Séance en hémicycle du 5 novembre 2009 à 22h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Roger Romani.

Photo de Roger Romani

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 2.

L’article 2 de la même loi est ainsi rédigé :

« Art. 2. – La Poste et ses filiales constituent un groupe public qui remplit des missions de service public et exerce d’autres activités dans les conditions définies par la présente loi et par les textes qui régissent chacun de ses domaines d’activité.

« I. – Les missions de service public sont :

« 1° Le service universel postal, dans les conditions définies par le code des postes et des communications électroniques, notamment ses articles L. 1 et L. 2 ;

« 2° La contribution, par son réseau de points de contact, à l’aménagement et au développement du territoire dans les conditions fixées à l’article 6 de la présente loi ;

« 3° Le transport et la distribution de la presse dans le cadre du régime spécifique prévu par le code des postes et des communications électroniques ;

« 4° L’accessibilité bancaire dans les conditions prévues par les articles L. 221-2 et suivants et L. 518-25-1 du code monétaire et financier.

« II. – La Poste assure selon les règles de droit commun toute autre activité de collecte, de tri, de transport et de distribution d’envois postaux, de courrier sous toutes ses formes, d’objets et de marchandises.

« La Poste exerce des activités dans les domaines bancaire, financier et des assurances dans les conditions prévues au code monétaire et financier.

« La Poste est habilitée à exercer en France et à l’étranger, elle-même et par l’intermédiaire de filiales ou participations, toutes activités qui se rattachent directement ou indirectement à ses missions et activités telles que définies par la loi, ainsi que toute autre activité prévue par ses statuts. »

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

L’article 2 du projet de loi énumère les quatre missions de service public de La Poste : le service universel postal, la présence postale, le transport et la distribution de la presse, l’accessibilité bancaire.

Il faut le rappeler, la directive prévoit ces missions de service public puisqu’elle définit la notion de service universel postal comme « une offre de services postaux de qualité déterminée, fournis de manière permanente en tout point du territoire, à des prix abordables pour tous les utilisateurs ».

L’article 2 paraît en contradiction avec l’article 1er. En effet, lorsque La Poste sera devenue une société anonyme, elle sera vraisemblablement amenée à privilégier la rentabilité économique au détriment de ses missions de service public. Comment pourra-t-elle alors garantir le financement de ces dernières ?

En effet, l’énumération de ces missions à l’article 2 ne garantit en rien que La Poste disposera effectivement d’un financement suffisant et pérenne à la hauteur des besoins nécessaires. Si le projet maintient La Poste comme le prestataire universel pour une durée de quinze ans, l’absence de nouveaux moyens pour assurer ces missions pourrait contraindre la société anonyme à réduire ses coûts, ce qui se traduirait par la suppression d’emplois et le recul de la présence postale.

De plus, avec la fin programmée du secteur réservé, les moyens actuels de financement du service universel postal ne vont pas augmenter. On me rétorquera que le projet de loi prévoit la création d’un fonds de compensation qui sera alimenté par l’ensemble des opérateurs postaux, au prorata de leur chiffre d’affaires. Mais j’émets des réserves sur ce dispositif dans la mesure où l’expérience menée dans le domaine de la téléphonie fixe depuis la loi de 1996 n’est pas très probante.

Dans ce domaine, en effet, le fonds est principalement financé par l’opérateur historique, en l’occurrence France Télécom. Mais ses concurrents contestent très souvent le montant de la quote-part qui leur incombe, et ce malgré la décision prise par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP. Cet exemple montre bien les limites d’un tel système.

Pour terminer, je voudrais exprimer mon inquiétude quant à l’avenir du partenariat entre La Poste et les collectivités territoriales, après le changement de statut. En effet, alors que les agences postales font l’objet de conventions négociées, sans mise en concurrence, avec les collectivités territoriales, il se pourrait que La Poste soit contrainte, à l’avenir, de lancer des appels d’offres, mode normal de choix d’un prestataire en cas de délégation de service public. Si tel devait être le cas, nous n’aurions aucune garantie que les communes seraient systématiquement retenues pour exercer ces délégations.

Par ailleurs, je m’interroge sur la réaction des concurrents de la Banque postale à ce dispositif quand La Poste deviendra une société anonyme… si ce projet de loi est voté dimanche, voire ultérieurement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet article revient sur les missions de La Poste et de ses filiales en matière d’accessibilité bancaire.

Nous avons suffisamment répété que La Poste ne doit pas devenir une entreprise comme les autres, mais il convient également de rappeler que la Banque postale ne doit pas non plus devenir une banque comme les autres, particulièrement dans un contexte de crise financière.

Les banques, par leur politique de placements à risques, ont été à l’origine de la crise. Jusqu’à présent, la Banque postale est restée en dehors des pratiques les plus graves. Mais, aujourd’hui, la Société générale se rapproche de la Banque postale pour certaines de ses activités, espérant ainsi bénéficier du crédit de La Poste auprès de la population et de ses lieux d’implantation. La Société générale est-elle vraiment l’archétype d’une banque responsable, dotée d’un esprit de service public ?

C’est désormais la recherche de la rentabilité qui anime la Banque postale. La présence postale et le personnel disponible dépendent non pas du nombre d’opérations réalisées dans les bureaux de poste, mais du montant de ces opérations, en particulier de celles de La Banque postale. C’est la raison pour laquelle de plus en plus d’agences bancaires ferment.

Cette situation n’est pas acceptable. Si garantir 17 000 points de contact est une bonne chose, jamais un commerce ou une agence communale ne pourra faire office de véritable banque ! C’est se moquer de l’usager ! Et que se passe-t-il dans les Relais Poste implantés chez les commerçants ou dans les agences postales communales ? Nous n’avons aucune garantie de la pérennité de la présence de ces points de contact ni du respect de la confidentialité des opérations.

La présence de la Banque postale sur le territoire doit être une réalité, particulièrement dans les zones rurales ou urbaines sensibles.

Enfin, je souhaite dire un mot sur la vaste partie de Monopoly qui se joue à l’international. Que ce soit avec la Banque postale ou par le rachat d’opérateurs postaux dans d’autres pays, La Poste cherche aujourd’hui à se placer au premier rang pour participer au démantèlement des postes étrangères, dépossédant ainsi les populations locales de leurs services publics.

Monsieur le ministre, la Banque postale est privatisable depuis 2005. Si La Poste participe actuellement à la privatisation d’opérateurs étrangers, sera-t-il possible de refuser demain la sienne ?

Nous, les Verts, souhaitons que La Poste et la Banque postale restent un service public. La Banque postale ne doit pas se laisser grignoter par des groupes à la morale douteuse, elle doit conserver son esprit de service public. Certes, l’accessibilité bancaire est garantie dans le texte, mais, sur le terrain, la réalité est tout autre.

Plutôt que de brader la Banque postale, il faut garantir un service bancaire universel. Je reviendrai sur ce point lors de la discussion de mes amendements. Selon moi, un pôle financier public serait aujourd’hui nécessaire pour impulser une véritable politique financière décidée par l’État, notamment en matière de logement social, d’environnement, de crédit aux entreprises et aux particuliers. Nous espérons donc que la Banque postale sera sauvegardée.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

Cet article 2 a pour objet de définir les missions de service public dont La Poste est chargée. Loin de constituer une avancée, cet article est une simple compilation de dispositions existantes dont l’unique objectif est d’afficher que La Poste, même transformée en société anonyme, sera chargée de missions de service public.

Ces missions sont au nombre de quatre : fourniture du service universel postal, aménagement du territoire – c'est-à-dire présence de La Poste sur l’ensemble du territoire national –, distribution de la presse et accessibilité bancaire.

Monsieur le ministre, vous nous garantissez que ces missions, telles qu’elles sont reconnues par le projet de loi, seront préservées, et qu’elles seront même renforcées. Permettez-nous d’en douter, pour une simple et unique raison : elles ne seront plus financées.

En effet, alors que l’existence d’un secteur réservé permettait de financer l’accomplissement du service universel, celui-ci est purement et simplement supprimé par ce texte, au nom des impératifs communautaires de concurrence totale dans les activités postales.

Le fonds de compensation, dont le principe a été posé dans la loi relative à la régulation des activités postales, n’est toujours pas institué. À ce titre, des doutes subsistent sur sa capacité éventuelle à assurer un financement suffisant des obligations liées à la fourniture du service universel. En Italie, la création d’un tel fonds s’est révélée un échec.

Un fonds finance également la mission d’aménagement du territoire. Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’il n’est pas suffisamment abondé pour faire face au défi de la présence postale. Chaque année, plus de 100 millions d’euros restent à la charge de La Poste pour le financement de cette mission. Qu’en sera-t-il lorsque la taxe professionnelle aura été supprimée par votre majorité puisque, je le rappelle, ce fonds est abondé par l’exonération de taxe professionnelle dont bénéficie La Poste ?

Continuons cette liste, fort intéressante. L’aide à la presse va décroître de manière conséquente à partir de 2015. Et je ne parlerai pas de la fameuse accessibilité bancaire, dont les objectifs ont été laminés par la loi de 2005, qui prévoit l’obligation pour l’opérateur public d’offrir des services bancaires au plus grand nombre et non plus à tous, comme c’était le cas précédemment.

Nous le voyons bien, il manque à La Poste des financements pérennes pour remplir ses missions de service public. De cela, il n’est point question dans le projet de loi. En effet, au-delà de l’ouverture du capital, rien n’est prévu de manière durable. C’est donc juste une aide ponctuelle qui est envisagée par ce gouvernement.

L’État prévoit certes d’investir 1, 2 milliard d’euros dans La Poste, mais cette somme correspond uniquement au manque à gagner qu’il lui inflige depuis des décennies.

De plus, comment ne pas deviner, notamment à la lecture du rapport de la commission Ailleret, que les missions de service public vont décliner puisque La Poste sera incitée à être en équilibre sur ces prestations ? Cet équilibre ne pourra être obtenu qu’au détriment de l’aménagement du territoire, de la présence postale, de l’accessibilité bancaire et de l’aide à la presse.

Ne nous racontons pas d’histoires ! La transformation en société anonyme et l’ouverture à la concurrence vont priver l’opérateur en charge de missions de service public des moyens de les assumer. Nous ne pouvons donc croire à vos bonnes intentions.

Vous rappelez également dans cet article que La Poste est un groupe public. Soit, mais jusqu’à quand ? On connaît dorénavant la chanson… De plus, par « groupe public », on entend simplement signifier que la part détenue par des personnes publiques doit rester supérieure à 50 %. Dès lors, quelle garantie cette disposition offre-t-elle pour l’avenir de La Poste, qui est aujourd’hui détenue à 100 % par l’État ?

Les sénateurs du groupe CRC-SPG ne peuvent cautionner un tel recul pour La Poste et ses missions de service public. C’est pourquoi ils ont déposé des amendements visant à préciser les missions de service public, notamment concernant le réseau des points de contact.

Cela ne les empêche pas de rester opposés sur le fond à cet article, qui entérine la fin du service public à la française tel qu’il est assuré par La Poste aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, La Poste est soumise à des droits et obligations au titre de ses missions de service public d’envois postaux.

Le code des postes et des communications électroniques dispose ceci « Le service universel postal […] est assuré dans le respect des principes d’égalité, de continuité et d’adaptabilité en recherchant la meilleure efficacité économique et sociale. Il garantit à tous les usagers, de manière permanente et sur l’ensemble du territoire national, des services postaux répondant à des normes de qualité déterminées. […] Le service de distribution est effectué, dans des installations appropriées, au domicile de chaque personne physique ou morale […] ».

Le courrier doit donc être distribué dans chaque boîte aux lettres, y compris dans celles qui sont situées dans les voies de lotissements réservées à l’usage des colotis ou les voies dites privatives, à partir du moment où ces voies sont ouvertes à la circulation publique.

Or certains bureaux de poste ont récemment décidé de manière arbitraire et subite de ne plus distribuer le courrier dans les boîtes aux lettres de certaines voies dites privatives, contrairement à ce qui se faisait depuis toujours et bien que ces voies soient ouvertes à la circulation publique, c’est-à-dire qu’elles ne possèdent ni barrière, ni portail, ni digicode en interdisant l’accès et que tout véhicule puisse donc y accéder.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Cela signifie que les habitants devront faire installer à leurs frais une batterie de CIDEX, ou courrier individuel à distribution exceptionnelle, à l’entrée de ces voies. En tant que maire, ce n’est pas une décision que j’apprécierais, notamment sur un plan esthétique.

Les principes d’égalité, de continuité et d’adaptabilité ne sont donc plus respectés, et encore moins les obligations de La Poste en matière de qualité du service.

En conséquence, je me permets de vous demander, monsieur le ministre, de bien vouloir nous confirmer que vous veillerez à ce que les obligations de service public de La Poste, notamment le principe d’égalité de tous les citoyens, soient toujours respectées.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Il ne peut y avoir de régression dans les normes de qualité des services de La Poste, puisque ce serait contraire aux objectifs poursuivis par le présent projet de loi.

Les 2, 7 milliards d’euros ne sont pas un chèque en blanc à La Poste ! Les élus locaux veulent l’assurance d’une amélioration du service public de La Poste, que chaque Français réclame d’ailleurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Nous touchons véritablement là aux conséquences de l’article 1er que le Sénat a adopté cet après-midi. L’article 2 prend en effet soin de détailler les missions de service public de La Poste. Il s’agit de dispositions fondamentales de ce projet de loi. Chacune d’entre elles mérite donc d’être définie le plus précisément possible.

Dans cette perspective, je souhaiterais insister sur une mission en particulier, à savoir celle qui concerne la contribution de La Poste à l’aménagement du territoire.

En reconnaissant que La Poste participe à l’aménagement du territoire, admettez, monsieur le ministre, que l’activité postale n’est pas uniquement marchande : elle est incontournable si l’on veut maintenir et préserver le lien social et, d’une manière plus générale, ce qui fait l’identité de nos territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Mirassou

Cela peut aussi toucher à l’identité nationale, en effet.

La Poste est aussi de plus en plus fréquemment le dernier service public de proximité. Dans les campagnes, quand l’école a fermé, le bureau de poste demeure souvent le dernier symbole de la présence de l’État.

La Poste incarne donc de ce point de vue le dernier rempart avant la désertification institutionnelle, qui sévit parfois dans les zones que nous connaissons. À ce titre, elle ne peut ni ne doit être considérée comme une entreprise « comme les autres ». Elle est bien plus que cela !

N’ayons pas peur de le dire, chacun ici – je le crois, ou du moins je l’espère – considère que La Poste représente symboliquement le lien entre l’État et ses citoyens. La Poste est donc un véritable symbole de la République et, à ce titre, elle se doit d’être présente, opérationnelle et visible dans tout notre pays.

Quelle image renverrions-nous à nos concitoyens si, en guise de projet de « vivre ensemble », nous actions la disparition de La Poste des zones territoriales les plus défavorisées, les plus reculées ou bien encore les moins bien équipées ?

Nous considérons donc pour notre part qu’inscrire dans le texte de loi les missions de service public postal n’est pas suffisant si les moyens permettant de les mettre en œuvre ne sont pas assurés. Pour cette raison, nous défendrons des amendements visant à introduire dans le projet de loi des dispositions permettant de préserver un niveau important d’accessibilité aux services postaux dans la France tout entière.

Cela revêt, je crois, une importance décisive ; sinon le principe d’égalité des citoyens serait définitivement ignoré. Les Français, où qu’ils habitent, quelles que soient leurs conditions sociales, ne doivent pas se sentir abandonnés par l’État. Ils ont donc droit à ce que La Poste fonctionne partout et qu’elle soit aussi, très concrètement – c’est un exemple parmi d’autres –, ouverte à tous avec des horaires d’ouverture suffisants.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, jusque-là nous n’avons pas réussi à nous convaincre les uns les autres, ni des dangers que le changement de statut de La Poste fait courir au service public, selon nous, ni des merveilles à en attendre, selon vous. Pourtant, nous sommes apparemment tous d’accord sur un point, rappelé d’ailleurs clairement par l’article 2 : le groupe public La Poste remplit des missions de service public.

« Remplir des missions de service public » signifie que La Poste a des obligations qu’un opérateur dont l’ensemble des activités s’exercent dans le cadre concurrentiel ne remplirait pas, parce qu’elles lui feraient perdre de l’argent. L’exercice du monopole par l’établissement public La Poste a donc permis pendant longtemps de financer ces obligations de service public.

Dès lors que l’essentiel de son activité s’exerce dans le cadre concurrentiel, se pose le problème du financement de ce qu’il faut bien appeler le « surcoût de service public » mis à sa charge. Celui-ci n’a pas été résolu de manière satisfaisante jusqu’à ce jour.

Bienvenu hier, un dispositif pérenne et suffisant de ce financement, avec le changement de statut et la disparition de ce qui restait de monopole, est devenu nécessaire.

Tel est l’objet des amendements que nous présenterons. Les premiers visent à consacrer le principe de l’obligation du financement intégral et pérenne des missions de service public de La Poste. Les autres tendent à décliner les modalités de ce financement s’agissant du « service universel postal » et de la présence postale sur l’ensemble du territoire national. À cet égard, deux choses sont indispensables : d’une part, donner une existence réelle et non virtuelle au fonds postal national de péréquation territoriale en le sortant des comptes de La Poste ; d’autre part, lui assurer des ressources réelles et non virtuelles comme aujourd’hui.

L’équivalent d’exonérations fiscales n’est pas une ressource, c’est d’abord un signal envoyé à Bruxelles pour ne pas être accusé de bénéficier d’avantages concurrentiels.

Quelle que soit sa position quant au statut souhaitable pour La Poste, chacun ici peut partager cette analyse et, si son souci de pérenniser la présence postale sur l’ensemble de notre territoire est sincère, soutenir nos propositions, ou d’autres du même type si elles sont meilleures, de localisation du fonds postal national de péréquation territoriale ou de recettes pour abonder celui-ci. Il faut absolument en finir avec le bricolage actuel. Les élus ruraux ne comprendraient pas que le Sénat ne réponde pas à leur attente.

Mes chers collègues, avec cet article 2 sonne un peu l’heure de vérité. Graver dans le marbre les missions de service public de La Poste en lui refusant les moyens identifiables et pérennes de les remplir serait pure hypocrisie. C’est dans cette catégorie que je range les propositions qui s’obstinent à gager le fonds de péréquation sur des exonérations fiscales, fragiles et difficilement identifiables, fussent-elles supérieures à celles d’aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question des missions de service public de La Poste se pose aussi avec une très grande acuité dans les outre-mer du fait de leur configuration géographique, de leur situation économique, d’un marché restreint et de leur éloignement par rapport au territoire métropolitain. C’est un fait reconnu. C’est d’ailleurs pourquoi les départements d’outre-mer ont été inscrits en tant que « zones prioritaires » au titre de la mission d’aménagement du territoire de La Poste. Pourtant, la situation de La Poste est loin d’être satisfaisante au regard des différents critères listés.

Hier, en réponse aux différentes interventions sur la motion référendaire, M. Estrosi a cité la Guyane pour illustrer son souci d’élargir le maillage territorial de La Poste dans toutes les zones du territoire français, surtout dans les zones les plus isolées, comme celles qui se situent à la frontière amazonienne.

La Guyane se singularise, il est vrai, par sa configuration géographique : un territoire continental immense avec beaucoup de zones enclavées, accessibles soit par le fleuve, soit par avion.

En dépit des déclarations de M. le ministre, force est de constater que la Guyane accuse un sérieux retard structurel en matière postale. Les chiffres sont parlants et saisissants : environ un bureau de poste pour 7 000 habitants, contre un pour 4 000 habitants en métropole.

Depuis plusieurs années, La Poste tient en Guyane un discours fondé sur l’ouverture à la concurrence, les directives européennes, la mondialisation et les réorganisations nécessaires liées à cet environnement. Sa logique d’intervention ou d’implantation est celle de n’importe quelle entreprise qui vise la rentabilité financière.

Il va donc sans dire qu’aucune des quatre missions de service public figurant dans ce texte, à savoir le service universel postal, le service public du transport et de distribution de la presse, la mission d’accessibilité bancaire et la mission d’aménagement du territoire, n’est remplie dans ce département. Je vais le démontrer à travers quelques exemples.

Le service universel postal et le service public du transport et de distribution de la presse, qui sont des services de base, déjà en difficulté, tendent à s’affaiblir de plus en plus en raison de la mutualisation forcée et non logique des moyens, de l’ouverture de relais-poste en lieu et place d’agences postales. Tous ces changements ne font que détériorer un service qui est loin d’être de qualité.

La mutualisation de communes éloignées conduit à accepter une offre postale de moindre niveau et oblige de fait les administrés à effectuer de nombreux kilomètres sur les routes et les fleuves. Ce sont les usagers qui sont les premières victimes de cette politique : beaucoup de files d’attente, un courrier à J+8, et encore… En conséquence, la grogne monte, et de plus en plus d’habitants dénoncent ces insuffisances de La Poste, comme ce fut le cas récemment en matière de distribution postale à Apatou, commune enclavée le long du fleuve Maroni.

Concernant la mission d’accessibilité bancaire, la Banque postale reste souvent, pour les plus démunis, la seule banque où ouvrir un compte. Je rappelle que les prestataires de minima sociaux sont pour la plupart détenteurs d’un compte à La Poste.

Cependant, des questions se posent actuellement quant à la pérennisation de la Banque postale en raison de la mutualisation, une fois de plus très fréquente, de certaines activités avec les Antilles, voire la métropole.

Au centre financier de la Guyane, c’est le cas pour le traitement des dossiers financiers, qui dure plusieurs semaines.

En outre, il n’y a toujours pas de réelle accessibilité bancaire, et les problèmes relatifs à l’alimentation de fonds sont récurrents. Cette situation a d’ailleurs déclenché un mouvement de contestation en septembre dernier à Apatou, commune du fleuve Maroni.

J’en viens, enfin, à la mission d’aménagement du territoire, une mission qui prend tout son sens dans les zones fragilisées connaissant des problèmes d’isolement, d’enclavement.

En Guyane, pour les raisons que j’ai énoncées précédemment, cette mission est particulièrement importante. En effet, le nombre insuffisant de « points poste » par rapport à la configuration géographique rend difficiles les conditions de travail des agents, qui parcourent de nombreux kilomètres en voiture, à pied ou en pirogue. Récemment, deux facteurs âgés de quarante ans sont décédés d’une crise cardiaque, dont l’un durant son service. Sans émettre de conclusions hâtives, on peut toutefois s’interroger sur ces événements.

Aussi, je suis certain que la privatisation de La Poste, avec son corollaire, la recherche de la rentabilité financière, ne fera qu’aggraver une situation qui est déjà très fragile et pénalisera une fois de plus les ultramarins. Nous connaissons l’attachement fort des populations d’outre-mer à l’un des derniers services publics garantissant à chacun, quelle que soit sa situation sociale ou géographique, un accès égalitaire à un bureau de poste, à la distribution du courrier ou encore à l’accessibilité bancaire.

Alors, au nom des principes d’égalité et d’équité, principes figurant dans la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire de 1995, et tout particulièrement des principes « d’unité de la nation, de solidarité entre citoyens et d’intégration des populations », nous devons être certains que La Poste continuera à assurer ses missions de service public sur l’ensemble du territoire français et que l’État se portera garant de leur financement.

C’est le sens des amendements que je vous proposerai.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet article est au moins aussi important que l’article 1er puisqu’il traite des quatre missions de service public de La Poste, à savoir le service universel postal, le service public du transport et de la distribution de la presse regroupé avec le service universel au sein du service public des envois postaux, la mission d’accessibilité bancaire et, bien sûr, la mission d’aménagement du territoire.

Comme l’a souligné notre rapporteur, Pierre Hérisson, La Poste constitue un acteur majeur de l’aménagement du territoire par son réseau de points de contact et, de ce fait même, joue un rôle social indispensable en milieu rural.

Les élus des collectivités territoriales souhaitaient, à juste titre, que soient inscrites très clairement dans la loi de véritables garanties sur le maintien des missions de service public de La Poste. Je pense que le présent article sera en mesure de leur donner satisfaction.

Ils souhaitaient également obtenir des garanties sur le volume et la pérennité du fonds postal national de péréquation territoriale qui concourt à l’aménagement du territoire et, bien entendu, sur le maintien d’un maximum de bureaux de poste ou de points de contact en milieu rural.

À cet effet, le groupe de l’Union centriste a proposé que la loi fixe très clairement le nombre minimum de points de contact de La Poste à son niveau actuel, c’est-à-dire à 17 000, et réaffirme l’engagement de l’État dans le maintien de la présence postale territoriale.

Je remercie M. le rapporteur d’avoir été sensible à notre demande en acceptant de défendre un article additionnel après l’article 2 – l’article 2 bis nouveau – prévoyant que le réseau de La Poste devra compter au moins 17 000 points de contact, tout en précisant cette notion. Ainsi, le contrat pluriannuel de présence territoriale devra élaborer des règles concernant notamment les horaires d’ouverture et la gamme de services postaux et financiers qui seront offerts à la population.

M. le rapporteur est allé encore plus loin puisqu’il défend un article additionnel visant à ce que La Poste apporte 65 millions d’euros supplémentaires au fonds postal national de péréquation territoriale, ce qui devrait permettre à cette entreprise de financer de manière plus satisfaisante sa mission d’aménagement du territoire.

Nous savons que ces financements avaient pour contrepartie le non-paiement de la taxe professionnelle, mais nous entendons bien que la suppression progressive de celle-ci ne remette pas en cause l’engagement de ces 65 millions d'euros, qui demeurent pour nous le garant de la présence postale sur l’ensemble de notre territoire.

J’aimerais être rassuré sur ce point, monsieur le ministre.

Dans mon département, nous avions pensé que le milieu périurbain risquait d’être encore plus pénalisé que le monde rural, et nous avions souhaité y conserver un certain nombre de bureaux de poste. Nous avons été rappelés à l’ordre et, finalement, nous sommes satisfaits de ce qui est en train de se passer.

Pour ma part, je crois donc sincèrement que, après avoir approuvé l’article 1er de ce projet de loi en renforçant le caractère public de l’entreprise La Poste, puis en approuvant l’article 2 et les articles additionnels qui en précisent la mission territoriale, le Sénat aura fait œuvre utile et répondu aux principales préoccupations qui se sont fait jour depuis le dépôt de ce texte.

C’est donc un acte de confiance que j’évoque en cet instant, en espérant que nous retrouverons la sérénité utile pour préparer ensemble véritablement l’avenir de La Poste.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Ce n’était certes pas vous, monsieur le ministre, mais on dit que le Gouvernement est un…

Mes chers collègues, l’article 2 de ce projet de loi est essentiel pour plusieurs raisons.

Nous connaissons des mutations sociologiques, économiques et écologiques décisives. Dans ce contexte, la continuité des services publics sur l’ensemble du territoire, y compris dans les lieux les plus démunis, mérite une attention particulière.

Je voudrais attirer l’attention du Sénat sur la situation de nos concitoyens. L’exclusion, la solitude se développent, de nombreuses familles monoparentales sont en difficulté. Nous assistons à une envolée de la pauvreté et de la précarité : le rapport du Secours catholique est à cet égard extrêmement inquiétant. Ne sous-estimons pas cette situation, car elle risque de nous revenir comme un boomerang !

Les services publics, en particulier La Poste, restent souvent le seul lien social pour certaines personnes. Si nous ne prêtions pas attention à ces questions dans ce projet de loi, nous serions inévitablement amenés à nous interroger sur notre qualité de parlementaires.

Face à la concurrence qui se prépare aujourd'hui, deux attitudes seront possibles : soit on l’affrontera en modernisant La Poste, soit on recherchera la rentabilité à tout prix, en transformant La Poste en une société privée classique où la rentabilité financière sera l’alpha et l’oméga de toute action et de toute stratégie. Dans ce dernier cas, les coûts seront volontairement réduits, les effectifs seront systématiquement baissés, le maximum de bureaux de poste de plein exercice sera fermé, certaines activités abandonnées, et La Poste se coupera inévitablement d’une grande partie de la population.

C’est malheureusement ce qui se passe déjà dans toute l’Europe. La singularité française, avec son EPIC, c’est justement de faire rimer modernisation et maillage du territoire. Nous devons faire en sorte de répondre à cette mise en concurrence en se servant de l’aménagement du territoire comme d’une force et non pas comme d’une faiblesse. Or je crains que la direction actuelle de La Poste ne considère plutôt l’aménagement du territoire comme un handicap…

Ainsi, en pleine crise financière, la Banque postale avait une occasion unique de dire qu’elle n’était pas une banque comme les autres, qu’elle n’avait pas trempé dans cette bulle spéculative et qu’il était possible d’y placer son argent en toute sécurité. Une telle campagne n’a pas eu lieu parce que c’était considéré comme ringard !

C’est pourquoi, tout au long du débat, nous allons proposer des amendements pour éviter toute restriction du service postal et défendre la continuité du service public en toutes circonstances.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. –Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Chacun a désormais bien compris que le Gouvernement prend le prétexte de la directive européenne du 20 février 2008 pour changer le statut de La Poste. Il a été abondamment démontré ces derniers jours que le processus d’ouverture progressive à la concurrence du secteur postal n’implique nullement le changement de statut de La Poste, qui, de personne morale de droit public, va devenir une société anonyme puisque l’article 1er a été adopté. Dès lors, on peut légitimement se demander si ce n’est pas le premier pas vers une privatisation qui ne dit pas son nom, du moins pas encore.

La majorité tente de justifier sa démarche en invoquant une condition nécessaire à la concurrence. Disons-le une nouvelle fois – mais il vaut mieux se répéter que se contredire –, la concurrence ne rend nullement nécessaire le changement de statut de La Poste, cet établissement dont la mission de cohésion et de service sur nos territoires va bien au-delà de l’aspect purement financier et devrait justifier l’engagement des pouvoirs publics.

Acheminer le courrier, délivrer un service bancaire universel et assurer une présence sur l’ensemble des territoires ruraux, de montagne, mais aussi dans les zones urbaines sensibles, c’est une mission qu’aucune entreprise privée ne souhaitera remplir, qui ne représentera aucune valeur ajoutée. Est-ce bien là ce que nous voulons pour La Poste ?

L’article 2 cherche à sauvegarder l’essentiel des missions de service public. C’est déjà un aveu ! Le statut de société anonyme est donc clairement une menace pour l’avenir de La Poste et pour le service postal en général. La Poste se trouvera en effet opposée à des concurrents qui se positionneront sur les secteurs d’activités offrant la plus forte valeur ajoutée.

Bien sûr, les missions de service public de La Poste restent un dernier rempart face à des dérives prévisibles ; mais pour combien de temps ?

Ne cherchez pas à nous faire croire que ce changement de statut ne s’accompagnera pas, à terme, de mesures de réorganisation et d’adaptation, comme la fermeture de bureaux de poste, voire des réductions d’effectifs, puisque c’est déjà le cas !

C’est sans doute pour cette raison, mes chers collègues, que le conseil général de la Savoie a récemment rejeté à l’unanimité le changement de statut de La Poste et s’est prononcé pour le maintien des services publics quels que soient les territoires.

Ce conseil général, que vous connaissez bien, est présidé par un personnage illustre, Hervé Gaymard, ancien ministre de l’économie. Dans ses rangs, on compte Michel Bouvard, député ô combien important, membre de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que notre collègue Jean-Pierre Vial, qui siège dans cet hémicycle sur les travées de l’UMP.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Et M. Thierry Repentin !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Les élus de ce département ont voté en faveur du maintien du service tel qu’il existe, car ils connaissent bien les effets, dans les territoires de montagne, de la dernière modification de La Poste, dont ils avaient d’ailleurs dénoncé les risques. Notre ancien collègue Pierre-Yvon Trémel s’était ainsi battu ici pour que la présence du service public de La Poste soit effectivement assurée dans tous les territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Sénateur d’un département de montagne, je mesure d’ores et déjà les difficultés et les retraits du service postal dans notre territoire.

Élu d’un canton situé en zone urbaine sensible, je veux témoigner du fait que, à la suite de deux agressions dans une agence de La Poste, les employés ont fait valoir leur droit de retrait. Voilà un an que nous discutons avec cette entreprise, afin que la mission de service public soit assurée. Peut-être allons-nous déboucher sur une solution dans les jours qui viennent. Cela fera néanmoins un an de discussions... Mais qu’en sera-t-il lorsque nous aurons en face de nous une entreprise privée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Qui assurera sur le long terme l’accessibilité aux services bancaires, notamment dans les zones urbaines sensibles, où les gens privés de compte chèques n’ont plus comme seul recours que le livret A, service aujourd’hui gratuit et obligatoire pour toute personne qui le demande, disposition que l’on ne retrouve d’ailleurs pas dans le projet de loi, notamment à l’article 2 ?

Voilà ce que je voulais vous dire sur la base d’une expérience de territoire et non d’une approche dogmatique, monsieur le ministre, mes chers collègues.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

J’ai apprécié les interventions précédentes, et je voudrais en particulier m’inscrire dans la lignée des propos de Mme Des Esgaulx, qui a mis en avant les nécessités de service public. Au travers d’exemples que nous pouvons les uns et les autres puiser dans nos territoires, nous pourrons mieux apprécier, me semble-t-il, ce que devrait être le service public de La Poste.

Je pense avoir été l’un des seuls présidents d’une commission départementale de présence postale à avoir démissionné de ses fonctions, comme s’est également empressé de le faire mon successeur lorsque cette commission a été remise en place. Pourquoi ?

Je suis élu du département de l’Ariège, un département qui présente certaines spécificités, pas uniquement rurales d’ailleurs. Le service public de La Poste est actuellement marqué par un certain nombre de dysfonctionnements sur lesquels, au moment où nous allons essayer de préciser, par nos amendements, les missions de service public de La Poste, nous souhaitons des éclaircissements.

Si les élus de ce département, au-delà de tous les clivages et de toutes les sensibilités politiques, ont considéré que la situation n’était plus tenable, c’est parce qu’ils rencontraient des difficultés, qui, à défaut d’être exceptionnelles, sont bien réelles.

Il s’agit, premièrement, du déclassement des bureaux de poste. Voilà cinq ans, mon département comptait quatre-vingt-cinq bureaux de poste de plein exercice ; aujourd’hui, il en reste une douzaine. Il s’ensuit la mise en place d’agences postales communales ou, quand c’est impossible, de points de contact ; je vous laisse apprécier cette dégringolade considérable, qui a un impact tout à fait significatif dans un département comme le mien !

Mais le plus grave, c’est la raison pour laquelle on en arrive là, parce qu’il faut toujours justifier la fermeture d’un bureau de poste et la demande d’ouverture d’une agence postale communale pour laquelle on doit faire appel aux collectivités.

C’est assez simple. On commence par diminuer l’amplitude horaire du bureau de poste : les gens, ne connaissant pas les jours d’ouverture du bureau de poste, ont alors quelques difficultés à utiliser ce service.

Je prendrai l’exemple du canton de Quérigut, l’un des plus petits de France, me semble-t-il, avec celui de Barcelonnette dans les Alpes de Haute-Provence. Situé en Ariège, non loin des départements de l’Aude et des Pyrénées-Orientales, ce canton de Quérigut est totalement enclavé en zone de montagne. Pendant douze ans, j’ai été maire d’une petite commune de ce canton, qui se situe à environ trois quarts d’heure ou une heure d’une ville un peu importante, que ce soit du côté de l’Ariège ou de l’Aude, à Quillan.

Aujourd’hui, les malheureux habitants – 500 au maximum, 450 l’hiver – qui continuent à vivre dans le pays du Donezan, situé dans le canton de Quérigut, ne peuvent profiter de ce qui tient lieu de bureau de poste qu’un jour et demi par semaine !

La Poste ne doit certes pas être le bouc émissaire de toutes les difficultés rencontrées, j’en conviens, et d’autres services publics sont également sources de problèmes. Mais cela signifie, en définitive, qu’il vaut mieux, à la limite, inciter les habitants à déménager dans un canton plus peuplé !

Deuxièmement, si ces bureaux de poste sont déclassés, c’est en raison du traitement qu’ils subissent. Je connais de très nombreux exemples de situations ayant exaspéré les maires. Ainsi, dans des bureaux de poste de montagne, par exemple, on ne remplace plus les personnels en congé de maladie, et même plus les personnels en congé annuel !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

On multiplie les handicaps, et les difficultés deviennent extrêmement importantes, amenant à s’interroger sur la signification et la validité des termes « service public ». « Service public », cela veut dire que toute personne, quel que soit l’endroit où elle habite sur le territoire national de notre République, y compris dans le canton de Quérigut, a droit aux mêmes services que d’autres citoyens vivant dans un contexte plus favorable.

À cela s’ajoute le problème du courrier qui n’arrive plus, ou qui arrive très tard…

Nous travaillons maintenant, et ce depuis de nombreux mois, contre le service public, lequel subit une rétrogradation tout à fait inquiétante. Personne n’aurait compris dans mon département que, au moment où nous nous exprimons sur La Poste, je ne signale pas ce cas tout à fait particulier, malgré les efforts de certains responsables de la direction de La Poste pour apporter des solutions.

Nous devons veiller à redonner son véritable sens au service public.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. –Mme Nathalie Goulet applaudit également.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Il n’est pas d’usage de répondre aux interventions sur l’article, mais je voudrais, par égard pour les membres du Sénat, apporter de brèves réponses aux interrogations que vous avez toutes et tous manifestées ce soir.

Douze orateurs se sont exprimés. Je ne reprendrai pas systématiquement ce qui a été dit puisque nous aurons l’occasion d’y revenir cette nuit et demain toute la journée ; mais je pense que, grâce à votre attachement au service public et aux missions d’aménagement du territoire, nous pourrons terminer cette affaire le plus tôt possible, et ce sera le mieux pour le service public.

Sourires

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Monsieur Fischer, il n’y a jamais aucune pression de ma part : avec moi, vous le savez, tout est proposé, rien n’est imposé !

Sourires. – Applaudissements sur certaines travées de l’UMP

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Non, ce n’est pas le Club Med, c’est bien en dessous !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je rappellerai d’abord que rien n’imposait au Gouvernement de reprendre dans les articles 2, 2 bis et 2 ter des dispositions relatives aux missions de service public de La Poste. La loi du 2 juillet 1990, dans son article 6, a fixé ces missions. Le Gouvernement a choisi de les rappeler et de les conforter dans ce texte pour bien montrer que le changement de statut de La Poste n’obère pas ces missions de service public.

Je répondrai sur ce point à Mme Des Esgaulx et à M. Mirassou.

Madame Des Esgaulx, vous avez – cela ne m’étonne d’ailleurs pas – parfaitement rappelé les missions du service public. Vous êtes juriste et élue de la Gironde. C’est le « maître de Bordeaux », Léon Duguit, qui a fixé la conception matérielle du service public, laquelle a toujours été confirmée par le Tribunal des Conflits et le Conseil d’État.

Monsieur Mirassou, vous êtes élu de Toulouse, …

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

… où professait effectivement le doyen Maurice Haurioux, qui a toujours privilégié la définition institutionnelle du service public sans prendre en compte les missions du service public. Dans notre pays, entre la définition matérielle et la définition institutionnelle, le choix est toujours allé vers la première, qui portait sur le contenu, et ce tant pour le service public que pour la Nation.

C’est ce choix que le Gouvernement continue de faire aujourd’hui. Le fait d’avoir confié à une société anonyme le soin d’assurer des missions de service public n’a rien de nouveau, et cela a été confirmé par le Conseil d’État à de multiples reprises, notamment en 1972, dans l’arrêt Société Unipain.

Il s’agit de poursuivre notre grande tradition du service public avec La Poste…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Bourquin, vous le savez parfaitement, et je sais que vous le savez ! (Sourires.) Il faut aussi de temps en temps pouvoir parler. C’est l’objet de nos débats.

Oui, La Poste a un statut de société anonyme…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Fischer, si vous ne me laissez pas terminer mes phrases, comment allons-nous pouvoir dialoguer ? Après, vous me direz que je ne vous parle pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Cela fait deux fois que vous parler de « société anonyme » !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Cet après-midi, le Sénat a voté l’article 1er, qui prévoit la transformation de La Poste en société anonyme.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Ce texte doit bien entendu être soumis à l’Assemblée nationale, mais on retrouve ces dispositions dans de nombreux services publics, et il n’y a rien là de très novateur.

M. Repentin nous a dit que la concurrence ne nécessitait pas un changement de statut. Je ne veux pas revenir sur cette question parce que M. Repentin, qui est remarquablement intelligent…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

… et au courant de toutes les choses de la vie publique, sait parfaitement que ce qui nous pousse à changer de statut, c’est non pas un problème de concurrence mais le régime des aides européennes. La Poste ayant besoin d’argent…

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Bourquin, acceptez-vous de dialoguer ? Si vous devez être le seul à parler, je peux me taire !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Ce sera votre choix ! Mais vous avez exposé votre thèse, et j’expose maintenant la mienne. Si vous n’écoutez que la vôtre, vous penserez que vous avez raison même quand vous aurez tort !

Rires sur les travées de l’UMP

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Il faut accepter d’écouter, de dialoguer, sinon cela ne marche jamais. Je suis pour le dialogue, je vous explique ma thèse, car vous avez déjà exposé la vôtre !

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Je ferai l’antithèse et quelqu’un fera la synthèse !

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Moi, je suis toujours pour la synthèse, et c’est ce qui vous manque en ce moment !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

M. Martial Bourquin. Nous, nous savons ce que c’est, la synthèse !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je voudrais simplement ajouter deux ou trois choses, qui marquent bien le caractère de service public de La Poste.

Vous nous avez dit que la Banque postale ne devait pas être une banque comme les autres.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je suis content du soutien de M. Fischer ! Oui, cette banque n’est pas comme les autres : 50 % de sa clientèle perçoit des minima sociaux. Elle est la seule à remplir cette mission d’accessibilité bancaire, et elle va continuer à le faire. Cette mission de service public sera en effet poursuivie.

Monsieur Teston, le financement des missions de service public est assuré ; nous en discuterons lors de l’examen des trois articles que j’ai rappelés tout à l'heure, notamment l’article 2 ter. La commission, qui a beaucoup travaillé sur ce sujet, formulera des propositions, et nous trouverons une solution.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. Si vous voulez la connaître, il faut vous dépêcher d’arriver à l’examen de l’article 2 ter !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Patient, il est vrai que certains problèmes se posent dans les départements d’outre-mer, notamment en Guyane. Mais il y a tout de même au moins un bureau de poste par commune !

Monsieur Repentin, il y a montagne et montagne ! Vous le savez bien, en Savoie, c’est en haute montagne que La Poste fait ses meilleurs chiffres ! Elle n’a donc pas du tout envie d’en partir. D’ailleurs, je ne vous vois pas protester…

Mesdames, messieurs les sénateurs, tels sont les éléments de réponse que je tenais à vous apporter. J’aborde toutes ces questions dans un esprit de dialogue et d’ouverture, et je suis certain que nous parviendrons tous ensemble à faire en sorte que La Poste, société anonyme, …

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

M. Michel Mercier, ministre. … détenue uniquement par l’État et ses « excroissances », assure totalement ses missions de service public.

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

L'amendement n° 37, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Claude Danglot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

Nous demandons la suppression de l’article 2, article essentiel du projet de loi, qui consacre La Poste non plus comme un service public, mais comme une entreprise gérant, pour une partie de son activité, des missions de service public. Nous refusons cette transformation.

À y regarder de plus près, des raisons particulières justifient également notre demande de suppression, surtout lorsque l’on prend connaissance de vos propos sur les missions de service public, monsieur le ministre.

Tout d’abord, nous notons que les fameuses missions de service public sont placées au même niveau que les autres activités de La Poste. Nous aurions pu penser que, pour mettre l’accent sur ces missions, vous ayez décidé de les détailler dans un article spécifique. Eh bien non, ce n’est pas ce que vous avez fait ! Vous placez sur un pied d’égalité les missions de service public et les activités concurrentielles, financièrement rentables, de La Poste. Le risque de dérive est donc réel.

Ensuite, dans un langage froid et technocratique, vous réduisez la notion de service public à des missions, faisant l’impasse complète sur les objectifs et les moyens à mettre en œuvre pour les assurer.

En outre, cet article est rédigé comme si la définition du service universel relevait de la loi. Or, vous le savez bien, ce n’est pas si simple.

Si le service universel postal relève bien des articles L. 1et L. 2 du code des postes et des communications électroniques, ceux-ci restent relativement généralistes et peu précis, à tel point d’ailleurs que le cinquième alinéa de l’article L. 2 prévoit qu’« un décret en Conseil d’État, pris après consultation de La Poste, et après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques, précise les caractéristiques de l’offre de service universel que La Poste est tenue d’assurer ».

Ainsi, La Poste devenue entreprise privée, avec bientôt des actionnaires privés, participera à la définition des activités relevant du service universel ; il vous suffira donc de restreindre, par décret, le service universel. C’est dire les garanties de service public que vous nous donnez dans ce projet de loi !

Nous pourrions également détailler, point par point, toutes les dispositions incohérentes, imprécises et dangereuses que contient cet article, mais le temps qui nous est imparti pour défendre un amendement est trop court pour ce faire. Aussi y reviendrons-nous dans le cadre des explications de vote.

Quoi qu’il en soit, nous demandons à bon droit la suppression de l’article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

L’article 2 vise à conforter les quatre missions de service public de La Poste, en les regroupant dans un même article. Pourquoi vouloir supprimer l’article 2 quand on est attaché au service public ?

Comme M. le ministre vient de le souligner, les missions de service public de La Poste sont au nombre de quatre : le service universel postal, le service public du transport et de la distribution de la presse, la mission d’accessibilité bancaire et la mission d’aménagement du territoire.

Elles permettent à La Poste de ne pas être une entreprise comme les autres ; elle est l’emblème du service public à la française.

Le contenu de ces missions est défini dans diverses dispositions législatives, notamment dans l’article 2 de la loi du 2 juillet 1990. Comme l’a souligné voilà quelques instants M. le ministre, le Gouvernement n’avait nullement l’obligation de les rappeler ici ! Pourtant, il a fait le choix de renforcer et de sécuriser les missions de service public !

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui n’est pas nécessaire.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Monsieur Danglot, j’ai envie de vous dire : Chiche ! Supprimons l’article 2, ne faisons plus référence aux 17 000 points de contact et ne précisons plus le contrat de service public de La Poste !

Mais nous avons tous ici, me semble-t-il, envie d’approfondir ces questions, en garantissant notamment le maintien des 17 000 points de contact et en prévoyant le financement de la mission d’aménagement du territoire.

Dans ces conditions, le Gouvernement ne peut être que défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

M. Jean-Claude Danglot. À mon avis, il faut surtout supprimer votre projet de loi, monsieur le ministre !

Exclamations sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Danglot

En réalité, vous ne souhaitez pas du tout engager le débat sur ce terrain, qui, je le sais, ne relève pas de la loi ; mais celui-ci concerne pourtant la vie de nos concitoyens et la qualité des services que La Poste est appelée à leur rendre.

Aussi importante que soit la nécessaire définition des actes que recouvrent ces missions, un service public ne saurait se définir seulement ainsi. Il importe également de prévoir la manière de le mettre en œuvre. Il s’agit, par exemple, de prendre en considération le fait que les acteurs de ce service public sont bien en permanence au service de leur public, c'est-à-dire des usagers et non des clients, auxquels on ne fait que rendre le service qu’ils ont payé.

Être à la disposition d’un usager, dans le cadre d’un service public, c’est être à son écoute et être disponible pour l’aider.

Au nom du maintien et du développement d’un vrai

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Ce projet de loi s’inscrit dans un contexte de libéralisation totale des activités postales, et l’article 2 en tire les conséquences.

La mention « service public des envois postaux » disparaît. On bascule du service public au service universel, en nous faisant croire que l’on parle de la même chose. Or, en réalité, on remplace le service public par des groupes privés en concurrence et aux marges du marché, qui assureront quelques prestations obligées, mais minimales, au titre du service universel.

Le service universel, c’est en réalité le service au rabais pour les plus démunis.

Monsieur le ministre, les missions de service public de La Poste sont rappelées dans l’article 2 du projet de loi, mais la question de leur financement n’est jamais abordée. Croyez-vous que les opérateurs privés s’en soucieront ? Croyez-vous que La Poste, société anonyme, privilégiera la rentabilité sociale au détriment de la rentabilité financière ?

Avec ce projet de loi, vous mettez encore une fois en œuvre votre projet politique, qui ne se soucie pas de satisfaire les intérêts de notre pays et de la majorité de la population.

Votre objectif est de couler notre pays dans le moule libéral, celui où s’appliquent, sans entrave, les orientations de l’Organisation mondiale du commerce pour la libéralisation des services, celui qui obéit à l’Accord général sur le commerce des services, en vertu duquel toutes les activités humaines doivent être soumises à la concurrence.

L’entreprise publique, débridée par les politiques communautaires et encouragée par le Gouvernement, a commencé à mener une politique néfaste pour les usagers et les personnels.

La mission de contribution de La Poste à l’aménagement et au développement du territoire constitue un exemple inquiétant de la dégradation du service public postal. Il est de la responsabilité du Gouvernement d’assurer un contenu substantiel aux services publics. Or les politiques qu’il conduit ne cessent, au contraire, de les vider de leur contenu !

En tant que parlementaires, nous devons défendre ces territoires et leur avenir. La Poste n’est pas une entreprise comme les autres. Sa force, c’est son réseau ! Son atout, c’est la proximité ! Quelle entreprise peut s’appuyer sur un tel réseau ?

Ce projet de loi acte l’ouverture totale à la concurrence, la fin du secteur réservé, et prépare la privatisation de l’exploitant public La Poste. Il pèse donc lourd sur l’avenir du service public postal français.

Dans ce contexte de libéralisation totale et de marchandisation des activités postales, l’article 2 n’a plus beaucoup de sens.

Très bien ! sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l'amendement n° 37.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 33 :

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 195 rectifié, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article 2 de la même loi est ainsi rédigé :

« Art. 2. - La Poste a pour objet, selon les règles propres à chacun de ses domaines d'activité, contenues notamment dans le code des postes et des communications électroniques :

« - d'assurer, dans les relations intérieures et internationales, le service public du courrier sous toutes ses formes, ainsi que celui du transport et de la distribution de la presse bénéficiant du régime spécifique prévu par le code des postes et télécommunications ;

« - d'assurer, dans le respect des règles de la concurrence, tout autre service de collecte, de transport et de distribution d'objets et de marchandises ;

« - d'offrir, dans le respect des règles de la concurrence, des prestations relatives aux moyens de paiement et de transferts de fonds, aux produits de placement et d'épargne, à la gestion des patrimoines, à des prêts d'épargne-logement et à tous produits d'assurance. La Poste gère le service des chèques postaux et contribue au développement de l'épargne populaire, notamment par la collecte du Livret A. Elle participe ainsi à la lutte contre l'exclusion bancaire et à la mise en place du droit au compte défini au titre Ier du livre III du code monétaire et financier. À cet effet, elle est partie prenante d'un pôle financier public l'associant à la Caisse des dépôts et consignations, au réseau des caisses d'épargne, à OSEO et à tout établissement financier doté d'une mission de service public. »

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Avec cet amendement, nous procédons en fait à la réécriture intégrale du texte de l’article 2 pour revenir au texte originel de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom.

Dans un premier temps, je me limiterai à un exemple, compte tenu du temps qui nous est imparti, mais je reviendrai sur ce sujet à l’occasion d’une explication de vote.

Mon exemple concerne l’un des aspects du service attendu pour La Poste : celui de la distribution de la presse.

Tel qu’il nous est proposé sur cette question, le texte de l’article 2 est ainsi rédigé : « La Poste et ses filiales constituent un groupe public qui remplit des missions de service public et exerce d’autres activités dans les conditions définies par la présente loi et par les textes qui régissent chacun de ses domaines d’activité. ».

Sous ces dehors apparemment simples se dissimule, en fait, une certaine conception du rôle et des missions de La Poste qui s’éloigne, lentement mais sûrement, des critères habituels du service public tels que soixante années les ont précisés depuis l’adoption de la Constitution de 1946 et la traduction, dans les faits, d’une bonne part du programme du Conseil national de la Résistance.

En effet, dans sa rédaction encore en vigueur, l’article 2 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de La Poste et à France Télécom est ainsi libellé : « La Poste et ses filiales constituent un groupe public qui remplit, dans les conditions définies par les textes qui régissent chacun de ses domaines d’activité, des missions d’intérêt général et exerce des activités concurrentielles. ».

Je ne peux évidemment que vous inviter à vous référer au texte initial de la loi de 1990, qui indiquait encore : « La Poste a pour objet, selon les règles propres à chacun de ses domaines d’activité, contenues notamment dans le code des postes et télécommunications […] ».

Nous sommes donc passés d’une législation sur mesure, en quelque sorte, tenant compte des spécificités de La Poste et s’appuyant sur les termes du code des postes et télécommunications, à une rédaction – celle qui nous est aujourd’hui proposée – dans laquelle les missions de service public deviennent l’accessoire et où, de fait, l’essentiel réside dans les activités strictement et totalement ouvertes à la concurrence, avec l’application du code du commerce, avant toute autre considération.

Nous ne voulons aucunement de cette apparence de service public, de ce qui semble avoir l’aspect du service public mais qui ne fait que consacrer la réduction des missions de service public au strict minimum et laisse la porte ouverte à sa disparition programmée.

Nous vous proposons également, dans cette nouvelle rédaction, la participation de La Poste avec la Banque postale à ce que l’on appelle un pôle public financier ; mais j’y reviendrai lors de mon explication de vote !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Cette rédaction soulève deux difficultés.

D’abord, s’agissant notamment des références aux autres dispositions législatives, elle est moins précise que celle qui a été adoptée par la commission.

Ensuite, elle supprime la mention de la mission d’aménagement du territoire de La Poste.

Je suis, pour ma part, très attaché au réseau de points de contact de La Poste ; aussi, je ne peux être qu’opposé à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Je partage tout à fait l’avis du rapporteur. Je suis hostile à cet amendement, car il ne reprend pas la mission d’aménagement du territoire de La Poste, pourtant essentielle.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Sans doute aurait-il fallu rectifier à nouveau cet amendement. Cela prouve bien que nous n’avons pas eu assez de temps pour travailler sur ce texte…

Cet amendement, qui porte aussi sur l’intégration de la Banque postale dans le périmètre de la société mère, La Poste, comporte quelques aspects particuliers sur lesquels je souhaite revenir.

La Banque postale a une mission de service public qui est résumée, au sein de cet article 2, par un alinéa très bref.

La mission de service public de la Banque postale, telle qu’elle peut lui être déléguée par La Poste, ne porte pas sur la gestion de comptes courants sécurisés et liquides pour une clientèle d’entreprises et de particuliers.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Elle ne porte pas sur la mise à disposition du public de prêts immobiliers à vocation écologique, de prêts particuliers, de conventions d’assurance au moindre coût.

Elle ne porte pas plus sur le développement des produits d’épargne-logement, alors même que l’acquisition de logements constitue un facteur essentiel de la politique gouvernementale.

En fait, dans le projet de loi, le service public assumé par la Banque postale est strictement limité à une accessibilité bancaire qui s’arrête à la prise en compte, par La Poste, de l’ensemble des déposants de l’épargne populaire dont personne d’autre ne veut « gérer » la clientèle. Pour aller vite, même si l’on peut s’enorgueillir de cet état de choses, c’est l’accueil des clients effectuant des retraits bien souvent inférieurs à dix euros qui constitue la mission de service public de la Banque postale !

Nous n’avons pas la même conception du service public de la Banque postale. Nous souhaiterions une vision moins rabougrie et misérabiliste du service public. Aujourd’hui, en effet, on laisse au public ce qui ne « rapporte » pas et l’on ouvre à la concurrence ce qui peut « rapporter », en attendant que la concurrence finisse par racheter les activités dites « profitables » !

Nous défendons aussi pour la Banque postale, et plus précisément pour les services publics financiers de La Poste, une autre vision.

Il existe, niché dans notre droit financier, et pratiquement inconnu du grand public, un droit au compte pour les personnes qui, encore aujourd’hui, dans notre pays, sont dépourvues de compte bancaire.

Nous estimons que la nature publique de La Poste peut pleinement justifier qu’une mission de service public lui soit accordée pour lui permettre d’être le dépositaire naturel de l’exercice de ce droit au compte. C’est là une différence entre la conception que vous présentez et la nôtre.

Nous voulons également faire de La Poste l’élément d’un véritable pôle public financier, lequel associerait, entre autres, La Poste, la Caisse des dépôts et consignations, le réseau des Caisses d’épargne et celui de l’établissement public industriel et commercial destiné au financement des PME, OSEO, pour accomplir des missions de service public et d’intérêt général.

Outre les missions de service public que La Poste assume pour l’heure et assumera demain, j’en viens à quelques observations sur les champs dans lesquels cette intervention de service public doit intervenir.

Le premier champ est celui de la construction de logements, notamment de logements locatifs sociaux comme de logements en accession sociale. Ce qui est déjà en grande partie accompli avec la centralisation des dépôts du Livret A dans le fonds d’épargne géré par la Caisse des dépôts et consignations serait encore plus pertinent si l’on pouvait, dans le droit fil de la constitution de ce pôle, permettre aux ménages de disposer d’un volume de prêts immobiliers d’accession moins coûteux qu’aujourd’hui.

Le deuxième champ est celui du financement des petites et moyennes entreprises. Il peut se faire dans le cadre de la mise à disposition d’une enveloppe de prêts à taux d’intérêt réduit distribués sur des ressources centralisées dans le même fonds d’épargne que précédemment.

Le troisième champ, que nous estimons bienvenu pour ce pôle public financier, c’est celui des économies d’énergie et de la réalisation des objectifs du Grenelle de l’environnement, notamment pour les bâtiments publics et pour les logements privés.

Nous pourrions évidemment assigner à ce pôle public financier des missions précises de service public : par exemple, gérer l’encours de 40 milliards, 50 milliards ou encore 100 milliards d’euros du fameux grand emprunt, idée reprise par le Président de la République, notamment pour financer les projets de grandes infrastructures dont notre pays a besoin pour connaître un nouveau développement économique et social.

Voilà ce que je voulais ajouter sur cet amendement, auquel il manque peut-être la dimension d’aménagement du territoire, je le reconnais, mais qui a surtout pour objet d’insister sur la création du pôle public financier.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à Mme Odette Terrade, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

Cet article 2 consacre la réduction des missions de service public de La Poste au strict minimum.

Si nous devions nous résumer quant à la situation posée par le projet de loi, nous pourrions le faire ainsi.

Nous allons avoir demain, en lieu et place d’un exploitant public dont on aura transformé la nature juridique, une société anonyme dont le capital sera, dans un premier temps, totalement détenu par l’État et d’autres personnes morales de droit public.

Cette définition vise évidemment, de manière expresse, la Caisse des dépôts et consignations, bras séculier de l’État en bien des situations, Caisse dont on attend, le moment venu, qu’elle apporte pour 1, 2 milliard d’euros de capital dans la nouvelle entité.

Au moment de la création de la société anonyme à capitaux publics, appliquant évidemment les règles du code du commerce avant toute autre règle – et c’est là que les ennuis commencent ! –, une partie du capital définie comme minoritaire sera distribuée auprès du personnel de la Poste et de ses filiales. On peut supposer que cet actionnariat populaire obligé, appelé à renforcer le noyau dur des détenteurs du capital, sera fort heureux de traduire les gains de productivité qui lui seront imposés en dividendes particulièrement généreux plutôt qu’en augmentations de salaires ou de primes. On peut objectivement s’attendre à quelque chose comme 3 % ou 4 % de la valeur de l’action de La Poste SA en dividendes, ce qui laisse augurer une haute profitabilité !

Après ces considérations, parlons un peu des missions de service public.

Le service public universel du courrier ? Il est apparemment limité à la seule circulation du courrier de caractère administratif.

L’accessibilité bancaire et la prévention de l’exclusion ? Elles sont manifestement limitées à la seule diffusion d’une sorte de Livret A du pauvre, sans même prise en compte de l’application du droit au compte.

Le réseau des points de contact ? Il est de plus en plus appelé à se généraliser en agences postales communales ou en simples Relais Poste chez les commerçants, avec le risque évident de réduction de la qualité et de la quotité des opérations que les usagers pourront accomplir dans ces points de contact.

Le transport et la distribution de la presse ? Il est de plus en plus à la charge quasi exclusive de La Poste, du simple fait que l’État a décidé, dans les années à venir, de réduire la part du budget de la mission Médias destinée à financer cette mission d’intérêt général pourtant évident.

Tant pis pour la démocratie et la diffusion de toutes les idées : la régulation budgétaire passe avant tout le reste !

Nous ne voulons pas d’un statut public pour un service public rabougri et réduit à sa plus simple expression, nous n’en voulons pas ! C’est aussi pour ces motifs que nous vous proposons d’adopter cet amendement 195 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

Dans la mesure où il vise en quelque sorte à sauvegarder l’essentiel, l’amendement n° 195 rectifié me paraît intéressant.

Monsieur le ministre, rappelons-le, rien ne nous oblige à changer le statut de La Poste. En effet, l’Union européenne accepte d’ores et déjà que l’État accorde des aides budgétaires ou fiscales à une entreprise, quelle que soit sa nature.

J’en veux pour preuve le fait que, à l’heure actuelle, l’Union européenne accepte la définition des services sociaux d’intérêts généraux et des services d’intérêt économique général. C’est d’ailleurs à ce titre que l’EPIC La Poste bénéficie d’avantages fiscaux, notamment en ce qui concerne la délivrance du livret A en tant que service bancaire universel, le fameux droit au compte dont vient de parler Mme Beaufils. Dans notre pays, il existe d’autres structures qui, sans être des sociétés anonymes, bénéficient d’aides budgétaires et fiscales.

Je prendrai l’exemple, au hasard, d’un office départemental d’HLM. L’Union européenne ne voit rien à redire à ce que l’État français lui accorde des subventions et une fiscalité à taux réduit pour la construction de logements locatifs sociaux, voire pour l’accession sociale à la propriété, dès lors que cela vise des publics sous conditions de ressources. Pour autant, que je sache, monsieur le ministre, nous n’allons pas transformer tous les offices publics d’HLM en sociétés anonymes !

Sourires. – M. Martial Bourquin applaudit.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Il va défendre Courchevel et les pauvres !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je mets aux voix l'amendement n° 195 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 34 :

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 198 rectifié, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Par dérogation aux dispositions de l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, les sommes collectées par La Poste au titre de l'article L. 221-2 du même code sont intégralement reversées au fonds défini à l'article L. 221-7 du même code.

La parole est à M. Bernard Vera.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Cet amendement est le premier d’une série…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

… portant sur une question importante, celle de l’épargne populaire. Il s’agit en effet de rappeler les termes du débat qui s’est engagé sur l’utilisation de la ressource du livret A, depuis sa banalisation, donnant l’occasion au Gouvernement d’en ajuster la rémunération, en l’occurrence à la baisse.

L’attractivité de La Poste est étroitement liée aux missions de collecte de l’épargne populaire qu’elle mène de longue date et dont, jusqu’à la funeste loi de modernisation de l’économie, elle était l’un des acteurs attitrés, avec le réseau des caisses d’épargne.

Notons d’ailleurs que la banalisation du livret A a précédé de peu la transformation des caisses d’épargne en élément du nouveau groupe Banques populaires–caisses d’épargne, créé à l’instigation du Président de la République dans la plus totale opacité quant aux perspectives réelles de survie de cette nouvelle entité.

La banalisation du livret A a toutefois été marquée par un phénomène que nous n’avions que peu connu jusqu’ici : la loi qui viendrait à s’appliquer n’aurait pas la même rigueur pour tous. C’est notamment vrai pour ce qui concerne la centralisation des ressources, principe désormais à géométrie variable. En effet, les nouveaux acteurs de la distribution du livret A jouissent d’une clause particulièrement favorable de convergence progressive des taux de centralisation.

Pour parler clairement, alors même que La Poste et les caisses d’épargne étaient tenues, par leur qualité d’opérateur historique de la collecte du livret A, de respecter un taux élevé de centralisation et de recueillir l’essentiel des 160 milliards d’euros attendus au titre du fonds d’épargne, les autres opérateurs n’avaient qu’à respecter un calendrier de convergence des taux de centralisation peu contraignant.

Certes, notre amendement peut paraître particulièrement sévère, puisqu’il vise à exiger de La Poste une centralisation intégrale des ressources issues de la collecte tant du livret A que du livret de développement durable, l’ex-CODEVI.

Pris isolément, il peut paraître contraignant. C’est la raison pour laquelle il est associé à d’autres dispositifs, déclinés au fil des amendements suivants, qui tendent à établir une plus grande égalité de traitement entre La Poste et les autres établissements assurant la collecte de ces produits d’épargne défiscalisés à haute valeur ajoutée pour la société dans son ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Pourquoi soumettre la Banque postale à un régime différent des autres établissements de crédit, qui peuvent également, je vous le rappelle, proposer le livret A depuis le 1er janvier 2009 ?

Le mécanisme introduit par la loi de modernisation de l’économie est équilibré et permet à la Caisse des dépôts et consignations de financer ses actions en faveur du logement social sans aucune difficulté. Laissons-le vivre avant de le modifier si cela s’avère nécessaire.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Même avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Cet amendement, très bien défendu par Bernard Vera, précise les conditions d’utilisation et de collecte de l’épargne populaire.

Les différents amendements que nous allons décliner s’intéressent aux enjeux sociaux très importants qui en découlent. J’aurai l’occasion de m’appesantir davantage sur ce point tout à l’heure. La banalisation du livret A au 1er janvier 2009 – on le voit aujourd’hui – consiste en fait en un véritable pillage de l’épargne populaire par les autres institutions bancaires, pour la détourner de son utilisation sociale, au profit notamment des entreprises. Certes, tout n’est pas négatif, mais on assiste – je tiens à le souligner – à un vrai détournement de l’épargne populaire.

Nous devons, me semble-t-il, être vigilants. En effet, par le passé, avec qui traitaient les élus des communes, pour financer leurs investissements ? Ils avaient des rendez-vous réguliers avec la Caisse des dépôts et consignations et les caisses d’épargne. Aujourd’hui, compte tenu des instructions gouvernementales, les disponibilités sont de moins en moins grandes et les élus sont parfois obligés de financer leurs investissements dans des conditions bien plus difficiles. Le niveau de rémunération des crédits pèse indirectement sur les budgets des collectivités territoriales et se traduit notamment par une hausse de la fiscalité locale. C’est la raison pour laquelle nous sommes très attachés à l’amendement qui vient d’être présenté.

J’aurai également l’occasion tout à l’heure de développer certains points concernant le logement social, dont les conditions se dégradent considérablement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La parole est à M. Bernard Vera, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Pour poursuivre dans la veine de Guy Fischer, je rappellerai que le livret A, depuis sa création en 1818, est le symbole de l’épargne populaire. Il concerne aujourd’hui 45 millions de titulaires.

Tous les gouvernements se sont attachés à préserver son mode de distribution, ainsi que le mode de centralisation de ses fonds, confiés à la Caisse des dépôts et consignations.

Ils l’ont fait au nom de deux impératifs majeurs et incontournables : le financement du logement social cofinancé à 80 % par le livret A et la lutte contre l’exclusion bancaire.

Dans son rapport de 2007 sur l’état du mal-logement en France, la Fondation Abbé-Pierre estime à près de six millions le nombre total de « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen terme ».

De son côté, l’Union sociale pour l’habitat, qui rassemble l’ensemble du mouvement HLM, estime que plus d’un million de demandes de logement HLM sont en attente en France métropolitaine et que le ralentissement, ces derniers mois, de la mise en chantier de logements, malgré les cadeaux fiscaux accordés par le Gouvernement aux promoteurs, n’a pas permis, loin de là, de répondre au problème.

Avec la loi Boutin, on est presque tenté de croire que c’est par la gestion locative autoritaire que l’on va pouvoir pallier l’insuffisance de la construction de logements neufs ! Aujourd’hui, environ 10 millions de personnes résident dans le parc HLM et acquittent des loyers en moyenne deux fois moins élevés que dans le secteur privé.

Il est prévu que le financement du plan Borloo de relance de la production de logement social repose à 80 % sur les fonds collectés par le livret A.

D’une manière générale, les Français continuent donc de vivre une situation de crise en matière de logement : logements chers à la location comme à l’achat, ségrégation, difficultés d’accès au logement, personnes sans abri.

Par ailleurs, à défaut de chiffrage officiel, on estime couramment, depuis le débat législatif, en 2004, sur la mise en place de la procédure de rétablissement personnel, que l’exclusion bancaire touche environ 5 millions de personnes dans notre pays.

Or le livret A représente par excellence le dernier outil de lutte contre l’exclusion bancaire. En l’absence de tout dispositif légal de service universel bancaire gratuit, les populations les plus démunies et souvent âgées – exclus, bénéficiaires de minima sociaux, travailleurs émigrés – utilisent pratiquement quotidiennement leur livret A pour effectuer leurs opérations financières.

Produit d’épargne populaire sans équivalent à l’échelon international, le livret A a fait, depuis des décennies, la preuve de sa solidité.

En cent quatre-vingt-dix ans d’existence, il n’a jamais spolié aucun épargnant et constitue le système le moins coûteux, en Europe, pour les finances publiques.

Ces qualités doivent s’accompagner d’une exigence sociale complémentaire, celle d’une utilisation rationnelle et responsable de sa collecte.

C’est le but de cet amendement, qui tend à prévoir une centralisation exemplaire de la collecte que la Poste réalise au titre du livret A et du livret de développement durable.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 199, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le premier alinéa de l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette quote-part ne peut être inférieure aux quatre cinquièmes des dépôts collectés au titre des livrets ci-dessus définis. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L'amendement n° 201, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le premier alinéa de l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette quote-part ne peut être inférieure aux sept dixièmes des dépôts collectés au titre des livrets ci-dessus définis. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L'amendement n° 200, présenté par M. Danglot, Mme Didier, M. Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

... - Après le premier alinéa de l'article L. 221-5 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette quote-part ne peut être inférieure aux trois quarts des dépôts collectés au titre des livrets ci-dessus définis. »

II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre l’amendement n° 199.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

L’amendement n° 199 constitue une déclinaison de l’amendement n° 198 rectifié, présenté à l’instant par Bernard Vera.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

M. Thierry Repentin. Une déclinaison particulièrement intéressante !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Alors que l’amendement n° 198 rectifié prévoyait que la totalité de la collecte soit centralisée, l’amendement n° 199 vise à ce qu’il en soit ainsi pour les quatre cinquièmes de cette collecte.

Nous devons nous demander quel a été le comportement des banques depuis le 1er janvier 2009, date de la banalisation du livret A.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Quelle a été la responsabilité des nouveaux opérateurs chargés de sa collecte ?

La banalisation a d’ores et déjà des conséquences : avec un encours global de collecte du livret A et du livret de développement durable de 254 milliards d’euros à la fin du mois de septembre 2009, on constate une décollecte relative du livret A de l’ordre de 9 milliards d’euros au regard du mois d’août précédent. On peut donc parler de « siphonage » du livret A au profit des établissements bancaires.

Nous souhaitons être très exigeants sur la centralisation afin que le droit au compte, le financement du logement social et des investissements des collectivités territoriales ne soient pas progressivement remis en cause.

La mission d’accessibilité bancaire est en train de se dégrader, alors qu’elle joue un rôle essentiel. Il suffit pour s’en convaincre de se rendre dans les grands quartiers populaires – je pense notamment aux Minguettes, à Vénissieux – et d’observer les longues files d’attente aux guichets de la Banque postale. Les familles les plus démunies vont en effet y retirer des sommes extrêmement faibles : cinquante, dix ou même cinq euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Monsieur Fischer, je vous propose de présenter dans la foulée les amendements n° 201 et 200, dont les objets sont très voisins : seule la proportion varie en effet. (Protestations sur certaines travées du groupe CRC-SPG.)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Je ne sais si mes camarades sont d’accord…

Mais compte tenu de l’heure tardive, j’accède à votre demande, monsieur le président.

Vous avez compris, mes chers collègues, que ces amendements constituaient plusieurs déclinaisons du même principe. Le problème qu’ils soulèvent n’en est pas moins réel. Tout un chacun peut concrètement vérifier, dans les quartiers les plus populaires de nos villes, le délitement progressif des liens sociaux tissés par la Banque postale. C’est très grave !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Hérisson

Ces trois amendements sont presque identiques. Ils visent l’ensemble des établissements de crédit et excèdent largement le champ du présent projet de loi. Le problème qu’ils soulèvent concerne l’ensemble du système bancaire.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Nous avons déjà eu un débat sur le livret A, et nous ne pouvons pas le rouvrir sans cesse.

Le Gouvernement ne peut donc que s’opposer à ces trois amendements, qui sont des cavaliers.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Romani

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au vendredi 6 novembre 2009, à neuf heures trente, à quatorze heures trente et le soir :

- Suite du projet de loi relatif à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales (Procédure accélérée) (n° 599 rectifié, 2008-2009).

Rapport de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (50, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 51, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.