La délégation organise un débat d'orientation sur les instances du dialogue entre l'État et les collectivités territoriales.
Nous avons aujourd'hui le plaisir d'accueillir des représentants d'associations d'élus et du Gouvernement qui siègent au sein de plusieurs instances du dialogue entre l'État et les collectivités territoriales :
- l'Association des régions de France, en la personne de son président, Alain Rousset ;
- l'Association des départements de France, elle aussi représentée par son président, Claudy Lebreton ;
- l'Association des maires de France qui, en raison de l'empêchement du président Jacques Pélissard, sera représentée par son vice-président, Philippe Laurent ;
- la Direction générale des collectivités locales, en la personne de son numéro un, M. Éric Jalon.
C'est la deuxième fois que nous organisons une telle rencontre, après celle sur le statut de l'élu et le cumul. J'attache beaucoup d'importance à ce lieu de dialogue permanent que doit incarner notre délégation entre élus locaux, parlementaires et Gouvernement.
Notre ordre du jour porte précisément sur le fonctionnement des instances de dialogue entre l'État et les collectivités territoriales.
Cela va de la Conférence nationale des exécutifs (CNE) au Comité des finances locales, en passant, entre autres, par la Conférence nationale des finances publiques (CNFP) ou la Conférence de la ruralité. J'ai pris l'initiative de convier nos collègues chargés de représenter le Sénat au sein de ces différentes instances et je salue ceux d'entre eux qui ont pu se joindre à nous.
Notre débat d'aujourd'hui s'inscrit dans le cadre de la préparation d'un rapport, confié par notre délégation à Jacqueline Gourault et à Didier Guillaume, sur le thème du dialogue entre l'État et les collectivités territoriales.
L'idée de ce rapport est née d'une rencontre au mois de juin avec les présidents des trois associations ici représentées. Tous trois avaient donné leur accord pour que notre délégation s'en saisisse. Je suis heureux que nous ayons ouvert ce chantier, faisant ainsi la démonstration que notre Délégation est à l'écoute et désireuse de faciliter le dialogue entre les élus locaux et l'État.
Le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales est un sujet récurrent, mais la question se pose aujourd'hui avec beaucoup d'acuité compte tenu du contexte actuel particulier, lié à trois phénomènes :
- les circonstances économiques et financières de notre pays, qui incitent l'État à réduire les aides qu'il attribue aux collectivités territoriales, notamment à geler ses dotations budgétaires à partir de 2011 ;
- la réforme en cours des collectivités territoriales ;
- la révision générale des politiques publiques, qui conduit à un changement d'organisation de l'État sur le territoire. C'est un point important car le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales ne s'établit pas seulement au niveau national, mais également au niveau local.
Nous pensons qu'il est nécessaire de renforcer le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales. Au cours des derniers mois, la gestion des collectivités territoriales a été fortement critiquée : elles sont accusées d'être trop nombreuses et trop coûteuses pour les finances publiques. Or, elles représentent 75 % de l'investissement public en France et gèrent au mieux les compétences dont elles ont la charge. Pour apaiser les relations entre l'État et les collectivités territoriales, il est nécessaire de clarifier les responsabilités et les moyens de chaque acteur.
Le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales est indispensable dans une démocratie apaisée. Or, force est de constater qu'aujourd'hui, ce dialogue ne fonctionne pas bien.
Au niveau national, il existe un certain nombre d'instances de dialogue, notamment dans le domaine financier, telles que le Comité des finances locales, la Commission consultative d'évaluation des charges (CCEC) ou la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN). Mais le dialogue doit s'effectuer d'égal à égal et dans un esprit de concertation, ce qui n'est pas toujours le cas aujourd'hui au sein de ces instances. Il en est de même s'agissant de la Conférence nationale des exécutifs. Or, le préalable pour l'amélioration des relations entre l'État et les collectivités territoriales au niveau national est la mise en place d'un contrat de confiance entre les différents partenaires, afin de définir des règles communes de discussion, de témoigner de la volonté partagée d'améliorer le fonctionnement des instances existantes et de disposer d'une vision financière commune des problématiques à long terme. C'est pourquoi il me semble indispensable d'analyser la situation dans les autres pays européens, pour s'en inspirer.
Au niveau local, les organismes de dialogue sont nombreux, mais la qualité des relations entre les représentants de l'État et les élus dépend fortement de la personnalité des individus. C'est pourquoi devrait être défini un cadre national permettant de régir les relations au niveau territorial, sous l'égide des associations nationales d'élus ou de la Direction générale des collectivités locales (DGCL).
Enfin, comme vient de le souligner Jacqueline Gourault, le contexte économique et politique actuel de notre pays doit être pris en compte pour analyser et améliorer les instances de dialogue entre l'État et les collectivités. Mais, dans le même temps, il faut s'interroger sur l'existence d'une particularité française en la matière, qui conduirait à une situation de blocage et de confrontation, quels que soient la majorité gouvernementale et les présidents des grandes associations nationales d'élus.
Je vous propose de procéder en deux temps :
- nos quatre invités vont d'abord nous faire part de leurs propositions sur le fonctionnement des instances de dialogue entre l'État et les collectivités territoriales,
- puis, chacun d'entre vous sera invité à réagir, à poser des questions ou à formuler des observations.
On a besoin de lieux de dialogue. Notre pays est bâti sur un modèle jacobin avec des corps d'État qui se défendent aujourd'hui face à la décentralisation et qui ont peur de perdre une part de leur existence professionnelle.
L'intervenant précédent évoquait les comparaisons européennes. Nous sommes le seul pays en Europe à maintenir un système napoléonien. Vous n'avez aucun pays où les corps d'État doublonnent d'une manière aussi massive les responsabilités des collectivités locales. En Espagne, en Allemagne ou en Italie, tout cela fonctionne autrement.
La décentralisation a toujours été un progrès, que ce soit pour les départements, les communes, les intercommunalités ou les régions. Les services publics qui ont été transférés de l'État aux collectivités locales étaient dans un état catastrophique ; il a fallu que les collectivités territoriales fassent un effort considérable et je trouve désagréable qu'on mette en cause cet effort. Parce que cet effort a été réalisé par toutes les collectivités, que ce soit les départements, les régions ou les communes, que les élus aient été de droite ou de gauche, et dans tous les secteurs, que ce soit pour les lycées, les collèges, les trains ou le développement économique.
Par ailleurs, l'État croit attendre de nous des subventions et non des politiques ; or, les collectivités locales aujourd'hui conduisent des politiques.
Ensuite, malgré trente ans de décentralisation, la clarification des relations entre l'État et les collectivités locales, et singulièrement avec les régions, n'est toujours pas faite. Dans le budget des régions, l'État représente une part de plus en plus importante (pour la région Rhône-Alpes, 30 %). Avec la ligne grande vitesse, ce sera bientôt plus de 30 % pour les régions Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes et Aquitaine. Aujourd'hui, les doublons ne sont pas entre les collectivités locales entre elles. Le problème des doublons d'ingénierie, donc du coût et du temps de la décision publique, est entre l'État et les collectivités locales, et singulièrement entre l'État et les régions. C'est pour cela qu'il y a des tensions.
En 2001, le Président de la République actuel disait que la réforme de l'État dépendait de la décentralisation. Comme il n'y a pas de nouveau dans la décentralisation, il n'y a pas de réforme de l'État. La RGPP n'est qu'une réduction des effectifs. L'État n'a pas de stratégie économique, il a une stratégie de ressources humaines. Il veut garder sur le territoire la compétence de gestion des fonds européens, mais il n'arrive plus à le faire parce qu'il n'a plus assez de monde. Et comme ce n'est pas lui, mais les collectivités locales, qui met les contreparties, quand il veut garder la compétence de gestion des fonds européens, cela coûte plus cher et retarde les dossiers. Il n'y a pas de stratégie politique de réforme de l'État dans notre pays. Certes, il peut y avoir parfois des collectivités locales qui ne sont pas parfaites, mais, sur la gestion de leurs finances, elles ont toutes été bien gérées. Il n'y a que l'État qui emprunte pour payer ses fonctionnaires.
On n'avait jamais vu dans notre histoire démocratique un Gouvernement qui attaque les collectivités locales, ce qui peut expliquer des tensions.
Il y a eu des tentatives faites pour développer le dialogue. Le CFL fonctionne bien. Tout le monde y participe. La CCEN et la CCEC permettent aussi un travail en profondeur. En revanche, il y a une insatisfaction totale des élus face à la CNE, qui n'est qu'un lieu de discours où il n'y a pas de dialogue. Chacun y vient pour dire son texte, on n'y discute pas du fond. On n'a jamais discuté, par exemple, des entreprises en difficulté, comme cela se passe en Allemagne, en Espagne, en Italie, dans tous les pays démocratiques, compte tenu de la part des régions dans l'action économique. Il y a une espèce d'autisme du Gouvernement et de l'État, comme si le dialogue pouvait passer par les préfets. On a l'impression que le Gouvernement et l'État ne traitent pas les collectivités locales en adulte. La CNE ne fonctionne pas bien, ce n'est pas la bonne instance de dialogue.
Ces difficultés sont aggravées par la crise profonde que traverse l'État : crise identitaire, crise financière et crise politique. Crise identitaire, car l'État n'est plus stratège. Il fonctionne par appel à projets. L'État attend du terrain des réponses à une politique qu'il ne formule plus. Aujourd'hui, on ne sent plus l'État comme portant de grandes politiques scientifiques, technologiques, industrielles, scientifiques.
La crise financière aggrave les rapports entre l'État et les collectivités locales, non pas parce que l'État doit intervenir partout (je ne suis pas de ceux qui critiquent le désengagement de l'État, au sens laisser faire les collectivités locales : ce n'est plus à l'État de s'occuper des pistes cyclables, des aménagements de bourgs ou de je ne sais quel problème territorial). La réforme des finances locales ne s'est pas faite avec nous. Les collectivités locales ont représenté 44 milliards sur le plan de relance alors que l'État a représenté 4 milliards. Pourtant, nous n'avons pas été consultés sur la réforme de la fiscalité locale. Nos associations sont reçues, mais jamais consultées. J'ajouterai qu'aucun compte n'a été tenu des nombreux rapports : rapports Lambert, Warsmann, Belot. Si je prends l'exemple du conseiller territorial, vous constaterez qu'il n'émane d'aucun travail d'expert, démocratique ou économique.
Nous n'avons pas procédé à la clarification des compétences. Là encore, il y a un réel problème, non pas entre les collectivités locales entre elles, mais entre les collectivités locales et l'État.
Je vais d'abord faire un retour trente ans en arrière. En 1980 : le conseil régional n'existait pas, les communautés de communes et les communautés d'agglomération non plus, et les décisions de l'assemblée départementale étaient mises en oeuvre par le préfet. Le 2 mars 1982 est adoptée la première loi de décentralisation. Le président de l'assemblée départementale est devenu maître de l'ordre du jour, a été investi de réelles responsabilités, dispose d'une administration, si bien que nous avons aujourd'hui une collectivité locale qui n'a rien à voir à ce qu'elle était dans les années 1970.
Il y a eu ensuite la création des régions, des communautés d'agglomération et de communes.
Le paysage territorial a donc profondément changé en l'espace de quelques années et ce serait intéressant d'apprécier, sur le plan quantitatif et qualitatif, cet apport de la décentralisation. Des rapports existent, ils sont objectifs et convergent souvent : la démocratie territoriale y a gagné, les libertés locales s'y sont épanouies, l'efficacité de l'action publique a été au rendez-vous et tout cela avec des budgets maîtrisés, sous le contrôle du citoyen. Le sens et la volonté d'alors étaient de redonner les pouvoirs au citoyen par une proximité, par une démocratie locale proche de l'ensemble des hommes et des femmes qui vivaient sur notre territoire ; c'est la décentralisation.
Pour autant, le jacobinisme dans notre pays a encore de beaux jours. Souvenez-vous des préfets, qu'on a un temps voulu appeler les commissaires de la République, souvenez-vous de l'extrême résistance aux changements d'alors. Aujourd'hui, la relation des élus avec l'administration de l'État déconcentrée a beaucoup changé. Nos administrations locales sont composées de personnes de grande qualité qui ne souffrent d'aucun complexe à l'endroit de l'administration d'État, qu'elle soit centrale ou territorialisée.
Ensuite, je veux aborder cette question en regardant au-delà de nos propres frontières nationales. A l'ADF, dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales et de la fiscalité, nous avons produit des rapports assez exhaustifs sur l'organisation territoriale des 27 pays de l'Union européenne : dans les 27 il y a le niveau local ; 19 pays européens ont le niveau intermédiaire ; seulement 8 pays ont le niveau régional en tant que collectivité territoriale légitimement élue au suffrage universel direct. On retrouve, la plupart du temps, le niveau régional dans les pays les plus peuplés d'Europe. Tous les grands pays européens ont trois niveaux de collectivité territoriale.
Il faut aussi regarder les compétences, y compris les finances publiques et la fiscalité. Les collectivités, c'est précisément 213 milliards 800 millions d'euros, alors que le budget de l'État qui va être discuté au Parlement en recettes est de 336 milliards 500 millions. Si une évolution de la décentralisation devait se poursuivre, le temps viendrait, peut-être, où le budget des collectivités locales pourrait être supérieur au budget de l'État lui-même, parce qu'on aurait compris qu'un certain nombre de compétences sont mieux assurées en proximité qu'elles ne le sont au niveau local. Dans le cadre du débat sur la clarification des compétences, on parle surtout de la clarification des compétences entre collectivités ; il faut aussi mettre dans le jeu clarification des collectivités et de l'État lui-même.
Troisième point : quand on parle du dialogue, on fait souvent une confusion entre l'État et le Gouvernement. Le problème de la relation se pose entre les collectivités et les représentants politiques de notre pays ; ce n'est pas pareil que le dialogue avec les administrations de notre pays, administrations centrales et déconcentrées. Les élus organisés au niveau national rencontrent les grandes directions, la DGCL, la DGFiP, mais il y a aussi des relations avec le Gouvernement. Et, localement, les élus et les collectivités ont des relations avec les représentants de l'État (préfet, sous-préfet,...). La relation avec l'État peut être meilleure que la relation avec le Gouvernement.
Je fais une analyse en trois mots qui me paraissent essentiels : consultation, concertation et négociation. A quelle étape en sommes-nous ? Certainement pas à celle de la concertation, et ne parlons même pas de la négociation. D'autres grandes démocraties européennes ont la culture de la négociation. Par exemple, lorsque le Président du Gouvernement espagnol a envisagé de transférer la compétence de santé aux grandes régions espagnoles, il y eu trois ans de négociations préalables entre le Gouvernement et les représentants des régions ; résultat : la loi a été votée pratiquement à l'unanimité. On aurait pu, sur un sujet aussi important que l'organisation territoriale de la République, conduire une véritable négociation entre les collectivités, leurs représentants et le Gouvernement et je pense qu'on aurait fait faire des progrès énormes à la démocratie territoriale. Il y avait des rapports convergents qui constituaient incontestablement une base de dialogue, voire de négociation. Je crois c'est plus une question d'état d'esprit que d'outils de concertation et de dialogue. Les instruments de négociation sont des éléments essentiels du débat entre l'État, le Gouvernement, les collectivités et leurs représentants, mais il faut un travail sur la modification de l'état d'esprit pour avoir un dialogue de confiance.
Je pose les questions : faut-il institutionnaliser les associations d'élus les plus importantes au niveau des lois de la République ? Faut-il instituer une obligation d'adhérer à ces associations pour les représenter dans le dialogue républicain ? Il faut reconnaître qu'après trente ans les associations sont reconnues. Dans un certain nombre de lois, il est écrit qu'il faut demander l'avis des associations.
Sur les instances de dialogue, il y a le CFL, la CCEN, la CCEC, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale et d'autres. Des outils existent mais ils sont sectoriels : le personnel, les charges, les normes... D'où l'idée de la Conférence nationale des exécutifs, dont le Premier ministre est le président et les présidents des associations les vice-présidents. Mais c'est devenu une instance de proclamation sans dialogue. On pourrait lui donner une importance plus grande si on avait la volonté de la faire vivre collectivement. Sans multiplier à l'extrême les groupes de travail, il ne serait pas inconvenant que certains membres du Gouvernement chargés de portefeuilles qui touchent les collectivités territoriales passent quelque part une demi-journée ou une journée en session plénière avec l'ensemble des collectivités territoriales. Les collectivités territoriales pèsent 213 milliards d'euros et représentent plus d'1 500 000 fonctionnaires, soit 73 % de l'investissement public. Aujourd'hui, plus aucune politique nationale n'est possible sans le concours des collectivités territoriales. C'est la réalité, trente ans après les débuts de la décentralisation. Pour un certain nombre de nouvelles politiques conduites par l'État, le Gouvernement serait bien inspiré de négocier avec les collectivités territoriales. Le plan de relance a eu des effets positifs parce que les collectivités se sont engagées au titre des investissements publics qui ont été largement consommés : c'est une illustration d'un partenariat entre la politique nationale accompagnée, voire soutenue, par les collectivités territoriales.
Je pense qu'on pourrait améliorer les instruments de dialogue existants : leur donner un pouvoir d'avis obligatoire, les doter d'une faculté d'auto saisine...
Je termine sur un exemple : les départements financent les services d'aide à domicile qui relèvent de leur responsabilité à raison de 80 %, et la caisse nationale vieillesse à raison de 20 %. Il y des difficultés financières. Les associations et fédérations avaient demandé au Gouvernement de faire une réunion qui n'a pas abouti. L'ADF, après avoir vu la plateforme des 17 représentants des associations, a travaillé et négocié ; elle vient de valider et nous nous apprêtons à signer une convention avec un certain nombre de propositions. Voilà un exemple de négociation qui pourrait être utile et reproduit.
La question du dialogue entre l'État et les collectivités territoriales est absolument essentielle pour l'avenir de notre pays. La situation, telle que l'AMF la ressent aujourd'hui à travers son réseau territorial, est révélatrice d'un État très centralisé et jacobin. C'est véritablement un problème culturel dont la solution nécessitera énormément d'efforts, notamment du côté de l'État, pour faire évoluer les choses.
La question centrale est de savoir qui, dans notre pays, est détenteur de l'intérêt général. La tradition française veut que l'intérêt général relève du Gouvernement et de l'État central. L'AMF estime que, avec l'évolution des communes et des intercommunalités, nos collectivités détiennent aussi une part de l'intérêt général et que cette situation oblige l'État à recourir au dialogue et à la négociation, et pas seulement à la concertation.
Quant à la comparaison européenne, si elle présente un intérêt, attention à comparer ce qui peut l'être : il existe des cultures politiques extrêmement différentes, avec des organisations et des modes de fonctionnement distincts, si bien que la comparaison n'est pas toujours significative.
Aujourd'hui, le fonctionnement des instances de dialogue n'est pas satisfaisant, même lorsque les règles en sont fixées par la loi.
D'abord, il y a des raisons culturelles, car ces organismes sont plaqués sur une culture qui ne les accepte pas véritablement, hormis un petit noyau au sein de la DGCL.
Par ailleurs, les moyens des associations d'élus sont faibles et celles-ci ne sont peut-être pas assez représentatives. J'observe d'ailleurs qu'on parle d'associations de maires d'un côté et d'associations de départements ou de régions de l'autre, ce qui n'est pas la même chose.
Il y a aussi un certain manque d'intérêt de la part des élus, à l'exception d'un petit nombre, par manque de connaissance ou par sentiment de perdre son temps parfois. J'ajoute que le Sénat joue le rôle de représentant des collectivités territoriales et que cela a peut-être freiné quelque peu l'implication des associations d'élus. Enfin, on ne peut négliger les effets du cumul des mandats.
Ceci étant dit, les associations travaillent aujourd'hui plus étroitement qu'auparavant avec le Parlement, sans doute en raison de la complexité des sujets, comme, par exemple, lors de la réforme de la taxe professionnelle.
La pratique et le discours évoluent également. Le dialogue est réclamé dans les motions des associations et même dans les discours des ministres. La mise en place de la Conférence nationale des exécutifs a été unanimement saluée et c'est la promesse d'un nouvel état d'esprit. Autre exemple : la Commission consultative d'évaluation des normes, présidée par Alain Lambert, résulte d'une volonté des élus et elle fonctionne bien. Ce n'est pas le cas, en revanche, du collège des employeurs territoriaux, qui regroupe vingt élus au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) consacré par la loi en 2007. Le problème de ce collège est qu'il n'y a pas de répartition claire des rôles entre ce dernier et les associations, qui ne peuvent donc pas négocier au nom des maires, par exemple. Une autre évolution positive est le fait que les associations ont pris l'habitude de travailler ensemble au cours de ces dernières années. Il y a énormément d'échanges entre leurs présidents, entre leurs services et entre les niveaux territoriaux.
S'agissant des propositions, il faut d'abord réussir à rétablir la confiance. Cela suppose de la préparation. Rappelons-nous la préparation de la loi Mauroy adoptée en 1982, dont le texte était prêt avant l'élection présidentielle et qui reste la grande référence en matière de loi de décentralisation : si rien n'avait été préparé en amont de l'élection, nous n'aurions jamais eu une réforme d'une telle ampleur.
Ensuite, il faut une plus grande responsabilisation des élus dans tous les domaines, notamment avec de l'autonomie fiscale.
Il faut aussi réduire le nombre d'organismes de consultation et améliorer notablement leur fonctionnement. La Conférence nationale des exécutifs devrait être la base du dispositif avec un secrétariat permanent, une équipe resserrée et des liens réguliers avec l'État. Enfin, il faut renforcer la représentativité des associations d'élus, et notamment celle de l'AMF. Les solutions envisageables sont multiples, il faut les explorer car la mise en place d'un dialogue régulier est une des clés du redressement du pays.
Tout d'abord, le dialogue nécessite l'utilisation de mots qui ne soient pas caricaturaux. Le terme « d'autisme » qui a été utilisé au cours du débat est, selon moi, totalement déplacé.
Le bilan qui vient d'être dressé sur les instances de dialogue entre l'État et les collectivités territoriales apparaît très négatif. Or, force est de constater un certain nombre d'améliorations, dont on peut tirer quelques enseignements sur les conditions nécessaires pour obtenir un dialogue réussi entre l'État et les collectivités territoriales.
Ainsi, un dialogue structuré et portant sur des questions précises permet des avancées réelles. Ainsi, le Comité des finances locales, créé en 1979, et obligatoirement consulté sur les décrets à caractère financier ou sur la répartition de la dotation globale de fonctionnement, a joué un rôle central lors de la réforme de la DGF en 2004-2005 ou celle des finances locales en 2010, avec notamment la présentation du rapport des inspections générales sur la réforme de la taxe professionnelle et celui de six parlementaires. Il permet, par ailleurs, à travers l'Observatoire des finances locales (OFL), d'avoir une vision objective et partagée de la situation des finances locales.
Le bilan est identique pour la Commission consultative d'évaluation des charges. Depuis la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, elle est composée, ainsi que chacune de ses sections, à parité entre représentants de l'État et élus locaux, et elle est présidée par un élu. Elle s'est réunie à quarante reprises depuis le 10 mars 2005, a examiné 145 projets d'arrêtés sur la compensation des transferts de compétences et en a adopté 139 à l'unanimité. Lorsque des désaccords sont apparus, l'État a sollicité des missions d'expertise de la part des inspections générales avant de demander des arbitrages auprès du Premier ministre, dont un certain nombre ont été favorables aux collectivités. La CCEC a ainsi permis de désamorcer des difficultés naissantes sur un certain nombre de sujets, comme le rappellent le rapport de 2006 de M. Éric Doligé consacré au transfert des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) et des directions départementales de l'équipement (DDE), ainsi que celui de MM. du Luart et Krattinger, fait au nom de votre Délégation en 2010, consacré aux compensations des transferts de compétences, ou encore ceux de M. Thierry Carcenac, en tant que président de la CCEC.
Quant à la Commission consultative d'évaluation des normes, créée par la loi de finances rectificative pour 2007, son bilan est, là encore, très positif. Réunie depuis septembre 2008 à 28 reprises, elle a examiné 346 textes. Mais au-delà des chiffres, elle a surtout permis à l'administration d'État de prendre conscience et de mesurer les impacts financiers des textes règlementaires qu'elle édicte pour les collectivités territoriales. Par ailleurs, lors de la deuxième conférence sur le déficit, le 20 mai 2010, ont été annoncés un moratoire sur la production de normes de la part de l'État et la possibilité pour la CCEN d'examiner le stock existant. Les présidents des trois principales associations nationales d'élus ont été saisis afin de connaître leurs priorités sur les textes qui pourraient être examinés par la CCEN.
Il existe d'autres instances nationales de dialogue entre l'État et les collectivités territoriales, telle que le Conseil national de la fonction publique territoriale (CNFPT). La loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, dont Madame Gourault était rapporteur au nom de la commission des lois du Sénat, a permis la création du collège employeur, réunissant les élus locaux. Cette mesure a été complétée par la loi du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique, qui prévoit qu'à compter de 2014, date du prochain renouvellement du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), celui-ci se prononcera par un vote par collège, ce qui obligera les représentants des collectivités à se concerter préalablement pour faire émerger une position commune des employeurs publics territoriaux.
Ainsi, ce bilan nous permet de dégager trois facteurs permettant de favoriser le dialogue entre l'État et les collectivités. Le premier est la contrainte qui s'applique aux administrations de l'État : elles sont soumises à une obligation de consultation de ces instances, qui constitue une formalité substantielle. Ainsi, les administrations sont obligées d'engager un dialogue avec les collectivités sur certains sujets précis. Le second est la constance de ce dialogue, compte tenu de l'organisation régulière de réunions et de l'existence d'un ordre du jour précis. Enfin, le dernier est la confiance, qui implique bonne foi et transparence de la part des administrations.
Cependant, l'absence de formalisme a pu également permettre un dialogue constructif et apaisé entre l'État et les collectivités, compte tenu d'un calendrier serré et d'un objectif précis, qui a nécessité la recherche d'un accord entre les deux partenaires. Il en fut ainsi pour le groupe de travail consacré à la maîtrise de la dépense locale, présidé par MM. Gilles Carrez et Michel Thénault, qui a permis un constat objectif et partagé sur le niveau et les raisons de l'évolution des dépenses des collectivités territoriales depuis les premières lois de décentralisation de 1982-1983.
Les instances formelles citées précédemment souffrent cependant d'un certain nombre de limites, qui tiennent à leur formalisme même : elles ne peuvent agir que dans le cadre des compétences qui leur ont été assignées. Cependant, au sein de la CCEC, lorsque les élus locaux ont souhaité aborder un domaine qui n'entrait pas dans le champ de compétence de la commission, l'administration de l'État a toujours répondu à leurs attentes en leur apportant les éléments de réponse demandés.
Plus globalement, le rapport de MM. Carrez et Thénault identifie deux lacunes principales qui obèrent le dialogue entre l'État et les collectivités territoriales. La première porte sur la dispersion : en effet, le dialogue est structuré sur des thématiques précises, telles que les normes règlementaires imposées aux collectivités ou la compensation des transferts de compétences. Il n'existe pas, entre la CNE et les instances dérivées du CFL, d'instance intermédiaire de dialogue sur les politiques publiques, que ces dernières soient décentralisées ou partagées entre l'État et les collectivités. Ainsi, les relations continuent de s'entretenir, de façon verticale, entre les ministères et les associations nationales d'élus, pour chaque niveau de collectivités territoriales. Ce constat s'apparente à une difficulté pour le ministère de l'Intérieur et la DGCL. C'est pourquoi le rapport de MM. Carrez et Thénault propose la mise en place d'un secrétariat permanent de la CNE, proposition sur laquelle il serait souhaitable que la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat fasse connaître sa position.
La deuxième lacune, également pointée par le rapport de MM. Carrez et Thénault, porte sur l'absence de connaissance partagée des politiques décentralisées entre l'État et les collectivités territoriales. L'appareil statistique de l'État est dispersé entre les différents ministères. Par exemple, c'est la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), direction de l'administration centrale des ministères sanitaires et sociaux, qui dispose de l'ensemble des données statistiques relatives à l'allocation personnalisée d'autonomie, et non la DGCL. Or, cette connaissance partagée des politiques décentralisées est une des conditions indispensable pour réussir un dialogue apaisé entre l'État et les collectivités territoriales.
Dès lors, se pose la question du rôle que pourraient jouer les différents acteurs. Comme je l'ai mentionné, la CNE pourrait se doter d'un secrétariat permanent et il serait utile que la Délégation se prononce sur cette question. En effet, le rôle du Parlement est essentiel sur cette question, d'autant plus qu'il appartient à la loi de définir les modalités de la libre administration des collectivités territoriales et de leurs ressources, conformément aux dispositions de l'article 34 de la Constitution. Dans un État unitaire comme le nôtre, avec une hiérarchie des normes, il revient au législateur de définir qui fait quoi.
S'agissant de la Cour des comptes, l'article 47-2 de la Constitution dispose qu'elle assiste le Gouvernement et le Parlement dans l'évaluation des politiques publiques. Sa mission ne se restreint donc pas aux seules politiques conduites par l'État, mais à l'ensemble de la sphère publique. Cette question, évoquée dans le rapport de M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, sur le projet de loi portant réforme des juridictions financières, est délicate. Mais tous les acteurs publics, et notamment l'État et les collectivités territoriales, gagneraient à bénéficier d'une analyse qui permette l'évaluation des politiques publiques, et non plus seulement le contrôle de celles-ci.
Il ressort des interventions précédentes que la situation est délicate. L'objet de notre rapport sera de définir les outils du dialogue. Il est en effet important de ne pas confondre dialogue et concertation. Nous devrons nous interroger sur les moyens de moderniser les outils actuels du dialogue, voire proposer la création de nouveaux outils susceptibles d'améliorer l'efficacité du dispositif.
Il faudra, bien entendu, faire le bilan des apports de la décentralisation. Il sera également nécessaire d'évaluer le fonctionnement des nombreux organismes de dialogue qui existent aujourd'hui mais agissent de manière isolée.
Il y a un autre point sur lequel le rapport devra revenir, c'est la distinction entre État et Gouvernement, qui sont deux choses différentes. Si le préfet est dans la main du Gouvernement, il n'en demeure pas moins un fonctionnaire soumis à une obligation d'impartialité. Cette neutralité lui permet de dialoguer avec des élus de toutes origines politiques. Lorsqu'un élu discute avec le préfet, il parle avec le représentant de l'État ; lorsqu'il s'adresse au ministre, il s'agit d'une discussion politique. Le préfet relaie la politique du Gouvernement sur le terrain, mais conserve sa neutralité dans le dialogue avec les élus. Il faut éviter toute dérive à ce sujet, qui ne manquerait pas de poser le problème du rapport entre l'élu et le pouvoir central.
La question des relations entre l'État et les collectivités territoriales nous renvoie à l'éternel débat entre jacobins et girondins, entre pouvoir central et pouvoirs locaux. C'est l'histoire de notre pays. D'où les questions : comment trouver un juste équilibre dans la répartition des compétences entre l'État et les collectivités territoriales ? Comment instaurer une confiance réciproque ? Comment trouver cet équilibre ?
Les relations avec l'État sur le territoire sont vécues et ressenties de façon différente selon les régions en fonction des traditions. La région Centre, par exemple, a toujours appartenu au royaume de France. Cela se traduit par une forme de reconnaissance du rôle de l'État et même une tendance des élus à se tourner vers l'État. Cette tradition n'est pas partagée par toutes les régions. Nous sommes un pays unitaire, marqué par des traditions locales. C'est un élément qui doit être pris en compte dans le débat pour établir un dialogue entre l'État et les collectivités locales. Cette toile de fond ne doit pas être ignorée.
Pour aller dans le sens des propos de mon co-rapporteur, je considère également que les modalités de nomination des préfets constituent un élément essentiel pour que les élus ressentent la neutralité de l'État. C'est quelque chose de très important.
Sur la question des structures du dialogue, et après l'état des lieux auquel nous venons de procéder, j'ai l'impression qu'il y a un cumul de mandats dans les instances les plus importantes du dialogue entre l'État et les collectivités territoriales. Ce sont toujours les mêmes dix ou douze parlementaires qui tiennent à peu près les affaires. Ce cumul a des contreparties positives, car il permet d'acquérir des compétences, mais il faut faire attention à éviter une trop grande centralisation.
Enfin, au sujet de la proposition avancée par le directeur général des collectivités locales tendant à la création d'un secrétariat permanent de la CNE, il s'agit là d'une proposition intéressante, mais il est également nécessaire de s'interroger sur le fondement juridique de la CNE. Cette question doit sans doute être clarifiée avant de doter la CNE d'un secrétariat permanent. Cette clarification constitue un sujet connexe aux préoccupations exprimées par Philippe Laurent quant aux fondements de la légitimité des associations d'élus.
Mon expérience d'élu m'a appris qu'il existe deux catégories de préfets : ceux qui ont une approche plutôt juridique de leur fonction et ceux qui privilégient une approche plus gestionnaire. Il s'agit de comportements, d'approches, qui ne sont pas liés à des appartenances politiques mais plutôt à la formation personnelle.
Par ailleurs, je souhaite que les rapporteurs puissent prendre en compte les suggestions présentées par les présidents d'associations, qui constituent autant de propositions concrètes. Je rappelle que notre Délégation a été instituée pour proposer des solutions pragmatiques susceptibles d'améliorer le fonctionnement de la décentralisation.
J'ai trouvé que le directeur général des collectivités territoriales faisait une utilisation très poussée de l'obligation de réserve. A sa place, évoquant la dispersion des instances de dialogue, j'aurais suggéré aux intervenants de se mettre d'accord sur les éléments constitutifs d'une institution représentative, et dans le respect de la fonction législative. J'aurais également demandé pourquoi cet article si important de la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République, prévoyant la création d'un institut des collectivités territoriales et des services publics locaux (article 53), réunissant tous les acteurs, n'a jamais été mis en place.
Je voudrais ajouter deux choses : je suis parfaitement d'accord avec le sénateur Didier Guillaume sur la distinction entre État et Gouvernement. A Mme Gourault, je rappelle que la France est un État jacobin. C'est juste un fait : le Conseil constitutionnel avait censuré une disposition de la loi de décentralisation de 1983 qui prévoyait que les actes des collectivités territoriales seraient exécutoires avant leur transmission aux représentants de l'État. Le Conseil a estimé que cette disposition était contraire à la hiérarchie des normes et a rappelé le rôle du préfet pour veiller aux intérêts de l'État.
A titre personnel, je suis partisan d'une fédération d'élus regroupant l'ensemble des associations pour élaborer des propositions. C'est une démarche qui aurait beaucoup d'écho auprès des partenaires du pouvoir central. Par ailleurs, la question n'est pas celle du partage des compétences au sein d'un État, qui restera unitaire, mais celle de la répartition des pouvoirs.
S'agissant de l'Europe, je crois que les mots ont leur importance et il faut trouver les bonnes définitions, celles acceptées par tous. Ce qui importe, c'est de savoir comment la France se situe par rapport aux autres pays, en fonction de l'histoire de chacun, et de déterminer des référentiels. Notons qu'on n'a jamais autant travaillé ensemble qu'au cours des quatre dernières années ; de même avec le Parlement. Si la CNE ne fonctionne pas, nous pouvons le faire entre nous par rapprochement des trois associations d'élus, même si ce n'est pas ce que je souhaite vraiment. Enfin, à la tête du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, j'ai connu deux étapes : celle avec le secrétariat permanent assuré par la DGCL, puis avec notre propre secrétariat, constitué de fonctionnaires territoriaux. Les rapports ont vraiment changé en passant de l'une à l'autre et, demain, on pourrait peut-être s'en inspirer pour la CNE. M. Jalon nous a aussi dit « l'administration est dans la main du Gouvernement ». Mais le Premier ministre a bien mis en place des groupes de travail, avec un fonctionnaire d'État d'un côté et un élu de l'autre ; voyez le rapport « Carrez-Thénault », qui ont parfaitement su travailler ensemble. Cela fait une différence à nos yeux, notamment pour les solutions susceptibles d'être apportées.
Pendant longtemps, le débat a porté sur l'État jacobin. La France est le seul pays où le centralisme ait réussi. La question est de savoir s'il correspond encore à l'état de la société. Je crois qu'aujourd'hui les collectivités territoriales veulent des politiques comme interlocuteurs.
Je ferai trois observations pour conclure. Premièrement, le problème culturel est essentiel ; lorsqu'on constate que les deux préoccupations les plus importantes aux yeux des Français sont le logement et l'emploi, et que personne ne sait qui pilote sur le terrain ces politiques, on ne s'étonnera pas que cela ne marche pas et coûte cher. J'ai proposé que ce soit les régions ou les intercommunalités qui s'en chargent.
Sur le contexte actuel, je suis convaincu que les sociétés occidentales ne s'en sortiront pas sans un effort de responsabilité, d'initiative, d'innovation, de rigueur financière. Cela passe par un monde plus décentralisé.
Enfin, les fonctionnaires d'État sont de grande compétence mais ils sont mal utilisés. En Aquitaine, j'ai pris l'initiative d'ajouter la formation des détenus dans le champ des compétences de la région. Mais les services de l'État veulent contrôler toutes les actions de formation, sinon on me refuse les ressources du fonds social pour l'emploi (FSE). Je souhaite un État fort, avec des moyens et des compétences claires mais il faut arrêter les doublons, passer du dialogue à la concertation et parvenir à un système d'évaluation des compétences publiques et de bonne gestion des fonds publics.