La réunion est ouverte à 17 heures 30.
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande du Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à une liaison ferroviaire entre Paris et l'aéroport Paris-Charles de Gaulle s'est réunie au Sénat le mercredi 30 novembre 2016.
Elle a procédé d'abord à la désignation de son bureau, ainsi constitué : M. Hervé Maurey, sénateur, président ; M. Jean-Paul Chanteguet, député, vice-président ; M. Louis Nègre, sénateur, rapporteur pour le Sénat ; M. Philippe Duron, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.
Les autres membres titulaires ou suppléants présents étaient, pour les sénateurs titulaires, MM. Patrick Chaize et Rémy Pointereau, Mmes Nicole Bonnefoy, Nicole Bricq et Evelyne Didier ; pour les députés titulaires, MM. Gilles Savary, Christophe Bouillon, Yves Albarello, Patrick Ollier et Lionel Tardy ; pour les sénateurs suppléants, M. Vincent Capo-Canellas et Mme Nelly Tocqueville ; pour les députés suppléants, MM. Laurent Grandguillaume, Bertrand Pancher et Rémi Pauvros.
Avant de laisser la parole à nos rapporteurs, souhaitez-vous dire un mot, monsieur Chanteguet ?
Monsieur le président, je vous remercie de nous accueillir au Sénat pour deux commissions mixtes paritaires, dont j'espère qu'elles aboutiront.
Je forme évidemment le même voeu. Avant de donner la parole aux deux rapporteurs sur le projet de loi relatif au CDG Express, je tiens à saluer leur travail sur ce texte important. Nous sommes tous attachés au principe de cette infrastructure. Nous discutons de ce sujet depuis plus de dix ans ! Notre pays tout entier en a besoin, non la seule Île-de-France. La difficulté majeure est, comme souvent, le financement du projet ; s'y ajoute la question de l'exception à la règle d'or que nous avons adoptée au sein de la loi portant réforme ferroviaire.
Je voudrais aussi saluer l'implication de nos deux rapporteurs, plus généralement, sur les questions relatives au transport ferroviaire et aux infrastructures de transport. Nous avons ici deux spécialistes du sujet : quelles que soient leurs divergences, ils ont du moins une passion commune !
DISCUSSION GÉNÉRALE
Le Sénat s'est prononcé favorablement sur ce projet d'intérêt général, dont les bénéfices s'apprécieront sur le temps long. Le principe de la création de cette infrastructure ne soulève aucune difficulté.
La commission du développement durable du Sénat a cherché à faciliter la mise en oeuvre juridique de ce montage en sécurisant une éventuelle participation de la Caisse des dépôts et consignations. Elle a également adopté un amendement visant à repousser le délai pour recourir à la procédure spéciale d'extrême urgence et procéder à des expropriations, et ce afin de favoriser la recherche d'accords amiables. Ces deux évolutions sont favorables au projet ; elles figurent dans le texte adopté par le Sénat.
En ce qui concerne la mise en oeuvre opérationnelle du projet, le Sénat a exprimé quelques inquiétudes au regard de son impact sur les usagers du RER B. En dépit de l'enveloppe de 125 millions d'euros destinée à financer les investissements nécessaires à la bonne gestion des situations dégradées, d'inévitables perturbations ne manqueront pas d'intervenir, soit pendant la phase de travaux, soit pendant la phase d'exploitation. Il faudra donc bien veiller à respecter les besoins des voyageurs du quotidien.
Le plan de financement reste flou. Le coût de l'infrastructure est actuellement estimé à 1,4 milliard d'euros, hors taxes, aux conditions économiques de 2014. Les équipements nécessaires, dont le matériel roulant, sont évalués à environ 285 millions d'euros. Nous craignons que la somme augmente au fil du temps. Je regrette également que la répartition des 400 à 500 millions d'euros de fonds propres entre Aéroports de Paris (ADP), SNCF Réseau et, éventuellement, la Caisse des dépôts et consignations (CDC) ne soit pas claire à ce stade.
Surtout, notre commission avait supprimé la dérogation à la règle d'or sur l'endettement de SNCF Réseau. Cette exception, même qualifiée d'exceptionnelle, est inacceptable ! Le Sénat, en séance publique, a fait le choix de rétablir cette dérogation, mais par une rédaction qui la rend inapplicable. Je vous proposerai une nouvelle rédaction, qui vise à sauvegarder la règle d'or tout en permettant la réalisation du projet. Celle-ci est éminemment souhaitable mais nous ne pouvons faire fi de l'engagement du Sénat pour sauver la situation financière de la SNCF. Cet engagement a été inscrit dans la loi du 4 août 2014, il doit être respecté. J'y tiens, c'est une question de principe.
Le projet CDG Express est indispensable pour l'intérêt de la capitale, de la région, mais aussi du pays tout entier. C'est un enjeu d'attractivité pour notre territoire, d'efficacité pour l'aéroport Paris-Charles de Gaulle, dont le trafic va continuer d'augmenter, et de mobilité pour l'Île-de-France. En effet, les infrastructures routières menant à l'aéroport sont presque saturées aujourd'hui - l'autoroute A1 le sera complètement en 2030 - et la liaison ferroviaire par le RER B est mal adaptée, donc peu empruntée par les usagers de l'aéroport. Le CDG Express s'impose, et le Sénat partage à l'évidence cette préoccupation.
Le projet a connu beaucoup de vicissitudes. Le dernier projet de concession globale, qui associait infrastructure et exploitation, n'a hélas pas pu aboutir. Il a fallu reprendre le dossier, de façon très pragmatique. Aucun candidat à la construction de l'infrastructure ne s'était présenté. Il a donc fallu trouver une solution innovante, sous la forme d'une société de projet associant ADP, évidemment très intéressé par cette infrastructure, et SNCF Réseau, qui possède les deux tiers de l'emprise de la future liaison et possède l'expertise nécessaire. Ce projet de loi vise aussi à associer la CDC, qui possède une grande expérience des montages financiers complexes et des problématiques juridiques liées à ce type d'infrastructure, comme en témoigne la rocade L2 de Marseille.
Le Sénat a amélioré le texte adopté par l'Assemblée nationale. Louis Nègre a rappelé les deux articles dont il a été l'excellent rédacteur, sur la CDC et sur le délai d'expropriation afin de favoriser les négociations amiables avec les propriétaires sur les huit kilomètres de ligne projetée entre Mitry-Mory et l'aéroport.
De nombreuses discussions ont eu lieu dans nos deux assemblées sur les questions financières et la règle d'or. Quant au financement, le tour de table n'est pas complètement bouclé. Il faudra attendre l'entrée de la CDC pour savoir comment la répartition de l'apport en capital se fera.
Pour pouvoir emprunter le milliard d'euros nécessaire à l'équilibre du projet, il fallait donner aux banques des gages de confiance : tel était le sens de la taxe sur les billets d'avion initialement prévue. Sur ce point, le Gouvernement a entendu les remarques des parlementaires, nombreux à s'inquiéter de l'avenir d'Air France et donc de l'impact de cette taxe, qui n'apporterait aucun avantage durant la construction de la ligne. Le Gouvernement a accepté de reporter à 2024 l'application de cette taxe ; il proposera, dans le projet de loi de finances rectificative, un moyen de financement intermédiaire pour compenser ce report.
Reste la question de la règle d'or. En politique, il faut souvent choisir entre deux inconvénients. L'orthodoxie, le respect rigoureux de la règle d'or, risquent d'empêcher purement et simplement la réalisation du projet. Or, nous en convenons tous, il est impératif qu'il aboutisse, dans un délai extrêmement contraint. Notre candidature à l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ainsi qu'à l'Exposition universelle implique l'achèvement des travaux avant la fin de 2023. Par conséquent, la société de projet doit être montée d'ici à la fin de cette année et les procédures foncières engagées dès le début de 2017.
Il faut trouver un compromis. Le Sénat, dans sa grande sagesse, a adopté l'amendement déposé par M. Vincent Capo-Canellas. Je vous propose de nous fonder sur cette rédaction, mais de la modifier légèrement pour mieux garantir la sécurité juridique et nous référer de manière plus précise à l'ordonnance du 18 février 2016.
Pourquoi ce besoin de sécurité juridique ? Le montage ici utilisé est tout à fait particulier, il faut le rendre « euro-compatible ». L'Union européenne a déjà fait une exception en acceptant que la création de cette infrastructure ne fasse pas l'objet d'une mise en concurrence. Or elle devra bientôt se prononcer sur le montage financier retenu. Si l'on fait disparaître tout risque pour le concessionnaire, le contrat devient léonin et peut être requalifié d'aide d'Etat.
Nous devons déterminer comment doter Paris d'une infrastructure qui lui manque cruellement. La plupart des grandes plateformes aéroportuaires mondiales ont une liaison ferroviaire directe avec la métropole qu'elles desservent.
Je veux en outre me démarquer des craintes qui ont été exprimées quant au modèle économique retenu. On me dit que le ticket serait trop cher, mais que recherchent les usagers ? D'abord un temps de parcours réduit, c'est ce qui a fait le succès des lignes à grande vitesse, ensuite le confort de parcours. Si les passagers aériens n'utilisent pas le RER B, c'est parce qu'il est saturé, même en dehors des heures de pointe, qu'il est parfaitement inadapté au transport des bagages et que des incidents de sécurité se sont parfois produits. Ils préfèrent payer la moitié d'une course de taxi pour être sûrs d'arriver à temps, et dans des conditions agréables.
À mon grand regret, on a peu parlé du taux de rendement interne (TRI) projeté pour cette infrastructure. Si la Caisse des dépôts et consignations s'intéresse à ce dossier, c'est bien parce que le TRI n'est pas médiocre : il doit approcher 9 %, niveau tout à fait exceptionnel pour de telles infrastructures. Le volume du trafic aérien ne cesse de croître et, si l'on en croit tous les experts, cela continuera.
Permettez-moi d'intervenir, non seulement en tant que député, mais aussi en tant que président de la métropole du Grand Paris. En effet, ce projet de loi est certes d'intérêt national, mais il est regardé avec un oeil tout particulier par cette métropole, qui regroupe les 131 communes de l'aire desservie et leurs 7 millions d'habitants. Pour nous, ce projet est essentiel. Le trafic augmente : 65 millions de passagers en 2015. Or 1 million de passagers supplémentaires produisent 400 millions d'euros de valeur ajoutée et 4 500 emplois. La métropole a besoin d'assurer ce développement par des transports rapides.
La métropole du Grand Paris est également partie prenante à la candidature pour les Jeux olympiques. Il est essentiel que le CDG Express soit mis en service en 2023. En effet, des millions de passagers viendront à cette occasion du monde entier ; ce serait une catastrophe nationale si le CDG Express ne fonctionnait pas. Actuellement, on planifie les Jeux olympiques comme si cette infrastructure était déjà créée. Lors des discussions internationales, la première vice-présidente du Grand Paris, Mme Anne Hidalgo, présente le CDG Express comme un acquis. Les mêmes remarques peuvent être faites au sujet de l'Exposition universelle, pour laquelle nous avons également compétence.
Quant au conflit qui existerait entre moyens de transport, on entend des arguments qui sont faux. Après la mise en service du CDG Express, le RER B sera enfin rendu à une logique de transport quotidien, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
J'en viens aux problèmes de financement. Sur ce point, je félicite Louis Nègre pour son excellent travail. Il a pu trouver des améliorations qu'il faut retenir. Il faut pourtant aller un peu plus loin ; je rejoins là-dessus Philippe Duron.
Je n'avais pas approuvé la taxe sur les billets d'avion. On nous a promis une solution...
Il y aura une solution !
mais c'est un peu lire dans le marc de café ! J'aurais apprécié que le Gouvernement nous présente sa solution avant l'adoption de ce texte.
Sur la règle d'or, il faut être raisonnable. Je pense, comme M. Philippe Duron, que la rédaction issue de l'amendement de M. Vincent Capo-Canellas peut être la source d'un bon compromis.
Quant à la compatibilité avec les règles européennes, les propositions du rapporteur Philippe Duron sécurisent le montage. Je me rallie donc volontiers à cette formule. Je vous demanderai, monsieur Nègre, de prendre en compte ma demande. Cette liaison est d'intérêt national, quand bien même, vue depuis Nice, elle peut paraître moins essentielle qu'elle ne l'est à nos yeux.
Mon groupe ne nie pas l'intérêt d'améliorer cette desserte. Pour autant, nous considérons que, compte tenu des contraintes budgétaires, bien d'autres projets sont prioritaires, en particulier les liaisons assurées par le RER. Quant au TRI de 9 %, il est au-delà de la normale : il n'y a pas de risque dans cette opération.
Une sorte de malédiction pèse sur la dette ferroviaire : plus elle est importante, plus on la creuse. Le trou est si profond, un peu plus ou un peu moins...
L'orthodoxie budgétaire en matière d'infrastructures de transports a été réaffirmée dans l'excellente réforme ferroviaire conduite par Gilles Savary. La règle est la suivante : toute infrastructure doit être financée uniquement par les usagers et par les contribuables. Certes, il y a ici urgence ; c'est pourquoi le groupe UDI s'est abstenu sur ce texte à l'Assemblée nationale.
Une seconde malédiction pèse sur les calculs d'équilibre. On prévoit toujours le trafic qui équilibre les plans de financement. Et pourtant, cela se passe rarement comme prévu : voyez la ligne Perpignan-Figueras ! Nous ne sommes pas du tout rassurés par les calculs présentés.
La règle d'or, à peine votée, est déjà bafouée. Il semblerait que les sénateurs soient désormais plus jeunes que les députés : ils excellent en concours de gymnastique !
C'est bien de la gymnastique, en effet, que de justifier l'exception faite en expliquant qu'elle n'a pas vocation à durer. Tout cela ne nous rassure pas ; c'est pourquoi je m'abstiendrai sur ce texte.
Ma circonscription contient une partie de la plateforme aéroportuaire de Paris-Charles de Gaulle, dans le nord-ouest de la Seine-et-Marne. Je dois être le seul député à défendre publiquement ce projet, et je voudrais couper court aux ragots selon lesquels ce train, que j'ai qualifié en son temps de train fantôme, serait le train des riches. Tel n'est pas le cas ! C'est un projet important pour la France. La France est la première destination touristique du monde, mais employons-nous les moyens nécessaires pour qu'elle conserve sa place ? Les Américains nous ont dépassés l'an dernier pour les sports d'hiver. Une première place est toujours fragile.
Paris-Charles de Gaulle est devenu la première plateforme aéroportuaire d'Europe du fait du Brexit. Y transitent 65 millions de passagers ; ils seront 100 millions en 2030. Vous qui voyagez connaissez les liaisons directes entre les grands aéroports étrangers et les centres-villes : à Stockholm, capitale d'un pays bien moins peuplé que la France, l'Arlanda Express vous transporte avec tout le confort nécessaire. En revanche, pour rallier la ville lumière depuis Roissy, vous avez le choix entre l'A1, avec un temps de trajet d'une heure et demie et le risque d'être dévalisé par des motards, et le RER B, qui peut mettre deux heures et demie à rejoindre la capitale, avec un arrêt à Sevran-Beaudottes, coeur de l'Île-de-France !
La plateforme aéroportuaire est le premier employeur d'Île-de-France. Voulons-nous ou non accueillir les Jeux olympiques et l'Exposition universelle ? Continuons ainsi, et nous passerons pour des ringards !
Quant à la « taxe Chirac » sur les billets d'avion, ne faudrait-il pas la réformer et l'affecter à l'investissement, plutôt que de l'envoyer là où l'on ne sait pas quelle utilisation en est faite ? Il faut faire bouger les choses. On s'est battu autour de la nouvelle taxe sur Air France : certains voulaient ajouter une taxe de 1 euro pour financer cette infrastructure ; nous nous y sommes opposés, et cette taxe a été repoussée à 2024.
Pour ma part, je serai favorable au projet, mais quels moyens de financement complémentaires seront mis en place ? Une nouvelle taxe sur Air France ? Nous n'en voulons pas. Il manque aujourd'hui l'essentiel à ce projet : son financement, qui n'est toujours pas clair. La société ADP dégage 600 millions d'euros de profit par an : ne pourrait-elle pas mettre au pot ?
Pour autant, l'amendement adopté par le Sénat à l'initiative de M. Vincent Capo-Canellas est le bienvenu ; la rédaction qui en résulte, complétée par notre rapporteur, mérite d'être retenue, pour que ce projet aboutisse.
L'intérêt d'une telle infrastructure n'est pas contestable ; sa réalisation est simplement très tardive ! Notre pays a trop longtemps mené des politiques de transport corporatistes, c'est-à-dire peu intermodales. Ces politiques pénalisent aujourd'hui terriblement la SNCF, qui n'a pas voulu aller dans les ports et les aéroports. Voyez ce qui se passe au port du Havre : seulement 5 % du trafic terrestre entrant et sortant empruntent le chemin de fer.
On est contraint à présent d'opérer un rattrapage, alors que le foncier est cher ; les projets sont donc extrêmement coûteux. Ils ne sont pas pour autant contestables, d'autant que des efforts d'investissement considérables seront faits en parallèle sur le RER B, auquel s'ajoutera la desserte par les lignes du Grand Paris Express. Le transport du quotidien sera substantiellement amélioré dans cette zone de l'agglomération, ce qui répond à une objection majeure.
Nous ne pouvons plus attendre si nous voulons que ce projet soit réalisé à temps pour les grands événements internationaux à l'organisation desquels nous sommes candidats.
Le plan de financement reste flou et ambigu, comme pour toutes les grandes infrastructures. Je suis l'auteur de la règle d'or, dont le but était d'éviter à la SNCF le sort d'Areva : un surinvestissement, résultant de décisions consensuelles... qui mènent droit dans le mur. Aujourd'hui, la SNCF est tout près du mur, son endettement s'alourdit de 3 milliards d'euros chaque année ! La règle d'or ne vise pas à arrêter l'investissement ; mais les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités. C'est pourquoi, lors de la construction d'une nouvelle infrastructure, nous voulons faire en sorte de ne pas pénaliser SNCF Réseau au-delà du taux de retour raisonnable. S'il y a une priorité politique, c'est à l'État d'assumer ses responsabilités, donc au contribuable de payer.
Je pointe ici la faiblesse de ce dossier : on n'a pas prévu de variable d'ajustement par des fonds publics. C'est impossible, du fait de l'adoption, dans la loi de 2010, d'un amendement - ironie du sort - de M. Yves Albarello. Il ne serait pourtant pas aberrant de proclamer un tel projet priorité nationale, et de faire assumer par la collectivité nationale, voire, pour partie, par les collectivités locales d'Île-de-France, les dépenses qui risquent de pénaliser SNCF Réseau.
Il ne faut pas insulter l'avenir : tout ceci est réversible. Ce qu'une loi a fait, une loi peut le défaire. En outre, il ne faut ni aller au-delà de la règle d'or ni pénaliser Air France. Si le financement s'avère insuffisant, ce devrait être à l'État d'assumer la différence.
Il est quelque peu fâcheux qu'on fasse une entorse à la règle d'or au premier dossier venu. J'espère que ce contournement ne fera pas exemple. Ce qui est en jeu est, non pas ma susceptibilité de parlementaire, mais bien l'avenir du système ferroviaire dans son ensemble. On sait comment peuvent se terminer les sociétés de projet censées découpler les risques de SNCF Réseau : dans le cas de la ligne Perpignan-Figueras, dont la construction avait été à l'origine concédée, le poste de pertes a été ramené dans le giron de la SNCF. Cette méthode ne doit pas devenir une habitude.
En somme, il faut suivre l'esprit de la règle d'or. S'il le faut, réajustons les financements de projets par l'emploi marginal de fonds publics. En tout cas, ne compromettons pas ce projet-ci. Je suivrai notre rapporteur.
On débat du financement. On peut déplorer l'absence, aujourd'hui, d'une copie propre, mais peut-être le projet de loi de finances rectificative sera-t-il l'occasion d'avoir une vue plus complète ? Nous avons imposé beaucoup de contraintes, parmi lesquelles l'interdiction du financement public de ce projet. Travailler dans ce cadre n'est pas simple. La déclaration d'utilité publique comporte elle aussi certaines mentions contraignantes. Il faut dès à présent donner un coup de pouce à ce projet, car l'heure est grave : soit ça marche, soit le dossier est - pardonnez le terme - planté !
Comment rassurer les banques ? Il s'agit d'éviter que les banques se tiennent à l'écart. L'amendement adopté à mon initiative visait à trouver une voie médiane. Je remercie Philippe Duron pour l'avoir apprécié, et je comprends tout à fait la nécessité d'en améliorer la rédaction : sa proposition sur ce point ne me pose aucun problème.
Je tiens également à rassurer Yves Albarello, qui a été l'un des rares députés à soutenir cette position. Le consensus n'a pas été simple à bâtir, même au niveau local. Je suis moi aussi usager du RER B ; à mon sens, il ne faut pas opposer les modes de transport : il est nécessaire d'améliorer le RER B mais aussi de créer le CDG Express, pour toutes les raisons rappelées par Patrick Ollier. Il est souhaitable de trouver la bonne formulation, sans se déjuger par rapport à la règle d'or, mais en donnant à ce dossier l'impulsion nécessaire.
Nous sommes contraints par l'urgence. Ce n'est pas notre faute : nous arrivons à la fin du quinquennat. Certains jugent trop élevé le tarif du passage ; j'estime tout comme Philippe Duron qu'il correspond aux standards internationaux. Nous offrirons un véritable service aux usagers de l'aéroport. Quant à la réforme de la taxe Chirac, j'ai effectivement découvert à l'occasion de ce texte que Bercy nous avait pris au moins dix millions d'euros...
Je n'ai pas bien compris par qui la décision avait été prise.
Sur 190 pays, seuls 30 ont signé l'accord relatif à la taxe de solidarité sur les billets d'avion, et seuls 9 la payent, parmi lesquels le Niger et le Cameroun ! Nous sommes donc allés très loin. En tout état de cause, le produit de cet écrêtement aurait pu servir à l'équilibre du plan de financement, aujourd'hui bien flou.
Nous entendons protéger la SNCF, qui en a vraiment besoin. Je crois aux grands principes : si nous avons voté celui de la règle d'or, ce n'est pas pour créer des exceptions exceptionnelles ! L'image du Parlement auprès de nos concitoyens en serait ternie.
Je suis complètement d'accord avec Patrick Ollier quant à l'aspect stratégique de cette infrastructure pour Paris et l'Île-de-France. Lors de la précédente candidature française à l'organisation des Jeux olympiques, il avait déjà été indiqué que le CDG Express se ferait même si le projet français n'était pas retenu. Or il n'en a rien été.
Gilles Savary a évoqué la variable d'ajustement. Selon lui, pour protéger SNCF Réseau, il faudrait du financement public. Ce n'est pourtant pas possible puisque, en 2010, sur proposition d'Yves Albarello, nous nous sommes interdits de le faire.
Certes, une nouvelle mesure législative est toujours possible, mais nous ne disposons pas du temps nécessaire pour ce faire.
Quant à la solution alternative à la taxe aérienne jusqu'en 2024, une réunion interministérielle s'est tenue à ce sujet. Le Premier ministre a entendu les remarques des parlementaires. Il ne m'appartient pas de dire ce qui sera proposé par le Gouvernement dans le projet de loi de finances rectificative. J'ai cru néanmoins comprendre que ce sera une solution robuste, qui ira dans le sens de vos suggestions aux uns et aux autres.
Cet investissement peut sembler lourd, mais il n'est rien à côté de ce qu'ont coûté les grands projets de LGV pour lesquels on a endetté allègrement RFF, maintenant SNCF Réseau, sans tenir compte de l'article 4 de ses statuts.
Il faudra effectivement nous montrer très vigilants sur le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest et sur la ligne nouvelle Paris-Normandie, quand bien même nous, Normands, souhaitons vivement la réalisation de cette dernière infrastructure.
Je doute qu'on la voie très vite !
Une large majorité d'entre nous reconnaît l'intérêt du CDG Express. La difficulté est le financement. De fait, je regrette moi aussi que l'État ne s'y implique pas. Je suis tout à fait d'accord avec Louis Nègre quant à la nécessité de respecter la règle d'or. Nous sommes attachés à cette règle, moins par souci d'orthodoxie qu'en considération de la situation financière de la SNCF. Et avant même la parution des décrets d'application, on y dérogerait ?
La commission procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er bis
Le mot crucial, dans ma proposition de rédaction n°1, est « rémunérée ». Cela indique qu'il y aura pour SNCF Réseau un retour financier, qui se fera dans les conditions précisées dans l'ordonnance. Cette rédaction est moins précise que celle de l'amendement adopté par le Sénat sur l'initiative de M. Vincent Capo-Canellas, et ce afin de ne pas irriter la Commission européenne et de ne pas inquiéter les participants potentiels à la levée d'emprunt. Ainsi, pour le dire en très mauvais français, nous serons « banquables ».
Si j'ai déposé une proposition de rédaction n° 2, c'est que celle de M. Philippe Duron ne me paraît pas résoudre le problème posé par la dérogation à la règle d'or. Il ne s'agit pas de savoir si la participation de SNCF Réseau sera rentable. Nous voulons un cadre juridique qui autorise cette dérogation tout en posant un garde-fou pour empêcher une prise de risque excessive, d'autant que l'on ne sait pas précisément ce que sera le plan de financement.
Nous proposons donc un principe simple : le montant de la participation en fonds propres de SNCF Réseau doit être calibré pour que, compte tenu du montage financier actuel, élaboré en toute bonne foi, les conséquences à terme ne soient pas négatives pour SNCF Réseau. Autrement dit, si le risque est excessif dans le montage financier, il faudra solliciter davantage l'apport en fonds propres d'ADP que celui de SNCF Réseau, dont les moyens sont moindres. Au vu de la situation respective des deux groupes, cela me paraît une mesure de bon sens et un garde-fou indispensable pour respecter l'esprit de la règle d'or.
Je soutiens ce projet depuis de nombreuses années au nom de l'attractivité de la France et du territoire francilien. Ma position à l'égard de ce texte est motivée par un principe d'efficacité. La difficulté soulevée par votre proposition de rédaction, monsieur Louis Nègre, est l'absence de risque dans un contrat de concession. Ce n'est pas ce à quoi la Commission européenne a donné son aval ! Par conséquent, l'adoption de votre proposition pourrait mener à l'échec de cette commission mixte paritaire, ce qui serait dommage. Ne prenons pas le risque de repartir à zéro.
En commission mixte paritaire, on essaie de rapprocher les points de vue et de trouver un compromis entre les deux assemblées. La proposition de rédaction de M. Philippe Duron nous mène à ce compromis. M. Vincent Capo-Canellas a voulu donner une chance à la CMP et ce serait notre honneur de parlementaires que de parvenir à un texte commun ce soir.
Ce serait aussi un bon signal. Grâce à des fonds apportés par les collectivités territoriales, on est parvenu à boucler le plan de financement du canal Seine-Nord, autre projet historique. On doit pouvoir faire de même ici ! Je suis donc partisane d'adopter la proposition de rédaction n°1.
Le risque sera porté par la société de projet ; je n'ai jamais dit le contraire. Mais dans la répartition interne, il doit être davantage supporté par ADP, qui en a les moyens.
Une fois n'est pas coutume, je ne suis pas d'accord avec Louis Nègre. Je partage en effet la lecture qu'a faite Nicole Bricq du modèle de la concession. Le garde-fou que M. Louis Nègre propose est bien minime. En effet, la hauteur d'engagement en fonds propres de SNCF Réseau est de l'ordre de 200 millions d'euros. Le garde-fou ferait varier cette participation d'une centaine de millions d'euros, ce qui, par rapport à l'endettement de SNCF Réseau, est extrêmement marginal. En revanche, le risque qu'on ferait ainsi prendre au projet est considérable.
La proposition de rédaction n° 1 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 1er bis dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 1er ter
La commission mixte paritaire adopte l'article 1er ter dans la rédaction du Sénat.
Article 1er quater
La commission mixte paritaire adopte l'article 1er quater dans la rédaction du Sénat.
La commission mixte paritaire adopte le texte issu de ses délibérations.
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes s'est réunie au Sénat le mercredi 30 novembre 2016.
Elle procède à la désignation de son bureau, ainsi constitué : M. Hervé Maurey, sénateur, président ; M. Jean-Paul Chanteguet, député, vice-président ; M. Jean-François Rapin, sénateur, rapporteur pour le Sénat ; M. Laurent Grandguillaume, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale.
Le président procède à l'appel des membres titulaires et suppléants de la commission mixte paritaire. Sont présents : sénateurs titulaires, MM. Hervé Maurey, Jean-François Rapin, Patrick Chaize, Rémy Pointereau, Claude Bérit-Débat, Jean-Yves Roux et Mme Evelyne Didier ; députés titulaires : MM. Jean-Paul Chanteguet, Laurent Grandguillaume, Gilles Savary, Christophe Bouillon, Patrick Ollier et Lionel Tardy ; sénateurs suppléants : M. Vincent Capo-Canellas et Mme Nelly Tocqueville, député suppléant : M. Bertrand Pancher.
Le président Jean-Paul Chanteguet se joint à moi pour former le voeu que cette commission mixte paritaire soit, comme la précédente, conclusive. Je voudrais souligner l'important travail qu'ont accompli nos deux rapporteurs, avec une mention toute particulière pour M. Laurent Grandguillaume, qui est non seulement rapporteur, mais également auteur de cette proposition de loi. À ce titre, il a réalisé un travail considérable. Je salue aussi le rapporteur du Sénat, M. Jean-François Rapin, qui était chargé pour la première fois d'un rapport législatif. Il s'est lui aussi impliqué de manière très forte ; il est devenu en peu de temps un très bon connaisseur de ce sujet extrêmement complexe.
Ce texte compliqué nous incite à l'humilité, car nous avons affaire à des professions différentes, avec un potentiel de clients identique, mais des enjeux souvent paradoxaux au sein même des corporations.
Je salue le travail de Laurent Grandguillaume. En effet, pour avoir rencontré en temps restreint toutes les catégories socio-professionnelles concernées, je mesure la complexité de cette tâche. Faire plaisir à l'un, c'est forcément décevoir l'autre.
Le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale est équilibré. Le Sénat a souhaité y apporter sa touche, d'abord d'un point de vue légistique, pour stabiliser certains articles plus fragiles, ensuite pour réaffirmer, notamment au travers de suppressions d'articles, l'importance de la séparation entre ce qui revient au pouvoir législatif et les obligations exécutives du Gouvernement. Nous avons voulu que ce texte soit renforcé pour être opposable devant les juges.
La modification essentielle, à l'article 1er, a consisté à inscrire directement dans la loi les obligations qui seront imposées aux plateformes, afin de clarifier la situation et rassurer les acteurs, plutôt que de renvoyer à un décret en Conseil d'État. S'agissant des sanctions pénales, nous avons accepté un amendement du Gouvernement sur les infractions à la loi, en réaffirmant la hiérarchisation des peines.
Nous avions supprimé en commission l'article 2 relatif à la transmission obligatoire des données des plateformes à l'observatoire, pour envoyer un signe. Après avoir participé aux discussions sur le projet de loi pour une République numérique, nous pensions en effet que l'on allait trop loin dans l'atteinte aux libertés individuelles, à celles des entreprises et au secret de la transmission des données. Cet article a été réintroduit en séance publique dans une version allégée et clarifiée. Le rapporteur pour l'Assemblée nationale et moi-même présenterons des propositions de rédaction, en intégrant la notion d'observatoire, essentielle à nos yeux. Il n'y pas de grand débat. Nous parviendrons certainement à une rédaction satisfaisante de cet article.
Nous en restons à notre position concernant l'article 6 : nous l'avons supprimé dans la mesure où il relève clairement du domaine réglementaire. Une proposition de rédaction de M. Laurent Grandguillaume tendra à le rétablir, afin de confier à la chambre des métiers l'organisation des examens.
Le Sénat a aussi cherché à ajuster le dispositif proposé à la réalité du terrain : nous avons avancé la date de la période transitoire durant laquelle les entreprises exécutant des services régis par la loi d'orientation des transports intérieurs (Loti) devront commencer à effectuer leur reconversion, donc avancé la date de suppression au 1er janvier 2017. Finalement, vos deux rapporteurs ont trouvé un accord pour faire débuter la période transitoire à la promulgation de la loi.
Je reviens à l'article 1er qui a fait l'objet de deux amendements du groupe Les Républicains au Sénat pour exclure le covoiturage du champ d'application. Certes, des détournements peuvent se produire mais la justice peut être saisie.
Nous devrons sans doute revenir dans les années à venir sur ces sujets, en essayant d'anticiper...
L'Assemblée nationale et le Sénat ont eu des échanges courtois et productifs. Nous parviendrons, je l'espère, à un compromis satisfaisant. Du reste, les propositions de rédaction sont pour toutes sauf une d'entre elles communes aux deux rapporteurs.
C'est toujours un plaisir de travailler ensemble, comme nous l'avons fait sur le conflit des auto-entrepreneurs et des artisans, puis sur la loi d'expérimentation territoriale que j'ai portée avec ATD Quart Monde. C'est avec beaucoup d'humilité qu'il faut aborder de tels sujets. Le Sénat apporte toujours de la clarification et un enrichissement des textes. Je tiens à saluer M. Rapin, pour la qualité du travail que nous avons accompli ensemble, pour les nombreux rencontres et échanges de qualité qu'il a eus avec les acteurs concernés, dans un domaine où coexistent plus d'une vingtaine d'organisations de taxis, une bonne dizaine pour les voitures de transport avec chauffeur (VTC), trois pour les chauffeurs Loti et une vingtaine de plateformes, gros opérateurs et petites start up françaises.
L'écosystème est donc complexe. Nous ne prétendons pas mettre tout le monde d'accord, mais créer les outils nécessaires à la régulation. Ceux-ci ont manqué dans la période récente. Il faut également simplifier, car la multiplicité et la complexité des statuts et des régimes ont progressivement donné lieu à des confrontations, après la Loti de 1982, la loi sur les VTC ou la loi Thévenoud plus récemment. Les parlementaires se saisissent des sujets au fil des innovations qui viennent heurter l'état de droit en imposant un état de fait.
Cette proposition de loi vise notamment à responsabiliser les acteurs. Pour ce faire, l'article 1er mettra tous les intervenants, centrales de réservation de taxis, plateformes de VTC ou Loti sur un pied d'égalité. Chacun aura les mêmes obligations et les mêmes devoirs. Cela permettra aussi aux start up françaises de participer au dialogue avec les différentes institutions, alors qu'elles n'y avaient pas accès jusqu'à présent.
J'en viens à la remontée des données, nécessaire pour rendre opérationnels les outils de régulation. À New York, l'autorité de régulation locale, la Taxi and Limousine commission (TLC), va jusqu'à la géolocalisation des véhicules, pour vérifier par exemple qu'ils sont rentrés à leur base. Avec ce qui est prévu dans ce texte, nous sommes plus libéraux que les Américains...
Est également prévue la fin des clauses d'exclusivité. Les chauffeurs pourront désormais travailler avec plusieurs plateformes.
Le Sénat a modifié la sortie du régime de la Loti. Fixer une période de transition d'un an à partir de la promulgation de loi me convient, cela est beaucoup plus clair. Il faudra y ajouter une proposition de rédaction que nous avons cosignée, M. Jean-François Rapin et moi, afin de prendre en compte tous les jeunes conducteurs en permis probatoire, car pour être VTC, il faut justifier de trois ans de conduite.
L'article 6 sur les chambres des métiers fait aussi débat. Quand le Gouvernement m'a confié une mission à ce sujet, les modalités de la formation et des examens des VTC n'avaient pas été arrêtées. Tout était suspendu depuis plusieurs mois. À chaque crise, on remettait en cause les systèmes existants, les acteurs ne bénéficiant d'aucune visibilité en la matière. Il revenait donc à l'État de mettre fin à ce flou et d'organiser enfin les examens, avec le tronc commun validé précédemment. Nous avons tenu compte des critiques émises ici ou là. Il est vrai que les intérêts divergent selon les catégories : un comité national réunira tous les acteurs du transport occasionnel pour suivre la mise en place de ce tronc commun d'examen dans les chambres des métiers et alerter les pouvoirs publics en cas de déséquilibre, sur le modèle de ce qui a été fait pour le titre de maître-restaurateur.
Ce texte vise à rassembler, en dépit des critiques inévitables du fait de la diversité des intérêts en présence. Certaines plateformes viennent d'annoncer qu'elles instauraient des outils de dialogue avec les chauffeurs, notamment sur les prix, car les baisses qu'elles avaient imposées dans le passé menaçaient de paupérisation certains d'entre eux.
Cette proposition de loi est la deuxième en moins de deux ans pour tenter d'apaiser les tensions qui naissent régulièrement entre les VTC et les taxis depuis le bouleversement du secteur lié à l'explosion du nombre d'immatriculations des voitures destinées au transport de personnes.
Il s'agit ici de tenter de calmer les taxis en leur octroyant un peu plus de liberté et de protection, notamment grâce à l'encadrement de l'activité des centrales de réservation ou l'exclusion de ce marché des entreprises capacitaires détenant des véhicules de moins de dix places dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants.
Soyons clairs : cette proposition de loi ne satisfait personne ; elle n'apaisera pas les tensions entre les VTC et les taxis. La loi Thévenoud est un échec et nous devons en tirer les conclusions. Il aurait fallu commencer par un diagnostic global de la profession, au lieu d'instaurer des barrières à l'entrée du métier de VTC sans résoudre la distinction entre professionnels et non professionnels.
Les députés du groupe Les Républicains se sont abstenus sur ce texte en première lecture. Les articles 1er et 2 me préoccupent. Faire peser des obligations sur les intermédiaires est illogique, car ils n'ont qu'un rôle de mise en relation. En réalité, le problème des plateformes est avant tout de nature fiscale. En outre, la transmission des données était beaucoup trop large dans le texte initial. Le Sénat a opéré plusieurs modifications qui vont dans le bon sens et que nous soutiendrons.
Je salue le travail des rapporteurs, qui ont oeuvré en bonne intelligence. Nous étions dans une situation complexe. Dire que ce texte réglera tous les problèmes est sans doute faux ; mais dire qu'il ne réglera rien est excessif.
Je souhaite attirer votre attention sur le cas des personnes ayant acheté très cher leur licence, ayant également pris un crédit pour acheter leur voiture, et qui connaissent donc de grandes difficultés. Il faut repérer ces chauffeurs pour éviter les malheurs.
Il nous faudra sans doute revenir sur ces questions à l'avenir, pour nous adapter aux évolutions. Nous assistons dans ce secteur comme dans d'autres à une disparition progressive du salariat, avec tous les inconvénients que cela suppose, notamment la suppression progressive de toute protection sociale. J'insiste sur ce point, car on connaît la fragilité du statut d'auto-entrepreneur.
Je me réjouis de l'excellent travail effectué par le Sénat qui a rendu ce texte beaucoup plus acceptable pour nous. De surcroît, les deux rapporteurs présentent nombre de propositions de rédaction communes ; c'est assez rare pour être souligné. Je me réjouis de ces rapprochements et des attitudes positives chez les professionnels ; et j'espère que la commission mixte paritaire confirmera ces efforts. Je voterai en faveur de ce texte.
Ayant été rapporteur par défaut de la loi Thévenoud, j'ai au moins mesuré l'extrême complexité de cette affaire. Un secteur conservateur, qui a refusé toute évolution en son sein, est percuté de plein fouet par la nouvelle économie. On y comptait déjà des artisans, des locataires, des salariés, tous dominés par des centrales très puissantes jouissant de quasi-monopoles. Sont arrivées les VTC et le conflit a éclaté, qui met à présent aux prises les taxis, les VTC et les Loti.
Ce texte est bienvenu. Son élaboration a été longue et difficile, il a fallu clarifier la nature des plateformes, qui prétendaient n'effectuer qu'une simple mise en relation, alors qu'il s'agissait, avec UberPop, de vrai faux-covoiturage, plus exactement d'un vrai travail dissimulé de taxi... Il a fallu aussi protéger les chauffeurs en harmonisant les statuts, créer une instance de régulation nationale et confier l'organisation des examens aux chambres des métiers. Il s'agit du meilleur compromis possible. Certains affirment qu'il ne donne satisfaction à personne : en tout cas il ne lèse personne.
Nous sommes favorables à la nouvelle économie, dès lors qu'elle est encadrée par des règles.
J'avais proposé un fonds de garantie en faveur des licences, mais cela fait débat même au sein de la profession. Tout le monde est d'accord sur le principe de ce fonds, mais des divergences apparaissent dès que l'on aborde les moyens de le financer.
Au-delà des licences, nous devrons aussi régler la question de la fiscalité à l'échelon national et européen.
Monsieur Lionel Tardy, l'évaluation a été réalisée par les deux rapporteurs dans un contexte tendu en recueillant l'avis de la profession. L'idéal aurait bien sûr été un projet de loi comportant une évaluation et une étude d'impact.
La commission procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.
Article 1er
Notre proposition de rédaction n° 1 est de nature rédactionnelle.
La proposition de rédaction n° 1 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 2 vise à apporter une précision, afin de bien prendre en compte la mise en relation entre les passagers et les entreprises ou les exploitants.
La proposition de rédaction n° 2 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 3 tend également à apporter une précision en imposant aux plateformes de vérifier l'attestation d'assurance de responsabilité civile professionnelle des entreprises dont les conducteurs relèvent.
La proposition de rédaction n° 3 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 4 tend à modifier l'intitulé du chapitre II, en cohérence avec les autres articles.
La proposition de rédaction n° 4 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 5 est de nature rédactionnelle.
La proposition de rédaction n° 5 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 6 est aussi de nature rédactionnelle.
La proposition de rédaction n° 6 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 7 tend à apporter une précision.
La proposition de rédaction n° 7 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 1er dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 2
Notre proposition de rédaction n° 8 a pour objet d'intégrer l'observatoire, en prenant en compte toutes les critiques qui ont été émises au sujet de la protection des données individuelles et des informations internes aux entreprises, pour lesquelles doivent être garantis l'intelligence économique et le secret sur leurs modèles.
Nous nous orientons vers une transmission plus resserrée, mais le groupe Les Républicains préfère la suppression de cet article, car la transmission des données représente une charge pour les entreprises.
La proposition de rédaction n° 8 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 2 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 3
La commission mixte paritaire adopte l'article 3 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 3 bis
La commission mixte paritaire adopte l'article 3 bis dans la rédaction du Sénat.
Article 4
Notre proposition de rédaction n° 10 vise à étendre aux Loti les obligations de communication des données.
La proposition de rédaction n° 10 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 11 tend à préciser que les entreprises régies par la Loti peuvent poursuivre leur activité, à la fin de la période de transition, en effectuant des services occasionnels pour des groupes de dix places ou plus.
La proposition de rédaction n° 11 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 12 est très importante pour éviter que de jeunes conducteurs en permis probatoire ne se retrouvent bloqués par cette période de transition. Il y a suffisamment de chômage chez les jeunes...
La proposition de rédaction n° 12 est adoptée.
Notre proposition de rédaction n° 13 est de nature rédactionnelle.
La proposition de rédaction n° 13 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 4 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 4 bis
Notre proposition de rédaction n° 14 vise la vente à la place ; c'est le Sénat qui a soulevé, à raison, ce point.
Il me semble que nous parvenons à une bonne rédaction, qui correspond à une belle évolution.
Merci de cette amélioration de ma rédaction !
La proposition de rédaction n° 14 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 4 bis dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 4 ter
La commission mixte paritaire adopte l'article 4 ter dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 4 quater
La commission mixte paritaire adopte l'article 4 quater dans la rédaction du Sénat.
Article 5
La commission mixte paritaire adopte l'article 5 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 6
Ma proposition de rédaction n° 17 vise à prévoir que les chambres des métiers et de l'artisanat sont chargées de l'organisation des examens. Un comité national comprenant toutes les catégories concernées sera chargé du suivi, je m'en suis expliqué. Il pourra notamment alerter les pouvoirs publics en cas de difficulté dans un département particulier.
J'ai expliqué les raisons pour lesquelles nous avons supprimé cet article. Mon groupe s'abstient sur cette proposition de rédaction.
L'article 6 est un vrai point de blocage : faire passer l'examen de VTC par les chambres des métiers et de l'artisanat n'est pas logique, puisqu'elles peuvent déjà prétendre au statut de centre d'examen des VTC par simple agrément de la préfecture. La suppression de cet article doit donc être maintenue.
La proposition de rédaction n° 17 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 6 dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 7 bis
La commission mixte paritaire adopte l'article 7 bis dans la rédaction du Sénat.
Article 8
Notre proposition de rédaction n° 18 tend à maintenir l'obligation de résultat pour les taxis concernant les moyens de paiement. Plus simplement dit, le terminal de paiement électronique doit fonctionner !
Nous avons reçu quelques courriers de l'une des fédérations de taxis, l'UNT, nous précisant que l'obligation de résultat était aberrante, eu égard à l'absence de connexion dans certains territoires. Or la force majeure peut être invoquée dans un tel cas.
La proposition de rédaction n° 18 est adoptée.
La commission mixte paritaire adopte l'article 8 dans la rédaction issue de ses travaux.
La commission mixte paritaire adopte le texte issu de ses délibérations.
Je me félicite de l'aboutissement de ces deux commissions mixtes paritaires et de l'étroite coopération entre le Sénat et l'Assemblée nationale. Je tiens à en remercier les quatre rapporteurs, Louis Nègre, Jean-François Rapin, Philippe Duron et Laurent Grandguillaume.
La réunion est close à 19h10.