroupements-fusions au sein des communes nouvelles définies par la loi Sarkozy de 2010.

Centralisatrice, inefficace, cette réforme va se traduire en outre par un véritable gaspillage des deniers publics.

En effet, contrairement à la fable mille fois répétée par les partisans de ces « hyper-régions », les économies annoncées ne seront pas au rendez-vous. La réorganisation des services, les transferts de compétences envisagés, l’harmonisation des régimes indemnitaires des personnels, la refonte de toute la communication institutionnelle et de la signalétique régionale seront autant de surcoûts totalement passés sous silence aujourd’hui.

Mais, demain, il vous faudra évidemment rendre des comptes aux contribuables.

Au moment où notre pays est au bord de la faillite, avec un chômage qui explose, était-il nécessaire d’engager à l’aveugle un tel chamboulement ?

Quand on voit l’amateurisme qui a entouré la fixation du calendrier électoral, on ne peut qu’être très inquiet quant à la capacité de la technostructure à conduire une telle réforme !

Pour notre part, nous restons attachés à l’organisation de notre République, à ses trois niveaux de collectivités, même si nous pensons que d’importantes modifications doivent être mises en œuvre pour en démocratiser toujours plus le fonctionnement, pour améliorer les services publics locaux, développer tous les partenariats possibles, monter des projets communs entre collectivités territoriales, dans le respect de toutes les parties prenantes, pour renforcer l’efficacité de l’action publique et toujours mieux répondre aux besoins et aux attentes de la population.

Nous militons donc pour un changement radical, démocratique et social, pour une VIe République qui place le peuple devant toute chose et l’humain au centre de tout.

Ce qui nous est présenté aujourd’hui, au nom du parti du mouvement, n’est qu’un mauvais replâtrage de notre monarchie républicaine, une Ve République bis, pire qu’avant par certains aspects.

Ce qui est devant nous, ce n’est pas la voie de la réforme, mais celle d’une contre-réforme passéiste, réactionnaire et centralisatrice, reniant le mouvement initié il y a trente ans par un gouvernement de gauche qui œuvrait alors pour une décentralisation démocratique, au service d’un projet émancipateur.

Cette volonté politique est toujours la nôtre et rien ne nous en détournera.

Aussi, nous refuserons certains articles et proposerons des amendements tendant à réduire les aspects les plus néfastes de ce texte.

Nous espérons être entendus, mais, en l’état actuel de ce projet de loi, trop partiellement réécrit par notre commission spéciale – même si les uns et les autres ont souligné les avancées réalisées –, nous ne pourrons que repousser ce texte, qui n’est pas, à nos yeux, à la hauteur d’une République moderne, démocratique et solidaire.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant qu’élue locale je plaide depuis plusieurs années en faveur d’une véritable réforme de la décentralisation, une réforme qui réponde enfin aux attentes des Français en matière de proximité et d’efficacité de l’action publique.

La décentralisation a permis de faire émerger l’intelligence des territoires.

La décentralisation a libéré des énergies et fait éclore de multiples talents. Elle a permis de relever bien des défis.

Je m’inscris dans ce mouvement et je partage donc la volonté du Gouvernement de procéder à une véritable réforme territoriale.

Cela étant précisé, permettez-moi d’émettre plusieurs réserves sur ce texte.

En premier lieu, le choix du nouveau découpage. Pourquoi avoir fait du nombre de régions l’alpha et l’oméga de la réforme ? Il était à mon sens préférable de définir, dans un premier temps, les missions et les compétences des collectivités ; la question de leur périmètre géographique serait venue tout naturellement dans un second temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

En deuxième lieu, cette réforme de la délimitation des régions est-elle attendue et partagée par tous ? L’avis de nos concitoyens aurait dû être sollicité. Faute de consultation préalable, la carte proposée par le Gouvernement a engendré de nombreuses contestations, souvent justifiées, et je suis bien placée pour en parler.

Christian Bourquin, mon prédécesseur, à qui nous avons rendu hommage cet après-midi, s’est toujours battu pour que cette réforme garantisse l’intégrité de sa région, le Languedoc-Roussillon.

Je me réjouis que les membres de la commission spéciale du Sénat aient entendu sa voix et celle de ses conseillers régionaux, qui, je le rappelle, ont adopté en séance publique une motion contre le projet de fusion de leur région avec Midi-Pyrénées, à la quasi-unanimité : 65 élus pour, 1 contre.

Mais ce sont avant tout les citoyens qui ont été entendus à travers les milliers de signatures recueillies pour garder la région et son identité.

Cela a déjà été dit en ce lieu, et je le répète encore une fois : notre « oui » au Languedoc-Roussillon n’est pas une position de rejet contre Midi-Pyrénées. Nombre de coopérations existent et se développent encore.

J’espère que le Gouvernement et l’Assemblée nationale auront la sagesse de retenir ces choix, conformes à la volonté des élus locaux et des citoyens de notre région.

J’émets une autre réserve sur ce projet de loi : où se feront les économies tant attendues ?

Ce n’est pas l’ersatz d’étude d’impact, indigne de ce nom, qui pourra nous le dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

Et pourtant, il aurait été plus que nécessaire d’évaluer les incidences de cette réforme sur les finances publiques. Mais, puisque le Conseil constitutionnel, saisi sur l’initiative de mon groupe, a jugé l’« étude » satisfaisante, il nous faudra obtenir des éclairages par d’autres moyens.

Je reconnais que ce texte comporte également quelques avancées notables.

Lors de la première lecture au Sénat, un amendement du groupe du RDSE reprenant une proposition de loi de mon collègue et ami Alain Bertrand visant à garantir un seuil minimal de cinq élus régionaux par département avait été adopté.

La commission spéciale a confirmé ce choix. Laisser un seuil inférieur, comme le prévoyait le texte transmis par l’Assemblée nationale, c’était tout simplement condamner les départements les moins densément peuplés à un rôle « décoratif ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

Le minimum de cinq sièges me paraît un juste équilibre entre le respect de la réalité démographique et la nécessité de permettre à chaque département de peser dans les nouvelles entités.

C’est un choix de bon sens, un choix dans l’intérêt des territoires.

Vous le savez, mes chers collègues, la question de la ruralité, et même de l’hyper-ruralité, à la suite de l’excellent rapport de notre collègue Alain Bertrand, fera l’objet d’un débat dans les prochains jours au sein de notre assemblée. C’est un enjeu de demain et nous y sommes, avec mes collègues du groupe du RDSE, très attentifs.

Nous sommes également attentifs à l’avenir des départements. Le Gouvernement, monsieur le ministre, a donné des gages sur le maintien de l’échelon départemental. C’est une sage décision.

À ce titre, je me réjouis aussi de voir dans le texte de la commission spéciale un nouvel article 1er A qui détermine les missions de chaque échelon local. En particulier, il y est indiqué que « les départements sont garants du développement et de la solidarité territoriaux et de la cohésion sociale sur leur territoire ».

Le département est donc bien vivant ! §Ceux qui pensent pouvoir confier dès demain les missions du conseil général aux intercommunalités ne sont pas réalistes. Aujourd’hui, c’est l’inverse qui se produit : ce sont les départements qui viennent en aide aux intercommunalités !

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

Mes chers collègues, de nombreuses questions restent encore en suspens : quelles économies seront effectuées ? Quelles villes seront les chefs-lieux des nouvelles régions ? Quels seront les pouvoirs de ces régions par rapport aux autres échelons ? Quel est l’avenir des territoires ?

Nous trouverons, semble-t-il, une partie des réponses dans le projet de loi NOTRe portant nouvelle organisation territoriale de la République. Encore faut-il que l’on s’accorde sur le point de savoir quand débuter la discussion de ce texte fondamental. Vous connaissez, monsieur le ministre, la position des présidents de conseil général et des conseillers généraux sur la question, à l’approche des élections de mars 2015…

Il est bien inconfortable de devoir voter le présent texte sans avoir d’assurances préalables sur ce que sera le contenu de la loi NOTRe, sans même connaître le sens que l’on souhaite donner à notre République décentralisée.

Il y va de l’intérêt général. Il s’agit de répondre aux besoins des citoyens. Ils nous font confiance et leurs attentes sont nombreuses. Il nous faut aller encore plus loin ! Malheureusement, ce texte n’apporte que des réponses très partielles.

Le groupe du RDSE et moi-même attendons impatiemment de connaître le fruit de nos débats pour déterminer définitivement notre vote.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur quelques travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

le ministre, mes chers collègues, je vous propose de prolonger cette séance jusqu’à minuit trente, afin d’aller plus avant dans la discussion générale de ce texte.

Il n’y a pas d’opposition ?...

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. Bruno Sido.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. […] Son organisation est décentralisée. » Notre Constitution, en son article 1er, pose clairement le principe de l’unité de l’État, de la République, dont les collectivités territoriales sont une modalité d’organisation administrative, l’expression d’une gestion décentralisée des territoires.

En d’autres termes, les régions, départements et communes de France sont eux aussi des composantes de la République et de l’État ; non des entités sui generis comme les Länder allemands, tirant leur légitimité de siècles d’existence autonome avant que, en 1871, la nation allemande ne prenne enfin la forme d’un État.

La France a été bâtie par la main de l’État, siècle après siècle, tantôt par le glaive et les conquêtes, tantôt par mariage et accueil de territoires nouveaux. Toujours, la monarchie puis la République ont veillé à faire de la France une nation unique, signifiant bien davantage qu’une simple juxtaposition de particularismes locaux. L’affirmation du pouvoir central sur les périphéries a permis le rayonnement de notre langue, la construction d’une nation ouverte, reposant sur les principes de liberté, d’égalité et de fraternité.

Qu’est-ce qu’une nation ? Ernest Renan, lors d’une conférence donnée à la Sorbonne en 1882, déclarait ceci : « Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé, l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis. »

Le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu fixent assurément, monsieur le ministre, les bases et les bornes de la réforme territoriale de notre pays, qui doit, à mon sens, en respecter l’esprit.

Cet héritage vivant est celui de la Révolution française ; celui qui a émancipé chaque petit Français de ses origines régionales, de son patois local qui l’attachait pour la vie à une terre, en lui offrant ce merveilleux véhicule de liberté et d’ascension sociale qu’est la langue française.

Les régions, héritage des provinces de l’Ancien Régime, ont longtemps suscité la méfiance de celles et de ceux qui croyaient en l’État pour donner corps aux principes républicains.

Dans cette fresque haute en couleur qu’est le roman national, trois entités tiennent un rôle majeur : les communes, les départements, l’État. Constamment, la régionalisation est refusée, tout au long du XIXe siècle, malgré les appels de certains, dont Charles Maurras qui clamait, en 1892 : « Nous voulons délivrer de leurs cages départementales les âmes de nos provinces […]. Nous sommes autonomistes, nous sommes fédéralistes. »

Monsieur le ministre, mes chers collègues, pour fixer un cap, il est nécessaire de savoir précisément d’où l’on vient.

Alors que, depuis une dizaine d’années, le département fait figure de « mouton noir » de la République, gratifié par d’innombrables articles de presse et déclarations de personnalités politiques éminentes d’épithètes telles qu’« obsolète », « coûteux », voire, plus récemment, « inutile », je veux rappeler avec force au Sénat que le département et le conseil général appartiennent non seulement à l’ADN de notre histoire républicaine, mais aussi à son avenir.

Le Gouvernement n’a pas démontré en quoi leur suppression, à tout le moins leur affaiblissement, permettrait la moindre économie. Au pays des Lumières, je forme le vœu que les ministres développent devant le Parlement un raisonnement objectif et construit, inspiré par le seul intérêt national.

Le Gouvernement réserve des leçons de gestion aux conseils généraux et aux communes, lui qui sait comme personne leur transférer de nouvelles charges, qu’il s’agisse du domaine social, avec les hausses du RSA que nous apprenons en lisant la presse, ou de la réforme des rythmes scolaires, qui laisse les élus locaux désemparés. Mettez la parole en cohérence avec les actes !

Pour l’avenir, le Gouvernement nous propose de grandes régions, immenses et puissantes, aux côtés desquelles existeraient des métropoles, véritables concentrés de pouvoirs cumulant les responsabilités des communes, celles du conseil général et même celles de la région ! Cela donne le vertige.

Comme l’écrivait Montesquieu dans De l’Esprit des lois, « pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir ». Alors que, au nom d’un idéal démocratique, le Gouvernement et sa majorité interdisent le cumul des mandats – c’est-à-dire de responsabilités reposant sur les mêmes personnes –, ils organisent ce même cumul des responsabilités sur les épaules des futurs présidents de région et des présidents de métropole, recréant, alors que le pays est confronté à une immense crise économique, la puissance des provinces d’Ancien Régime et leurs dérives.

Et le conseil général, dans tout cela ?

S’agissant de la redéfinition des cartes régionales, le droit d’option doit permettre d’ajuster, dans les prochaines années, le périmètre des nouvelles régions aux réalités des coopérations territoriales. Si l’État maintient des compétences fortes aux conseils généraux, ils peuvent continuer à être les garants de l’équilibre entre l’urbain et le rural et à relayer efficacement ses politiques publiques dans les territoires. Plus les grandes régions auront de poids, et plus les départements resteront nécessaires.

Si les quinze nouvelles régions sont compétentes pour l’économie, les investissements d’avenir, la compétitivité et l’innovation, les départements doivent gérer, de l’avis des quarante et un présidents de conseil général de la droite, du centre et des indépendants, l’ensemble des compétences de proximité : non seulement conserver les routes, les collèges et les transports scolaires, mais aussi gérer les lycées et assumer les missions d’assistance technique nécessaires aux communes et à leurs groupements. M. le Premier ministre en a parlé tout à l’heure.

D’ailleurs, l’État ne s’y trompe pas, comme en attestent le maintien du maillage territorial des préfets et des sous-préfets et le renforcement considérable des pouvoirs des préfets pour modifier la carte intercommunale et supprimer nombre de syndicats de communes.

L’État, n’en déplaise aux régions, s’occupe directement des grandes questions économiques dès qu’un sinistre industriel menace, dès qu’une opportunité existe à l’export pour telle ou telle entreprise, dès qu’une négociation de haut niveau avec des investisseurs étrangers est nécessaire. Demain, il doit, à mon sens, conserver cette capacité d’action, car lui seul détient la légitimité pour s’occuper des grandes questions.

Les conseils généraux ne font pas la politique du paon ni, pour paraphraser La Fontaine, ne jouent la fable de la grenouille qui se voulait aussi grosse que le bœuf. Ils ne se piquent pas non plus d’incarner une pseudo-identité régionale. Ils sont utiles, tout simplement, par les services concrets et efficaces qu’ils rendent à nos concitoyens : c’est là leur seule fierté. Au quotidien, ils veillent à faire arriver à l’heure les enfants en classe, à chauffer, entretenir et moderniser les collèges, à maintenir un réseau routier en bon état, à aider nos concitoyens les plus fragiles, surtout. Je pense aux personnes âgées ou handicapées, aux enfants et aux jeunes, aux personnes en rupture d’insertion.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Les conseils généraux attendent aujourd’hui de l’État, à moins de cinq mois des élections, une clarification de leur rôle. C’est, pour le dire clairement, la moindre des choses pour les Français, qu’ils soient électeurs ou candidats.

Nous attendons également de l’État une assurance de disposer des moyens financiers nécessaires pour faire face aux missions confiées par la loi, dans le champ social notamment. Certes, l’État doit faire des économies, mais pas au détriment de la proximité, à l’heure où nos concitoyens font face à la crise.

Nous ne sommes pas comme les « frondeurs », qui sapent votre action ; nous sommes au contraire des partenaires avec lesquels vous pouvez, dans la droite ligne du rapport Raffarin-Krattinger, qui esquissait une réforme territoriale aussi ambitieuse qu’équilibrée, « sortir par le haut ». Faites confiance aux départements et à la libre administration des collectivités territoriales.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l'UDI -UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes bien sûr, les uns et les autres, présents sur le terrain. De plus, durant l’été, une moitié d’entre nous, concernés par les élections sénatoriales, ont été amenés à rencontrer et à écouter avec une attention particulière nos collègues élus, les grands électeurs. À cette occasion, je n’ai pas entendu exprimer un rejet de principe d’une réforme de notre organisation territoriale. En revanche, il a été affirmé avec force et sur tous les tons que cette réforme devait se faire de la bonne manière. Or force est de constater aujourd’hui qu’elle a été bien mal engagée par le Gouvernement.

Dès l’examen en première lecture de ce projet de loi au Sénat, nous avions été plusieurs à souligner les lacunes d’un texte qui reposait très largement sur des idées reçues, sans pour autant s’attaquer aux vrais problèmes de fond, évoqués tout à l’heure par plusieurs collègues devant le Premier ministre.

Principal argument avancé par le Gouvernement, la fusion des régions allait d’abord permettre d’engendrer de fortes économies. Tout le monde reconnaît aujourd’hui qu’entre les fusions de services, le financement des déménagements, l’alignement des statuts, etc., ces fusions engendreront des coûts dans un premier temps – et peut-être pendant très longtemps –, surtout dans un État encore très centralisé, dont la réforme reste à faire.

Le Gouvernement nous annonçait ensuite que la fusion allait permettre à nos régions d’atteindre la fameuse « taille critique ». Or, si l’on regarde la situation chez nos voisins européens, on constate qu’il n’existe pas d’optimum régional et que comparaison n’est pas raison : il n’existe pas de « taille critique ».

Enfin, pour ce qui est de la méthode et du calendrier, le Gouvernement nous proposait le contenant avant le contenu, alors même que la clarification des compétences aurait dû être le point de départ de toute réforme. Quelles seront, en effet, les compétences respectives des collectivités de demain ? Qui fera quoi et avec quels moyens, dans un contexte de baisse des recettes ?

Alors que ce manque de cap et de vision a été largement commenté, à juste titre, lors de nos débats, on peut regretter a posteriori que le Sénat n’ait pas saisi l’occasion de la première lecture pour dessiner sa propre carte, avant que l’Assemblée nationale ne dénature le projet gouvernemental… Que cela nous serve aujourd’hui de leçon pour la deuxième lecture !

Vous le savez, la majorité de l’Assemblée nationale, en accord avec le Gouvernement, a adjoint la Champagne-Ardenne à l’Alsace-Lorraine, écartant ainsi une perspective qui, sans faire l’unanimité, aurait pu, dans le contexte du début de l’été, constituer une solution acceptable pour les uns et les autres. En Alsace, le président Philippe Richert avait d’ailleurs, à cette époque, accepté de négocier avec son homologue lorrain.

L’adjonction de la Champagne-Ardenne, considérée comme une provocation et aboutissant à la formation d’une trop grande région, a provoqué la mobilisation des Alsaciens durant tout l’été, avec comme point d’orgue la manifestation du 11 octobre à Strasbourg, qui a été un succès populaire. Cette mobilisation ne s’est toutefois pas faite – je veux le rappeler – contre le dialogue, que ce soit avec le Président de la République – nous l’avons rencontré à l’occasion de commémorations, pendant l’été – ou avec le Gouvernement.

Ce dialogue doit se poursuivre ; pourtant, nous avons entendu, cet après-midi et ce soir, de la part du Premier ministre et du ministre de l’intérieur, des propos qui témoignent plutôt d’une certaine fermeture. Nous le regrettons. J’espère néanmoins que, comme cela nous a été dit à plusieurs reprises, le débat est vraiment ouvert et que tout n’est pas joué d’avance.

La démarche que nous avons entreprise, en Alsace, ne s’inscrit pas non plus dans une opposition à la Lorraine, à la Champagne-Ardenne et à leurs habitants. L’Alsace, si elle est dotée d’une identité forte, dont elle est fière, n’entend en aucun cas manifester une volonté de repli ; elle entend bien adopter, au contraire, une démarche d’ouverture – à l’égard tant des régions voisines que des régions frontalières de Suisse et d’Allemagne – et innovante, avec la ferme volonté de surmonter l’échec du référendum de 2013, qui avait suscité beaucoup d’espoir, y compris, je le sais, au sein du Gouvernement. L’idée de la fusion des collectivités alsaciennes n’a pas été rejetée par le peuple, puisqu’une majorité très nette en sa faveur s’est dégagée sur l’ensemble de la région lors du référendum : l’échec tient à des conditions aujourd’hui considérées par tous comme impossibles à remplir. Cela a servi de leçon ; tant mieux, mais nous l’avons payé cher !

Dans ce contexte, je me réjouis que la commission spéciale du Sénat ait adopté un amendement permettant à l’Alsace de constituer à elle seule l’une des futures régions. Je regrette cependant que les amendements portant sur l’instauration du conseil d’Alsace, et donc la perspective d’une expérimentation innovante, qui intéresse d’ores et déjà d’autres régions, n’aient pas été retenus, pour des raisons constitutionnelles. C’est dommage, car cette idée a fait son chemin, particulièrement dans notre région. Je souhaite que l’on puisse y revenir, au travers du présent texte ou d’un prochain véhicule législatif approprié, si besoin – je pense par exemple au projet de loi relatif aux compétences.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les travaux de la commission spéciale ont permis de réaliser des avancées importantes, qui rendent ce texte plus équilibré et cohérent. Celles-ci doivent désormais être préservées en séance publique !

Au-delà, le dialogue devra se poursuivre avec le Gouvernement et nos collègues de l’Assemblée nationale. En tout cas, tout retour à une trop grande région Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne ne pourrait que susciter colère et incompréhension en Alsace. Il s’agirait là d’une marque de mépris, que nous ne pourrions comprendre.

Nous attendons tous beaucoup de ce débat, qui constituera un test pour un Sénat renouvelé, désireux de se faire entendre à nouveau et de retrouver son rôle et sa légitimité d’assemblée représentant les territoires.

Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC et sur certaines travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission spéciale, monsieur le rapporteur, chers collègues, il y a tant à dire sur le sujet qui nous rassemble cette semaine que l’on ne sait pas vraiment par où commencer.

Depuis le début de l’année, nous sommes confrontés à un déferlement d’annonces contradictoires en ce qui concerne l’avenir des départements, leurs compétences, la date des élections, voire le mode de scrutin et le territoire de chaque canton. Nous n’avons jamais connu une telle tempête, un tel flou. J’en suis à me demander, monsieur le ministre, si vous savez ce que vous faites, si vous croyez ce que vous dites, si vous savez où vous allez.

Derrière ce cafouillage, il y a le citoyen, son avenir, celui de centaines de milliers de fonctionnaires et, accessoirement, le travail de milliers d’élus qui se sont donnés avec passion pour leur pays.

Le Président de la République, au détour d’une annonce surprenante, a lâché un soir de printemps que « les départements ont vécu », cela après les avoir encensés trois mois auparavant…

Monsieur le ministre, je vais évoquer quelques points spécifiques et vous poser quelques questions.

Concernant la carte, chacun sait qu’elle a été imaginée au hasard d’un découpage, dans la précipitation et sur le coin d’une table. Ce n’est pas un scoop : le Premier ministre l’a reconnu cet après-midi.

Pensez-vous que l’on puisse, comme vous l’aviez prévu, diminuer le nombre de régions en supprimant parallèlement les départements, peut-être après 2020 ? Avez-vous trouvé une définition du département rural ? Quel sera en définitive leur nombre exact : dix, vingt, cinquante ou plus ? J’ai l’impression que l’on détermine un nombre qui servira à définir a posteriori ce qu’est la ruralité. Pourra-t-on organiser simplement les fusions entre départements ? Pourra-t-on faire jouer le droit d’option ?

Finalement, ne pensez-vous pas que, le flou le plus total prévalant, il serait plus sérieux de reprendre le problème à la base et de parler des compétences avant de pratiquer des découpages hasardeux ?

S’agissant de la date des élections, puis-je me permettre de revenir à notre échange du 4 juillet 2014 ? Lors de la présentation de mon amendement sur l’article 12, qui visait à mettre fin à la concomitance entre les élections départementales et les élections régionales, vous vous êtes montré très agacé et vous avez haussé le ton : j’ai eu le sentiment de me faire gronder par mon maître d’école ! §Comment pouvais-je oser mettre en doute vos certitudes quant à l’obligation d’organiser le même jour les élections départementales et les élections régionales ? Vous vous êtes appuyé sur le Conseil constitutionnel pour conforter votre démonstration et vous êtes exprimé en ces termes :

« Monsieur Doligé, nous sommes défavorables à cet amendement pour deux raisons. La première est que nous reprenons à notre compte les dernières décisions du Conseil constitutionnel, qui a estimé que la concomitance des élections départementales et régionales relevait d’une disposition d’intérêt général, puisqu’elle favorise la participation aux élections. La seconde est que nous présenterons un texte sur la répartition des compétences visant à mieux articuler celles-ci entre départements et régions ; cela justifie que les élections départementales et les élections régionales soient organisées au même moment. »

Ainsi, monsieur le ministre, vous avez balayé mes amendements avec force et même agacement, votre argument « massue » étant la référence incontournable au Conseil constitutionnel. Vous aviez d’ailleurs utilisé ces éléments dans l’étude préalable au projet de loi, la fameuse étude d’impact.

Vous avez fait voter la concomitance des élections en décembre 2015 par une Assemblée nationale qui vous était totalement soumise. Je ne vous ferai pas l’affront de lire, à ce moment de mon intervention, vos déclarations du 18 juillet 2014 devant l’Assemblée nationale.

Aujourd’hui, en utilisant les mêmes arguments qu’il y a trois mois, vous allez nous soutenir exactement le contraire. Le Conseil constitutionnel va encore vous servir d’alibi.

La question légitime que l’on est en droit de se poser est la suivante : le Gouvernement nous a-t-il caché la vérité sur la véritable nature des arguments constitutionnels ? Avons-nous en face de nous des amateurs qui ne maîtrisent pas le sujet ?

Nous avons parfois le sentiment qu’il y a du flou sur quelques sujets majeurs, comme l’état réel des finances publiques, l’écotaxe ou l’utilisation des autoroutes. Dès lors, pourquoi n’y aurait-il pas du flou dans votre argumentation concernant les dates des élections ?

Très sincèrement, je ne sais plus dans quelle catégorie classer le Gouvernement : parmi les dissimulateurs ou parmi les amateurs ? Peut-être allez-vous nous l’expliquer.

Comme vous m’aviez convaincu en juillet de votre grande sincérité, j’ai fini par analyser un à un vos arguments et suis arrivé à la même conclusion que vous voilà tout juste trois mois. Le maintien des élections départementales en mars 2015 est bien en contradiction avec certains principes constitutionnels. C’est ce que vous nous expliquiez à l’époque.

En premier lieu, nous devons en effet respecter l’exigence constitutionnelle de sincérité du suffrage, en termes d’intelligibilité, de clarté et de loyauté. Ce sont vos arguments.

En second lieu, la tenue d’élections départementales en mars serait contraire au corollaire du principe de sincérité du scrutin, à savoir le principe d’égalité de traitement des candidats à une élection.

Si vous le voulez, je peux vous donner d’autres arguments. Vous saurez certainement les démonter aujourd’hui, mais nous ne participons pas à un concours d’habileté.

Mais alors, comment pensez-vous résoudre les difficultés suivantes ?

Concernant la date d’ouverture des comptes de campagne, le code électoral impose au candidat d’inscrire, via son mandataire, les dépenses électorales effectuées un an avant les élections sur son compte de campagne. Quelle est votre solution ? M. le rapporteur nous exposera la sienne, mais j’aimerais savoir comment vous allez protéger les candidats.

Concernant le délicat problème de la communication en période électorale et l’utilisation des moyens de l’institution, les atermoiements autour de la date des élections sont de nature à faire peser un risque sur les actions de communication des collectivités territoriales. Comment y répondez-vous ?

Un autre écueil tient à l’impossibilité, pour un fonctionnaire de catégorie A, de se présenter s’il ne démissionne pas dans les six mois qui précèdent l’élection. Or il ne peut plus le faire si l’élection a lieu en mars 2015. Vous allez certainement résoudre également ce problème.

Enfin, pour ce qui est de l’avenir des départements, nous sommes dans le flou le plus complet, et les explications du Premier ministre ne rassurent pas. J’aimerais, pour les milliers de fonctionnaires qui s’interrogent sur leur devenir, que vous nous donniez de vraies perspectives.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

En moins d’un an, nous avons connu quatre dates de suppression de la collectivité départementale, s’étageant de 2015 à 2022. Je pourrais reprendre les déclarations du Président de la République et des membres du Gouvernement. En à peu près un an, nous avons connu des dates d’élection variables : mars 2014, mars 2015, décembre 2015 puis mars 2015. Quant aux compétences, elles varient au gré du temps et des rencontres…

Grande nouveauté dans le cadre de la simplification, il y aura des départements à trois vitesses. Comment pensez-vous, dans ces conditions, que nos personnels puissent avoir l’esprit serein ? Ils sont désorientés.

Connaissez-vous la définition du harcèlement moral ? Nous sommes au centre de cette problématique. Ce sont des agissements qui occasionnent une dégradation des conditions de travail et créent une situation anxiogène. Je vous invite à venir sur le terrain pour constater l’inquiétude des personnels et leur peur de l’avenir. Dans son intervention de cet après-midi, notre collègue Didier Guillaume a abordé le sujet.

L’inquiétude gagne aussi les élus : voyez les milliers de recours qu’ils ont déposés et la manière dont ils sont traités ; voyez ces maires qui aujourd’hui manifestent devant le Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Ils nous disent que, « avec la suppression des départements, les maires ruraux vont perdre un partenaire essentiel. Nous vivons un sentiment d’abandon, qui peut dégénérer en sentiment d’exclusion, » ajoutent-ils.

Avec toutes vos imprécisions, avec toutes vos hésitations, les citoyens, les élus, les fonctionnaires se sentent totalement exclus. Souhaitons que vous donniez, durant ce débat, des réponses à nos questions et des éclaircissements sur l’avenir que vous nous préparez. Peut-être finirez-vous par nous entendre et prêterez-vous attention à nos amendements ? Je suis un peu inquiet lorsque je constate que le Premier ministre remet en cause notre carte et que vous acquiescez à cela.

Puis-je rappeler, en conclusion, que le vrai sujet, pour notre société menacée de destruction, c’est celui de l’économie et de l’emploi ? Tout le temps que nous passons à élaborer la moins mauvaise carte possible et à limiter les dégâts pour nos territoires et les citoyens, nous ne le passons pas à simplifier, à innover, à clarifier et à favoriser notre économie.

Depuis que vous avez décidé de diviser par deux le nombre des régions, de supprimer les départements, de porter à 20 000 habitants le seuil minimal de population pour les communautés de communes, les investissements sont bloqués et l’emploi en souffre. Venez rencontrer les professionnels du secteur du bâtiment et des travaux publics.

La question qu’il fallait se poser est celle-ci : quelle organisation territoriale voulons-nous pour adapter notre pays aux enjeux de notre siècle ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

La question que vous vous êtes posée aura été la suivante : comment puis-je utiliser l’organisation territoriale pour faire croire au citoyen que je vais réformer et réaliser des économies rapidement ?

Cette réforme aurait pu être une chance pour notre pays si elle avait été prise à l’endroit. Finalement, comme le dirait Alain Juppé, avec de l’or, vous avez réussi à faire du plomb. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 29 octobre 2014, à quatorze heures trente et le soir :

1. Scrutin pour l’élection de six juges titulaires et de six juges suppléants à la Cour de justice de la République et scrutins pour l’élection de six membres titulaires et de six membres suppléants représentant la France à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

2. Suite de la deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (6, 2014-2015) ;

Rapport de M. François Noël Buffet, fait au nom de la commission spéciale (42, 2014-2015) ;

Texte de la commission (n° 43, 2014-2015).

En outre, à quatorze heures trente :

Désignation :

- des dix-huit sénateurs membres de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques ;

- des trente-six membres de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes ;

- des trente-six membres de la Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation ;

- des trente-six membres de la Délégation sénatoriale à la prospective ;

- et des vingt et un membres de la Délégation sénatoriale à l’outre-mer autres que les vingt et un sénateurs d’outre-mer, membres de droit.

À dix-sept heures :

Prestation de serment des juges élus à la Cour de justice de la République.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le mercredi 29 octobre 2014, à zéro heure trente.