Après la réunion qui s'est tenue hier, selon la procédure classique d'adoption du texte de commission, nous tenons ce jeudi notre seconde réunion dans un format qui est celui de la nouvelle procédure de « législation en commission ». Celle-ci figure aux articles 47 ter et suivants de notre Règlement ; elle résulte d'une résolution adoptée le 14 décembre 2017 par notre Assemblée.
La commission des lois et la commission des affaires sociales avaient déjà mis en oeuvre une procédure d'examen en commission expérimentale, mais aujourd'hui notre commission spéciale a la responsabilité d'appliquer pour la première fois le nouveau dispositif. Sur les articles concernés, le droit d'amendement s'exerce uniquement en commission, la séance plénière étant centrée sur les explications de vote et le vote sur l'ensemble du texte adopté par la commission.
Nous faisons aujourd'hui une application partielle de cette procédure. Elle concerne uniquement certains articles du projet de loi, dont la liste a été validée par la Conférence des Présidents : il s'agit des articles 15 ter, 17, 17 bis A, 17 bis B, 22, 22 bis, 27, 37, 41, 42, 45 et 46. Nous n'aurons pas de discussion générale avant de passer à l'examen des articles puisqu'une telle discussion a eu lieu hier lors de notre première réunion.
J'indique que notre réunion est ouverte à tous les sénateurs et au public, et retransmise en direct comme la séance publique dans l'hémicycle. Elle se tient en présence du Gouvernement, représenté par le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Je précise également que si tous les sénateurs présents peuvent intervenir lors de la discussion, seuls les membres de la commission spéciale sont appelés à voter.
À l'issue de l'examen des articles, je suspendrai la séance un bref instant pour revenir à la configuration traditionnelle d'une réunion de commission, afin que les membres de la commission spéciale votent sur l'ensemble du texte soumis à la procédure de législation en commission. J'aurai alors le regret de demander au ministre, à nos collègues non membres de la commission et au public de quitter la salle, et aux caméras d'arrêter la retransmission.
Certes, il y a là beaucoup de formalisme mais il est important de respecter toutes les règles pour assurer la crédibilité de la nouvelle procédure. Ceci ne nous empêchera pas de dresser plus tard les leçons de cette première expérience.
Article 15 ter
L'article 15 ter instaure, à titre expérimental, un dépôt unique dématérialisé ainsi qu'un référent unique pour les demandes de subventions au titre de la politique de la ville. Aujourd'hui, les modalités concrètes de dépôt et d'instruction des demandes relèvent d'un formulaire Cerfa ; autrement dit, on élève ici au niveau législatif des sujets traités par un simple formulaire administratif...
En matière de dématérialisation, cet article acterait en réalité ce qui existe déjà, ou ce qui s'apprête à exister : les demandes de subventions adressées aux services de l'État sont déjà dématérialisées à 90 % et le seront à 100 % dès cette année, tandis qu'un outil numérique d'instruction partagée par les différents co-financeurs des contrats de ville (services déconcentrés et services des opérateurs de l'État, services des collectivités territoriales) sera déployé à compter du 1er septembre 2018 et pourra traiter l'ensemble des demandes de subventions sur l'exercice 2019.
Quant à la désignation d'un référent unique, elle est déjà possible aujourd'hui, si les signataires des contrats de ville la décident conjointement.
Dès lors, et comme vos services nous l'ont confirmé, monsieur le ministre, cet article n'aurait d'autre effet juridique que de pouvoir contraindre des collectivités signataires des contrats de ville d'instaurer un référent unique, qui le cas échéant pourrait être mis à leur charge sans qu'une compensation ne soit, elle, obligatoirement prévue, et alors que cette instruction relève de leurs compétences. Les services ont voulu nous rassurer en précisant que les collectivités concernées devraient, « en pratique », être volontaires pour participer à l'expérimentation mais rien dans la rédaction actuelle ne le garantit.
L'amendement COM-181 que je vous propose entend lever ce risque en prévoyant explicitement l'accord des collectivités concernées. De fait, il viderait dans le même temps cet article de toute portée normative et l'on pourrait donc aussi s'interroger sur une suppression pure et simple. J'ai cependant considéré, d'une part, qu'il n'est pas inutile que la loi impulse, par le signal donné, la mise en place de référents uniques et, d'autre part et surtout, que les collectivités à qui l'on chercherait à imposer une telle expérimentation pourront se prévaloir d'une disposition législative contraire dans leur dialogue avec l'État...
La précision est utile : avis favorable.
L'amendement COM-181 est adopté.
L'amendement COM-235 porte de deux à trois ans la durée de l'expérimentation, afin que tous les effets du référent unique puissent être mesurés. Il prévoit aussi que l'évaluation sera transmise au Parlement au plus tard six mois avant le terme de la période.
L'amendement COM-235, accepté par le Gouvernement, est adopté. L'article 15 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 17
L'amendement COM-70 inscrit dans la loi l'exigence d'impartialité et de confidentialité qui s'impose au médiateur et supprime le renvoi à un décret qui risquerait d'imposer des contraintes excessives et retarderait la mise en oeuvre de la médiation.
L'amendement COM-70, accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article instaure un système de médiation entre les employeurs et les Urssaf. Contrairement à ce que les articles 17 bis A et 17 bis B relatifs prévoient, respectivement, pour le régime agricole et les branche familles et vieillesse, il n'est pas question ici de médiateur national. Nous ne voulons pas créer une instance d'appel par rapport aux recommandations des médiateurs des Urssaf, mais la médiation au sein de la branche recouvrement doit pourtant faire l'objet d'une évaluation.
L'amendement COM-71 confie au directeur de l'Acoss le soin de dresser chaque année un bilan de la médiation et de formuler des propositions d'évolution législative ou règlementaire.
Effectivement, seuls sont prévus des médiateurs locaux. Confier le rapport national à un médiateur national garantirait une autonomie d'évaluation et de recommandation. L'amendement ne va pas jusque-là, puisqu'il confie ce rapport au directeur de l'Acoss, qui est responsable du fonctionnement du réseau des Urssaf. Il a le mérite cependant de prévoir au moins une évaluation : sagesse...
Je suis favorable à l'amendement, la médiation est un mécanisme supplémentaire bienvenu.
Nous ne voulions pas ajouter un médiateur supplémentaire, une instance d'appel. Le directeur de l'Acoss peut se charger de ce récolement. Mais nous pourrons en reparler dans le cadre de la commission mixte paritaire...
Nous avons le souci de rechercher une cohérence avec les autres caisses, qui ont un médiateur national, et je ne doute pas qu'un accord sera trouvé sur ce point.
L'amendement COM-71 est adopté. L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 17 bis A
L'amendement COM-7 précise que la procédure de médiation suspend les délais de recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale et qu'un recours devant ce tribunal met fin à la procédure de médiation.
C'est une précision qui a son importance. Vous mettez en cohérence les modalités de saisine du médiateur pour la Mutualité sociale agricole (MSA) et pour le régime général. Cependant l'intervention du médiateur après celle de la commission des recours amiables pose des problèmes juridiques et se heurte à la diversité des pratiques. Nous avons besoin d'un peu de temps pour expertiser tout cela : sagesse par conséquent sur l'amendement COM-7 ainsi que sur l'amendement COM-114 à l'article suivant. Nous viserons une harmonisation afin que le système soit compréhensible pour les demandeurs.
Dans le régime agricole, il fonctionne bien. Nous ne voulons pas le perturber par des ajouts intempestifs, simplement le clarifier.
L'amendement COM-7 est adopté. L'article 17 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 17 bis B
L'amendement COM-236 précise les missions du médiateur des branches famille et vieillesse créé par l'article 17 bis B. En cohérence avec l'article 17 bis A relatif au régime agricole, il est ainsi prévu que le médiateur peut proposer des modifications règlementaires et législatives et que son rapport annuel est présenté au conseil d'administration de la branche et transmis au Défenseur des droits. Mais pourquoi préciser qu'il formule des recommandations « notamment » lorsque les réclamations qu'il reçoit « posent des difficultés particulières » ? Cette rédaction nuit à l'intelligibilité de la loi et introduit une ambiguïté quant à la recevabilité des demandes de médiation.
Cet alignement de rédaction est cohérent et bienvenu : favorable.
L'amendement COM-236 est adopté.
Il convient de préciser que la médiation est incompatible avec un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale mais peut intervenir après une décision de la commission de recours amiable. L'amendement COM-114 y pourvoit.
Comme je l'ai dit précédemment, sagesse, dans l'attente d'y travailler ensemble.
L'amendement COM-114 est adopté. L'article 17 bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 22
L'amendement COM-215 améliore la rédaction des alinéas 7 et 8 en évitant un renvoi au code des relations entre le public et l'administration, qui ne s'applique ni à La Poste ni aux établissements publics à caractère industriel et commercial. Il étend le champ d'application du dispositif aux agents contractuels de droit public de ces organismes. Accessoirement, il corrige une référence erronée.
Ces clarifications sont utiles, avis favorable.
L'amendement COM-215 est adopté. L'article 22 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 22 bis
L'amendement COM-5 est simplement rédactionnel. Je voudrais toutefois dire quelques mots sur cet article 22 bis qui prévoit de décaler de deux ans, c'est à dire jusqu'en 2022, le délai dont disposent les employeurs publics pour mettre en oeuvre la déclaration sociale nominative (DSN). Celle-ci a commencé à entrer en vigueur dès 2015 pour les entreprises, et elle est désormais obligatoire pour tous les employeurs privés. Les employeurs publics bénéficiaient déjà d'un délai supplémentaire, jusqu'en 2020. Je ne suis pas favorable à ce que l'État s'exonère des obligations qu'il impose au secteur privé. Au demeurant, quel rapport avec le droit à l'erreur ou la société de confiance ?
Néanmoins, les outils informatiques ne sont pas prêts - ce qui est symptomatique des difficultés de l'État dans la conduite de ses chantiers informatiques... Un certain nombre d'entreprises, qui sont bien loin de disposer des mêmes moyens que l'État, se trouvent dans la même situation et n'ont pas encore mis en place la DSN. Cela concerne environ 30 000 petites entreprises. J'espère, monsieur le ministre, que des instructions seront données afin qu'elles ne soient pas sanctionnées...
Instruction a été donnée de ne pas sanctionner les petites entreprises, qui n'ont pas les moyens des grandes pour respecter ces prescriptions. Les dispositions de l'article visent aussi à accompagner la mise en place du prélèvement à la source. Avis favorable à votre amendement, sous réserve de l'adoption du sous-amendement COM-257 qui va encore plus loin, avec trois précisions. Le report à 2022 s'applique aux seuls régimes spéciaux et non à tous les employeurs publics ; les échéances pourront être différentes selon les employeurs publics, et non seulement selon la nature des données de la DSN ; enfin, nous insérons la référence à la version actuellement en vigueur de l'article L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale.
Sur le fond, je comprends les exigences posées à l'égard du secteur privé, mais pourquoi laisser aux collectivités deux années de plus, alors qu'elles savent faire ce qui est demandé ? Je voterai le sous-amendement et l'amendement mais je trouve dommage que l'on n'ait pas choisi une autre démarche.
La généralisation en 2017 dans le secteur privé avait été préparée de longue date. Il n'en va pas de même pour le secteur public. Par ailleurs, je le répète, il s'agit bien des employeurs publics des régimes spéciaux, et non de tous les employeurs publics.
Je compte sur la bienveillance des services, d'autant que les entreprises ne pourront être prêtes pour la retenue à la source si les éditeurs de logiciels ne le sont pas...
Le Gouvernement travaille avec les éditeurs de logiciels. J'ai participé à l'assemblée générale de la Société des éditeurs et nos services sont mobilisés pour les accompagner dans leur travail. Les modifications se font dans le cadre de chartes et de conventions entre l'État, les éditeurs et les organismes concernés par le prélèvement à la source.
Ce qui m'étonne, c'est ce parfum de totale improvisation. On prend une décision, puis on la reporte allégrement. À quoi bon faire des lois si on ne les applique pas ?
Pour répondre à madame le rapporteur, nous avons demandé en effet que les tarifs d'adaptation des logiciels à la retenue à la source soient chaque fois que possible inclus dans les tarifs de maintenance, dès lors que les clients sont équipés de logiciels déjà adaptés à la DSN ; et ce pour éviter qu'ils ne subissent deux fois les frais de modification.
Le sous-amendement COM-257 est adopté.L'amendement COM-5, ainsi sous-amendé, est adopté. L'article 22 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 27
L'article 27 est adopté sans modification.
Article 37
La nouvelle commission régionale d'élaboration des plans régionaux de gestion des déchets procèdera à l'évaluation des plans départementaux de gestion de déchets en lieu et place des commissions départementales qui les ont élaborés. Autrement dit, on demande aux régions d'apprécier la politique des départements. Bien sûr, certains rêvent de voir ces derniers disparaître. Quoi qu'il en soit, se profile ici la tutelle d'un niveau de collectivité sur un autre. Que les régions procèdent au moins en concertation avec les départements ! Tel est l'objet de mon amendement COM-124 rectifié.
Ce projet de loi entend rapprocher l'État et les citoyens mais ne comporte guère de dispositions efficaces. Ce qui serait efficace, ce serait d'instaurer des gestions différentes des ressources humaines, en faisant évoluer la notion de service public vers celle de mission d'intérêt général dans le contexte européen, et en prévoyant les moyens suffisants.
Mon amendement COM-167 est identique. Les régions vont évaluer les politiques des départements ! L'action publique de proximité sera encore affaiblie. La gestion des déchets dans le Cantal sera planifiée... à Lyon ! Au minimum, il faut une concertation avec les départements.
La loi NOTRe, en 2015, a confié aux régions la responsabilité d'élaborer des plans régionaux de prévention et de gestion des déchets (PRPGD), un plan unique se substituant aux plans départementaux, interdépartementaux et régionaux existants. Les PRPGD ont vocation à être intégrés dans les des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).
Avant leur fusion au sein du PRPGD, les plans existants doivent faire l'objet d'une évaluation par les commissions consultatives d'élaboration et de suivi des compétentes, dans les six mois suivant la décision d'élaborer un Sraddet.
L'article 37 prévoit que cette évaluation sera réalisée par la nouvelle commission régionale d'élaboration et de suivi du PRPGD, et non par les différentes commissions départementales existantes car l'absence d'activité de certaines de ces commissions ne permettrait pas de respecter le délai imparti.
Les deux amendements visent à associer les départements à l'évaluation. Or, la compétence de planification en matière de déchets a été transférée à la région. Tels que rédigés, ces amendements conduiraient aussi à associer les départements à l'évaluation des plans régionaux de gestion des déchets dangereux. Il va de soi cependant que les régions consulteront les départements : inutile de l'inscrire dans la loi. Avis défavorable.
Je fus rapporteur de la loi NOTRe à l'Assemblée nationale, je me souviens des longs débats sur le plan régional des déchets et le transfert de la compétence. Il ne s'agit pas d'une tutelle puisque la compétence appartient désormais à la région ! Et nombre de régions ont déjà développé des concertations. N'ajoutons pas au formalisme, quand nous voulons simplifier. Défavorable.
La compétence déchets a été transférée aux régions, l'évaluation lui revient. Tenons-nous en à la position du rapporteur... ce qui ne dispense pas les régions d'un dialogue avec les départements.
Il n'est pas incongru d'entendre les départements, qui sont le niveau de l'investissement dans les équipements, par exemple. Une évaluation laissant à l'écart ces partenaires serait un non-sens. Il faut, sinon une concertation, du moins une audition, des échanges !
Il y a formellement, légalement, indéniablement, une compétence régionale. Mais on découvre que la loi NOTRe - que vous avez fortement soutenue, monsieur le ministre - a accouché d'un véritable Gosplan régional. Sur le papier, les réformes sont toujours impeccables ; dans la réalité, il en va autrement. Je soutiens l'idée d'une concertation, et je souligne que le projet de loi comporte nombre d'articles moins utiles que celui-ci.
Se rapprocher des départements concernés, c'est le simple bon sens. J'ai élaboré le schéma départemental de traitement des déchets dans le département de la Marne. Et j'ai été longtemps président de ce syndicat. Les élus alsaciens sont venus nous voir pour étudier comment acheminer chez nous leurs déchets. Des Belges, aussi, nous ont apporté des déchets. Il faudrait connaître les capacités de traitement des entreprises, les outils locaux, pour planifier la gestion des déchets. Sinon, comment de Strasbourg pourrait-on décider ce que l'on peut envoyer à Châlons-en-Champagne ?
Consultez, au moins, si vous ne voulez pas de concertation. Cela ne peut se passer autrement sur le terrain !
La loi NOTRe a provoqué le marasme dans les territoires, et même des désastres, comme en Île-de-France. Sur certains sujets, on peut sans doute prendre de loin des décisions technocratiques. Mais sur les déchets, il faut tenir compte de la gestion de proximité. Et on gagnerait toujours à écouter le Cantal pour que le bon sens l'emporte !
Une consultation plutôt qu'une concertation, fort bien. J'étais premier vice-président du Rhône quand mon président était ministre. Je me souviens de la multitude des consultations auxquelles il fallait procéder : une de plus ou de moins ne changerait pas grand-chose. Alors que les départements souffrent, que leurs élus font un travail remarquable, le message serait bienvenu.
J'ai moi-même été président de département. Peut-être ma région était-elle différente des autres car chaque fois que j'étais consulté par la présidente de région, je donnais mon avis, et elle n'en tenait aucun compte. (Rires)
Cependant, les départements sont menacés. Graver dans le marbre qu'ils seront consultés, c'est au moins cela... Je vous soumets donc deux sous-amendements COM-261 et COM-262 respectivement aux amendements identiques COM-124 rectifié et COM-167 pour remplacer « en concertation » par « après consultation ».
Où est la différence ? La concertation est une forme de consultation ! Quoi qu'il en soit, inutile d'ajouter du formalisme, quand les bonnes pratiques sont déjà bien diffusées. Défavorable.
Ma proposition est dans l'esprit du texte, elle est la bonne solution pour conserver la belle unanimité entre nous, même si nous ne sommes pas tous convaincus de l'utilité de ce texte.
Les sous-amendements COM-261 et COM-262 sont adoptés, de même que les amendements COM-124 rectifié et COM-167, ainsi sous-amendés. L'article 37 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 41
L'article 41 tend à prévoir que les rapports d'évaluation des diverses expérimentations mentionnent les conditions dans lesquelles les personnes intéressées ont participé à ces évaluations.
Ces dispositions ont été présentées comme le moyen d'inciter le Gouvernement à avoir recours à la participation pour l'évaluation des expérimentations. C'est une excellente chose ! Mais ce n'est pas parce que le Gouvernement remet un rapport qu'il aura associé les personnes intéressées. D'où mon amendement COM-204 de suppression.
Avis défavorable par cohérence : le Gouvernement a soutenu l'adoption de ces dispositions à l'Assemblée nationale.
Par ailleurs, vous déplorez l'absence de garanties de la participation des parties prenantes. Or il est ici posé que l'évaluation des expérimentations prévues aux articles 11, 12 bis, 15, 15 bis, 15 ter, 16, 17 bis, 21 et 33 associe les personnes concernées. Cet amendement renforce la qualité de l'information.
Rien n'interdit au Gouvernement de consulter les intéressés, mais il n'est ni judicieux ni utile de l'inscrire dans la loi. Cet article ne sert absolument à rien.
On parle beaucoup de rapports, de bilans, d'évaluation... et on les élimine. Certes, l'article traduit une volonté d'associer les parties prenantes qui est la marque de fabrique de ce Gouvernement. Je ne vois cependant pas l'utilité de cet article ; je m'abstiendrai donc.
Ce texte proclame plusieurs principes - droit à l'erreur, droit au contrôle, droit au conseil - et simplifie des procédures qu'il rend plus lisibles. La volonté du Gouvernement est de procéder à l'évaluation de ces dispositions non seulement à l'occasion de rapports mais encore à longue échéance. Il veut associer les parlementaires, mais aussi la société civile. C'est pourquoi nous soutenons les demandes de rapports et la volonté de la majorité de l'Assemblée nationale de rendre obligatoire une consultation qui - vous avez raison, monsieur le rapporteur - pourrait être pratiquée même sans la présente mention.
Je ne comprends pas. Il est toujours intéressant de savoir comment une consultation a lieu, d'en connaître la méthodologie, de manière à en mesurer la crédibilité.
Lorsque quelque chose ne fonctionne pas, nous sommes très vite au courant, les informations remontent du terrain. S'il y a quelque chose à modifier, autant le faire tout de suite, sans attendre le rapport d'évaluation. Et si la Cour des comptes ou le Parlement considèrent qu'il faut évaluer un dispositif, ils peuvent le faire. Les rapports sont presque toujours remis en retard. Le Gouvernement a déjà du mal à remplir ses obligations actuelles. Il serait préférable de se faire confiance de part et d'autre.
Hier, nous avons supprimé les nombreux rapports qui, selon nous, ne servent à rien. Le Gouvernement doit prendre l'initiative ; laissons-lui le libre choix de faire au mieux. Inscrire dans la loi ces dispositions ne fait qu'alourdir les procédures.
Sans oublier les rapports auxquels le Parlement n'a pas accès...
L'amendement COM-204 est adopté et l'article 41 est supprimé.
Article 42
L'article 42 est le pendant de l'article 41 pour les dispositions du projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre des ordonnances : le Gouvernement rendra compte au Parlement des conditions dans lesquelles les personnes intéressées auront été associées à l'élaboration de ces ordonnances.
Les dispositions ont été présentées comme le moyen d'associer à l'élaboration d'une norme ceux qui devront l'appliquer : c'est un objectif louable.
Mais comme à l'article 41, la garantie fait défaut. Ce n'est pas parce que le Gouvernement remet un rapport qu'il aura associé les personnes intéressées. D'où la demande de suppression de l'amendement COM-205.
Avis défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement COM-205 est adopté et l'article 42 est supprimé.
Article 45 (nouveau)
L'article 45 du projet de loi précise que le Gouvernement s'engage à mettre en place une évaluation « rigoureuse » de l'impact des différentes dispositions du texte d'ici 2022, par un rapport rendu public et présenté en séance publique. Enfin, il est précisé que le choix du dispositif d'évaluation et des évaluateurs doit être soumis pour avis à l'organe d'évaluation et de contrôle des politiques publiques du Parlement.
L'amendement COM-206 supprime ces dispositions qui soulèvent de sérieuses difficultés notamment constitutionnelles : le I de l'article semble relever d'une injonction au Gouvernement ou est, à défaut, dépourvu de portée normative ; la demande de présentation du rapport en séance publique paraît contraire à l'article 48 de la Constitution et à la lecture qu'en fait le Conseil constitutionnel. Enfin, le dernier alinéa de cet article fait référence à un « organe d'évaluation et de contrôle des politiques publiques du Parlement » qui n'existe en réalité qu'à l'Assemblée nationale.
Nous ne partageons pas vos craintes et sommes donc opposés à la suppression d'un article qui permet une évaluation scientifique multicritères, par des experts reconnus. Le I n'est pas une injonction au Gouvernement : ce dernier ne fait que s'engager à « mettre en place les moyens nécessaires à une évaluation rigoureuse » de la loi. Le II n'est pas contraire à l'article 48 : la présentation du rapport en séance publique pourra se faire dans les conditions prévues par ce même article.
C'est encore un rapport - vous savez ce que nous en pensons, et l'organe prévu n'existe pas au Sénat.
Je suis dubitative sur la question du rapport : l'évaluation est nécessaire, mais je ne peux que voter la suppression d'un article anticonstitutionnel.
Cela me semble problématique que le législatif écrive : « le Gouvernement s'engage »...
L'amendement COM-206 est adopté et l'article 45 est supprimé.
Article 46
L'article 46 commande à la Cour des comptes de remettre au Parlement, dans un délai contraint, des rapports d'évaluation comptable et financière relatifs à la mise en oeuvre de nouveaux dispositifs du projet de loi.
Or, la remise de tels rapports n'est pas compatible avec l'activité normale de la Cour des comptes, alors même que la garantie de l'équilibre de ses différentes missions est un impératif d'ordre constitutionnel, tel que constaté par la décision du Conseil constitutionnel du 25 juillet 2001.
Ces évaluations pourraient, en outre, être traitées par les différents corps d'inspection de l'État. De plus, la suppression de l'article 46 ne ferait pas obstacle à ce que la Cour des comptes soit ultérieurement saisie par le Parlement, dans les conditions prévues par la loi organique.
C'est pourquoi mon amendement COM-207 supprime l'article 46.
La Cour des comptes est la mieux à même de remplir cette mission. Avis défavorable.
Les délais impartis sont insuffisants. Pour une telle évaluation, il faut au moins deux années comptables de référence, de manière à éviter les effets de pic conjoncturel, comme par exemple lors de l'acquisition d'un nouveau logiciel, faisant apparaître un coût excessif. Dix-huit mois ne suffisent pas.
Je maintiens mon avis défavorable.
L'amendement COM-207 est adopté et l'article 46 est supprimé.
L'examen des articles soumis à la législation partielle en commission est terminé. Aucun amendement n'est plus recevable en séance sur ces articles sauf exceptions prévues à l'article 47 quater du Règlement : ces exceptions concernent les amendements visant à assurer le respect de la Constitution, qui opèrent une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d'autres textes en cours d'examen ou avec les textes en vigueur ou qui corrigent une erreur matérielle. Merci à tous.
La réunion est suspendue à 11 h 05.
Monsieur Olivier Dussopt, secrétaire d'État, est raccompagné à la porte de la salle et le public est invité à quitter la tribune.
La réunion est reprise à 11 h 10.
Cet examen selon une procédure nouvelle, avec des rapporteurs nouveaux, me semble avoir pris un bon départ ! Merci à tous. Les débats en présence du ministre ont été fluides. Mais il faudra trouver une juste mesure entre les habitudes de « l'ancien monde » et la volonté nouvelle de simplifier - sans quoi des couches administratives supplémentaires pourraient avoir l'effet inverse à celui escompté.
Merci au président, à mon collègue rapporteur, à tous les commissaires : les sujets se suivent très vite et ne se ressemblent pas, et nous avons dû procéder aux auditions sur une très courte période. À la suite d'échanges de grande qualité hier et aujourd'hui, nous sommes parvenus collectivement à améliorer le texte.
À mon tour de saluer votre investissement personnel, monsieur le président, ainsi que celui de Mme Gruny. Le titre initial du projet de loi était celui du « droit à l'erreur » ; au terme de notre examen, j'opterais plutôt pour « loi fourre-tout » ! Tous les Français espèrent qu'on améliore la loi pour leur rendre la vie plus facile. Nous nous sommes partagé le travail, avec Mme Gruny, sans nous disputer - grâce à la vigilance du président...
Je veux saluer l'état d'esprit de la commission spéciale, dont chacun des membres a eu à coeur d'apporter sa contribution en fonction de sa spécialité, pour obtenir le texte le plus utile possible. C'est la première fois que je suis rapporteur ; je le dis aux futurs débutants, ce n'est pas de tout repos !
Je fais miennes toutes ces remarques. J'étais inquiet devant la procédure de législation en commission, mais elle me semble finalement utile. Elle nous évitera des heures de débat inutiles en séance, sur des articles bien circonscrits.
Nous adhérons à la philosophie du texte, qui, dans la lignée de l'action de Jean-Luc Warsmann et Thierry Mandon, simplifie en développant la confiance et le dialogue. Mais l'intitulé, avec la mention d'une « société de confiance », est un peu pompeux pour une loi aussi disparate. C'est ce qui nous a amenés à déposer un amendement pour la renommer.
Il faut aussi tenir compte de la question des moyens. Une écoute plus attentive, une administration qui conseille sans s'exonérer de ses obligations actuelles de contrôle, cela risque d'être difficile avec 120 000 fonctionnaires en moins ! Les dispositions relatives à la dématérialisation nous inquiètent : tout le monde n'est pas en mesure d'avoir des relations numériques de qualité avec l'administration.
Beaucoup de principes restent très généraux. Avec 12 ordonnances, 15 expérimentations, un très grand nombre de rapports, le texte est trop générique. Il enfonce des portes ouvertes, mais attention aux effets réels. C'est pour cette raison que notre groupe a voté à l'instant les amendements de suppression. Sur l'ensemble du texte, il choisira une abstention bienveillante en attendant l'examen en séance publique.
La bonne ambiance de travail qui a régné dans cette commission est tout à fait appréciable. Ayant suscité beaucoup d'attentes, ce projet de loi risque de décevoir. Les suppressions de l'article concernant l'accueil de la petite enfance et d'une partie de l'article 33 sur les enquêtes publiques me semblent être de bon aloi. Notre abstention à ce stade sera bienveillante, ne serait-ce que par considération pour le travail de la commission.
Cette affaire aura été menée rondement, mais bien des points obscurs auront été clarifiés : je crois avoir compris de quoi il retournait - sauf quelques réponses du ministre que je n'ai pas bien entendues...
Ce texte est schizophrène. Sa philosophie générale est celle d'un « populisme chic » qui n'est pas ma tasse de thé. Par ailleurs, elle constitue un fourre-tout qui s'impose à nous, alors que le Gouvernement passe son temps à reprocher au Parlement de lambiner... Nous serions plus efficaces si nous n'avions pas à examiner de tels textes.
Rien à dire sur la procédure de législation en commission, qui a montré son utilité. En fait, c'est surtout la preuve que beaucoup de dispositions ne relèvent pas de la loi - dans ces conditions, autant les expédier ! Lorsque j'étais étudiant, la Constitution de la Ve République était justifiée entre autres par le bavardage d'un Parlement de la IVe République qui se plaisait à « fixer le nombre de baudets dans les haras nationaux ». Mais aujourd'hui, nous faisons encore mieux. Pour simplifier, peut-être suffirait-il de respecter la Constitution... Mais non, on veut « envoyer des messages » ! Il faut dire au citoyen, à l'électeur qu'on l'aime !
Aucune mesure de cette loi ne me révulse. Certaines sont très détaillées, mais elles ne sont pas forcément illégitimes. Nous attendons avec gourmandise la séance publique, et notamment de voir ce qu'il adviendra de l'article premier. D'ici là, nous pratiquerons une abstention sceptique.
Je me réjouis de notre travail collectif. Cela tient peut-être au fait qu'en commission spéciale ne viennent que les sénateurs les plus motivés : il n'y a aucune obligation d'y participer ! Le texte me semble relever plus de la communication que de la législation : il s'agit pour le Gouvernement de donner la direction dans laquelle il veut aller. Nous aussi avons fait passer nos messages, ce qui est très positif.
La législation en commission est une procédure d'avenir. Elle permet d'évacuer les parties accessoires d'un texte. Reste la conviction qu'il faut améliorer la performance de l'État. La culture des fonctionnaires évolue, mais il reste encore du chemin à parcourir. Cela ne passera pas par la loi, mais par la gestion des équipes, la formation, la modernisation. Le dire, c'est bien, mais le faire, c'est mieux.
Nous avons bien travaillé, grâce à notre président et à nos rapporteurs. Le titre du texte n'est pas seulement pompeux, il dénote une vision de la société digne du monde des Bisounours : tout va bien, on se fait tous confiance...
La procédure de législation en commission a bien fonctionné : il n'y a autour de la table que des parlementaires qui s'intéressent de près au texte. Une telle procédure est bien adaptée pour un texte technique : un texte politique nécessite en revanche un passage en séance publique.
Bravo au président et aux rapporteurs. J'ai eu beaucoup de plaisir à participer à la commission spéciale : cette horizontalité a été très enrichissante. La législation en commission a démontré son intérêt s'agissant de textes techniques. C'est une avancée, une simplification, une accélération.
Sur le fond, nous avons affaire à une loi de pure communication. Toute une partie ne relève pas du législatif, mais du management de l'administration par le Gouvernement. Ce dernier n'a pas tort de penser qu'il faut changer la culture de la fonction publique. Mais pourquoi passer par la loi ? Je voterai néanmoins le texte, en considération du travail accompli.
D'ici la séance, nous continuerons à échanger afin de trouver une appellation qui corresponde mieux au texte.
L'ensemble du projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
TABLEAU DES SORTS
La réunion est close à 11 h 35.
TABLEAU DES SORTS
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 11 h 35.