Nous avons souhaité vous entendre, monsieur le ministre, afin que vous puissiez faire devant nous le point sur la sécurité dans les musées. Notre commission s'est en effet émue d'apprendre qu'un certain nombre de tableaux avaient été dérobés dans des musées nationaux et municipaux. Nous sommes tous très attachés à la préservation du patrimoine exposé dans les musées.
En outre, j'ai appris par les journaux que vous reveniez d'un voyage en Haïti. Pourrez-vous nous dire quelques mots sur ce que vous avez pu constater dans ce malheureux pays qui est un membre important de la francophonie ? Comme nous l'avions dit en séance lors du débat qui a suivi la catastrophe, sans oublier les victimes, il faut dire que le patrimoine culturel haïtien a été particulièrement touché par le tremblement de terre. Que peut faire la France pour venir en aide à ce pays, monsieur le ministre ?
Tout d'abord, je tiens à vous informer que l'on vient de me remettre une dépêche AFP annonçant qu'un tableau de Picasso évalué à 180 millions d'euros a été retrouvé ce matin.
Sachons-le : il n'y a pas de risque zéro. Nous aurons aura beau faire, l'imagination des voleurs et des réseaux sera toujours sans limite. Il s'agit d'une lutte permanente. Je ne vais donc pas venir devant vous en vous assurant que le problème est réglé : ce serait vous mentir. En outre, les musées ne sauraient devenir des bunkers : ils sont faits pour accueillir du public, un public d'ailleurs de plus en plus nombreux ces dernières années. Mais plus la fréquentation est forte, plus les risques s'accroissent.
Je vous remercie d'avoir suscité un débat sur cette question fondamentale de la sûreté dans les musées. Il s'agit d'un enjeu essentiel de la politique patrimoniale de notre pays, et d'une priorité de longue date du ministère de la culture et de la communication. Je suis d'ailleurs venu accompagné de différents responsables de mon ministère dans ce domaine, dont Marie-Christine Labourdette, directrice des musées de France, Pierre Hanotaux, mon directeur de cabinet, et Anne-Solène Rolland.
La France est célèbre, dans le monde entier, pour ses musées qui présentent des collections d'une richesse exceptionnelle, enrichies génération après génération. Nous avons le devoir absolu de veiller sur ce patrimoine afin de le léguer dans son intégralité aux générations futures. Il s'agit d'une responsabilité collective que se partagent l'Etat, les collectivités territoriales, les professionnels des musées et les visiteurs. C'est ensemble que nous devons prévenir le vol et lutter contre le trafic des oeuvres d'art. Il est indispensable que chaque citoyen se sente concerné et que l'Etat mobilise toutes les énergies.
Cette question de la sûreté des collections a pris un relief tout particulier avec la disparition spectaculaire, dans la nuit du 19 au 20 mai, de cinq chefs-d'oeuvre du Musée d'Art moderne de la Ville de Paris. Ce vol a été évalué à une centaine de millions d'euros. Cet événement m'a incité à rappeler, par une circulaire adressée le 9 juin dernier aux responsables d'établissements nationaux et territoriaux, toutes les mesures qu'il leur incombe de mettre en oeuvre pour assurer cette mission fondamentale. Du directeur à l'agent de surveillance, en passant par le conservateur, le technicien et le conférencier, chacun a un rôle à jouer dans la chaîne de protection de nos collections.
Ce vol récent a suscité un très grand émoi. Dans la communication que j'ai faite hier en Conseil des ministres, j'ai rappelé que les voleurs de tableaux étaient entourés d'une sorte d'aura romantique. Ils évoquent, dans l'inconscient collectif, Arsène Lupin ou les riches collectionneurs fous que l'on trouve dans les James Bond. La réalité est, hélas, plus sombre : l'idée d'un pillage du patrimoine par des bandes organisées est insupportable, comme celle de la malveillance et du vandalisme. Cependant, ce type d'événement reste exceptionnel, et le nombre de vols dans les musées de France ne cesse de baisser d'année en année, de manière très significative, jusqu'à avoir été presque divisé par deux en une dizaine d'années : vingt vols ont été recensés en 2009 contre trente-sept en 2000. Cette baisse est due au développement des mesures de sûreté dans les musées et à l'action volontariste et concertée menée par les ministères concernés.
Les équipes spécialisées de mon ministère sont en relation constante avec l'Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) du ministère de l'intérieur, ainsi qu'avec l'administration des douanes, les services du ministère de la justice, mais aussi avec Interpol puisque le trafic d'oeuvres d'art ne connaît pas de frontières. Ainsi, il y a quelques années, deux chefs d'oeuvre d'Edvard Munch ont été volés en Norvège : l'un a été retrouvé dans ce pays et l'autre dans un autre pays européen.
Grâce à cette action interministérielle volontariste, les enquêtes, forcément longues et difficiles, connaissent souvent d'heureux dénouements. Ainsi, en janvier, j'ai eu l'honneur de remettre au président du Château de Fontainebleau les deux glaives du roi Jérôme qui y avaient été dérobés il y a quinze ans et qui ont pu être retrouvés au terme de patientes et minutieuses recherches menées par l'OCBC. De même, je vais prochainement remettre au Musée du quai Branly une sculpture d'Afrique Centrale, un fétiche volé probablement dans les années 1960 dans les réserves du Musée de l'Homme, et que sa documentation précise a permis d'identifier lors de son passage en vente. C'est d'ailleurs souvent à ce moment-là que les oeuvres d'art sont retrouvées. Il est alors intéressant de voir le cheminement parcouru par l'oeuvre : le plus souvent, elle passe du receleur à un premier acheteur malhonnête. Le second est généralement aveugle par inconscience ou par mauvaise foi tandis que le troisième achète l'oeuvre en toute bonne foi et c'est quand il veut s'en séparer qu'il se rend compte que les certificats dont il dispose sont faux.
Notez bien qu'il ne s'agit pas que de tableaux : toutes les oeuvres d'art sont soumises à des risques. Ainsi, il y a quelques années, un petit objet fabriqué par Picasso a été dérobé au Musée Picasso. J'ai déjà évoqué les glaives du roi de Westphalie et le fétiche retrouvé.
Tous ces succès démontrent l'efficacité remarquable des services de police et des mesures de prévention, mais il faut beaucoup de temps pour remonter les filières.
La sécurité du patrimoine est une préoccupation ancienne du ministère de la culture et elle s'inscrit dans une politique globale. La circulaire que j'évoquais rappelle cette priorité et en précise les différentes mesures. La sécurité des collections passe avant tout par une politique de prévention qui se développe dans quatre domaines.
Le premier axe concerne la prévention des actes de malveillance. On connaît à ce sujet nombre d'anecdotes tragiques : jet d'encre ou attaque au cutter d'un tableau. On se rappelle de cette artiste illuminée qui a voulu prouver son admiration pour un tableau en le couvrant de baisers : le rouge à lèvre a complètement dénaturé l'oeuvre. Les musées ne sont pas des bunkers et l'on court toujours ce genre de risques.
Les actions menées prennent la forme d'avis techniques, dispensés notamment lors des projets de rénovation ou de création de musées, tout au long de la conception des projets architecturaux, dans le cadre du contrôle technique exercé par mon ministère sur les musées de France, et réaffirmé par la loi du 4 janvier 2002. Il s'agit également de missions d'expertise technique effectuées à l'initiative soit des établissements, soit des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), en relation avec les collectivités territoriales concernées. En 2009, pas moins de douze missions ont ainsi eu lieu dans les musées nationaux et quarante-cinq dans les autres musées de France. Ces avis et missions sont formalisés dans des rapports d'expertise, qui sont ensuite transmis aux chefs d'établissement et aux collectivités propriétaires des collections publiques pour attirer leur attention sur les dangers que courent les oeuvres.
Pour renforcer l'efficacité de cette prévention des actes malveillants, j'ai lancé des audits de sûreté dans les musées nationaux jugés les plus vulnérables avec l'objectif de couvrir la totalité de ces musées d'ici la fin de l'été 2010. Je passe presque tous mes week-ends à visiter des musées afin de constater l'étendue du problème et mes équipes sont mobilisées en permanence sur ces questions.
En liaison avec les DRAC, je prévois de définir une cartographie des établissements sur lesquels une vigilance particulière est nécessaire, avec des visites périodiques destinées à apprécier les efforts entrepris par les collectivités pour sécuriser les bâtiments et les collections.
Deuxième axe de cette politique de prévention : la formation des professionnels et des responsables des collections publiques. Les formateurs du ministère de la culture et de la communication interviennent dans le cadre de stages organisés au sein du ministère comme au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), et dont le contenu s'appuie sur une « mallette pédagogique » réalisée en 1997 et actualisée en 2005. Ce corpus, élaboré en partenariat avec le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, et avec la direction de la formation de la police nationale, rappelle le cadre légal des interventions des services de l'Etat, inventorie les différents systèmes de protection mécaniques et électroniques, et propose des solutions pour trouver un équilibre entre les missions de surveillance et celles qui se rapportent à l'accueil des publics, qui est, bien sûr, la vocation première des musées.
Une formation à la sûreté est aussi systématiquement dispensée pendant dix jours à chaque agent d'accueil et de surveillance nouvellement recruté dans un musée national. Ces formations ont concerné, depuis 2000, pas moins de 730 stagiaires et près de 1 500 journées-stagiaires, sans compter les stages organisés directement par les grands établissements publics tels que Versailles et le Louvre.
Une formation spécifique sur la circulation des biens culturels est proposée une fois par an aux conservateurs et aux régisseurs des collections. L'accent est mis sur la traçabilité des oeuvres avec, notamment, la présentation, dans les musées, des bases spécialisées des services de police et de gendarmerie.
Là encore, j'entends renforcer ces mesures qui ont fait leurs preuves. C'est pourquoi j'ai souhaité que se tienne en octobre prochain, à Paris, une session de formation intitulée « Vol Malveillance dans les musées : prévenir et réagir », suivie en 2011 d'une formation de terrain sur ces mêmes thèmes.
A ma demande, le programme de formations élaboré par la direction générale des patrimoines (DGP) intègrera des modules de formation consacrés à la sûreté et à la sécurité, qui seront organisés localement à la demande des directions régionales des affaires culturelles, en liaison avec le CNFPT.
Le troisième axe de notre politique de prévention concerne la diffusion de documents d'information auprès des professionnels. Ce point est essentiel. Le réseau des musées de France dispose déjà d'outils largement diffusés. Il s'agit de documents qui concernent notamment les modes de protection mécanique des bâtiments, la vidéosurveillance, la détection volumétrique ou la centrale d'alarme. Je me réjouis de la mise en ligne prochaine, en complément de ce que l'on appelle les « muséo-fiches », de documents techniques portant sur les systèmes d'accrochage et de détection. Il est avéré que, dans le vol intervenu dans le Musée d'art moderne de la Ville de Paris, les systèmes d'alarme et de protection ne fonctionnaient pas. Depuis plusieurs mois, le système était défectueux, mais les négligences se sont accumulées entre ce qu'on savait et qu'on ne disait pas, ce qu'on savait et dont on ne se préoccupait pas, sans parler des pièces manquantes pour le système d'alarme qui avaient été commandées et qui n'arrivaient pas, sans qu'il y ait eu de relance pressante auprès du constructeur. Tous ces dysfonctionnements expliquent que les voleurs aient pu se déplacer dans le musée pendant une quinzaine de minutes sans être détectés. De la même manière, le vol d'un dessin de Degas qui s'est produit dans le Musée Cantini s'est effectué alors que les caméras de vidéosurveillance étaient soit en panne, soit braquées sur d'autres oeuvres.
En cas de vol, mon ministère a élaboré et transmis aux DRAC un document d'information sur la conduite à tenir, accompagné d'une fiche d'alerte à renseigner pour documenter précisément le bien volé et les circonstances de sa disparition au moment du dépôt de plainte, ce qui facilite l'enquête menée par les services de police et de gendarmerie, et augmente ses chances de réussite rapide pour retrouver l'oeuvre.
Ces informations permettent d'alimenter la base de données « TREIMA », gérée par l'OCBC, et qui est, grâce à la recherche par similarité d'images, la plus moderne du monde pour ce qui concerne les vols dans les collections publiques. A ce jour près de 80 000 objets volés y sont répertoriés. Bien évidemment, il ne s'agit pas que d'objets dérobés dans les musées nationaux : l'immense majorité a été dérobée chez des particuliers.
J'ai souhaité que soit diffusé prochainement, à l'ensemble des DRAC et des musées nationaux, un guide d'information et de prévention des vols à l'usage des propriétaires publics et privés de biens culturels, élaboré avec l'OCBC et la direction générale des douanes du ministère du budget. Ce guide sera mis en ligne tout prochainement, afin de toucher le public le plus large possible : propriétaires, élus locaux, professionnels du secteur culturel et du marché de l'art, collectionneurs. C'est toute la chaîne du secteur qui doit être informée pour réagir rapidement et donc efficacement.
Le quatrième et dernier axe de cette politique de prévention pour une meilleure sûreté dans les musées repose sur une indispensable connaissance des oeuvres à protéger, notamment à travers l'inventaire, le récolement et la documentation des collections, leur marquage et leur numérisation.
Afin de garantir la traçabilité des biens en cas de vols, les personnes morales, publiques ou privées, propriétaires des collections d'un musée de France doivent tenir l'inventaire de ces biens sur un registre normalisé, qui réponde aux normes définies par le code du patrimoine et par ses textes d'application, notamment le décret du 2 mai 2002 et l'arrêté du 25 mai 2004. Une circulaire a été adressée en 2006 à chacun des responsables des musées de France pour leur rappeler ce devoir.
Par ailleurs, l'obligation, pour les musées de France, de procéder à un récolement décennal, prévue par le code du patrimoine, offre un outil indispensable à la sécurisation des collections publiques. L'ensemble de ces récolements doit être terminé d'ici 2014.
Le marquage des collections contribue aussi à cette traçabilité des oeuvres. Tous les objets appartenant à l'Etat ou à une collectivité publique doivent être marqués du numéro d'inventaire qui leur a été attribué, et aucun bien culturel ne peut être exposé, prêté, déposé ou mis en réserve sans avoir auparavant reçu de marquage.
La numérisation constitue également un outil particulièrement efficace d'identification et donc de protection des collections. Depuis plusieurs années, le ministère de la culture et de la communication a mis en place un plan national de numérisation des collections publiques, intitulé « JOCONDE ». Quel nom est plus approprié que celui de ce tableau qui, je vous le rappelle, a été volé, puis retrouvé une dizaine d'années plus tard au début du XXe siècle ? Ce catalogue collectif des musées de France propose à ce jour pas moins de 422 000 notices d'objets culturels de toute nature, issus de 320 musées répartis sur tout notre territoire. Comme je l'ai rappelé dans la circulaire du 9 juin, les musées sont vivement encouragés - j'y insiste - à accélérer le versement de leurs données documentaires sur cette base.
Pour mener à bien cette politique de prévention, de formation et de diffusion, le ministère de la culture et de la communication dispose, depuis longtemps, de personnels qualifiés qui travaillent en étroite collaboration avec les organismes publics oeuvrant dans les domaines de la sécurité nationale. Dès 1990, le directeur des musées de France a eu l'idée de créer une mission pour la sécurité, dirigé par un ancien officier de police. Mais il est impératif de tenir compte aujourd'hui de nouveaux paramètres, notamment de la fréquentation croissante de nos musées et de nos monuments.
Pour répondre à l'enjeu national que constitue la sécurité des collections publiques, le ministère a donc renforcé ses structures pour accompagner les collectivités territoriales et les institutions muséales engagées dans la mise en sûreté de leurs équipements et de leurs collections.
Mon ministère dispose ainsi, au sein du service des musées de France et du département de la maîtrise d'ouvrage, de la sécurité et de la sûreté, de compétences scientifiques et techniques à même d'être mobilisées pour répondre à l'ensemble des questions qui se posent dans ces domaines, tant pour ce qui concerne la protection des collections que pour la mise en sûreté des bâtiments et des espaces muséographiques.
Il faut souligner, là encore, l'apport extrêmement fructueux des collaborations interministérielles. Mon ministère bénéficie ainsi de la mise à disposition, par le ministère de l'intérieur, de deux officiers de police qui ont pour mission de procéder à des audits de sûreté, de prodiguer des avis et des conseils techniques, et de participer aux actions de formation et de sensibilisation des professionnels des musées. Cette mise à disposition nous permet en outre de rester en contact permanent avec les services de la police nationale et de la gendarmerie, tant en matière de prévention des actes de malveillance, que dans le cadre des enquêtes liées à ces actes. Ces officiers de police sont considérés par l'OCBC comme des officiers de liaison. Je tiens à développer le nombre de missions et d'audits sûreté grâce à la présence de ces fonctionnaires de police mis à disposition.
Les relations privilégiées nouées de longue date entre le ministère de la culture et de la communication et le ministère de l'intérieur se sont également traduites par la possibilité offerte aux musées de France situés dans une zone de police nationale d'être raccordés au système « Ramses Evolution II » qui permet d'alerter l'état-major de la police au niveau départemental, qui intervient alors de façon systématique et particulièrement rapide. Il est donc essentiel de multiplier le nombre de musées raccordés et je les y engage fermement.
Cette coopération interministérielle est également très précieuse en aval, dans la lutte contre le trafic des biens culturels et dans les enquêtes, coordonnée en France par l'OCBC, qui entretient des relations suivies avec la direction générale des patrimoines. Son chef, le Colonel Stéphane Gauffeny, ainsi que ses adjoints, participent régulièrement aux travaux de l'Observatoire du marché de l'art et du mouvement des biens culturels, que pilote le service des musées de France.
La prévention et le travail d'investigation ont pour nécessaire corollaire un renforcement des sanctions contre ceux qui font trafic d'oeuvres d'art volées et qui portent ainsi gravement atteinte à l'intégrité de nos collections publiques. En 2007, à l'issue d'une table ronde sur la prévention et la répression des actes de vols et vandalismes, organisée par le ministère de la culture avec des représentants des ministères de la justice et de l'intérieur, du Sénat et de l'Assemblée nationale, mais aussi des professionnels du marché de l'art, des compagnies d'assurance et des experts de la protection du patrimoine, nous sommes convenus d'alourdir les peines infligées aux trafiquants d'objets d'arts volés. Ces mesures constituent des avancées importantes : voler une oeuvre d'art, la dégrader, c'est attenter à notre patrimoine national, à notre mémoire collective, et cela mérite une sanction plus lourde que pour d'autres vols.
Cette lutte contre le trafic de biens culturels avait d'ailleurs été retenue, à la fois par le ministère de l'intérieur et par celui de la culture, comme l'un des axes prioritaires de la présidence française de l'Union européenne.
Dans le cadre des objectifs de l'Agenda européen de la Culture, un groupe de travail sur la mobilité des collections a enfin été lancé en 2008 par la Commission européenne. A cet égard, vous savez que la France a choisi de présider avec l'Italie l'un des sous-groupes consacré à la prévention des vols et du trafic illicite. Des recommandations issues du travail de réflexion et de recensement des bonnes pratiques européennes vont être intégrées dans un rapport qui sera remis à la Commission européenne et qui devrait permettre de lancer de nouvelles initiatives dans les années à venir.
La sûreté des collections publiques est un enjeu prioritaire de la politique patrimoniale de notre pays. C'est en poursuivant, ensemble, un travail amorcé depuis plusieurs années déjà, que nous serons en mesure de parvenir aux buts que nous nous sommes fixés.
L'action que je souhaite promouvoir ne peut être efficace sans une mobilisation, aux côtés de l'Etat, de l'ensemble des propriétaires d'édifices, en particulier des communes, mais aussi des collectivités publiques, des conservateurs et des responsables d'institutions muséales autour de cette question essentielle. Notre responsabilité collective vis-à-vis de ce patrimoine et de sa protection requiert la plus grande vigilance et nous oblige à prendre toutes les mesures nécessaires à la réduction des risques. Beaucoup d'églises en France contiennent des oeuvres de grande qualité : il ne suffit pas de restaurer et de replacer une oeuvre dans une église ; encore faut-il que la commune dispose des moyens adéquats pour la protéger efficacement. On sait aussi ce qu'il est advenu de nombreux châteaux achetés avec leurs meubles il y a une quinzaine d'années par un véritable gang japonais et qui ont été désossés pour être revendus à la découpe au Japon : c'était légal, mais c'était du vol. Il faudra donc trancher entre ce qui relève de la pure acquisition et de l'acquisition délictueuse.
Il importe aussi de développer les réflexes des citoyens pour qu'ils sachent, tant en métropole que dans les territoires ultramarins, où j'ai eu quelques déconvenues lors de mon récent voyage, qu'ils sont les gardiens de ce patrimoine. Il faut donc renforcer l'éducation artistique et civique, qui sont étroitement liées, mais aussi favoriser un développement sécurisé du marché de l'art. J'y travaille avec la plus grande détermination. J'espère que vous avez compris que je suis prêt à tout faire pour lutter contre les vols et la malveillance.
Ce sujet est très sensible, surtout après le vol de cinq tableaux majeurs au Musée d'art moderne de la Ville de Paris. Je suis déjà intervenue au Conseil de Paris sur ce sujet puisque ce vol à provoqué une très vive émotion, d'autant qu'il a été effectué dans des conditions bien particulières. Les voleurs ont pu s'introduire dans le musée sans grande difficulté et la qualité des enregistrements vidéo était tellement médiocre qu'elle n'a pas permis leur exploitation par les enquêteurs. Or, un rapport confidentiel rédigé par l'inspection générale de la ville avait déjà souligné en 2007 les graves déficiences de la surveillance et de la sûreté dans divers musées dans la capitale. Des préconisations avaient été faites, mais elles n'ont pas été suivies d'effet. Un second rapport datant de 2009 a repris les points soulevés en 2007, en aggravant le diagnostic : seuls quelques musées sont équipés de caméras de surveillance, la sécurité incendie est souvent obsolète, les abords des musées sont mal surveillés, les fenêtres parfois dépourvues de système anti-intrusion. Ces rapports n'ont pas été suivis d'effet, et le Musée d'art moderne a connu le vol que l'on sait.
Les élus de Paris ont demandé l'audition de l'adjoint au maire de Paris et du directeur du musée. La commission des affaires culturelles de la Ville de Paris a reçu Christophe Girard, adjoint au maire, mais la mairie de Paris a estimé que nous ne devions pas auditionner le directeur du musée.
Quel est votre sentiment, monsieur le ministre ? Vous avez adressé une circulaire le 9 juin dont nous n'avons pas eu connaissance. Comment faire pour que les musées parisiens ne connaissent plus ce genre de vols ?
Je n'ai pas vocation à contrôler les musées de la Ville de Paris. Certaines susceptibilités sont insurmontables. Les mesures nécessaires ont été prises pour que de tels vols ne se reproduisent pas. J'en ai d'ailleurs parlé à deux reprises avec M. Delanoë avec qui j'entretiens d'excellents rapports. M. Fabrice Hergott, dont la compétence professionnelle est reconnue, a vécu cette affaire comme un drame personnel, alors qu'il n'était pas directement responsable de la sécurité et qu'il ne disposait d'aucun pouvoir hiérarchique pour la faire respecter. Les responsabilités étaient tellement partagées qu'elles se sont diluées. Il faut donc que chaque musée désigne un seul référent responsable de la sécurité.
Bien évidemment, je vous ferai parvenir la circulaire : la question de l'herméticité des établissements est un des points sur lesquels nous insistons beaucoup.
Je ne peux qu'adhérer à tout ce que vous avez dit, monsieur le ministre. Il était bon que vous entriez dans tous les détails, comme vous l'avez fait.
Pourtant, ce qui s'est passé le 29 juin, à Fontainebleau, va exactement dans le sens contraire de vos propos. Ce jour là, le conseil d'administration de ce beau musée a décidé d'appliquer les préconisations de la RGPP II en prévoyant la suppression de 400 à 500 postes afin « d'optimiser » les fonctions d'accueil et de surveillance grâce aux nouvelles technologies et à l'externalisation éventuelle de ces fonctions. L'accueil et la surveillance ne font plus partie du coeur du métier. Le 29 juin, le départ d'une partie du personnel a été décidé sans qu'il y ait eu de concertation préalable. La date de la mise en oeuvre de cette externalisation est fixée... au 1er juillet ! Je suis effaré et en colère.
Au moment où vous prenez la peine, monsieur le ministre, de définir précisément les mesures à mettre en oeuvre, sans tomber toutefois dans l'idéologie sécuritaire, la RGPP frappe au Musée de Fontainebleau. On va me dire que je n'ai pas confiance dans le privé. C'est exact ! Quand on connaît les conditions qui sont faites au personnel du privé, on est en droit de se méfier. Avec la RGPP II, la sécurité sera moindre. Et ce n'est pas le tout-technologique qui règlera la question : on l'a d'ailleurs vu dans les villes qui se sont équipées de caméras de vidéosurveillance. Ça marche un temps, et puis ...
Avec la RGPP, vont manquer des moyens et des hommes compétents. Il y des choses qui me font mal. Si je le dis haut et fort, c'est que vous êtes capable de m'entendre, monsieur le ministre.
Par parenthèse, la semaine dernière, j'ai visité le Centre de recherche et de restauration des musées de France au Louvre. J'ai rencontré tous les directeurs des filières, j'y ai passé plus de quatre heures ! Voilà une merveille inventée par le système français au rayonnement international et que l'on fragilise. Il est question de déménager le laboratoire qui n'est déjà plus mixte, le CNRS l'ayant quitté. Puisse la ville de Fontainebleau ne pas être celle de tous les adieux, en l'espèce l'adieu à la tradition française du patrimoine !
Sans chercher à accabler quiconque, nous devons tirer les leçons de cette malheureuse affaire de vol survenu au Musée d'art moderne de Paris et qui est la hantise de tous les conservateurs. Permettez-moi de plaider leur cause. Contrairement aux directeurs de théâtre ou d'orchestre, ils n'exercent pas d'autorité hiérarchique sur leur personnel, y compris en matière de discipline, et doivent obtenir l'approbation du conseil pour acheter un simple photocopieur. Certains d'entre eux sont même à la merci de chefaillons qui règlent des comptes. Or la sécurité, invisible quand elle est efficace, coûte cher quand il s'agit de protéger des oeuvres qui, par leur caractère inaliénable, n'ont justement pas de prix. Il n'y a pas de panacée : les musées utilisent différents types de techniques. Vous aurez d'ailleurs l'occasion d'admirer les installations sophistiquées du Musée d'art moderne de Villeneuve-d'Ascq lorsque vous l'inaugurerez, semble-t-il, le 22 septembre : caméras de surveillance dans le parc où est situé le musée et dans les salles, contacteurs sur les vitres, détecteurs de mouvement dans les salles et les couloirs, appareils de détection rapprochée installés sur les oeuvres les plus fragiles, système d'accrochage sécurisé et personnel 24 heures sur 24. Les musées de petites villes, qui ne sont pas soutenus par d'importantes communautés urbaines comme celle de Lille, qui n'a gardé que cette compétence culturelle, n'ont pas les moyens de faire de tant de frais. Outre les intéressantes mesures que vous avez détaillées, il faut donc s'employer à convaincre de l'importance des musées et du rôle des conservateurs, auxquels il faudrait peut-être donner un statut et davantage d'autonomie, eux dont la population se souvient lorsqu'un vol est commis. Il y va du prestige de la République.
Sans être obsédé par la répression et la déploration de l'abaissement moral de notre société, il me semble nécessaire de mieux expliquer à tous les citoyens que la protection de notre patrimoine est de la responsabilité de chacun. Telle préfète quittant la préfecture en emportant tapis et meubles, l'anecdote est aussi drôle que tragique ! Nous avons dû renoncer à l'installation lumineuse de M. de Castelbajac entourant la statue équestre d'Henri IV sur le Pont-Neuf à l'occasion de la commémoration de sa mort parce qu'elle était régulièrement vandalisée par des individus ivres mort.
Monsieur Ralite, vous avez lancé une charge - c'est de bonne guerre - contre la RGPP. Qualifié par certains de fossoyeur du service public, comme sur tel tract de la CGT, j'ai quelques réticences à vous suivre sur ce chemin. Le problème de la sécurité n'est pas lié à la RGPP. Externalisation de la sécurité ne signifie pas réduction de la préoccupation de sécurité. Sans affirmer que cela constitue une solution, je note que le Quai Branly, qui a fait ce choix de l'externalisation, n'a jamais été cambriolé. Quant au Musée de Fontainebleau, la décision d'une externalisation temporaire a pour but d'ouvrir de nouveaux espaces au public durant l'été.
Monsieur Renar, les directeurs de musées placés sous l'autorité directe du ministère de la culture, qui sont neuf fois sur dix des conservateurs de musée, ont la responsabilité hiérarchique de la sécurité. Quant aux musées qui dépendent de collectivités territoriales, les équipements sophistiqués n'assurent pas une protection totale : leur technicité pose des problèmes d'utilisation, d'entretien, de réparation - pour lire la notice d'une machine à laver, il faut presque être prix Nobel ! -, leur coût est un obstacle. Chaque collectivité doit réfléchir aux moyens d'assurer la sécurité de son patrimoine. J'ai visité deux petits musées, dont l'un près de Clermont-Ferrand et l'autre dans le Morvan. Grâce aux personnes merveilleuses qui en ont la charge, ces musées ont trouvé un système adapté à la modicité de leurs moyens. Peut-être est-ce parce que leurs responsables se sentent totalement concernés... Car il y a aussi des personnes négligentes. D'où la nécessité de véritables campagnes auprès des citoyens...
qui pourraient être confiées à France Télévisions par votre ministère et financées par les recettes publicitaires !
Certes, mais prenons garde à leur formulation. Chercher à prévenir le vandalisme, c'est souvent y inciter.
Vous parliez tout à l'heure d'oeuvres d'art, et non de vandalisme. Certains habitants de Créteil, ignorant ce qu'est une oeuvre d'art, ne sauraient pas, de toute façon, où vendre de tels objets. Gardons un équilibre.
Pourriez-vous nous dire quelques mots de la préparation de votre budget ? Où en est le contrat d'objectifs et de moyens de Radio France qui sera bientôt discuté par son conseil d'administration ? Dans les médias, on parle beaucoup de la nomination du président de France Télévision ou encore, dans Le Figaro, du retard dans l'application de la loi Hadopi. Il faudrait éviter que ces affaires traînent... Quid du projet de musée de l'histoire ? Enfin, les problèmes liés à la numérisation des salles de cinéma. Les parlementaires, malgré leurs efforts, n'ont pas réussi à faire adopter ce texte en juillet. Les collectivités, qui possèdent moins de trois écrans, ont besoin d'en savoir davantage sur les modalités du futur complément de financement. Ce point ne peut pas être réglé par la loi parce que les crédits dépendront du Centre national de la cinématographie et, pour partie, du « Grand emprunt » qui ne pourra pas tout financer, la numérisation du livre et celle du cinéma. Autres craintes : la disparition des petites salles, notamment en milieu rural, et la relation entre distributeurs et salles. Plutôt que d'être accablé sous le poids des questions écrites des parlementaires - les périodes électorales y sont propices -, le ministère pourrait prendre l'initiative de nous tenir régulièrement informés en nous transmettant des notes.
Monsieur Lagauche, ces questions, si intéressantes soient-elles, ne concernent pas la sécurité dans les musées, sujet auquel est consacré cette audition.
Soit, mais je ne demande pas une réponse immédiate. J'aimerais également entendre le point de vue du ministère sur la réforme des collectivités territoriales.
Monsieur Lagauche, l'application retardée de la loi Hadopi s'explique par le fonctionnement de la machine administrative et législative, dont vous êtes plus expert que moi, la difficulté à publier les décrets - il en reste encore un ou deux - et le recours devant la CNIL, tout à fait justifié de mon point de vue. Techniquement, tout est au point : les premiers messages électroniques partiront début septembre. Pour autant, j'attache plus d'importance au message pédagogique de cette loi qu'à son volet répressif - les sanctions, il est vrai, renforçant ledit message. Marie-Françoise Marais, présidente de l'Hadopi, suit le dossier de près.
Pour le budget, je me bats comme un lion. Les arbitrages n'étant pas encore rendus, je ne peux pas vous en dire plus, sinon que je crois m'en être plutôt bien sorti, grâce au soutien de mon cabinet, qui a su trouver les arguments.
Le lieu central du futur Musée de l'histoire, où seront organisés colloques, expositions et films, sera décidé quand nous aurons terminé le travail de mutualisation des lieux qui jalonneront le parcours offert à travers toute la France. Ce travail prend un temps fou : j'ai seulement depuis quinze jours entre les mains la liste définitive des maisons d'hommes remarquables en France continentale et ultra-marine.
Le Grand emprunt, désormais appelé « investissement d'avenir », contribuera à la numérisation de notre patrimoine. Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), la Réunion des musées nationaux, la Bibliothèque nationale de France et l'Institut national de l'audiovisuel, chargés de collecter les informations sur la numérisation de notre patrimoine, participent à un groupe de travail avec l'organisme responsable de la répartition des crédits. Le Grand emprunt lancera seulement la machine - vous avez raison -, il faudra ensuite faire appel au secteur privé. Je serai heureux de recueillir vos avis et recommandations le moment venu.
Faites-moi confiance concernant la numérisation des salles ! J'ai été exploitant d'une salle de cinéma durant quinze ans ; j'ai été le premier à faire venir des Cinémobiles en France ; mon premier déplacement ministériel a été pour le festival du film documentaire de Lussas en Ardèche. Je travaille avec Mme Véronique Cayla à la question du complément budgétaire ; je serai vigilant concernant le respect de la liberté de la programmation. S'il le faut, nous coulerons dans le marbre que la numérisation ne doit pas conduire à l'affaiblissement de la diversité.
Quant à la réforme des collectivités territoriales, le sujet est trop important pour que nous en discutions ce matin.
Pour protéger le petit patrimoine rural entreposé dans les églises, les casernes et parfois les brasseries, les élus ont trouvé deux solutions : mettre les oeuvres au placard ou fermer les lieux... Monsieur le ministre, vous avez parlé de campagnes citoyennes, je veux vous parler d'éducation. Pourquoi ne pas sensibiliser les enfants durant les cours d'éducation artistique ? Soyons optimistes : faisons confiance à notre jeunesse ! En outre, l'inventaire que vous avez évoqué concernera-t-il toutes les oeuvres ? S'il porte sur les seules oeuvres de l'Etat, votre ministère ne pourrait-il pas mettre au point un canevas afin que les élus inventorient les oeuvres locales selon la même technique ? Quels seront les critères choisis pour faire entrer une oeuvre au catalogue : sa valeur, sa date ?
Le plan Joconde concerne la totalité des oeuvres des musées de France. Il me vient à l'esprit que nous devrons prendre garde à sa divulgation : évitons d'en faire une shopping list à l'usage des voleurs...
Oui, nous avons besoin d'éducation citoyenne. Le patrimoine, comme la lutte contre le tabac, peut faire l'objet de campagnes d'information telles que l'imagine M. Lagauche. Celles-ci sont globalement un succès, malgré les aspects moins positifs que je soulignais tout à l'heure. L'éducation artistique dans les programmes scolaires peut y contribuer.
Alors que se tiendra bientôt la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'action extérieure de l'Etat, pourriez-vous, monsieur le ministre, m'indiquer comment votre ministère, à qui ce texte assigne pour la première fois un rôle important, participera à la définition de la politique culturelle extérieure française menée par l'Institut Français, placée sous la tutelle unique du ministère des Affaires étrangères ? Serez-vous consulté sur la nomination du futur président de cet institut ? Quel rôle jouera la sous-direction des affaires internationales de votre ministère ? Entretient-elle des relations avec les réseaux, particulièrement concernant la formation, une avancée importante de ce texte ? Comment éviter la confusion ou la concurrence entre cet institut et les agences dépendant de votre ministère - UniFrance pour le cinéma, le bureau export de la musique française et la société de l'audiovisuel extérieur de la France ?
Monsieur Duvernois, je vous ferai le même amical reproche qu'à M. Lagauche...
Monsieur Duvernois, le ministère de la culture sera très présent concernant l'Institut Français. Au-delà des excellentes relations que j'entretiens avec M. Kouchner, le ministère des Affaires étrangères aura besoin de nous. Et ce, pour une raison simple, l'institution fonctionnera avec notre « stock », si j'ose dire. J'ajoute que nous aurons au moins trois membres au conseil d'administration - j'en aurais souhaité quatre. Nous sommes en train de définir des règles d'usage. Le futur président de l'institut est un homme d'une grande culture, je n'y reviens pas. J'ai proposé une personne pour le poste de directeur général qui sera certainement retenue. D'après mon cabinet, je suis peut-être le premier ministre autant préoccupé du rayonnement culturel de la France à l'étranger. Je connais bien ce domaine, contrairement à d'autres, pour avoir été commissaire de plusieurs expositions à l'étranger. Nous avons pris de l'avance concernant la formation des agents : celle-ci sera organisée conjointement avec le ministre des affaires étrangères. Enfin, il est évident que le CNC ou le bureau export de la musique française travailleront avec l'institut, tout en restant des organismes indépendants, ne serait-ce que parce que certains d'entre eux sont privés...
Permettez-moi d'en revenir à la protection des oeuvres dans les collectivités territoriales. Je souhaiterais évoquer l'intervention parfois lente et chère des architectes en chef des bâtiments de France avant de rappeler que certaines villes héritent parfois d'un riche patrimoine, notamment religieux. La mienne, évêché durant plus de cinq siècles, abrite une cathédrale. Une fois réglés les problèmes de toiture et d'étanchéité, il faut s'inquiéter des vestiges antérieurs au XIIe et XIIIe siècle découverts dans le bâtiment, s'occuper de la remise aux normes de l'électricité, de la restauration des statues et des tableaux. Bien que le ministère de la culture et la DRAC contribuent à 50 % de ces coûts et que les conseils général et régional prennent en charge 10 % des frais, reste 40 % à la charge de villes de moins en moins riches. Cela devient extrêmement difficile. La cathédrale a fait l'objet d'un audit de sécurité contre le vol et le vandalisme et comme une merveilleuse petite église baroque que j'ai été contraint de fermer... Comment l'Etat peut-il davantage contribuer aux travaux de mise en sécurité de ce patrimoine important ?
Il n'y aurait pas de vol dans les musées sans trafic d'oeuvres d'art. En tant qu'ancien rapporteur de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe sur le pillage des biens culturels africains, j'ai constaté que de nombreux pays européens ne possèdent pas un office aussi sérieux et efficace que le nôtre, notamment Bruxelles, pourtant capitale européenne. Y a-t-il une concertation en cours à ce sujet au niveau européen ? Si aucun effort n'est fait en ce sens, nos musées, nos châteaux, nos églises continueront d'être pillées. Si nous voulons promouvoir cette cause, nous devons être exemplaires en prévenant toute vente illégale ou délictueuse d'objet d'art sur notre territoire. Quid de la ratification de la convention d'Unidroit sur les biens culturels ?
Peut-être cela paraîtra-t-il romanesque ou suranné de le dire ainsi, mais la protection des oeuvres, après la visite de Grasse, me hante ! Il y a tant de Grasse en France ! Nous devons trouver de nouvelles pistes, sans nous arrêter à tous ceux qui nous diront qu'elles sont déraisonnables. L'une d'entre elle, que j'étudie avec Mme Pécresse, est de recourir aux étudiants, notamment ceux des écoles d'art : plutôt que de faire du baby-sitting pour obtenir quelques sous, les étudiants feraient du « musée sitting ». J'espère avancer vite sur cette piste prometteuse et remettre une note à la rentrée. Pour protéger nos oeuvres, je ne crois pas à un miracle, mais à un faisceau d'éléments. Le raccordement d'une cathédrale à un commissariat, une plus grande attention des DRAC au sujet, tout cela ne suffira pas.
Permettez-moi une anecdote sur le trafic international des oeuvres d'art. Un milliardaire étranger à la réputation controversée a acquis une très belle commode auprès d'un grand antiquaire français, pour plusieurs millions d'euros. Celle-ci a été soumise aux restrictions d'usage : elle ne devait pas quitter le territoire français. Affectant d'ignorer notre législation, il a fait porter ladite commode dans un appartement à Monaco. De là, il comptait la faire transporter dans son palais du XVIIIe siècle, tout de béton brut, récemment érigé à Kiev. Nous avons réussi à bloquer le processus ! C'est dire toutes les formes que peut prendre le trafic illicite des oeuvres d'art !
A Bruxelles, il existe un groupe de travail, présidé par la France et l'Italie, sur la mobilité des collections et la lutte contre le trafic de biens culturels. Il manque, il est vrai, un dispositif coercitif. Nous pourrons signer toutes les conventions de l'Unesco, elles n'auront pas d'effets tant qu'il n'y aura pas de suivi !
Monsieur le ministre, merci d'avoir répondu à nos interrogations. Nous sommes loin d'avoir épuisé toutes nos questions, vous l'aurez constaté, je vous dis donc : « A bientôt ! ».
La commission procède à l'examen du rapport et à l'élaboration du texte proposé par la commission pour la proposition de loi n° 563 (2009-2010), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques et la proposition de loi n° 411 (2009-2010) relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques (Rapporteur : M. Serge Lagauche).
Nous allons procéder à l'examen du rapport et du texte proposé par la commission pour la proposition de loi n° 563 (2009-2010), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques et la proposition de loi n° 411 (2009-2010) relative à l'équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques.
Je vous remercie de m'avoir confié le dossier de la numérisation des salles, mutation technologique importante et inéluctable qui détermine l'avenir du cinéma.
La numérisation bouleverse le modèle économique actuel. Les exploitants vont devoir investir 80 000 euros en moyenne par salle pour l'achat de projecteurs et serveurs numériques et pour l'adaptation des cabines de projections. Les distributeurs, quant à eux, vont réaliser des économies car les coûts de fabrication et de transport des fichiers numériques des films sont très inférieurs à ceux des anciennes copies photochimiques des films en 35 mm.
Nous devons donc trouver un mode de financement pour que les exploitants de salles s'équipent le plus rapidement possible : la période transitoire est coûteuse pour tous les acteurs et il faut éviter qu'une concurrence exacerbée entre salles ne nuise à la diversité et à la richesse de leur maillage territorial.
A la suite du rapport Goudineau, le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) avait proposé un fonds de mutualisation, dont le principe avait recueilli l'accord des professionnels et qui avait l'avantage de la simplicité. Le 1er février 2010, l'Autorité de la concurrence a cependant émis un avis défavorable à sa création, estimant qu'il aurait constitué une concurrence déloyale envers les opérateurs privés existants.
En effet, certains exploitants de salles ont déjà contractualisé directement avec des distributeurs, ou par le biais d'intermédiaires privés, pour financer l'achat de leur équipement numérique. Ces montages sont financés par une « contribution numérique » des distributeurs, appelée aussi « Virtual Print Fee » ou (VPF).
Ce système fonctionne bien pour les multiplexes de plus de trois ou quatre écrans, qui ont accès aux films dès leur sortie nationale ou qui programment un grand nombre de films nouveaux différents.
Cependant, la loi est nécessaire pour encadrer ce dispositif et permettre l'équipement de toutes les salles. Les petits et moyens exploitants, notamment ceux qui exploitent les films plusieurs semaines après leur sortie ou qui disposent de peu d'écrans, peuvent difficilement entrer dans ce type de montage contractuel, car ils ne génèrent pas suffisamment de contributions en vue de financer leurs investissements.
L'encadrement du dispositif vise à maintenir la liberté de programmation des exploitants et à garantir la maîtrise par les distributeurs de leurs plans de diffusion des films, c'est-à-dire le libre accès aux films pour les uns et le libre accès aux salles pour les autres.
En effet, le système contractuel actuel pourrait favoriser le placement de copies numériques au détriment des autres films pendant la période de transition et entraîner une accélération de la rotation des films, ce qui serait préjudiciable à leur bonne exposition au public. Les films les plus fragiles seraient bien sûr les premiers touchés.
A cette fin, le texte veille à assurer l'étanchéité entre les contrats de contribution numérique et la négociation sur les conditions de location et d'exposition d'un film.
Le respect de ce cadre s'exercera sous le contrôle du CNC et du Médiateur du cinéma.
Après l'avis de l'Autorité de la concurrence, le CNC s'est concerté avec les professionnels pour trouver une solution qui recueille l'accord du plus grand nombre. Un texte de loi est apparu nécessaire
Les députés et sénateurs du comité de suivi des ordonnances relatives au cinéma - M. Leleux et moi-même pour le Sénat - ont été régulièrement informés et consultés. Compte tenu de l'urgence à agir, une proposition de loi a été déposée dans les mêmes termes au Sénat - par nos collègues MM. Leleux et Legendre - et à l'Assemblée nationale, l'idée étant que la chambre qui disposerait la première d'une « fenêtre » à l'ordre du jour l'examinerait en premier lieu, en pleine concertation avec l'autre assemblée. C'est ainsi que l'Assemblée nationale a adopté le texte, le 16 juin, assorti d'amendements qui vont dans le sens que nous souhaitions et qui tenaient compte de la concertation, qui a continué.
La proposition de loi généralise et encadre la contribution numérique contractuelle. Plutôt que de créer une nouvelle taxe, elle redistribue aux exploitants une partie des économies réalisées par les distributeurs. Cette contribution n'est pas pérenne, puisqu'elle s'arrêtera une fois que toutes les salles auront été équipées.
Sans un tel système général et obligatoire, les plus petites salles ne pourront s'équiper, faute d'attirer les investisseurs nécessaires : ce texte leur permet donc de se regrouper, pour mutualiser la collecte des contributions.
Ce dispositif sera complété par des aides spécifiques du CNC aux exploitants de trois écrans ou moins, voire de quatre écrans si cela s'avère nécessaire. En effet, ces salles - dites de continuation - obtenant très rarement les films à leur sortie, elles ne généreront que peu de contribution numérique.
Les salles de quatre écrans ou moins représentent 734 établissements, soit environ 95 % de ceux qui ne percevront pas assez de contribution numérique. Le CNC évalue au maximum à 35 le nombre des établissements de plus de 3 écrans concernés.
Ces aides complèteront leurs apports propres ainsi que, le cas échéant, la contribution numérique et les aides des collectivités territoriales.
Nous voulons tous préserver l'aménagement culturel de notre territoire et la diversité cinématographique unique de notre pays. Notre réseau est le premier d'Europe et le quatrième du monde. Nous refusons de baisser les bras, contrairement à de nombreux pays étrangers, qui admettent que le numérique entraînera la fermeture de nombreuses salles de cinéma...
Ce texte prévoit que la contribution numérique sera exigible, par salle, durant les deux premières semaines de la sortie nationale du film, et - comme l'a précisé l'Assemblée nationale - au-delà lorsque l'oeuvre est mise à disposition dans le cadre d'un élargissement du plan initial de sortie du film. Elle est donc fixée sur le pic du tirage des copies. Les professionnels que nous avons rencontrés lors du Festival de Cannes nous ont convaincus de la pertinence de cette solution.
En revanche, la contribution n'est pas exigible lorsque les films sont mis à disposition pour une exploitation dite « en continuation », c'est-à-dire lorsqu'une salle reprend une copie déjà existante.
L'Assemblée nationale a précisé que la contribution sera due seulement pour l'installation des équipements de projection numérique, non pour leur renouvellement. Elle ne sera plus requise une fois assurée la couverture du coût des équipements, compte tenu des autres financements de l'exploitant et, en tout état de cause, au-delà d'un délai de dix ans après l'installation initiale des équipements de projection numérique, sans que ce délai ne puisse excéder le 31 décembre 2021 ;
L'Assemblée nationale a également précisé que la contribution serait due aux salles homologuées avant le 31 décembre 2012. Elle a encore prévu que le financement de l'équipement pourra être mutualisé entre exploitants ou par des intermédiaires financeurs. Nos collègues ont ajouté que la contribution numérique sera également due en cas de mise à disposition ou de location d'une salle de projection pour diffuser des programmes dits « hors film », comme la captation de spectacles vivants ou la retransmission de compétitions sportives ou d'émissions audiovisuelles.
Certains professionnels s'inquiètent de voir ce type de programmation se substituer à celle des films. Un décret en cours d'élaboration doit encadrer la diffusion de ces programmes « hors film » : pourquoi ne pas minorer le soutien du CNC en cas de projection de « hors film », notamment pour les salles qui ne sont pas fragiles ? En effet, s'ils diversifient l'offre et s'ils soutiennent les salles en zones rurales, ces programmes peuvent être une aubaine pour des exploitants qui bénéficieraient des aides au cinéma sans diffuser d'oeuvres cinématographiques.
En contrepartie de ces obligations, des garanties sont apportées aux distributeurs et aux exploitants. Le montant de la contribution doit rester inférieur à la différence entre le coût de la mise à disposition d'une oeuvre sur support photochimique et celui de la mise à disposition d'une oeuvre sous forme de fichier numérique.
Le Médiateur du cinéma - qui a la confiance de tous les professionnels - pourra être saisi de tout litige relatif à la contribution numérique. Sur les propositions de MM. Bloche et Riester, l'Assemblée nationale a précisé qu'il pourra demander la transmission du contrat de location des films, ce qui garantira davantage la transparence et l'étanchéité du dispositif.
Sera nulle de plein droit toute clause contractuelle qui ferait dépendre les choix de distribution, de programmation, ou encore le taux de location, du versement de la contribution : cela pour « préserver la diversité de l'offre cinématographique ».
Un comité de concertation professionnelle est chargé d'élaborer des recommandations de bonne pratique, il sera ouvert quand l'ordre du jour l'exige, comme le souhaitaient les professionnels.
L'Assemblée nationale a aussi prévu une clause de rendez-vous un an après la promulgation de la loi ainsi qu'un comité de suivi parlementaire composé de deux députés et de deux sénateurs chargé d'évaluer le fonctionnement du nouveau dispositif. Ce comité disposera du concours du CNC, lequel devra produire un rapport sur la mise en oeuvre de la loi.
Le comité de suivi, le comité de concertation professionnelle et le Médiateur du cinéma devront, chacun dans son rôle, vérifier l'étanchéité entre le versement de la contribution numérique et la programmation, ainsi que le respect des engagements de programmation et des plans de diffusion des films.
A l'initiative de M. Rogemont, nos collègues députés ont lié le versement d'une aide pour l'équipement numérique au respect d'engagements de programmation : c'est important.
Enfin, l'Assemblée nationale a rendu obligatoire la référence aux usages de la profession pour fixer le loyer des salles de cinéma ; c'était une demande constante de la profession.
La proposition de loi est donc consensuelle sur les principes et sur l'urgence à les mettre en oeuvre. Le texte est équilibré, ce qui est difficile pour un secteur composé d'acteurs aux intérêts parfois violemment divergents.
Le dispositif doit garder de la souplesse pour que les acteurs le fassent vivre. Nous suivrons avec vigilance son application et nous nous remettrons à l'ouvrage si cela s'avérait nécessaire. Je fais confiance aux professionnels, au comité de concertation professionnelle, au CNC et au Médiateur du cinéma pour qu'une application intelligente du texte permette d'en atteindre tous les objectifs.
Cette proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale de façon très consensuelle, je vous propose de l'adopter dans les mêmes termes.
De fait, nous n'avons aucun amendement à examiner. J'ai demandé un examen le plus rapide de ce texte, j'ai bon espoir pour la session extraordinaire de septembre.
Bien des questions demeurent. Pour la première fois, le système qui a fait l'originalité et le maintien même de notre cinéma, ce système mis en place au lendemain de la guerre, tout entier se trouve mis en cause. Car la solution qu'on nous propose, n'est rien d'autre que la copie conforme du système américain, qui ne compte que des grandes salles. En France, grâce en particulier à l'action des agences pour le développement régional du cinéma (ADRC), nous avons encore un réseau très dynamique de salles en milieu rural, en particulier le cinéma itinérant, qui vit bien !
Or, ce texte va aider les salles d'importance, en laissant de côté les plus petites et le cinéma itinérant : c'est la conséquence de l'introduction d'un tiers opérateur, d'un tiers financier, dont on a su se passer depuis la guerre en faisant travailler ensemble le public et le privé, dans l'intérêt du public et du cinéma. Le tiers financier va constituer un groupement financier, qui ne tardera pas, comme c'est partout le cas avec la finance, à prendre le pouvoir : c'est un tournant historique dans l'histoire de notre politique cinématographique !
Les grands exploitants se sont opposés farouchement à l'idée pourtant très bonne d'une taxe, qui aurait abondé un fonds de soutien à l'équipement numérique, ils ont mis en avant tous les investissements qu'ils avaient réalisés pour faire leurs multiplexes, puis l'Autorité de la concurrence est venue à leur secours, pour interdire un véritable fonds de mutualisation. Reste une redistribution, qui serait estimée à 10 millions, certaines rumeurs évoquent même 40, voire 70 millions. Mais ce qu'il faudrait, pour aider toutes les petites salles à s'équiper, c'est une enveloppe de 120 millions : en dessous de 100 millions, il y aura des victimes.
Quand les grands distributeurs ont vu que certaines salles étaient peu rentables et qu'ils ont concentré leur diffusion en centre-ville, ils ont fermé systématiquement leurs salles de banlieue, et il a fallu que les municipalités les rachètent, qu'elles maintiennent les équipements. Rien qu'en Seine-Saint-Denis, 17 salles ont été sauvées, c'est un succès, mais que vont-elles devenir si elles ne peuvent s'équiper ? Les collectivités territoriales, on le sait, n'ont plus les moyens d'intervenir, et la loi que le Gouvernement fait passer ces jours-ci va aggraver la situation. Il faut aider les salles, toutes les salles !
Le Médiateur, ensuite, n'a pas les pouvoirs qu'il lui faut...
Oui, mais ce n'est pas suffisant. Et il faut veiller aussi à la bonne application de la règle européenne de minimis : la pression est trop forte ! Le CNC lui-même ne s'est pas assez battu pour les petites salles... Je proposerai donc des amendements en séance.
Les règles ont été fixées au lendemain de la guerre, mais l'Europe, depuis, est passée par là ! Nous devons en tenir compte... Les grandes salles s'équipent, nous avons cherché à ce que les salles plus petites puissent suivre.
Le projet d'aide du CNC s'adresse aux établissements qui ne sont pas, du fait de leur programmation, susceptibles de générer suffisamment de contributions des distributeurs pour couvrir au moins les trois quarts du coût de leurs investissements. Elle est placée sous le régime d'exemption de minimis, qui autorise les Etats à accorder une aide de cette nature à condition qu'elle ne dépasse pas le montant de 200 000 euros sur trois exercices fiscaux consécutifs. Ce montant s'apprécie en cumulant toutes les aides perçues par un bénéficiaire donné, tous dispositifs publics confondus.
L'aide est réservée aux établissements n'appartenant pas à un circuit ou groupement de plus de 50 écrans, elle est destinée en priorité aux établissements de un à trois écrans, et sont exclus les établissements qui ont moins de cinq séances hebdomadaires en moyenne sur l'année et les circuits itinérants, qui feront l'objet d'un soutien spécifique.
Le CNC se mobilise, les collectivités territoriales également, et les autres dispositifs de modernisation des salles sont en vigueur.
Des distributeurs se sont inquiétés pour la programmation, car la concurrence est particulièrement vive sur les nouveaux films, mais la numérisation diminue de beaucoup les coûts de copie, dans une proportion considérable.
Sur la gestion, ensuite, je crois que le CNC est consolidé par les ordonnances, et le Médiateur dispose de pouvoirs nouveaux, en particulier sur l'investigation.
Enfin, le comité de concertation professionnelle pourra s'ouvrir à toute personnalité, et le comité de suivi parlementaire sera très vigilant sur le devenir des petites salles. Nous ferons un premier bilan dans un an, nous mesurerons alors quelles sont les difficultés.
Nous avons donc dû composer avec un système libéral, pour équiper notre réseau de salles au mieux que nous pouvons, mais nous n'allons pas cependant faire comme si les règles de concurrence n'existaient pas, ni revoter sur le traité européen...
Nous avons utilisé nos possibilités d'action, la régulation par les pics de copies a été obtenue à l'arraché, nous adaptons un système libéral, pour protéger la diversité de notre programmation. C'est le sens également des mesures sur le « hors film » et sur les territoires ruraux.
Puisque j'ai eu l'honneur d'être le cosignataire de notre proposition de loi, monsieur le président, je veux aussi rassurer M. Ralite. Le CNC se préoccupe de la diversité, ce texte en porte témoignage.
Cette loi est nécessaire, urgente mais pas suffisante : il faut la compléter par une aide aux salles de moins de trois écrans, aux salles en territoire rural et au cinéma itinérant. Cette aide complémentaire est en préparation, les premiers éléments dont nous avons connaissance sont rassurants.
Ce texte respecte l'avis de l'Autorité de la concurrence et les regrets du CNC sont, en quelque sorte, le gage de ce qu'il se mobilisera pour aider les plus petites salles. Nous facilitons donc l'adaptation à cette mutation technologique du numérique, c'est très important.
Les professionnels étaient satisfaits par la proposition d'un fonds de mutualisation, l'intervention de l'Autorité de la concurrence les préoccupe vivement, car l'avenir des petites salles est en jeu. Le cinéma accessible est le résultat d'efforts très importants, qui sont nécessaires pour que les petites salles jouent le rôle d'animation qui est le leur. Les collectivités territoriales se mobilisent. En Limousin, nous avons lancé la numérisation de six écrans, avec un subventionnement de moitié : la région finance 15 %, l'Etat aussi, et le reste des subventions vient de l'Union européenne, à travers le programme opérationnel Massif central, qui concerne aussi l'Internet à haut débit. Venez le constater au cinéma de Neuvic, qui est passé au numérique ! Dans une région comme le Limousin, où la moitié de la population est rurale, l'investissement pour le cinéma a toute son importance.
La situation des territoires ruraux doit être prise en compte, c'est ce que fait ce texte.
On a évoqué la somme de 10 millions, puis de 40 à 70 millions, saura-t-on bientôt ce qu'il en est ?
L'ADRC, où j'ai longtemps siégé, s'attachait à prendre en compte la création et le pluralisme de la programmation, d'un cinéma pour tous les publics et tous les territoires : puisse cette philosophie qui a prévalu depuis soixante ans et fait travailler ensemble le public et le privé, puisse cette belle oeuvre collective ne pas être oubliée !
La proposition de loi est adoptée sans modification dans la rédaction de l'Assemblée nationale.