La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à Mme Catherine Dumas, auteur de la question n° 962, transmise à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, représenté aujourd’hui par Mme la ministre chargée de l’outre-mer.
Madame la ministre, le 14 avril 2010, le maire de Paris a présenté son projet pour le réaménagement des voies sur berges.
En installant des feux tricolores et en fermant les « quais bas » de la rive gauche, il prétend notamment pouvoir réduire la vitesse et le volume de la circulation dans la capitale.
Toutefois, la fermeture de ces voies, fréquentées aujourd’hui par plus de 2 000 véhicules par heure en période de pointe, risque d’entraîner une augmentation du trafic sur les axes de report, tels que les « quais hauts », le boulevard Saint-Germain, la rue de Rivoli, mais aussi le boulevard périphérique, et d’entraîner des encombrements. On peut donc, in fine, redouter une congestion de tout le cœur de Paris.
Au-delà de ces problèmes de circulation, la faisabilité de ce projet doit aussi être appréciée d’un point de vue juridique. En effet, les voies sur berges font l’objet d’une superposition de gestion, donnée par l’État à la ville de Paris dans les années soixante-dix, et sont spécifiquement destinées à une utilisation en tant que voies express.
Si la ville de Paris supprime la circulation sur ces voies, ces dernières retomberont de facto dans le domaine public de l’État et de nouvelles conventions devront alors être établies avec la ville.
Je souhaiterais, madame la ministre, que vous me précisiez la position de l’État sur ce dossier.
l'outre-mer. Madame le sénateur, vous avez attiré l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur le projet d’aménagement des voies sur berges à Paris.
Présenté le 14 avril 2010, le projet de réaménagement des voies express envisagé par la ville de Paris vise à modifier profondément le dispositif existant dans une optique de reconquête des berges de la Seine au bénéfice d’usages principalement piétonniers et cyclistes et d’activités de loisirs.
Ce projet distingue les deux rives concernées : d’une part, l’autoroute urbaine de la rive droite serait réaménagée en boulevard urbain ponctué de feux de signalisation ; d’autre part, la voie rapide de la rive gauche serait fermée au trafic automobile entre Solférino et le Pont de l’Alma.
Les espaces de 4, 5 hectares ainsi libérés seraient affectés à différentes activités récréatives, de sport et de culture.
Ce projet, dont la réalisation est envisagée pour 2012, ne peut bien évidemment être conçu que dans le cadre d’une discussion approfondie avec l’État.
Mme Catherine Dumas acquiesce.
C’est dans le cadre de ce partenariat étroit avec l’État que devront être évalués les effets de ce projet. La nécessité d’une concertation approfondie avec les habitants et les collectivités locales voisines a été réaffirmée et les différents services de l’État impliqués seront consultés officiellement sur le projet.
Au cours de la dernière séance du Conseil de Paris, le préfet de police est intervenu pour souligner que ce projet devait être abordé avec ouverture d’esprit, méthode et prudence. Il conviendra, en particulier sur le plan de la circulation, de veiller à préserver des axes de communication suffisamment fluides, de garantir la cohérence du projet avec les politiques de déplacement franciliennes, d’effectuer des tests de réalité et, enfin, de maintenir des délais réduits d’acheminement des secours en cas d’urgence.
De même, dès lors qu’est en cause l’utilisation du domaine public de l’État, il conviendra de réexaminer le dispositif existant de superposition d’affectation et de préserver les intérêts de l’État et de ses établissements publics dans le cadre de nouvelles conventions conclues en application des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques, le CG3P.
L’évolution éventuelle de l’occupation des berges devrait, enfin, être cohérente avec les objectifs fixés par le Grenelle de l’environnement.
Madame la ministre, j’ai pris bonne note de votre réponse.
Mes collègues du groupe UMP au Conseil de Paris et moi-même allons bien sûr rester très attentifs à ce sujet important, qui peut modifier durablement le visage de la capitale et, surtout, avoir des conséquences au quotidien sur la vie des Parisiens.
Nous pensons, en effet, que le projet actuel du maire de Paris est d’ores et déjà dépassé par rapport aux réalités de la ville et, surtout, indigne des défis qui sont les nôtres pour les prochaines années, notamment dans le cadre de l’ambitieux projet d’aménagement du Grand Paris.
On ne peut pas se contenter de bannir la voiture de Paris. Les élus du groupe UMP au Conseil de Paris, emmenés par leur président Jean-François Lamour, opposent un projet beaucoup plus ambitieux de réaménagement global de tous les espaces des bords de Seine, pariant sur la diversité des modes de déplacement – cela nous semble tout à fait important – et se révélant compatible avec le développement économique, culturel et surtout touristique de la capitale.
La parole est à M. Marcel Rainaud, auteur de la question n° 966, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, et des collectivités territoriales
Madame la ministre, les collectivités territoriales sont, grâce à leurs investissements, des éléments moteurs de la dynamique économique de notre pays. Elles sont soumises à des règles strictes puisqu’elles sont dans l’obligation de présenter des budgets en équilibre. Le recours à l’emprunt ne leur est autorisé que pour financer les investissements.
Malgré ces règles contraignantes et les différents transferts de charges auxquels elles ont dû faire face, à l’origine d’une augmentation mécanique de leurs coûts de fonctionnement, leurs investissements sont des éléments importants du dynamisme de notre économie. En effet, plus de 70 % de l’investissement public annuel est porté par les collectivités locales. Cela représente près de 800 000 emplois directs.
Au moment où la commande privée est au ralenti, il est particulièrement important de permettre à la commande publique de se maintenir à un bon niveau.
Le Gouvernement l’a compris lorsqu’il a instauré le dispositif de remboursement anticipé de la TVA pour les collectivités qui s’engageaient à produire des efforts supplémentaires en matière d’investissement. Cette mesure semblait indiquer la reconnaissance de l’importance du rôle des collectivités dans la dynamique économique et le maintien des emplois dans le secteur privé.
Malheureusement, la réforme de la fiscalité et l’annonce du gel des dotations aux collectivités locales ont mis un coup d’arrêt à cette dynamique.
Contraindre les finances des collectivités locales est un mauvais calcul économique. Les carnets de commandes des professionnels des secteurs du bâtiment et des travaux publics se sont vidés et les mesures de prudence prises par les exécutifs locaux amplifient les effets de la crise économique sur leur activité.
Ces entreprises se voient contraintes de se séparer d’une partie de leurs personnels : ce sont autant de personnes qui vont se retrouver en situation de précarité, ce qui fera encore gonfler les chiffres du chômage, puis, à terme, se traduira par une augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA.
Cela ne sera pas sans conséquences sur les finances publiques, qui devront faire face à cette augmentation du nombre de bénéficiaires d’indemnités chômage et de minima sociaux.
Pour protéger l’emploi et nos entreprises, il faut donner une meilleure visibilité aux collectivités sur l’évolution de leurs ressources et, tout d’abord, sur celle des dotations de l’État. L’annonce du gel de celles-ci, si elle est confirmée, renforcera les restrictions budgétaires des collectivités. Elle réduira leur rythme et leur niveau d’investissement.
Avant de mettre en œuvre une telle mesure, il serait donc important qu’une étude d’impact soit menée afin de mieux appréhender ses effets.
Les petites économies faites aujourd’hui sur le dos des collectivités locales engendreront, demain, de plus importantes dépenses dans le domaine du social et de l’insertion.
Les collectivités territoriales ont aussi besoin d’être rassurées sur la dynamique de leurs ressources. La suppression de la taxe professionnelle et la nouvelle architecture de la fiscalité ne sont pas sans conséquences pour elles.
Le Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR, fait partie des principaux sujets de préoccupation. Ce fonds a vocation à compenser les pertes de recettes des collectivités induites par la réforme de la fiscalité.
Deux questions se posent alors.
La première concerne l’évolution du fonds : les élus locaux demandent que le montant de ce dernier leur soit pour le moins garanti et que sa pérennité soit assurée.
La seconde porte sur la dynamique des ressources nouvelles. Certains territoires ont choisi de mettre le développement économique au cœur de leur projet pour créer de nouveaux emplois et élargir l’assiette fiscale grâce aux recettes engendrées sur leur territoire par les entreprises qu’elles y installent.
Dès lors, les élus ont des craintes quant au devenir de ces ressources nouvelles. Ils affirment leur volonté forte de voir les ressources nouvelles créées sur leurs zones économiques abonder leurs budgets.
Les élus locaux ont besoin de réponses à ces questions. Les professionnels du secteur des travaux publics et du bâtiment, comme leurs salariés, sont également en attente.
Pouvez-vous, madame la ministre, prendre un engagement quant à la pérennité du Fonds national de garantie individuelle des ressources ? Pouvez-vous assurer aux collectivités locales qu’elles tireront profit de leurs efforts consentis en faveur du développement économique en leur garantissant qu’elles bénéficieront de l’intégralité des nouvelles recettes ainsi générées sur leurs territoires ?
Monsieur le sénateur, vous avez attiré l’attention du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur la pérennité du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR, et le maintien de la dynamique des ressources des collectivités.
La suppression de la taxe professionnelle a permis d’alléger les charges des entreprises de presque 9 milliards d’euros dès 2010, contribuant ainsi à l’amélioration de leur situation financière. Dans le cadre de cette réforme de la fiscalité locale, le Gouvernement s’est engagé à compenser, pour l’ensemble des collectivités locales, les éventuelles pertes engendrées par cette suppression.
Cette compensation prendra la forme, d’une part, d’une dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, d’autre part, d’un Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR, pour chacun des niveaux de collectivité territoriale – communes et intercommunalité, départements et régions.
Ainsi que le Gouvernement l’a précisé à plusieurs reprises, aucune collectivité ne doit voir ses ressources fiscales baisser à la suite de la suppression de la taxe professionnelle.
Le FNGIR est financé par les gains des collectivités qui se retrouveraient gagnantes après la réforme, c’est-à-dire de celles dont les ressources fiscales en 2010 seraient supérieures à ces mêmes ressources constatées en 2009. Ce fonds est pérenne et les collectivités locales connaîtront vraisemblablement en juillet 2011 le montant exact des sommes ainsi redistribuées.
Quant à la dynamique des ressources des collectivités territoriales, les nouvelles impositions créées à la suite de la suppression de la taxe professionnelle, notamment la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, permettront de l’assurer puisqu’elles sont directement assises sur l’activité économique.
En effet, les simulations effectuées dans le cadre du rapport présenté en juin 2010 par le Gouvernement montrent qu’à l’horizon 2015 la croissance annuelle des nouvelles ressources devrait être comprise entre 3, 3 % et 3, 9 % selon les collectivités, ce qui ferait passer les ressources fiscales de 72, 8 milliards d’euros en 2010 à 87, 8 milliards d’euros en 2015.
Madame le ministre, je vous remercie de votre réponse. Celle-ci n’est cependant pas satisfaisante, car elle n’apporte pas aux élus les données concrètes qui leur permettraient d’organiser une gestion pluriannuelle de leur collectivité.
Je vous demande donc de prendre véritablement en compte l’incidence des investissements publics sur le dynamisme de notre économie et sur l’emploi. Il faut donner aux exécutifs locaux des signaux suffisamment rassurants pour qu’ils relancent la commande publique.
La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 927, adressée à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales.
Ma question, madame le ministre, est dans le prolongement de la précédente, et peut-être m’avez-vous déjà répondu par avance. Vous me permettrez néanmoins d’évoquer, à mon tour, les problèmes liés à la péréquation.
Au cours de la présente année, deux documents sont venus conforter mon inlassable combat en faveur de la mise en œuvre d’une plus grande péréquation financière pour les collectivités territoriales les plus pauvres, qu’il s’agisse de communes, de groupements de communes, ou encore de départements.
Tout d’abord, dans son rapport sur la fiscalité locale présenté le 6 mai dernier, le Conseil des prélèvements obligatoires estime que l’équité entre contribuables et celle entre collectivités ne sont plus assurées. Il ajoute que les écarts de richesse entre collectivités territoriales sont trop grands. Ainsi, le potentiel fiscal par habitant varie du simple au double entre régions, du simple au quadruple entre départements, et de un à mille entre les communes, ce qui est considérable. Il s’agirait donc, en l’occurrence, non pas de donner plus, mais de donner autrement et mieux.
Par ailleurs, les mécanismes actuels de péréquation ne corrigent qu’à peine la moitié de ces disparités. Ainsi, la part de péréquation de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, n’atteint que 16 % de son montant.
Je l’ai souvent affirmé, et je le répète, le mode de calcul de la DGF privilégie certaines grandes villes riches, au détriment des communes rurales pauvres. Ce phénomène est dû à des raisons à la fois historiques – on se souvient que la DGF est l’héritière du versement représentatif de la taxe sur les salaires... – et législatives : le fait que, dans les grandes villes, 1 habitant compte pour 2, 5 est forcément contre-péréquateur.
Le Conseil des prélèvements obligatoires propose d’accélérer, pour chaque échelon territorial, l’augmentation de la part relative des dotations péréquatrices de la DGF en ralentissant la hausse des dotations forfaitaires, et de renforcer les mécanismes de péréquation fiscale de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, qui doit être mise en place en 2011. Il suggère également de mieux cibler les efforts de péréquation en faveur des collectivités qui sont véritablement les plus éloignées de la moyenne.
Le second document date du 12 mai 2010 et émane de l’Association des maires de France, l’AMF, et de son groupe de travail sur la dépense locale. Lui aussi met en évidence la nécessité d’un renforcement de la péréquation et l’effet jusqu’ici insuffisamment péréquateur des dotations versées par l’État, notamment de la DGF.
L’AMF propose, notamment, une réduction progressive des inégalités dans les dotations d’intercommunalité : la dotation par habitant entre intercommunalités varie, en effet, du simple au double ; cela n’est pas normal.
Madame le ministre, consacrer une plus grande part de la DGF à la péréquation, concentrer notre effort de péréquation sur les communes et les départements qui, comme la Meuse, en ont le plus besoin, faire en sorte que toutes les intercommunalités perçoivent la même dotation par habitant – nous sommes loin du compte ! –, voilà de saines pistes de travail dont le Gouvernement devrait s’inspirer pour la préparation du projet de loi de finances pour 2011 !
Monsieur le sénateur, vous appelez l’attention de M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales sur le renforcement des mécanismes de péréquation financière.
La péréquation, qui consiste à atténuer les disparités entre les collectivités locales, a fait l’objet d’un effort soutenu au cours de la dernière décennie et a été érigé en objectif à valeur constitutionnelle par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003.
Ainsi, chaque niveau de collectivités locales bénéficie de dispositifs de péréquation : la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, la DSU, la dotation de solidarité rurale, la DSR, et la dotation nationale de péréquation, la DNP, pour les communes ; la dotation de péréquation urbaine, la DPU, et la dotation de fonctionnement minimale, la DFM, pour les départements ; enfin, la dotation de péréquation régionale.
Entre 2004 et 2010, la part de dotation globale de fonctionnement consacrée à la péréquation a augmenté de 2, 3 milliards d’euros et s’élève aujourd’hui à 6, 8 milliards. Pour 2011, le Gouvernement entend poursuivre cet effort en consacrant des montants conséquents à la péréquation.
Outre la péréquation dite verticale, c’est-à-dire de l’État vers les collectivités territoriales, il est nécessaire de renforcer la péréquation horizontale, soit entre les collectivités d’une même catégorie.
Dans leur rapport, MM. Carrez et Thénault se sont d’ailleurs accordés sur l’importance de prélever davantage les collectivités présentant un potentiel financier plus élevé, afin de reverser aux collectivités moins riches de la même catégorie. Leurs conclusions constituent autant de pistes pour le renforcement de la péréquation.
Les auteurs de ce rapport préconisent d’utiliser progressivement une partie des montants versés au titre du complément de garantie des communes et des départements comme un mécanisme de péréquation. L’écrêtement du montant touché par chaque collectivité pourrait, à cet effet, dépendre du potentiel fiscal, et non plus d’un montant uniforme.
Ils préconisent, ensuite, de calculer le potentiel fiscal en tenant compte du potentiel par habitant de l’ensemble intégré commune-intercommunalité.
Ils proposent, enfin, d’alimenter la péréquation par des dotations compensatrices.
Ces réflexions, monsieur le sénateur, seront naturellement prises en compte dans le cadre des différents rendez-vous législatifs qui seront l’occasion d’adapter les outils disponibles à la suppression de la taxe professionnelle, comme au nouveau cadre d’évolution des dotations de l’État.
Madame le ministre, je vous remercie de ces précisions qui vont, me semble-t-il, dans le bon sens. Néanmoins, depuis quelques années, s’agissant de ces accompagnements financiers, nous avons souvent observé une différence de taux entre la DGF urbaine et la DGF rurale, et ce toujours dans le mauvais sens. Lorsqu’on examine l’aspect du potentiel fiscal, on retrouve un certain équilibre.
Je constate, pour ma part, que ma commune reçoit au titre de la DGF seulement 10 % de ce que perçoit Paris par habitant. Je veux bien admettre que je vis aussi à l’ombre de la capitale, mais j’aimerais ne pas y mourir... Quoi qu’il en soit, je tiens à vous remercier pour les efforts accomplis.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, auteur de la question n° 887, transmise à Mme la ministre chargée de l’outre-mer.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je souhaite aborder la question de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les DOM, en particulier à la Réunion.
Le 13 janvier 2009, les députés européens ont adopté les deux textes qui constituent la future législation européenne sur les pesticides. Après le compromis trouvé en décembre 2008 entre le Parlement européen et le Conseil, les députés se sont prononcés à une large majorité en faveur d’un règlement sur la production et l’autorisation des pesticides, et d’une directive relative à l’utilisation durable de ces produits.
Ainsi, la nouvelle législation prévoit l’interdiction d’une liste de vingt-deux substances chimiques toxiques au niveau de l’Union européenne, qui servira de base à l’autorisation de pesticides au niveau national. La directive fixe, pour la première fois au niveau communautaire, des règles tendant à rendre l’utilisation des pesticides plus sûre et à encourager le recours à la lutte intégrée et aux alternatives non chimiques. Dans les faits, l’épandage aérien sera progressivement interdit dans la sylviculture et la viticulture. Quant aux pesticides, ils seront également interdits dans les parcs, les jardins publics, les terrains de sport, les cours de récréation et les terrains de jeux. La directive devrait être mise en œuvre par les États membres au début de l’année 2011.
Les pesticides sont décriés depuis des années à cause de leur incidence sur la santé humaine. En décembre 2008, une étude mettait en exergue les effets toxiques du Roundup, l’un des herbicides les plus utilisés au monde, sur les cellules humaines ainsi que sur les OGM alimentaires. En février 2010, une étude du Centre d’immunologie de Marseille-Luminy, le CIML, a prouvé qu’il existait un lien de causalité entre l’exposition des agriculteurs aux pesticides et certains cancers du sang. Je tiens à rappeler que la France est le premier utilisateur de pesticides en Europe, et le troisième au niveau mondial.
L’exposition aux pesticides en milieu agricole est considérée depuis longtemps comme un facteur de risque accru de lymphomes. Le lymphome folliculaire est ainsi en augmentation de 3 % à 4 % par an depuis une trentaine d’années. Ce type de cancer du sang incurable représente la cinquième cause de mortalité par cancer au niveau national.
Les agriculteurs sont plus souvent victimes de cancers que les autres professionnels. Les chercheurs ont mis en évidence des biomarqueurs qui témoignent d’un lien moléculaire entre l’exposition des agriculteurs aux pesticides, l’anomalie génétique et la prolifération de ces cellules, qui sont des précurseurs de cancers. Ils ont aussi constaté que, par rapport au reste de la population, les agriculteurs exposés aux pesticides développaient dans leur génome de 100 à 1 000 fois plus de cellules anormales.
Afin de connaître les liens entre les facteurs professionnels et la survenue de problèmes de santé, l’Institut de veille sanitaire, l’InVS, a lancé le 8 février 2010, en partenariat avec la Mutualité sociale agricole, la MSA, une grande étude permettant de décrire et de surveiller l’état de santé de la population au travail dans le monde agricole. La première phase de cette étude a débuté dans cinq départements. Sont concernés les Bouches-du-Rhône, le Finistère, le Pas-de-Calais, les Pyrénées-Atlantiques et la Saône-et-Loire. Je regrette qu’elle ne soit menée dans aucun département d’outre-mer.
À la Réunion, la prise en compte du risque professionnel lié aux produits phytosanitaires n’est que récente. Les agriculteurs réunionnais n’utilisent pas de produits moins dangereux qu’en métropole ; au contraire, ils seraient même moins regardants sur leur dangerosité et sur la protection qu’ils devraient mettre en œuvre. Force est de constater que le climat chaud et humide n’incite guère à revêtir gants, masque et combinaison pour se protéger des produits traitants.
La chambre d’agriculture de la Réunion organise régulièrement des stages de prévention et de sensibilisation sur le sujet, mais aucune étude sérieuse n’a été menée localement car, dans les départements d’outre-mer, contrairement à la métropole, il n’existe pas de mutuelle sociale agricole pour collecter les cas. C’est dans le secteur du maraîchage qu’on observe le plus de problèmes.
Madame le ministre, la question de l’utilisation des pesticides n’est pas cloisonnée aux seuls départements agricoles et viticoles, ou à un territoire ultramarin en particulier. Elle nous concerne tous puisque, dans tous les aliments et boissons, on retrouve des traces de produits phytopharmaceutiques.
Vous connaissez mon attachement tant aux problématiques de santé qu’à l’équité de traitement entre la métropole et les territoires ultramarins. Je plaide pour que soit mise en place, très prochainement, une véritable enquête sur l’état de santé des agriculteurs réunionnais, et plus généralement ultramarins.
Madame la sénatrice, vous avez interrogé Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé et des sports, sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques dans les départements d’outre-mer, et en particulier à la Réunion.
Cette question constitue une réelle préoccupation pour le Gouvernement.
À la Réunion, depuis 2005, la médecine du travail collabore avec les professionnels agricoles et les services sanitaires pour sensibiliser la profession agricole aux risques phytosanitaires. Dans ce cadre, le service de la prévention des risques professionnels de la Caisse générale de sécurité sociale réalise des actions de formation auprès des agriculteurs, en partenariat avec la Direction de l’agriculture et de la forêt, sur les risques liés au stockage et à la manipulation des produits phytosanitaires.
Ainsi, afin de faciliter l’observation d’effets indésirables des produits phytosanitaires sur la santé des manipulateurs, un numéro vert gratuit est à la disposition de toute personne utilisant des produits professionnels, en métropole comme à la Réunion. Ce numéro vert est celui du réseau Phyt’attitude, qui recense spécifiquement et analyse les intoxications liées aux produits phytosanitaires.
Depuis 2006, parallèlement à la Caisse centrale de la MSA, qui recense ces données, la cellule interrégionale d’épidémiologie Réunion-Mayotte de l’agence régionale de santé a mis en œuvre un dispositif de toxicovigilance comparable. Enfin, s’agissant de la surveillance épidémiologique, un registre des cancers est en cours de constitution à Saint-Denis de la Réunion. La consolidation de ce registre permettra de parfaire la surveillance des pathologies tumorales et de faciliter les travaux de recherche.
Par ailleurs, l’étude conduite par l’Institut national de veille sanitaire que vous évoquez n’est, à ce stade, qu’une étude de faisabilité réalisée dans cinq départements métropolitains, en relation étroite avec la Mutualité sociale agricole.
L’extension de ce protocole aux DROM nécessitera des conditions spécifiques, en raison notamment du régime de sécurité sociale des agriculteurs d’outre-mer, qui est différent de celui de la MSA.
Ce protocole devra en particulier être adapté aux circuits d’information propres à ce régime de sécurité sociale.
Comme vous pouvez le constater, madame la sénatrice, le Gouvernement prend très au sérieux la question de la surveillance de la santé des agriculteurs liée à la manipulation des produits phytopharmaceutiques.
En 2008, la cellule interrégionale d’épidémiologie Réunion-Mayotte s’était penchée sur le problème des pesticides à la suite du traitement dispensé pendant la crise de chikungunya. Aucune intoxication liée à l’usage des pesticides n’avait alors été recensée parmi les agriculteurs. Mais la profession n’est pas pour autant à l’abri.
Le service de prévention de risques professionnels de la Caisse générale de sécurité sociale a mis en place depuis 2006 un numéro vert, celui du réseau Phyt’attitude, pour répondre aux urgences et recenser les cas.
Cependant, peu d’appels sont enregistrés. Les opérateurs ont certes relevé quelques intoxications aiguës, mais ont beaucoup de difficultés à appréhender leurs conséquences sur le long terme. L’une des possibilités consisterait à lever le secret médical. L’année dernière, une quarantaine de cancers de la vessie ont été recensés, majoritairement chez des hommes, à raison de 35 cas sur 40. L’observatoire régional de santé souhaiterait en savoir davantage. Si le secret médical était levé, un lien pourrait être établi entre la maladie et la profession des personnes concernées.
Nous avons tous en mémoire les dégâts considérables et même irréversibles causés par l’utilisation du chlordécone aux Antilles.
M. Jean-Paul Virapoullé acquiesce.
Les déclarations du Professeur Belpomme ont beaucoup ému les ultramarins. Les terres ont été polluées pour des décennies. Hier soir encore, nous avons entendu sur TF1 le Docteur Pascal Blanchet, dont une étude récente a démontré le caractère hautement dangereux de ce pesticide et le lien direct qui existe entre le cancer de la prostate et son utilisation. Par ailleurs, l’Institut national de recherche agronomique, l’INRA, vient de réaliser une étude dénonçant le caractère faussement rassurant du rapport parlementaire fait sur l’utilisation du chlordécone et en démontrant la dangerosité. Il convient donc de prêter une attention plus soutenue aux pesticides utilisés dans les départements d’outre mer, ainsi qu’en métropole.
M. Jean-Paul Virapoullé acquiesce.
La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 933, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
J’avais adressé cette question à M. le ministre de l’éducation nationale. Or je constate que cette dernière, entre son dépôt et la date de son inscription à l’ordre du jour, a quelque peu perdu de son actualité : portant sur les nouvelles modalités de formation et de recrutement des enseignants, il aurait mieux valu qu’elle soit examinée avant la rentrée scolaire ! Je vous la soumets néanmoins aujourd’hui.
La formation des enseignants incombe désormais aux universités par le biais de la « masterisation ». Des protestations s’élèvent de partout, provenant des présidents d’université, des syndicats, des étudiants. Alors que le cursus des enseignants, fondé sur le principe de l’alternance, prévoyait jusqu’à présent une formation théorique et un stage de plusieurs mois en établissement scolaire, ce stage est non plus obligatoire, mais simplement conseillé. Ainsi, les enseignants pourront désormais prendre leur poste après une préparation académique poussée à l’université, mais sans avoir reçu une solide formation pédagogique et parfois même sans avoir effectué au préalable un stage dans une école.
Cette réforme privilégie donc la dimension disciplinaire à la pédagogie proprement dite, alors même que le volet pédagogique, déjà jugé insuffisant, ne doit pas être négligé. Désormais, les enseignants risquent de se retrouver face à une classe sans y avoir été préparés, malgré la présence éventuelle de tuteurs, en nombre d’ailleurs insuffisant compte tenu du faible nombre de personnes attirées par cette mission.
La réforme de la formation des enseignants aura des répercussions négatives sur la qualité de l’enseignement à l’école, au collège et au lycée. Le nombre de postes de titulaires, chaque année en diminution, entraîne l’augmentation du nombre d’élèves par classe et le recrutement d’enseignants vacataires en plus grand nombre. Or, nous restons attachés à une formation de qualité, à la base de l’éducation de l’élève et du citoyen, pour nos enseignants. Comme chacun le sait, l’école républicaine est le socle de la transmission de nos valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité.
Aussi vous demanderai-je, madame la ministre, de bien vouloir prendre en compte ces questions et de mesurer la portée des objections soulevées.
Monsieur le sénateur, vous souhaitez attirer l’attention de mon collègue Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement, sur la réforme de la formation des enseignants. Luc Chatel est retenu ce matin par d’autres obligations mais, vous le savez, la question que vous avez soulevée est pour lui une préoccupation majeure. Il a d’ailleurs tenu à accueillir personnellement, le 30 août dernier, des professeurs stagiaires de l’Académie de Versailles.
La réforme des conditions de formation et de recrutement des personnels enseignants permet d’abord, dans le cadre d’un cursus universitaire prolongé jusqu’au master, d’harmoniser nos dispositifs avec les pratiques en vigueur dans la plupart des pays européens.
La réforme contribue aussi à élever la qualification des personnels. Recruter des professeurs à un niveau « bac + 5 » permettra à notre école d’appréhender les enjeux du monde contemporain et de faire face à ses transformations futures.
En outre, le nouveau dispositif de recrutement assure une découverte plus progressive du métier en articulant formation pratique et formation universitaire. En effet, les étudiants ont la possibilité de faire des stages dès la licence, ainsi qu’au cours des première et seconde années de master. Ces stages, rémunérés, leur permettront de prendre une classe en responsabilité. Tous ces stages sont bien entendu encadrés par des enseignants expérimentés.
Enfin, après leur recrutement, tous les professeurs stagiaires bénéficient d’un accompagnement par un professeur-tuteur reconnu pour ses qualités pédagogiques, et des actions de formation complémentaires adaptées aux besoins de chaque nouvel enseignant sont proposées.
La réforme du recrutement s’accompagne d’une meilleure reconnaissance des missions confiées à nos professeurs, notamment grâce à une revalorisation significative des rémunérations en début de carrière. En moyenne, les professeurs nouvellement recrutés perçoivent un traitement supérieur de 10 % à celui des générations précédentes. Les 200 000 enseignants qui ont récemment débuté leur carrière bénéficient également d’une revalorisation.
Élévation du niveau de qualification universitaire, progressivité dans l’acquisition des compétences professionnelles, renforcement de la pratique dans le cursus de formation, voilà ce qui caractérise la nouvelle formation des maîtres. Voilà ce qui permettra à l’école de la République de répondre aux attentes de nos concitoyens.
Madame la ministre, je vous remercie. J’entends bien la force de vos arguments, mais je tiens à formuler les remarques suivantes.
Tout d’abord, la seconde année de formation en IUFM, en tant que fonctionnaire stagiaire rémunéré par l’État, est remplacée par une année de master, non payée. Voilà qui va faire entrer l’inégalité sociale dans la préparation des maîtres, fermant l’accès au concours d’enseignant aux classes les moins aisées.
Ensuite, dès la rentrée de septembre, les nouveaux enseignants ont pris leur poste sans la formation pédagogique qu’offraient jusqu’alors les IUFM. Ils devront pourtant assurer, le plus souvent dans des zones difficiles, le même service, les mêmes tâches, avec la même efficience que leurs collègues expérimentés. Le remède à cette inexpérience serait apporté par des tuteurs : un maître formateur, présent en classe à leurs côtés ou rencontré à l’occasion de réunions hebdomadaires. Mais au collège et au lycée, tous n’auront pas de tuteur.
Enfin, il convient d’appréhender une conséquence locale de la réforme, le démantèlement des antennes IUFM implantées dans les départements ruraux, comme la Nièvre. C’est très dommageable. En effet, une formation reçue dans le cadre de l’université risque d’urbaniser à l’excès les futurs maîtres, alors que les IUFM départementaux leur offraient plus de contact avec le terrain. Ainsi, ils seront moins enclins à accepter les postes situés dans les zones les plus reculées et isolées de nos campagnes.
J’insiste donc auprès de Mme la ministre pour que ces questions soient examinées avec soin et que les conséquences de cette réforme qui fragilise les antennes départementales soient correctement appréciées.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, auteur de la question n° 968, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Je souhaite tirer aujourd’hui la sonnette d’alarme quant aux conditions très préoccupantes de la rentrée dans les collèges et lycées des Hauts-de-Seine.
Depuis l’année scolaire 2009-2010, la situation s’est beaucoup dégradée.
En raison de suppressions massives de postes d’enseignants, qui ont entraîné une pénurie aiguë de personnel, le rectorat de l’Académie de Versailles connaît de réelles difficultés à assurer le remplacement des enseignants en cas d’absence de courte durée, mais également de longue durée.
Face au manque d’enseignants remplaçants titulaires, lié d’une part à un recrutement insuffisant au regard des besoins et d’autre part à leur sédentarisation à l’année faute d’enseignants titulaires, il est question de recruter massivement des professeurs vacataires ou contractuels. Or, cette solution n’est pas acceptable, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, cela revient à placer devant les élèves des personnes non formées, et ce sans accompagnement. Ensuite, ces types de contrats sont extrêmement précaires, faisant de ces enseignants remplaçants des personnels payés au rabais, corvéables à merci et bien sûr sans statut. Il s’agit de vacataires que les rectorats, face aux besoins abyssaux, ont même du mal à trouver.
Au final, cette situation est très préjudiciable aux élèves, qui n’ont parfois pas de professeurs pendant des semaines, voire des mois. La cause est à rechercher dans une politique budgétaire centrée sur l’application de la RGPP et du principe d’un recrutement pour deux départs en retraite, au mépris des besoins réels des établissements.
Alors que la situation est demeurée très instable tout au long de l’année passée, la réforme de la formation des enseignants dite de masterisation, mise en place dans le seul but de supprimer près de 16 000 postes d’enseignants, va sans aucun doute aggraver la situation pour cette année.
Dans l’académie de Versailles, après la suppression de 578 postes en 2008, de 249 en 2009, ce sont 127 postes de titulaires et 385 postes de stagiaires qui sont supprimés en 2010 ! Madame la ministre, la situation est grave. Le Gouvernement doit prendre la mesure de la pénurie de personnels. Les syndicats d’enseignants, d’étudiants et les associations de parents d’élèves ne cessent d’alerter le ministère de l’éducation nationale, sans succès, sur la catastrophe qui menace le service public de l’éducation.
Quelles mesures d’urgence le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour sortir notre pays de cette pénurie d’enseignants titulaires ? Va-t-il revenir sur la suppression de la formation des enseignants débutants ? Je suis loin de partager l’optimisme affiché sur ce sujet. Le plafond d’emplois d’enseignants pour 2011 va-t-il être augmenté à la hauteur des besoins et va-t-on recruter dès à présent suffisamment de lauréats pour le concours 2010 ?
Monsieur le sénateur, Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, dont vous attirez l’attention sur les non- renouvellements de postes d’enseignants dans le département des Hauts-de-Seine, m’a chargée de vous répondre sur ce sujet fondamental que constitue la maîtrise de la dépense et des effectifs publics.
Vous le savez, notre pays consacre un effort considérable à son éducation. Le budget de l’éducation nationale est le premier budget de l’État. En 2010, il est encore en augmentation de 1, 6 % par rapport à 2009, pour s’élever à 59, 6 milliards d’euros.
Or, depuis 1990, le nombre d’élèves a baissé de 700 000, tandis que le nombre des enseignants s’est accru de plus de 50 000.
La responsabilité du ministre de l’éducation nationale est de contribuer à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. Cette responsabilité, Luc Chatel la partage avec tous les responsables locaux de l’éducation nationale, qui sont en charge de la mise en œuvre des politiques éducatives sur le terrain. Les efforts prévus pour les prochaines années font dès à présent l’objet d’échanges.
Le rôle du ministre de l’éducation nationale est d’assurer à ces jeunes les meilleures conditions d’apprentissage, afin de leur permettre de construire leur parcours de réussite. Cet objectif est au cœur des réformes conduites par Luc Chatel. Tant la réforme du recrutement des enseignants, que le recentrage sur les savoirs fondamentaux dans l’enseignement primaire mais aussi la rénovation et la revalorisation de la voie professionnelle, qui ouvriront des perspectives nouvelles aux lycéens de cette voie d’excellence, ou encore la réforme du lycée d’enseignement général et technologique, qui entre en vigueur cette année, participent de cette volonté.
Toutes ces réformes modifient les missions des enseignants. C’est pourquoi, afin de mieux accompagner ces derniers, Luc Chatel a mis en œuvre un nouveau pacte de carrière, qui combine mesures de revalorisation, nouvelles possibilités de formation et plan santé au travail.
Concernant plus particulièrement l’académie de Versailles, les échanges fréquents que Luc Chatel a eus avec le recteur, M. Alain Boissinot, ne confirment pas votre inquiétude. Au niveau de l’académie, moins de 1 % des postes restent à pourvoir, principalement dans les disciplines professionnelles. La situation, comparable à celle de l’année passée, sera résolue dans les prochains jours. Elle est même plus favorable dans les Hauts-de-Seine que dans les autres départements de l’académie.
Enfin, je vous signale que, par rapport aux autres académies métropolitaines, la part des enseignants contractuels dans le potentiel enseignant de l’académie de Versailles s’inscrit dans la moyenne, soit moins de 3 %.
Cet effort de maîtrise des effectifs publics se concilie donc parfaitement avec une grande qualité d’enseignement.
Madame la ministre, je ne partage pas votre optimisme...
Je souhaite en cet instant vous citer un rapport de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche, rendu au mois de juillet à M. Chatel. Aux termes de ce document, gardé secret au moment de son dépôt mais dont la presse a révélé les aspects les plus dramatiques, « les restrictions budgétaires pour 2010 vont créer des tensions et préparent assez peu l’avenir. » Tout au long des quarante-cinq pages de synthèse, les choix ministériels sont très clairement mis en cause.
Accueillir 25 000 élèves supplémentaires dans le second degré alors que de 3 000 à 4 000 emplois sont supprimés ne relève pas de l’efficience, contrairement à ce que vous affirmez, madame la ministre. En effet, les coupes budgétaires drastiques ont pour conséquence l’augmentation des effectifs par classe ainsi que la suppression de postes d’enseignants remplaçants titulaires, comme chacun peut le constater.
Je ne reviendrai pas sur la guerre des chiffres relative aux contractuels. Je me réfère simplement à ceux que comporte le rapport précité, auquel je vous renvoie.
Je veux maintenant souligner un point très important, à savoir la dégradation sans précédent des conditions de travail et de budget des services administratifs qui, selon le rapport, sont « sollicités au-delà du raisonnable ». En réalité, la politique conduite ne vise qu’à désorganiser, à déréguler et à libérer le système éducatif. Elle ne pourra, selon moi, que créer de nouvelles inégalités.
Le Gouvernement, par la politique qu’il mène, développe les disparités et porte directement atteinte à la globalité du système. Il hypothèque ainsi gravement l’avenir et en porte l’entière responsabilité. Comme je l’ai indiqué, parlementaires, membres de syndicats ou d’associations de parents d’élèves essaient de l’alerter et réclament en vain des solutions pérennes.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 955, adressée à M. le ministre de la défense.
J’appelle votre attention, monsieur le secrétaire d'État, sur la situation de l’entreprise Roxel – son actionnariat est détenu à 50 % par MBDA et à 50 % par la SNPE –, dont l’un des sites se trouve à La Ferté-Saint-Aubin, dans le département du Loiret, que j’ai l’honneur de représenter dans cette enceinte.
Le groupe Roxel, spécialisé dans la production de matériel militaire – en particulier la propulsion de missiles – et de matériel aéronautique et qui compte actuellement quatre-vingt-quatre emplois à La Ferté-Saint-Aubin, a récemment annoncé un plan visant à réorganiser les activités de ses différents sites.
Cette réorganisation se traduirait par le transfert de trente-trois emplois de La Ferté-Saint-Aubin vers Bourges, ce qui poserait de réels problèmes pour les salariés concernés.
De surcroît, vingt emplois seraient purement et simplement supprimés dans un bassin d’emploi déjà touché par de nombreuses suppressions d’activité.
Selon le rapport remis par un expert sur le plan de sauvegarde de l’emploi, de telles mesures n’étaient ni rendues nécessaires par le plan de charge de l’entreprise Roxel établie à La Ferté-Saint-Aubin, ni justifiées par des motivations économiques. En l’espèce, la stratégie peut être invoquée, mais pas l’économie. Il paraît tout à fait possible de construire une stratégie alternative permettant le maintien de l’ensemble des emplois existants à La Ferté-Saint-Aubin.
Monsieur le secrétaire d'État, quelles dispositions concrètes comptez-vous prendre afin que le plan en question soit revu, de manière à remettre en cause les licenciements ainsi que les transferts et à mettre en œuvre une politique d’innovation et de développement, assurant la pérennité du site de La Ferté-Saint-Aubin, dont l’existence risquerait, à terme, d’être menacée si les projets annoncés devenaient effectifs ?
Monsieur le sénateur, le ministère de la défense a pris note de vos préoccupations relatives aux modalités retenues par l’entreprise Roxel, filiale des groupes SNPE et MBDA spécialisée dans les moteurs de missiles tactiques et de roquettes, pour sa réorganisation en région Centre où elle compte deux sites, depuis le rachat de l’ancienne entreprise Protac en 2008, établis sur les communes du Subdray, près de Bourges, dans le Cher, et de La Ferté-Saint-Aubin, dans le Loiret.
Sur l’initiative de la direction de l’entreprise, ces deux sites, dont les activités étaient, pour partie, redondantes en raison de leurs histoires industrielles différentes, vont être spécialisés, le premier dans la pyrotechnie, le second dans les activités mécaniques et de composites aéronautiques. De ce fait, l’entreprise prévoit le transfert de trente emplois de La Ferté-Saint-Aubin vers Le Subdray. Mais cette réorganisation a aussi pour objet non seulement d’améliorer la productivité de Roxel France, mais également de réduire les coûts de l’entreprise, ce qui impose, selon sa direction, une réduction nécessaire de l’effectif total en région Centre de seize emplois. Ces derniers seront supprimés sur le site de La Ferté-Saint-Aubin, qui ne comptera plus alors que trente-trois salariés, mais restera, en tout état de cause, ouvert.
Sur le principe, le ministère de la défense, qui exerce une tutelle de l’État sur l’entreprise publique SNPE, encore détentrice à 50 % du capital de Roxel, ne conteste pas l’opportunité de ce plan de réorganisation, dans la mesure où les coûts induits par les redondances sur les deux sites étaient importants, et ce dans un contexte de restrictions budgétaires.
Il reste attentif à la situation d’un bassin d’emploi tel que celui de La Ferté-Saint-Aubin, qui, par le passé, a déjà été touché par des restructurations de l’industrie de défense. À ce titre, il serait naturellement favorable à ce que des activités nouvelles en rapport avec les savoir-faire existants y soient créées par l’entreprise Roxel, permettant d’assurer un avenir professionnel meilleur aux personnels du site concerné.
Il souhaite, par conséquent, l’établissement d’un dialogue responsable entre la direction de cette société et les collectivités territoriales représentées par leurs élus, de façon qu’une solution en ce sens soit trouvée, dans le respect non seulement de l’intérêt social de l’entreprise, mais également des préoccupations légitimes que nous avons tous à l’égard de l’emploi.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie des précisions que vous avez bien voulu m’apporter.
Je connais depuis bien longtemps La Ferté-Saint-Aubin. Malheureusement, depuis trente ans, j’ai vu les effectifs des diverses entreprises situées sur le site de Chevaux diminuer considérablement année après année. La réelle angoisse des salariés en cause doit être prise en compte.
J’aurais naturellement aimé, monsieur le secrétaire d'État, que vous puissiez me confirmer le maintien sur place des emplois, car les salariés et les élus y sont très attachés compte tenu des réductions d’effectifs enregistrées depuis plusieurs années.
Néanmoins, votre réponse comporte deux points positifs.
Premièrement, vous m’avez assuré de la pérennité de l’activité de l’entreprise Roxel à La Ferté-Saint-Aubin, engagement important dont je prends bonne note, car le maintien de seulement trente-trois emplois a fait craindre une fermeture définitive à moyen terme.
Deuxièmement, vous avez indiqué votre volonté de voir le groupe Roxel développer des activités innovantes à La Ferté-Saint-Aubin. Cette annonce comporte un encouragement, un espoir, dont je ne manquerai pas de faire part à la fois aux salariés et aux élus concernés, de manière que les contacts soient pris le plus rapidement possible pour concrétiser un tel développement. Comme vous le savez, tous les territoires ont besoin d’espoir, lequel passe aujourd’hui par l’essor des activités innovantes. Je crois pouvoir compter sur le ministère de la défense pour soutenir les actions entreprises en matière d’innovation.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de vos annonces.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, en remplacement de Mme Marie-Thérèse Bruguière, auteur de la question n° 949, transmise à Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Ma collègue Marie-Thérèse Bruguière souhaite attirer l’attention du secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme sur les répercussions que provoquent les retards postaux dans l’exercice de la profession d’administrateur de biens et les syndicats de copropriété.
Les convocations aux assemblées générales des copropriétaires, dont sont responsables les administrateurs de biens et les syndicats de copropriété, sont en effet encadrées par des règles strictes, énoncées aux articles 9 et 64 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967. Relevons, notamment, la règle du délai légal de vingt et un jours entre la convocation et le déroulement des assemblées générales, dont le non-respect est une cause intangible d’annulation des assemblées générales.
En cas de difficultés dans l’acheminement postal, des procédures d’annulation peuvent donc avoir lieu, causant ainsi un préjudice important aux professionnels concernés.
S’il convient d’assainir la profession, il n’est pas normal qu’elle puisse être pénalisée par des causes qui ne relèvent pas de sa responsabilité.
Ainsi, Marie-Thérèse Bruguière se demande s’il ne serait pas plus logique de prendre en compte comme point de départ du délai non pas le lendemain du jour de première présentation, mais, par exemple, le lendemain du jour de la preuve de dépôt dans le bureau postal. Elle souhaite savoir s’il est envisageable d’engager une modification réglementaire en ce sens.
Monsieur le sénateur, je répondrai volontiers à cette question à la place de mon collègue chargé du logement et de l’urbanisme. Étant l’un et l’autre élu local, nous connaissons parfaitement le sujet. Le cumul d’une fonction parlementaire ou ministérielle avec un mandat local fait de nous des généralistes !
La notification des convocations aux assemblées générales des copropriétaires est valablement faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par télécopie avec récépissé. Le délai a pour point de départ le lendemain du jour de la première présentation de la lettre recommandée au domicile du destinataire.
Le décret que vous avez cité prévoit en conséquence un délai minimal entre la réception de la convocation et la tenue de l’assemblée générale en deçà duquel la convocation n’est pas valablement faite.
Dans l’hypothèse où la convocation n’a pu être délivrée en temps utile pour respecter le délai réglementaire en raison d’un dysfonctionnement des services postaux, il a été jugé – c’est un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 6 décembre 2005 – que la responsabilité du syndic ne pouvait être engagée dès lors que la convocation à l’assemblée générale avait été adressée dans des délais suffisants qui auraient dû permettre l’acheminement de ce document, sans la défaillance du service postal, dans les délais légaux.
En outre, en l’absence de texte prévoyant un délai maximal entre la réception de la convocation et la tenue de l’assemblée générale, rien n’empêche le syndic d’anticiper d’éventuelles difficultés d’acheminement du courrier en envoyant les convocations quatre ou cinq semaines avant la date de l’assemblée générale.
Ainsi, il apparaît que les textes et la jurisprudence permettent de répondre au problème posé, sans qu’il soit besoin d’envisager une modification réglementaire.
Au surplus, une telle modification ne serait pas conforme à la volonté du législateur, et en bon législateur, vous le savez, monsieur le sénateur. En effet, le délai de vingt et un jours a été prévu pour permettre aux copropriétaires d’étudier correctement les divers documents qui doivent leur être notifiés au plus tard en même temps que l’ordre du jour en application de l’article 11 du décret du 17 mars 1967. Ce délai leur permet également de prendre éventuellement connaissance, conformément à l’article 18-1 de la loi du 10 juillet 1965, des pièces justificatives des charges de copropriété.
Toute modification de ce délai se ferait donc au détriment de la protection des droits des copropriétaires, à laquelle, je le sais, vous êtes attaché, monsieur le sénateur.
Je remercie M. le secrétaire d’État des précisions qu’il a bien voulu m’apporter. Je me ferai un devoir et un plaisir de transmettre à notre collègue Mme Marie-Thérèse Bruguière ces informations, en particulier la décision de la Cour de cassation qui protège les syndics en cas de défaillance postale.
M. Alain Milon, retenu par des ennuis de dernière minute, m’a demandé de le suppléer pour poser cette question, dont de nombreux infirmiers nous ont aussi saisis dans nos départements.
Il souhaitait attirer l’attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur la publication du décret portant sur le code de déontologie des infirmiers.
En vertu de la loi n° 2006-1668 du 21 décembre 2006 et après confirmation par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, il est prévu un code de déontologie des infirmiers préparé par le Conseil national de l’ordre des infirmiers, puis édicté sous la forme d’un décret en Conseil d’État.
Ce code revêt une importance capitale pour la profession infirmière qui souhaite se doter de règles précises fixant non seulement les devoirs des infirmiers envers leurs patients, mais également leurs devoirs entre eux-mêmes et envers les autres professionnels de santé.
Il est nécessaire que des règles actualisées soient établies car l’exercice infirmier a connu des évolutions majeures parallèlement à celles que notre système de soins a pu connaître ces dernières années.
Par ailleurs, le code de déontologie permettra à l’Ordre de remplir sa mission fondamentale de garantie du respect des principes éthiques de la profession infirmière, en ouvrant aux professionnels la voie d’une procédure de conciliation ainsi que la possibilité que soient portées devant les chambres disciplinaires les affaires les concernant.
Pourtant, à ce jour, et bien que le projet de code de déontologie des infirmiers ait été remis depuis plusieurs mois aux services du ministère de la santé, ce décret n’est toujours pas publié.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous demande, en conséquence, de bien vouloir nous indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre pour que ce décret d’application soit publié dans les meilleurs délais.
Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser Mme Roselyne Bachelot-Narquin, qui m’a chargé de répondre à votre question.
Comme vous le savez, la loi du 21 décembre 2006 a institué un ordre des infirmiers regroupant obligatoirement tous les infirmiers habilités à exercer leur profession en France, à l’exception de ceux qui sont régis par le statut général des militaires.
L’ordre national des infirmiers a pour mission de veiller à maintenir les principes éthiques et à développer la compétence, indispensables à l’exercice de la profession. Il contribue, en outre, à promouvoir la santé publique et la qualité des soins.
Comme le prévoit le code de la santé publique, le Conseil national de l’Ordre doit préparer un code de déontologie, qui énonce notamment les devoirs des infirmiers dans leurs rapports avec les patients, les autres membres de la profession et les autres professionnels de santé.
Ce projet est ensuite transmis aux services du ministère chargé de la santé, lequel procède à son analyse et apporte les adaptations nécessaires, notamment sur le plan juridique.
Il peut alors, et seulement après ces étapes, être transmis au Conseil d’État pour être inséré dans le code de la santé publique.
Un projet de code de déontologie a effectivement été transmis aux services du ministère chargé de la santé. Ma collègue Mme Roselyne Bachelot-Narquin se félicite de cette première étape, qui témoigne d’une volonté forte, de la part du conseil national de l’ordre des infirmiers, de se doter de cet outil, particulièrement structurant.
La profession infirmière dispose déjà de règles professionnelles inscrites dans le code de la santé publique, auxquelles les infirmiers sont très attachés, d’ailleurs, mais le code de déontologie constitue probablement une étape supplémentaire. Il représente en effet l’aboutissement d’un travail mené par les professionnels eux-mêmes, qui devrait permettre de parvenir dans les meilleurs délais, monsieur le sénateur, à une version suffisamment aboutie pour la présenter au Conseil d’État puis, naturellement, la publier.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de ces informations très détaillées. M. Alain Milon, auteur de cette question, les lira avec attention. De nombreux infirmiers, notamment dans mon département, pourront également en prendre connaissance.
Je souhaite que ce cheminement puisse se faire dans les meilleurs délais.
La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 958, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
J’appelle une nouvelle fois, comme je l’ai fait il y a deux ans, l’attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur un problème qui nous est souvent signalé et que nous pouvons constater nous-mêmes : il s’agit de l’augmentation du niveau sonore des séquences publicitaires à la télévision, qui nous agace tout particulièrement. C’est un véritable problème et une pratique désagréable pour le téléspectateur.
En effet, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, avait conclu, dans une première étude en 2003, que les pratiques à la télévision étaient contraires à l’article 14 du décret du 27 mars 1992 réglementant le volume sonore moyen des séquences publicitaires. En 2006, la situation était toujours la même et le volume sonore des messages publicitaires était toujours supérieur au volume sonore moyen du reste du programme.
Au moment du passage à la télévision numérique terrestre, le CSA a créé un groupe de travail afin d’associer les éditeurs de services de télévision à la maîtrise du niveau sonore des écrans publicitaires.
J’aimerais savoir où en sont ces travaux et, surtout, quels seraient les moyens concrets pour faire appliquer la réglementation. Vous le savez tout comme moi, et les faits le montrent bien, malgré les constatations et recommandations du CSA, les chaînes de télévision n’en font aucun cas.
Avez-vous donc l’intention de mettre en œuvre des moyens concrets de coercition pour mettre fin à ces pratiques déplaisantes, qui, de plus, nuisent à leurs propres auteurs, puisque les téléspectateurs ont souvent le réflexe d’éteindre ou de couper le son au moment des séquences publicitaires pour ne pas être gênés.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, des informations que vous voudrez bien m’apporter. J’avais obtenu une réponse à cette question, dans cet hémicycle, voilà deux ans, mais les choses n’ont pas évolué.
Monsieur le sénateur, permettez-moi de vous livrer la réponse de M. Frédéric Mitterrand, qui est retenu aujourd’hui.
À plusieurs reprises, le législateur a souhaité que le volume sonore des écrans publicitaires ne soit pas supérieur à celui des programmes télévisés.
Le décret « publicité » du 27 mars 1992 fixe le régime juridique applicable à la publicité télévisée, et dispose que « Le niveau sonore des séquences publicitaires ainsi que des écrans qui les précèdent et qui les suivent ne doit pas excéder […] le niveau sonore moyen du reste du programme. » Le respect de ces dispositions est assuré par le Conseil supérieur de l’audiovisuel.
Une étude menée par le CSA en 2003 avait conclu que le niveau sonore des écrans publicitaires dépassait le niveau moyen des programmes dans plus de la moitié des cas. Une campagne de mesures a donc été lancée à la fin de l’année 2004, en concertation avec les opérateurs. Sur ce fondement, le CSA a adressé, le 23 mai 2006, une mise en garde à M6 et a également écrit à TF1 et à France 3.
Depuis cette date, le CSA n’a pas émis de nouvelles observations sur cette question.
Afin de prendre en compte les évolutions induites par la diffusion en mode numérique, le CSA a entamé une réflexion technique avec les chaînes, pour mettre en place de nouvelles méthodes de mesure, qui tiennent compte des technologies multi-canal et des traitements sonores qu’elles facilitent.
Le CSA a ainsi adopté en septembre 2008 une décision consistant à identifier un niveau de référence commun. Les travaux portent aujourd’hui sur le volume sonore perçu par le téléspectateur.
La complexité technique de la matière – les difficultés pour mettre en place des outils de mesure fiables et objectifs – associée à une dimension parfois subjective du ressenti par le téléspectateur constituent pour le CSA des contraintes importantes dans la mise en œuvre de son pouvoir de contrôle.
Afin de permettre au CSA d’effectuer un contrôle plus adapté, le cadre réglementaire a été complété.
La loi de 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a, en effet, introduit dans la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication une disposition consistant, par voie de décret, à garantir « le maintien à niveau sonore constant des séquences publicitaires ainsi que des écrans qui les précèdent et qui les suivent ».
En conséquence, le décret « publicité » de 1992 a été complété le 2 juillet 2010, avec la notion de « traitement de la dynamique sonore » : « Le niveau sonore des séquences publicitaires ainsi que des écrans qui les précèdent et qui les suivent ne doit pas excéder, s’agissant notamment du traitement de la dynamique sonore, le niveau sonore moyen du reste du programme. »
Par ailleurs, le Syndicat national de la publicité télévisée, qui regroupe les régies publicitaires des chaînes, les agences-conseils en communication et les annonceurs, a récemment saisi les directions techniques des principales chaînes de télévision afin de normaliser le son des messages publicitaires.
Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la recommandation technique sur le mixage audio à la télévision, approuvée le 4 février 2010 par les diffuseurs, qui vise à harmoniser les niveaux sonores ressentis entre programmes et entre chaînes.
L’ensemble de ces travaux doit permettre de répondre à la préoccupation légitime des téléspectateurs d’un meilleur confort d’écoute.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse précise et fouillée, qui nous laisse espérer que le décret du 2 juillet 2010, notamment, sera appliqué. En effet, j’ai pu constater le week-end dernier encore que le son des séquences publicitaires qui interrompent les émissions télévisées était toujours très élevé.
J’avais déjà attiré l’attention sur cette question, sur laquelle il nous faut réfléchir. En effet, nous qui avons encore nos bras et nos mains devons nous mettre à la place de ceux qui n’en ont plus l’usage, qui sont hospitalisés et dont la télévision constitue souvent la seule distraction. Ainsi, j’ai connu une personne qui est restée paraplégique pendant dix-sept ans : elle avait la télévision mais ne pouvait absolument pas se servir de ses mains pour actionner la télécommande. Nous devons nous mettre à la place de ces gens.
Je souhaite donc que l’on sensibilise les responsables des chaînes. Nous n’accepterons pas la situation actuelle et voulons que le son de la télévision soit toujours constant, ne serait-ce que pour les personnes âgées ou handicapées qui ne peuvent utiliser leur télécommande. Je vous remercie d’y veiller, madame la secrétaire d'État, avec l’ensemble du Gouvernement.
La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, auteur de la question n° 965, adressée à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.
Je voudrais attirer l’attention du Gouvernement sur le devenir de la médecine du travail.
En 2010, un rapport particulièrement alarmant a été remis au ministre concerné sur ce sujet. En outre, aujourd'hui, le Gouvernement ne fait pas mystère de son souhait de relever l’âge légal de départ à la retraite et d’allonger la durée de cotisation des salariés, tout en niant la très importante question de la pénibilité et celle, qui est aussi très importante, des nouveaux facteurs d’exposition aux risques.
Aussi, pour toute une population de travailleurs que le Gouvernement souhaite – le mot est faible ! – plus importante et plus âgée, la question de la prévention des problèmes de santé au travail et de la promotion des bonnes conditions d’exercice de la profession exercée se pose de manière plus aiguë que jamais.
Nous avons donc affaire aujourd'hui à des salariés très vulnérables confrontés à de nouvelles contraintes de santé dans un contexte de crise économique et de durcissement des marchés qui, bien entendu, a des conséquences sur les conditions de travail.
Cette fragilité risque de s’accentuer dans les mois et les années à venir. Aussi, ces travailleurs auront besoin d’un suivi sanitaire plus conséquent que celui qui existe aujourd’hui.
Or, – c’est le cœur de ma question – la médecine du travail est aujourd'hui presque sinistrée, malgré l’extraordinaire dévouement dont font preuve ces professionnels, qui sont parfois amenés à suivre jusqu’à 3 600 salariés par an et qui se trouvent, aujourd’hui, dans l’impossibilité de respecter la réglementation en vigueur, celle qui est inscrite dans le code du travail.
C’est une tâche colossale qui est dévolue aux médecins du travail, compte tenu de l’évolution de leur démographie ; je le rappelle, 51 % d’entre eux ont plus de 55 ans et 75 % plus de 50 ans. Par ailleurs, de nombreux obstacles entravent le renouvellement d’une profession qui semble désormais, bien qu’elle soit hyperspécialisée, peu attractive.
Le constat est clair : les effectifs des médecins du travail sont actuellement notoirement insuffisants !
À l’heure où je m’exprime, le débat sur cette question a commencé à l’Assemblée nationale. De nombreuses craintes ont été exprimées par les parlementaires, mais aussi par les partenaires sociaux. Ils s’inquiètent d’une éventuelle banalisation de la médecine du travail, qui ferait intervenir des praticiens généralistes, voire des infirmiers ou des infirmières, à la place des médecins spécialisés, mais aussi d’une évolution réglementaire et législative qui laisserait, à terme, le patronat gérer presque exclusivement ce secteur d’activité.
Pourtant, une réforme est plus que jamais nécessaire afin de garantir au médecin du travail, dans le cadre d’une équipe pluridisciplinaire, les moyens dont il a besoin pour mener correctement la mission qui est la sienne.
D’une manière plus générale, le médecin et son équipe doivent être en mesure d’appréhender les risques anciens et nouveaux que peut courir un salarié dans le cadre de sa profession, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui – je viens de le démontrer – et risque malheureusement de l’être encore moins demain.
Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous, sinon nous garantir, du moins tenter de nous convaincre que la médecine du travail disposera bientôt des moyens réglementaires, matériels et humains nécessaires pour appréhender les nouveaux risques auxquels se trouve confronté le monde du travail ?
Monsieur le sénateur, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la nécessaire évolution de la médecine du travail, en soulignant l’importance de la prise en compte des questions de santé au travail et de suivi médical des salariés, dans un contexte de crise économique et de durcissement des marchés et des conditions de travail.
Les questions de santé au travail et de protection des salariés constituent – évidemment ! – un enjeu social majeur, et cela pour deux raisons. D’une part, émergent des risques professionnels qui sont nouveaux ou qui n’étaient guère pris en compte auparavant ; on peut notamment citer à cet égard les troubles musculo-squelettiques, les risques psychosociaux et les risques à effets différés dus aux expositions professionnelles. D’autre part, le vieillissement de la population amène à poser la question de l’adaptation des conditions de travail, en vue d’éviter l’altération précoce de la santé des travailleurs et de favoriser le « vieillissement actif ».
Dans le cadre de la négociation préparatoire à la réforme de la médecine du travail, un certain nombre de thèmes avaient été proposés dans un document d’orientation transmis aux partenaires sociaux à la fin du mois de juillet 2008.
Cette négociation des partenaires sociaux, qui s’est déroulée de janvier à septembre 2009, n’a pas abouti à un accord. Par conséquent, sur la base de ces échanges, ont été présentés au conseil d’orientation sur les conditions de travail, le 4 décembre 2009 et le 11 mai dernier, les grands axes que devrait suivre la réforme des services de santé au travail.
À l’occasion du débat sur le projet de loi portant réforme des retraites, et parce que les services de santé au travail ont un rôle majeur à jouer, notamment sur la question essentielle de la prévention de la pénibilité, un certain nombre de ces mesures ont d’ores et déjà été proposées et étudiées par l’Assemblée nationale. Elles le seront dans les prochaines semaines par la Haute Assemblée. Or elles me semblent rejoindre les pistes que vous proposez, monsieur le sénateur, notamment pour ce qui concerne les missions des services de santé au travail, l’organisation de leur action et la reconnaissance d’un rôle spécifique à l’équipe de santé autour du médecin du travail.
Madame la secrétaire d'État, vous avez tenu des propos que je qualifierai presque de rassurants, mais qui ne correspondent pas vraiment aux échos que nous recevons du débat actuellement en cours à l’Assemblée nationale !
Pour répondre au problème que j’ai soulevé, il faut avant tout afficher notre volonté politique de doter notre pays d’un grand service de la médecine du travail. Celui-ci prendrait en charge toutes les missions que j’ai évoquées, mais aussi, plus largement, les nouveaux risques – des radiations ionisantes aux nanotechnologies – auxquels sera très rapidement confronté le monde du travail.
Toutefois je suis tenté de dire que ce débat est en partie pollué par un autre, celui qui est relatif aux retraites. En raison de l’allongement de la durée du temps de travail, je crains malheureusement que vos compétences, madame la secrétaire d’État chargée des aînés, ne soient bientôt couvertes par celles du ministre du travail, même si je ne vous le souhaite pas !
Sourires.
La parole est à Mme Catherine Troendle, auteur de la question n° 954, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Madame la secrétaire d'État, je souhaiterais attirer votre attention sur le nombre important de commissaires enquêteurs nommés chaque année par les commissions départementales d’aptitude à ces fonctions.
En vertu des dispositions de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement, pour être désignée comme commissaire enquêteur et conduire des enquêtes publiques, toute personne peut faire acte de candidature auprès du secrétariat de la commission départementale d’aptitude aux fonctions de commissaire enquêteur. Cette dernière, présidée par un magistrat administratif, se prononce sur la compétence et l’expérience de ceux qui postulent aux fonctions de commissaire enquêteur.
Or la grande qualité des candidatures exclut quasiment toute possibilité de refus de la commission. Les critères éliminatoires sont très restreints et le recours, devant le tribunal administratif, contre une décision de refus dissuade les membres de la commission de procéder au moindre rejet.
Ainsi, chaque année, de nouveaux commissaires enquêteurs viennent grossir les rangs de leurs collègues nommés les années précédentes ; en effet, un recrutement annuel est imposé aux commissions départementales.
Or pour que les commissaires enquêteurs soient véritablement efficaces, ils doivent acquérir de l’expérience à travers les dossiers qui leur sont confiés. Malheureusement, certains d’entre eux ne traiteront qu’une affaire par an, tout simplement parce que leurs effectifs pléthoriques sont en totale inadéquation avec le nombre d’affaires à traiter annuellement. Ce surnombre s’explique aussi parce qu’il suffit à un commissaire enquêteur déjà nommé de valider annuellement son agrément pour disposer, somme toute, d’une « mission à vie », dès lors qu’aucune disposition n’impose une limite d’âge.
Il conviendrait donc, dans l’immédiat, d’imposer une pause de deux ans au moins dans le recrutement des commissaires enquêteurs.
Par ailleurs, il serait également souhaitable de prévoir une limite d’âge au-delà de laquelle il ne serait plus possible d’exercer cette mission, afin d’assurer le renouvellement, voire le rajeunissement de la profession et de réguler le nombre des commissaires enquêteurs, qui seront ainsi sollicités à diverses reprises pour plusieurs affaires et pourront, par conséquent, acquérir une véritable expérience de terrain.
Madame la sénatrice, vous avez attiré l’attention de Jean-Louis Borloo sur le nombre important de commissaires enquêteurs inscrits sur les listes départementales d’aptitude à ces fonctions, de tels effectifs ne permettant pas aux intéressés d’acquérir une expérience suffisante compte tenu du faible nombre de dossiers qui leur sont confiés annuellement.
Je souhaite, tout d’abord, souligner que nous avons constaté, entre 2009 et 2010, une légère diminution du nombre des commissaires enquêteurs à l'échelle nationale : leur effectif est passé de 6 453 à 6 354; soit une réduction de 1, 56%.
Par ailleurs, le vice-président du Conseil d’État a chargé un groupe de travail, composé de membres de cette instance et de magistrats des tribunaux administratifs, de conduire une réflexion sur les conditions dans lesquelles les présidents des tribunaux administratifs désignent les commissaires enquêteurs et les membres des commissions d’enquête publique.
Ce groupe de travail n’a pas encore remis son rapport, mais il a d’ores et déjà fait part au ministre d’État des principales orientations qu’il comptait proposer afin d’améliorer les conditions de sélection des commissaires enquêteurs. Parmi celles-ci, figure notamment l’idée d’une limitation de la durée de validité de l’inscription sur les listes d’aptitude, ce qui devrait permettre de réexaminer périodiquement la capacité des candidats à exercer de telles fonctions.
Grâce à cette évolution, nous pourrons être plus exigeants sur les compétences qui sont attendues des commissaires enquêteurs et renforcer la sécurité juridique des enquêtes publiques.
Ces pistes de réforme semblent de nature à répondre à vos préoccupations, madame la sénatrice, en limitant le nombre de commissaires enquêteurs inscrits sur les listes d’aptitude tout en permettant à chacun d’entre eux d’être désigné plus régulièrement pour mener une enquête publique. En revanche, le ministère est beaucoup plus réservé quant à l’instauration d’une limite d’âge.
Sur la base des conclusions définitives que rendra ce groupe de travail, une mise en œuvre de la réforme par voie réglementaire interviendra dans les prochains mois.
Telles sont, madame la sénatrice, les précisions que je peux vous apporter afin d’alimenter votre réflexion sur ce sujet essentiel pour nos territoires.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.
La proposition d’instaurer une limite d’âge était née du sentiment que, comme vous l’avez vous-même souligné, les commissaires enquêteurs, une fois nommés, ne subissent plus aucune vérification de leurs compétences. Il leur suffit de s’inscrire sur les listes d’aptitude et de réaffirmer chaque année leur volonté d’y rester.
Les pistes de réflexion que vous avez évoquées, à la suite du groupe de travail constitué sur cette question, me siéent parfaitement, car elles vont tout à fait dans le bon sens, me semble-t-il.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 963, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur la nécessité de réformer l’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », et notamment d’élargir la nomenclature des logements dits « sociaux ».
Dans de nombreux départements, l’application des dispositions de l’article 55 de la loi SRU pose de réelles difficultés. Je prendrai l’exemple d’un département que je connais bien puisque c’est le mien, celui de la Haute-Savoie.
Le prix du foncier, nettement au-dessus de la moyenne, y rend le coût de la construction de logements sociaux très onéreux pour la plupart des communes. Si l’on inclut toutes les dépenses induites par ces constructions et par l’accueil des populations occupant ces logements, en particulier les aménagements, équipements et services publics, ce coût devient littéralement prohibitif.
Lorsqu’ils comparent ce coût au montant de la pénalité prévue pour déficit de logements sociaux, beaucoup de maires restent perplexes. Certains en effet n’ont pas hésité à m’interroger sur la volonté réelle de l’État de voir augmenter le parc de logements sociaux.
À cela s’ajoute en Haute-Savoie la nécessité de ne pas « consommer » outre mesure le foncier, et de préserver le maximum de terres à vocation agricole. En effet, l’agriculture occupe une place majeure dans notre économie, et se caractérise par l’excellence des productions. Or, notre département connaît chaque année, depuis vingt ans, une croissance de population conséquente, de plus de 8 000 habitants par an. C’est en outre un département touristique, qui doit donc disposer de capacités d’accueil, et préserver ses espaces naturels. Enfin, il s’agit d’un département au territoire contraint par son relief. Tous ces facteurs ne peuvent que concourir à une surenchère du prix du mètre carré constructible.
Je terminerai ce tableau en parlant de la crise économique que connaît notre pays depuis bientôt deux ans. Elle a encore aggravé la difficulté que rencontrent les collectivités à mettre en chantier des programmes de logements sociaux.
De fait, aujourd’hui, de nombreuses communes se voient pénalisées par le prélèvement proportionnel prévu par la procédure du constat de carence, tout simplement parce qu’elles ne parviennent pas à atteindre l’objectif fixé par la loi. Elles souhaiteraient pourtant y parvenir, et font des efforts en ce sens. Les maires ressentent cela comme une injustice, et, pour ma part, je partage leur sentiment.
Pourtant, quelques mesures pourraient permettre de ne pas pénaliser injustement ces communes.
La première consisterait à réintroduire dans le décompte des logements sociaux ceux qui en ont été exclus du fait de leur acquisition par des ménages ayant bénéficié du prêt social de location accession, le PSLA. Ces logements, qui sont issus du parc locatif social, doivent en effet, à mon sens, continuer à être considérés comme des logements sociaux, car les conditions de ressources des acquéreurs restent les mêmes après l’achat, et ne dépassent pas les plafonds établis. Or, aujourd’hui, ces logements ne sont comptabilisés dans les 20 % prévus par la loi que durant cinq ans, ce qui fait bien évidemment baisser le quota atteint par les communes. Il conviendrait qu’ils soient pris en compte définitivement.
Par ailleurs, les constructions de logements en accession à la propriété très aidés devraient également être prises en considération dans le décompte des 20 %. Car, d’abord, elles bénéficient du processus d’aide à la mobilisation foncière, ensuite elles s’adressent à des populations modestes et, enfin, les acquéreurs libèrent autant de logements sociaux.
L’article 55 de la loi SRU ne serait certainement pas mis en péril par la souplesse ainsi amenée par ces mesures.
Enfin, de nombreux élus estiment qu’il serait opportun d’inclure dans le quota de 20 % les emplacements destinés à l’accueil des gens du voyage, eu égard à la situation de la majeure partie d’entre eux, très souvent bénéficiaires des prestations sociales.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, le Gouvernement est-il disposé, madame la secrétaire d’État, à faire évoluer l’article 55 de la loi du 13 décembre 2000 ?
Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur les difficultés d’application de l’article 55 de la loi SRU, en particulier dans votre département de la Haute-Savoie.
Vous évoquez, notamment, le prix du foncier, la nécessité de préserver le foncier agricole, les contraintes imposées par le relief, tant de facteurs liés aux spécificités de votre territoire, qui surenchérissent le prix du mètre carré constructible. Il est exact que de tels phénomènes peuvent représenter un frein à la construction de logements.
Cependant, je note que votre département est parvenu à surmonter, au moins en partie, ces obstacles. Vous avez en effet pu maintenir, sur la période 2006-2009, un rythme satisfaisant de construction de logements. Pendant ces quatre années, plus de 38 000 logements ont fait l’objet d’un permis de construire en Haute-Savoie, dont environ 15 % de logements locatifs sociaux neufs, puisqu’un peu moins de 6 000 logements ont été financés au cours de cette période.
Vous déplorez que ne soient pas décomptés comme logements sociaux les logements vendus à leurs occupants via le dispositif dit de prêt social location accession, le PSLA, et vous proposez que soient décomptés également les logements en accession sociale à la propriété. Le législateur n’a en effet retenu que les logements locatifs sociaux, à partir du constat que la très grande majorité des ménages, dont les revenus sont modestes ou faibles, ne peut avoir accès qu’au parc des bailleurs sociaux.
Par ailleurs, vous proposez que soient inclus, dans ce décompte des logements sociaux, les emplacements destinés à l’accueil des gens du voyage.
Le législateur a déjà tenu compte des efforts de solidarité fournis par les communes pour accueillir les gens du voyage. En effet, leur contribution au financement de ces emplacements est prise en compte au titre des dépenses déductibles du prélèvement sur leurs ressources fiscales, prélèvement défini à l’article L. 302-7 du code de la construction et de l’habitation. Il semble difficile d’aller plus loin dans la prise en compte de ces aires d’accueil, dans la mesure où une aire d’accueil de gens du voyage ne peut en aucun cas être assimilée à une offre de logements locatifs sociaux.
L’article 55 de la loi SRU a pour objectif de développer une forme de solidarité entre les ménages et les territoires. Le fait que la Haute-Savoie soit un département fortement attractif a certes des conséquences sur le prix du foncier que les autorités publiques doivent compenser pour arriver à financer des logements dont les loyers soient accessibles aux plus modestes de nos concitoyens.
Je partage votre sentiment et c’est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de concentrer ses aides à la réalisation de logement social sur les zones les plus tendues afin de mieux répondre à ce besoin de la population. Ainsi, le Gouvernement tente d’apporter des réponses aux questions que vous venez de soulever, monsieur le sénateur.
Je souhaite remercier Mme la secrétaire d’État des précisions qu’elle a bien voulu m’apporter sur un sujet qui, s’il ne relève pas de ses compétences ministérielles actuelles, lui est familier en tant qu’élue locale. Je voudrais aussi la remercier de reconnaître l’effort engagé par le département de la Haute-Savoie dans des conditions très difficiles, essentiellement liées au surcoût foncier. Sans l’aide du conseil général et des communes, les bailleurs sociaux ne parviendraient pas à équilibrer financièrement leurs réalisations.
Cependant, je regrette que l’accession sociale au sens large ne soit pas comptabilisée dans le quota de logements sociaux. Il ne s’agit pas d’exonérer les communes de leurs obligations, mais de les inciter à accentuer leur effort pour faciliter la mixité sociale, en juxtaposant le logement destiné à l’accession sociale à la propriété et le logement social locatif. Cela lèverait certaines craintes tout en changeant le climat dans un certain nombre de lotissements, et permettrait d’aller un peu plus vite.
Quant aux aires d’accueil des gens du voyage, elles ne sont effectivement pas des logements sociaux ni même des logements locatifs. Elles permettent de recevoir des populations que chacun laisse à l’autre le soin d’accueillir. Leur prise en compte permettrait donc de faire un effort social, si vous me permettez d’employer ce terme.
La parole est à Mme Françoise Cartron, auteur de la question n° 967, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.
Ma question, qui est dans le droit fil de celle que M. Carle vient de poser, s’adresse tout particulièrement à M. le secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme. Elle porte sur les effets néfastes de l’abaissement du plafond de prêt dans le cadre du dispositif de Pass-Foncier.
Depuis le 1er juillet 2010, le plafond des prêts accordés dans le cadre du Pass-Foncier a été abaissé de 20 000 euros, sans consultation des acteurs de l’accession sociale à la propriété. Cette décision a été expliquée par le tarissement des financements accordés par Action Logement, anciennement « 1 % logement ».
Cette décision précipitée, qui prend effet en même temps que la fin du doublement du prêt à taux zéro pour les logements neufs, marque sans conteste un recul de la politique d’accession sociale à la propriété.
Alors que l’application du dispositif de Pass-Foncier doit prendre fin le 31 décembre 2010, cet abaissement sans préavis du plafond de prêt risque d’entraîner d’importantes difficultés pour les ménages déjà engagés dans un projet, et dont l’accession à la propriété pourrait être remise en cause. Cette décision affectera également les professionnels, dont l’activité risque d’être fragilisée par la perte sèche d’opérations pour lesquelles ils avaient déjà beaucoup investi.
Dans sa conception, le Pass-Foncier était un outil intéressant d’aide à l’accession à la propriété, mais sa mise en œuvre a pâti du manque d’information de l’État en direction des collectivités territoriales, ainsi que de la brièveté des délais accordés. Ce dispositif permettait pourtant de sécuriser l’accession à la propriété de personnes qui n’auraient pas pu devenir propriétaires, notamment dans des zones où le marché immobilier est sous tension.
Je regrette que le Gouvernement ait décidé de remettre en cause cet instrument d’une politique sociale de l’habitat qui commençait à prendre sa mesure et auquel étaient associées les collectivités territoriales.
En conséquence, je vous demande, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer si des directives nécessaires pourraient être données afin que la nouvelle réglementation du Pass-Foncier soit appliquée avec souplesse, afin d’assurer la réalisation des projets en cours et de sauvegarder les emplois concernés.
Je vous demande également de bien vouloir indiquer s’il est envisageable que soient prises des mesures visant à pérenniser la politique d’accession sociale à la propriété, qui trouve aujourd’hui un vrai écho, en particulier chez les jeunes ménages primo-accédant.
Madame la sénatrice, vous avez interrogé mon collègue Benoît Apparu sur le dispositif du Pass-Foncier. Ce dispositif, en octroyant une aide puissamment solvabilisatrice aux ménages bénéficiaires, a donné lieu à une mobilisation très importante des collectivités territoriales, des professionnels et des ménages accédant à la propriété. De plus, les services de l’État ont largement relayé l’information aux niveaux régional et départemental par la tenue de réunions à destination des collectivités territoriales.
Compte tenu de cette forte mobilisation, au début du mois de juillet 2010, les prévisions d’engagements de Pass-Foncier recensées par les collecteurs d’Action Logement dépassaient le nombre de 27 000, à divers niveaux d’avancement, ce qui permettait d’atteindre, à la fin de l’année 2010, l’objectif de 30 000 opérations établi dans le cadre du plan de relance, au niveau de la demande.
Financièrement, cet objectif à atteindre sur 2009 et 2010 avait conduit à prévoir, au début de l’année 2009, une enveloppe de 1 milliard d’euros, correspondant à un montant moyen observé de 33 000 euros par opération. Ce montant a été inscrit dans le décret fixant pour chaque emploi du « 1% logement » les enveloppes minimales et maximales.
La loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion a étendu le dispositif du Pass-Foncier aux opérations dans le logement collectif, par l’octroi d’un prêt à remboursement différé. Elle a donné la possibilité aux territoires densément peuplés de bénéficier du Pass-Foncier, faisant du dispositif un véritable levier des politiques locales de l’habitat. La commune de Bordeaux s’est ainsi engagée sur une centaine de logements en Pass-Foncier pour l’année 2010.
La diffusion des Pass-Foncier dans les zones tendues a eu lieu progressivement, compte tenu de la longueur des opérations immobilières, ce qui a eu pour effet d’augmenter le montant moyen des Pass-Foncier à un niveau proche de 40 000 euros. L’objectif de 30 000 Pass-Foncier est alors devenu incompatible avec l’enveloppe financière prévue, créant un risque réel de saturation de l’objectif avant l’entrée en vigueur du nouveau régime d’aide à l’accession à la propriété.
Afin de ne pas compromettre la capacité d’Action Logement à délivrer des Pass-Foncier jusqu’à la fin de l’année 2010, Action Logement, ses collecteurs, et le secrétaire d’État chargé du logement et de l’urbanisme, Benoist Apparu, ont choisi d’en réduire le montant.
La diminution forfaitaire de 20 000 euros ne remet pas en cause les opérations pour lesquelles l’accord du collecteur a été délivré avant la parution du décret, le 28 juillet 2010. Elles conserveront les anciens montants. Je pense répondre par cette phrase à la demande de souplesse que vous avez évoquée dans votre question.
Elle permettra en revanche le déblocage de l’ensemble des projets qui se trouvaient gelés par des collecteurs qui s’inquiétaient de faire moins de Pass-Foncier que prévu avec l’enveloppe dédiée. Le Conseil national de l’habitat, qui regroupe tous les acteurs de l’accession sociale à la propriété, a été consulté en amont de la mesure. Le 7 juin 2010, il rendait ainsi un avis favorable, à l’unanimité moins une voix des suffrages exprimés.
Le fait que cette décision ait été prise au même moment que la diminution du doublement du prêt à 0 % souligne simplement que nous sommes entrés dans la phase de fin progressive du plan de relance de l’économie.
Le Gouvernement continue de soutenir activement l’accession à la propriété. Il a engagé une grande réforme des aides à l’accession à la propriété, qui sera présentée dans le cadre du prochain projet de loi de finances et dont le Président de la République, accompagné de Benoist Apparu, dévoile ce matin même l’architecture. Celle-ci veillera, tout en simplifiant l’ensemble des aides existantes, à créer un dispositif plus puissant pouvant assurer aux ménages bénéficiaires une forte solvabilisation dans des conditions de sécurisation satisfaisantes, qui tiendra compte de leurs ressources et de la zone dans laquelle ils comptent s’installer.
Madame la sénatrice, telles sont les précisions que j’étais en mesure de vous apporter sur ce sujet. Elles sont de nature à vous rassurer sur la capacité du Gouvernement à accompagner les Pass-Foncier déjà engagés.
Madame la secrétaire d'État, me voilà à moitié rassurée. Certes, les Pass-Foncier qui sont déjà engagés seront maintenus, ce qui apaisera les inquiétudes des ménages concernés. Toutefois, je n’ai pas entendu les déclarations du Président de la République, qui sont imminentes.
J’espère que des échos de ce débat lui parviendront et que le Gouvernement se rendra compte que le Pass-Foncier est une mesure très efficace permettant à de jeunes ménages primo-accédant qui n’ont pas les ressources pour envisager d’autres opérations de devenir acquéreurs de leur résidence principale. C’est un objectif du Président de la République, c’est aussi le rêve de nombreux Français.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, auteur de la question n° 907, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Madame la secrétaire d'État, développer l’attractivité des territoires ruraux est, vous le savez, nous le savons tous, une tâche des plus délicates. La mission devient insurmontable quand il faut en plus lutter, comme c’est le cas en Dordogne, contre le désengagement de l’État. Et, comme si cela ne suffisait pas, nous devons nous battre maintenant pour préserver l’activité de notre réseau ferré. C’est sur ce point précis que je souhaite vous interroger.
En effet, qu’il s’agisse du transport de passagers, du fret ou de ses propres ateliers, la SNCF déserte progressivement mais inéluctablement notre département. Jugez plutôt.
La situation des ateliers SNCF de Chamiers s’aggrave de jour en jour. Si la charge de travail est ponctuellement plus élevée aujourd’hui, c’est simplement parce que de nombreux postes ont encore été supprimés cette année.
J’en viens au fret, priorité environnementale, s’il en est. Là encore, le désengagement est patent. Une gare dédiée au transport du bois a par exemple été ouverte au Buisson-de-Cadouin en 2001 et fermée dès 2003 !
Dans la même veine, au Condat sur Lardin, le conseil général de la Dordogne et les papeteries de Condat, plus grosse activité industrielle de notre département, ont créé en 2003 un embranchement ferré spécialement conçu pour permettre l’expédition par le rail des produits de l’entreprise. Or les exigences de Réseau ferré de France et les hésitations de la SNCF ont rendu impossible tout accord avec l’entreprise. En conséquence, l’outil ferré reste désespérément inutilisé, tandis que l’entreprise s’oriente désormais vers le transport routier !
Et ce n’est pas tout ! Le désengagement ne vaut pas seulement pour le fret : il vaut aussi pour les usagers.
Aujourd’hui, malgré le contrat État-Région, c’est bien le conseil régional d’Aquitaine qui finance les deux tiers des investissements de modernisation des gares. De son côté, la SNCF tente de restreindre les horaires d’ouverture des guichets, comme hier à Thiviers ou aujourd’hui à Périgueux. À Mussidan, elle demande carrément que la commune lui rachète son terrain et démantèle elle-même les rails de l’ancienne voie ferrée !
Que dire enfin de la situation du bureau auxiliaire de Ribérac ? Le coût du terminal de vente que l’office du tourisme de la ville loue est tel que la seule réponse de la SNCF, pour retrouver l’équilibre, consiste à réduire l’amplitude d’ouverture du bureau !
Au total, nous sommes confrontés à une nouvelle contrainte : celle de voir la SNCF déserter méthodiquement notre territoire.
Alors que le rail devrait constituer une solution aux défis que nous avons à surmonter, il devient au contraire une nouvelle source de problème. C’est la raison pour laquelle, madame la secrétaire d’État, je vous demande ce que le M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, compte faire face à cette situation intenable.
Monsieur le sénateur, votre question me donne l’opportunité d’affirmer de nouveau la détermination du Gouvernement à tout mettre en œuvre pour assurer le développement du fret ferroviaire. Cet objectif est l’un des axes forts du Grenelle de l’environnement.
L’engagement national pour le fret ferroviaire, qui a été présenté par Jean-Louis Borloo et Dominique Bussereau le 16 septembre 2009 en conseil des ministres, représente un investissement de 7 milliards d’euros d’ici à 2020. Il traduit concrètement l’ambition du Grenelle de l’environnement de porter de 14 % à 25 % d’ici à l’horizon 2022 la part que les transports non routiers et aériens occupent dans l’ensemble du transport de fret.
En cohérence avec cet engagement national, la SNCF met en œuvre son schéma directeur pour un nouveau transport écologique de marchandises. Cela représente un investissement de 1 milliard d’euros d’ici à 2015.
Dans ce cadre, la branche fret de la SNCF a engagé une concertation avec l’ensemble de ses clients chargeurs avec l’objectif de finaliser des offres de transport conformes à leurs besoins, sur la base de propositions économiquement réalistes, dans un contexte de forte concurrence, tant intermodale qu’intramodale.
S’agissant de la Dordogne, la branche fret de la SNCF continue d’assurer des prestations de transport pour les principaux industriels, tels que les carrières de Thiviers et les papeteries de Condat. En revanche, les discussions et négociations entamées avec ses clients pour la poursuite de la desserte ferroviaire du site du Buisson-de-Cadouin ne lui permettent pas, à ce jour, de proposer une offre logistique ferroviaire compétitive par rapport au mode routier.
Une solution ferroviaire pourrait toutefois être trouvée au travers de l’un des axes structurants de l’engagement national qui concerne le développement d’opérateurs ferroviaires de proximité. La branche fret de la SNCF se met en situation de favoriser leur émergence. Ainsi, en région Aquitaine, elle participe aux réflexions menées actuellement par la cellule économique régionale des transports d’Aquitaine, lieu d’échanges et de partenariats entre les acteurs du transport et de la logistique, dont le but est de contribuer à la réussite d’un schéma ferroviaire innovant impliquant l’ensemble des acteurs économiques et institutionnels.
Par ailleurs, la Dordogne possède un établissement ferroviaire important avec l’atelier de Chamiers, qui est l’un des deux ateliers de la SNCF spécialisés dans la fabrication et la réparation des appareils de voie. Au cours des cinq dernières années, les besoins en matière d’appareils de voie ont enregistré une baisse de l’ordre de 20 %, ce qui a bien entendu affecté l’activité de ces deux ateliers. Même si le site de Chamiers a connu une réduction sensible de ses effectifs, aucun licenciement n’a été prononcé.
La SNCF adapte donc son outil de production à une demande en réduction mais également à un contexte en forte évolution, du fait notamment de l’intensification de la concurrence sur ce marché. Dans ce cadre difficile, elle a pris la décision de maintenir en service les deux ateliers dont elle dispose à l’échelon national, dont celui de Chamiers, en misant sur les résultats de ses efforts commerciaux.
Enfin, pour poursuivre sur une note optimiste, il convient de souligner que le marché serait susceptible d’enregistrer, à partir de 2012, une certaine croissance en raison de l’augmentation des besoins de régénération du réseau dans le cadre du contrat de performance entre l’État et RFF, des plans rail régionaux et du développement des lignes à grande vitesse.
Telles sont les informations que je pouvais vous apporter, monsieur le sénateur.
Madame la secrétaire d'État, je tiens à vous exprimer ma déception.
Vous évoquez la politique de fret qui est inscrite dans le Grenelle de l’environnement. Or, en Dordogne, ce que vous venez de dire est démenti par la réalité ! Certes, il aurait été possible de mettre en place une plate-forme sur le bois à Buisson-de-Cadouin, mais cela ne s’est pas fait, vous l’avez reconnu. Il en est de même pour les papeteries de Condat : aujourd'hui, – je vais vous démentir – cette entreprise ne travaille pas avec la SNCF, car aucun accord n’a pu être trouvé : Réseau Ferré de France a beaucoup tardé à donner sa réponse, la SNCF a tergiversé et, dans les faits, il y a une différence de trois euros à la tonne entre le transport par le rail et le transport par la route. Comme cette entreprise appartient à un grand groupe qui a été restructuré, celui-ci hésite fortement à revenir en arrière et continuera sans doute à privilégier la route.
La situation des ateliers SNCF de Chamiers mobilise l’attention des élus. Mon collègue Bernard Cazeau, le député de la circonscription, Pascal Deguilhem, et moi-même avons écrit à M. le secrétaire d’État chargé des transports. Si aujourd'hui le plan de charge a augmenté et est important, c’est simplement lié au fait que, tous les ans, le personnel a été « dégraissé ». Le savoir-faire disparaît. Aujourd’hui encore, douze à quatorze salariés ne sont pas remplacés. Certes, aucun licenciement n’a lieu, mais la capacité de production ne permet plus de faire face et il en résulte une perte de compétitivité.
Il s’agit d’un problème très important. Après la Société nationale des poudres et des explosifs de Bergerac, après Marbot-Bata, c’est un exemple type de désindustrialisation dans le département de la Dordogne.
Il est un sujet que vous n’avez pas abordé, madame la secrétaire d'État, c’est celui des passagers. Le conseil régional d’Aquitaine est contraint d’intervenir et de se substituer de plus en plus à la SNCF, notamment pour prendre en charge les travaux de rénovation des gares. J’ai cité l’exemple de Mussidan où il faut construire un nouveau parking. Non seulement la SNCF vend très cher ses terrains, mais elle demande de démanteler des rails pour améliorer la capacité d’accueil d’une gare !
À Ribérac, dont la gare a disparu depuis très longtemps, un point de vente a pu être maintenu et installé au syndicat d’initiative, sur proposition de la municipalité. Pour faire baisser les coûts prohibitifs de location, la SNCF répond qu’il faut diminuer les horaires de ce bureau !
Dans ces conditions, madame la secrétaire d'État, vous comprendrez que les réponses que vous venez de m’apporter ne me conviennent pas.
La parole est à M. Jean-Pierre Vial, auteur de la question n° 959, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Ma question concerne les modalités de mise en œuvre du fonds de solidarité territoriale pour les communes traversées par la future ligne à grande vitesse Lyon-Turin.
Le Gouvernement a pris la décision, le 24 octobre 2009, de créer un fonds de solidarité territoriale destiné à financer les mesures d’accompagnement des chantiers des nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse sur le territoire des collectivités locales concernées. Celui-ci sera abondé à hauteur de 0, 4 % du coût global du projet et géré par le préfet de région coordonnateur du projet, en étroite liaison avec Réseau Ferré de France, d’une part, et lesdites collectivités locales, d’autre part.
Il importe que le Gouvernement confirme que le projet de nouvelle liaison transalpine Lyon-Turin à grande vitesse et à grande capacité sera bien éligible au bénéfice de ce fonds. Les collectivités concernées par le projet – la région Rhône-Alpes et les conseils généraux de l’Isère et de la Savoie – se sont déjà engagées aux côtés de l’État sur les besoins d’anticipation et d’accompagnement des chantiers de la nouvelle liaison sur leurs territoires.
La convention territoriale, conclue au titre du contrat de plan État-région 2007-2013, a préprogrammé les actions nécessaires dans les domaines de l’environnement, de l’emploi et de la formation, du logement des personnels des chantiers, du soutien au tissu économique local et de l’appui aux projets de territoires. Le besoin de financement, qui correspond à ces actions, s’élève à environ 25 millions d’euros pour la période 2007-2013.
Sur la base de 0, 4 % du coût global du projet, il apparaît que le projet Lyon-Turin pourrait générer un montant du fonds de solidarité territoriale légèrement supérieur à 50 millions d’euros, c’est-à-dire de nature à couvrir les besoins d’accompagnement sur l’ensemble de la durée des chantiers de réalisation.
Reste posée la question du financement des actions qui doivent être impérativement engagées d’ici au début des travaux prévu en 2013, notamment en matière de recrutement, de formation, de dispositifs d’accueil des personnels – logements et équipements publics –, de préparation des entreprises locales pour qu’elles se positionnent utilement en vue d’accéder aux marchés de travaux.
Pour être réellement efficace, le fonds devrait pouvoir couvrir ces besoins d’anticipation avant le début des chantiers pour aller au-delà de la convention territoriale précitée, actuellement mise en œuvre, de 25 millions d’euros pour la période antérieure à 2013.
C’est pourquoi il importe de connaître les possibilités ouvertes par le fonds de solidarité territoriale pour accompagner la réalisation de la liaison Lyon-Turin, y compris pour le financement des mesures nécessaires à court terme et dont certaines sont d’actualité.
Monsieur le sénateur, vous évoquez la question de la mise en place d’un fonds de solidarité territoriale pour accompagner la réalisation de la nouvelle liaison ferroviaire Lyon-Turin.
La mise en place de ce fonds a été annoncée par le Premier ministre en octobre dernier. Il s’agit, comme vous l’avez rappelé, de compenser auprès des collectivités territoriales la construction d’un nouveau linéaire ferroviaire à grande vitesse.
J’ai été chargée, par mon collègue Dominique Bussereau, de vous confirmer que les accès français à la nouvelle liaison ferroviaire Lyon-Turin bénéficieront de ce dispositif, permettant de mobiliser un montant égal à 0, 4 % du coût prévisionnel du projet.
Cette enveloppe permettra de financer des actions visant à améliorer l’insertion environnementale de la nouvelle infrastructure, en dehors de l’emprise ferroviaire et au-delà des obligations réglementaires qui s’imposent au maître d’ouvrage. Elle servira aussi à mettre en valeur les territoires traversés, notamment en favorisant leur développement économique. Elle concernera les communes directement impactées par le tracé de la nouvelle infrastructure.
Ce dispositif pourra également être étendu à la partie commune franco-italienne, pour la partie des ouvrages à l’air libre.
Le financement de ce dispositif sera intégré dans le financement global du projet et les travaux d’identification et de sélection des projets éligibles aux subventions s’engageront de manière partenariale, une fois conclue la convention de financement globale de l’opération.
La mise en place d’un fonds de solidarité territoriale vise à accompagner la réalisation de la ligne nouvelle sur les communes traversées. Elle est distincte de la démarche « grand chantier », à laquelle vous faites référence et qui dépasse largement le cadre géographique du seul tracé de la nouvelle infrastructure.
En effet, l’objectif de la démarche « grand chantier » est de préparer le démarrage des chantiers sur le territoire de la région Rhône-Alpes, d’accompagner leur déroulement, de valoriser les opportunités économiques qu’ils proposent et, enfin, à plus long terme, de préparer l’après-chantier.
La démarche « grand chantier » a fait l’objet d’une convention territoriale d’application, le 28 septembre 2008, entre l’État, le conseil régional Rhône-Alpes, les conseils généraux de Savoie et d’Isère.
Cette convention précise en particulier les principes de financement de cette démarche : celle-ci s’organisera dans le cadre du contrat de projet État-région, d’une part, et de lignes budgétaires de droit commun, d’autre part.
Il s’agit donc de deux dispositifs distincts, mais complémentaires, relevant d’objectifs, de calendriers et de financement différents dont nous espérons qu’ils pourront permettre la réalisation de ce projet ambitieux dans les meilleures conditions possibles.
Je remercie Mme la secrétaire d’État de cette réponse, qui nous confirme l’éligibilité à ce fonds et pour un montant représentant 0, 4 %. Elle confirme également que ce dispositif vient en accompagnement de la procédure « grand chantier » dont elle a évoqué les modalités de mise en œuvre.
Je me permettrais simplement de souligner un point : beaucoup de ces questions seront traitées dans des calendriers à venir alors qu’il s’agit d’accompagner des projets d’actualité. Je remercie le Gouvernement, ainsi que vous-même, madame la secrétaire d’État, des mesures d’accompagnement qu’il fera examiner pour prendre en compte ces périodes intermédiaires, qui sont importantes pour les collectivités.
La parole est à M. Didier Guillaume, auteur de la question n° 973, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Ma question s’adresse à M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, mais Mme Valérie Létard va répondre, j’en suis sûr.
Je souhaitais interroger M. le secrétaire d'État chargé des transports très directement et très simplement sur l’échéance de la réalisation de la gare TGV à Allan dans la Drôme.
J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet et d’apporter mon plus entier soutien, avec l’ensemble des élus de ce département, toutes tendances politiques confondues, auprès de M. Dominique Bussereau.
La construction d’une gare TGV à Allan s’inscrit parfaitement, madame la secrétaire d’État, dans les enjeux du Grenelle de l’environnement et dans les conclusions du débat public, qui a été organisé il y a deux ou trois ans, sur la vallée du Rhône et l’Arc languedocien, le VRAL.
Cette gare permettrait en effet de réduire sensiblement les émissions de gaz à effet de serre et offrirait à la population une alternative à la route dans le sud de la vallée du Rhône, zone la plus fréquentée d’Europe, pour se rendre à la gare TGV de Valence Rhône-Alpes Sud Rovaltain.
Cette gare d’Allan serait, de plus, une infrastructure majeure pour les trois régions, Rhône-Alpes, mais aussi Provence-Alpes-Côte d’azur et Languedoc-Roussillon.
Idéalement située, cette zone pourrait devenir un véritable pôle économique, un véritable pôle d’aménagement du territoire. Outre l’impact très positif sur l’activité touristique, elle permettrait évidemment, je viens de le dire, de fluidifier le trafic de voyageurs et de désengorger la gare de Valence TGV. Je rappelle que cette dernière a été initialement construite pour 1 million de voyageurs et qu’elle en accueille aujourd’hui plus de 2, 5 millions.
Elle permettrait également de désenclaver et d’organiser une meilleure accessibilité aux transports collectifs pour les habitants du sud de l’Ardèche et de la Drôme et du nord du Gard et du Vaucluse.
Des études ont déjà permis de confirmer la faisabilité de cette gare.
Sur sa faisabilité technique, l’étude a été menée par RFF, Réseau ferré de France. Sur le schéma d’accessibilité multimodale et le développement du sud de la vallée du Rhône, l’étude a été conduite et financée par la région et les départements de la Drôme et de l’Ardèche.
Selon le comité de pilotage, qui se réunit sous l’égide du préfet, son coût de réalisation serait estimé à 70 millions d’euros.
D’après ces études, le potentiel de la Gare d’Allan est évalué à 340 000 voyageurs à l’horizon de 2020.
Enfin, la complémentarité de cette future gare avec celles de Montélimar-Ville et de Valence TGV est primordiale.
De plus, lors de la construction de la ligne à grande vitesse Paris-Marseille, les voies et l’espace ont été prévus par la SNCF et RFF afin que cette gare puisse être implantée. Elle a d’ailleurs failli être mise en place à cette époque.
Pour toutes ces raisons, l’implantation d’une gare TGV à Allan est donc une priorité pour les habitants et les entreprises du sud Rhône-Alpes.
Les élus du département ne comprendraient pas qu’une décision rapide ne soit pas prise. Le ministre drômois, les députés UMP, les trois sénateurs socialistes, le conseil général de la Drôme, que j’ai l’honneur de présider, les maires du territoire y sont favorables.
Pouvez-vous confirmer l’engagement de réalisation de cette gare pris par le secrétaire d’État M. Dominique Bussereau, le 16 mars 2009, lors de son déplacement à Allan ?
Le cas échéant, pouvez-vous me préciser quel financement le Gouvernement entend accorder pour construire cette infrastructure essentielle au développement du sud de la région Rhône-Alpes ?
M. le président. Lors des réunions décidant du tracé du TGV entre Paris et Marseille, nous avons reçu un certain nombre de tomates car chacun souhaitait cette construction, mais à côté, jamais devant chez lui. Mais nous sommes toujours là, ce qui signifie que nous avons résisté !
Sourires.
Monsieur le sénateur, vous avez interrogé mon collègue Dominique Bussereau sur la réalisation d’une gare TGV à Allan dans la Drôme. Voici les éléments de réponse qu’il m’a chargée de vous communiquer.
Les résultats des études de faisabilité de la réalisation de la gare nouvelle d’Allan ont été présentés le 24 juin 2010 lors d’un comité de pilotage sous la présidence du préfet de la Drôme.
Ce comité de pilotage a permis de préciser le coût de la gare et de ses investissements connexes, qui représentent près de 200 millions d’euros. Le montant d’investissement de la gare s’élève en effet à 70 millions d’euros, tandis que les investissements connexes permettant un accès à la gare dans de bonnes conditions sont évalués a minima à 117 millions d’euros.
Les cofinanceurs examinent actuellement ces résultats afin de prendre une décision sur les conditions de poursuite du projet et de lancement, le cas échéant, d’une nouvelle phase d’études préalables à la déclaration d’utilité publique.
En tout état de cause, compte tenu des montants d’investissements en jeu et de l’intérêt local de cette opération, le soutien de l’ensemble des acteurs locaux en faveur de ce projet – et notamment de son financement – est une condition indispensable pour progresser sur ce dossier. Vous avez d’ailleurs rappelé, monsieur le sénateur, combien tous les élus étaient mobilisés sur cette question.
Un comité de financeurs a donc été mis en place : il constitue naturellement le lieu le plus adapté pour poursuivre les réflexions relatives au financement de cette gare nouvelle.
En ce qui concerne l’impact de cette gare sur le schéma de desserte, il doit encore faire l’objet d’approfondissements et d’échanges, notamment avec l’exploitant ferroviaire. La possibilité d’un transfert de quelques arrêts des gares de la vallée du Rhône vers la gare nouvelle d’Allan est l’une des hypothèses à l’étude. Des scénarios reposant sur de nouveaux arrêts, donc sans transfert, sont également examinés. En tout état de cause, la solution qui sera in fine mise en œuvre devra tenir compte des contraintes d’exploitation ferroviaire, particulièrement délicates dans la vallée du Rhône.
Telles sont, monsieur le sénateur, les précisions que je pouvais vous apporter concernant l’état d’avancement des réflexions sur ce projet.
Madame la secrétaire d’État, j’ai bien entendu la réponse que M. le secrétaire d’État aux transports vous a chargé de lire. J’allais dire : rien de nouveau sous le soleil !
Les collectivités locales se sont engagées à financer cette gare, il nous manque maintenant la position de l’État pour savoir s’il financera, ou non, ce projet. Sans cet apport, nous savons bien que cette gare ne pourra pas être réalisée.
Les collectivités territoriales se sont engagées pour ce que vous appelez les investissements connexes : la multimodalité, l’accès par les transports collectifs. Toutes ces questions sont réglées.
Nous avons besoin de connaître la position du Gouvernement – je ne l’ai pas entendue – quant à son engagement pour cette gare.
Je rappelle que le secrétaire d’État M. Dominique Bussereau, lorsqu’il était venu dans la Drôme, avait indiqué qu’il était favorable à l’implantation de cette gare.
Il y a suffisamment de dossiers qui divisent. Celui-ci réunit l’ensemble des acteurs politiques et économiques ainsi que la plupart des acteurs sociaux. Il existe une unanimité pour dire que ce projet est crucial.
J’aurais espéré, madame la secrétaire d’État, mais ce n’est pas votre responsabilité directe, que M. Dominique Bussereau s’engage un peu plus.
J’ai plutôt le sentiment, pour utiliser un vocabulaire sportif, qu’il a botté en touche ! Dire que c’est au comité de financeurs de s’exprimer n’est pas la bonne réponse. Celui-ci s’est en effet déjà exprimé. Maintenant, il s’agit de savoir si les 70 millions d’euros nécessaires pour construire cette gare vont être mis sur la table par l’État, par d’autres partenaires, par exemple par un partenariat public-privé.
Tant que le Gouvernement n’apporte pas de réponse sur ce point, je considère qu’il nous manque son soutien pour avancer. J’espère que lors du prochain comité de pilotage, le représentant du Gouvernement, le préfet ou le secrétaire d’État lui-même, pourra aller un peu plus dans cette direction. Sans cela, l’ensemble des citoyens, des élus et des acteurs de ce territoire seront immensément déçus.
Merci en tout cas, madame la secrétaire d’État, pour votre réponse !
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 981, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a trois ans, j’interrogeais ici même M. Bussereau, à qui s’adresse également cette nouvelle question, sur la fermeture de 262 gares. Je lui disais avoir rencontré des chargeurs inquiets et des salariés en colère. Trois ans après, malheureusement, ces sentiments n’ont fait que croître.
La situation du fret ferroviaire s’est effectivement fortement dégradée, et le secrétaire d’État chargé des transports en porte pour une part la responsabilité.
Comment comprendre l’objectif du Grenelle de porter à 25 % la part des modes non routiers et non aériens en 2022 alors que la politique gouvernementale engendre les effets inverses.
Ne vous apprêtez-vous pas, dans votre ministère, à autoriser les 44 tonnes routiers alors qu’un rapport de l’Assemblée nationale rappelait avec force qu’il fallait « faire échec à la généralisation des camions de très grande capacité en vue de préserver le wagon isolé ».
L’objectif du Grenelle me semble très éloigné des réalités d’aujourd’hui. Entre 2004 et 2008, vous avez mis 1, 5 million de camions sur les routes. L’abandon des dessertes locales va y mettre 1, 2 million de camions supplémentaires.
Le rapport que j’ai cité précédemment souligne que la réalisation de l’objectif du Grenelle supposerait une augmentation des trafics de 45 %. Or votre politique va totalement en sens inverse, puisqu’elle réduit les volumes transportés, en baisse de 6 % depuis 2002, toutes entreprises ferroviaires confondues. Cela démontre d’ailleurs que le choix de l’ouverture à la concurrence est un échec.
En 2009, M. Bussereau déclarait « On ne demande pas à la SNCF d’abandonner le wagon isolé mais on ne le subventionne pas ; on attend les propositions de la SNCF ». Pourtant, la SNCF est toujours une entreprise publique, l’État en est toujours l’actionnaire principal et peut donc peser sur ses choix.
Le nouveau plan fret de la SNCF, intitulé « schéma directeur pour un nouveau transport écologique de marchandises », n’a d’écologique que son titre. Trois cent cinquante personnalités viennent de le dire. Ce plan confirme l’abandon de 60 % du transport par wagon isolé.
Les conséquences environnementales et sociales, avec la suppression de 8 000 emplois, seraient catastrophiques.
L’étude, tenue secrète, réalisée en septembre 2009 par le cabinet Carbone 4 et présentée au Comité stratégique fret de la SNCF le 15 janvier 2010 seulement, montre que cet abandon va provoquer des rejets supplémentaires de gaz à effet de serre de l’ordre de 300 000 tonnes d’équivalent CO2 par an. Où sont donc, madame la secrétaire d'État, les engagements du Grenelle de l’environnement ?
Les syndicats, les associations de défense de l’environnement, les associations d’usagers, les industriels, les chargeurs sont vent debout contre votre décision de supprimer le wagon isolé. Vous voulez leur faire croire qu’elle serait prise pour des raisons essentiellement financières. Le wagon isolé coûterait trop cher.
Mais alors pourquoi sept grands opérateurs ferroviaires européens, dans un projet nommé X-Rail, dans onze grands pays européens, ont-ils choisi d’unir leurs efforts pour relever le défi de la lutte contre le changement climatique et celui de l’aménagement du territoire ? Pourquoi la SNCF s’est-elle retirée de ce projet ?
L’étude du cabinet Carbone 4 suggère de « maintenir un portefeuille large d’offres de fret » et de « garder la messagerie et bénéficier d’une spécificité française du réseau maillé fin ».
Vous avez, au contraire, décidé de réduire les volumes de façon drastique, alors qu’il faudrait, par une politique commerciale dynamique, relancer l’activité. La politique de réduction des volumes menée aujourd’hui dégrade les comptes de ce secteur et le fragilise toujours plus.
En proposant de réduire l’offre de fret, vous allez à l’encontre des intérêts écologiques de notre planète, des intérêts des chargeurs, des intérêts des salariés et des intérêts de l’entreprise.
Dans la réponse à ma précédente question sur le fret, M. Bussereau faisait les louanges des opérateurs ferroviaires de proximité, que vous avez évoqués voilà quelques instants, madame la secrétaire d’État, lors de votre réponse à une autre question orale. Il déclarait, en particulier : « Je suis donc favorable à la création d’opérateurs ferroviaires de proximité, comme celui que vous avez mis en place dans la région Centre ».
Au bout du compte, quel échec puisque l’opération Proxirail n’a jamais vu le jour ! M. Bussereau m’avait pourtant invitée à m’engager aussi dans ce sens, en disant : « Il n’y a pas de raison que ne soit pas mis en place un tel opérateur local sur un site de fret ferroviaire historiquement aussi important que celui de Saint-Pierre-des-Corps ».
À ma connaissance, à ce jour, un seul opérateur ferroviaire aurait été mis en place et ferait circuler des trains de marchandises depuis le 27 juillet 2010 : il s’agit du train touristique du Pays cathare et du Fenouillèdes. Sérieusement, nous sommes loin des annonces faites, et ce n’est pas à la hauteur des besoins.
Je suis, quant à moi, convaincue que le fret ferroviaire doit rester dans le giron public et que la SNCF a les capacités pour gérer ce secteur.
Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, de rouvrir le site de Saint-Pierre-des-Corps en le modernisant, de revoir de fond en comble avec la SNCF le plan fret et je vous propose qu’un moratoire immédiat soit décidé pour le « wagon isolé ».
Et je ne me trompe pas d’interlocuteur en m’adressant au Gouvernement, puisque les investissements nécessaires à cette relance nécessitent son accord et pourraient être accélérés si, de plus, ils bénéficiaient d’aides financières de l’État.
Madame la sénatrice, lors du Grenelle de l’environnement, vous l’avez rappelé, le Gouvernement s’est engagé à porter la part des modes de transports alternatifs à la route de 14 % à 25 % à l’horizon 2022.
Dans ce cadre, Jean-Louis Borloo et Dominique Bussereau ont présenté, le 16 septembre 2009, le plan d’engagement national pour le fret ferroviaire. Ce programme montre la volonté et l’ambition de l’État de donner un nouveau souffle au fret ferroviaire et permettra, à terme, d’éviter l’émission de plus de deux millions de tonnes de CO2 sur notre territoire.
Cet engagement national porte sur un investissement global en faveur du fret ferroviaire de plus de 7 milliards d’euros d’ici à 2020, auxquels s’ajoutera 1 milliard d’euros investis par la SNCF au service du même objectif.
En effet, le Gouvernement a demandé à la SNCF de s’engager résolument dans le développement du fret ferroviaire et d’investir dans les solutions innovantes de transport de marchandises. Il s’agit, en particulier, du développement des autoroutes ferroviaires, du transport combiné, du fret à grande vitesse, des opérations de logistique urbaine et de favoriser l’émergence d’opérateurs ferroviaires de proximité, qui devront avoir la capacité d’offrir de nouvelles solutions adaptées au fret local.
En cohérence avec cet engagement national, la SNCF finalise actuellement son projet de schéma directeur industriel et managérial pour un nouveau transport ferroviaire écologique de marchandises. Les grandes lignes de ce schéma directeur ont été présentées en conseil d’administration de la SNCF en septembre 2009. Les études de production se sont poursuivies au cours du premier semestre 2010.
Concernant l’activité « wagons isolés », ce schéma s’appuiera sur une organisation de transport qui comportera, d’une part, des services sur mesure pour les produits industriels lourds, encombrants et dangereux et, d’autre part, des trains composés de wagons « multi-lots multi-clients ». Dans ce cadre, les clients grands comptes dans un premier temps, puis les PME-PMI dans un second temps, ont été rencontrés afin de préciser leurs besoins.
Les plates-formes de réception des trains multi-lots multi-clients seront principalement approvisionnées par le mode ferroviaire. Les décisions concernant leur localisation seront arrêtées à l’issue de la concertation en cours.
En effet, tout en prenant en compte des considérations d’ordre économique et social, ce réseau de plates-formes sera principalement défini en fonction des besoins exprimés par les chargeurs, clients actuels ou potentiels de fret SNCF. Cette adaptation sera progressive sur une période de deux ans. Enfin, pour les clients qui ne peuvent pas intégrer les « multi-lots multi-clients », des services dédiés ont été proposés.
Le Gouvernement est également très vigilant sur la dimension territoriale des réformes envisagées par la SNCF, qui doivent prendre en compte un objectif de desserte du territoire correspondant aux besoins économiques et écologiques de notre pays.
La SNCF s’est ainsi engagée à mettre en place, en concertation avec les acteurs économiques et politiques locaux, des dispositifs d’accompagnement de son schéma directeur pour le transport de marchandises au service des territoires, dont Saint-Pierre-des-Corps qui est une plaque tournante importante.
La Délégation à l’aménagement des territoires ferroviaires, la DATF, créée au sein de la SNCF en fin d’année 2009, a pour mission d’organiser les échanges avec les acteurs économiques, politiques et institutionnels locaux en vue de répondre à cet objectif. Dans chaque région, elle est représentée par un délégué régional qui est l’interlocuteur privilégié pour mettre au point les différents axes de développement ferroviaire pouvant être mis en œuvre.
Tels sont, madame la sénatrice, les éléments que Dominique Bussereau m’a demandé de vous communiquer.
J’ai entendu les annonces dont Mme la secrétaire d’État vient de me faire part, en remplacement de M. Bussereau.
Je serai très attentive à ce que, sur le terrain, les échanges avec la délégation régionale à l’aménagement des territoires ferroviaires puissent se faire et que l’on entende véritablement nos soucis.
Nous avons en effet un certain nombre d’interrogations.
Ainsi, ces derniers jours, la direction de Primagaz et moi-même avons fait état auprès de la directrice régionale de la SNCF du souci auquel est confrontée actuellement cette entreprise, à Saint-Cyr-en-Val, dans l’arrondissement d’Orléans, s’agissant du transport d’une matière dangereuse, le gaz, qui est assuré sans sécurité.
Nos préoccupations concernent des réalités très concrètes, mais les réponses qui nous sont données aujourd'hui ne sont pas sécurisées quant à l’avenir. Voilà six ans, nous avions déjà rencontré de très grandes difficultés pour permettre d’inscrire la démarche de transport des entreprises dans une vision à plus long terme. On ne peut en effet tabler uniquement sur le court terme lorsque des entreprises de ce type sont installées.
Dans la région Centre, un certain nombre de secteurs d’activité continuent à être embranchés au secteur ferroviaire, sans avoir pour le moment de réponses sécurisées.
J’ai bien entendu l’idée de wagons « multi-lots ». Une telle formule apportera-t-elle véritablement une réponse ? Je n’en suis pas encore complètement convaincue, compte tenu de ce que j’ai pu observer.
Autre point d’interrogation, que vous pourrez peut-être relayer auprès de M. Bussereau : je n’ai toujours pas de réponse au sujet des motivations qui ont conduit la SNCF à abandonner le travail qui a été mené à l’échelon européen s’agissant de l’initiative X-Rail. J’avoue que je ne comprends pas cette décision.
Aujourd'hui, l’Allemagne, qui a persévéré dans cette démarche, est en train de relancer ce transport par wagon isolé, qui répond véritablement à un besoin. Le développement de ce mode de transport commence à se faire sentir dans les résultats du fret outre-Rhin. Par conséquent, je souhaite vivement avoir une réponse sur ce point, madame la secrétaire d’État.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.