La réunion est ouverte à 15 h 05.
Mes chers collègues, je vous présente à toutes et à tous mes voeux de santé, de bonheur, de prospérité et de réussite.
Nous allons examiner le rapport pour avis sur le projet de loi de programmation n° 19 (2016-2017), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.
Nous sommes saisis pour avis sur 29 des 116 articles du projet de loi de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, dont 25 nous ont été délégués au fond. L'outre-mer est donc, décidément, un sujet qui intéresse notre commission cette année, puisque je vous rappelle que nous y avons consacré notre déplacement d'étude d'avril dernier, sur la question de la situation sanitaire des populations de l'Océan Indien.
Je souhaiterais vous faire partager, à titre liminaire, quelques réflexions qui me sont venues, au cours des auditions que j'ai conduites, sur la notion d'égalité réelle. Quoique l'expression ait déjà été actée dans le titre d'un autre texte du quinquennat, la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, je vous avoue ici ma grande perplexité. Cela signifierait-il donc qu'il pourrait exister, a contrario, une égalité qui ne serait que de principe, sans se traduire dans les faits ? Il me semble que ce serait là reconnaître l'impuissance des textes que nous adoptons, ainsi que des politiques publiques qui sont conduites dans notre pays. Face pourtant aux défis majeurs auxquels doivent faire face plusieurs de nos territoires ultramarins - à commencer par Mayotte, dont la situation nous a particulièrement inquiétés -, je crois que nous devrions ici, sans nous attacher à des concepts qui ne sont bien souvent que d'affichage, privilégier une approche plus claire, plus humble peut-être, et sans doute davantage adaptée aux diverses situations de ces territoires.
Le projet de loi soumis à notre examen ne me semble malheureusement pas de nature à satisfaire à cette aspiration. Il est tout d'abord difficile d'en donner une vision d'ensemble, tant les sujets abordés sont divers - et, ce même si la ministre a tenu à nous préciser qu'il ne s'agissait en rien d'une loi « fourre-tout »... Cette diversité résulte en grande partie de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, qui a multiplié par sept le nombre d'articles initialement contenus dans le texte. Sur le volet social, il en résulte nécessairement des dispositions éparpillées, souvent adoptées dans la précipitation, qui ne sont parfois que de complaisance, et qui, bien entendu, ne sont assorties d'aucune étude d'impact. Peut-on, dans ces conditions, parler d'une loi de programmation - qui supposerait un travail rigoureux en amont, visant à définir les grands principes et objectifs autour desquels s'organisera le droit applicable à l'outre-mer en matière sociale au cours des prochaines décennies ? Je ne le crois pas, et je le regrette, car plusieurs de ces territoires de la République font face à de véritables situations d'urgence.
Je m'interroge également sur l'application de la notion d'égalité réelle à l'ensemble des outre-mer : il me semble en effet que l'objectif n'est pas ici d'aboutir à une uniformité complète entre ces territoires et l'hexagone, qui serait de toute façon chimérique, tant ils font face à des enjeux et des situations de développement contrastés. Je crois au contraire que nous devons prendre en compte ces différences, et définir, en tenant compte des spécificités de chaque territoire, une dynamique de convergence plutôt qu'un objectif d'égalité parfaite, en tout état de cause inatteignable.
J'attire enfin votre attention sur un sujet qui tient à coeur à notre commission, celui des demandes de rapport. Le projet de loi n'en comprend pas moins de 19. Considérant, comme nous le faisons habituellement, que la remise de rapport ne saurait constituer un substitut à l'action publique - ou à l'inaction publique, selon les cas -, je vous proposerai de supprimer systématiquement ces demandes.
Ces précisions liminaires étant faites, je vous propose d'en venir sans plus tarder au volet du texte relatif à la santé et à l'assurance maladie.
La première de ces dispositions, portée par l'article 3 quater, précise la portée et les modalités de l'exercice des prérogatives dont disposent les agents polynésiens et calédoniens compétents en matière de contrôles de santé publique. Il s'agit là d'une mesure certes très technique, mais qui apparaît cependant nécessaire et justifiée, et sur laquelle je ne vous proposerai d'apporter que quelques améliorations marginales.
L'article 10 quater prévoit que la déclinaison mahoraise de la stratégie nationale de santé (SNS) doit inclure un volet relatif à la mise en place progressive de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) à Mayotte. Il s'agit là de l'une des préconisations formulées par notre rapport sur la situation sanitaire des populations de l'Océan Indien, à laquelle je ne peux donc être que tout à fait favorable. Nous avions en effet constaté que le très faible développement de l'offre de soins libérale à Mayotte résulte en partie de l'organisation de la couverture maladie de la population, et singulièrement de l'absence de CMU-c. Je vous proposerai donc d'adopter cette disposition sans y apporter de modification, même si je regrette, d'une part, que la mesure proposée n'englobe pas également l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS) -alors même que les deux dispositifs poursuivent le même objectif et fonctionnent ensemble-, et, d'autre part, qu'il ne soit pas procédé à une mise en oeuvre plus directe de cette mesure. Le renvoi à la stratégie nationale de santé apparaît en effet pour le moins flou, d'autant qu'aucun élément de calendrier n'est précisé.
Je vous proposerai en revanche de supprimer deux dispositions qui me paraissent être purement d'affichage, et en tout état de cause parfaitement inutiles, dans la mesure où elles figurent d'ores et déjà dans la déclinaison ultramarine de la stratégie nationale de santé (SNS). Il s'agit de l'article 10 quinquies, qui entend prévoir que la SNS ultramarine comprend un volet relatif à la qualité des établissements de santé, ainsi que de l'article 10 sexies, qui affirme que le ministre en charge de la santé doit favoriser la négociation et la conclusion de protocoles de coopération entre professionnels de santé.
L'article 13 A, qui prévoit l'organisation d'une sensibilisation sur les questions nutritionnelles à l'intention des élèves du primaire des établissements scolaires ultramarins, me paraît relever de la même logique, dans la mesure où une telle sensibilisation est déjà prévue, pour l'ensemble du territoire national, par L. 312-17-3 du code de l'éducation. L'égalité, qu'elle soit réelle ou non, n'implique pas à mon sens de superposer des dispositifs lorsqu'une seule mesure peut utilement produire ses effets pour l'ensemble du territoire national. Je vous proposerai donc de supprimer cette mesure.
Le texte comporte deux articles relatifs à la consommation nocive d'alcool.
L'article 10 decies demande un rapport au Parlement sur le lien entre le prix et la consommation d'alcool, sans toutefois porter expressément sur les outre-mer. Or, ce lien est largement établi par de nombreuses études, sans qu'il soit besoin d'en ajouter une nouvelle. Ainsi que nous avons pu le constater lors de notre déplacement à La Réunion, la fiscalité spécifique applicable outre-mer, sous les effets cumulés de la TVA, de l'octroi de mer interne, des droits de consommation sur les alcools ou de la cotisation de sécurité sociale, permet un accès des populations, à des prix très bas, à des alcools au titrage alcoométrique élevé.
Il ne me semble pas justifié de maintenir une cotisation de sécurité sociale, instaurée expressément pour des motifs de santé publique, qui soit près de sept fois inférieure dans les outre-mer par rapport à l'hexagone (80 euros contre 555,68). C'est pourquoi je vous proposerai de supprimer la demande de rapport au profit de dispositions plus normatives prévoyant notamment une convergence progressive, sur dix ans, du taux de la cotisation entre les outre-mer et l'hexagone et une affectation à la Cnam du produit de cette taxe au profit d'actions conduites dans les Dom. Les droits d'accises étant également beaucoup plus bas, un différentiel important subsistera entre la taxation des rhums produits localement et les alcools importés.
L'article 13 B prévoit quant à lui la possibilité d'interdire la publicité pour les alcools à proximité des écoles. Il rejoint ainsi une proposition formulée par notre collègue Claire-Lise Campion pour laquelle les outre-mer constitueraient en quelque sorte un terrain d'expérimentation.
Le volet famille du projet de loi ne comprenait à l'origine qu'un seul article, relatif à l'extension à Mayotte du complément familial et de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH), ainsi qu'à l'accélération du mouvement de convergence du montant des allocations familiales. Si l'harmonisation permise par ces mesures demeure largement inachevée, elle s'inscrit dans le processus d'alignement progressif sur le droit commun du droit applicable à Mayotte.
Ce volet famille a été largement complété en séance publique, à l'initiative du Gouvernement et en réponse aux demandes formulées par nos collègues députés d'outre-mer.
L'élargissement des conditions d'affiliation à l'assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) en outre-mer, prévu par l'article 9 F, constitue un rapprochement bienvenu avec le droit commun, bien qu'il laisse subsister des différences notables entre les publics éligibles en métropole et en outre-mer.
L'article 9 ter prévoit d'harmoniser les montants et les plafonds du complément familial servi en outre-mer sur la base des paramètres applicables en métropole. Il s'agit là d'une revalorisation ciblée en direction des familles ultramarines, sans remise en cause de la différence de nature entre le complément familial métropolitain et le complément familial ultramarin - qui constituent en réalité deux prestations très nettement différentes.
Il est par ailleurs proposé, comme indiqué précédemment, d'étendre le complément familial à Mayotte, sur la base du droit actuel. Trois régimes coexisteront donc pour cette prestation : celui de Mayotte, celui des autres départements d'outre-mer, et celui de la métropole. Il me semble que cette complexité viendra encore alourdir la charge de travail de la Cnaf, et contribuera à renforcer l'illisibilité de ces différents régimes de prestations pour les allocataires - notamment pour ceux qui devraient déménager entre l'hexagone, La Réunion et Mayotte.
Ces articles ajoutés par l'Assemblée nationale laissent subsister un certain nombre de différences importantes entre la métropole et les outre-mer en matière de politique familiale. Ces différences sont au demeurant loin d'être toujours en défaveur des familles ultramarines : outre le complément familial que j'ai déjà évoqué, je note que les allocations familiales sont versées à partir du premier enfant dans les départements d'outre-mer, mais à partir du deuxième dans l'hexagone.
De ce point de vue, une véritable réflexion sur l'égalité réelle outre-mer supposerait de s'interroger sur l'ensemble de ces différences et sur leur justification plutôt que d'improviser, peut-être pour satisfaire des équilibres politiques, une série de mesures de revalorisations ciblées et d'extensions partielles sans étude d'impact préalable.
Néanmoins, ces mesures étant de nature à lutter contre la pauvreté des familles ultramarines, je vous proposerai de les adopter, sous réserve de modifications essentiellement rédactionnelles.
Le Gouvernement a par ailleurs introduit un article 9 bis supprimant la condition de versement préalable des cotisations pour le bénéfice des prestations familiales, qui s'applique en outre-mer aux travailleurs indépendants. Si cette suppression répond à une demande ancienne, elle intervient ici encore dans l'improvisation.
En effet, si cette condition peut être critiquée, elle s'explique par les difficultés particulières observées en matière de recouvrement, le taux d'impayés atteignant jusqu'à 50 % dans les territoires ultramarins. Or, le Gouvernement n'a présenté aucune mesure concrète de nature à améliorer cette situation.
Estimant que cette situation n'est pas tolérable, et que cet article 9 bis pourrait même aggraver le problème, je vous proposerai de le supprimer.
J'en viens à l'article 9 C, introduit par nos collègues députés, qui vise à étendre aux lycées l'aide à la restauration scolaire versée par les Caf aux établissements scolaires dans les départements d'outre-mer. Alors que le Gouvernement avait demandé, sans succès, la suppression de cet article en séance publique, la ministre nous a expliqué lors de son audition qu'elle le regardait comme une simple clarification du droit existant. Il est donc clair que le Gouvernement n'a aucunement l'intention d'augmenter l'enveloppe consacrée à cette prestation. Or, à budget constant, l'élargissement de cette aide aux lycéens conduirait à diluer le montant unitaire de l'aide accordée pour les autres enfants scolarisés, ce qui augmenterait mécaniquement le reste à charge pour les collectivités et les familles. Je vous proposerai donc de supprimer cet article, dont la portée juridique apparaît au demeurant incertaine.
Deux articles concernent enfin le logement.
L'article 10 octies A habilite le Gouvernement à étendre et adapter par ordonnance les aides au logement à Saint-Pierre-et-Miquelon. Attendue de longue date, cette extension se trouvait retardée par une incertitude juridique, qu'un avis récent du Conseil d'État a cependant permis de lever.
À l'inverse, l'article 9 A, relatif à l'extension de la garantie Visale aux locataires du parc social outre-mer, et adopté contre l'avis du Gouvernement, me semble poser plusieurs problèmes. Outre qu'il fait intervenir la loi dans un dispositif conventionnel sans concertation préalable avec les acteurs, il est à craindre qu'il n'aboutisse à déresponsabiliser les bailleurs sociaux, dont la mission est justement d'assumer les risques portés par les locataires modestes. Je vous proposerai donc de supprimer cet article.
Trois articles sont ensuite relatifs à l'assurance vieillesse. L'article 10, relatif à Mayotte, est le plus important d'entre eux ; il vise principalement à revaloriser les petites retraites dans ce département en rapprochant le dispositif de pension minimale qui y a cours du minimum contributif dont bénéficient l'ensemble des retraités de notre pays, dans l'objectif de valoriser les périodes d'activité. Il fixe également des règles de plafonnement des retraites des agents publics titulaires, dans un objectif d'équité de traitement avec leurs homologues hexagonaux. Ces dispositions, qui figuraient dans le texte initial, ne me paraissent pas poser de problème particulier.
Je vous proposerai en revanche de supprimer l'article 9 B, qui entend prévoir, alors même que c'est déjà le cas en pratique, que le Comité d'orientation des retraites (Cor) et le comité de suivi des retraites doivent prendre en compte les outre-mer dans leur réflexion sur les inégalités de pensions entre les femmes et les hommes. Il s'agit donc, selon moi, d'une disposition inutile, voire contreproductive.
Enfin, l'article 10 bis ratifie notamment deux ordonnances relatives aux régimes d'assurance vieillesse de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte.
J'en termine, sur les articles consacrés à la protection sociale, par les mesures relatives aux dispositifs de solidarité. Les retouches apportées par nos collègues de l'Assemblée nationale sur ce point illustrent l'équilibre délicat que le législateur doit atteindre entre uniformité de la loi et spécificités ultramarines, particulièrement sensibles en la matière.
L'article 10 nonies du texte qui nous est transmis propose notamment d'élever le seuil de récupération sur succession de l'allocation de solidarité pour les personnes âgées (Aspa) à un niveau presque trois fois supérieur à celui défini dans l'hexagone. En dépit du caractère louable de cette intention, il me semble qu'une telle dérogation instaurerait un précédent dangereux, qui voudrait qu'en fonction des spécificités foncières, sociales ou économiques d'un territoire, les modalités de versement d'une prestation nationale puissent être modulées. Je vous proposerai donc sa suppression.
Venons-en enfin au volet du texte relatif au droit du travail et à la formation professionnelle.
L'article 9 D définit les critères que doit remplir une organisation patronale ou un syndicat de salariés pour être déclaré représentatif à l'échelle d'un territoire ultramarin. Je rappelle que le cadre législatif patiemment bâti depuis 2008 ne reconnaît actuellement que quatre niveaux de représentativité pour les syndicats : l'entreprise, le groupe, la branche et l'échelon national. L'objectif de cet article est de permettre aux partenaires sociaux représentatifs dans une collectivité ultramarine de négocier et conclure des accords locaux en cas d'absence de couverture conventionnelle.
Je partage naturellement cet objectif ; je regrette cependant que cet article n'ait fait l'objet d'aucune concertation préalable avec les partenaires sociaux représentatifs au niveau national, en contradiction avec l'esprit de l'article L. 1 du code du travail, alors qu'il modifie en profondeur les règles de représentativité. Alors, en outre, qu'il est largement satisfait par un article de la loi « Travail », il risque d'ouvrir la boîte de Pandore en incitant différents syndicats locaux à demander l'extension de ces dispositions à d'autres territoires. C'est pourquoi je vous proposerai sa suppression.
L'article 10 septies rend obligatoire, à titre expérimental pendant trois ans, la création d'une commission sur la pluriactivité dans tous les comités régionaux de l'emploi et de la formation et de l'orientation professionnelles (Crefop) présents dans les régions ultramarines. Cette commission sera chargée d'établir un diagnostic sur les travailleurs pluriactifs et d'élaborer une stratégie pour sécuriser leurs parcours professionnels. Je ne m'oppose pas à cet article, introduit à l'initiative du Gouvernement, mais je souligne qu'il ne permettra pas à lui seul d'améliorer substantiellement la situation des pluriactifs.
Les questions de formation professionnelle et d'accès à la qualification sont abordées par quatre articles techniques et de portée limitée, qui, pour trois d'entre eux, engagent des expérimentations, et dont un seul figurait dans le projet de loi initial.
Il s'agit tout d'abord de l'article 13, qui vise à faciliter l'accès à la valorisation des acquis de l'expérience (VAE) outre-mer en supprimant la durée minimale d'expérience d'un an requise au profit des personnes engageant un processus de sortie de l'économie informelle et de création d'entreprise avec l'aide d'une structure de microcrédit comme l'ADIE. Notre commission s'était opposée, lors de l'examen de la loi « Travail », à l'abaissement de trois ans à un an de cette durée, qui avait suscité de fortes craintes de dévalorisation de cette voie d'acquisition d'un diplôme professionnel. Il me semble toutefois, au vu du public très limité concerné par cette mesure et de son caractère expérimental, qu'elle peut être ici conservée.
Il en va de même s'agissant de l'article 10 octies, inséré en commission à l'initiative du Gouvernement. Il vise à avancer de quelques mois l'entrée en vigueur du compte personnel de formation (CPF) pour les travailleurs indépendants et les non-salariés, fixée par la loi « Travail » au 1er janvier 2018. Si cette mesure ne concerne pas que les outre-mer mais bien toute la France, elle répond à une demande de certains organismes chargés de le gérer, qui seraient prêts dès aujourd'hui.
Je vous propose en revanche de supprimer deux articles insérés par l'Assemblée nationale. L'article 13 ter, tout d'abord, vise à permettre aux entreprises, à titre expérimental, d'imputer leurs dépenses de tutorat sur leur plan de formation. Il faut savoir que ce plan de formation a un objectif : maintenir l'employabilité des salariés et les adapter aux évolutions de leur poste de travail. D'autres mécanismes de prise en charge des dépenses de tutorat existent déjà, et il ne faut pas détourner les ressources consacrées au plan de formation alors que les salariés ultramarins ont des besoins de qualification très importants.
L'article 13 quater, enfin, a suscité une grande perplexité chez les partenaires sociaux que j'ai auditionnés. Il crée, dans un cadre expérimental, un contrat de professionnalisation plus court dans les départements d'outre-mer, qui serait précédé d'une préparation opérationnelle à l'emploi (POE) réalisée dans l'hexagone. Il devrait toutefois être conclu préalablement à cette POE. D'une grande complexité, ce mécanisme vient remettre en cause l'objectif central du contrat de professionnalisation : l'accès à la qualification. Il est difficile de croire qu'en six mois la même formation qu'en douze mois pourra être délivrée, même si une POE viendrait d'abord rappeler les fondamentaux et fournir une partie de la formation théorique. Ce n'est pas de cette façon que l'insuffisance de l'offre de formation outre-mer pourra être résorbée.
Au total, c'est un volet social certes allégé, mais plus normatif, plus cohérent, et moins soucieux de sacrifier aux seules exigences de l'affichage politique, que je vous propose d'adopter sur ce texte.
Face à l'amaigrissement spectaculaire que notre rapporteur pour avis nous propose de soutenir et de voter, le groupe socialiste et républicain s'abstiendra. Il y a beaucoup de choses à revoir et à dire mais nous en débattrons en séance publique.
Je voudrais revenir sur la suppression de l'article 9 B, relatif aux travaux du Cor, proposée par notre rapporteur et à laquelle je ne suis pas favorable.
Le Cor, au sein duquel siègent un certain nombre de nos collègues, procède à des analyses concernant les publics de l'hexagone mais aussi de manière plus large, même si cela n'est pas toujours bien précisé. Cet article ne peut qu'encourager le Cor à bien stratifier et diversifier ses travaux.
Je remercie notre collègue Chantal Deseyne pour le rapport fouillé et documenté qu'elle présente et le sérieux du travail fourni.
À l'instar du groupe socialiste et républicain - une fois n'est pas coutume ! -, nous nous abstiendrons. En effet, nous regrettons la suppression pure et simple de nombreux articles. Des dispositions pourraient être améliorées plutôt que d'être supprimées. Nous reviendrons de manière plus approfondie sur ces questions lors du débat en séance publique, d'autant que des pistes sont ouvertes. Les propositions qui nous sont faites ne sont pas à la mesure de ce que nous attendions.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 3 quater
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 3 quater.
Article 3 nonies
L'amendement COM-203 vise à supprimer cet article, qui prévoit la demande d'un rapport. Plusieurs études ont déjà permis de mettre en évidence la gravité et le caractère d'urgence de la situation sanitaire et sociale outre-mer. Multiplier les rapports ne présente pas beaucoup d'intérêt.
L'amendement COM-203 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 3 nonies.
Article additionnel avant l'article 9 A
L'amendement COM-75, auquel je suis favorable, est présenté par le Gouvernement.
Avant le 1er janvier 2017, les employeurs des fonctions publiques territoriale et hospitalière des départements et régions d'outre-mer assuraient directement le versement des prestations familiales à leurs agents et payaient aux CAF la différence entre les prestations effectivement versées et les cotisations théoriquement dues.
Depuis le 1er janvier et en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, les employeurs publics des collectivités d'outre-mer cotisent selon le droit commun et les prestations sont versées par les CAF. Le mécanisme de compensation s'effectuant avec un décalage de deux ans, le Gouvernement demande que les années 2015 et 2016 soient blanches, sans rattrapage de cotisation.
L'amendement COM-75 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
Article 9 A
L'article prévoit d'étendre le dispositif de garantie des loyers Visale aux locataires du parc social dans les départements d'outre-mer. Or cette mesure ne se justifie pas car d'autres dispositifs, comme la garantie Loca-pass, existent déjà. C'est pourquoi l'amendement COM-186 vise à supprimer cet article.
L'amendement COM-186 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 9 A.
Article additionnel après l'article 9 A
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
Article 9 B
Les différentes publications du Cor intègrent déjà des données sur les outre-mer lorsqu'elles sont disponibles. Cet organisme mène en effet une réflexion la plus large possible sur le système des retraites en France ainsi que sur les inégalités de pension entre hommes et femmes.
L'amendement COM-201 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 9 B.
Article 9 C
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 9 C.
Article additionnel après l'article 9 C
Je suis favorable à l'amendement COM-74 du Gouvernement visant à ratifier l'ordonnance relative à la garantie des salaires à Mayotte. Cette ordonnance transpose à Mayotte les règles en vigueur dans l'hexagone, notamment l'obligation pour tout employeur de s'assurer contre le risque de non-paiement des salaires en cas de procédure de sauvegarde, de liquidation ou de redressement judiciaires.
L'amendement COM-74 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
Article 9 D
L'amendement COM-188 vise à supprimer cet article relatif à la représentativité des partenaires sociaux dans les collectivités ultramarines. Outre le fait qu'aucune concertation préalable n'a été organisée, l'article 26 de la loi « Travail » permet déjà d'associer les partenaires sociaux ultramarins habilités et reconnus par leurs pairs.
L'amendement COM-188 est adopté ; l'amendement COM-157 devient sans objet.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 9 D.
Article 9 E
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 9 E.
Article additionnel après l'article 9 E
L'amendement COM-51 concerne l'application à Mayotte de la réduction forfaitaire de cotisations par heure travaillée pour les particuliers employeurs.
Lors de l'examen du PLFSS pour 2017, le Sénat a adopté cette extension à Mayotte. L'amendement adopté ne comportait toutefois pas de montant. La réduction est de 3,70 euros dans les Dom mais les cotisations sociales ne sont pas les même à Mayotte où elles sont beaucoup moins élevées. Il est donc suggéré de renvoyer au pouvoir règlementaire le soin de définir le montant de la réduction forfaitaire en fonction des taux de cotisations effectivement applicables.
L'amendement COM-51 est adopté, sous réserve de sa rectification.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
L'amendement COM-24 applique le régime micro-social à Mayotte. Demande de retrait ou avis défavorable.
L'ordonnance du 22 décembre 2011 relative à l'évolution de la sécurité sociale à Mayotte, dans le cadre de la départementalisation, prévoit une convergence progressive des taux de cotisations jusqu'en 2036. Le taux de l'équivalent de la CSG y est actuellement de 2 % ; les travailleurs indépendants sont exonérés de cotisations pendant deux ans. Il me semble trop tôt pour transposer le régime micro-social alors que des dispositions spécifiques, plus avantageuses, s'appliquent toujours. De surcroît, il n'est pas certain que l'organisme de recouvrement local soit prêt à appliquer ce dispositif dès la promulgation de la loi.
Madame le rapporteur, vous nous dites que le régime actuel est plus avantageux. C'est une bonne raison pour demander le retrait de cet amendement. Mais vous nous dites aussi que la loi serait d'application directe. Or on peut définir des modalités par décret ou imposer un délai. Le groupe socialiste s'abstient sur cet amendement qu'il faut étudier.
L'amendement COM-24 est rejeté.
Article 9 F
L'amendement rédactionnel COM-189 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 9 F ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 9 F
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
Article 9
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 9 ainsi modifié.
Article 9 bis
Mon amendement COM-192 supprime cet article. Dans les départements d'outre-mer, les travailleurs indépendants doivent justifier du paiement préalable de leurs cotisations pour bénéficier des prestations familiales. La suppression de cette condition, prévue par cet article inséré en séance publique par l'Assemblée nationale sans étude d'impact préalable, doit s'accompagner d'un renforcement du recouvrement, le taux d'impayés atteignant 50 %. Or le Gouvernement n'a proposé aucune mesure en ce sens, ce qui fait craindre une aggravation des difficultés de recouvrement dans les collectivités concernées.
L'amendement COM-192 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 9 bis.
Article 9 ter
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 9 ter ainsi modifié.
Articles additionnels après l'article 9 ter
Avis favorable à l'amendement COM-76 du Gouvernement qui sécurise l'extension à Mayotte de deux prestations sociales versées à des adultes lourdement handicapés. Jusqu'à présent, les dispositifs nationaux n'étaient extensibles à Mayotte qu'à la condition de relever d'avantages de sécurité sociale, ce qui ne s'appliquait ni au complément de ressources ni à la majoration pour la vie autonome.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
L'amendement COM-77 n'a pas de lien direct avec les dispositions d'un projet de loi relatif aux territoires d'outre-mer. Il paraît donc irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
La commission proposera à la commission des lois de déclarer l'amendement COM-77 irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
Article additionnel après l'article 10
L'amendement COM-70 actualise, pour leur application en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, plusieurs dispositions du code de la santé publique relatives à la bioéthique. Si je suis a priori favorable à ces dispositions principalement techniques, je m'interroge sur la non-application à la Nouvelle-Calédonie du principe d'opposition au prélèvement d'éléments du corps humain et à la collecte de ses produits par les titulaires de l'autorité parentale ou le tuteur de mineurs ou de majeurs sous tutelle.
L'amendement COM-70 est rejeté.
L'amendement COM-71 porte sur l'application du régime de droit encadrant la recherche biomédicale à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy, à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Si je n'ai pas d'opposition de principe à ces dispositions principalement techniques, je précise que cet amendement ne nous a été transmis qu'hier. Or il apporte des modifications très nombreuses que nous n'avons pas pu examiner en détail. Nous préférons pouvoir interroger le Gouvernement lors de la séance publique.
L'amendement COM-71 est rejeté.
Article 10 bis
L'amendement rédactionnel COM-210 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 10 bis ainsi modifié.
Article 10 quinquies
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 10 quinquies.
Article 10 sexies
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 10 sexies.
Article 10 septies A
Mon amendement COM-206 supprime cet article, puisque le chiffrage du coût associé à la prise en charge des frais de transport des parents d'enfants soumis à une évacuation sanitaire peut être facilement effectué par la direction de la sécurité sociale, dans un délai bien inférieur à 18 mois.
J'y suis défavorable car notre commission travaillera sur le transport héliporté. Il est important d'approfondir cette question.
La proposition de loi de M. Bertrand sur le transport sanitaire héliporté pose beaucoup de questions.
L'amendement COM-206 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 10 septies A.
Article 10 nonies
Mon amendement COM-200 supprime cet article sur la récupération de l'allocation de solidarité pour personnes âgées (Aspa), qui dispose que le seuil de récupération soit porté à 100 000 euros en outre-mer, contre 39 000 euros dans l'hexagone. Cette dérogation instaurerait un précédent dangereux, selon lequel les modalités de versement d'une prestation nationale pourraient être modulées en fonction des spécificités foncières, sociales ou économiques d'un territoire.
L'amendement COM-200 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 10 nonies.
Article 10 decies
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 10 decies.
Article additionnel après l'article 10 decies
Mon amendement COM-195 prévoit la convergence sur dix ans du tarif de la cotisation sociale applicable outre-mer. À partir de 2028, le taux de droit commun pour la cotisation de sécurité sociale s'appliquera sur l'ensemble du territoire national. Cet amendement affecte également le surplus du produit de la cotisation à la caisse nationale d'assurance maladie, afin de renforcer les actions de prévention et de prise en charge des pathologies outre-mer qu'elle finance.
C'est une version retravaillée d'un amendement qui avait soulevé des difficultés lors de l'examen du dernier PLFSS.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
Article 10 undecies
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 10 undecies.
Articles additionnels après l'article 10 undecies
Les amendements identiques COM-27 et COM-38, qui portent sur des dispositions relatives au régime d'affiliation, de cotisations et aux prérogatives de la caisse des Français de l'étranger, ne présentent aucun lien, même indirect, avec le texte transmis. Je propose que nous suggérions à la commission des lois, saisie au fond, de les déclarer irrecevables en application de l'article 45 de la Constitution.
L'amendement COM-68 étend à trois territoires ultra-marins le bénéfice du fonds d'appui aux politiques d'insertion instauré par la loi de finances pour 2017. Les ressources de ce fonds, doté de 50 millions d'euros en 2017, ne sont pas pérennisées car elles seront prélevées sur les réserves de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), dont notre rapporteur pour le médico-social a montré qu'elles disparaîtraient en 2018. Rendre trois territoires ultramarins éligibles à un dispositif dont l'abondement financier est plus qu'incertain n'est pas responsable. Avis défavorable.
L'amendement COM-68 est rejeté.
L'amendement COM-69 du Gouvernement étend à Mayotte le bénéfice du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion. Avis favorable.
Le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion est doté de 500 millions d'euros répartis entre les départements. Cela signifie que cette même enveloppe devrait englober d'autres collectivités territoriales ?
Cette question doit être examinée dans le cadre de la loi de finances, et non dans une loi ordinaire. Les fonds ne sont pas automatiquement reconductibles.
Cet amendement ne traite pas de la répartition du montant du fonds, mais ajoute simplement Mayotte, qui est un département, parmi ses bénéficiaires.
L'enveloppe sera toujours de 500 millions d'euros et Mayotte pourra y prétendre.
Ce n'est pas un problème de solidarité, c'est un problème strictement législatif. Il faudra reprendre ce que nous avons voté dans le projet de loi de finances.
J'entends bien les arguments de mon collègue mais il est dommage que nous n'ayons pas pu discuter du projet de loi de finances au Sénat ! C'est un sujet que nous aurions peut-être pu évoquer.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
Article 13 A
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 13 A.
Article 13 B
L'amendement rédactionnel COM-197 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois d'adopter l'article 13 B ainsi modifié.
Article 13 ter
Mon amendement COM-198 supprime cet article, qui prévoit d'expérimenter la prise en charge des dépenses de tutorat des entreprises par leur plan de formation, sans tenir compte de l'objet de ce dernier.
Le plan de formation, défini par l'employeur, doit assurer le maintien de l'employabilité de ses salariés et leur adaptation aux évolutions de leur poste de travail. Le tutorat ne correspond pas à cette définition. De plus, des possibilités de prise en charge financière existent déjà.
Cette expérimentation revient à détourner des ressources du plan de formation au profit de pratiques non qualifiantes qui ne correspondent pas aux postes de travail des salariés, alors que les lacunes de la formation professionnelle des salariés ultramarins sont connues et ses ressources financières limitées.
L'amendement COM-198 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 13 ter.
Article 13 quater
Mon amendement COM-199 supprime cet article qui abaisse, dans certaines collectivités régies par l'article 73 de la Constitution et sous conditions, de douze à six mois la durée minimale des contrats de professionnalisation qui peuvent prendre la suite d'une préparation opérationnelle à l'emploi. Cette disposition risque ainsi de dévaloriser cet outil de formation et de diminuer la qualité des formations offertes.
L'amendement COM-199 est adopté.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 13 quater.
Articles additionnels après l'article 30 quinquies
La commission proposera à la commission des lois d'adopter un article additionnel ainsi rédigé.
L'amendement COM-148 poursuit le même objectif que le mien. Néanmoins, les modifications rédactionnelles proposées ne me paraissent pas entièrement satisfaisantes. Je vous propose donc de nous en tenir à la rédaction résultant de mon amendement COM-209, et de continuer à travailler à son amélioration en vue de la séance publique, car il est vrai que cet article soulève quelques difficultés techniques. Avis défavorable.
L'amendement COM-148 est rejeté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
La réunion est close à 16 h 10.