Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale

Réunion du 4 mars 2015 à 9h35

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission procède tout d'abord à la désignation de candidats pour faire partie de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte pour les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à faciliter l'exercice, par les élus locaux, de leur mandat.

MM. Philippe Bas, Bernard Saugey, Jean-Jacques Hyest, Mme Jacqueline Gourault, MM. Jean-Pierre Sueur, Alain Anziani et Mme Cécile Cukierman sont désignés en qualité de membres titulaires et MM. François-Noël Buffet, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Michel Delebarre, Yves Détraigne, Mme Catherine Troendlé, et M. René Vandierendonck sont désignés en qualité de membres suppléants.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Il vous sera invariablement répondu que la composition des commissions mixtes paritaires est fonction de la représentation proportionnelle des groupes.

M. François Grosdidier est désigné comme représentant du groupe de travail institué par la commission du développement durable consacré au suivi des négociations internationales sur le climat.

MM. Christophe-André Frassa et Jean-Yves Leconte sont nommés co-rapporteurs sur le bilan d'application de la loi n° 2013-659 du 22 juillet 2013 relative à la représentation des Français établis hors de France.

MM. Hugues Portelli et Jean-Pierre Sueur sont nommés co-rapporteurs sur le bilan d'application de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens.

Puis la commission examine le rapport de M. François Pillet et le texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 531(2013-2014) présentée par Mme Colette Giudicelli visant à modifier l'article 11 de la loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004 relative à l'accueil et à la protection de l'enfance.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

On dénombre en France 98 000 cas d'enfants en danger, dont 19 000 sont victimes de maltraitance et 79 000 se trouvent dans des situations à risque. Ces statistiques sont extraites du dossier « Maltraitance des enfants » paru dans la revue Médecins, dont la fiabilité est hors de doute. Près de 44 % des enfants maltraités ont moins de six ans. Selon le docteur Grouchka, membre du collège de la Haute Autorité de santé, 5 % des signalements émanent de médecins : 1 % des médecins libéraux et 4 % de leurs confrères hospitaliers.

Quelle est l'origine de cette proposition de loi ? Le souci de mieux protéger l'enfance maltraitée en s'interrogeant sur les raisons pour lesquelles les personnes qui constatent la maltraitance ne la signalent pas. Tous les intervenants que nous avons auditionnés - membres de la Haute Autorité de santé, des syndicats de médecins, du Conseil de l'ordre, universitaires - s'accordent sur le diagnostic et sur une partie des solutions. Le problème est psychologique : les médecins n'utilisent pas le dispositif de signalement des maltraitances par crainte des conséquences des signalements sans suite, des poursuites à leur encontre, et de ce qu'ils considèrent comme le mécanisme broyeur de la justice. Ils redoutent l'effet en retour de ces signalements sur les familles, sur leur clientèle et sur l'ensemble de leur zone de travail. Les médecins, enfin, ne sont pas du tout formés à la reconnaissance des situations de maltraitance et à la procédure de signalement. Cette proposition de loi mérite donc une étude attentive.

La réforme proposée pose néanmoins certains problèmes. Si l'article unique oblige le médecin à saisir « sans délai » le procureur de la République, cette obligation est contrebalancée par l'alinéa suivant, selon lequel sa responsabilité pénale, civile ou disciplinaire ne pourra être recherchée. Une apparente erreur de rédaction a conduit à omettre le signalement par le médecin des violences dont les victimes ne sont ni des mineurs, ni des personnes incapables, mais des femmes majeures par exemple. Ces signalements doivent pouvoir être maintenus, mais avec l'accord de la victime, car sinon ils auront pour effet de les dissuader de se rendre chez le médecin. L'obligation faite au médecin de saisir « sans délai » le procureur de la République le priverait, enfin, de la possibilité de rechercher un avis supplémentaire, ou de demander des examens complémentaires. Ces faiblesses de rédaction justifieront que nous en restions, moyennant certaines modifications que je vous proposerai, aux dispositions actuelles de l'article 226-14 du code pénal.

Le droit existant offre des protections considérables au médecin signalant des présomptions de maltraitance : le secret professionnel étant levé, sa responsabilité disciplinaire ou civile ne peut d'ores et déjà être recherchée, sauf en cas de signalement abusif. Cependant, le quatrième alinéa de la proposition de loi, en réaffirmant clairement cette irresponsabilité, améliore la lisibilité des textes. Je vous proposerai donc de le conserver. À côté de cette disposition, d'autres moyens peuvent être recherchés pour améliorer les textes en vigueur. Lorsqu'ils n'ont que de simples doutes, plutôt que d'alerter immédiatement le procureur, les médecins devraient pouvoir adresser leurs signalements à la cellule départementale de recueil des informations préoccupantes (CRIP), habilitée à effectuer des vérifications supplémentaires. Pourquoi la protection juridique dont jouissent les médecins ne serait-elle pas étendue à d'autres professions médicales, comme les puéricultrices et les infirmières ? Je vous proposerai des modifications en ce sens. Un autre amendement complète la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites aux femmes, qui traite aussi des violences familiales, dont j'avais été le rapporteur, pour prévoir une formation des professionnels aux mécanismes de signalement.

À côté des modifications législatives que je vous proposerai, les auditions que j'ai menées me conduisent à relever la nécessité pour les pouvoirs publics et notamment pour la Haute Autorité de santé d'améliorer les formulaires de signalement mis à la disposition des médecins, en y ajoutant notamment la mention des dispositions qui les protègent et les formes que le signalement doit prendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Si l'on s'émeut à juste titre que certains cas ne soient pas signalés, j'ai pu constater, en tant que maire, les conséquences désastreuses de signalements hâtifs : en dépit de mes recommandations de prudence, les gendarmes sont venus appréhender les personnes visées. Le consentement des victimes majeures est en tout cas la moindre des précautions à prendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Béchu

Le titre de cette proposition de loi me gêne : il ne s'agit pas là de remettre à plat la loi du 2 janvier 2004. Un amendement du rapporteur pourrait y remédier. Si j'approuve la proposition, je sais que la protection de l'enfance requiert bien d'autres améliorations. Nous avons déjà eu ces débats. J'ai été il y a trois ans l'auteur d'une proposition de loi, votée dans cette assemblée par 330 voix sur 346, qui disposait que les allocations familiales ne seraient plus versées aux parents coupables de violences sur leurs enfants, mais aux personnes ou aux institutions qui en auraient la charge. Je regrette que la promesse, faite alors par la ministre Dominique Bertinotti, d'un nouveau texte pour la protection de l'enfance n'ait été suivie d'aucun effet trois ans après. Protéger les médecins auteurs de signalements, c'est bien ; mais quid des instituteurs ou des autres lanceurs d'alerte potentiels ?

Une histoire en dit long sur les difficultés en matière de responsabilité : président d'un conseil général, et responsable à ce titre de la protection de l'enfance dans mon département, j'ai reçu un jour de décembre l'appel d'une responsable de l'action sociale me signalant la présence dans une maternité d'un nourrisson qui, me disait-elle, ne devait pas être renvoyé au domicile de ses parents. L'assistante sociale ne voulait pas prendre la responsabilité d'un signalement de peur de difficultés avec la famille ; la responsable elle-même s'adressait à moi par téléphone pour ne pas laisser de traces. Comment pouvais-je, en tant que président du conseil général, prendre une décision sur une situation que je ne connaissais pas ? La juridiciarisation des rapports sociaux entraîne chez nombre d'acteurs la volonté de n'être pas tenus pour responsables du fait déclencheur des procédures.

Près de 100 000 enfants sont placés, 300 000 sont suivis. Nous n'avons aucune visibilité sur les effets des interventions en milieu ouvert. L'hétérogénéité de l'accueil des mineurs isolés dans notre pays est scandaleuse : si certains départements font beaucoup, d'autres font peu. La situation financière est ubuesque : la protection de l'enfance n'étant pas considérée comme une dépense transférée directement par l'État, elle ne fait pas l'objet d'une compensation, à la différence du revenu de solidarité active (RSA), de l'allocation personnalisée d'autonomie ou de la prestation de compensation du handicap. Vous pouvez décider de diminuer vos dépenses de protection de l'enfance sans que l'on ne puisse rien vous reprocher ! Cela risque d'en faire la variable d'ajustement des difficultés actuelles en matière de dotation globale de fonctionnement. Si vous y ajoutez le chantier de la responsabilité et de la juridiciarisation, nous avons du travail...

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Les conseils généraux sont en effet en première ligne. La proposition de loi de Christophe Béchu et de Catherine Deroche, adoptée par le Sénat, a été transmise à l'Assemblée nationale...

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Béchu

Non contente de la détricoter, elle a voté contre : il n'y a plus de texte. Attendons une alternance à l'Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le travail, certes important, qu'a accompli le rapporteur ne réduit-il pas l'impact du texte ? Si son amendement touchant les victimes majeures est très judicieux, l'intention des auteurs est bien que le médecin soit tenu de signaler les mineurs maltraités. Que devient cette obligation dans le texte amendé ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

Je comprends parfaitement la préoccupation de Pierre-Yves Collombat : c'est précisément pour que les médecins n'aient pas à s'adresser directement au procureur que mon amendement rappelle la possibilité de saisir la CRIP lorsqu'ils n'ont que de simples doutes. Celle-ci peut constituer une espèce de sas, puisqu'elle est compétente pour conduire des vérifications autres que médicales, notamment dans le milieu familial.

Il n'y a jamais eu de véritable obligation de signalement, le médecin était toujours renvoyé à sa conscience. L'avantage du texte amendé sera de le libérer des craintes qu'un éventuel signalement engage sa responsabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

L'obligation de signalement figure bien dans la proposition de loi. Vous paraît-elle excessive ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

Si le médecin se trouve tenu de signaler tout fait tant soit peu suspect, le procureur sera submergé et les patients eux-mêmes risquent de ne plus consulter.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Le problème, c'est que la maltraitance n'est souvent pas évidente. Évitons donc l'automaticité, qui peut avoir des conséquences catastrophiques, pour laisser au médecin un temps de réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

La maltraitance, psychologique en particulier, est en effet très difficile à déterminer. Dépourvus d'une formation spécifique, les médecins ne peuvent qu'hésiter devant cet acte de soin particulier qu'est le signalement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Le principal objet de l'article 226-14 du code pénal est la levée du secret professionnel. Le signalement n'engage pas la responsabilité de son auteur dès lors que celui-ci n'est plus tenu au secret professionnel.

Je me suis moi aussi, en tant que conseiller général, occupé pendant près de trente ans de l'aide sociale à l'enfance. Lorsque les services sociaux du département collaboraient en bonne intelligence avec les juges des enfants et les parquets des mineurs, nous obtenions de très bons résultats, sans judiciarisation excessive. Il est vrai aussi que les non signalements conduisent à des catastrophes : j'ai connu le cas d'une mère infanticide qui a récidivé. Les mineurs qui sont du ressort de l'aide sociale à l'enfance doivent de toute façon faire l'objet d'un signalement par les fonctionnaires ayant connaissance de leur situation, au nom de l'article 40 du code de procédure pénale.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

La réflexion de Christophe Béchu sur l'intitulé est parfaitement pertinente : mon troisième amendement le modifie. Les protections offertes aux médecins doivent effectivement être étendues à l'ensemble des professions médicales, c'est l'une de mes propositions.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article unique

L'amendement COM-1 est adopté.

Article additionnel après l'article unique

L'amendement COM-2 est adopté

Intitulé de la proposition de loi

L'amendement COM-3 est adopté.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

La commission examine ensuite le rapport de M. Alain Anziani et le texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 536 (2013-2014) présentée par M. Gérard Collomb sur la participation des élus locaux aux organes de direction des deux sociétés composant l'Agence France locale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'Agence France locale a été créée le 22 octobre 2013 afin de répondre aux difficultés d'emprunt des collectivités territoriales, en raison de la rareté des liquidités, du poids des emprunts toxiques dans les budgets locaux et des règles prudentielles du comité de Bâle qui imposent l'augmentation des fonds propres des établissements bancaires.

Face à ces difficultés, les collectivités les plus importantes ont répondu à cette crise en recourant aux marchés financiers et bénéficié d'emprunts obligataires. Toutefois, cette faculté n'est pas accessible aux petites collectivités. C'est pourquoi plusieurs associations nationales d'élus ont engagé une réflexion qui a abouti à la mise en place de l'Agence France locale. Composée uniquement de collectivités territoriales, celle-ci a pour objet de proposer des prêts à ses membres afin que celles-ci financent leur politique d'investissement local. Elle se compose d'une société territoriale qui fixe les orientations de l'Agence, et d'une société financière destinée à lever des fonds sous la conduite d'un directoire de banquiers.

La proposition de loi de Gérard Collomb vise à identifier et prévenir les risques encourus par les élus locaux participant à cette agence, à savoir le risque de qualification « d'élu intéressé à l'affaire » lors des délibérations de sa propre collectivité ; le risque de qualification « d'entrepreneur d'un service local » et l'engagement enfin, de sa responsabilité civile au titre de ses fonctions.

Le premier risque est, à mon avis, très limité, grâce à une jurisprudence désormais très précise et ancienne. Le principe de précaution invite cependant à prévoir expressément que les élus siégeant au sein de l'Agence ne pourront être qualifiés « d'intéressés à l'affaire » lors d'une délibération de leur collectivité portant sur les relations de celle-ci avec l'Agence. Cette situation n'est pas à assimiler avec l'incrimination de prise illégale d'intérêt.

Un élu relève du statut d'entrepreneur d'un service local si lui-même, ou la société à laquelle il appartient, travaille directement pour la collectivité. C'est le cas de l'Agence France locale. Il convient donc d'écarter cette qualification pour les élus qui en sont membres.

La proposition tend enfin, dans son quatrième et dernier alinéa, à exonérer l'élu de toute responsabilité civile ; celle-ci serait supportée par sa collectivité. Ce problème est plus complexe que les précédents : l'élu membre de l'Agence y représente sa collectivité, personne morale susceptible d'être mise en cause ; la personne physique peut également l'être, en cas de faute qui lui soit imputable en propre. Ce risque est faible, mais ne saurait être supprimé : qui commet une faute doit en répondre. Par ailleurs, la directive « Résolution », qui doit être prochainement transposée, prévoit que les membres d'une société bancaire sont civilement et pénalement responsables. Gérard Collomb m'a donc donné son accord pour un amendement de suppression de cette disposition. Mon autre amendement est purement rédactionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Je me félicite de la création de cette agence, qui a contribué à la reconstruction de notre système de financement sur les décombres de Dexia. La même technique existe dans d'autres pays. Je constate avec plaisir que l'on se pose la question de l'implication personnelle des élus lorsqu'ils agissent pour le compte de leur collectivité. La distance n'est pas si grande entre le premier risque identifié par la proposition de loi et le cas particulier de la prise illégale d'intérêt. Or l'Assemblée nationale a cru bon de supprimer de la proposition de loi sur l'exercice des mandats locaux notre définition de la prise illégale d'intérêt. Espérons que ceux qui soutiennent cette proposition de loi persévéreront dans les mêmes dispositions : c'est exactement le même problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Si la création de l'Agence France locale était parfaitement pertinente en octobre 2013, on trouve aujourd'hui plus facilement de l'argent sur les marchés. La Caisse des dépôts et consignations est revenue dans le jeu. Pourquoi, d'ailleurs, parle-t-on au futur de la « société opérationnelle » ? N'est-elle pas encore en place ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

Si, elle a même été notée par l'agence de notation Moody's, et elle émettra son premier emprunt dans les prochaines semaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Espérons que ce ne soit pas la source de nouveaux problèmes pour les collectivités en grande difficulté. Prêter, c'est bien, pourvu que l'on ait des garanties... La pertinence de cette agence dans la situation économique actuelle me paraît incontestable. Je m'accorde en revanche avec les recommandations du rapporteur : un administrateur de société, quelle qu'elle soit, ne peut s'exonérer de sa responsabilité civile. Quant aux deux autres risques évoqués, ils me paraissent en l'occurrence bien faible.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Le système de financement local mis en place est très fragile : on a récemment mis les banques à l'abri de procédures initiées par les collectivités qui se considèrent flouées par Dexia. La Société de financement local (Sfil) est d'ailleurs pleine de produits explosifs, associés dans un montage complètement délirant !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Que dire de ceux qui sont indexés sur le franc suisse...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il n'est donc pas mauvais de se ménager une sortie de secours.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

La notion de prise illégale d'intérêt reviendra en discussion lorsque nous débattrons prochainement de la proposition de loi sur le statut de l'élu ; la commission mixte paritaire s'efforcera de rapprocher les points de vue. Ce n'est cependant pas la question posée par ce texte : il modifie les dispositions du code général des collectivités territoriales sur la qualification « d'élu intéressé », non le code pénal.

Si Jean-Jacques Hyest a raison de souligner que les liquidités sont désormais plus abondantes aujourd'hui, elles peuvent aussi se tarir de nouveau. La création de cette agence, qui facilitera l'accès aux marchés financiers, est donc une mesure de prudence. À côté des questions du volume des liquidités et des taux se pose encore celle des marges. Cette agence aura l'intérêt de les limiter.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

L'adhésion à l'Agence est conditionnée par une évaluation des collectivités candidates : seules celles notées entre 1 et 5,99 sur une échelle de 7 y sont admises. Elles ne bénéficieront de prêts que pour un montant limité.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article unique

Les amendements COM-2 et COM-1 sont adoptés.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Présidence de M. Jean-Patrick Courtois, vice-président -

La commission procède ensuite à l'examen, en deuxième lecture, du rapport de Mme Catherine Troendlé et du texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 620 (2013-2014), modifiée par l'Assemblée nationale en première lecture, visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Le Sénat doit se prononcer en deuxième lecture sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale le 12 juin 2014, visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire. Déposée au Sénat le 13 février 2012 par MM. Jean-Pierre Leleux et Jean-René Lecerf et plusieurs de leurs collègues, la proposition de loi avait pour objet d'ajouter une troisième épreuve, sanctionnant la connaissance des gestes de premiers secours, aux deux épreuves actuelles du permis de conduire. En première lecture, le Sénat a conservé le principe d'une formation obligatoire mais il a supprimé l'épreuve supplémentaire correspondante. La proposition de loi ainsi modifiée par le Sénat n'a subi que peu d'évolutions à l'Assemblée nationale.

La proposition de loi part du constat de l'insuffisante formation de la population française aux gestes de premiers secours : selon l'enquête menée par la Croix Rouge en 2013, seuls 46 % des Français les connaissent. Si des dispositifs de formation obligatoires existent, comme les articles L. 312-13-1 et L. 312-16 du code de l'éducation qui imposent de former les élèves à l'attestation de prévention et secours civique de niveau 1 (PSC1), ils sont peu mis en oeuvre puisqu'en pratique 20 % des élèves sont formés chaque année. Je l'ai régulièrement dénoncé. C'est d'autant plus préjudiciable en cas d'accidents de la route. Ce constat prend un relief particulier aujourd'hui puisque la mortalité routière a augmenté de 3,7 % en 2014.

En première lecture au Sénat, le principe de l'épreuve spécifique prévu par la proposition de loi a été supprimé à mon initiative : la nouvelle épreuve aurait eu des conséquences financières non négligeables - étant observé que le coût d'une première présentation du permis de conduire est au minimum de 1 200 euros -, elle aurait allongé des délais déjà très longs - trois à cinq mois en moyenne - et elle aurait été enfin compliquée à organiser. La sanction des connaissances devrait donc être effectuée à l'occasion des épreuves actuelles, notamment de l'épreuve théorique, dans la mesure où seule la pression d'un questionnement systématique forcera les élèves à apprendre ces notions.

Un appel d'offres a été lancé le 13 février 2015, afin de modifier les questions de l'examen théorique. Il porte sur la fourniture de 1 000 questions, dont 100 demandées au sein de la famille n° 5 relative à la réglementation générale, qui inclut les questions liées aux gestes de premiers secours. Cela augmentera la probabilité - jusqu'alors très faible - d'une question portant sur la formation aux premiers secours, ce que je salue. Il est essentiel qu'au moins une question soit systématiquement posée sur ce sujet à l'occasion de l'examen théorique du permis de conduire, faute de quoi les candidats ne s'investiront pas dans la formation aux premiers secours.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale ne remettent pas en cause le texte : la référence aux accidents de la circulation dans l'obligation de formation aux premiers secours des candidats au permis de conduire a été supprimée, le terme « sanctionner » a été remplacé par « évaluer » et enfin, à juste titre, l'obligation de « sensibilisation » prévue par l'article 16 de la loi n° 2003-495 du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière a été supprimée car elle serait contradictoire avec le texte proposé dont la teneur est beaucoup plus forte.

En conclusion, le principe resterait celui d'une formation obligatoire à des gestes simples de premiers secours, dont le contenu serait déterminé par décret. Les connaissances seraient évaluées dans le cadre des épreuves actuelles du permis de conduire, c'est-à-dire aussi bien lors de l'épreuve théorique qu'à l'occasion de l'épreuve pratique. Au regard de l'importance de tous les dispositifs permettant de contribuer à sauver des vies sur les routes, je propose que le texte soit adopté sans modification supplémentaire, afin qu'il entre en vigueur le plus vite possible. Compte tenu de l'importance de cette question, je demanderai en séance l'engagement du Gouvernement d'évaluer systématiquement cette formation, aussi bien au cours de l'examen pratique qu'au cours de l'examen théorique, cette dernière condition étant la plus importante pour que le texte proposé soit effectif.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Je vous remercie pour ce rapport, mais je ne désire pas être secourue par un jeune conducteur en cas d'accident ! Il est impossible d'être correctement formé aux premiers secours en trois ou quatre cours.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Il est préférable de prévoir une formation pendant le service civique.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Comme on ne fait rien, il faut donner l'impression qu'on fait...

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Depuis plusieurs années, nous votons des dispositions pour faciliter l'obtention du permis de conduire - incluses notamment dans les lois sur la politique de la ville - et maintenant nous renchéririons le coût du permis sans raison ! Les accidents de mobylette conduites sans permis sont souvent plus dangereux que les accidents de voiture. Si nous estimons que tous les Français doivent être formés aux premiers secours, la formation devrait être organisée par l'Éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

La proposition de loi émane du Sénat ; elle a été peu modifiée par l'Assemblée nationale ; les amendements de notre collègue Jean-Pierre Leleux précisent que la formation consiste à savoir baliser un accident, alerter le bon service, savoir effectuer les gestes pour faire face à la détresse respiratoire et aux hémorragies externes. Il y a quinze jours, des adolescents de mon département de Seine-et-Marne, formés aux premiers secours dans leur collège, ont sauvé un automobiliste coincé dans une voiture en feu. Le texte de la proposition de loi va moins loin que les amendements de M. Leleux mais tout ce qui concourt à la connaissance des gestes de premier secours doit être encouragé. Cela ne compliquera pas beaucoup les épreuves du permis de conduire. Je pense qu'il faut soutenir la position du rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Michel Mercier ouvre une piste. La formation aux premiers secours pourrait être réalisée pendant les temps d'activités péri-scolaires. Les enfants de neuf-dix ans sont très réceptifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Madec

Je ne suis pas d'accord avec Michel Mercier. Sensibiliser aux premiers secours à l'occasion du permis de conduire est une bonne chose et la formation prévue n'augmentera pas le coût du permis de conduire.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Initialement, le texte proposé préconisait une formation lourde et couteuse - de l'ordre de vingt-cinq euros - sanctionnée par une épreuve spécifique. Le texte adopté par le Sénat est plus modeste. Les notions évaluées porteraient seulement sur les services à alerter, car les sondages montrent que 50 % des Français ne les connaissent pas, la sécurisation du lieu d'accident et les indications à apporter pour être localisé par les secours. Jean-Pierre Leleux a toutefois déposé deux amendements pour élargir cette formation à des gestes quasi médicaux destinés à faire face à la détresse respiratoire et aux hémorragies externes. Mais il faudrait alors prévoir un renouvellement de la formation à intervalles réguliers. Le texte que je vous propose d'adopter est certes une version minimaliste, mais il a pour principal objet de systématiser la formation sur les trois points essentiels que je viens d'énumérer.

Même si je comprends la démarche suivie, je suis personnellement défavorable aux amendements de M. Leleux.

Enfin, le Gouvernement doit absolument progresser sur la mise en oeuvre de ces formations au collège car des dispositions législatives imposent des formations aux premiers secours obligatoires mais elles ne sont pas appliquées.

Les amendements COM-1 et COM-2 ne sont pas adoptés.

Le texte est adopté dans la rédaction votée par l'Assemblée nationale.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

- Présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente -

La commission examine enfin le rapport de M. Yves Détraigne et le texte qu'elle propose sur la proposition de loi n° 292 (2013-2014) présentée par M. Henri Tandonnet et plusieurs de ses collègues tendant à interdire la prescription acquisitive des immeubles du domaine privé des collectivités territoriales et à autoriser l'échange en matière de voies rurales.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

La proposition de loi déposée par Henri Tandonnet et neuf de ses collègues tend à interdire la prescription acquisitive des immeubles du domaine privé des collectivités territoriales et autoriser l'échange en matière de voies rurales. Examinée par notre commission le 15 octobre dernier et discutée en séance le 29 octobre suivant, elle a fait l'objet d'un renvoi en commission. Si la commission a approuvé la disposition autorisant l'échange de chemins ruraux - sur lesquels je vous avais proposé de recentrer la proposition - elle a refusé les dispositions sur l'imprescriptibilité. Une majorité de nos collègues a considéré que, s'il y a un problème de protection de ces chemins affectés à l'usage du public et appartenant au domaine privé des communes, il était souhaitable de rester dans le schéma traditionnel selon lequel, hormis leur insaisissabilité, les biens du domaine privé des personnes publiques sont - contrairement aux biens du domaine public - régis par les règles de droit commun de la propriété, sous réserve de quelques dérogations.

Le régime d'aliénation des chemins ruraux est dérogatoire du fait de leur nature hybride. L'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime impose une désaffectation préalable du chemin à l'usage du public, puis une décision d'aliénation prise par le conseil municipal, après réalisation d'une enquête publique dans les formes prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Le texte permet aux « intéressés groupés en association syndicale » de s'opposer à l'aliénation du chemin, s'ils s'engagent à en assurer l'entretien. Par ailleurs, en vertu de la loi du 22 juillet 1983, modifiant la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre communes, département, régions et État, un chemin rural inscrit par le conseil général sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée (PDIPR) peut être aliéné uniquement si une voie de substitution a été mise en place. Le Conseil d'État prohibe l'échange des chemins ruraux sur la base du même article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime en considérant « qu'il résulte de ces dispositions que le législateur n'a pas entendu ouvrir aux communes, pour l'aliénation des chemins ruraux, d'autres procédures que celles de la vente dans les conditions ci-dessus précisées ». Ainsi, les communes ne peuvent procéder au déplacement de l'emprise d'un chemin rural qu'après une procédure d'aliénation elle-même conditionnée par le constat de fin d'usage du chemin par le public et une enquête publique suivie d'une délibération, puis d'une procédure de déclaration d'utilité publique destinée à la création d'un nouveau chemin... Vous conviendrez qu'il s'agit là d'un droit singulièrement complexe pour des chemins du domaine privé. D'autant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 161-5 du code rural et de la pêche maritime, le maire est tenu de faire cesser toute atteinte aux chemins ruraux alors même qu'ils ne sont pas couverts par le régime des contraventions de voirie et ne donnent pas lieu à une obligation d'entretien.

Pour autant, appartenant au domaine privé des communes, les chemins ruraux peuvent faire l'objet d'une prescription acquisitive ou usucapion - d'où l'intérêt de la proposition de loi de notre collègue Tandonnet. L'hypothèse du basculement des chemins ruraux dans le domaine public des communes est peu envisageable, compte tenu des charges d'entretien ainsi créées pour les communes. On peut imaginer de procéder à des reversements ponctuels de chemins ruraux vers la voirie publique via une procédure de « reconnaissance », comme l'ont prévu, par le passé, les lois du 21 mai 1836 et du 20 août 1881. Ce sont d'ailleurs ces chemins ruraux reconnus qui ont pu être incorporés aux voies communales à la suite de l'ordonnance n° 59-115 du 7 janvier 1959. En l'absence de recensement général récent des chemins ruraux, le ministre a indiqué qu'ils représenteraient aujourd'hui 750 000 kilomètres, après la disparition de 250 000 kilomètres. Cette disparition d'un quart des chemins semble correspondre à une extrapolation des recensements réalisés en région Picardie à l'initiative de l'association « Chemins de Picardie » et comparant les indications portées au cadastre avec des relevés opérés sur le terrain. La plupart du temps, les communes s'aperçoivent de la disparition d'un chemin lorsqu'elles veulent mettre en valeur ce patrimoine, au regard de l'attrait nouveau des chemins ruraux, outre leur rôle premier de voie de circulation : lutte contre l'érosion des sols, vivier de biodiversité, maintien de la Trame verte et bleue, chasse, randonnées équestres ou pédestres, VTT...

Il importe que le législateur trouve un moyen pour enrayer ce mouvement de disparition des chemins ruraux. La proposition de loi d'Henri Tandonnet maintient les chemins ruraux dans le domaine privé des communes, tout en leur conférant l'imprescriptibilité, qui était jusqu'ici l'apanage du seul domaine public. Cette solution garantit les chemins ruraux de toute appropriation et découragerait sans doute certains comportements de fermeture à la circulation ou d'appropriation indue de la part de riverains, situation qui n'est pas rare si l'on en croit un certain nombre de personnes entendues en audition. Elle favoriserait probablement les échanges de parcelles.

Dans la mesure où, si le domaine public présente une homogénéité de règles, il n'en va pas de même pour le domaine privé des collectivités, la proposition mérite, me semble-t-il, d'être examinée. Pour autant, l'imprescriptibilité ne risquerait-elle pas d'être contre-productive en n'incitant pas les élus à mieux connaître et mieux gérer ce patrimoine ?

J'ai donc examiné la possibilité, sans faire échapper les chemins ruraux à la prescription acquisitive, d'en interrompre le cours, afin de permettre aux communes de recenser les chemins ruraux et de s'interroger sur leur devenir. Un acte de type conservatoire, tel le recensement, n'interrompant pas la prescription, je vous proposerai d'inscrire dans la loi un cas supplémentaire d'interruption de prescription, spécifiquement applicable aux chemins ruraux, le temps de permettre aux communes de recenser leurs chemins ruraux et d'en dresser l'inventaire. Ce type d'inventaire a déjà été prescrit par la circulaire du 18 décembre 1969 qui demandait aux préfets « d'inviter les communes à dresser un tableau récapitulatif et une carte des chemins ruraux »... circulaire qui a connu un succès mitigé... La mise en oeuvre de ce recensement après enquête publique, interromprait le délai de prescription. Un nouveau délai commencerait à courir, à compter de la délibération marquant la fin du recensement et au plus tard dans les deux ans.

Enfin, je vous proposerai de faciliter les échanges de chemins ruraux pour en rectifier l'assiette.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Je remercie le rapporteur et l'auteur de la proposition de loi d'avoir pris le temps d'approfondir la réflexion sur ce sujet. Je suis persuadé de l'intérêt du texte car nous sommes face à un véritable problème qui appelle une réforme. Le législateur de 1959 a créé un domaine privé par détermination de la loi afin d'épargner aux communes une obligation d'entretien. Ce régime est source d'ambiguïté. La prescription acquisitive cause de nombreuses difficultés. Les exemples abondent. Je vous rappelle que le département intervient dans le cadre du PDIPR. À ce propos, il nous faut nous féliciter que le Sénat ait convaincu - non sans mal - le Gouvernement de laisser aux départements leurs compétences en matière de voirie.

Pour ma part, j'avais initialement des réserves d'ordre juridique sur l'application des règles de la domanialité publique aux chemins ruraux. L'amendement de repli d'Yves Détraigne offre une bonne solution de compromis qui obligera les communes à définir une stratégie cohérente. Je le voterai.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Comme j'ai eu l'occasion de le dire au rapporteur, je suis opposé à la proposition de loi. Elle apporte une mauvaise réponse à un vrai problème. Le tracé de la voirie communale qui relève du domaine public est défini par arrêté préfectoral. Les chemins qui ne sont pas répertoriés dans cet arrêté appartiennent de facto au domaine privé. Ma question est la suivante : combien de procédures en vue de voir reconnaître l'usucapion de chemins ruraux sont-elles engagées chaque année devant les tribunaux de grande instance ? À mon sens - la chancellerie le sait - ces procédures sont très rares, ce qui ôte son intérêt au texte. Au surplus, il nous est indiqué que les dispositions de l'article 2262 du code civil empêchent la commune de récupérer un chemin momentanément délaissé. Cela est inexact. Une commune peut toujours reprendre possession d'un chemin délaissé, sauf lorsqu'une procédure a été engagée devant le tribunal de grande instance. Nos communes n'ont pas les moyens d'entretenir les chemins ruraux. Lorsqu'un chemin dessert une seule parcelle ou habitation, la commune a intérêt à le vendre à cet utilisateur. S'il dessert plusieurs parcelles ou habitations, l'usucapion est impossible. Il faut donc revenir aux réalités ! Il y a d'autres moyens de faire plaisir aux associations de randonneurs que de créer un domaine intermédiaire, ni public ni privé, dont le régime ne manquera pas d'entraîner des difficultés nouvelles. L'amendement de repli est sage : chaque commune doit pouvoir délibérer.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Je m'associe aux propos laudatifs de René Vandierendonck et partage une partie des observations de Jacques Mézard. Quand bien même il y aurait peu d'actions possessoires engagées devant les tribunaux, on ne peut nier le phénomène des appropriations de fait qui sont la réalité du monde rural. Nous l'avons tous vu. Pour autant, il est juridiquement erroné, et probablement inconstitutionnel, de vouloir transformer les chemins ruraux en quasi domaine public. Le domaine public obéit à un régime juridique propre - justifié par le service public - qu'il n'y a pas lieu d'appliquer à des biens qui n'en font pas partie. Les situations peuvent grandement différer selon les communes : un village de 200 habitants comptant de nombreux chemins ruraux inutilisés n'est pas comparable à une grande commune urbaine dotée de quelques chemins résiduels. La proposition consistant à proposer aux communes de réaliser un recensement après enquête locale puis de prendre une délibération valant constat opposable de la consistance du domaine privé n'offre pas une protection définitive contre les empiètements, mais présente l'avantage de permettre aux communes de connaître l'étendue de leurs chemins ruraux, de prendre des mesures vis-à-vis de ceux qui ont commencé à s'approprier des terrains et d'étudier l'équilibre entre les charges qu'ils représentent et leur utilité. Cet examen pourrait être utilement réalisé à intervalles réguliers de dix ou vingt ans. Je soutiendrai cette proposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

La préservation des chemins ruraux est très importante. Il est impossible de déduire du faible nombre de procédures judiciaires l'absence de problème. Dans la plupart des cas, la victime de l'occupation d'un chemin rural n'ira pas en justice pour défendre la propriété de la commune. Il est fréquent qu'un agriculteur commence par labourer deux largeurs de charrue sur un chemin rural, puis quatre, puis annexe le chemin. C'est intolérable ! La faculté d'agir ne doit pas être laissée aux communes car elles ne l'utiliseront pas dans de nombreux cas, surtout dans les petites communes où tout le monde se connait : le maire, hostile à une telle annexion, n'osera pas saisir le tribunal.

Il faut donc instaurer l'imprescriptibilité et être très ferme sur ce sujet. Il convient de demander à toutes les communes de dresser un inventaire des chemins ruraux afin de mettre de l'ordre. Dans mon canton, des chemins ruraux qui rejoignaient des communes entre elles ont été fermés, de sorte qu'il est impossible de passer d'une commune à l'autre. Il n'y a pas lieu d'adopter l'amendement de repli et de minimiser la problématique. La réalité est que des centaines de paysans empiètent sur des chemins communaux.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

Je rejoins les observations de mes collègues Vandierendonck, Mézard et Richard. Les chemins ruraux ne posent pas de grands problèmes. Le maire qui voit qu'un chemin a été annexé peut intervenir. Ne déresponsabilisons pas les maires ! Si elle était votée, la proposition de loi ne reviendrait pas sur les acquisitions déjà réalisées, elle pourrait s'appliquer aux occupations de moins de trente ans, mais en quelques années, des plantations peuvent avoir été faites, des hangars construits, des drainages opérés, et revenir en arrière posera problème... Il est délicat d'agir après avoir laissé penser à quelqu'un qu'il allait pouvoir acquérir la propriété d'un chemin. Je suis favorable à la position de repli. Elle présente beaucoup d'avantages : elle ne bouleversera pas le droit et évitera les contentieux ; elle ne déresponsabilisera pas les maires, mais les invitera à établir un inventaire, puis à faire des choix intelligents avec le conseil municipal. C'est une solution opportune qui a des vertus pédagogiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

La solution de repli de notre rapporteur suscite une large approbation.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

La solution que nous adoptons va-t-elle résoudre les problèmes ? L'imprescriptibilité empêchera-t-elle l'agriculteur de labourer un chemin communal ? Non. J'ai pu constater assez souvent qu'il existe de grandes différences entre le cadastre et la réalité. Tant qu'il n'y a pas de procédure judiciaire, il n'y a pas de transfert de propriété. Il est donc essentiel de savoir combien de procédures sont engagées. Ce texte est l'illustration de l'adage « le mieux est l'ennemi du bien ». Pour résoudre quelques problèmes ponctuels, on va créer des difficultés et imposer un travail supplémentaire aux collectivités qui ont d'autres choses à faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

La question des chemins ruraux est délicate car leur utilisation évolue au fil du temps. La solution de repli me semble bonne. Elle confie aux conseils municipaux le soin d'établir la liste des chemins ruraux et de décider de leur utilisation et de leur entretien. Il ne faut pas, en effet, surcharger les communes contre leur volonté, mais leur donner les moyens juridiques d'assurer la bonne gestion des chemins ruraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La solution de repli est une solution de sagesse ; elle est meilleure que la proposition initiale. L'agriculture évolue... La taille des exploitations augmente : si un chemin qui dessert une seule exploitation est labouré, où est le problème ? Le maire peut intervenir contre celui qui installe un barbelé. Si nous avions eu communication du nombre de procédures judiciaires, nous verrions qu'il n'existe pas de véritable difficulté. La solution de repli a l'avantage d'offrir une simple faculté. Un maire pourra se séparer de chemins ruraux qui n'ont d'autre intérêt que de susciter des contentieux. Il est déraisonnable de vouloir conserver à toute force tous les chemins ruraux qui existent et dont une grande partie n'est pas entretenue.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pillet

Les chemins ruraux sont un sujet passionnant ! Il existe des fractions de chemins qui n'ont pas été vendues ou intégrées dans le remembrement et qui ne desservent plus qu'une seule ferme, comme l'a souligné M. Mézard. Quel intérêt alors de conserver ce chemin rural ? Sauf à vouloir monter les gens les uns contre les autres ...

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je n'imaginais pas que ce sujet allait enflammer les esprits de notre assemblée... Avec le peu d'éléments d'information dont je dispose, je confirme que les cas d'usucapion sont sans doute peu nombreux, mais les problèmes n'en existent pas moins. Si nous proposons aux collectivités de dresser un inventaire puis de décider de vendre ou de conserver les chemins, nous n'aurons pas perdu notre temps. La circulaire de 1969 allait dans ce sens, la loi aura peut-être plus d'effet. Les collectivités auront été mises en position de mettre de l'ordre. L'interruption de prescription doit être limitée dans le temps, il ne s'agit pas d'aller vers une mesure dilatoire. Une fois le recensement effectué, les communes décideront d'inscrire les chemins qui les intéressent dans le tableau récapitulatif. Je propose une solution pragmatique, car vous m'avez convaincu que la proposition initiale passait un peu vite sur quelques principes importants.

Merci aux collègues qui se sont exprimés. Après les avoir entendus, je propose de nous en tenir à ma solution de repli : cette formule pragmatique, qui a déjà été utilisée, permettra de faire le ménage dans les chemins ruraux sans bousculer les règles de droit. Il faut y mettre de l'ordre, les exemples qu'a cités Henri Tandonnet dans son département, le Lot-et-Garonne, le montrent.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 1er

L'amendement COM-1 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

L'amendement COM-2 incitera les communes à procéder au recensement de leurs chemins ruraux. La décision d'inventaire, prise par délibération du conseil municipal, interrompra la prescription.

L'amendement COM-2 est adopté.

Article 2

L'amendement COM-3 est retiré.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Avec l'amendement COM-4, nous instaurons un moratoire de cinq ans, pour laisser aux communes le temps de se saisir du devenir de leurs chemins ruraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Autant je soutenais l'amendement COM-2, autant je refuse cette proposition un peu sibylline qui revient à bloquer toute procédure d'acquisition. Vous savez bien comment cela se passe : le citoyen ou plutôt l'agriculteur, car c'est lui qui est visiblement dans le collimateur de ce texte, va voir le maire et l'affaire se règle à l'amiable. Pourquoi immobiliser tout le système durant cinq ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

En effet. Premièrement, nous restons dans le droit commun de la propriété. Deuxièmement, un moratoire est nécessaire, en particulier pour les collectivités dont les nouveaux élus découvriront les sujets. Cependant, les communes n'ont pas besoin de cinq ans pour se mettre à jour. Un à deux ans suffiront.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je ne le pense pas, surtout si la question n'est pas d'actualité. Je n'ai pas proposé la durée de cinq ans au hasard, elle correspond à la moitié du délai de prescription acquisitive abrégée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Peut-être pourrions-nous ramener ce moratoire à deux ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Les élus auront ainsi largement le temps d'effectuer le tour des chemins ruraux de leur commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je rectifie donc mon amendement COM-4 en ce sens.

L'amendement COM- 4 rectifié est adopté.

Article 3

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Mon amendement COM-5 facilitera les échanges de parcelles modifiant le tracé d'un chemin rural.

L'amendement COM-5 est adopté.

Intitulé de la proposition de loi

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Mon amendement COM-6, de conséquence, renomme le texte « proposition de loi visant à renforcer la protection des chemins ruraux ».

L'amendement COM-6 est adopté.

L'ensemble de la proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

On voit souvent dans le renvoi en commission la volonté d'enterrer un texte. Nous venons de donner la preuve du contraire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Effectivement, grâce à cette décision, j'ai eu le temps de mener des auditions qui étaient indispensables. Les juristes spécialisés dans les chemins ruraux, qui se comptent sur les doigts de la main, ont tous montré de l'intérêt pour nos travaux.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

La réunion est levée à 11 h 40