La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à vingt et une heures.
La séance est reprise.
J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
L’ordre du jour appelle le débat préalable à la réunion du Conseil européen des 19 et 20 mars 2015, organisé à la demande de la commission des affaires européennes.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d’abord remercier le Sénat et sa commission des affaires européennes de l’organisation de ce débat préalable au Conseil européen des 19 et 20 mars prochains, qui se tiendra sur deux jours en raison du nombre et de l’importance des points inscrits à son ordre du jour.
Vos analyses et vos observations nous seront très utiles dans la perspective des négociations à venir. J’en tiendrai naturellement le plus grand compte en vue du conseil Affaires générales de la semaine prochaine.
Ce Conseil européen portera en premier lieu sur le projet d’Union de l’énergie dont la France a souhaité la mise en œuvre et qui sera une nouvelle étape de la construction européenne.
Le débat se fondera sur les trois communications présentées par la Commission européenne le 25 février dernier.
La première de ces communications a trait au cadre stratégique de l’Union de l’énergie. Elle s’articule autour de cinq piliers : la sécurité énergétique, le marché intérieur, l’efficacité énergétique, la décarbonation de l’économie, la politique de recherche et d’innovation. À nos yeux, ces cinq piliers constituent un ensemble cohérent, et nous veillerons au maintien de cette cohérence dans le lancement des travaux de mise en place de l’Union de l’énergie et dans les conclusions du Conseil européen. Respecter cette cohérence, c’est aussi respecter l’équilibre auquel nous sommes parvenus lors du Conseil européen d’octobre 2014 sur le cadre énergie-climat pour 2030.
Certains, dans la préparation de ce Conseil européen de mars, sont tentés de privilégier un seul élément, par exemple le marché intérieur ou la sécurité d’approvisionnement énergétique. Ce serait, à notre sens, une erreur. Pour construire l’Europe de l’énergie, il faut avancer sur toutes ses dimensions : les infrastructures, les approvisionnements, les économies d’énergie et l’efficacité énergétique, qui sont aussi des éléments de l’indépendance énergétique de l’Europe, ainsi que les énergies renouvelables et les autres sources d’énergie décarbonées, comme le nucléaire, sans oublier, plus généralement, le soutien aux filières industrielles, à la recherche et à l’innovation dans le secteur des technologies à bas carbone.
Nous devrons donc rester vigilants, pendant toute la phase de préparation de ce Conseil européen, sur le respect de cette approche cohérente, intégrée, globale, ainsi que sur certains sujets concernant la régulation, comme celui des tarifs réglementés, parce qu’il y va du service public. En tout état de cause, cette communication de la Commission, qui sera le point de départ de la discussion, nous semble constituer une bonne base de travail.
La deuxième communication de la Commission porte sur les interconnexions. Elle comporte des mesures pour atteindre l’objectif minimal de 10 % d’interconnexion électrique au plus tard en 2020, au moins pour les États membres ne présentant pas encore un niveau minimal d’intégration au sein du marché intérieur de l’énergie, comme les États baltes, le Portugal et l’Espagne, ou pour ceux qui constituent leur principal point d’accès au marché intérieur de l’énergie.
Pour la Commission, la réalisation des interconnexions électriques constitue ainsi la première étape concrète de la construction de l’Union de l’énergie. Lors du sommet de Madrid de la semaine dernière, qui rassemblait le Président de la République, les Premiers ministres espagnol et portugais et le président Juncker, celui-ci a évoqué de nouveau l’importance qu’il attachait à ce sujet et le soutien que la Commission apporterait au financement des infrastructures nécessaires. Ce point est évidemment crucial, compte tenu de l’ampleur des investissements à réaliser, qu’il s’agisse d’interconnexions électriques ou gazières, notamment entre l’Espagne et la France. Une ligne enterrée à haute tension de très haute technologie vient d’être inaugurée par les Premiers ministres français et espagnol, mais la création de trois autres lignes à haute tension est en projet – l’une passera sous la mer, dans le golfe de Gascogne, et les deux autres à travers les Pyrénées –, ainsi qu’un renforcement des interconnexions gazières.
La troisième communication expose la vision de l’accord de la COP 21 de Paris sur le climat qui doit, selon la Commission, être défendue par l’Union européenne.
La Commission européenne insiste sur plusieurs aspects qui nous paraissent essentiels : l’ambition, sur le fond –l’objectif de réduction des émissions – comme sur la forme – la mise en place d’un instrument juridiquement contraignant –, la clarté des engagements, la transparence et la responsabilisation, l’agenda des solutions, l’adaptation au changement climatique et, bien sûr, le financement.
S’agissant de la diplomatie du climat, la Commission mentionne le besoin d’une intense mobilisation de l’Union européenne et de ses vingt-huit États membres en 2015, lors de tous les rendez-vous internationaux – le G20, le G7, les réunions au sein de l’Organisation des Nations unies consacrées aux nouveaux objectifs de développement et celle d’Addis-Abeba – et auprès de tous les acteurs, qu’il s’agisse des autres États parties à la COP 21, des entreprises, des organisations non gouvernementales ou des collectivités locales.
À cet égard, je veux saluer l’accord intervenu lors du conseil des ministres de l’environnement, vendredi dernier à Bruxelles, sur la contribution européenne à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le document a pu être envoyé aux Nations unies avant la date qui avait été convenue à Lima. Cela permet à l’Europe d’être à l’initiative du mouvement international que nous souhaitons promouvoir en matière de lutte contre le changement climatique, d’être exemplaire et en ordre de marche dans la perspective de la COP 21.
Nous attendons maintenant des autres pays, et en particulier des grands émetteurs de gaz à effet de serre que sont les États-Unis ou la Chine, qu’ils s’engagent à leur tour. Chacun doit prendre ses responsabilités. L’Europe continuera à se mobiliser au côté de la France. C’est ce que propose la Commission européenne, c’est ce que nous demanderons au Conseil européen de décider, afin que l’ensemble des États préparent un accord ambitieux, indispensable pour limiter l’élévation de la température à moins de deux degrés d’ici à la fin du siècle.
Le semestre européen, et plus généralement les enjeux en matière de croissance et d’emploi, est le deuxième grand sujet à l’ordre du jour du Conseil européen.
Comme lors de tous les Conseils européens du mois de mars, les chefs d’État ou de Gouvernement auront un échange sur la situation économique en Europe, la situation budgétaire et la mise en œuvre des réformes structurelles au sein des États membres. Ils devraient approuver les trois piliers de l’examen annuel de croissance établi par la Commission : stimuler l’investissement, accélérer les réformes structurelles, procéder à un assainissement budgétaire responsable et favorable à la croissance. Ils devraient également encourager les États membres à tenir compte de ces trois priorités dans les programmes nationaux de réforme, ainsi que dans les programmes de stabilité ou de convergence que chaque État communiquera en avril prochain.
Permettez-moi à cet égard de revenir sur deux décisions prises aujourd’hui même par le conseil Ecofin, réuni à Bruxelles.
Premièrement, en lien avec le semestre européen, une décision a été prise sur la trajectoire budgétaire française. Les États membres ont approuvé la recommandation de la Commission, confortant ainsi le choix qui avait été fait par la représentation nationale de respecter l’obligation de passer sous les 3 % de déficit par rapport au PIB en 2017. La trajectoire que la France s’était fixée à elle-même et la trajectoire établie par l’Union européenne convergent donc sur une même cible, à un rythme et dans des conditions qui permettent de réduire le déficit sans nuire à la reprise et à la croissance.
Toutes les politiques menées dans l’Union européenne, en particulier au sein de l’Union économique et monétaire, doivent en effet se conjuguer pour conforter la croissance et l’emploi. C’est là notre conviction, et c’est la ligne que nous avons défendue tout au long de ces deux dernières années.
La politique monétaire, qui relève de la Banque centrale européenne, apporte incontestablement une contribution très importante à la reprise. Je citerai notamment le lancement, hier, d’un programme de rachat de dettes qui va fortement contribuer à encourager les investissements. Le niveau de l’euro a baissé – cela tient à des décisions prises antérieurement, telles la baisse des taux d’intérêt et les dispositions visant à injecter des liquidités dans l’économie européenne –, comme l’avait souhaité le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale. C’est une bonne chose pour nos exportations. Les liquidités sont importantes et les banques peuvent apporter des financements aux entreprises.
Nous menons en France les réformes avec détermination. C’est le cas dans la plupart des pays de la zone euro. En Allemagne, elles ont été engagées voilà dix ans. Le pacte de responsabilité est entré en vigueur le 1er janvier. Il prévoit notamment la baisse des charges sur les salaires au niveau du SMIC, une montée en puissance du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, qui concerne maintenant 6 % de la masse salariale, jusqu’à deux fois et demie le SMIC. Si l’on y ajoute d’autres mesures d’allégement de la fiscalité pour les entreprises, ce sont de nouvelles marges qui sont données aux entreprises pour pouvoir investir.
Les indicateurs de croissance s’améliorent, l’emploi des jeunes également. D’autres réformes sont engagées et seront débattues devant votre assemblée, au travers par exemple du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Elles seront, elles aussi, favorables à la croissance et à l’emploi.
En ce qui concerne maintenant les investissements, nous venons aussi de franchir une étape aujourd’hui, puisque le conseil Ecofin a décidé d’appuyer le plan Juncker d’investissement de 315 milliards d’euros proposé par la Commission européenne. C’est la seconde décision du conseil Ecofin que je voulais évoquer.
Le conseil Ecofin vient en effet d’adopter à Bruxelles ce que l’on appelle une « orientation générale » sur le règlement relatif au Fonds européen pour les investissements stratégiques, c’est-à-dire d’exprimer la position favorable du Conseil avant que ne s’ouvrent les négociations avec le Parlement européen. C’est une avancée importante, qui devrait permettre, si les travaux au sein du Parlement européen sont menés avec la même célérité – j’ai insisté sur ce point auprès des chefs de délégation que j’ai rencontrés aujourd’hui même à Strasbourg –, de tenir l’échéance d’une adoption en juin de ce règlement, et donc de commencer à soutenir des projets au travers du plan Juncker dès cet été. C’est un enjeu économique majeur, mais il y va aussi de la crédibilité politique de l’Europe. La Banque européenne d’investissement, la BEI, l’a bien compris, qui s’est engagée par anticipation à mettre immédiatement en œuvre sur ses fonds propres des financements nouveaux au profit de certains projets.
La France s’engage elle aussi pleinement. À l’occasion de sa rencontre vendredi à Luxembourg avec le président de la Banque européenne d’investissement, M. Werner Hoyer, le Président de la République a annoncé une participation de 8 milliards d’euros aux projets qui seront sélectionnés dans le cadre du plan Juncker, sous forme de cofinancement via la Caisse des dépôts et consignations et BpiFrance, qui constitueront une plate-forme de soutien à ces projets. Cela nous place au même niveau que l’Allemagne.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Conseil européen abordera également des sujets urgents liés à la situation internationale.
Il évoquera en particulier la situation en Libye, qui a des effets sur la stabilité de l’ensemble du bassin méditerranéen et du Sahel, qu’il s’agisse des flux migratoires ou du risque de voir apparaître un nouveau sanctuaire terroriste, et la préparation du sommet de Riga des 21 et 22 mai prochains sur le partenariat oriental, qui recouvre des enjeux extrêmement importants.
Il se penchera aussi, évidemment, sur la situation dans l’est de l’Ukraine, un peu plus d’un mois après l’entrée en vigueur de l’accord trouvé à Minsk, le 12 février, grâce à l’initiative diplomatique conjointe du Président de la République et de la Chancelière allemande. À l’est de l’Ukraine, bien que les tensions restent fortes, des signes d’amélioration sont apparus depuis plusieurs semaines : le cessez-le-feu tient dans l’ensemble, malgré des tensions persistantes, notamment autour de Marioupol, et le retrait des armes lourdes est engagé. En outre, des échanges de prisonniers ont eu lieu, conformément à ce qui avait été convenu à Minsk.
Cette amélioration reste cependant fragile, et nous devons continuer à faire preuve d’une vigilance extrême pour garantir le respect de l’ensemble des engagements pris à Minsk. C’est la raison pour laquelle nous allons renforcer les moyens de la mission de l’OSCE, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, afin de lui permettre de jouer pleinement son rôle de surveillance, en particulier des frontières, dans l’intégralité de la zone de démarcation.
Tout cela doit nous pousser à renforcer la mobilisation diplomatique européenne pour garantir le plein respect des accords de Minsk. En effet, nous sommes convaincus que seuls le dialogue et la recherche d’une solution politique permettront de mettre durablement un terme à cette crise, de faire respecter la souveraineté de l’Ukraine et de permettre de rétablir des relations normales entre l’Ukraine et la Russie, et partant entre la Russie et l’Union européenne.
La réunion informelle des ministres des affaires étrangères qui s’est déroulée à Riga les 6 et 7 mars derniers a permis de confirmer une nouvelle fois que la France et l’Allemagne bénéficiaient, dans leurs efforts, du plein soutien de l’ensemble des États membres.
Voilà, madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, les grandes questions qui seront à l’ordre du jour de ce Conseil européen, à la fois consacré au traitement des urgences qui s’imposent à l’Europe, à ses frontières comme en son sein – le point sera fait sur la mise en œuvre des décisions prises en matière de lutte contre le terrorisme –, et tourné vers l’avenir avec l’instauration de l’Union de l’énergie, qui constituera une étape décisive dans l’histoire de la construction européenne.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées de l’UDI–UC. – Mme Colette Mélot applaudit également.
J’indique au Sénat que la conférence des présidents a décidé d’attribuer un temps de parole de huit minutes aux porte-parole de chaque groupe politique et de cinq minutes à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
La commission des finances et la commission des affaires européennes interviendront ensuite durant huit minutes chacune.
Le Gouvernement répondra aux commissions et aux orateurs, puis nous aurons une série de questions, avec réponse immédiate du Gouvernement ou de la commission des affaires européennes.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Simon Sutour, pour le groupe socialiste.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis quelques mois, des signaux européens tangibles montrent enfin que l’urgence est non plus à l’austérité, mais à la croissance et à l’investissement : annonce d’un plan d’investissement européen, clarification des principes de flexibilité du pacte de stabilité et de croissance, perspective de la mise en place d’une stratégie numérique et d’une Union de l’énergie qui devraient permettre de développer les investissements.
Malgré ces signaux, la concrétisation de ces projets nécessaires à la croissance en Europe risque de se faire attendre. Il reste en effet à adopter la création du Fonds européen pour les investissements stratégiques, le FEIS, pour lancer le plan d’investissement, dont le champ et la force de frappe restent, pour le moins, perfectibles. En outre, aucun projet concret majeur n’a encore été annoncé en matière de stratégie numérique, et les bénéfices d’une Union de l’énergie fondée sur une transition énergétique se feront, par définition, attendre. Quant aux propositions tendant au renforcement de l’Union économique et monétaire, leur examen a été repoussé à une date ultérieure. Enfin, je tiens à le souligner tout particulièrement, le volet social reste le parent pauvre de ce début de mandature de la Commission européenne.
Certes, l’actualité s’est largement invitée au prochain sommet européen. Terrorisme, Ukraine, Grèce : autant de défis qui ont nécessité des réponses rapides. Nous en appelons à plus d’audace de la part de nos dirigeants européens.
En ce qui concerne la Grèce, tout d’abord, la question est complexe et éminemment politique. La Banque centrale européenne ne s’y est pas trompée : en refusant pour l’instant d’ouvrir le rachat des dettes souveraines des États membres à celles de la Grèce, elle place les États face à leurs responsabilités politiques et les oblige à définir une stratégie de sortie de crise pour la Grèce qui ne soit pas seulement une succession de plans d’aide. La gestion de cette crise depuis 2010 démontre que les solutions ne peuvent pas être que comptables et que l’on ne peut pas se borner à demander l’application d’un plan de consolidation budgétaire sans tenir compte de ses conséquences sociales et économiques.
Enfin, et c’est le président du groupe d’amitié France-Grèce du Sénat qui s’exprime à présent, la Grèce n’est pas un pays européen comme les autres. Son adhésion à l’Union européenne s’est faite après la dictature des colonels, période pendant laquelle la France a joué un rôle majeur pour le retour à la démocratie. Par ailleurs, n’oublions jamais que la Grèce est le berceau de notre civilisation et de la démocratie, comme l’indique l’étymologie de ce mot.
Concernant la communauté de l’énergie, une stratégie-cadre a été rendue publique le 25 février dernier par la Commission européenne. Celle qui avait été adoptée par le Conseil européen de mars 2009 a eu une portée très limitée, par manque d’ambition et d’engagement des États membres et de la Commission européenne d’alors. Le paquet climat-énergie, pourtant adopté en octobre dernier, pourrait connaître le même sort, pour les mêmes raisons. Or nous ne pouvons plus nous permettre ce luxe aujourd’hui.
La mise en place de l’Union de l’énergie – les socialistes appellent depuis longtemps de leurs vœux la création d’une « communauté de l’énergie », proposée par Jacques Delors – a été défendue par le Président de la République lors du Conseil européen informel qui lui a été consacré, puis lors du Conseil européen de juin 2014.
Dans l’attente des propositions législatives, je m’arrêterai aujourd’hui sur les objectifs de cette Union de l’énergie. L’Union européenne se doit d’adopter, d’ici à la conférence sur le climat de Paris de décembre 2015, une feuille de route très ambitieuse, combinant propositions concrètes, financement et échéances. Afin d’en faire un succès, nous devons agir selon plusieurs objectifs : réaliser des économies d’énergie, grâce notamment au déploiement de politiques d’efficacité énergétique systématiques ; mettre fin à la dépendance aux hydrocarbures ; donner une place importante au nucléaire, en apportant bien entendu les garanties de sûreté nécessaires ;…
… développer les énergies renouvelables, afin de « décarboner » les économies européennes.
Je voudrais souligner particulièrement quelques points.
Premièrement, cette nouvelle stratégie énergétique doit prévoir des mesures fortes de protection des consommateurs et accorder une attention particulière aux besoins des plus vulnérables : il s’agit, en un mot, de déclarer la guerre à la pauvreté énergétique. Elle doit également comporter un volet fort en matière d’emploi, notamment dans le cadre du développement des infrastructures et du soutien aux politiques de recherche et d’innovation en matière énergétique.
Deuxièmement, le secteur énergétique en Europe souffre aujourd’hui d’un sous-investissement chronique. Certes, le mécanisme d’interconnexion européen est destiné à développer de grandes infrastructures énergétiques à l’échelle européenne, mais il sera en partie « recyclé » dans le cadre du plan d’investissement européen. Comment ce dernier pourra-t-il financer, d’une part, des projets énergétiques publics et privés, et, d’autre part, la recherche et l’innovation pour conforter et développer nos filières d’excellence dans le secteur énergétique ? Peut-être faudrait-il réfléchir à la mise en place d’un instrument d’investissement spécifique, faute de quoi il sera difficile d’atteindre les objectifs fixés. J’en suis convaincu, le financement sera déterminant.
Troisièmement, l’Union européenne doit pouvoir s’exprimer d’une seule voix à l’égard des pays tiers. Si l’Union doit assumer la responsabilité première de la planification et du développement des projets majeurs en matière d’infrastructures, ainsi que définir et développer les routes et fournisseurs d’énergie alternatifs, notamment pour les États membres les plus dépendants, les États doivent conserver la responsabilité première en matière de sécurité de leur approvisionnement énergétique et de leurs contrats d’approvisionnement passés avec des pays tiers. En tout cas, ce point continue de faire débat, comme on a pu le voir lors du conseil Énergie du 5 mars dernier.
Pour autant, il est clair qu’il faut développer une véritable solidarité, à la fois en coordonnant mieux nos choix et nos stratégies nationaux et en développant un mécanisme destiné à assurer la sécurité énergétique des États membres les plus vulnérables.
Sur le volet de la politique extérieure de l’Union européenne, que le Conseil européen ne manquera pas d’aborder, je voudrais manifester mon accord avec les propos que vous avez tenus sur la Libye, monsieur le secrétaire d’État : les développements de la situation sont de plus en plus inquiétants et la déstabilisation de ce pays emporte des conséquences importantes pour l’Union européenne.
Quant à la situation en Ukraine, elle est loin d’être stabilisée. Le cessez-le-feu, intervenu en application des accords de Minsk du 12 février dernier, constitue évidemment une avancée, aussi remarquable qu’inédite, à porter au crédit du couple franco-allemand. Néanmoins, ce cessez-le-feu reste fragile.
Dans certains secteurs de la ligne de front, les armes lourdes ont été effectivement retirées, le Président de la République et la Chancelière allemande ayant pu obtenir l’aval de Kiev et de Moscou pour un renforcement de la présence de l’OSCE à l’est du pays. Toutefois, la situation peut rapidement basculer et rendre caducs les accords de Minsk. Je pense qu’il est nécessaire de réajuster les sanctions en fonction des efforts déployés par la diplomatie des chancelleries européennes. On peut déplorer que la réunion informelle de Riga n’ait pas adapté ce dispositif afin de mieux accompagner les efforts diplomatiques de Paris et de Berlin. En tout état de cause, je voudrais affirmer avec force que rien ne remplacera un dialogue apaisé et constructif avec ce grand pays qu’est la Russie.
Monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, comme souvent, l’actualité européenne est dense, et les enjeux européens sont toujours aussi importants pour le développement et le bien-être de nos sociétés. Nous savons, monsieur le secrétaire d’État, que vous œuvrez au mieux pour faire en sorte que les intérêts de l’Europe et ceux de la France se rejoignent, et nous comptons sur vous pour poursuivre le combat de la France pour une Europe plus politique et, surtout, plus sociale.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE. – M. Yves Pozzo di Borgo et Mme Colette Mélot applaudissent également.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le prochain Conseil européen portera donc principalement sur les orientations visant à la construction d’une Union de l’énergie, sur les relations entre l’Union européenne et la Russie et sur la situation en Ukraine. Je consacrerai mon intervention à ces sujets, même si d’autres seront abordés, comme le partenariat oriental ou les conclusions du second semestre 2015.
Je voudrais tout d’abord évoquer la situation en Ukraine, parce que des populations souffrent profondément aux portes de l’Union : 6 000 personnes, principalement des civils, ont déjà été tuées en onze mois de guerre civile. Il s’ensuit de difficiles relations avec la Russie, qui ont une incidence directe sur la construction de l’Union de l’énergie.
Voilà soixante-dix ans tout juste, les dirigeants de la Grande-Bretagne, des États-Unis et de l’Union soviétique signaient les accords de Yalta. Ce traité a divisé l’Europe en deux sphères d’influence politiques. La ligne ainsi tracée ne reposait sur aucune définition de l’Est ou de l’Ouest, mais résultait du rapport de force militaire et d’un pur compromis politique. Pourtant, elle a coupé l’Allemagne en deux et redessiné les contours de la plupart des pays du centre de l’Europe, souvent au mépris de la volonté des peuples, en ignorant tout de leur culture et de leur langue. Faut-il aujourd’hui, en recherchant une issue à la crise, négocier en quelque sorte le tracé d’une nouvelle frontière est-ouest en Ukraine ?
Les accords de Minsk 2 ont été conclus le 12 février dernier, après des heures d’âpres négociations. La signature d’un accord de cessez-le-feu, dont le respect se heurte à bien des difficultés, et d’un document de règlement politique et sécuritaire du conflit comportant treize points vise à la conclusion d’un accord de paix global dans le Donbass.
Si cette action diplomatique mérite d’être saluée, je ne peux que m’interroger sur certaines conséquences que cet accord pourrait emporter pour l’avenir de l’Ukraine.
La feuille de route prévoit l’organisation, sous législation ukrainienne, d’élections locales dans les territoires occupés du Donbass et la mise en place d’un régime ou statut spécial à l’intérieur des deux « républiques populaires ». Ainsi, l’Ukraine doit modifier sa constitution avant la fin de 2015, afin de prévoir un statut spécial pour les « républiques » du Donbass, et donc reconnaître de fait les représentants de Lougansk et de Donetsk comme des autorités quasiment légitimes et, implicitement, l’existence des territoires de l’Est. De plus, ces accords intensifient la notion de décentralisation de l’État, ce qui met forcément en question la perception même de l’influence de l’autorité politique nationale.
Ces nouveaux accords de Minsk pourraient donc être diversement appréciés par les Ukrainiens et créer de nouvelles tensions, d’autant que nous ne pouvons totalement écarter la possibilité d’une nouvelle phase d’expansion territoriale de cette crise vers la ville côtière de Marioupol, ce qui aboutirait à la formation d’un corridor terrestre entre les « républiques » du Donbass et la Crimée.
Les accords de Minsk 2 relèvent néanmoins d’une volonté de donner une solution politique au conflit. Je préfère nettement cette voie à l’action des États-Unis, qui, en envoyant 3 000 soldats manœuvrer aux frontières de la Russie, avec chars, véhicules de combat et hélicoptères, ne peuvent que contribuer à faire monter la tension. Et que penser du souhait du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, de voir créer une armée européenne, au motif qu’« une armée commune à tous les Européens ferait comprendre à la Russie que nous sommes sérieux quand il s’agit de défendre les valeurs de l’Union européenne » ? Cette annonce ne va pas non plus dans le sens de la recherche d’un apaisement des relations entre l'Union européenne et la Russie. Déjà, l’OTAN se sent recouvrer une certaine légitimité de guerre froide, dès lors qu’il s’agit de tenir tête à la Russie, voire de la combattre.
Dans une situation aussi grave, on est en droit d’attendre un peu plus de sérieux de la part du président de la Commission européenne. Pour mémoire, l’Union européenne possède déjà des groupements tactiques, gérés par rotation, censés permettre de réagir rapidement par la force. Ces groupements n’ont cependant jamais été utilisés ; alors, une armée commune…
En outre, cette déclaration va à l’encontre de la nécessaire mise en œuvre de coopérations renforcées en matière de sécurité et de défense, qui mériterait pourtant un peu plus de volontarisme. Elle se heurte à des problèmes de structure de commandement, de chaîne de décision, de gestion des ressources humaines et du budget. Enfin, l’armée est une incarnation de la nation, or il n’existe pas de nation européenne.
L’Europe a d’autres moyens de pression que le recours à une armée européenne. Je sais, monsieur le secrétaire d'État, que la Grande-Bretagne et la France sont réticentes à l’idée de donner une dimension militaire à l’Union. Pouvez-vous cependant préciser la position de notre pays à l’égard de cette déclaration de M. Juncker ?
Le conflit en Ukraine fait également ressortir la problématique de la dépendance énergétique de l’Union européenne à l’égard de la Russie, qualifiée par les décideurs politiques de « fournisseur non fiable », utilisant son énergie comme une arme politique. Environ 30 % des livraisons de gaz russe à l'Union européenne transitent en effet par l’Ukraine.
L’abandon par la Russie de son projet de gazoduc South Stream, qui devait livrer soixante-trois milliards de mètres cubes de gaz à l’Union par an et était censé contourner l’Ukraine en passant par la Bulgarie, rend encore plus pressante la nécessité de trouver d’autres fournisseurs, d’autant que la Russie, comme on le sait, a changé de tactique : plutôt que de construire des gazoducs, elle acheminera du gaz jusqu’aux frontières de l'Union européenne, où les clients pourront l’acheter.
Après la présentation de l’Union de l’énergie le 25 février dernier à Bruxelles, on peut s’interroger sur les nouveaux partenariats que compte développer l'Union européenne afin de s’affranchir de cette dépendance énergétique.
Certes, je comprends bien qu’il faille diversifier les fournisseurs d’énergie afin d’éviter la réapparition de pénuries comme celle de 2009. Toutefois, compte tenu de l’instabilité de la situation dans nombre des pays concernés – où agissent des groupes terroristes comme Daech, où des guerres sévissent, comme en Irak et en Libye –, je ne suis pas convaincu que nous rendrons ainsi notre approvisionnement plus sûr. Comme certains observateurs l’ont déjà signalé, il semble prématuré de compter sur l’Iran, dont le programme nucléaire attire encore l’attention du monde, et sur l’Irak, toujours en proie à une guerre civile, pour être des fournisseurs sûrs, fût-ce à long terme. De même, que penser de coopérations avec la Turquie, l’Azerbaïdjan ou le Turkménistan ?
Comme le souligne Iverna MacGowan, directrice adjointe du bureau des institutions européennes d’Amnesty International, « en coopérant avec ces pays, sans condamner publiquement leurs violations des droits de l’homme, l'Union européenne donne pratiquement son feu vert à ces violations ». L’Union européenne assène que les droits de l’homme doivent être la pierre angulaire de toutes ses politiques étrangères, mais, dans son rapport annuel sur les droits de l’homme publié le 26 février dernier, Amnesty International dénonce clairement certains des pays avec lesquels l’Union compte faire affaire.
Nous ne pouvons fermer les yeux sur les pratiques de certains pays au seul motif que leur gaz ou autres ressources énergétiques nous intéressent ! Remplacer notre dépendance énergétique à l’égard de la Russie par une dépendance à l’égard de régimes peu soucieux du respect des droits de l’homme ne garantit nullement une plus grande sécurité énergétique à l’Europe.
Le marché intérieur de l’énergie est un autre sujet essentiel. L’Union de l’énergie avait déjà appelé à un remaniement considérable des interventions des États sur le marché. Le document du Conseil européen indique maintenant clairement que les « politiques nationales non coordonnées » en matière de potentiel de production et d’énergies renouvelables devront être remplacées par une réglementation ambitieuse, en ajoutant que les interventions des États sur la tarification créent une distorsion en termes de coûts. Dans cette perspective, l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie, l’ACER, se verra confier la régulation du marché unique de l’énergie, ce qui élargira considérablement les pouvoirs dont elle dispose aujourd’hui.
Cela veut-il dire que, une fois encore, nous préférons laisser le marché de l’énergie à de grands groupes industriels et financiers plutôt que d’en avoir une vision globale et sociale ? L’accès à l’énergie doit pourtant être garanti à chaque citoyen européen. Il est donc impératif que les États puissent conserver la possibilité d’assurer une maîtrise publique de l’énergie : tout ne doit pas être livré au marché !
Il est par conséquent indispensable de concevoir, au travers de l’Union de l’énergie, un véritable projet ambitieux prévoyant la façon dont les politiques commerciales et de développement européennes doivent contribuer à la réalisation des objectifs climatiques de l'Union européenne, tout en prenant acte du fait que l’énergie ne doit pas être considérée comme une simple marchandise, tant elle est vitale pour le développement humain et peut s’avérer nocive pour l’avenir de notre planète si l’on n’opère pas les bons choix.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Jean-Yves Leconte applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la semaine dernière, le Sénat a adopté le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, après en avoir enrichi l’article 1er d’un alinéa rappelant la nécessité de contribuer à la mise en place d’une Union européenne de l’énergie. Hasard du calendrier, cette préoccupation figure en tête de l’ordre du jour du prochain Conseil européen.
Comme vous le savez, mes chers collègues, les questions énergétiques ont été au fondement du projet européen, avec la création de la Communauté européenne du charbon et de l’acier puis le traité Euratom sur l’énergie. Plus d’un demi-siècle plus tard, on évoque donc plus concrètement la nécessité de bâtir une véritable Union européenne de l’énergie.
En effet, si l’article 194 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne vise la politique énergétique, les déclarations et les initiatives en la matière ne se multiplient que depuis quelques années. Sans être totalement absent des débats européens, le problème de l’énergie a été jusqu’à présent traité sous l’angle de la dérégulation des marchés. Or, aujourd’hui, c’est davantage l’idée d’une convergence qui fait son chemin : c’est là, selon nous, un progrès.
Le 5 février dernier, le Président de la République a déclaré qu’il fallait construire une Europe énergétique. De même, le président du Conseil européen, Donald Tusk, s’est exprimé en ce sens à plusieurs reprises depuis sa prise de fonction.
Le RDSE, attaché à l’approfondissement de l’intégration européenne, se réjouit de cet intérêt renforcé pour la mise en place d’une politique énergétique commune.
Je rappelle que l’Europe consomme un cinquième de l’énergie produite dans le monde, alors qu’elle ne dispose que de peu de réserves propres. Notre dépendance aux importations en provenance des pays de l’OPEP, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, et de la Russie constitue une véritable faiblesse.
L’Union européenne se trouve confrontée au défi de s’organiser pour garantir son approvisionnement, de s'assurer l’accès à une énergie à un tarif compétitif pour favoriser sa croissance et d’améliorer les réseaux énergétiques.
Bien sûr, je n’oublie pas l’enjeu environnemental, mais celui-ci ne peut pas demeurer le seul ressort de notre politique énergétique. De surcroît, l’Union européenne a souscrit des engagements pour 2020 et 2030, que la France a déclinés au travers du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Les objectifs du paquet énergie-climat seront d’ailleurs rediscutés lors de la COP 21. Tout cela est très bien, mais la politique énergétique européenne ne doit pas se borner à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, qu’elles émanent ou non des vaches… §Comme je le disais, l’Europe doit sécuriser son approvisionnement énergétique et, pour cela, mettre en œuvre une stratégie de construction d’un véritable marché européen de l’énergie assorti de réseaux énergétiques modernes interconnectés. La recherche technologique et l’innovation doivent être davantage encouragées.
Naturellement, une telle coordination ne va pas de soi, tous les États membres n’ayant pas les mêmes intérêts. En France, nous avons développé l’énergie d’origine nucléaire, ce qui rend notre pays moins dépendant, par exemple, que la Pologne, qui importe presque tout son pétrole de Russie. Ajoutons à cela que les sensibilités à l’égard de telle ou telle énergie varient d’un pays à l’autre. On le constate depuis longtemps pour l’énergie nucléaire et on le voit aujourd’hui pour l’exploitation du gaz de schiste, plus ou moins bien acceptée.
Si l’on ne peut que souhaiter, bien sûr, le développement des énergies renouvelables, l’Europe dispose du plus grand espace maritime au monde, et donc d’un potentiel d’exploitation sous-marine qu’il ne faudra pas non plus négliger.
La consommation en hausse des Européens – et donc notre dépendance accrue à l’égard de l’extérieur – ne nous laisse pas d’autre choix que de faire valoir nos intérêts communs pour garantir à l’Union européenne un approvisionnement stable. Les États membres qui importent de Russie une large part de leur énergie craignent à juste titre pour leur sécurité énergétique quand la situation géopolitique se dégrade…
Cela m’amène à aborder brièvement un autre point de l’ordre du jour du Conseil européen : nos relations avec la Russie dans le contexte de la crise ukrainienne.
En prenant différentes initiatives depuis février 2014, l’Union européenne a pris la mesure de l’implication de la Russie dans la crise ukrainienne, ce qui est une bonne chose. Je salue à cet égard la démarche franco-allemande ayant abouti aux accords de Minsk 2. Certes, ces accords sont fragiles, mais le cessez-le-feu se met timidement en place. Tout au long de la crise, l’Union européenne a adopté un régime de sanctions à l’encontre de la Russie. Comme l’a indiqué l’Élysée la semaine dernière, une réaction serait nécessaire « en cas de rupture majeure » dans l’application des accords de Minsk.
Je partage cette position, et je me félicite que le Conseil européen informel de Riga n’ait pas proposé de nouvelles sanctions économiques contre la Russie. On peut toutefois s’inquiéter de l’existence de divergences entre les États membres, certains d’entre eux préconisant d’armer l’Ukraine. Il faudrait absolument pouvoir parler d’une seule voix.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors du débat sur le projet de loi relatif à l’accord d’association avec la Moldavie, nous devons tout faire pour contenir les tensions avec la Russie. Dans cette optique, nous devons mener une politique de voisinage raisonnable à l’est de l’Europe, car la Russie ne cèdera pas quant à sa volonté de créer une sorte de « cordon sanitaire » la séparant de l’OTAN sur sa frontière occidentale. Il faut tenir compte de cette volonté, illustrée, hélas ! par les cas de la Transnistrie et de la Crimée.
Voilà, mes chers collègues, ce que je voulais vous dire au nom du RDSE.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et de l’UDI -UC.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre fidélité à ce rendez-vous du débat préalable au Conseil européen, qui est pour notre assemblée l’occasion de faire le point sur les questions qui seront évoquées lors de ce dernier et de mettre les choses en perspective.
Le prochain Conseil européen portera sur les trois questions suivantes : la construction d’une Union de l’énergie, les relations entre l’Union européenne et la Russie au regard de la situation en Ukraine et le semestre budgétaire européen. Sur ces sujets, je formulerai quelques observations au nom du groupe UDI-UC, avec la liberté de ton qui est de règle dans notre assemblée.
La Commission européenne et la Banque centrale européenne font preuve depuis plusieurs mois d’un véritable activisme, qui mérite d’être salué, en faveur de la reprise économique. Pour sa part, la France se retrouve, comme en 2013 et en 2014, placée face à ses contradictions, dans la mesure où elle a les plus grandes difficultés à mettre en place des réformes structurelles pourtant incontournables.
Monsieur le secrétaire d’État, dans quelles conditions la France abordera-t-elle la prochaine réunion du Conseil européen ? S’agit-il de gagner du temps, en « surfant » sur une conjoncture plus favorable, ou de prendre sa part des efforts visant à la reprise économique, à l’instar de la Commission et de la BCE ?
J’évoquerai maintenant les recommandations faites par la Commission européenne à notre pays.
La France fait face à un triple déficit, budgétaire, commercial et au regard du marché du travail. Je fais ici allusion non seulement à notre taux de chômage, tout à fait considérable à l’échelle européenne, mais aussi au nombre d’heures de travail : de nombreuses études font apparaître que la durée du travail est moindre en France qu’en Grande-Bretagne ou en Allemagne, pour ne citer que nos principaux partenaires.
Plusieurs délais successifs ont été accordés à notre pays pour respecter les objectifs européens. Il nous est aujourd’hui demandé de ramener notre déficit public à 2, 8 % du PIB en 2017. Des efforts nous sont également demandés afin de réduire de 0, 8 % en 2016 et de 0, 9 % en 2017 notre déficit structurel. Il serait d’ailleurs opportun, à mon sens, de faire preuve de pédagogie à l’égard de nos concitoyens sur la notion de déficit structurel.
Nous sommes actuellement très loin de ces objectifs, ce qui amène ma deuxième question : monsieur le secrétaire d’État, comment le Gouvernement envisage-t-il d’opérer la correction pluriannuelle qui lui est demandée ? Alors qu’il prévoyait initialement 50 milliards d’euros d’économies, la Commission européenne préconise un effort supplémentaire de 30 milliards d’euros. La situation est d’autant plus inquiétante que, sur les 50 milliards d’euros d’économies annoncées en avril 2014 au travers du pacte dit « de responsabilité », près de 30 milliards d’euros ont vocation à permettre de financer une diminution des charges sociales pour améliorer la compétitivité de notre pays. Je peine donc à concevoir comment on peut intégrer cette somme à notre effort d’économies. Comment le Gouvernement compte-t-il procéder pour respecter les objectifs fixés à l’échelon européen ?
Pour ne pas être discourtois, je ne reviendrai pas sur ce que j’appellerai la « première génération » de réformes structurelles. Je n’évoquerai donc pas la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques d’octobre 2012, ni l’accord national interprofessionnel de janvier 2013, dont on nous avait pourtant dit grand bien. Quant aux effets du CICE, les avis sont assez divergents.
Je m’attacherai davantage à la seconde génération, donc à la manière dont notre pays dégagera les 50 milliards d’euros d’économies budgétaires annoncés et mènera des réformes de structures. Nous examinerons à partir du 9 avril prochain le projet de loi dit « Macron » : nous nous interrogeons fortement sur la contribution que ce texte pourra apporter à la restauration de la compétitivité de notre pays ou à la décongestion du marché du travail.
Pour être objectif, je dois dire que je vous apporte, monsieur le secrétaire d’État, un soutien tout particulier pour ce qui concerne le décompte des dépenses militaires pour le calcul du déficit public de notre pays. Que le président de la Commission, M. Juncker, évoque la mise en place d’une défense européenne ne me choque pas, au regard des contraintes en matière d’efficacité et des logiques stratégiques, qui relèvent indiscutablement, à mes yeux, du cadre européen. En revanche, je considère comme peu convenable que la plupart des pays d’Europe se satisfassent aujourd'hui de vivre sous la protection de l’OTAN, d’une part, et de la Grande-Bretagne et de la France, d’autre part. Il ne me choquerait donc pas que, au titre des « pistes comptables » qui ont été évoquées, les dépenses liées aux opérations extérieures que nous menons ou à l’entretien de notre outil de défense soient exclues du calcul de notre déficit budgétaire, ces dépenses profitant également aux autres pays européens. Quel est votre sentiment à ce sujet, monsieur le secrétaire d’État ? Pensez-vous que nous pourrons tenir nos engagements européens par le biais d’une simple régulation budgétaire, ou faudra-t-il élaborer une loi de finances rectificative ?
J’avais prévu d’évoquer les distorsions, en termes de taux de croissance, entre la France et les autres pays européens. Mon propos, monsieur le secrétaire d’État, vise essentiellement à briser le cercle des faux-semblants et à demander que notre pays, comme d’autres l’ont fait, prenne des mesures fortes.
Enfin, la situation en Libye et les relations avec la Russie et l’Ukraine figurent également à l’ordre du jour du prochain Conseil européen. Notre groupe compte, avec M. Pozzo di Borgo, un véritable spécialiste des questions internationales et de leurs liens avec les politiques énergétiques. Lors d’un prochain débat, il aura l’occasion de faire le point sur ces sujets, en particulier sur la mise en œuvre des accords de Minsk 2.
Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC et de l'UMP.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le prochain Conseil européen traitera de sujets variés et particulièrement importants. Étant donné la richesse de son ordre du jour, je me concentrerai plus particulièrement sur les questions liées à l’Union de l’énergie et au semestre européen.
L’énergie est sans aucun doute l’un des grands domaines stratégiques dans lesquels une intégration européenne s’avère particulièrement nécessaire et porteuse de valeur ajoutée.
Les enjeux sont gigantesques. Ils concernent d’abord la sécurité de notre approvisionnement, dans un contexte géopolitique tendu avec la Russie et plus qu’incertain en Libye et au Moyen-Orient. Ils sont ensuite intimement liés à la compétitivité de nos entreprises et au pouvoir d’achat des ménages, touchés par la crise économique. Ils ont enfin un lien très direct avec nos engagements en matière de lutte contre le changement climatique, au regard notamment de la prochaine conférence mondiale sur le climat, qui se tiendra à Paris en décembre 2015.
La situation n’est pour l’heure guère satisfaisante. L’Europe importe aujourd’hui près de 55 % de son énergie, la facture atteignant 400 milliards d’euros par an. L’électricité et le gaz y sont substantiellement plus chers qu’aux États-Unis, et nos transports sont dépendants de carburants fossiles presque intégralement importés.
La Commission européenne estime à 2 000 milliards d’euros les investissements à réaliser d’ici à 2025 pour moderniser et interconnecter notre système énergétique, et l’adapter à l’émergence des énergies renouvelables.
Une action européenne déterminée sur le long terme est indispensable. Or l’Europe de l’énergie est toujours très loin d’être une réalité. Le cadre stratégique présenté le 25 février dernier représente donc un pas en avant important pour relever les défis qui se présentent à nous, et le socle intersectoriel proposé apparaît comme une base de discussion solide.
Cependant, nous n’en sommes qu’au tout début d’un processus qui sera long et ardu. Étant donné le caractère hautement stratégique de ce secteur et la grande diversité des situations des États membres, les écueils seront nombreux.
Quelques principes devront toutefois guider la négociation des textes à venir. L’intégration et l’interconnexion du marché intérieur devront certes renforcer la résilience de nos systèmes énergétiques et engendrer de réelles économies, mais il faudra surtout jouer sur la complémentarité des mix énergétiques nationaux et s’appuyer sur l’ensemble des sources d’énergie disponibles, notamment sur l’énergie nucléaire, pour l’instant parent pauvre de cette stratégie.
Il faudra également donner un cap solide aux investisseurs. Si les instruments financiers de la BEI, la Banque européenne d’investissement, du Mécanisme pour l’interconnexion en Europe, des fonds structurels et du Fonds européen pour les investissements stratégiques pourront être mobilisés, c’est bien sur les entreprises que reposera l’essentiel de la charge des investissements. Ces acteurs devront donc pouvoir bénéficier d’un environnement favorable à l’investissement, y compris bien sûr au niveau national, pour mener à bien les projets nécessaires.
La transition et l’amélioration de l’efficacité énergétiques devront permettre d’atteindre nos objectifs en matière environnementale, mais elles devront aussi ouvrir de réelles opportunités pour conférer une avance technologique durable aux entreprises européennes et leur permettre de développer des filières d’excellence compétitives à l’échelon mondial.
Enfin, la coordination des accords intergouvernementaux et des contrats commerciaux dans le secteur du gaz devra permettre d’adresser des messages forts et cohérents aux partenaires stratégiques et aux fournisseurs.
L’équilibre sera toutefois particulièrement difficile à trouver entre cette nécessaire coordination, la mise en place d’un système efficace de gouvernance globale de l’Union de l’énergie et la liberté, pour les États membres, de conduire la politique énergétique la mieux adaptée à leurs besoins et à leurs impératifs politiques et stratégiques.
Les étapes à franchir sont donc encore nombreuses et complexes avant que l’Union de l’énergie soit le succès que nous appelons de nos vœux. Celle-ci est une chance pour la France, qui, avec trente-sept interconnexions sur six frontières, se trouve au carrefour des échanges européens. Notre pays dispose d’entreprises leaders sur le plan mondial dans ce domaine. Le Gouvernement devra donc montrer une implication sans faille et jouer un rôle moteur dans les négociations à venir pour tirer le meilleur parti de ce projet.
Les relations avec la Russie et la crise ukrainienne ont bien sûr une résonance très forte dans le domaine de l’énergie, mais c’est naturellement le conflit se déroulant à nos portes qui occupe aujourd’hui tous les esprits. Je laisserai toutefois mes collègues sénateurs de l’UMP s’exprimer sur ce sujet au cours du débat interactif.
Le prochain Conseil européen conclura enfin la première phase du semestre européen. Évidemment, les résultats des dernières élections en Grèce nous ont tous interpellés, s’agissant notamment de la question centrale de la coordination des budgets nationaux et des réformes structurelles à mener au sein des économies de la zone euro.
Je souhaite toutefois me concentrer sur la situation française.
Le bilan approfondi et les recommandations faits par la Commission sont inquiétants. Le niveau de l’effort budgétaire demandé pour 2015 a été fixé à 0, 5 % du PIB, ce qui signifie qu’au moins 4 milliards d’euros d’économies devront être dégagés à très court terme. La Commission avait dans un premier temps préconisé, sur la base du programme de réformes présenté par le Gouvernement, un effort de 0, 3 % du PIB. L’ajustement est donc important et témoigne du peu d’efficacité des réformes mises en œuvre jusqu’à présent. Dans son analyse, la Commission conclut d’ailleurs assez explicitement que le CICE et le pacte de responsabilité n’auront pour ainsi dire pas d’effet réel sur la compétitivité des entreprises, et donc sur la croissance, alors qu’il s’agissait de leur objectif premier.
Certes, deux années de délai ont été accordées pour redresser les comptes publics ; certes, d’autres pays se trouvent dans une situation similaire de déséquilibre excessif ; mais, en la matière, c’est la trajectoire qui compte : la France passe cette année au stade suivant de la procédure.
À politique inchangée, le déficit français ne pourra pas repasser sous la barre des 3 % en 2017. Les économies budgétaires devront donc d’ici là être très largement supérieures, de près de 30 milliards d’euros, à celles qu’avait prévues le Gouvernement, alors même que le ministre de l’économie a annoncé ces derniers jours qu’aucun effort supplémentaire ne serait fourni.
Une liste de réformes macroéconomiques devra également être présentée d’ici au mois de mai, faute de quoi la France pourrait finalement être mise en demeure, première étape vers la prise de sanctions.
Le bilan et les perspectives ne sont pas réjouissants. Je cite le rapport de la Commission : « Une reprise modeste est attendue pour 2015. Le taux de chômage ne devrait pas refluer de manière significative au cours des prochaines années. Les investissements ont diminué en 2014. La dépréciation de l’euro et les réformes récentes ne suffiront pas à enrayer les pertes de parts de marchés des exportations. L’inflation devrait tomber à zéro en 2015. »
Pourtant, les carences économiques de la France sont désormais largement connues. Elles imposent notamment d’agir résolument en faveur de la compétitivité des entreprises, afin de leur permettre de restaurer leurs marges pour investir, d’innover pour embaucher, et enfin de redresser la balance commerciale du pays. Cela exige d’abaisser de façon réelle le coût du travail et le niveau de la pression fiscale et des dépenses publiques, qui ne cessent de croître. Cela impose aussi de s’attaquer sans faiblesse aux rigidités du marché du travail, ainsi qu’à la complexité et à la lourdeur réglementaires, qui pèsent de plus en plus sur nos entreprises dans la compétition internationale. Nous savons bien que, dans une économie ouverte et concurrentielle, ne pas résoudre ces problèmes équivaut à terme à accepter l’échec.
La France échappe pour l’instant de justesse à l’ouverture d’une procédure pour déficit excessif, mais elle restera, jusqu’à l’expiration du nouveau délai, sous la pression de la Commission et des États membres qui font les efforts nécessaires au redressement de leur situation sans pourtant bénéficier d’autant de mansuétude. L’image de notre pays n’en sera que davantage ternie.
La France est la deuxième économie de la zone euro. Elle entretient des liens commerciaux, financiers et bancaires étroits avec les autres États membres. Par conséquent, si nos problèmes structurels ne sont pas corrigés, cela aura des répercussions fortes sur nos partenaires.
Le louvoiement n’est plus possible et la France ne peut demeurer le mauvais élève de la classe européenne. Le redressement réel de notre économie est urgent et indispensable. Il l’est d’abord, naturellement, pour nos concitoyens, mais il l’est également pour l’ensemble des Européens, car il s’agit d’une clé du retour de la croissance en Europe. Il y va donc de la responsabilité européenne de notre pays.
Monsieur le secrétaire d'État, vous l’avez compris, nos attentes sont fortes ; pouvez-vous nous rassurer ce soir ?
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI -UC.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Conseil européen des 19 et 20 mars sera largement consacré aux relations entre l’Europe et la Russie et à la situation en Ukraine, un mois environ après les accords de Minsk 2.
À titre personnel, je considère que la manière dont les Européens vont gérer le dossier ukrainien sera déterminante pour l’avenir de l’Europe politique et pour l’équilibre de notre continent.
En tant que présidente de la commission des finances, j’observe que l’évolution de la crise ukrainienne constitue un aléa important pour la croissance en Europe en 2015.
Dans ses prévisions économiques de cet hiver, la Commission européenne relève que l’impact économique des sanctions contre la Russie et des « contre-sanctions » pourrait être plus important que prévu, en particulier si les sanctions sont appliquées plus longtemps que ce que l’on pouvait envisager au départ.
La crise ukrainienne nous affecte négativement, car elle pèse sur la confiance des acteurs européens. Elle pèse sur les échanges en raison de cette perte de confiance, mais aussi du fait des sanctions mises en œuvre de part et d’autre. Les exportations vers la Russie et l’Ukraine sont pénalisées. Cela affecte en particulier les pays de l’Est, plus dépendants de ces marchés, mais nous sommes aussi atteints, comme le ressentent durement nos agriculteurs, alors que les soutiens annoncés par l’Union européenne n’auraient pas tous été mis en place.
La crise ukrainienne pèse aussi sur l’investissement, en particulier sur les flux d’investissements étrangers vers les pays voisins de la Russie et de l’Ukraine.
À l’heure où l’Europe souffre d’un manque d’investissements et où elle tente de les relancer en créant un fonds européen pour les investissements stratégiques dans le cadre de ce que l’on appelle le « plan Juncker », cette situation est pénalisante. On comprend donc que le débat sur le devenir des sanctions imposées à la Russie, qui arrivent à échéance en juillet, sera essentiel. Plusieurs États ont fait savoir dans quel sens ils tenteraient de peser sur la discussion. Il nous serait précieux, monsieur le secrétaire d'État, de savoir dans quel état d’esprit le Gouvernement abordera ce débat.
La situation en Ukraine a également une incidence sur l’autre grand sujet inscrit à l’ordre du jour du Conseil européen : l’Union européenne de l’énergie.
Notre préoccupation immédiate est la sécurité de notre approvisionnement énergétique en gaz dans le cadre de notre partenariat stratégique avec l’Ukraine, mais la crise ukrainienne a aussi mis en évidence la nécessité d’une solidarité énergétique européenne. La France y prend toute sa part en développant ses capacités d’interconnexion avec ses voisins. Notre pays et l’Italie souhaitent que l’interconnexion électrique à travers le tunnel du Fréjus puisse être financée dans le cadre du plan Juncker. Divers projets électriques et gaziers sont également en cours avec l’Espagne et ont été évoqués à l’occasion du récent sommet trilatéral entre la France, l’Espagne et le Portugal.
Au-delà des principes, il faudra évoquer la question des financements, puisque les investissements nécessaires à la mise en œuvre des orientations présentées le 25 février par la Commission européenne sont estimés à 1 000 milliards d’euros sur cinq ans.
Cela me conduit à évoquer le dernier point inscrit à l’ordre du jour du Conseil européen de mars, qui marque la fin de la première phase du semestre européen.
Après avoir pris connaissance des travaux conduits depuis novembre par la Commission, le conseil Ecofin et le Parlement européen, les chefs d’État ou de Gouvernement vont adopter des orientations de politique économique, sur la base desquelles les États devront, en avril, présenter leurs projets en matière de finances publiques, dans le cadre de leur programme de stabilité, et de réformes structurelles, au titre de leur programme national de réformes.
Avec la situation en Ukraine et les discussions en cours depuis les élections en Grèce, les États membres, ceux appartenant à la zone euro en particulier, se sont trouvés confrontés, au cours de la première phase du semestre européen, à des défis historiques qui ne pourront être relevés qu’à condition de proposer une politique économique cohérente et tournée vers la croissance.
C’est à cette fin que des recommandations spécifiques sont adressées à chacun des pays, pour faire en sorte qu’ils avancent tous dans la même direction.
S’agissant de la France, ces recommandations sont d’abord formulées dans le cadre de la procédure de correction des déficits excessifs prévue par le pacte de stabilité et de croissance.
Comme elle l’avait annoncé le 28 novembre 2014 à l’issue de la procédure d’examen des projets de plans budgétaires instituée par le Two-Pack, la Commission européenne a arrêté sa position concernant la situation budgétaire de la France le 27 février dernier.
Elle a recommandé au Conseil de reporter de deux années l’échéance pour la correction du déficit excessif de notre pays, soit jusqu’en 2017.
Cette proposition a, de toute évidence, été favorablement accueillie par nos partenaires européens. J’en veux pour preuve que, au cours du déplacement que j’ai effectué à Berlin la semaine passée avec le rapporteur général de la commission des finances et le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, la totalité de nos interlocuteurs allemands nous ont indiqué que le report du délai de correction était justifié, en particulier dans la perspective d’un rétablissement de la confiance en France, qui profiterait à l’ensemble de l’Europe.
Demain, le vice-président de la Commission européenne chargé de l’euro et du dialogue social présentera, lors d’une audition ouverte à tous les sénateurs, la recommandation de la Commission au Conseil sur le budget de la France.
Des recommandations nous sont également adressées dans le cadre de la procédure, plus récente, dite de « correction des déséquilibres macroéconomiques ».
Dans ses conclusions rendues publiques le 27 février, la Commission européenne souligne l’importance que revêtira le prochain programme national de réformes de la France et indique que c’est en mai prochain qu’elle décidera ou non d’engager le volet correctif de la procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques, qui, je le souligne, peut aboutir à des sanctions financières.
Par conséquent, monsieur le secrétaire d'État, vous serait-il possible de nous apporter des précisions quant à cette échéance du mois de mai et au déroulement de cette procédure ?
Plus que jamais, nos procédures budgétaires nationales et les procédures européennes sont imbriquées. Le Parlement français sera destinataire, dans les prochaines semaines, des projets de programme de stabilité et de programme national de réforme. Le Haut Conseil des finances publiques statuera, en vue de l’examen du projet de loi de règlement, sur le respect par la France de sa trajectoire de solde structurel et sur la nécessité ou non de déclencher le mécanisme de correction automatique. Il nous faudra ensuite examiner les orientations budgétaires pour 2016.
Parallèlement, la Commission européenne étudiera les projets de programme de stabilité, ainsi que les programmes nationaux de réforme, et adressera au Conseil une « recommandation de recommandation » à la France et aux autres États membres.
Tout cela est complexe, et si nous voulons que cette construction conserve un sens, que l’Europe reste notre amie, nous avons besoin d’y voir clair sur les étapes et les enjeux. C’est pourquoi je vous remercie par avance, monsieur le secrétaire d'État, des réponses et des éclaircissements que vous pourrez nous apporter.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.
La parole est à M. le président de la commission des affaires européennes.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le débat préalable au Conseil européen est un rendez-vous auquel nous sommes tous très attachés. Le thème principal de la réunion des 19 et 20 mars sera l’Union de l’énergie. Nous venons tout juste de voter le projet de loi relatif à la transition énergétique. Il était donc très important que le Sénat puisse débattre des perspectives européennes en la matière.
Je remercie le président du Sénat et la conférence des présidents d’avoir donné suite à la demande de la commission des affaires européennes, ainsi que M. le secrétaire d’État pour sa disponibilité.
Quelle est la situation énergétique en Europe ? L’Union importe 53 % de l’énergie qu’elle consomme ; elle dépense plus de 1 milliard d’euros par jour pour acquitter sa facture énergétique ; elle importe 90 % de son pétrole brut, 66 % de son gaz naturel, 42 % de ses combustibles solides et 40 % de ses combustibles nucléaires. En ce qui concerne le gaz, il provient à hauteur de 39 % de Russie, qui est son fournisseur principal, 50 % du gaz russe importé transitant par l’Ukraine.
Ces chiffres suffisent à montrer tout l’intérêt d’une véritable politique européenne coordonnée en matière énergétique.
Le traité de Lisbonne donne les bases juridiques pour agir ; il faut s’en féliciter. Le Conseil européen de juin 2014 a fait de la création d’une Union de l’énergie « dotée d’une politique en faveur du climat tournée vers l’avenir » un axe prioritaire. Le président Juncker l’a par la suite inscrite en bonne place parmi les projets prioritaires de la nouvelle Commission.
Cette démarche doit être soutenue, mais dans quelle direction faut-il aller ?
L’Union européenne subit une désindustrialisation aux causes certes multiples, mais dans laquelle le prix de l’énergie joue un rôle croissant depuis la révolution du gaz de schiste aux États-Unis. On ne peut faire l’impasse sur la mise à disposition d’une énergie sécurisée, bon marché et bénéficiant de larges interconnexions sur le territoire européen.
L’Union européenne est en pointe dans la lutte contre le changement climatique. Elle doit aussi veiller à ne pas se fragiliser de manière unilatérale : des millions d’emplois directs et indirects sont en jeu.
Une réponse internationale est requise, d’où l’intérêt de la COP 21, qui se tiendra à Paris en 2015. La France a par ailleurs une grande expertise en matière d’énergie nucléaire. C’est un élément important de la compétitivité de notre pays, ne l’oublions pas. En vue de la COP 21, il faut réfléchir à élargir le périmètre des énergies décarbonées, pour y inclure le nucléaire.
L’objectif de la transition énergétique est consensuel, mais cette transition rencontre des difficultés qui tirent leur origine de l’intermittence subie. En l’absence de capacité de stockage digne de ce nom et faute de « réseaux intelligents » à même de caler partiellement la consommation d’énergie sur la production, les lignes à haute tension subissent des variations. L’absence de ces réseaux déstabilise l’ensemble du marché.
Nous devons aussi nous interroger sur le financement de la transition dans des conditions qui assurent la réindustrialisation de l’Union européenne. Les faibles prix de revient caractérisant la filière électronucléaire apportent la seule ressource disponible à même de financer une évolution que les considérations techniques imposent d’inscrire dans la durée.
Je veux aussi insister sur le rôle moteur que doivent jouer la France et l’Allemagne. Nos deux pays sont les deux principaux producteurs d’énergie renouvelable au sein de l’Union européenne. Ils sont aussi les principaux producteurs d’énergie toutes catégories confondues, ainsi que les deux principaux consommateurs. Ils doivent donc promouvoir une coopération leur permettant d’élaborer des schémas cohérents d’investissements.
Je souhaiterais maintenant aborder la situation en Ukraine, qui continue de susciter de vives inquiétudes. La France et l’Allemagne ont joué un rôle déterminant pour promouvoir le nouvel accord de Minsk. Je dois saluer en la circonstance l’action déterminante du Président de la République et de la Chancelière, ce couple franco-allemand retrouvé qui a suscité l’adhésion de l’ensemble des États membres.
Néanmoins, nous savons que cet accord demeure fragile. Vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, il n’existe pas de solution militaire à cette crise ; seule une issue négociée dans le cadre des accords de Minsk peut être acceptable. L’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine doivent être respectées. L’Union européenne doit donc utiliser les moyens de pression à sa disposition, notamment les sanctions individuelles, contre ceux, y compris en Russie, qui soutiennent les actions militaires des séparatistes. L’Union européenne doit aussi agir pour favoriser l’émergence d’une solution politique. Comme l’a souligné le président Larcher lors de ses récents entretiens en Russie et en Allemagne, le Sénat, qui a une grande expérience de la décentralisation, est prêt à apporter un concours en la matière, au travers notamment de l’implication de l’OSCE.
À travers le partenariat oriental, l’Union européenne doit définir des lignes claires pour approfondir ses relations avec ses partenaires orientaux. Le sommet de Riga, en mai prochain, sera important à cet égard. Le partenariat doit respecter le cadre fixé dans la déclaration de Prague de 2009, notamment les principes de conditionnalité et de différenciation. Il doit être distinct de la politique d’élargissement, je tiens à le redire. Lors du sommet de Vilnius de novembre 2013, cette distinction a clairement été maintenue. Nous devons aussi être pragmatiques et privilégier une logique de projets pour avancer dans la bonne direction.
Enfin, le Conseil européen clôturera la première phase du semestre européen. Notre commission aura un échange sur ce thème, avec une communication de Fabienne Keller et François Marc. Nous entendrons demain, avec la commission des finances, le vice-président Dombrovskis sur la recommandation de la Commission européenne concernant le déficit public de la France. J’indique à nos collègues que cette audition sera ouverte à tous les sénateurs. Le Conseil devait adopter aujourd’hui même la recommandation de la Commission européenne visant à ce qu’il soit mis fin à la situation de déficit public excessif en France. La lecture de cette recommandation, que je vous conseille, est édifiante ; la crédibilité de notre pays est en jeu. Nous devons respecter nos engagements budgétaires et engager enfin un programme de réformes structurelles. Nous avons trois mois devant nous ; la date du 10 juin prochain sera importante, voire fatidique. Je souhaite que la Commission regarde avec beaucoup d’objectivité les efforts et les engagements structurels que notre pays aura engagés dans les prochains mois.
Au-delà, la zone euro ne peut fonctionner sans discipline commune. Elle doit se conjuguer avec une action résolue pour renforcer la compétitivité des entreprises et la croissance. L’euro est fondé sur la responsabilité de chacun des États membres de veiller à faire converger les politiques budgétaires et économiques. C’est dans ce cadre que la nécessaire solidarité peut jouer tout son rôle. Le cas de la Grèce nous préoccupe. Nous souhaitons une solution réaliste, qui ne peut faire l’impasse sur des engagements fermes concernant les réformes indispensables. Avec l’Allemagne, la France a apporté une large contribution pour soutenir ce pays avec lequel nous avons des liens très forts, rappelés tout à l’heure par le président du groupe d’amitié France-Grèce du Sénat. Je souligne que l’engagement de la France en faveur de la Grèce s’élève à 48 milliards d’euros, auxquels il faut ajouter 20 milliards d’euros au titre de la réassurance, soit un total de 68 milliards d’euros, c’est-à-dire à peine moins que l’Allemagne. Il ne faut pas l’oublier, les contribuables français sont directement concernés par l’évolution de ce dossier. Oui à la solidarité, mais oui à la responsabilité également !
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI -UC. –M. Jean-Claude Requier applaudit également.
Madame la présidente, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires européennes, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de vos interventions.
En ce qui concerne l’Union de l’énergie, nous partageons tous, le débat l’a montré, les mêmes priorités : faire en sorte que cette nouvelle étape dans la construction européenne permette de répondre aux enjeux en matière d’indépendance énergétique et de sécurité d’approvisionnement, mais aussi de lutte contre le changement climatique, qu’elle soit un moteur pour l’innovation, l’investissement, qu’elle permette d’atteindre un certain nombre d’objectifs sociaux.
S’agissant de la protection des consommateurs, ou plus précisément de la lutte contre la précarité énergétique, angle sous lequel M. Sutour a abordé cette question, nous considérons que cet élément doit effectivement être pris en compte au titre de la politique de l’énergie : il ne relève pas seulement de la politique sociale, comme d’aucuns le pensent peut-être. Par conséquent, nous serons attentifs à garantir un accès à l’énergie à un coût abordable. Cela est d’ailleurs important aussi pour l’économie. À cet égard, M. Bizet a bien souligné la contribution qu’apporte l’énergie nucléaire à la compétitivité de notre pays. Nous veillerons donc au maintien des tarifs réglementés. Ceux-ci ne doivent pas, pour autant, entraver la mise en place d’un marché intérieur de l’énergie, laquelle, réciproquement, ne doit pas nous faire oublier que l’énergie n’est pas un bien comme les autres et que tous les citoyens doivent y avoir accès.
Plusieurs d’entre vous ont souligné la nécessité de pouvoir mobiliser le Fonds européen pour les investissements stratégiques, afin de pallier le sous-investissement actuel et de soutenir nos ambitions, en matière d’interconnexion notamment. Ce sera un facteur important de la réussite de l’Union de l’énergie.
M. Billout a également insisté sur la nécessité d’être attentifs, en termes de gouvernance et d’organisation du marché de l’énergie, à ne pas remettre en cause des mécanismes qui sont indispensables, sur le plan social ou pour des raisons de diversification du bouquet énergétique.
Concernant le semestre européen, je souligne à nouveau que la recommandation de la Commission qui a été adoptée aujourd’hui par le conseil Ecofin est convergente avec notre propre stratégie budgétaire. Nous respecterons nos engagements. Dans cette perspective, nous menons un dialogue et un travail permanents avec la Commission européenne, car nous sommes parfaitement conscients de nos responsabilités et du fait que notre situation économique a une incidence sur l’ensemble de la zone euro et sur le fonctionnement de l’Union économique et monétaire.
Cela étant, il convient de prendre en compte la situation économique dans son ensemble. C’est pourquoi la Commission elle-même a introduit dans sa doctrine, au travers d’une communication qu’elle a publiée voilà quelques semaines, la notion de flexibilité, pour que la consolidation budgétaire, c’est-à-dire la baisse des déficits et le désendettement, ne vienne pas entraver la mise en œuvre de l’objectif de soutien à la croissance. En effet, in fine, c’est aussi la meilleure contribution que chaque pays peut apporter à la bonne santé de la zone euro que de s’assurer que la croissance redémarre en son sein.
Aujourd’hui, la croissance est en train de repartir en Europe. La Commission européenne, le Fonds monétaire international ou l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, sont d’accord pour considérer que les politiques d’austérité, de restriction budgétaire trop marquées ont un effet négatif sur l’activité économique. La Commission européenne prend donc en compte cet élément dans ses prévisions de croissance, et notre dialogue avec elle porte sur les conditions à réunir pour ramener notre déficit public en dessous de 3 % en 2017 sans pour autant freiner la croissance, qui est en passe de repartir en France.
La loi de finances de 2015 a été bâtie sur une prévision de croissance de 1 %, qui coïncide avec celle de la Commission européenne, d’autres instances étant même plus optimistes. Par conséquent, cette hypothèse nous semble solide, et nous espérons pouvoir conforter encore cette tendance à la reprise, sachant que, en 2014, la croissance a été de 0, 4 %.
Nous remettrons à la Commission avant même la date butoir du 10 juin prochain le rapport exposant de quelle façon nous réaliserons un effort supplémentaire de réduction de 0, 2 % de notre déficit structurel pour l’année 2015, afin de diminuer celui-ci de 0, 5 % au total, au lieu de 0, 3 % comme initialement prévu. Le ministre des finances l’a dit, nous serons présents au rendez-vous, nous ferons cet effort supplémentaire ; je réponds par là même à la question de Mme la présidente de la commission des finances.
Nous sommes tout à fait déterminés à atteindre cet objectif, ainsi qu’à mener les réformes de structures qui permettront de moderniser le fonctionnement de notre économie, de notre administration, de nos collectivités locales, de notre marché du travail, afin de renforcer notre compétitivité.
La réforme territoriale que nous avons engagée s’inscrit dans cette perspective. Le Parlement a adopté la nouvelle carte des régions. Aujourd’hui même, l’Assemblée nationale a voté en première lecture le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Nous avançons par ailleurs sur la simplification des normes, ainsi que sur une forme de libéralisation de certains secteurs de notre économie, avec le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Nous progressons également dans l’amélioration de certains aspects de l’organisation du marché du travail et de la vie sociale au sein des entreprises. Ainsi, la conclusion de l’accord national interprofessionnel, évoqué par M. Bonnecarrère, est largement considérée, me semble-t-il, comme un progrès en matière de négociations dans les entreprises confrontées à des restructurations. En outre, un texte relatif au dialogue social sera prochainement présenté par François Rebsamen.
Nous sommes tout autant déterminés à réduire les prélèvements obligatoires et la dépense publique, mais nous voulons y parvenir en maintenant un haut niveau de solidarité et de services publics, les Français y étant attachés. Au demeurant, il est nécessaire, y compris pour garantir l’avenir économique de notre pays, d’investir dans l’éducation, de préserver un système de santé qui demeure l’un des meilleurs du monde, mais qui peut sans doute être organisé pour fonctionner à coûts moindres : c’est tout l’enjeu des réformes en cours.
Nous pensons donc qu’il est possible de réduire la dépense publique et d’engager des réformes de structures sans casser le modèle social et républicain auquel nos compatriotes sont attachés. C’est dans cet esprit que nous dialoguons avec la Commission européenne et avec nos partenaires de l’Union.
Je rappelle que l’Europe était là, à Paris, dans la rue, le 11 janvier, aux côtés des Français, aux côtés du Président de la République, pour exprimer sa solidarité, pour dire que nous ne céderions pas, que nous ne nous laisserions pas intimider par la terreur, mais aussi que nous défendrions notre modèle de société. Or, au cœur des valeurs qui structurent ce modèle, figurent à la fois la liberté d’expression, la solidarité et la cohésion sociale.
Aujourd’hui, malgré les divergences qui se font jour, le débat sur la situation de l’Union économique et monétaire va de pair avec la conscience qu’il est tout à fait légitime, pour chacun des pays membres, de mener les réformes permettant d’améliorer sa situation économique et de préserver ce modèle de société. Ce dernier forme la base même de la construction européenne. C’est un modèle de liberté, mais c’est aussi un modèle de solidarité.
J’en viens aux questions internationales et, tout d’abord, à la défense.
Le président de la Commission européenne a employé une expression audacieuse et forte, parlant d’« armée européenne ». Pour notre part, nous considérons qu’il faut commencer par faire progresser la défense européenne et la politique de sécurité et de défense commune. Vous le savez, nous agissons en ce sens en travaillant à renforcer très concrètement les outils de l’unité européenne dans le domaine de la défense.
Nous devons, en effet, faire en sorte que les besoins de sécurité de l’Europe, ainsi que les devoirs qui sont les siens en la matière, soient exercés et assumés collectivement. Plusieurs orateurs l’ont souligné : chaque État membre doit prendre sa part. On ne peut faire reposer les efforts de défense, y compris les interventions armées qui sont parfois nécessaires, sur un ou deux pays seulement.
Parallèlement, nous nous employons à la mise en œuvre d’outils collectifs. Tel était l’objet des discussions du Conseil européen de décembre 2013, au terme duquel des orientations concrètes ont été fixées et regroupées en trois volets : l’efficacité de la politique de sécurité et de défense commune, le renforcement des capacités en matière de défense et le soutien à l’industrie de défense.
Premièrement, pour ce qui est de l’efficacité, nous avons engagé des travaux en vue de réformer le système de financement des opérations extérieures, connu sous le nom de mécanisme Athena. Ces opérations représentent un coût extrêmement important, lequel n’est, pour l’heure, supporté que par quelques États membres, en particulier la France. Nous souhaitons qu’un certain nombre de dépenses liées à ces opérations puissent être mutualisées à plus grande échelle.
Cette mutualisation ne se confond pas avec la possibilité de décompter les dépenses de défense des déficits structurels, mais elle procède malgré tout du même constat ; il est clair que, si certains États assument seuls ces charges, leurs dépenses publiques et leur déficit finiront par en être affectés. C’est pourquoi il faut augmenter la part de ces dépenses qui peut être assumée par le budget européen, donc par l’ensemble des pays membres.
Deuxièmement, au titre des capacités, nous souhaitons accélérer la mise en commun des efforts, en particulier avec l’Agence européenne de défense, l’AED, et via la programmation d’un certain nombre de grands projets nécessitant des investissements communs. Je songe au drone européen de défense ou encore à la flotte d’avions ravitailleurs.
À cet égard, nous demandons à tous les États membres de respecter l’objectif qui a été fixé : réserver 2 % de leur PIB à la défense en consacrant 20 % de cet effort aux équipements et à la recherche et développement. Les États de l’Union européenne membres de l’OTAN ont d’ailleurs pris cet engagement dans le cadre de cette organisation.
Troisièmement, s’agissant du volet industriel, nous souhaitons accroître le soutien apporté à la recherche et développement. Nous tenons en outre à faciliter l’accès aux financements pour les PME du secteur de la défense.
À propos du sommet de Riga, je tiens à confirmer l’importance de la distinction, soulignée par M. Bizet, entre la politique de voisinage et la politique d’élargissement : il ne doit pas y avoir de confusion à cet égard !
Nous devons nous donner les moyens d’une politique de voisinage assurant la stabilité à travers des accords de partenariat et d’association. Toutefois, l’action dans ce domaine ne doit pas être confondue avec la politique d’élargissement, sauf à nourrir des ambiguïtés qui pourraient susciter des difficultés et, finalement, nuire à la stabilité.
Au sujet de l’Ukraine, nous l’avons toujours dit, les sanctions sont un outil pour parvenir à la négociation. Il faudra se pencher sur leur éventuelle reconduction. L’enjeu, en l’espèce, ce sont les sanctions sectorielles, qui arrivent à échéance le 31 juillet 2015. Elles devront être examinées en fonction du respect des accords de Minsk, en particulier de Minsk 2, donc de la feuille de route dont j’ai rappelé un certain nombre d’éléments en ouvrant ce débat.
Outre les enjeux liés au cessez-le-feu, au retrait des armes et à la surveillance de la frontière, Michel Billout a insisté sur le volet politique. Il s’agit de faire en sorte que, en Ukraine même, soient conduites des réformes portant notamment sur la décentralisation et le futur statut des territoires de l’est, en particulier sur le statut spécial de certaines régions du Donbass. Sur ce plan également, on constate des avancés. Ces chantiers sont très importants pour la stabilité durable de l’Ukraine.
À échéance, des élections devront être organisées dans ces provinces de l’est de l’Ukraine. En vertu de la Constitution actuellement en vigueur dans ce pays, un scrutin doit y avoir lieu le 25 octobre prochain.
Vous le constatez, un certain nombre d’engagements très précis ont été pris dans ce domaine. Ils ont pour but d’assurer la désescalade de la violence, laquelle est engagée. Désormais, il faut veiller à ce que toutes les parties respectent totalement le cessez-le-feu, donc l’arrêt des affrontements militaires. Ces engagements tendent, ensuite, à permettre une stabilité durable, pour les régions de l’est de l’Ukraine et pour les relations entre l’Ukraine et la Russie.
Au cours de ce Conseil européen, sera confirmée l’aide financière très importante que nous apportons à l’Ukraine, parallèlement aux réformes que nous lui demandons de mettre en œuvre pour moderniser son administration, notamment en luttant contre la corruption.
Cette action est menée non seulement à titre bilatéral, entre l’Union européenne et l’Ukraine, mais aussi à travers le Fonds monétaire international. Cela étant, les pays de l’Union européenne apportent aussi dans ce cadre une contribution substantielle.
Je conclurai en évoquant la question de la Grèce. Ce sujet a été notamment abordé par Simon Sutour, qui, au Sénat, préside le groupe interparlementaire d’amitié France Grèce.
Hier, au cours du conseil Ecofin, il a été décidé de continuer à travailler avec le gouvernement grec sur la liste de réformes communiquée par ce dernier. Ainsi, une confiance s’instaurera entre les partenaires de la zone euro et le nouveau gouvernement de la Grèce, qui s’emploie logiquement à mettre en œuvre les engagements qu’il a pris lors de la campagne électorale.
Les électeurs grecs ont fait un choix : ils ont décidé de tourner la page des politiques d’austérité, qui se sont révélées très dures. À travers le mécanisme économique que j’ai détaillé il y a quelques instants, ces politiques ont, dans les faits, aggravé la récession. Celle-ci trouvait certes son origine dans les faiblesses de l’économie et des finances publiques grecques, faiblesses antérieures à la crise, mais celle-ci a eu pour effet de les mettre pleinement en lumière.
Cela étant, le nouveau gouvernement grec a reçu pour mandat de travailler dans le cadre de l’Europe et de la zone euro. En effet, les électeurs grecs ont fait le choix d’une formation politique et d’un leader s’engageant, tout en menant le changement, à maintenir le pays au sein de la zone euro. Un récent déplacement à Athènes, au cours duquel j’ai rencontré plusieurs membres du gouvernement grec ainsi que le nouveau Président de la République, m’a permis de m’assurer qu’il n’y avait pas d’ambiguïté sur ce point.
De surcroît, M. Tsipras l’a confirmé lors de son entrevue à Paris avec le Président de la République, peu de temps après son élection : le gouvernement grec travaille bien, au sein de la zone euro, dans le cadre des règles européennes.
Nous devons faire en sorte que la mise en œuvre des réformes permette à la Grèce de sortir de la situation de crise dans laquelle elle se trouve. Nous allons y contribuer de manière très concrète, au-delà de l’aide que nous apportons à la conclusion d’un accord. Vous le savez, nous avons joué un rôle très important dans ce domaine, depuis l’élection du 25 janvier. Nous apportons par ailleurs une assistance technique à la Grèce au titre de la réforme de l’administration, de la réforme fiscale et de la modernisation des finances publiques.
Cet accompagnement tient bien entendu à l’amitié qui nous lie à la Grèce. Toutefois, à mon sens, c’est un devoir politique pour l’Union européenne tout entière, en particulier pour les membres de la zone euro, de permettre à ce pays de continuer à vivre son destin au sein de cette communauté politique qu’est l’Union européenne. Bien entendu, c’est la seule option sur laquelle nous travaillons. Nous devons continuer, sur cette base, à aider le gouvernement grec. Notre action est menée dans la clarté et dans le respect des engagements pris par la Grèce vis-à-vis de ses partenaires européens.
Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les précisions que je tenais à apporter sur les principaux points que vous avez abordés.
Je vous remercie de nouveau de ce débat, de vos interventions et du soutien que vous avez exprimé, en particulier, au projet d’Union de l’énergie.
Pour répondre à une question posée au cours de cette discussion, je vous assure que la France se rendra à ce Conseil européen dans un état d’esprit qui est celui de l’engagement et du leadership. Nous sommes déterminés à aider l’Union européenne à prendre les décisions lui permettant d’avancer sur tous les points inscrits à l’ordre du jour : la construction de l’Europe de l’énergie, le soutien à la croissance et à l’investissement, l’engagement pour la paix en Ukraine, pour la sécurité et la stabilité dans son environnement !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.
Nous allons maintenant procéder au débat interactif et spontané, dont la durée a été fixée à une heure par la conférence des présidents.
Je vous rappelle que chaque sénateur peut intervenir pour deux minutes au maximum. S’ils sont sollicités, la commission des affaires européennes ou le Gouvernement pourront répondre.
La parole est à Mme Fabienne Keller.
Monsieur le secrétaire d’État, plusieurs de mes collègues l’ont rappelé, il y a quelques jours, la Commission européenne a accordé un nouveau délai pour la réduction du déficit de notre pays : 4 % du PIB en 2015, 3, 4 % en 2016 et, enfin, 2, 8 % en 2017. Telle est la trajectoire fixée.
À cette occasion, la Commission nous a répété que les économies de 50 milliards d’euros déjà programmées ne suffiraient pas à atteindre cet objectif.
Vous l’avez vous-même rappelé, à l’instar de Pascale Gruny et de Philippe Bonnecarrère, il nous faut assumer un effort budgétaire structurel supplémentaire de 0, 5 point de PIB. Ainsi, il serait possible de dégager 4 milliards d’euros d’économies, mais 4 milliards d’euros sur le déficit structurel. Cela signifie que ces économies ne peuvent pas reposer sur l’affaiblissement de l’euro et les bas prix du pétrole.
S’agissant des moyens de parvenir à l’objectif, vous avez indiqué quelques pistes.
Vous avez évoqué le projet de loi NOTRe. Mais, dans un premier temps, ce texte ne changera pas grand-chose. Du reste, les sources d’économies qu’il est censé apporter ne sont pas évidentes. Quant à la nouvelle carte des régions, vous le savez, les travaux dont elle a déjà fait l’objet montrent qu’elle commencera par susciter des charges supplémentaires avant de permettre d’éventuelles économies, lesquelles ne sont pas certaines non plus.
Vous avez également mentionné le chantier de la simplification. En la matière, nous attendons les effets du travail en cours. Quoi qu’il en soit, pour l’essentiel, la future loi Macron ne devrait pas être applicable en 2015. Dès lors, cette réforme ne pourra pas aider à dégager les 4 milliards d’euros dont il est question.
Quant aux autres actions que vous avez citées, je ne puis dire avec certitude qu’elles dégageront bel et bien des économies.
Dans tous les cas, il nous faudrait des mesures identifiées, plus précises, assorties des modalités de leur mise en œuvre. Vous l’avez rappelé, le véritable délai, c’est plutôt la fin du mois de mai : un projet de loi de finances rectificative serait nécessaire avant cette échéance pour sécuriser et crédibiliser cet engagement de la France.
Chacun d’entre nous en est convaincu : tous nos partenaires de l’Union européenne, à commencer par l’Allemagne et le Royaume-Uni, attendent que la France prenne enfin des décisions de fond, à même de redonner espoir à l’ensemble de l’Europe !
Applaudissements sur les travées de l'UMP – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.
Madame Keller, la Commission européenne, tout en confirmant qu’elle approuvait notre trajectoire budgétaire d’ici à 2017, a effectivement demandé à la France un effort structurel supplémentaire pour 2015, mais il est de 0, 2 point de PIB pour cette année, l’objectif étant d’arriver à 0, 5 point en 2017. De cette préconisation découlent les 4 milliards d’euros d’économies que vous avez mentionnés.
Cela étant, vous avez raison de dire que ni les réformes territoriales qui sont actuellement examinées ni celles qui ont déjà été votées ne provoqueront pas immédiatement une baisse de la dépense publique. Il n’en demeure pas moins que, à terme, la fusion des régions, la clarification des compétences, la fin du « millefeuille », emporteront des effets structurels importants sur notre dépense publique. C’est ce que nous avons tous souhaité, mais, nous, nous l’avons fait !
Exclamations dubitatives sur les travées de l’UMP.
Cette baisse de 0, 2 % de la dépense structurelle sur le budget de 2015 découlera donc d’autres mesures, que Michel Sapin est en train de préparer et qui vous seront présentées de façon détaillée au cours des prochaines semaines.
Vous savez que nous réalisons déjà continuellement des économies dans de nombreux domaines de la vie de l’administration. Nous nous en tenons néanmoins à certains objectifs prioritaires, par exemple en matière d’éducation. Il fallait en effet former et employer davantage d’enseignants, car nous bénéficions, contrairement à d’autres, d’une croissance démographique positive, qui nous impose certaines contraintes.
Nous avons dû prendre des mesures en matière de sécurité depuis 2012, que nous avons renforcées depuis les attentats des 7, 8 et 9 janvier, et dont le coût est d’environ un milliard d’euros. Cela nous conduit à ajuster le niveau des dépenses publiques. Pour ce qui est des charges supplémentaires liées à la lutte contre le terrorisme, le Premier ministre a demandé à l’ensemble des ministres de réduire, au prorata de leur budget, leurs dépenses afin de financer les mesures en question.
Un certain nombre de dispositions vont être prises en vue de réaliser les économies à hauteur de 0, 2 point de PIB au titre 2015 et de tenir ainsi nos engagements vis-à-vis de la Commission européenne, sans renoncer pour autant aux priorités de politique publique que nous nous sommes fixées ni au soutien de la croissance au moment où celle-ci redémarre.
Je rappelle que nous avons engagé une lutte impitoyable contre la fraude et l’évasion fiscales, en obtenant notamment la mise en œuvre de l’échange automatique d’informations dans un avenir très proche, amenant donc un certain nombre de contribuables qui dissimulaient des comptes à l’étranger à les déclarer et à rapatrier leurs avoirs de manière à les intégrer dans leur patrimoine imposable.
La Commission a reconnu la contribution de cette politique à la baisse de nos dépenses structurelles. Cela a en effet rapporté 2 milliards d’euros supplémentaires au budget de l’État en 2014, et nous estimons qu’il en ira de même en 2015.
Nous disposons donc d’un certain nombre de leviers d’action qui nous permettent aujourd’hui et nous permettront demain de faire baisser la dépense publique de façon structurelle, d’accroître certaines rentrées dans le budget de l’État et de respecter entièrement nos engagements vis-à-vis de la Commission européenne.
Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur une proposition de la présidence lettone qui a trait au système bancaire et qui nous cause quelque souci.
Nous voyons là réapparaître, sous une forme un peu nouvelle, une proposition formulée précédemment par le commissaire Barnier et inspirée des recommandations de M. Vickers, que les Britanniques ont appliquée. À l’époque, cette idée avait rencontré une hostilité assez forte puisque, de manière un peu curieuse s’agissant d’un règlement, elle ne devait pas s’appliquer à la Grande-Bretagne elle-même. Elle n’avait pas survécu à la fin de la Commission Barroso.
Revient donc sur la table une proposition qui vise à classer les banques en fonction de la taille de leur bilan, et non du niveau de risque qu’il intègre. Ce système, qui consiste à répartir les banques dans des zones rouge, orange ou verte, vise les banques françaises, qui sont les seules grandes banques universelles. Les Allemands n’en ont qu’une, la Deutsche Bank, qui va émigrer à Londres ; les Britanniques n’étant pas dans le système, il apparaît clairement que celui-ci ne vise que la France.
Selon nous, cette proposition ne doit pas prospérer, d’autant qu’elle tend, de surcroît, à remettre en cause les réformes menées à bien en France et en Allemagne, et que la Commission nous reproche à mi-voix. En conséquence, j’espère que la France saura défendre sa législation bancaire et ses établissements.
Monsieur Yung, il existe en effet un projet de règlement de séparation des activités bancaires, issu du rapport Liikanen, qui avait été lancé par la Commission Barroso. Il n’en est cependant qu’au stade de la discussion interne, au sein de la Commission. Certains, sans doute, seraient favorables à ce qu’il suive son chemin jusqu’à être soumis au Parlement européen et au Conseil, mais la France a toujours défendu la même position : nous sommes très attachés à notre modèle de banque universelle.
Notre propre loi de séparation des activités bancaires, que vous avez votée, a été pensée de manière à remédier à une partie des problèmes qui ont été à l’origine de la crise financière, notamment par une séparation des activités de nature spéculative de celles de banque de détail.
Nous n’avons donc aucune raison d’envisager ou d’accepter un projet de règlement européen qui s’éloignerait de cette vision. Nous considérons que beaucoup d’outils ont été mis en place par ailleurs, notamment à travers l’Union bancaire.
Les stress tests conduits par la Banque centrale européenne, que toutes les banques françaises ont passés avec succès, ont permis de vérifier leur solidité.
Certaines des banques qui ont fait défaut étaient des banques universelles, mais la plupart d’entre elles, Lehman Brothers aux États-Unis comme un certain nombre d’autres en Grande-Bretagne ou en Irlande, n’en étaient pas.
Nous ne souhaitons pas remettre en cause la législation adoptée en France, dont nous estimons qu’elle est de nature à assurer la stabilité du système bancaire. Nous considérons donc qu’il n’y a pas de raison que la Commission européenne s’engage dans une réforme de ce type.
Je souhaite évoquer la toute récente décision de la Cour de justice de l’Union européenne enjoignant à la France de porter à 20 % le taux de TVA applicable au livre numérique, au lieu du taux réduit dont il bénéficie depuis janvier 2012.
Certes, ce sujet n’est pas inscrit à l’ordre du jour du prochain Conseil européen, mais il ne peut être passé sous silence compte tenu de son importance pour nos industries culturelles.
Je rappelle que, sur l’initiative du Sénat, le législateur a considéré comme nécessaire d’appliquer le taux réduit de TVA au livre, quel que soit son support, afin de favoriser à la fois la diffusion accrue des œuvres d’expression européenne face à la concurrence anglo-saxonne et le développement du marché unique du numérique.
Tel n’a pas été le sentiment de la Commission européenne sur le sujet, bien que la majorité des États membres se soient déclarés favorables à ce parallélisme fiscal.
Souvenons-nous que l’Allemagne elle-même s’est ralliée, en juillet 2013, à la position de la France à cet égard. La perspective d’une modification de la directive TVA de novembre 2006 avait alors été envisagée, d’autant que, parallèlement à son recours, la Commission européenne avait déposé une consultation sur le taux réduit.
Je suis consternée par cette décision, qui paraît aller à contre-courant de la stratégie politique en faveur du numérique, nécessaire pour relever les immenses défis qui sont devant nous. L’Europe doit évoluer sur ces questions fiscales, mais aussi se montrer beaucoup plus offensive quant à la nécessité d’une régulation concurrentielle, garante d’une véritable neutralité, s’appliquant non seulement aux réseaux mais aussi aux services et aux plateformes. Il faut bâtir un régime exigeant et réaliste des données personnelles, à l’heure du cloud, des objets connectés et du big data, et mettre en œuvre une politique industrielle forte.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous avais déjà posé cette question lors du débat préalable au précédent Conseil européen : face à l’urgence que souligne cette récente décision, quelle stratégie le Gouvernement entend-il adopter pour avancer sur ce sujet difficile ?
Encore une fois, je suis consternée de constater que la question du marché unique numérique n’est abordée que par le biais d’une possible révision de la directive sur le droit d’auteur de 2001. Rien d’autre n’est envisagé au niveau européen ! Que peut-on faire, que comptez-vous faire sur ce sujet crucial ?
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.
Madame la présidente Morin-Desailly, la Cour de justice de l’Union européenne a effectivement pris une décision qui remet en cause l’application du taux réduit de TVA au livre numérique.
En réalité, nous avions simplement étendu au livre numérique le taux de TVA applicable au livre papier. La Cour de justice a estimé que cela n’était pas conforme à la directive TVA de 2006, qui limite strictement l’application du taux réduit. Or, lorsque cette directive a été prise, le livre numérique, tout comme la presse en ligne d’ailleurs, était beaucoup moins développé qu’il ne l’est aujourd'hui : en Europe, il existait déjà, mais seulement à l’état embryonnaire. La directive ne pouvait donc intégrer l’absence de raison de principe commandant d’appliquer des taux différents pour un même bien culturel selon qu’il est acheté et consulté sur support numérique ou sur support papier.
Nous avons immédiatement réagi à la décision de la Cour de justice. Avec la ministre de la culture et le ministre des finances, je vais demander à la Commission européenne de proposer des mesures d’ordre législatif permettant de garantir la neutralité technologique pour les biens culturels.
À nos yeux, la voie la plus normale serait une révision de la directive TVA de 2006, qui ajouterait à la liste des exceptions les biens culturels numériques, en particulier les livres. L’important, c’est de développer l’accès au livre et de garantir la rémunération des auteurs et des éditeurs.
Alors que l’Europe a choisi de faire du numérique l’un de ses grands chantiers, après la mise en place de l’Union de l’énergie, il serait absurde de faire ainsi obstacle à la diffusion du livre numérique, probablement appelé à un grand avenir.
Il faut s’assurer que les conditions dans lesquelles les œuvres culturelles sont diffusées par voie numérique ne nuisent pas à la protection du droit d’auteur ni à la rémunération des créateurs. De ce point de vue, il ne serait pas logique de maintenir une fiscalité plus lourde sur les biens culturels dès lors qu’ils sont diffusés sur support numérique, et non sur les supports traditionnels.
Je vous rejoins donc totalement : nous allons mener ce combat, avec l’Allemagne et d’autres pays. La difficulté réside dans le fait que, s’agissant d’une directive sur la fiscalité, elle est soumise à la règle de l’unanimité. Nous nous battrons cependant pour obtenir que le livre numérique ne soit pas taxé davantage que le livre papier.
Monsieur le secrétaire d'État, l’ordre du jour du prochain Conseil européen abordera la question du partenariat oriental de l’Union européenne et celle des relations avec l’Ukraine et la Russie. C’est un point fondamental, dont les enjeux et les conséquences sont essentiellement liés.
Tous les responsables européens, les parlementaires nationaux ainsi que les membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, dont je suis, sont extrêmement préoccupés par l’application des accords de Minsk du 12 février dernier. Nous nous réjouissons, bien sûr, du cessez-le-feu négocié, mais ce que l’on appelle diplomatiquement, presque pudiquement, le « conflit ukrainien » ne doit pas nous faire oublier la réalité.
Nous souhaitons tous que les négociations de paix aboutissent. Toutefois, cela signifie-t-il que l’annexion de la Crimée par la Russie, au mépris du droit et des traités internationaux, est aujourd’hui un fait irrévocable ?
Les ministres des affaires étrangères de l’Union européenne, réunis à Riga la semaine dernière, ont renoncé à la possibilité de prendre de nouvelles sanctions contre la Russie. Dès lors, qu’en est-il du respect stricto sensu des accords de Minsk quant à la libération des otages et du retrait des troupes russes ?
Moscou refuse la libération de Nadia Savchenko, ma collègue membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, détenue en Russie depuis juin 2014 et qui poursuit une grève de la faim, mettant sa vie en péril. La justice russe ne la considère pas comme un otage et affirme disposer de chefs d’inculpation sérieux. Quelle est la position de la France sur ce sujet et quelle sera son action en la matière ?
Enfin, je tiens à rappeler que le Partenariat oriental de l’Union européenne a pour objet d’instaurer un espace de stabilité démocratique et économique. Il s’accompagne également d’accords d’association. Le Sénat a voté la semaine dernière le projet de loi autorisant la ratification d’un accord d’association avec la Moldavie, tout en rappelant qu’un tel accord n’était pas un préalable à une intégration du pays considéré. Il importe en effet que ces accords ne soient pas perçus par la Russie comme des éléments de concurrence avec l’Union économique eurasiatique proposée par la Russie aux pays concernés par le Partenariat oriental de l’UE.
Pour ce faire, il faut que les institutions européennes adoptent une politique diplomatique plus claire, de nature à apaiser les relations entre l’Union européenne et la Russie.
Mme Colette Mélot applaudit.
Madame la sénatrice, je tiens tout d’abord à indiquer que nous ne reconnaissons pas l’annexion de la Crimée par la Russie et que nous défendons la souveraineté de l’Ukraine. Nous demandons en outre la libération de Nadia Savchenko.
Comme vous l’avez dit, nous recherchons l’apaisement. À cet égard, les accords de Minsk sont évidemment importants. Les initiatives du Président de la République et de la Chancelière allemande ont été saluées et soutenues par tous les membres du Conseil européen, un soutien confirmé à la fin de la semaine dernière par les ministres des affaires étrangères qui se sont rencontrés à Riga. La seule issue possible à cette crise passe en effet par la voie diplomatique et la négociation.
C’est pourquoi nous travaillons à rétablir entre l’Ukraine et la Russie des relations de voisinage normales, dans tous les domaines. Dans le cadre des accords de Minsk, cela suppose la libération des prisonniers, des otages, mais aussi le respect de la frontière et le rétablissement des relations économiques. Sur ce plan, le commissaire européen chargé de l’énergie est intervenu pour faire en sorte qu’un accord sur l’approvisionnement de l’Ukraine en gaz soit signé dans les prochains mois, afin que ce pays ne se retrouve pas privé d’énergie, ne serait-ce que pour que la population puisse se chauffer.
L’apaisement des relations entre les deux pays est donc au cœur de notre feuille de route et c’est le sens des initiatives prises par le couple franco-allemand, avec le soutien de l’ensemble des Européens. Dans l’intérêt même de l’Ukraine – je connais votre attachement à ce pays, madame la sénatrice –, c’est la voie qu’il faut suivre. Il n’y a pas de solution militaire à ce conflit : envoyer des troupes armées ne résoudra pas le problème. Toutes les escalades militaires ont conduit à un désastre humanitaire dans l’est de l’Ukraine.
Il importe de ramener les Ukrainiens et les Russes à la table des négociations, de faire cesser le soutien militaire aux séparatistes et de veiller au respect de toutes les dispositions prévues dans les accords de Minsk, une tâche à laquelle se sont attelés le Président de la République et la Chancelière allemande.
Mon intervention portera également sur l’Ukraine, mais, une fois n’est pas coutume, c’est à M. le président de la commission des affaires européennes que j’adresserai une question.
Je tiens tout d’abord à saluer l’action du gouvernement français et du gouvernement allemand pour faire en sorte que ce soit entre Européens, et seulement entre Européens, qu’une issue soit trouvée à cette guerre.
Personne n’a le moindre doute quant à la réalité de l’engagement russe : nous savons bien qu’il est le moteur de ce conflit, qui n’est pas une guerre civile. L’attaque conduite près de Marioupol est un test de la capacité de la Russie et de l’Ukraine – mais d’abord de la Russie – à respecter les accords de Minsk, et j’ai, moi aussi, une pensée pour Mme Savchenko.
Ce qui s’est passé l’année dernière en Ukraine n’est rien de moins qu’une révolution. Une révolution, à nous Français, cela ne devrait pas nous faire peur : nous en avons connu une ! Et les Russes aussi ! C’est un événement qui est ancré dans nos histoires respectives. Dès lors, personne en France et en Russie n’a le droit de dire que ce qui s’est passé était un coup d’État !
Aujourd'hui, l’Ukraine a un nouveau parlement, dont plus de la moitié des membres ont été renouvelés, qui doit s’atteler à des tâches énormes pour réformer l’économie, la justice et la police, lutter contre la corruption et procéder à une décentralisation. Sur tous ces sujets, la coopération avec l’ensemble des parlements de l’Europe est absolument indispensable : c’est la condition d’une mise en place réussie d’une véritable démocratie en Ukraine.
Voilà pourquoi je souhaiterais, monsieur le président de la commission des affaires européennes, que nous puissions travailler avec les parlements de l’Union européenne pour accompagner nos collègues ukrainiens dans les difficiles réformes qu’ils doivent mettre en œuvre pour instaurer une authentique démocratie dans leur pays.
La parole est à M. le président de la commission des affaires européennes.
Mon cher collègue, j’ai été informé par le président Gérard Larcher, qui était avec vous et d’autres collègues à Moscou, des entretiens qu’il a eus avec le président Poutine et d’autres interlocuteurs.
Cette coopération interparlementaire est indiscutablement une voie à explorer. Le concept de « décentralisation approfondie », qui figure dans le communiqué publié à la suite de votre déplacement, peut être examiné dans le cadre de l’OSCE et dans le respect des deux principes fondamentaux rappelés précédemment par M. le secrétaire d’État : l’intégrité territoriale de l’Ukraine, avec le respect des frontières, et les accords de Minsk 2, même si l’on peut imaginer une certaine autonomie de certaines provinces, à l’instar de ce que nous connaissons en France avec les départements d’outre-mer.
Comme l’ont souligné tant M. le secrétaire d’État que de nombreux autres orateurs, les solutions sont uniquement pacifiques. S’il devait y avoir à Marioupol ou ailleurs des manquements aux engagements pris par les uns ou par les autres, ce délicat projet tomberait carrément à l’eau.
Nous sommes ouverts et réalistes : la coopération interparlementaire doit avoir lieu dans le cadre de l’OSCE.
Monsieur le secrétaire d'État, même si de nombreux collègues ont déjà évoqué la question de l’énergie, je me permets d’y revenir : le sujet est suffisamment important pour que l’on s’y attarde.
Avec un solde exportateur net de plus de 65 térawatts-heure en 2014, la France fait partie des tout premiers exportateurs d’électricité au monde. Grâce à l’utilisation soutenue des interconnexions européennes, dont le développement est au cœur de la stratégie pour une Union de l’énergie, elle est également le premier exportateur européen.
C’est notamment en s’appuyant sur la sécurité de cette production que l’Europe, en particulier l’Allemagne, a pu développer ces dernières années les énergies éolienne et photovoltaïque, des énergies certes renouvelables mais, surtout, extrêmement fluctuantes.
La stabilité, le volume et la compétitivité de notre production électrique, qui sont à la base de notre capacité exportatrice, proviennent évidemment en très grande partie de nos capacités nucléaires. Or cette énergie demeure le parent pauvre de la stratégie présentée le 25 février dernier.
La France a signé avec sept autres États membres un courrier soulignant le rôle important joué par l’énergie nucléaire dans la sécurité de l’approvisionnement, les faibles émissions de carbone et la compétitivité de l’économie. Ce courrier réclame également que les mécanismes de financement mobilisés dans le cadre de l’Union de l’énergie pour les grands projets d’infrastructures sobres en carbone puissent également être appliqués aux nouveaux projets de la filière nucléaire.
Monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis que la France tienne ce langage au niveau européen. Toutefois, le contenu de ce courrier semble en contradiction flagrante avec les objectifs affichés par le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.
Ce projet de loi prévoyait, avant son examen par le Sénat, un calendrier de réduction de la part du nucléaire dans notre bouquet énergétique, ainsi que le plafonnement du parc électronucléaire à sa puissance actuelle, ce qui aboutirait à la fermeture rapide de plusieurs réacteurs existants.
Si l’on souhaite adopter la vision résolument européenne d’un marché intérieur à la fois efficace et interconnecté et respectant les choix et les atouts énergétiques des différents États membres, il faut préserver les capacités françaises en matière nucléaire, car notre pays joue un rôle essentiel de stabilisateur pour l’ensemble du marché énergétique européen.
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer avec précision la stratégie poursuivie par le Gouvernement et la majorité en matière d’énergie nucléaire aux niveaux national et européen ?
Madame la sénatrice, vous évoquez le courrier que Ségolène Royal et plusieurs de ses homologues ont adressé à la Commission européenne et qui faisait valoir notre approche équilibrée, cohérente et globale de la politique énergétique de l’Union européenne, tout en soulignant la contribution qu’apporte l’énergie nucléaire dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la lutte contre le réchauffement climatique.
Le nucléaire participe aussi à la réduction de notre dépendance vis-à-vis des fournisseurs d’hydrocarbures, qui se trouvent pour la plupart hors de l’Europe ou, en tout cas, hors de l’Union européenne. Il s’agit, en outre, d’une filière industrielle marquée par l’excellence technologique et créatrice de nombreux emplois.
Vous le savez, pour développer les énergies renouvelables, on a besoin d’une production d’énergie stable en raison de l’intermittence de la production d’énergie d’origine solaire ou éolienne. C’est pourquoi nous sommes très attachés à défendre la part du nucléaire nécessaire dans notre bouquet énergétique.
La réponse nationale est le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, dont l’objet est tout à fait clair : comme vous l’avez rappelé, il plafonne au niveau actuel la production d’électricité d’origine nucléaire. Cela signifie que la production nucléaire ne diminuera pas. Certes, les anciennes installations, telle la centrale de Fessenheim, seront remplacées, mais des EPR sont en chantier, à commencer par celui de Flamanville.
L’objectif est de nous en tenir à 50 % d’énergie nucléaire, compte tenu de la montée en puissance des énergies renouvelables. Cela signifie que nous allons continuer à renouveler notre parc, à entretenir cette filière et à faire reposer une grande partie de notre production d’électricité sur cette technologie.
Nous demandons que, au niveau européen, cette possibilité ne soit pas remise en cause : les États membres doivent conserver ce libre choix. Certains pays ont, comme nous, choisi cette voie et investissent dans le nucléaire : c’est notamment le cas de la Grande-Bretagne, qui a d’ailleurs fait appel à la France pour son projet d’Hinkley Point C. D’autres pays ont, pour le moment, pris une décision de principe, sans avoir encore lancé de chantier. Nous espérons qu’ils iront au bout de la démarche, et ce point sera l’un de ceux qui seront abordés dans les discussions que le Premier ministre aura demain et après-demain avec son homologue polonaise. J’aurai le plaisir de l’accompagner en Pologne et je peux vous assurer que nous défendrons, bien entendu, les qualités de la filière nucléaire française.
Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de vous remercier de votre disponibilité et de la clarté de vos réponses. Je sais qu’il ne vous était pas facile d’être ce soir au Sénat dans la mesure où vous étiez il y a quelques heures encore à Strasbourg.
Je souhaite, avant que ce débat ne s’achève, vous adresser deux messages.
Le premier a trait au plan Juncker. Jeudi prochain, le commissaire Jyrki Katainen sera à Paris pour avancer sur la mise en œuvre du plan qui prévoit d’injecter 315 milliards d’euros dans l’économie des vingt-huit États membres. Au moment où nos collectivités territoriales voient baisser les dotations qui leur sont destinées – d’environ 14 milliards d’euros sur deux ans –, alors qu’elles ne sont responsables que d’à peine 5 % du déficit public et qu’elles réalisent quelque 60 % des investissements publics, tout ce qui pourra concourir à injecter de l’argent au plus près des territoires sera bénéfique.
Le Sénat, représentant les collectivités territoriales, est très attentif à ce que l’ensemble du territoire soit irrigué et à ce que les élus locaux de notre pays utilisent au mieux cette aide. Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d’État, que vous le soyez aussi, avec l’ensemble de vos services, pour que nous puissions aider les élus locaux à mobiliser ces fonds, principalement destinés à de gros projets, que ce soit par le biais de l’Association des régions de France ou de l’Association des maires de France. À l’heure où les régions vont entrer dans une phase de renouvellement, il ne faut pas oublier les autres élus territoriaux !
Mon second message est relatif à l’achèvement de la première phase du semestre européen.
J’aimerais partager votre optimisme, monsieur le secrétaire d’État ! Je suis en effet un peu inquiet. Certes, le président Juncker, dans sa communication du 13 janvier 2015, nous invite à interpréter le pacte de stabilité avec une certaine souplesse. Cependant, puisque la France est classée, avec la Croatie, la Hongrie, l’Italie et le Portugal, parmi les pays connaissant quelques difficultés, c’est-à-dire un déficit excessif, il nous enjoint en fait d’engager un certain nombre de réformes.
La réforme territoriale est pratiquement derrière nous. Je souhaite donc parler de la réforme qui est devant nous et dont nous débattrons ici au début du mois d’avril.
J’ai eu l’occasion de participer, hors de tout cadre parlementaire, à une table ronde où M. Emmanuel Macron était présent. Il a eu l’honnêteté intellectuelle de considérer que sa loi n’allait pas révolutionner la compétitivité de la société française et nous placer soudainement dans une situation extraordinaire.
Pour ma part, je pense que ce texte se caractérise par un certain nombre de rendez-vous manqués. C’est sur cela que le Sénat souhaite mettre l’accent, en adoptant une attitude absolument constructive.
Très franchement, je ne vois pas dans la mise des professions réglementées sous la tutelle de l’Autorité de la concurrence le moyen de rendre notre société plus compétitive. Je ne vois pas dans le travail du dimanche le moyen de donner plus de flexibilité à notre marché du travail.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai peur du rendez-vous du 10 juin 2015 : il nous faudra trouver non seulement 4 milliards d’euros, mais aussi les 3 milliards d’euros inscrits dans la loi de programmation militaire, soit un total de 7 milliards d’euros ! Voilà pourquoi je suis plutôt inquiet, tout en ayant envie de me tromper et de partager votre optimisme. Rendez-vous le 10 juin !
Quoi qu'il en soit, monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie encore une fois de votre disponibilité.
Personne ne demande plus la parole ?...
Nous en avons terminé avec le débat préalable au Conseil européen des 19 et 20 mars 2015.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 11 mars 2015, de quatorze heures trente à dix-huit heures trente :
Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, visant à faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement (n° 126, 2014 2015) ;
Rapport de Mme Claire-Lise Campion, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 238, 2014 2015) ;
Texte de la commission (n° 239, 2014 2015).
Proposition de loi sur la participation des élus locaux aux organes de direction des deux sociétés composant l’Agence France locale (n° 536, 2013 2014) ;
Rapport de M. Alain Anziani, fait au nom de la commission des lois (n° 315, 2014 2015) ;
Texte de la commission (n° 316 2014 2015).
Suite de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant (n° 799, 2013 2014) ;
Rapport de Mme Michelle Meunier, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 146, 2014 2015) ;
Texte de la commission (n° 147, 2014 2015) ;
Avis de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois (n° 139, 2014 2015).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée à vingt-trois heures vingt-cinq.