Mes chers collègues, je vous propose de commencer par l'examen des amendements que la commission estime ne pas relever du domaine de la loi ou qui sont dépourvus de portée normative. Il s'agit des amendements n° 217 rectifié, 18 rectifié ter, 19 rectifié ter et 66 : le premier amendement vise à rétablir l'article 2 bis, que la commission a supprimé au motif qu'il est dépourvu de portée normative, tandis que les trois autres ont pour objet d'appeler les pouvoirs publics à mettre en oeuvre une politique du handicap.
La commission demande au Président du Sénat de se prononcer sur l'irrecevabilité des amendements n° 217 rectifié, 18 rectifié ter, 19 rectifié ter et 66 en application de l'article 41 de la Constitution.
EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR
Article 1er
Les amendements de coordination n° 302, 303 et 304 sont adoptés.
Article 2
L'amendement n° 305 vise à éviter une redondance au sein d'un article du code de la sécurité sociale.
L'amendement n° 305 est adopté.
L'amendement n° 306 tend à lever toute ambiguïté quant à la possibilité d'importer ou d'exporter des gamètes conservés à des fins autologues, en précisant qu'il s'agit de la préservation ou de la restauration de la fertilité.
L'amendement n° 306 est adopté.
Article 3
L'amendement rédactionnel n° 307 est adopté.
Article 5
L'amendement de coordination n° 308 est adopté.
Article 6
L'amendement n° 309 vise à ajouter les enfants dans la liste des membres de la famille qui peuvent bénéficier d'un don de cellules souches hématopoïétiques de la part d'une personne vivante majeure.
L'amendement n° 309 est adopté.
Article 7
L'amendement n° 310 corrige une erreur matérielle.
L'amendement n° 310est adopté.
Article 9
L'amendement rédactionnel n° 311 est adopté.
Article 10 bis
L'amendement n° 312 tend à préciser que l'utilisation et la conservation des données issues de tests génétiques à visée généalogique devront se conformer aux exigences du Règlement général sur la protection des données (RGPD).
L'amendement n° 312 est adopté.
Les amendements de coordination n° 313 et 314 sont adoptés.
Article 12
L'amendement de coordination n° 315 est adopté.
Chapitre Ier : Aménager le régime actuel de recherches sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires
L'amendement n° 316 vise à tenir compte du fait que le chapitre Ier comporte des dispositions relatives aux cellules pluripotentes induites à l'article 15. Je propose en conséquence de modifier l'intitulé de la division.
L'amendement n° 316 est adopté.
Article 14
Les amendements de coordination n°s 317 et 318 sont adoptés.
Article 15
L'amendement n° 319 permet d'éviter tout malentendu : l'encadrement prévu par l'article 15 n'est envisagé que pour les cellules souches pluripotentes d'origine humaine. Des recherches sont en effet aussi effectuées sur des cellules iPS dérivées de cellules somatiques animales. Il convient d'écarter toute idée que l'encadrement envisagé s'appliquerait également aux recherches effectuées exclusivement à partir d'éléments issus d'animaux, l'Agence de la biomédecine n'ayant pas compétence pour ce type de recherches.
L'amendement n° 319 est adopté.
L'amendement de coordination n° 320 est adopté.
Article 21 bis
L'amendement rédactionnel n° 321 est adopté.
Article 26
L'amendement rédactionnel n° 322 est adopté.
Article 30
L'amendement rédactionnel n° 323 est adopté.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
Article additionnel avant le titre Ier : élargir l'accès aux technologies disponibles sans s'affranchir de nos principes éthiques
Les amendements identiques n° 15 rectifié ter, 93 et 163 visent à soumettre la bioéthique au principe de précaution. Je rappelle que ce principe est un principe d'action et non pas d'abstention : il oblige « à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».
Il me semble que le principe même de la bioéthique est plus efficace que le principe de précaution tel qu'il existe. Aussi, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements n° 15 rectifié ter, 93 et 163.
L'amendement n° 14 rectifié ter a pour objet de demander un rapport. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 14 rectifié ter.
L'amendement n° 161 vise également à demander un rapport au Gouvernement sur l'application du principe de précaution en matière de bioéthique. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 161.
Article additionnel avant l'article 1er
L'amendement n° 128 rectifié vise à inscrire dans le code civil l'absence de « droit à l'enfant », par la mention « Nul n'a de droit à l'enfant ». Or nul ne peut être titulaire du droit à l'enfant. L'inscrire dans le code civil revient presque à lui donner une existence. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 128 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
L'amendement n° 37 rectifié bis, sur lequel nous avons déjà donné un avis défavorable, vise à inscrire la primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant dans le code civil. La notion de « considération primordiale » de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) doit être conciliée avec d'autres intérêts. Or la primauté signifie que l'intérêt de l'enfant est de premier rang, ce qui peut être discutable dans certaines situations. L'intérêt de l'enfant demande parfois un peu plus d'équilibre. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 37 rectifié bis et, à défaut, y sera défavorable.
L'amendement n° 144 rectifié, qui a pour objet d'inscrire dans le code civil les droits de l'enfant, me semble satisfait par le droit existant. La protection de l'enfant est déjà reconnue au niveau supra-législatif, par le Conseil constitutionnel et la CIDE. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 144 rectifié et, à défaut, y sera défavorable.
Article 1er
Les amendements identiques n° 4, 42 rectifié, 48, 49, 53, 171 et 188 visent à supprimer cet article, qui étend aux femmes seules ou aux couples de femmes l'assistance médicale à la procréation (AMP). Vous le savez, j'y suis favorable à titre personnel, mais la commission spéciale a émis un avis défavorable sur ce point. J'émets donc un avis défavorable à ces amendements.
L'amendement n° 62 vise à rétablir le texte adopté par l'Assemblée nationale. Or la commission spéciale a notamment introduit le critère d'infertilité pour les couples hétérosexuels. En conséquence, l'avis est défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 62.
Même s'il ne rédige pas tout l'article, l'amendement n° 283 du Gouvernement vise à supprimer le critère d'infertilité pour l'accès à l'AMP par les couples hétérosexuels. C'est le même objet. En conséquence, l'avis est défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 283.
L'amendement n° 258 a le même objet même s'il n'est pas rédigé dans les mêmes termes. L'avis est donc défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 258.
L'avis est le même pour l'amendement n° 225 rectifié, qui a le même objet.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 225 rectifié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 94.
L'amendement n° 196 rectifié vise à supprimer le critère d'infertilité pour l'accès à l'AMP et à ouvrir l'accès à l'AMP en cas de changement de sexe à l'état civil. L'avis est défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 196 rectifié.
L'amendement n° 191 vise également à supprimer le critère d'infertilité pour l'accès à l'AMP. L'avis demeure défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 191.
L'amendement n° 33 rectifié, qui maintient le critère médical pour l'AMP, est satisfait par la rédaction issue des travaux de la commission spéciale. L'AMP a pour objet de remédier à l'infertilité d'un couple ou d'éviter la transmission à l'enfant ou à un membre du couple d'une maladie d'une particulière gravité. Le caractère pathologique d'infertilité doit être médicalement diagnostiqué. La commission spéciale a déjà adopté ces dispositions. Aussi, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j'y serai défavorable.
Les amendements identiques n° 12 rectifié, 51 et 167 prévoient que le recours à l'AMP n'est possible qu'en cas d'échec avéré de tous les autres traitements de l'infertilité et de toute autre technique de restauration de la fertilité. C'est une logique de graduation des soins. Mais il me semble qu'il revient à l'équipe médicale d'apprécier la situation, bien plus qu'au législateur de l'inscrire dans la loi. Je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements n° 12 rectifié, 51 et 167.
L'amendement n° 270 a pour objet de permettre à toute personne en capacité de mener une grossesse d'accéder à l'AMP. Toute personne dotée d'un utérus, quel que soit son sexe à l'état civil, pourrait accéder à l'AMP. Cette proposition est source de confusion. L'avis est défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 270.
L'amendement n° 141 ajoute la mention selon laquelle l'homme et la femme doivent être en âge de procréer pour avoir recours à l'AMP, une mention à laquelle la commission spéciale ne fait plus référence. Le texte issu de nos travaux renvoie les conditions d'âge à une recommandation de bonnes pratiques de l'Agence de la biomédecine, qui a toujours retenu le critère de personnes en âge de procréer. Cette référence est donc implicite dans le texte de la commission. Aussi, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Cet amendement prévoit aussi d'autres conditions : il s'oppose de facto à la PMA post mortem en ce qu'il prévoit que « l'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer ». Par ailleurs, il ajoute une troisième condition, à savoir le consentement. Ces trois conditions posent problème.
L'âge de procréer est laissé à l'appréciation des équipes médicales. Les personnes que nous avons auditionnées ont indiqué que, globalement, cela correspond à l'âge fixé pour le remboursement par la sécurité sociale, c'est-à-dire quarante-trois ans. Mais il peut exceptionnellement arriver qu'une femme en très bonne santé puisse assumer une grossesse jusqu'à 45 ans maximum. L'expression « en âge de procréer » figure déjà dans le texte... depuis quinze ans.
Concernant les hommes, la jurisprudence a retenu 60 ans.
Le texte de la commission spéciale, je le répète, renvoie aux bonnes pratiques de l'Agence de la biomédecine.
Concernant les deux autres conditions, le texte fait déjà référence au consentement de l'homme et de la femme au transfert des embryons humains ou à l'insémination. Nous aurons certainement une discussion en séance sur le transfert d'embryons post mortem.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 141.
Les amendements identiques n° 11 rectifié et 34 rectifié visent à fixer à 43 ans l'âge limite des femmes pour accéder à l'AMP. Comme je viens de le dire, la commission spéciale renvoie aux bonnes pratiques de l'Agence de la biomédecine. Il nous a semblé plus raisonnable de ne pas figer l'âge. Laissons les médecins apprécier la situation. L'avis est défavorable.
La commission émet un avis défavorable aux amendements n° 11 rectifié et 34 rectifié.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 43 rectifié.
L'amendement n° 142 prévoit la non-ouverture de l'AMP aux couples de femmes et aux femmes seules. J'y suis favorable à titre personnel, mais telle n'est pas la position de la commission spéciale. L'avis est donc défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 142.
L'amendement n° 41 rectifié vise à ne pas ouvrir l'AMP aux femmes non mariées. La commission spéciale, qui a longuement débattu de cette question, leur a ouvert l'AMP. En tant que rapporteur, j'émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 41 rectifié.
L'amendement n° 168 vise à fixer à 43 ans l'âge limite de la femme pour bénéficier d'une AMP.
Il s'agit en réalité de l'âge retenu par le Gouvernement, par la sécurité sociale pour ce qui concerne le remboursement et par l'Agence de la biomédecine.
Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j'y serai défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 168.
Les amendements n° 140, 98 et 164 introduisent une clause de conscience pour les médecins et personnels de santé qui ne souhaitent pas participer à l'AMP sans raison médicale. Avis défavorable : il existe déjà, dans le code de déontologie médicale, une clause de conscience générale qui comprend une obligation de rediriger le patient vers un autre professionnel, même si, il est vrai, les instances ordinales l'apprécient de manière assez restrictive. Nous avions aussi rejeté un amendement similaire lors de l'établissement de notre texte.
Les amendements n° 272, 224, 231, 102, 211, 24, 268, 116, 279, 157, 96 et 64 visent à permettre à une femme, dont le conjoint est décédé, de poursuivre le projet parental et d'autoriser l'AMP post mortem.
Il s'agit d'introduire une dérogation pour ne pas infliger à la femme qui vient de perdre son époux une douleur supplémentaire en l'empêchant de poursuivre l'AMP. En effet, le texte actuel prévoit que la femme devra renoncer à l'embryon conçu avec son conjoint compagnon, tout en lui donnant la possibilité d'accueillir l'embryon d'un autre couple. C'est paradoxal ! Toutefois, l'embryon qu'elle avait conçu avec son époux s'inscrivait dans un projet parental, et si le mari disparaît, le projet change aussi. En réalité, l'argument majeur est qu'il ne faut pas traumatiser davantage la femme endeuillée. C'est une situation extrêmement délicate. Mais il faut aussi, me semble-t-il, prendre en compte l'intérêt de l'enfant. Celui-ci est-il vraiment respecté si on le fait naître d'un mort ? C'est un héritage particulièrement lourd à porter. J'ai consulté des pédopsychiatres : il est très difficile de se construire une filiation en sachant que l'on est né d'un père mort. C'est pourquoi, j'émets un avis défavorable. L'intérêt de la femme doit être mis en balance avec l'intérêt de l'enfant ; il est difficile de naître avec une couronne mortuaire dans le berceau.
Mais l'enfant a été conçu avec amour ! Sa mère pourra le lui expliquer. De plus, la situation est ubuesque : la femme devra donner les gamètes ou les embryons ainsi conçus à des inconnus. Ces amendements sont donc logiques et d'humanité.
La question est complexe. C'est une situation que l'on peut rencontrer à l'armée : des jeunes couples qui avaient un projet parental n'ont pu avoir d'enfant car le mari est mort en opération. La question est la suivante : doit-on maintenir la veuve dans la mémoire de son mari ? Ou bien la vie doit-elle continuer ? En fait, on constate que les deux se font, d'où la complexité de la situation : dans un premier temps, la mémoire du défunt est entretenue par les camarades, la famille, les amis, la femme. Mais la vie continue et, avec le temps, la probabilité la plus forte est que la femme reconstruise sa vie. Après un certain temps, la situation n'est alors plus la même et l'enfant conçu pendant la période de deuil risque de se retrouver dans une position un petit peu incongrue. La question est donc délicate, mais je ne suis pas très favorable, pour cette raison, à l'AMP post mortem.
Dimanche dernier, M6 a diffusé un documentaire sur le cas d'une femme dont le mari est décédé d'une leucémie. Au début de la maladie, face au risque d'infertilité, ils avaient entamé une AMP ; cinq embryons ont ainsi été conçus. Une petite fille est déjà née, et, aujourd'hui, l'épouse souhaite obtenir le droit de transférer en Espagne les embryons restant pour obtenir un troisième enfant. Le père avait rédigé, avant sa mort, une lettre, très émouvante, où il exprimait sa volonté que sa femme puisse utiliser les embryons qu'ils avaient conservés. Cette lettre d'amour sera dans le berceau de l'enfant. La mère refuse que les embryons soient détruits ou donnés à d'autres, car ils ont été conçus en commun, avec amour.
J'ai vu aussi le documentaire. Le couple avait l'ambition de fonder une famille nombreuse. Ils ont eu deux enfants. En avoir un troisième constitue un acte d'amour. Même si le père n'est plus là, les enfants seront toujours liés par un lien fraternel très fort. Dans une telle situation, les médecins ont beaucoup de peine à expliquer à la mère qu'elle doit jeter ou donner les embryons. Même le professeur Mattei, pourtant réservé sur le sujet de l'AMP pour les femmes seules, est plutôt favorable à son utilisation dans ce cas-là. Mais il faut toutefois que certaines conditions soient remplies - volontés anticipées écrites du défunt, entourage familial solide, délais, etc. -, car il ne faut pas faire un enfant pour remplacer l'être cher disparu.