Séance en hémicycle du 27 mai 2021 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Madame la présidente, mes collègues Nadine Bellurot, Céline Boulay-Espéronnier, Mathieu Darnaud, Marc-Philippe Daubresse, Jean-François Husson, Ronan Le Gleut, Isabelle Raimond-Pavero, Stéphane Sautarel, Elsa Schalck et Cédric Vial souhaitaient s’abstenir sur le scrutin n° 126 portant sur l’article 4 de la proposition de loi pour un élevage éthique, juste socialement et soucieux du bien-être animal.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Madame la présidente, je souhaite moi aussi faire une mise au point au sujet du scrutin n° 126.

Mes collègues David Assouline, Hussein Bourgi, Hélène Conway-Mouret, Michel Dagbert, Gilbert-Luc Devinaz, Martine Filleul, Jean-Michel Houllegatte, Victoire Jasmin, Bernard Jomier, Gisèle Jourda, Claudine Lepage, Jean-Jacques Lozach, Michelle Meunier, Laurence Rossignol, Rachid Temal et André Vallini souhaitaient voter pour et non s’abstenir.

Mon collègue Olivier Jacquin, quant à lui, souhaitait ne pas participer au vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, de la proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises, présentée par Mme Hélène Conway-Mouret et plusieurs de ses collègues (proposition n° 311, résultat des travaux de la commission n° 606, rapport n° 605).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteure de la proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, permettez-moi dans un premier temps de me réjouir de voir deux ministres au banc. J’y vois là un signe très positif de l’attention que nous accordons, Parlement et exécutif, à notre jeunesse.

Je tiens également à remercier Mme la rapporteure Jacky Deromedi pour le travail qu’elle a réalisé et le dialogue que nous avons entretenu même si, malheureusement, celui-ci ne nous a pas permis de parvenir à un consensus, lequel aurait pourtant contribué à l’amélioration du texte.

Je le regrette vivement parce que l’objet de la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui est au cœur de notre projet républicain : l’égalité des chances et l’accès des jeunes à l’emploi, notamment des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale.

Ce texte s’inscrit pleinement parmi les priorités que notre groupe politique s’est fixées dans le cadre, à la fois de la mission en cours de notre collègue Monique Lubin sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, et de la proposition de loi relative aux droits nouveaux dès dix-huit ans de notre collègue Rémi Cardon, que nous avons examinée en janvier dernier.

Le présent texte s’appuie sur les observations des acteurs de terrain avec lesquels j’ai l’habitude de travailler depuis de nombreuses années. Il part d’un constat : notre système scolaire est profondément inégalitaire, marqué par une reproduction sociale et économique des élites, non seulement dans l’administration, mais aussi dans notre tissu industriel et commercial.

Notre marché du travail est à son image : les employeurs s’attachent encore beaucoup au diplôme ou au concours d’entrée, qui détermine souvent le reste de la carrière. Or, premier obstacle, ceux-ci ne sont pas accessibles à tous. Deuxième obstacle, même les plus diplômés issus de certaines catégories sociales ont beaucoup de mal à s’insérer sur le marché du travail. J’en veux pour preuve que le taux d’emploi des diplômés âgés de 20 à 34 ans s’élevait à 74 % en France en 2017, contre 80 % pour la moyenne européenne.

La France est également l’un des pays membres de l’Union européenne comptant le plus de jeunes âgés de 15 à 29 ans n’ayant pas de travail ou ne suivant ni études ni formation.

La crise sanitaire que nous traversons a exacerbé les inégalités et a frappé durement notre jeunesse. Le taux de chômage des jeunes âgés de 18 à 25 ans a augmenté : il a atteint 21, 8 % en 2020. Le taux d’emploi a reculé quatre fois plus pour cette catégorie d’âge que dans le reste de la population. Les conditions de vie des jeunes sont précaires : un jeune de moins de 25 ans sur cinq vit au-dessous du seuil de pauvreté.

L’éloignement géographique en milieu rural, dans les territoires d’outre-mer, ou le fait de vivre dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville constituent aujourd’hui un barrage, notamment pour les familles les plus modestes. Ils contribuent de facto à la faible représentation des jeunes issus de ces territoires au sein des grandes écoles et des classes préparatoires, concentrées pour la plupart à Paris.

La haute fonction publique n’est pas à l’image de la société. La France est l’un des pays où la reproduction sociale des élites est la plus forte, ce qui concourt à une perception de plus en plus négative de la classe dirigeante, à l’égard de laquelle la défiance est grandissante.

Les enfants de cadres supérieurs représentent au moins la moitié des élèves des grandes écoles, voire parfois jusqu’à 70 % – notamment à l’ENA ou à Polytechnique –, alors qu’ils constituent à peine un quart de l’ensemble des jeunes de leur âge. On ne compte plus que 4 % d’enfants d’ouvriers à l’ENA, 2 % dans les écoles normales supérieures, et pratiquement aucun – 0, 4 % – à Polytechnique, preuve, s’il en fallait une, que le système de formation des élites en France est socialement endogène.

Le mouvement des « gilets jaunes » a révélé ce sentiment de relégation d’une partie importante de la population. Pour rétablir la confiance, il faut, entre autres choses, étendre les possibilités d’accès aux plus hautes fonctions de l’administration et dans les entreprises et assurer dans ces milieux une plus grande représentativité de la société.

« L’ascenseur social n’est pas seulement en panne : il descend » analyse le sociologue Camille Peugny dans son livre intitulé Le D éclassement. Le système scolaire ne garantit plus toujours la réussite professionnelle ; il suscite chez de trop nombreux jeunes un sentiment de rejet ou d’abandon et chez nos diplômés un sentiment de frustration, voire un certain fatalisme, qui les conduit à ne même pas postuler aux emplois auxquels leurs études les ont préparés.

Les politiques dites « de la ville » ou « de la seconde chance » ne sont pas véritablement parvenues à briser le plafond de verre, malgré tous les efforts déployés par les gouvernements successifs – le président Kanner pourra en parler –, y compris celui auquel vous appartenez, mesdames les ministres, en dépit de la panoplie de mesures que vous proposez de mettre en œuvre.

Cette proposition de loi a pour seul objet de faciliter l’insertion de tous les jeunes sur le marché du travail, quels que soient leur milieu social et leur ancrage territorial. Nous nous adressons donc à la majorité d’entre eux.

Pour les jeunes, l’accès à l’emploi est source d’autonomie financière et d’accomplissement social. Pour l’État, la diversité sociale au sein des administrations et des entreprises est à la fois le gage que tous les talents sont mis au service de la France et un moyen de renforcer la cohésion de notre société.

Si cette proposition de loi prévoit en grande partie des mesures concrètes pour faciliter l’accès à notre administration et à nos entreprises, elle participe de fait à une politique active de lutte contre les discriminations.

S’il existe aujourd’hui plusieurs dispositifs de contrôle, aucun n’est destiné à accroître la mobilité sociale au sein de la fonction publique. C’est pourquoi nous prévoyons de créer une nouvelle autorité publique indépendante : l’Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. Cette autorité serait chargée de veiller à ce que la fonction publique soit représentative de la diversité sociale, que ce soit par ses voies d’accès, ses modalités de promotion interne, ou encore par les garanties qu’elle apporte afin d’assurer un déroulement de carrière équitable entre les agents.

Nous n’avons pas d’outil exclusivement consacré à cet objectif, qui permettrait véritablement d’évaluer les mesures prises et qui nous conférerait, éventuellement, un pouvoir de contrôle. La population considère majoritairement que les politiques publiques mises en œuvre ne sont pas efficaces. Donnons-nous donc enfin les moyens de prouver qu’elles le sont, sur le fondement d’indicateurs et de critères fiables, et de rassembler toutes les données à cet égard dans un rapport que nous voulons annuel.

Dans certains quartiers, l’État n’est pas assez présent. Nous proposons que les fonctions de délégué du préfet dans les quartiers soient prioritairement occupées par des personnes ayant ou exerçant une activité professionnelle dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. Ces délégués permettraient aux jeunes de se reconnaître dans les représentants de l’autorité de l’État. Ils serviraient également de relais des représentants auprès de leurs collègues, moins familiers de cet environnement.

Nous souhaitons promouvoir tous les talents en valorisant les personnes issues des zones urbaines et rurales. Nous faisons bien la promotion de la diversité sociale et territoriale dans ce texte, et non celle de la diversité au sens large.

Pour ce faire, nous nous donnons pour ambition de réhabiliter les diplômes obtenus dans les établissements scolaires situés dans des zones prioritaires et rurales. Il existe de nombreuses initiatives pour les jeunes des quartiers prioritaires, mais beaucoup moins pour les jeunes issus des milieux ruraux, qui sont mal informés et ne bénéficient pas du même accès aux filières préparatoires. Certains s’autocensurent et ne s’autorisent même pas à s’inscrire dans des établissements supérieurs. Beaucoup n’exercent pas pleinement leurs droits, parce qu’ils ne les connaissent pas. J’imagine que la création du label Cités de la jeunesse tend à y remédier.

Pour ceux qui n’ont pas appris les codes véhiculés par les meilleures écoles, la réussite aux concours, qui repose en grande partie sur une formation type que procure d’abord l’accès auxdites écoles, est problématique. Nombreux sont les jeunes issus des familles plus modestes qui réussissent les écrits, mais échouent aux oraux, car ils n’ont pas acquis les codes non écrits et pourtant requis. Les profils différents, en dehors des voies traditionnelles, semblent exclus d’office.

Nous proposons donc que, dans la mesure du possible, les jurys des épreuves orales des concours d’entrée dans la fonction publique de l’État soient composés d’au moins une personne issue de la société civile – associations, entreprises –, c’est-à-dire d’une personne n’appartenant pas au corps de recrutement.

Le Gouvernement a annoncé s’attaquer à la réforme de la haute fonction publique, notamment en remplaçant l’ENA par l’Institut du service public en janvier 2022. Or il ne suffit pas de changer un nom pour diversifier notre fonction publique : nous pouvons et devons la transformer aussi en démontrant que les candidats aux concours seront traités équitablement, et ce non pas en instaurant des quotas ou des filières particulières, mais en appliquant le principe d’égalité des chances grâce, notamment, à certaines des mesures que nous proposons.

Il existe, il est vrai, de nombreuses études qui analysent les discriminations. Selon le Défenseur des droits, près d’une personne sur deux considère que les discriminations sont fréquentes ou très fréquentes lors de la recherche d’emploi. Dans son rapport publié en juin 2020, Jacques Toubon soulignait également que les discriminations fondées sur l’origine sont importantes et leur nature systémique. Il écrivait alors que « les discriminations ne sont pas le résultat de logiques individuelles de quelques DRH » et que « c’est tout le système qui est en cause, un système qui reproduit les inégalités ».

Cette situation a des conséquences graves sur les parcours individuels et les groupes sociaux concernés et entame la confiance dans l’État et la cohésion de la société. C’est pourquoi il est urgent de lutter contre certaines formes de discrimination.

Le lieu d’origine est malheureusement encore trop souvent handicapant pour les candidats. Nous proposons de supprimer sa mention, après la disparition de celle du lieu de résidence. Dans la phase de recrutement, nous souhaitons que les candidats non retenus puissent, s’ils le demandent, obtenir des explications sur leur performance, afin d’éliminer les faiblesses identifiées lors d’un entretien d’embauche. Ces éléments d’appréciation seraient très utiles pour la préparation des futurs entretiens du candidat. Tel est l’objet de l’amendement que nous avons déposé, Jean-Pierre Sueur et moi-même, à l’article 6.

Madame la ministre de Montchalin, vous avez récemment souligné la nécessité absolue de casser l’entre-soi et les corporatismes et de lutter contre les inégalités de destin. Il me semble que cette proposition de loi va dans ce sens et qu’elle vise à atteindre les objectifs que vous avez fixés.

J’espère que ce texte recevra plus largement l’approbation de mes très honorables collègues qui, ce faisant, donneront encore une fois raison à Jean Jaurès, lorsqu’il disait qu’il convient d’aller vers l’idéal en passant par le réel, l’idéal d’une société égalitaire et le réel d’une intégration effective de tous les jeunes !

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, la proposition de loi de Mme Hélène Conway-Mouret et des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain vise à favoriser l’accès des jeunes à la fonction publique et aux entreprises.

À l’heure où la jeunesse est particulièrement touchée par la crise sanitaire et les restrictions d’activité qui en découlent, nous ne pouvons qu’en partager l’objectif. Le Sénat conduit d’ailleurs actuellement trois missions d’information sur des sujets proches, ce qui démontre sa volonté de faire avancer ces questions.

Toutefois, l’examen de la présente proposition de loi a suscité diverses interrogations d’ordre à la fois constitutionnel et pratique, auxquelles les amendements déposés en commission, puis en séance, ne semblent pas répondre. Dans ces conditions, la commission des lois n’a pas pu adopter de texte.

La proposition de loi vise à compléter le droit existant par une série de mesures tendant, tout d’abord, à favoriser l’entrée des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale dans la fonction publique de l’État et, ensuite, à limiter les risques de discrimination à laquelle ils sont confrontés dans le monde de l’entreprise.

Il s’agirait ainsi de corriger des inégalités de parcours, dont de nombreux travaux conduits ces dernières années sur le thème de la diversité et de l’égalité des chances établissent la réalité.

L’article 1er est assez emblématique. Il prévoit notamment de réserver une proportion minimale de nominations aux emplois de la haute fonction publique de l’État, laissés à la décision du Gouvernement, à des personnes qui ont ou ont eu une expérience professionnelle d’au moins deux ans dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.

Cette disposition s’inspire du dispositif des nominations équilibrées, qui oblige certains employeurs publics à nommer 40 % de personnes de chaque sexe dans les emplois supérieurs et de direction.

Toutefois, ce modèle est difficilement transposable dans notre cas en raison d’une difficulté d’ordre constitutionnel. En effet, les nominations par priorité de certaines catégories de personnes aux emplois publics sont contraires au principe d’égalité et à l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. En droit français, l’introduction de quotas pour assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la vie politique et professionnelle a nécessité deux révisions constitutionnelles préalables.

Par ailleurs, cet article introduirait un nouveau critère de différenciation, l’expérience professionnelle dans un quartier prioritaire. Or le choix de ce critère soulève une interrogation : vise-t-il à enrichir les parcours des hauts fonctionnaires en les incitant à aller travailler dans un quartier prioritaire ou à favoriser la nomination de personnes issues de ces quartiers ?

Enfin, il semblerait que la valorisation des parcours des candidats dans les territoires et de leur expérience de vie ait davantage la faveur des représentants des associations que j’ai entendus.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission n’est pas favorable à l’article 1er, même amendé pour transformer le quota prévu en simple critère de priorisation.

L’article 3 a retenu l’attention de la commission, car il semble nécessaire de diversifier et de former les membres des jurys pour éviter les biais évaluatifs qui peuvent favoriser certains candidats au détriment d’autres, à compétences égales ou moindres.

Néanmoins, le fait d’imposer la présence obligatoire, dans chaque jury, de personnes extérieures à l’administration, et ce dans le respect de l’obligation de nomination équilibrée entre les femmes et les hommes déjà applicable, risque de donner lieu à de véritables casse-têtes pour les organisateurs.

D’un point de vue pratique, et au-delà du débat sur le profil des personnes à choisir, il paraît compliqué de recruter un nombre suffisant de personnes extérieures à l’administration ayant la disponibilité nécessaire pour siéger dans les très nombreux jurys organisés par l’État. À titre d’illustration, en 2018, plus de 41 000 postes de la fonction publique de l’État ont été ouverts par voie de concours externe, ce qui donne une idée du volume de concours à organiser et du nombre de jurys à constituer.

C’est donc pour une raison pratique cette fois-ci que la commission n’a pas adopté l’article 3. L’amendement du groupe socialiste tendant à prévoir que les jurys doivent comprendre non plus au moins 50 % de personnes extérieures à l’administration, mais une seule personne au minimum n’a pas modifié la position de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

C’est une bonne pratique qui peut déjà être mise en œuvre et qui ne semble opportune que pour certaines épreuves. La généraliser rigidifierait à l’excès les règles de composition des jurys.

Par ailleurs, la commission n’est pas favorable aux mesures proposées pour les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

À l’article 5, l’ajout d’un vingt-sixième critère de discrimination en matière de droit du travail nous a semblé relever d’un niveau de précision qui n’est pas nécessaire : il est en effet déjà satisfait par les critères de l’origine et du lieu de résidence, réellement protecteurs.

À l’article 6, le fait d’obliger les entreprises à indiquer, à tout candidat refusé qui le demanderait, les motifs pour lesquels celui-ci n’a pas été embauché risque de faire naître un important contentieux prud’homal.

Cette obligation serait une charge administrative lourde pour les petites et moyennes entreprises, même si l’on en restreint le champ aux seuls candidats reçus en entretien et le demandant, comme le proposent les auteurs de l’un des amendements déposés. Cette disposition pourrait de surcroît se révéler contre-productive en ne suscitant qu’une motivation stéréotypée de la part des employeurs.

Quant à l’obligation pour les entreprises de plus de cinquante salariés de recueillir des données en vue de mettre des indicateurs sur l’égalité des chances à la disposition du comité social et économique, mesure prévue à l’article 7, elle soumettrait l’employeur à des règles de collecte et de conservation très contraignantes, sous le contrôle de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Il s’agirait en effet de données sensibles destinées à permettre l’évolution des salariés selon leur origine sociale, culturelle ou géographique.

Comme l’a relevé le président de la délégation sénatoriale aux entreprises, toutes ces mesures laissent en outre penser que les employeurs favoriseraient a priori les discriminations, alors que leurs difficultés actuelles à recruter les conduisent au contraire à diversifier les viviers de candidats.

À mon sens, les difficultés d’accès des jeunes à l’emploi résultent non pas de leur origine géographique, qu’ils soient issus de quartiers prioritaires de la politique de la ville ou de zones de revitalisation rurale, mais d’une inadéquation entre leur formation et les compétences recherchées par les employeurs.

En conclusion, la commission des lois estime que cette proposition de loi aborde de véritables problématiques, tout à fait dignes d’intérêt. L’objectif de favoriser l’emploi des jeunes, et spécifiquement l’emploi des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale, doit recueillir toute notre attention.

Cependant, les solutions proposées soulèvent des interrogations sur les plans à la fois juridique et pratique, que les amendements déposés n’ont malheureusement pas pu dissiper. La commission vous propose donc de ne pas adopter la proposition de loi.

Pour ma part, je pense, comme les auteurs de ce texte, que beaucoup reste encore à faire pour les jeunes, par exemple dans le secteur de l’apprentissage et de la formation en alternance. De nombreux jeunes pourraient ainsi s’épanouir en apprenant un métier et avoir des perspectives d’avenir. Je crois beaucoup à de telles formations, si possible dès l’âge de 14 ans, accompagnées de garanties en termes d’instruction générale. J’espère que nous aurons prochainement l’occasion de discuter d’un nouveau texte sur ce sujet.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Madame la présidente, madame la ministre, chère Nadia, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, madame la sénatrice Hélène Conway-Mouret, mesdames, messieurs les sénateurs, notre fonction publique doit redevenir le symbole qu’elle a été durant près d’un siècle, c’est-à-dire un élément fondateur de notre ascenseur social républicain, un lieu de sens et de service de l’intérêt général.

Tous ceux qui aspirent à servir l’intérêt général, qu’ils soient dans les quartiers, en périphérie des villes ou au cœur de nos villages ruraux, doivent pouvoir avoir cette chance. Il est plus que jamais de notre responsabilité d’aller chercher ces talents partout en France et de les accompagner vers les concours de notre fonction publique.

Vous l’avez dit, madame la sénatrice, une partie de notre jeunesse ne croit plus en ses chances au sein de la République. Nous avons donc l’impérieuse responsabilité d’agir rapidement.

Ce constat, cette finalité, nous les partageons – je crois – sur toutes les travées de cette assemblée. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans cette perspective.

Vous le savez, le Gouvernement n’a pas attendu ce texte pour agir de façon déterminée en faveur de l’égalité des chances dès le plus jeune âge. La fonction publique doit prendre toute sa part afin de répondre à cette exigence fondamentale qui est au cœur de notre pacte républicain.

Dès mon arrivée à ce ministère, sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, j’ai fait du renforcement de l’égalité des chances pour l’accès des jeunes à la fonction publique une priorité.

C’est tout le sens du programme Talents du service public, présenté à l’institut régional d’administration de Nantes par le Président de la République en février dernier. C’est aussi toute l’ambition de l’action que nous conduisons pour améliorer l’attractivité de notre fonction publique auprès de notre jeunesse afin de faire émerger une nouvelle génération de talents.

Permettez-moi de détailler ces deux priorités, car elles sont au cœur de notre débat.

D’abord, le programme Talents du service public repose sur le principe qu’il nous appartient d’aller chercher les talents partout en France, dans les collèges, les lycées, les universités, de lutter contre les frustrations – vous avez employé ce terme à juste titre, madame la sénatrice – et l’autocensure qui minent leur ambition et d’accompagner toute notre jeunesse vers les concours de notre fonction publique.

Ce programme repose sur trois fondements.

Tout d’abord, la création des Cordées de service public mobilise les écoles de service public, ainsi que les collèges et les lycées du réseau des Cordées de la réussite pour accompagner des jeunes partout sur le territoire, y compris là où la méconnaissance des possibilités et l’autocensure des jeunes sont des freins. Nous développons le tutorat et le mentorat pour ouvrir l’accès aux postes de la fonction publique et accroître la connaissance de ces métiers.

Ensuite, la création de soixante-quatorze classes préparatoires dites « Talents du service public » partout en France, à Orléans, à Valenciennes, à Agen, dans l’ensemble des villes où se situent des centres universitaires, de Brest à Limoges, vise à préparer aux concours de la fonction publique.

Ces classes seront ouvertes aux boursiers les plus méritants de l’enseignement supérieur. Dès la rentrée 2021, ce sont 1 700 étudiants qui pourront ainsi les rejoindre. Par ailleurs, ces étudiants bénéficieront d’une bourse, dont le montant a été doublé et porté de 2 000 à 4 000 euros par an à la suite des dernières discussions budgétaires.

Avec la création de ces classes préparatoires en leur sein, les universités jouent un rôle majeur dans le renforcement du maillage territorial, au plus près de nos étudiants.

Les étudiants bénéficieront d’un accompagnement renforcé et, notamment, d’un tutorat effectué par des élèves d’écoles de service public et de jeunes fonctionnaires ou hauts fonctionnaires – on le sait, beaucoup des choses qu’il faut savoir pour réussir les concours ne s’apprennent pas dans les livres. Ils se verront également offrir des stages dans certaines administrations.

Enfin, nous ouvrons dès cette année une nouvelle voie d’accès aux concours de la fonction publique pour les élèves de ces classes préparatoires.

Cette nouvelle voie a été créée par l’ordonnance prise dans le cadre de l’article 59 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Elle verra le jour dès cette année, ce qui permettra à trente-cinq jeunes d’accéder à cinq écoles de formation de hauts fonctionnaires, après avoir subi des épreuves identiques à celles qu’auront passées les candidats aux concours externes.

Le programme Talents du service public fait directement écho à l’esprit qui a animé les auteurs de cette proposition de loi. Les outils sont déjà mis en place et opérationnels. Il me paraît important de laisser ces mesures porter leurs fruits avant de légiférer de nouveau sur ce sujet majeur – je partage votre position, madame la sénatrice Conway-Mouret – et de prendre un risque juridique inutile en superposant des dispositifs qui pourraient se télescoper.

Le deuxième axe de notre politique est le renforcement de l’attractivité de la fonction publique auprès des jeunes.

Beaucoup de jeunes peinent aujourd’hui à accéder à un emploi du fait de la crise sanitaire, ce qui a conduit le Gouvernement à lancer, l’été dernier, le plan « 1 jeune, 1 solution » dans lequel la fonction publique prend toute sa part.

Nous recruterons plus d’apprentis dans la fonction publique de l’État – nous venons de nous engager à en embaucher 15 000 dès cette année – et développons les stages – nous offrirons ainsi 43 000 stages en 2021 –, afin d’ouvrir de nouveaux chemins et de susciter de nouvelles vocations.

J’en viens au versant territorial de la fonction publique. À cet égard, je tiens à saluer l’engagement des sénateurs, notamment lors des discussions budgétaires de l’hiver dernier, en particulier celui de la rapporteure pour avis Catherine Di Folco, avec qui nous travaillons de manière étroite. Le Gouvernement a choisi d’aider les employeurs territoriaux à recruter des apprentis en les faisant bénéficier, à l’instar des entreprises du secteur privé, d’une aide financière de 3 000 euros. Cette aide ponctuelle vient d’ailleurs d’être prolongée par le Gouvernement jusqu’à la fin de l’année 2021.

Nous réfléchissons également, avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et les employeurs territoriaux, afin de trouver une équation budgétaire, de moyen et de long terme, adaptée aux besoins de ces employeurs.

Par ailleurs, l’État maintient son objectif de recruter 6 % d’apprentis en situation de handicap.

Pour accompagner ces mesures, j’ai par ailleurs lancé une ambitieuse campagne de communication, #Rejoinsleservicepublic, pour que plus aucun jeune Français âgé de 16 à 24 ans ne se dise : « La fonction publique, ce n’est pas pour moi ! »

Enfin, parce que la promotion de la diversité ne peut s’arrêter au stade du recrutement, la réforme de la haute fonction publique, que j’ai présentée hier devant votre commission des lois, place les questions de diversité, d’ouverture et d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au cœur de la gestion des carrières.

La création d’une direction interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État, qui comprendra un responsable de la diversité, chargé notamment d’assurer la diversité, entendue dans un sens très large comme une ambition d’ouverture à l’ensemble des talents de notre pays, permettra de promouvoir l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et d’en faire une priorité de l’encadrement supérieur de l’État.

J’ai la conviction que l’ensemble de ces mesures permettront de susciter des vocations et de renouveler l’attractivité de notre fonction publique.

Vous le voyez, les objectifs de ce texte concordent largement avec l’ensemble des mesures prises par le Gouvernement ces derniers mois. Pour autant, nous nous heurtons avec cette proposition de loi à plusieurs obstacles juridiques. Le Gouvernement estime en effet que celle-ci comporte certaines dispositions qui pourraient entrer en collision avec les dispositifs que nous avons déjà mis en œuvre.

Si je partage les objectifs visés par le texte, j’y suis défavorable, car je ne souhaite pas que nous fragilisions la politique que nous avons engagée.

Je vous renouvelle mes remerciements, madame la sénatrice, pour le travail que vous avez fourni et pour votre engagement. Je me tiens à votre disposition, ainsi qu’à celle de l’ensemble des sénateurs, pour travailler ensemble sur le sujet. Je suis évidemment prête à vous associer au suivi et à l’évaluation des dispositifs actuellement mis en œuvre par le Gouvernement pour atteindre les mêmes objectifs que ceux que vous cherchez à atteindre.

Debut de section - Permalien
Nadia Hai

Madame la présidente, madame la ministre, chère Amélie, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, madame la sénatrice Hélène Conway-Mouret, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, nous voici réunis pour discuter de la proposition de loi de Mme la sénatrice Hélène Conway-Mouret, qui traite de la lutte contre les discriminations et de l’égalité des chances.

Je connais votre engagement, madame Conway-Mouret. D’ailleurs, si nous avons un point commun, c’est bien celui-là ! En tant que parlementaire, je me suis engagée sur ces questions durant trois années et je le suis encore plus aujourd’hui, en ma qualité de ministre de la ville. Je connais donc les difficultés que rencontrent les jeunes des territoires fragiles ; elles n’ont pas changé, elles se sont même aggravées avec la crise sanitaire.

Dans les Bouches-du-Rhône et le Jura, voilà quelques jours, ou encore hier à Poitiers, j’ai effectué plusieurs déplacements sur le thème de la jeunesse et de la sortie de crise. J’ai écouté les jeunes, les habitants, les professionnels parler de leur quotidien dans les quartiers. Ce qui a été accompli depuis quatre ans commence à produire des effets perceptibles ; il nous faut redoubler d’efforts pour que la promesse républicaine soit tenue.

Nous nous devons d’avoir un projet ambitieux pour nos concitoyens, pour l’avenir des jeunes, notamment ceux qui résident dans les territoires fragiles.

Dès le mois de mai 2018, le Président de la République a exprimé sa conviction profonde : oui, la politique de la ville est avant tout une « politique de l’émancipation et de la dignité » pour des habitants qui cumulent difficultés sociales, économiques et éducatives et voient de ce fait leur réussite professionnelle et personnelle entravée.

C’est à cette même occasion que le Conseil présidentiel des villes a été créé par le Président de la République, avec l’objectif de réunir des personnalités issues des quartiers, qui officieraient comme « capteurs » afin de nourrir la réflexion sur la politique de la ville. C’est une instance avec laquelle j’échange régulièrement, notamment sur l’égalité des chances et l’émancipation.

Cette égalité des chances, mise en exergue dans la proposition de loi, est au cœur de l’action gouvernementale, que nous voulons éloignée des grands principes et au plus près des dures réalités que connaissent nos concitoyens dans les territoires fragiles. C’est tout l’enjeu de la mission qui incombe au ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, regroupant, autour de la ministre Jacqueline Gourault, Joël Giraud, Cédric O et moi-même.

J’entends les regrets exprimés sur l’absence de textes législatifs sur l’égalité des chances. Mais agir dans ce domaine n’implique pas nécessairement de modifier notre arsenal législatif.

Ce qui nous semble aujourd’hui impératif, c’est la mise œuvre, avec des moyens nécessaires et ambitieux.

Ce qui nous semble aujourd’hui impératif, comme vient de l’évoquer ma collègue Amélie de Montchalin, c’est de casser les codes et les corps établis, de rendre accessible tout ce qui paraît inatteignable aux jeunes et, plus largement, aux habitants des territoires fragiles.

Comme vous le savez, dès 2017 et dès notre arrivée aux responsabilités, nous avons souhaité mettre un terme à la minoration, effective depuis plusieurs années, du budget de la politique de la ville. Celui-ci a même été accru au cours des trois dernières années.

Dans un contexte dégradé par la crise sanitaire, sociale et économique, nous avons engagé de véritables mesures en faveur de l’égalité des chances. Un agenda a été ouvert par le Président de la République ; il est mis en œuvre à travers des dispositions concrètes, au plus près des besoins de nos concitoyens, loin des discussions et des vœux pieux.

Pour faire de l’égalité des chances une réalité, nous avons posé plusieurs briques. Ma collègue Amélie de Montchalin a déjà détaillé ce qui concerne la fonction publique. Mes collègues Élisabeth Borne et Sarah El Haïry développent la pratique du mentorat sur tout le territoire national, à laquelle le ministère de la ville contribue depuis plusieurs années en accordant son soutien au tissu associatif.

La première brique posée dans le cadre de l’agenda fixé par le Président de la République l’a été en janvier dernier, avec la réunion à Grigny, sous la présidence du Premier ministre, du Comité interministériel à la ville (CIV), qui ne s’était pas réuni sous cette forme depuis huit ans.

Cette réunion a abouti à un renforcement sans précédent des moyens d’action de l’État en faveur des habitants des quartiers, notamment des jeunes, grâce à un effort financier supplémentaire de 3, 3 milliards d’euros. Disons-le, c’est inédit !

Au-delà de cet accroissement budgétaire, il s’agit de mener une action forte et impactante afin de répondre aux besoins exprimés par les habitants en matière d’émancipation par l’éducation et par l’emploi, cette action s’intéressant, enfin, à l’attractivité et à l’image des quartiers. Soyons clairs, la lutte contre les discriminations n’a pas de couleur politique ; sa seule couleur, c’est l’action et, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, nous agissons !

Nous agissons en changeant de méthode pour accompagner au mieux les acteurs, et ce à partir d’un constat bien précis. Les discriminations à l’embauche existent-elles ? Oui ! Les discriminations dans l’évolution de carrière existent-elles ? Oui ! Notre arsenal législatif est-il suffisamment doté pour relever les manquements et appliquer des sanctions ? Oui ! Pour autant, doit-on rester inactif sur le sujet ? Évidemment, non !

Voilà pourquoi le Président de la République nous a exhortés, bien plus qu’à prendre des mesures, à revoir la méthode. Dans ce cadre, il nous semble opportun de partir des expériences du terrain, de travailler avec les acteurs et les élus locaux, territoire par territoire, pour construire des solutions au plus près de nos concitoyens.

Nous nous appuyons aussi sur le fait qu’il existe, en plus des discriminations, des inégalités de destin dès la naissance.

Il nous faut donc agir, en mettant en place un véritable accompagnement pour le développement de l’enfant dans un environnement sain et sécurisé. C’est le programme des 1 000 premiers jours, porté par mon collègue Adrien Taquet.

Il nous faut poursuivre en luttant contre le décrochage scolaire et en garantissant un parcours de qualité à chaque enfant de la République. C’est l’action que mène Jean-Michel Blanquer, notamment à travers le dédoublement des classes de grande section, CP et CE1 dans les établissements du réseau d’éducation prioritaire et du réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP et REP+) ou encore la création du label Cités éducatives, une démarche partenariale entre le ministère de la ville et celui de l’éducation nationale, qui conduira à la création de 200 cités d’ici à 2022.

Nous agissons aussi pour l’éducation et l’égalité des chances via le dispositif des Cordées de la réussite, notamment dans le service public, dispositif précédemment évoqué par ma collègue Amélie de Montchalin.

L’autre levier d’émancipation est évidemment l’emploi.

Dans ce domaine aussi, nous avons décidé de mettre en place de nouvelles méthodes en faveur de l’emploi dans nos territoires, grâce, notamment, aux Cités de l’emploi.

Vous avez raison, madame la sénatrice Conway-Mouret, les jeunes rencontrent des difficultés en matière d’insertion professionnelle dans les territoires fragiles, particulièrement dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Les Cités de l’emploi ont donc pour but de contribuer à trouver des candidats parmi les publics de ces quartiers, en fonction des besoins en recrutement et des compétences demandées, et de les accompagner vers l’insertion professionnelle. Il s’agit de mieux coordonner les acteurs de terrain afin de faciliter l’accès à la formation – Mme la rapporteure Jacky Deromedi l’a souligné –, à l’emploi et à la création d’activité. Entreprises, collectivités, services publics de l’emploi, services des préfectures, associations, médiateurs, éducateurs de rue : il faut associer tous ceux qui font la vie locale.

Pour atteindre nos objectifs en termes d’emploi, il nous faut également agir sur le soutien au développement économique et l’image des quartiers.

Cela passe bien sûr par le Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) que nous menons et intensifions avec l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), aux côtés des élus et des bailleurs.

Cela passe aussi par l’expérimentation du programme Quartiers productifs, qui vise à accompagner les collectivités locales dans la définition et la mise en œuvre de stratégies de développement économique dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, en partenariat avec la Caisse des dépôts et consignations, l’Agence nationale de la cohésion des territoires, Bpifrance et l’ANRU. Nous souhaitons y développer des commerces de proximité, faciliter l’installation de nouvelles activités industrielles ou de services, qui permettront la création d’emplois au bénéfice des habitants de ces quartiers.

Toutes ces actions contribuent à accroître l’attractivité économique de nos quartiers et à restaurer leur image dégradée, laquelle entretient la discrimination liée au lieu de résidence.

J’ai également lancé, hier, le label Cités de la jeunesse pour traiter les problèmes, évoqués par Mme Conway-Mouret, de non-recours aux droits, par manque d’accès à l’information ou, parfois, aux dispositifs eux-mêmes. De nouveau, nous agissons dans ce domaine et je remercie Mme la sénatrice de l’avoir rappelé dans son propos liminaire.

De manière opérationnelle et concomitante, nous faisons évoluer les pratiques et les mentalités.

C’est le cas avec la création du Pacte avec les quartiers pour toutes les entreprises, le PaQte, ou le lancement de « La France, une chance », des programmes d’accompagnement pour toutes les entreprises et leurs salariés souhaitant œuvrer à une meilleure inclusion de nos concitoyens des territoires fragiles dans le monde économique. Notre objectif est de « faire avec » – avec les acteurs économiques, avec les élus –, de développer les bonnes pratiques ensemble.

Le PaQte, par exemple, est déployé opérationnellement dans 67 départements. Au total, plus de 2 200 entreprises se sont engagées, près de 30 000 collaborateurs ont été sensibilisés aux biais de recrutement, notamment en matière de discrimination.

Je pense également à la plateforme de stage de troisième, au parrainage et au mentorat, qui constituent un volet essentiel du programme PaQte, en permettant aux élèves qui, bien souvent, ne bénéficient pas des réseaux idoines, de trouver des stages de qualité.

La mise en œuvre de plans locaux de prévention et de lutte contre les discriminations participe également de notre action pour changer les mentalités au plus près des territoires. À titre d’exemple, le plan déployé par la ville de Vitrolles est de très bonne qualité, puisqu’il lie formation des agents, soutien aux victimes de discriminations, sensibilisation des jeunes et travail avec le tissu économique local.

Nous avons pour ambition de muscler ces plans locaux de prévention et de lutte contre les discriminations, de les articuler avec la plateforme de signalement des discriminations, en lien avec le Défenseur des droits, afin de favoriser l’accès aux droits. Nous allons également lancer une seconde vague de testing dans le courant de l’année 2021. Dans le même temps, nous avons élaboré un référentiel de bonnes pratiques pour la prévention et la lutte contre les discriminations au travail avec les associations, les organisations patronales et les ministères d’Élisabeth Borne et Elisabeth Moreno.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, l’égalité des chances ne se décrète pas. Elle se pense et se construit au plus près des territoires, avec les acteurs de terrain.

Notre projet d’égalité des chances, vous l’aurez compris, c’est une vision – permettre à chaque citoyen de prendre sa place dans la République – ; une méthode – coproduire des solutions avec les acteurs locaux, par la mobilisation de l’ensemble du Gouvernement – ; des résultats – avoir un effet réel et positif sur le quotidien des habitants et faire en sorte que ni l’origine ni le lieu de résidence ne déterminent le parcours scolaire ou encore le niveau d’ambition de nos jeunes.

Comme vous pouvez le constater, dans le prolongement de la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine et de la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, nous agissons concrètement pour lutter efficacement contre les discriminations, pour l’égalité des chances, pour offrir le meilleur avenir à ces jeunes, en y consacrant des moyens financiers à la hauteur de nos ambitions.

Les éléments contenus dans cette proposition de loi ne nous semblent pas opportuns à ce stade, mais nous serons ravis de pouvoir vous associer à l’ensemble des travaux que nous avons engagés depuis quatre ans avec les parlementaires de la majorité, que je remercie chaleureusement pour leur engagement à nos côtés et leur soutien en vue de répondre à cet enjeu, ô combien important.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mon rappel au règlement porte sur l’organisation de nos travaux.

Mme la ministre Nadia Hai vient de parler d’égalité… Très beau sujet que l’égalité ! Mais nous assistons à un débat dans lequel le Gouvernement s’exprime durant vingt-cinq minutes pour vanter son action, quand nos interventions ne doivent pas excéder quelques minutes. C’est une certaine conception de l’égalité ! Je me permets, madame la présidente, de faire part de notre sentiment à cet égard.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Vous connaissez suffisamment bien la Constitution pour savoir que le Gouvernement peut intervenir autant qu’il le souhaite et que le temps de parole des sénateurs est, lui, limité.

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Cécile Cukierman.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, tout va si bien, si l’on en croit les deux précédentes interventions, qu’il serait presque inutile de rappeler à cette tribune que la réalité, tout de même, est quelque peu différente…

La proposition de loi de nos collègues socialistes s’appuie effectivement sur plusieurs constats, avérés, ayant pour dénominateur commun la discrimination dans notre pays et l’inégalité d’accès, à travers le système scolaire français, à l’enseignement supérieur, la fonction publique et, plus globalement, la vie professionnelle.

Comme beaucoup ici, nous reconnaissons que l’ascenseur républicain est en panne. Il ne faut d’ailleurs pas idéaliser cet ascenseur républicain, qui n’a jamais été l’alpha et l’oméga pour corriger les inégalités sociales dans notre pays. On pourrait, sous un angle plus philosophique, s’interroger sur le rôle effectif du système éducatif dans une société aussi inégalitaire que la nôtre. Régulation, correction ou renversement des inégalités ? En définitive, l’école ne fait qu’accompagner la société, sans la transformer.

Bien évidemment, l’idée qui sous-tend la proposition de loi est qu’il est nécessaire de briser les différentes logiques à l’œuvre, lesquelles ont pour conséquence, malgré toutes les actions menées par le Gouvernement depuis quatre ans, qu’un nombre excessif de jeunes des quartiers populaires relevant de la politique de la ville ou des zones rurales rencontrent encore des difficultés pour accéder à un emploi de qualité, qualifié et pérenne.

Toutefois, les solutions proposées ne sont à nos yeux que des palliatifs. Mises en œuvre a posteriori, elles passent à côté du problème du fond. C’est plus en amont qu’il faut travailler, et de manière approfondie, cette question.

En tout cas, les politiques de discrimination positive, telles que les prévoit la proposition de loi, ne peuvent constituer l’essentiel de la lutte contre les discriminations. On se retrouve avec un texte qui s’éparpille entre différents sujets à traiter, avec de nouvelles mesures visant à gommer les injustices qui, si l’on n’y prend pas garde, pourraient conduire à une stigmatisation des jeunes concernés, au lieu d’un aplanissement des inégalités.

Vous nous avez beaucoup parlé d’égalité des chances, mesdames les ministres. Au sein du groupe CRCE, nous ne connaissons qu’une seule égalité : l’égalité républicaine. C’est sur elle que repose cette exigence politique d’un combat permanent contre les discriminations et les inégalités, cette volonté d’offrir à tous un même accès aux droits, indépendamment de la condition sociale ou du territoire d’origine. Droit à la formation, droit au travail : l’accès à tous ces droits ne peut être conditionné par la situation sociale de la famille dans laquelle on naît et l’on est éduqué, ni par le lieu où l’on grandit et où l’on vit.

C’est à cela qu’il faut s’attaquer !

Mesdames les ministres, on ne peut que regretter que vous ayez attendu quatre ans pour associer l’ensemble des parlementaires à l’élaboration des formidables mesures que vous venez de nous présenter. Si votre majorité a si bien travaillé, qu’elle continue ! Mais permettez-moi de vous dire que les inégalités qui existent dans notre pays se sont accrues très fortement au cours des quatre dernières années.

En l’état, et compte tenu de l’ensemble de ces éléments, nous nous abstiendrons sur la présente proposition de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud de Belenet

Madame la présidente, mesdames les ministres, chère Hélène Conway-Mouret, mes chers collègues, en matière de restriction des libertés publiques, les effets des mesures de confinement, puis de reconfinement prises pour endiguer l’épidémie de covid-19 ont été particulièrement brutaux pour les jeunes générations.

Ces mesures ont, sans aucun doute, accentué les inégalités de destin et le tribut économique de la crise sanitaire risque, hélas, d’être tout aussi lourd pour nos jeunes. Nécessaire pour sauvegarder le pouvoir d’achat des Français malgré une récession historique, l’envolée de la dette publique fera peser sur leurs épaules un fardeau qui nous engage toutes et tous, et à tous les niveaux – en particulier celui de l’emploi.

Dans ces conditions, nous ne pouvons qu’approuver le double objectif affiché dans la proposition de loi de notre collègue Hélène Conway-Mouret : tout d’abord, favoriser l’accès à la fonction publique de l’État des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale ; ensuite, limiter les risques de discrimination dans l’accès de ces jeunes au monde de l’entreprise.

Transpartisanes, ces préoccupations rejoignent d’ailleurs celles de plusieurs missions d’information sénatoriales dont les travaux sont en cours. Elles font par ailleurs écho à un certain nombre de mesures prises par le Gouvernement. Je mentionnerai notamment la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, précédemment évoquée, qui, portée par Olivier Dussopt, a occupé notre été 2019.

Il semble effectivement exister, en la matière, un paradoxe français : pays « égalitaire » grâce à des mécanismes massifs de redistribution sociofiscale, la France demeure un pays « injuste ». La faute à une institution scolaire qui ne joue plus pleinement son rôle ; la faute, aussi, à un marché du travail entravant la mobilité sociale.

L’école française est touchée par le déterminisme social. Seule la Hongrie affiche des résultats plus médiocres, si l’on en croit une récente étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), intitulée La France, les inégalités et l ’ ascenseur social. Celle-ci montre que, chez nous, les enfants d’enseignants ou de milieux privilégiés connaissent des parcours nettement plus favorables que ceux de familles modestes ou de zones géographiques défavorisées.

Le constat est malheureusement identique s’agissant du marché du travail. Dans une récente étude, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) constate ainsi que « toutes les catégories sociales ne présentent pas le même risque de chômage ». De fait, le taux d’emploi des descendants d’immigrés est inférieur de près de 9 points à celui des personnes sans lien avec l’immigration. Symétriquement, et sans surprise, l’écart sur le taux de chômage dépasse les 5 points.

C’est que le système français est ankylosé : il redistribue, afin d’empêcher à juste titre qu’aucun citoyen ne dégringole, mais il ne permet pas d’escalader les marches. Notre système protège les rentes, mais ne promeut pas l’égalité des chances.

La discrimination positive, fil conducteur du texte que nous examinons, permet-elle d’y remédier ? Les membres du groupe Union Centriste ne le pensent pas. Celle-ci fonctionne trop souvent comme un cautère sur une jambe de bois. Or on ne remplira pas la promesse républicaine à coups de rustines et de segmentation sociale.

Comme l’a rappelé le rapporteur Jacky Deromedi, dont je salue la qualité du travail, les mesures proposées dans le présent texte soulèvent plusieurs difficultés, d’ordre tout à la fois juridique et pratique.

Réserver à certaines catégories de personnes une proportion minimale des nominations aux emplois de la haute fonction publique de l’État – ces mesures figurent à l’article 1er – ne résisterait pas au principe constitutionnel d’égalité. En ce domaine, mieux vaudrait valoriser les parcours des candidats plutôt que de discriminer, fût-ce positivement.

Prévues par l’article 3, la diversification et la formation des membres siégeant dans les jurys de recrutement correspondent à de réels enjeux, nous n’en disconvenons pas. Cependant, rendre obligatoire la présence d’au moins 50 % de personnes extérieures à l’administration exposerait les organisateurs de ces concours à des contraintes vraisemblablement inextricables.

En fait de rigidités, signalons de la même façon les mesures enjoignant les entreprises, tantôt à justifier des motifs de non-embauche, tantôt à collecter des données personnelles devant permettre de constituer des indicateurs d’égalité des chances. Périlleuses sur le plan juridique, en matière contentieuse comme en matière de respect des libertés, ces mesures ne feraient qu’alimenter la société de défiance, en rendant tout employeur suspect par définition.

Je dirai un mot, enfin, sur l’article 4 et la création d’une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. Qui peut croire que l’instauration d’un énième comité, au demeurant dispendieux, serait à la hauteur des enjeux ? Quand il y a manque – ici d’égalité des chances –, les mots ne suffisent pas !

Mes chers collègues, les membres du groupe Union Centriste partagent pleinement les intentions des auteurs de cette proposition de loi. Rejoignant leur diagnostic, ils divergent néanmoins quant au remède, que le cadre fixé par le présent texte ne permettrait pas d’administrer. C’est pourquoi nous n’adopterons pas ce texte.

La France doit renouer avec la société de confiance, qui ouvre les voies de la réussite, scolaire et professionnelle, indépendamment des origines de chacun. Pour l’heure, elle n’y est malheureusement pas encore parvenue. Puissent les mesures évoquées par les membres du Gouvernement et les travaux du Sénat, passés et en cours, donner un meilleur accès des jeunes à la fonction publique et aux entreprises !

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues : « Circulez, il n’y a rien à voir ! » Voilà ce que l’on répond à Mme Hélène Conway-Mouret, qui vient de présenter, au prix d’un important travail, une série de propositions afin de faciliter l’accès des jeunes à l’emploi dans les quartiers en difficulté.

Dans ces quartiers, mes chers collègues, 31 % des personnes de moins de 30 ans sont au chômage, soit un jeune de moins de 30 ans sur trois. C’est énorme !

Comment ne pas voir la désespérance et le désarroi des jeunes de ce pays à la suite de la crise du covid, qu’ils soient étudiants ou apprentis, en formation ou réduits à la vacuité ? Ils se heurtent aux portes de Pôle emploi, mais y reviennent et repartent bredouilles… Qui peut nier tout cela ?

On nous dit : l’esprit de votre texte est très bien. Vive l’esprit ! Vive l’intention ! Mais nous avions proposé que l’un d’entre nous, membre du groupe socialiste, fût rapporteur et cela nous a été refusé. Il nous a été dit, monsieur le président de la commission des lois, que l’on ne confiait pas un rapport à un membre du groupe auquel appartient l’auteur du texte. Tant pis si cela a été démenti six minutes plus tard en commission – chacun voit ce à quoi je fais allusion. Vous avez donc nommé Mme Jacky Deromedi rapporteur…

Connaissant les aspérités du texte, dont plusieurs orateurs ont parlé et que nous ne contestons pas, nous avons déposé quatre amendements visant à apporter des modifications substantielles. Or j’ai appris que, au cours de la réunion de commission qui vient d’avoir lieu, à laquelle M. Patrick Kanner a assisté, ces quatre amendements ont été rejetés en moins de trente secondes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous saviez pourtant, madame le rapporteur, que ces quatre amendements permettraient d’aboutir à un texte très différent, qu’il était possible de surmonter un certain nombre de difficultés et, ainsi, de parvenir à retenir quelques dispositions, au moins, de la proposition de loi.

Vous rendez-vous compte, mes chers collègues ? Un texte est présenté au Sénat sur l’accès des jeunes des quartiers en difficulté à l’emploi, à la formation, à la fonction publique, à l’entreprise et, sous des flots d’éloquence, il n’aboutit à rien ! Ce n’est pas digne ! Ce n’est pas digne des jeunes concernés dans ces quartiers !

Mesdames les ministres, quand les groupes disposent d’un temps réservé, ce n’est pas pour écouter pendant vingt-cinq minutes un gouvernement se livrer à un numéro d’autosatisfaction. Toutes deux, vous nous avez dit : « Circulez, il n’y a rien à voir ! Avec tout ce que nous faisons, les problèmes vont être réglés. Votre proposition de loi est parfaitement inutile. »

Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous le constatez : une certaine colère sourd de nos rangs.

Madame le rapporteur, je sais que vous le savez : il aurait été possible de travailler ensemble pour que certaines de nos propositions soient adoptées.

C’est pourquoi mes collègues sont là, auprès de Mme Conway-Mouret : M. Kanner, M. Cardon, Mme Lubin, Mme Meunier, Mme Harribey, M. Fichet, Mme Filleul, Mme Artigalas, Mme Briquet. Nous prendrons la parole sur les articles pour défendre nos idées et nos projets en faveur de ces jeunes, car ce qui leur est proposé aujourd’hui est tout simplement humiliant. Après l’heure du couvre-feu, nous les voyons sur leurs mobylettes, sous-payés et sans statut, faire des livraisons pour Uber, encore Uber, toujours Uber ! Ce n’est pas digne. Nous tous parlerons pour défendre la cause des jeunes.

Même si ce texte n’est pas parfait – nous l’admettons –, nous avons fait ce qu’il fallait pour que certaines de ses dispositions puissent être adoptées. Or, une fois de plus, on nous dit : « Circulez, il n’y a rien à voir ! » Ce message n’est pas recevable pour la jeunesse de notre pays.

Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, les précédents orateurs l’ont rappelé : les difficultés que rencontrent les jeunes pour accéder au monde du travail préoccupent chacune et chacun d’entre nous, d’autant plus qu’elles se sont encore accentuées ces derniers mois.

Les chiffres interpellent : 24 % des jeunes ont subi une interruption de formation depuis le début de la crise sanitaire ; 21 % ont connu l’annulation d’un stage en entreprise, le développement du télétravail ayant empêché d’accueillir et d’encadrer des jeunes lors de leur première expérience professionnelle ; et 18 % ont connu un licenciement ou le non-renouvellement d’un contrat.

Nous, élus, le constatons au quotidien au fil de nos échanges et dans nos permanences : beaucoup d’étudiants et de lycéens galèrent pour trouver un stage, une alternance ou une formation qualifiante.

Nous sommes évidemment sensibles aux objectifs de cette proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises. Ce texte s’appuie sur des études récentes démontrant que les blocages de l’ascenseur social se situent au niveau de l’enseignement et du recrutement. Ce travail rejoint d’ailleurs les préoccupations du Sénat, qui mène actuellement trois missions d’information sur des thématiques similaires.

Toutefois, les mesures proposées se heurtent à un certain nombre d’obstacles.

Tout d’abord, je constate des difficultés d’ordre juridique. Les nominations par priorité de certaines catégories de personnes sont contraires au principe d’égalité : le Conseil constitutionnel en a jugé ainsi dans sa décision du 16 mars 2006.

Ensuite, certaines dispositions manquent de clarté ou sont imprécises : je pense à « l’expérience professionnelle dans un quartier prioritaire » comme critère de différenciation ou encore au « lieu d’origine » comme nouveau critère de discrimination en droit du travail.

Enfin, l’obligation nouvelle pour les entreprises de justifier les motifs de non-embauche auprès de tout candidat refusé pourrait engendrer beaucoup des contentieux devant les prud’hommes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Pour ces raisons, les élus du groupe Les Indépendants – République et Territoires ne voteront pas cette proposition de loi. Néanmoins, nous participerons au travail évoqué par M. Sueur.

Ce texte vise à élargir et à favoriser l’accès au monde du travail des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville et, de manière plus originale, des jeunes des zones de revitalisation rurale.

Nous en avons connus, des textes, des propositions, des actions en faveur des jeunes des quartiers prioritaires : cet effort est nécessaire. Il existe de véritables difficultés et il faut y répondre.

Ces difficultés, ces souffrances sont également réelles dans la ruralité : elles sont de nature différente, mais elles existent, même si l’on en parle beaucoup moins. Cette partie de la jeunesse est moins incarnée, moins représentée et moins défendue, tant et si bien que toute une partie de notre territoire et de nos jeunes ont l’impression – passez-moi l’expression – de ne pas faire partie du film.

Même si les résultats scolaires sont globalement bons dans les territoires ruraux, il faut continuer à mettre le paquet sur l’enseignement en maternelle et en primaire. Il faut encore et toujours développer l’accès à la culture. Il faut surtout défendre une ambition nationale pour aménager le territoire, améliorer les axes de communication et donc la mobilité.

La France, la jeunesse, l’accès au monde du travail ne peuvent pas se résumer à Paris et à quelques métropoles. C’est aussi cela, l’enjeu soulevé par cette proposition de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Mesdames les ministres, quel panégyrique de l’action gouvernementale ! Je vous ai bien entendues : le pragmatisme doit dépasser le politique. Sur cette base, vous posez des briques les unes après les autres. Mais sans réelle architecture politique globale, on ne peut pas construire une maison habitable ou un pays égalitaire !

Alors que la crise sanitaire de l’année dernière et le « quoi qu’il en coûte » qu’elle a inspiré bouleversent notre pays et son économie dans des proportions considérables, il est bon de garder en tête que les jeunes ont payé un lourd tribut.

Ne détournons pas les yeux des files d’attente devant les centres de distribution alimentaire, n’occultons pas les difficultés de santé mentale dont notre jeunesse souffre et va souffrir durablement.

C’est dans ce contexte que le présent texte nous est soumis : une incertitude grandissante des jeunes sur leur avenir au sein d’une société dont les contours flous et changeants ne laissent pas augurer d’un accueil digne de ce nom, d’une intégration et d’un épanouissement ; une inquiétude tenace sur leur présent ou leur avenir immédiat, liée notamment aux crises écologiques, sanitaires et sociales.

Aussi, cette proposition de loi, que je salue, a pour ambition de créer les conditions d’un meilleur accès des jeunes à la vie active et surtout de lever les obstacles souvent discriminatoires auxquels ils font face à l’entrée sur le marché du travail.

Le Gouvernement s’apprête à déposer des ordonnances visant à réformer la fonction publique, l’objectif étant de renforcer la confiance en l’État, de casser des schémas déterminés et d’organiser une plus grande mobilité des métiers : raison de plus pour soutenir le présent texte !

Cette proposition de loi ne prétend pas répondre à la totalité des enjeux : je regrette à la fois les réserves exprimées à son sujet et la position de la commission des lois.

La notion de quotas, je le sais, laisse souvent perplexes les décideurs de notre pays. En l’occurrence, elle a été partiellement corrigée dans le texte par voie d’amendement. Les critiques les plus farouches persistent à voir dans cette discrimination positive une injustice face à d’autres critères et un moyen d’écarter des personnes méritantes, mais ils occultent la réalité : il s’agit de faciliter l’accès aux postes à responsabilité de personnes ayant un autre regard et de nouvelles compétences.

L’exemple de la parité entre les femmes et les hommes, parité que nous peinons à appliquer plus largement dans les entreprises, dans les conseils d’administration, dans cet hémicycle même, mériterait pourtant d’être suivi.

Le désir de voir des femmes et des hommes de terrain accéder aux responsabilités dans la fonction publique s’exprime de plus en plus fortement. L’article 1er de cette proposition de loi, qui prévoit de réserver un certain nombre de postes à des personnes ayant déjà exercé des fonctions dans des quartiers prioritaires de la ville, semble donc très pertinent.

La recherche de talents doit s’étendre au-delà de Paris – l’administration n’est pas telle qu’on la caricature, ne voyant rien au-delà de Paris. Ainsi, l’article 2 modifie les conditions d’attribution des bourses, afin que les bacheliers des zones de revitalisation rurale puissent accéder à la catégorie d’élèves boursiers.

Quant à l’article 3, il prévoit d’agir sur ce qui, de l’aveu même de la commission, constitue un « enjeu identifié », à savoir la composition des jurys.

Les trois derniers articles portent sur l’appréhension du secteur privé à recruter des jeunes.

Je sais que notre commission doute fortement de l’intérêt d’inscrire un nouveau critère de discrimination : elle y voit une stigmatisation des employeurs, qui seraient « a priori discriminants », alors que ce n’est pas le cas. Je pense au contraire qu’une telle mesure permettrait d’envoyer un message fort sur la différence entre a priori et discrimination.

Je sais aussi que notre commission, à l’image de la majorité sénatoriale, voit dans la création d’un indicateur d’égalité des chances une nouvelle charge pour les entreprises. Mais pourquoi le refuser ? Un tel indicateur serait un outil de mesure de la performance comme un autre. Il permettrait d’informer l’entreprise sur les biais inconscients qui jouent lorsqu’elle recrute.

Cette proposition de loi va donc dans le bon sens. Elle vise à favoriser un large recrutement de tous les jeunes en permettant une valorisation des expériences dans la diversité de nos territoires et en sanctionnant les discriminations envers les personnes issues de certains d’entre eux. Aussi, les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voteront ce texte !

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Teva Rohfritsch

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons ce matin, déposée par notre collègue Hélène Conway-Mouret, a le mérite de concentrer nos débats sur un sujet qui nous préoccupe tous : la jeunesse et son avenir.

La crise sanitaire que nous traversons n’a pas épargné nos jeunes. De Tahiti à l’Alsace, toute une série de ruptures scolaires, économiques, affectives et psychologiques ont été constatées. Ce virus a frappé nos vies et la société sans discernement.

Les propositions réunies dans le texte soumis à notre sagacité font pleinement écho aux objectifs politiques de notre groupe : offrir une chance à tous nos jeunes.

Au titre Ier de cette proposition de loi, notre collègue propose de faciliter l’accès à la fonction publique, notamment pour les jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale, grâce à la mise en place de quotas et à la création d’une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique.

Indubitablement, nous faisons nôtres les objectifs des dispositions précitées ; mais les articles 1er à 4 posent diverses difficultés. Soit ils sont déjà satisfaits par l’arsenal juridique existant ; soit ils ne pourraient être constitutionnellement justifiés ; soit leur application poserait de réelles difficultés opérationnelles.

À titre d’exemple, l’article 1er prévoit de réserver une proportion minimale de nominations aux postes de délégués du préfet dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville à des personnes ayant déjà une expérience dans un tel quartier. Non seulement cette question relève du pouvoir réglementaire, mais, pour occuper de tels emplois, une expérience professionnelle dans ces quartiers est déjà exigée : elle est nécessaire pour une connaissance fine du terrain.

La création d’une nouvelle autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique est une idée intéressante. Néanmoins, les études et rapports qu’il est proposé de confier à cette instance sont, pour partie, déjà menés par le service statistique ministériel de la fonction publique, lequel présente les garanties d’indépendance souhaitées : cette proposition mériterait donc d’être approfondie.

Par ailleurs, des engagements forts ont été pris et des réformes sont en cours afin que notre fonction publique redevienne un élément fondateur de notre ascenseur social républicain, un lieu de sens et de service de l’intérêt général pour tous, que ce soit dans les villes, les campagnes, les quartiers prioritaires ou encore les outre-mer.

Je pense notamment à l’agenda en faveur de l’égalité des chances impulsé par Emmanuel Macron et mis en œuvre par sept ministres, rythmé par la réforme de la haute fonction publique.

Je pense également au lancement des Talents du service public, évoqués plus précisément par Mme Amélie de Montchalin. À titre d’exemple, l’île de la Réunion compte trois classes prépas Talents du service public, réunies sur deux sites : Saint-Denis et Le Tampon. Au total, soixante-dix jeunes sont ainsi formés pour accéder à la fonction publique.

Je pense aussi au lancement de la plateforme anti-discriminations, aux mesures annoncées lors du Comité interministériel à la ville de janvier dernier pour les quartiers prioritaires de la politique de la ville, avec plus de 3, 3 milliards d’euros dédiés, ainsi qu’à la récente création du label Cités de la jeunesse par Mme Nadia Hai.

Ce texte propose également l’introduction d’un nouveau critère de discrimination lié au lieu d’origine. Il s’ajouterait à l’arsenal législatif déjà fondé sur vingt-cinq critères de discrimination. Commençons par garantir la pleine application des lois en vigueur : telle nous semble être la priorité.

L’obligation de motiver la non-embauche d’un candidat pourrait, cela a été dit, entraîner des contentieux prud’homaux. De surcroît, cette nouvelle disposition pourrait paradoxalement constituer un frein supplémentaire à l’embauche.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris : les objectifs de cette proposition de loi sont aussi les nôtres. Nous saluons le travail de notre rapporteur et nous remercions notre collègue Hélène Conway-Mouret, mais les mesures que je viens d’évoquer, quand elles ne sont pas déjà satisfaites, poseraient de réelles difficultés d’application. Pour ces raisons, les élus du groupe RDPI voteront contre cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryse Carrère

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, réfléchir à un meilleur accès de nos jeunes à la fonction publique et à l’emploi, c’est avant tout penser les failles de notre méritocratie républicaine. C’est faire le constat de son échec. C’est se dire que, malgré les nombreux dispositifs qu’elle met en place, la France reste, parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), celui où l’origine sociale conditionne le plus l’avenir des enfants.

C’est constater que la mobilité sociale est à l’arrêt et que l’ascension sociale est devenue une anomalie. C’est également battre en brèche l’idée d’une égalité parfaite entre citoyens, grâce à laquelle la réussite est dictée non plus par notre origine, mais par nos efforts, ambition héritée de la Révolution française.

Pour autant, mettre fin aux politiques d’égalité des chances serait une erreur ; cesser d’y réfléchir aussi. À cet égard, je tiens à remercier l’auteure de cette proposition de loi.

C’est d’autant plus vrai que les crises, comme celle que nous vivons, frappent toujours davantage les plus démunis et aggravent les inégalités, notamment chez les jeunes.

J’en viens au présent texte. S’il soulève de bonnes questions, les réponses qu’il apporte ne permettront pas, malheureusement, de relever l’ensemble des défis auxquels nous faisons face.

Ainsi, l’article 1er prévoit de faciliter la nomination dans la haute fonction publique d’agents ayant travaillé dans les quartiers prioritaires. Ces dispositions permettraient-elles une réelle mise en valeur des jeunes des quartiers prioritaires ? Rien ne garantit que les agents qui pourraient être nommés à ces emplois soient issus de ces quartiers ou qu’ils auront une réelle appétence pour ces sujets.

L’article 2 porte sur le recrutement diversifié dans les concours et formations de la fonction publique. Je salue le fait que les zones de revitalisation rurale soient mises sur le même plan que les quartiers prioritaires. Longtemps, on a vu l’égalité des chances et l’ascenseur social sous le seul prisme des quartiers prioritaires et de la politique de la ville : je le regrette. L’erreur a été d’oublier de nombreux jeunes ruraux qui sont tout autant défavorisés.

Loin de moi l’idée d’opposer les uns aux autres, bien au contraire. À mon sens, il faut répondre de la même manière à ces problèmes, car ils sont identiques, que l’on habite dans une commune de 100 habitants dans les Hautes-Pyrénées ou dans un quartier relevant de la politique de la ville. C’est une question d’équité.

Néanmoins, le fait d’élargir l’accès à ces concours n’a de sens que si l’on transforme les pratiques en profondeur. Pour cela, il est indispensable de modifier le recrutement des membres des jurys. Cela permettra de mettre fin aux situations que l’on connaît actuellement et qui laissent peu de place aux profils différents au sein des jurys et donc parmi les candidats.

J’émets davantage de réserves sur les articles suivants, à commencer par l’article 4, qui prévoit la création d’une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. Ce que je crains, c’est un énième comité Théodule sans véritable pouvoir, incapable d’assumer les missions qui lui seront confiées, faute de moyens financiers et humains.

Si je comprends la volonté de prendre en compte le lieu d’origine comme facteur discriminatoire, il me semble que les vingt-cinq critères de discrimination déjà retenus sont suffisants.

Enfin, l’article 6 oblige toute entreprise à motiver son choix à la suite d’un entretien d’embauche. Je crains qu’une telle mesure ne soit inefficiente : chaque employeur pourra invoquer le motif qui lui plaira pour justifier le refus d’une candidature.

Pour conclure, si nous approuvons l’objectif de cette proposition de loi, il nous paraît indispensable de lutter dès le plus jeune âge contre les inégalités afin de réparer l’ascenseur social et de renouveler la promesse républicaine.

Sur ce texte, le groupe du RDSE se partagera entre votes favorables et abstentions.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Piednoir.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Piednoir

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, malgré les multiples aides déployées durant la crise sanitaire et économique que nous traversons, la période actuelle – chacun en conviendra – est difficile pour tous. La cessation d’activité dans bon nombre de secteurs a lourdement pesé sur les trésoreries ; la conjoncture a reporté ou condamné nombre d’initiatives entrepreneuriales ; et les recrutements ont le plus souvent été gelés dans l’attente d’une meilleure visibilité sur l’avenir économique.

Au milieu de ce tableau assez sombre, les jeunes subissent de plein fouet autant les conséquences de ce ralentissement économique que le bouleversement du marché du travail. Ainsi, 37 % des étudiants salariés ont perdu leur emploi.

Pour leur insertion professionnelle, les étudiants, quelle que soit leur origine sociale, sont confrontés à une sorte d’effet ciseaux. D’une part, le marché du travail est profondément et sans doute durablement contracté ; de l’autre, ces jeunes risquent de voir leur niveau de qualification interrogé, en raison des nouvelles modalités d’enseignement auxquelles ils ont été confrontés durant les deux dernières années universitaires.

Dès lors, que peut-on attendre des pouvoirs publics ? Quelles réponses apporter à ces jeunes qui font leur entrée sur le marché de l’emploi ?

Ce que veulent ces jeunes, c’est concrétiser leurs études par un emploi correspondant à leurs aspirations et à la formation qu’ils ont choisie. C’est donc à la source – si je puis dire – qu’il faut intervenir, en permettant aux entreprises de se relancer, à leurs sites de production de retrouver une croissance salvatrice. Bref, il faut leur donner les moyens d’avoir des perspectives et d’envisager sereinement de nouvelles embauches. Cette dynamique vertueuse profitera inévitablement aux jeunes.

Sans renier la solidarité nationale dans notre pays, qui n’a vraiment pas à rougir à cet égard, le même raisonnement doit prévaloir pour l’insertion des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville : ils ont davantage besoin d’une dynamique globale que d’une commisération dévalorisante à leur endroit.

État moi-même issu d’un milieu modeste, je suis reconnaissant à l’État d’avoir aidé ma famille, via l’attribution de bourses, à subvenir à mes besoins durant mes études. En complément, j’ai exercé de bonne grâce différents petits boulots durant mes années universitaires et la plupart de mes vacances. La réussite est parfois à ce prix : elle n’en a que plus de saveur. La motivation contribue à en atténuer les contraintes.

En revanche, j’aurais très mal vécu d’avoir une sorte de passe-droit, de bénéficier d’une politique de quotas, comme on dit aujourd’hui en langage autorisé, pour accéder aux cursus auxquels j’aspirais et, pis, pour obtenir le concours de la fonction publique que je visais avec volonté. Et que dire du regard que mes collègues auraient porté sur moi ? Des commentaires du style : « Il a eu le concours sur les places réservées à son profil » ? La société française n’est pas constituée de castes, et c’est heureux.

La méritocratie, c’est l’école de la détermination ; c’est le droit de se frotter à tous, quelles que soient son origine sociale et ses conditions matérielles de vie. Mais c’est aussi, pour tous, l’acceptation du risque d’échouer dans son entreprise personnelle.

Cette méritocratie ne signifie pas que tous les enfants de milieux modestes ont un droit privilégié de réussir, qu’ils ont le droit d’imposer leur candidature face à d’autres qui présenteraient de meilleurs atouts et compétences.

À mon sens, les choses se jouent bien avant. J’ai eu l’occasion de l’éprouver, cette fois en tant qu’enseignant, en convainquant un étudiant qu’il était tout à fait capable de réussir compte tenu de ses résultats et de ses aptitudes confirmés, même s’il était le premier de sa famille à accéder aux études supérieures.

Le frein est ici : au sein des familles qui acceptent une dévalorisation consubstantielle à leur catégorie socioprofessionnelle. C’est le rôle des enseignants et des conseillers principaux d’éducation de convaincre ces élèves qu’ils ont droit aux mêmes études, aux mêmes débouchés, aux mêmes métiers tant qu’ils apportent la preuve de leurs qualités.

Nul besoin de quotas pour cette politique : il suffit de faire confiance aux professionnels qui conseillent nos jeunes et leurs familles au quotidien. Un large consensus me semble possible sur ce point.

En résumé, si je comprends l’objectif de cette proposition de loi, je n’approuve pas du tout ses dispositifs. En conséquence, comme l’ensemble de mes collègues du groupe Les Républicains, je voterai contre ce texte !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bouloux

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises.

Séduisant, cet intitulé prête à confusion à double titre. D’une part, il ne s’agit pas d’améliorer l’accès de l’ensemble des jeunes à l’emploi, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bouloux

… mais simplement d’en privilégier quelques-uns.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bouloux

D’autre part, certaines des dispositions proposées ne visent pas spécifiquement les jeunes. En réalité, on nous demande d’introduire dans la loi une nouvelle discrimination positive en fonction, cette fois, non pas du sexe, mais du lieu de résidence. Sont ciblés les quartiers de la politique de la ville et les zones de revitalisation rurale.

L’existence d’inégalités de traitement ne fait pas débat. D’ailleurs, dans les territoires ruraux, les élus œuvrent quotidiennement pour combattre cette perte de chance.

On nous suggère notamment de réserver une proportion minimale de nominations aux emplois de la haute fonction publique de l’État. Quel est l’objectif ? Favoriser l’implantation dans ces territoires ou l’accès à ces emplois des personnes qui y résident ? Ne vaudrait-il pas mieux garantir un niveau d’enseignement minimal dans tous les territoires ?

L’égalité des chances est un objectif louable, mais on ne saurait la garantir au détriment de la compétence ou au prix de nouvelles inégalités. Les concours d’accès à la fonction publique n’ont-ils pas précisément pour objet de garantir l’égalité des chances ? Quoi qu’il en soit, une telle disposition exige une révision constitutionnelle.

L’article 4 crée une nouvelle autorité administrative indépendante (AAI) chargée de rassembler, d’analyser et de diffuser les informations et données relatives à la promotion de l’égalité des chances dans la fonction publique. Encore une AAI ! La multiplication des agences et autres autorités indépendantes entraîne bien des lourdeurs et des coûts. On peut se passer de telles instances, d’autant plus quand leur rôle se limite à compiler des données qui ne seront probablement jamais exploitées.

Pour faciliter l’accès des jeunes à l’entreprise, on nous propose d’ajouter le lieu d’origine à la liste des discriminations interdites ou encore d’obliger à mentionner le motif du refus d’embauche. Il s’agirait de nouvelles contraintes pour les entreprises, et pour quelle efficacité ? Favorisons l’implantation d’entreprises dans ces lieux oubliés : ainsi, l’embauche sera locale !

Vous l’aurez compris, si j’approuve l’objectif d’agir pour améliorer l’accès de ces jeunes au monde du travail, les moyens d’action méritent réflexion. Pour les raisons que je viens d’indiquer, les membres du groupe Les Républicains ne voteront pas ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à revenir brièvement sur un certain nombre de points.

Tout d’abord, mon ambition, comme celle des différents orateurs, est bien sûr de travailler dans un cadre strictement républicain : il s’agit de défendre le pacte républicain, en vertu duquel l’égalité des chances et surtout l’égalité des choix doivent être mises en œuvre concrètement. On ne saurait se contenter de clamer « République » : il faut déployer des outils concrets – je vais y revenir – pour que la promesse républicaine, socle de notre cohésion nationale, soit une réalité.

Nombre d’entre vous l’ont rappelé, la jeunesse a beaucoup souffert depuis dix-huit mois : nous en sommes pleinement conscients. Elle a souffert d’interruptions de formation ; elle a souffert de la raréfaction des stages. C’est pourquoi la fonction publique prend toute sa part dans le plan « 1 jeune, 1 solution ».

Je le répète : ce plan, c’est 43 000 offres de stages cette année et 49 000 autres en 2022 ; c’est 15 000 places d’apprentissage ; c’est une circulaire signée hier par le Premier ministre et par moi-même, relative à l’apprentissage et aux stages, qui s’applique à l’ensemble de la fonction publique de l’État ; c’est un travail partenarial rapproché avec la fonction publique territoriale.

En parallèle – certains orateurs l’ont souligné –, nous devons nous défaire de l’idée selon laquelle Paris serait un passage obligé. Nos territoires, nos universités et, plus largement, nos lieux de formation sont riches de leur diversité. Il n’est écrit nulle part dans le contrat républicain qu’il faudrait, comme au XIXe siècle, « monter à Paris ».

Si vous me permettez une référence littéraire, loin des Illusions perdues de Balzac, je préférerais voir venir le temps de la confiance retrouvée. Nous devons faire confiance aux professionnels de la formation et de l’enseignement supérieur dans l’ensemble du territoire.

Ces précisions étant apportées, je tiens à revenir sur deux points de mon intervention liminaire afin d’éviter toute ambiguïté.

Je peux vous le certifier : ni Nadia Hai ni moi n’éprouvons le moindre sentiment d’autosatisfaction.

Si nous vous avons présenté en détail un certain nombre de dispositifs, c’est parce que nous sommes extrêmement engagés et que nous savons qu’il n’existe pas de baguette magique, de solution toute faite, que les choses sont complexes et qu’il nous faut agir de manière large, en utilisant tous les leviers à notre disposition. Nous ne sommes absolument pas dans le fameux « circulez, il n’y a rien à voir ! » que certains ont pointé.

Si nous étions dans un tel état d’esprit, nous n’aurions pas pris le taureau par les cornes comme nous le faisons. Nous pensons qu’il faut privilégier l’action, beaucoup plus que les lois, les incantations, les signaux, les principes. La jeunesse de notre pays a trop souffert d’avoir été amenée à croire, sur ces questions essentielles de cohésion nationale et républicaine, que les grands principes et les grandes lois allaient tout faire.

Agir, c’est mettre en place du mentorat, du tutorat, des moyens de formation, c’est ouvrir des classes – concrètement, nous ouvrons 74 lieux où 1 700 jeunes vont pouvoir se former, à La Réunion et ailleurs – ; c’est sortir d’une logique de chiffres et de quotas pour créer des viviers.

Notre travail, madame Conway-Mouret, s’est fait en convergence, voire en concomitance, puisque l’habilitation que vous avez accordée au Gouvernement dans l’article 59 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique lui permet, précisément, de prendre des mesures. Celles-ci sont législatives quand cela s’impose, mais beaucoup d’entre elles n’ont rien à voir avec la loi, elles sont concrètes. Quand la loi est nécessaire, nous l’avons activée par ordonnance.

Pour conclure, je tiens à vous remercier, monsieur le sénateur Piednoir, de votre témoignage. Notre pays a besoin de tels témoignages pour montrer que ce chemin existe.

Je vous affirme également que nous ne créerons aucun passe-droit. En tant que ministre de la fonction publique, je m’engage à donner des outils concrets à des jeunes méritants pour les aider à préparer des concours exigeants et sélectifs, c’est-à-dire du tutorat, du mentorat, une bourse de 4 000 euros par an – il s’agit de leur éviter d’avoir à occuper des petits boulots au lieu de préparer les concours –, ainsi qu’un accès au logement étudiant.

À Angers, ville chère à votre cœur, nous prévoyons ainsi d’ouvrir en 2022 l’une de ces classes Prépas Talents pour que la jeunesse du Maine-et-Loire entre dans cette dynamique avec tout l’accompagnement nécessaire. Je sais pouvoir compter sur votre soutien à ce projet.

Debut de section - Permalien
Nadia Hai

Vous allez pouvoir vous exprimer, madame la sénatrice, c’est le propre des débats démocratiques.

Nous avons évidemment réagi à l’expression « circulez, il n’y a rien à voir ! » Personne, dans cet hémicycle – et je vous ai tous écoutés avec beaucoup d’attention – n’a tenu ce type de propos, ni l’orateur d’un groupe ni, encore moins, un membre du Gouvernement.

« Qui peut nier les difficultés que rencontrent les jeunes dans nos quartiers ? » nous a demandé M. le sénateur Sueur. Personne, et certainement pas la ministre déléguée chargée de la ville que je suis.

M. le sénateur Sueur a rappelé à plusieurs reprises que le Gouvernement était intervenu durant vingt-cinq minutes, mais il semble qu’il ne nous ait pas écoutées §

Nous n’avons pas la prétention d’avoir résorbé en quatre ans des inégalités qui se creusent depuis des décennies, mais nous avons l’honnêteté de dire que l’arsenal législatif qui a été pensé avant notre arrivée aux responsabilités est suffisant. Je n’imagine pas, monsieur le sénateur Kanner, que vous puissiez considérer que la loi de 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté n’a pas été suffisamment pensée ! Les inégalités, je le répète, ne datent pas d’aujourd’hui.

Nous partageons, évidemment, les objectifs et l’esprit de cette proposition de loi, mais nous mettons en place les mesures nécessaires et, excusez du peu, nous y consacrons les moyens financiers et nous changeons de méthode. C’est bien cela qui nous différencie.

Je suis désolée de vous avoir éprouvé en détaillant les actions du Gouvernement, mais tel est le propre du débat démocratique. Amélie de Montchalin et moi-même étions encore parlementaires il y a peu et nous avons du respect pour les débats démocratiques. Le rôle de cette assemblée comme du Gouvernement est de permettre les échanges et les discussions, mais aussi l’évolution des mentalités. C’est ce travail que nous engageons à vos côtés.

Madame la sénatrice, nous accueillons tous ceux qui souhaitent travailler avec le Gouvernement sur la question de l’égalité des chances, qui nous tient à cœur, et œuvrer en faveur de l’ensemble de nos concitoyens sur tout le territoire. Nous ne réservons cette exclusivité à aucun groupe.

Debut de section - Permalien
Nadia Hai

Vous allez pouvoir vous exprimer, madame la sénatrice, c’est le propre des débats démocratiques.

Nous avons évidemment réagi à l’expression « circulez, il n’y a rien à voir ! » Personne, dans cet hémicycle – et je vous ai tous écoutés avec beaucoup d’attention – n’a tenu ce type de propos, ni l’orateur d’un groupe ni, encore moins, un membre du Gouvernement.

« Qui peut nier les difficultés que rencontrent les jeunes dans nos quartiers ? » nous a demandé M. le sénateur Sueur. Personne, et certainement pas la ministre déléguée chargée de la ville que je suis.

M. le sénateur Sueur a rappelé à plusieurs reprises que le Gouvernement était intervenu durant vingt-cinq minutes, mais il semble qu’il ne nous ait pas écoutées

Mme Cécile Cukierman s ’ exclame.

Vives exclamations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Le pluralisme par ordonnances, ce n’est pas terrible !

Debut de section - Permalien
Nadia Hai

Nous n’avons pas la prétention d’avoir résorbé en quatre ans des inégalités qui se creusent depuis des décennies, mais nous avons l’honnêteté de dire que l’arsenal législatif qui a été pensé avant notre arrivée aux responsabilités est suffisant. Je n’imagine pas, monsieur le sénateur Kanner, que vous puissiez considérer que la loi de 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté n’a pas été suffisamment pensée ! Les inégalités, je le répète, ne datent pas d’aujourd’hui.

Nous partageons, évidemment, les objectifs et l’esprit de cette proposition de loi, mais nous mettons en place les mesures nécessaires et, excusez du peu, nous y consacrons les moyens financiers et nous changeons de méthode. C’est bien cela qui nous différencie.

Je suis désolée de vous avoir éprouvé en détaillant les actions du Gouvernement, mais tel est le propre du débat démocratique. Amélie de Montchalin et moi-même étions encore parlementaires il y a peu et nous avons du respect pour les débats démocratiques. Le rôle de cette assemblée comme du Gouvernement est de permettre les échanges et les discussions, mais aussi l’évolution des mentalités. C’est ce travail que nous engageons à vos côtés.

Madame la sénatrice, nous accueillons tous ceux qui souhaitent travailler avec le Gouvernement sur la question de l’égalité des chances, qui nous tient à cœur, et œuvrer en faveur de l’ensemble de nos concitoyens sur tout le territoire. Nous ne réservons cette exclusivité à aucun groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La discussion générale est close.

La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.

Mme Cécile Cukierman s ’ exclame.

Photo de Pascal Savoldelli

Le pluralisme par ordonnances, ce n’est pas terrible !

Photo de Laurence Rossignol

La discussion générale est close.

La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.

Photo de Laurence Rossignol

L’amendement n° 1, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

détermine une proportion minimale, qui ne peut être supérieure à 20 %, de nominations proposées à des

par les mots :

précise les conditions permettant de favoriser la nomination de

II. – Alinéa 6

Remplacer les mots :

détermine une proportion minimale, qui ne peut être supérieure à 20 %, de nominations

par les mots :

précise les conditions permettant de favoriser la nomination

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

Comme vous, j’ai entendu au cours de la discussion générale parler de discrimination – serait-elle positive ? – ou d’inégalité à l’évocation de certaines des dispositions de cette proposition de loi, alors que l’objectif de ce texte est à l’opposé de ces concepts. Nul doute que si la commission avait adopté les amendements que nous proposons, ce débat aurait pris une tout autre forme.

Ce premier amendement vise, tout en conservant intacte l’ambition d’instaurer une haute fonction publique plus représentative de la société française, à clarifier la rédaction de l’article 1er.

Notre objectif n’est bien évidemment pas de fixer des quotas. Nous souhaitons simplement favoriser l’ouverture dans la haute fonction publique.

I. – Après l’article 25 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, il est inséré un article 25 bis ainsi rédigé :

« Art. 25 bis. – Pour les nominations aux emplois mentionnés au premier alinéa de l’article 25, un décret en Conseil d’État détermine une proportion minimale, qui ne peut être supérieure à 20 %, de nominations proposées à des personnes, appartenant ou non à l’administration, qui exercent ou ont exercé une activité professionnelle pendant au moins deux années dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, dans le respect de la parité. »

II. – Le titre III de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« CHAPITRE IV

« Des délégués du représentant de lÉtat dans le département dans les quartiers prioritaires de la ville

« Art. 14 -1. – Un décret en Conseil d’État détermine une proportion minimale, qui ne peut être supérieure à 20 %, de nominations au poste de délégué du représentant de l’État dans le département dans les quartiers prioritaires de la ville proposées à des personnes, appartenant ou non à l’administration, qui exercent ou ont exercé une activité professionnelle pendant au moins deux années dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5, dans le respect de la parité. »

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 1, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer les mots :

détermine une proportion minimale, qui ne peut être supérieure à 20 %, de nominations proposées à des

par les mots :

précise les conditions permettant de favoriser la nomination de

II. – Alinéa 6

Remplacer les mots :

détermine une proportion minimale, qui ne peut être supérieure à 20 %, de nominations

par les mots :

précise les conditions permettant de favoriser la nomination

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement tend à remplacer la proportion minimale, fixée par décret en Conseil d’État et ne pouvant excéder 20 %, de nominations de personnes ayant ou ayant eu une expérience professionnelle de deux ans dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville par l’objectif plus général de favoriser la nomination de telles personnes.

Nous avons estimé que le critère retenu n’était pas opérant et qu’il conduirait à créer une nouvelle catégorie. De nombreux jeunes rencontrant également des difficultés sociales ailleurs sur le territoire seraient laissés de côté.

Par ailleurs, le risque constitutionnel ne semble pas écarté, puisque les nominations aux emplois publics doivent, avant toute chose, reposer sur les capacités et les talents.

Enfin, valoriser l’expérience dans un quartier prioritaire de la politique de la ville paraît tout à fait intéressant pour certaines nominations – pour un délégué du préfet dans un quartier prioritaire, cela semble même aller de soi –, mais il ne faudrait pas en faire un critère de priorisation systématique.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

Comme vous, j’ai entendu au cours de la discussion générale parler de discrimination – serait-elle positive ? – ou d’inégalité à l’évocation de certaines des dispositions de cette proposition de loi, alors que l’objectif de ce texte est à l’opposé de ces concepts. Nul doute que si la commission avait adopté les amendements que nous proposons, ce débat aurait pris une tout autre forme.

Ce premier amendement vise, tout en conservant intacte l’ambition d’instaurer une haute fonction publique plus représentative de la société française, à clarifier la rédaction de l’article 1er.

Notre objectif n’est bien évidemment pas de fixer des quotas. Nous souhaitons simplement favoriser l’ouverture dans la haute fonction publique.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Cet amendement me semble bienvenu, la logique des quotas étant, vous le savez, contraire à un certain nombre de principes constitutionnels. L’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen prévoit un égal accès à l’emploi public de tous les citoyens sans autre distinction que leurs mérites et leurs talents. Il ne prévoit pas de quotas !

Permettez-moi de faire un point sur les mesures qui sont déjà dans les tuyaux dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique que nous sommes en train de mettre en œuvre, car elles pourraient satisfaire votre amendement. Je présenterai l’ordonnance en conseil des ministres la semaine prochaine.

Nous ne pouvons pas, en raison de l’article 13 de la Constitution, contraindre la nomination aux emplois à discrétion du Gouvernement. En revanche, la réforme de la haute fonction publique que j’ai présentée hier devant la commission des lois prévoit la création d’une délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État, laquelle comprendra un responsable de la diversité et de l’ouverture en général.

L’objectif est de créer des viviers de profils beaucoup plus diversifiés, qui bénéficieront d’une formation adéquate afin de pouvoir accéder aux postes à responsabilités. Aujourd’hui, une partie de l’autocensure est le fait des personnes elles-mêmes, mais une autre peut être évitée par la délivrance d’un complément de formation.

La mécanique des viviers sera définie par décret en Conseil d’État. Ce décret présentera les lignes directrices de notre gestion interministérielle, lesquelles ont vocation à fixer une stratégie en matière de ressources humaines et d’identification des talents, afin de favoriser l’accès à des responsabilités de personnes qui n’y parviennent pas aujourd’hui.

Le poids du classement et les habitudes de nominations dans les grands corps imposent aujourd’hui, de fait, une limitation dans la mécanique des viviers. Le décret en Conseil d’État indiquera comment nous entendons favoriser des nominations plus diversifiées, selon une logique non pas de quotas, mais de viviers.

Ce que nous prévoyons ne correspond pas tout à fait à l’outil juridique que vous proposez, mais, dans les faits, d’ici à la fin de l’année 2022, une stratégie de gestion des ressources humaines claire sera mise en œuvre afin d’atteindre l’objectif que vous fixez et que nous partageons.

Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement tend à remplacer la proportion minimale, fixée par décret en Conseil d’État et ne pouvant excéder 20 %, de nominations de personnes ayant ou ayant eu une expérience professionnelle de deux ans dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville par l’objectif plus général de favoriser la nomination de telles personnes.

Nous avons estimé que le critère retenu n’était pas opérant et qu’il conduirait à créer une nouvelle catégorie. De nombreux jeunes rencontrant également des difficultés sociales ailleurs sur le territoire seraient laissés de côté.

Par ailleurs, le risque constitutionnel ne semble pas écarté, puisque les nominations aux emplois publics doivent, avant toute chose, reposer sur les capacités et les talents.

Enfin, valoriser l’expérience dans un quartier prioritaire de la politique de la ville paraît tout à fait intéressant pour certaines nominations – pour un délégué du préfet dans un quartier prioritaire, cela semble même aller de soi –, mais il ne faudrait pas en faire un critère de priorisation systématique.

L’avis est donc défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Cet amendement me semble bienvenu, la logique des quotas étant, vous le savez, contraire à un certain nombre de principes constitutionnels. L’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen prévoit un égal accès à l’emploi public de tous les citoyens sans autre distinction que leurs mérites et leurs talents. Il ne prévoit pas de quotas !

Permettez-moi de faire un point sur les mesures qui sont déjà dans les tuyaux dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique que nous sommes en train de mettre en œuvre, car elles pourraient satisfaire votre amendement. Je présenterai l’ordonnance en conseil des ministres la semaine prochaine.

Nous ne pouvons pas, en raison de l’article 13 de la Constitution, contraindre la nomination aux emplois à discrétion du Gouvernement. En revanche, la réforme de la haute fonction publique que j’ai présentée hier devant la commission des lois prévoit la création d’une délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État, laquelle comprendra un responsable de la diversité et de l’ouverture en général.

L’objectif est de créer des viviers de profils beaucoup plus diversifiés, qui bénéficieront d’une formation adéquate afin de pouvoir accéder aux postes à responsabilités. Aujourd’hui, une partie de l’autocensure est le fait des personnes elles-mêmes, mais une autre peut être évitée par la délivrance d’un complément de formation.

La mécanique des viviers sera définie par décret en Conseil d’État. Ce décret présentera les lignes directrices de notre gestion interministérielle, lesquelles ont vocation à fixer une stratégie en matière de ressources humaines et d’identification des talents, afin de favoriser l’accès à des responsabilités de personnes qui n’y parviennent pas aujourd’hui.

Le poids du classement et les habitudes de nominations dans les grands corps imposent aujourd’hui, de fait, une limitation dans la mécanique des viviers. Le décret en Conseil d’État indiquera comment nous entendons favoriser des nominations plus diversifiées, selon une logique non pas de quotas, mais de viviers.

Ce que nous prévoyons ne correspond pas tout à fait à l’outil juridique que vous proposez, mais, dans les faits, d’ici à la fin de l’année 2022, une stratégie de gestion des ressources humaines claire sera mise en œuvre afin d’atteindre l’objectif que vous fixez et que nous partageons.

Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Chapitre II

Notre administration accessible à tous et à toutes

Photo de Laurence Rossignol

Chapitre II

Notre administration accessible à tous et à toutes

Photo de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Monique Lubin, sur l’article.

Article 2

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

En soutien à cet article, je rappellerai les difficultés que rencontrent en France les lycéens vivant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans les zones de revitalisation rurale quand ils sont bénéficiaires d’une bourse nationale de lycée.

Ils souffrent d’être éloignés d’une information complète et incarnée pour leur orientation et sont, de manière plus générale, confrontés aux conséquences d’un éloignement culturel et symbolique. Par conséquent, ils sont notamment victimes d’autocensure et peinent à se projeter dans des études et des carrières professionnelles éloignées des possibilités offertes par leur territoire d’origine.

On sait que l’école en milieu rural est loin d’être un espace voué à l’échec scolaire. Les résultats des enquêtes menées révèlent surtout l’autocensure des élèves ou leur manque de confiance en eux, bien que leurs résultats scolaires soient, dans l’ensemble, tout à fait satisfaisants.

On sait, par ailleurs, que les jeunes habitant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville redoublent plus souvent. Par exemple, dans les Pays de Loire, 24 % des élèves de sixième vivant dans un tel quartier ont au moins un an de retard, contre 9 % des jeunes résidant ailleurs. Après la troisième, les élèves vivant dans les quartiers prioritaires s’orientent plus souvent vers des filières professionnelles que les autres.

Enfin, les jeunes des territoires isolés ne bénéficient pas des mesures de compensation mises en place dans les centres urbains pour pallier les insuffisances de l’éducation nationale en matière de prise de parole, d’expression orale ou de gestion du stress par exemple. Ils ne bénéficient pas non plus du foisonnement de structures dans lesquelles s’investir et développer ce type de compétences ; or celles-ci font pourtant partie des attendus lors des études supérieures, puis, a fortiori, dans la vie professionnelle.

Conscients des inégalités en matière d’oralité, les lycéens ruraux s’estiment très largement démunis lors des premiers oraux, que ce soit pour intégrer une école ou une formation ou obtenir un stage.

Par conséquent, en matière d’orientation comme de résultats scolaires, les jeunes Français sont déterminés, pour partie, par leurs origines sociales et géographiques. Ce n’est pas un phénomène nouveau, mais la fracture se creuse entre les jeunes qui peuvent s’adapter aux standards du XXIe siècle et ceux qui rencontrent d’autant plus de difficultés à cocher toutes les cases que celles-ci se multiplient, générant angoisse et autocensure.

Madame la ministre, pour conclure, pourriez-vous définir ce qu’est un jeune « méritant » ? Y a-t-il, dans ce pays, un ordre naturel qui permettrait aux jeunes bien nés d’avoir accès à tout, quand les autres devraient être plus « méritants » ?

I. – L’article L. 611-1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° La seconde phrase de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « Ces modalités assurent le recrutement d’étudiants titulaires du baccalauréat ou d’un diplôme équivalant obtenu au sein d’un établissement scolaire situé : » ;

2° Avant le dernier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« – soit dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ;

« – soit dans une zone de revitalisation rurale au sens de l’article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire, en qualité d’élève bénéficiaire d’une bourse nationale de lycée.

« Ces modalités sont fixées par décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche et, pour les formations conduisant au titre d’ingénieur, après avis de la commission des titres d’ingénieur. »

II. – Le 1° de l’article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque l’obtention du baccalauréat ou de son équivalent est requise, les candidats bénéficient d’un aménagement des épreuves du concours précisé par voie réglementaire s’ils ont obtenu ce diplôme dans un établissement scolaire situé soit dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, soit dans une zone de revitalisation rurale au sens de l’article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire en qualité d’élève bénéficiaire d’une bourse nationale de lycée ; ».

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

En soutien à cet article, je rappellerai les difficultés que rencontrent en France les lycéens vivant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans les zones de revitalisation rurale quand ils sont bénéficiaires d’une bourse nationale de lycée.

Ils souffrent d’être éloignés d’une information complète et incarnée pour leur orientation et sont, de manière plus générale, confrontés aux conséquences d’un éloignement culturel et symbolique. Par conséquent, ils sont notamment victimes d’autocensure et peinent à se projeter dans des études et des carrières professionnelles éloignées des possibilités offertes par leur territoire d’origine.

On sait que l’école en milieu rural est loin d’être un espace voué à l’échec scolaire. Les résultats des enquêtes menées révèlent surtout l’autocensure des élèves ou leur manque de confiance en eux, bien que leurs résultats scolaires soient, dans l’ensemble, tout à fait satisfaisants.

On sait, par ailleurs, que les jeunes habitant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville redoublent plus souvent. Par exemple, dans les Pays de Loire, 24 % des élèves de sixième vivant dans un tel quartier ont au moins un an de retard, contre 9 % des jeunes résidant ailleurs. Après la troisième, les élèves vivant dans les quartiers prioritaires s’orientent plus souvent vers des filières professionnelles que les autres.

Enfin, les jeunes des territoires isolés ne bénéficient pas des mesures de compensation mises en place dans les centres urbains pour pallier les insuffisances de l’éducation nationale en matière de prise de parole, d’expression orale ou de gestion du stress par exemple. Ils ne bénéficient pas non plus du foisonnement de structures dans lesquelles s’investir et développer ce type de compétences ; or celles-ci font pourtant partie des attendus lors des études supérieures, puis, a fortiori, dans la vie professionnelle.

Conscients des inégalités en matière d’oralité, les lycéens ruraux s’estiment très largement démunis lors des premiers oraux, que ce soit pour intégrer une école ou une formation ou obtenir un stage.

Par conséquent, en matière d’orientation comme de résultats scolaires, les jeunes Français sont déterminés, pour partie, par leurs origines sociales et géographiques. Ce n’est pas un phénomène nouveau, mais la fracture se creuse entre les jeunes qui peuvent s’adapter aux standards du XXIe siècle et ceux qui rencontrent d’autant plus de difficultés à cocher toutes les cases que celles-ci se multiplient, générant angoisse et autocensure.

Madame la ministre, pour conclure, pourriez-vous définir ce qu’est un jeune « méritant » ? Y a-t-il, dans ce pays, un ordre naturel qui permettrait aux jeunes bien nés d’avoir accès à tout, quand les autres devraient être plus « méritants » ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Invoqué, convoqué à tout bout de champ, le mot « République », répété à l’infini de manière abusive en ces temps de campagne parfois nauséabonde, perd de sa force dans l’esprit de beaucoup de nos concitoyens.

Les mots lassent et les actes manquent pour convaincre que la République mérite encore d’être notre idéal commun, le socle de notre identité. Pour lui redonner de la vigueur, il faut une action déterminée en faveur de l’égalité et, à la République sécuritaire qui est aujourd’hui manifestement le cap de ce gouvernement, son alpha et son oméga, je préfère la sécurité dans la République, avec son corollaire, l’équité.

L’équité, c’est, notamment, donner aux jeunes, quelles que soient leur origine et leur condition, la possibilité de s’insérer et l’assurance de pouvoir monter dans l’ascenseur social, lequel devient, pour beaucoup, une chimère.

L’égalité, c’est donner plus à ceux qui ont moins. C’est permettre à chacun d’accéder à la fonction publique et de se mettre au service de l’État, même lorsque l’on vient d’un quartier prioritaire ou d’une zone de revitalisation rurale. Tel est l’objet de l’article 2.

Ne jetons pas un voile pudique sur nos concours de la haute fonction publique. On les présente comme des modèles suprêmes d’égalité, mais chacun sait qu’ils sont en réalité accessibles à des publics triés sur le volet, possédant les codes et les clés d’entrée dans les meilleurs lycées et les meilleures classes préparatoires.

Les réussites potentielles des quelques transfuges de classe que vous avez évoquées, madame la ministre, ne doivent pas masquer cette réalité structurelle : il existe une forme de ruissellement du déclassement.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Mme la ministre fait un geste de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Le Gouvernement aurait pu saisir l’occasion du projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme pour introduire des mesures de justice sociale : sur le logement, sur l’école, sur l’emploi. Il ne l’a pas fait.

Vous auriez pu alors changer de trottoir, c’est ce que nous proposons de faire : restaurer l’égalité républicaine dans l’accès aux emplois publics jusque dans les quartiers et les campagnes.

L’autosatisfaction dont vous avez fait preuve, même si vous le niez, est totalement décalée, quand on sait que votre première mesure en matière sociale dans ces quartiers a été la destruction de centaines de milliers d’emplois aidés.

Nous souffrons du manque de représentativité sociale de notre administration publique. La défiance et l’affaiblissement de la légitimité de l’État s’en nourrissent. Cette proposition de loi a un objectif : que la prise de conscience s’accompagne aussi de mesures concrètes dans l’esprit de l’article Ier de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui reste d’une modernité éclatante : « Les hommes – et les femmes ! – naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. »

Le constat est aujourd’hui implacable, mesdames les ministres : les inégalités sociales ont progressé depuis votre arrivée au pouvoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Invoqué, convoqué à tout bout de champ, le mot « République », répété à l’infini de manière abusive en ces temps de campagne parfois nauséabonde, perd de sa force dans l’esprit de beaucoup de nos concitoyens.

Les mots lassent et les actes manquent pour convaincre que la République mérite encore d’être notre idéal commun, le socle de notre identité. Pour lui redonner de la vigueur, il faut une action déterminée en faveur de l’égalité et, à la République sécuritaire qui est aujourd’hui manifestement le cap de ce gouvernement, son alpha et son oméga, je préfère la sécurité dans la République, avec son corollaire, l’équité.

L’équité, c’est, notamment, donner aux jeunes, quelles que soient leur origine et leur condition, la possibilité de s’insérer et l’assurance de pouvoir monter dans l’ascenseur social, lequel devient, pour beaucoup, une chimère.

L’égalité, c’est donner plus à ceux qui ont moins. C’est permettre à chacun d’accéder à la fonction publique et de se mettre au service de l’État, même lorsque l’on vient d’un quartier prioritaire ou d’une zone de revitalisation rurale. Tel est l’objet de l’article 2.

Ne jetons pas un voile pudique sur nos concours de la haute fonction publique. On les présente comme des modèles suprêmes d’égalité, mais chacun sait qu’ils sont en réalité accessibles à des publics triés sur le volet, possédant les codes et les clés d’entrée dans les meilleurs lycées et les meilleures classes préparatoires.

Les réussites potentielles des quelques transfuges de classe que vous avez évoquées, madame la ministre, ne doivent pas masquer cette réalité structurelle : il existe une forme de ruissellement du déclassement.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.

Mme la ministre fait un geste de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 2, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer le mot :

assurent

par le mot :

favorisent

II. – Alinéas 7 et 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Le Gouvernement aurait pu saisir l’occasion du projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme pour introduire des mesures de justice sociale : sur le logement, sur l’école, sur l’emploi. Il ne l’a pas fait.

Vous auriez pu alors changer de trottoir, c’est ce que nous proposons de faire : restaurer l’égalité républicaine dans l’accès aux emplois publics jusque dans les quartiers et les campagnes.

L’autosatisfaction dont vous avez fait preuve, même si vous le niez, est totalement décalée, quand on sait que votre première mesure en matière sociale dans ces quartiers a été la destruction de centaines de milliers d’emplois aidés.

Nous souffrons du manque de représentativité sociale de notre administration publique. La défiance et l’affaiblissement de la légitimité de l’État s’en nourrissent. Cette proposition de loi a un objectif : que la prise de conscience s’accompagne aussi de mesures concrètes dans l’esprit de l’article Ier de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui reste d’une modernité éclatante : « Les hommes – et les femmes ! – naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. »

Le constat est aujourd’hui implacable, mesdames les ministres : les inégalités sociales ont progressé depuis votre arrivée au pouvoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

Cet amendement vise, tout en conservant intacte l’ambition du texte initial d’améliorer l’accès des jeunes à la fonction publique, à proposer une rédaction plus souple de l’article.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 2, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Remplacer le mot :

assurent

par le mot :

favorisent

II. – Alinéas 7 et 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Isabelle Briquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement tend à modifier la rédaction de l’article 2 en ne conservant que sa partie relative aux modalités d’accès différencié dans les établissements d’enseignement supérieur pour les bacheliers des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale.

La loi du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 prévoit déjà que les établissements d’enseignement supérieur peuvent diversifier leur recrutement pour assurer une mixité sociale et géographique. Nous venons de voter ce texte, je vous propose donc d’attendre d’en voir les résultats avant de le modifier.

Les précisions apportées par l’article 2, même amendé, semblent, par ailleurs, être de nature réglementaire.

Enfin, le renvoi à un décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) ne semble pas opportun, puisqu’il ne respecterait pas l’autonomie des établissements. Le texte actuel prévoit que les établissements fixent leurs modalités selon des objectifs arrêtés par les ministres de tutelle, ce qui semble préférable.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Briquet

Cet amendement vise, tout en conservant intacte l’ambition du texte initial d’améliorer l’accès des jeunes à la fonction publique, à proposer une rédaction plus souple de l’article.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Ce qui est excessif étant insignifiant, je considère qu’un certain nombre de termes, voire d’anathèmes, sont inappropriés compte tenu de l’importance et du sérieux de notre débat.

Madame la sénatrice Lubin, vous m’avez interrogée sur la définition du mot « méritant ». Permettez-moi de revenir à ce que Mirabeau, Mounier et Champion de Cicé ont écrit dans l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 : l’accès à l’emploi public est ouvert à tous, « sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. » C’est bien pour cela que le programme que nous proposons s’appelle « Talents du service public ».

Nous savons tous en France ce qu’est un élève méritant. Le programme Talents du service public est ouvert à des élèves boursiers, sur le fondement d’un dossier et d’un entretien de motivation. C’est ce que l’on appelle le mérite, et cela nous semble être une définition à la fois compréhensible et républicaine, terme que j’assume, monsieur le président Kanner.

J’en viens à l’amendement lui-même.

Ce gouvernement croit au concours, qui est un élément méritocratique. Nous investissons d’ailleurs pour que 1 700 élèves s’y préparent dans de très bonnes conditions dès la rentrée de septembre 2021. Nous ne croyons pas que le mérite consiste à passer des épreuves aménagées. Au contraire, il s’agit de préparer des élèves afin qu’ils réussissent des concours sélectifs, qui leur donneront toute leur place et toute leur légitimité au service de l’intérêt général.

Je suis donc défavorable à cet amendement, même si sa rédaction est un peu plus cohérente avec notre cadre constitutionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement tend à modifier la rédaction de l’article 2 en ne conservant que sa partie relative aux modalités d’accès différencié dans les établissements d’enseignement supérieur pour les bacheliers des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale.

La loi du 24 décembre 2020 de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 prévoit déjà que les établissements d’enseignement supérieur peuvent diversifier leur recrutement pour assurer une mixité sociale et géographique. Nous venons de voter ce texte, je vous propose donc d’attendre d’en voir les résultats avant de le modifier.

Les précisions apportées par l’article 2, même amendé, semblent, par ailleurs, être de nature réglementaire.

Enfin, le renvoi à un décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (Cneser) ne semble pas opportun, puisqu’il ne respecterait pas l’autonomie des établissements. Le texte actuel prévoit que les établissements fixent leurs modalités selon des objectifs arrêtés par les ministres de tutelle, ce qui semble préférable.

L’avis est donc défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Ce qui est excessif étant insignifiant, je considère qu’un certain nombre de termes, voire d’anathèmes, sont inappropriés compte tenu de l’importance et du sérieux de notre débat.

Madame la sénatrice Lubin, vous m’avez interrogée sur la définition du mot « méritant ». Permettez-moi de revenir à ce que Mirabeau, Mounier et Champion de Cicé ont écrit dans l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 : l’accès à l’emploi public est ouvert à tous, « sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. » C’est bien pour cela que le programme que nous proposons s’appelle « Talents du service public ».

Nous savons tous en France ce qu’est un élève méritant. Le programme Talents du service public est ouvert à des élèves boursiers, sur le fondement d’un dossier et d’un entretien de motivation. C’est ce que l’on appelle le mérite, et cela nous semble être une définition à la fois compréhensible et républicaine, terme que j’assume, monsieur le président Kanner.

J’en viens à l’amendement lui-même.

Ce gouvernement croit au concours, qui est un élément méritocratique. Nous investissons d’ailleurs pour que 1 700 élèves s’y préparent dans de très bonnes conditions dès la rentrée de septembre 2021. Nous ne croyons pas que le mérite consiste à passer des épreuves aménagées. Au contraire, il s’agit de préparer des élèves afin qu’ils réussissent des concours sélectifs, qui leur donneront toute leur place et toute leur légitimité au service de l’intérêt général.

Je suis donc défavorable à cet amendement, même si sa rédaction est un peu plus cohérente avec notre cadre constitutionnel.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Photo de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Viviane Artigalas, sur l’article.

Article 3

Debut de section - PermalienPhoto de Viviane Artigalas

Je tiens à rappeler l’importance de la composition des jurys de concours pour la diversification des profils reçus.

Si l’on parle autant d’égalité des chances, c’est bien parce que nous sommes dans une société de plus en plus inégalitaire eu égard à ces concours. On parle de méritocratie, mais beaucoup de sociologues montrent bien que, quoi que l’on fasse, les plus méritants sont de plus en plus issus des classes favorisées. Nous constatons donc l’échec du concept de méritocratie que vous mettez en avant.

La société n’est plus la même, les inégalités s’accroissent, ce qui se voit particulièrement à l’oral des concours : les candidats issus des classes défavorisées n’ont pas les mêmes codes que les jurys, que ce soit en matière vestimentaire ou d’expression orale. Même si on les prépare, ils restent défavorisés par rapport à ceux qui maîtrisent ces codes. C’est pourquoi il me paraît important d’introduire dans ces jurys des personnes issues de la diversité afin de casser ce cercle vicieux.

L’argument selon lequel il serait difficile de trouver des personnes pour participer à ces jurys ne tient pas. Ayant été membre de jurys de concours, je puis vous dire que l’on trouve très facilement des gens pour en faire partie.

À vous écouter, on se dit que ces concours permettent surtout la reproduction des élites et des candidats issus des milieux favorisés. Restons entre nous et surtout que rien ne change !

I. – L’article 20 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est ainsi rétabli :

« Art. 20 bis. – Les membres des jurys et des comités de sélection constitués pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État sont composés d’au moins 50 % de personnes extérieures à l’administration. »

II. – Le VI de l’article L. 612-3 du code de l’éducation est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« L’instance chargée de l’examen des candidatures aux formations mentionnées au même premier alinéa comprend au moins une personne n’appartenant pas à l’établissement ou aux services de l’autorité académique.

« Les établissements mentionnés audit alinéa remettent un rapport annuel sur les recrutements effectués analysant les profils des candidats retenus et écartés, selon des modalités prévues par arrêté du ministre chargé de l’enseignement supérieur. Les rapports des établissements où l’admission est subordonnée à un concours de recrutement de la fonction publique sont transmis à l’Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. »

III. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 681-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « L. 611-1, » est supprimée ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … pour un meilleur accès des jeunes dans les administrations et les entreprises, les articles L. 611-1 et L. 612-3. » ;

c) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 612-3, » est supprimée ;

2° L’article L. 683-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « L. 611-1 » est remplacée par la référence : « L. 611-2 » ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont applicables en Polynésie française, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … pour un meilleur accès des jeunes dans les administrations et les entreprises, les articles L. 611-1 et L. 612-3. » ;

c) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 612-3, » est supprimée ;

3° L’article L. 684-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « L. 611-1 » est remplacée par la référence : « L. 611-2 » ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont applicables en Nouvelle-Calédonie, dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … pour un meilleur accès des jeunes dans les administrations et les entreprises, les articles L. 611-1 et L. 612-3. » ;

c) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 612-3, » est supprimée.

IV. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2022.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 3, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. 20 bis. – Les jurys et comités de sélection constitués pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État comprennent au moins une personne qui n’appartient pas à l’administration, dans la limite de 50 % de l’effectif global du jury ou du comité de sélection.

« Les modalités d’application sont définies par décret. »

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

Debut de section - PermalienPhoto de Viviane Artigalas

Je tiens à rappeler l’importance de la composition des jurys de concours pour la diversification des profils reçus.

Si l’on parle autant d’égalité des chances, c’est bien parce que nous sommes dans une société de plus en plus inégalitaire eu égard à ces concours. On parle de méritocratie, mais beaucoup de sociologues montrent bien que, quoi que l’on fasse, les plus méritants sont de plus en plus issus des classes favorisées. Nous constatons donc l’échec du concept de méritocratie que vous mettez en avant.

La société n’est plus la même, les inégalités s’accroissent, ce qui se voit particulièrement à l’oral des concours : les candidats issus des classes défavorisées n’ont pas les mêmes codes que les jurys, que ce soit en matière vestimentaire ou d’expression orale. Même si on les prépare, ils restent défavorisés par rapport à ceux qui maîtrisent ces codes. C’est pourquoi il me paraît important d’introduire dans ces jurys des personnes issues de la diversité afin de casser ce cercle vicieux.

L’argument selon lequel il serait difficile de trouver des personnes pour participer à ces jurys ne tient pas. Ayant été membre de jurys de concours, je puis vous dire que l’on trouve très facilement des gens pour en faire partie.

À vous écouter, on se dit que ces concours permettent surtout la reproduction des élites et des candidats issus des milieux favorisés. Restons entre nous et surtout que rien ne change !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Sans revenir sur l’objectif d’assurer une composition des jurys et des comités de sélection pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État plus représentative de la diversité de la société, cet amendement tend à prévoir un dispositif remanié.

Ces jurys ou comités de sélection comprendraient au moins une personne n’appartenant pas à l’administration, sans que ces personnes extérieures comptent pour plus de la moitié de l’effectif global. Les modalités de désignation de ces personnes extérieures et les épreuves auxquelles ce dispositif s’applique, par priorité les épreuves orales, seront fixées par décret.

Je précise que toutes les associations sont favorables à cette nouvelle disposition, à cette ouverture, y compris celles qui ont été auditionnées par le rapporteur. Cela rendrait justice à des candidats qui ont besoin d’être mieux représentés au sein des jurys et de se sentir mieux soutenus.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 3, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. 20 bis. – Les jurys et comités de sélection constitués pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État comprennent au moins une personne qui n’appartient pas à l’administration, dans la limite de 50 % de l’effectif global du jury ou du comité de sélection.

« Les modalités d’application sont définies par décret. »

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement vise à réduire la proportion de personnes extérieures à l’administration qui serait exigée dans la composition des jurys. La proportion de 50 % du panel serait remplacée par une personne au minimum, dans la limite de 50 % du jury.

Malgré tout, cette disposition resterait un facteur de complexification pour les organisateurs de concours. Elle devrait en outre être combinée avec le principe de nomination équilibrée de 40 % de personnes de chaque sexe.

Il semble préférable que cela reste une bonne pratique réservée à certaines épreuves, par exemple au grand oral.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Fichet

Sans revenir sur l’objectif d’assurer une composition des jurys et des comités de sélection pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires de l’État plus représentative de la diversité de la société, cet amendement tend à prévoir un dispositif remanié.

Ces jurys ou comités de sélection comprendraient au moins une personne n’appartenant pas à l’administration, sans que ces personnes extérieures comptent pour plus de la moitié de l’effectif global. Les modalités de désignation de ces personnes extérieures et les épreuves auxquelles ce dispositif s’applique, par priorité les épreuves orales, seront fixées par décret.

Je précise que toutes les associations sont favorables à cette nouvelle disposition, à cette ouverture, y compris celles qui ont été auditionnées par le rapporteur. Cela rendrait justice à des candidats qui ont besoin d’être mieux représentés au sein des jurys et de se sentir mieux soutenus.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Madame la sénatrice Artigalas, si vous considérez réellement que la ligne du Gouvernement est « restons entre nous et surtout que rien ne change », je vous invite à vous rapprocher des deux anciens Premiers ministres socialistes qui s’expriment ces derniers jours sur la réforme de la haute fonction publique que nous menons et qui semblent trouver que nous changeons trop et trop vite. Parfois, le conservatisme n’est pas là où certains l’imaginent !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement vise à réduire la proportion de personnes extérieures à l’administration qui serait exigée dans la composition des jurys. La proportion de 50 % du panel serait remplacée par une personne au minimum, dans la limite de 50 % du jury.

Malgré tout, cette disposition resterait un facteur de complexification pour les organisateurs de concours. Elle devrait en outre être combinée avec le principe de nomination équilibrée de 40 % de personnes de chaque sexe.

Il semble préférable que cela reste une bonne pratique réservée à certaines épreuves, par exemple au grand oral.

L’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

J’en viens à la composition des jurys. Depuis 2015, une circulaire, appliquée avec beaucoup d’exigence, précise d’ores et déjà que les autorités organisatrices des concours des trois versants de la fonction publique doivent diversifier la composition de leurs jurys en nommant obligatoirement des membres extérieurs à l’administration recruteuse.

Dans le cadre de la loi d’août 2019, nous avons clarifié la rédaction de la loi de 1983 qui fixe, comme vous savez, le statut et certains principes importants de la fonction publique, afin de garantir une composition équilibrée entre hommes et femmes des jurys. Une alternance à la présidence est également prévue de manière que, d’une cession à l’autre, l’exigence de parité s’applique.

Nous renouvelons également les membres des jurys pour que chacun d’entre eux n’exerce pas son mandat pendant plus de trois ou quatre sessions et nous les formons à un certain nombre de biais et de stéréotypes. Je porte cette action avec beaucoup de conviction, avec l’ensemble des écoles de service public et des organisateurs de concours.

L’enjeu, M. le sénateur de La Réunion le sait, est d’assurer l’ensemble des expériences et des regards, notamment des outre-mer, sur un certain nombre de recrutements, afin de garantir que ceux que nous recrutons sont pleinement formés aux missions qui vont être les leurs, mais également qu’ils sont recrutés pour leurs talents, leurs mérites et leurs vertus et qu’ils ne sont pas discriminés sur la base de stéréotypes.

Votre amendement me paraissant satisfait, je vous prie de bien vouloir le retirer.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Madame la sénatrice Artigalas, si vous considérez réellement que la ligne du Gouvernement est « restons entre nous et surtout que rien ne change », je vous invite à vous rapprocher des deux anciens Premiers ministres socialistes qui s’expriment ces derniers jours sur la réforme de la haute fonction publique que nous menons et qui semblent trouver que nous changeons trop et trop vite. Parfois, le conservatisme n’est pas là où certains l’imaginent !

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Madame la ministre, nous anticipons un peu sur ce que vous entendez faire.

Ce que nous proposons ici, c’est que des personnes qui auront été formées sur le terrain, et qui n’auront donc pas besoin d’une formation particulière, siègent dans les jurys afin de permettre aux jeunes concernés de se reconnaître en elles et d’en être reconnues.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

J’en viens à la composition des jurys. Depuis 2015, une circulaire, appliquée avec beaucoup d’exigence, précise d’ores et déjà que les autorités organisatrices des concours des trois versants de la fonction publique doivent diversifier la composition de leurs jurys en nommant obligatoirement des membres extérieurs à l’administration recruteuse.

Dans le cadre de la loi d’août 2019, nous avons clarifié la rédaction de la loi de 1983 qui fixe, comme vous savez, le statut et certains principes importants de la fonction publique, afin de garantir une composition équilibrée entre hommes et femmes des jurys. Une alternance à la présidence est également prévue de manière que, d’une cession à l’autre, l’exigence de parité s’applique.

Nous renouvelons également les membres des jurys pour que chacun d’entre eux n’exerce pas son mandat pendant plus de trois ou quatre sessions et nous les formons à un certain nombre de biais et de stéréotypes. Je porte cette action avec beaucoup de conviction, avec l’ensemble des écoles de service public et des organisateurs de concours.

L’enjeu, M. le sénateur de La Réunion le sait, est d’assurer l’ensemble des expériences et des regards, notamment des outre-mer, sur un certain nombre de recrutements, afin de garantir que ceux que nous recrutons sont pleinement formés aux missions qui vont être les leurs, mais également qu’ils sont recrutés pour leurs talents, leurs mérites et leurs vertus et qu’ils ne sont pas discriminés sur la base de stéréotypes.

Votre amendement me paraissant satisfait, je vous prie de bien vouloir le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Madame la ministre, nous anticipons un peu sur ce que vous entendez faire.

Ce que nous proposons ici, c’est que des personnes qui auront été formées sur le terrain, et qui n’auront donc pas besoin d’une formation particulière, siègent dans les jurys afin de permettre aux jeunes concernés de se reconnaître en elles et d’en être reconnues.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Chapitre III

Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État

Photo de Laurence Rossignol

Chapitre III

Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État

Photo de Laurence Rossignol

La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

Article 4

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

L’article 4 prévoit la création d’une nouvelle autorité publique indépendante afin de garantir une égalité des chances dans la fonction publique. Le concours n’est pas suffisant pour lutter contre les discriminations.

La presse a relayé hier le grand succès des concours d’accès aux écoles en 2021 : il y a eu moins d’autocensure, moins de frais de déplacement. Ces concours à distance semblent être une piste à envisager, au-delà de la crise sanitaire actuelle.

Malgré les programmes d’études intégrés dans les instituts d’études politiques et dans les autres facultés, trop d’élèves n’achèvent pas leurs études universitaires ; ils sont souvent issus du même milieu social, comme le montrent les études de Stéphane Béaud et de Michel Pialoux.

Tout cela nuit à la méritocratie qui vous est si chère, madame la ministre. Les avertissements en ce sens sont constants, comme en témoignent les rapports L’Horty en 2014 ou Rousselle en 2017 sur le manque de diversité dans les écoles, ou, plus récemment, le rapport Borloo en 2018.

Cette autorité indépendante posera un regard neuf sur la situation et pourra disposer de données sur le sujet, alors que, actuellement, les processus de recrutement dans le public comme dans le privé sont opaques. Nous avons besoin d’une publicisation et d’une évaluation plus fines, vous l’avez compris.

Il y a urgence : combien de rapports vous faudra-t-il pour comprendre qu’il faut agir en ce sens pour favoriser l’égalité des chances dans la fonction publique ?

I. – Le chapitre IX bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est ainsi rétabli :

« CHAPITRE IX BIS

« Autorité pour légalité des chances dans la fonction publique

« Art. 72. – Il est créé une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique, autorité publique indépendante, placée auprès du ministre chargé de la fonction publique.

« Cette autorité rassemble, analyse et diffuse les informations et données relatives à la promotion de l’égalité des chances dans l’accès à la fonction publique, aux modalités de promotion du personnel au sein de l’administration, aux garanties permettant un déroulement de carrière équitable entre les agents, à la diversité sociale de la fonction publique ainsi qu’aux politiques menées en ce domaine. Elle réalise des travaux d’études, de recherche et d’évaluation.

« Les administrations de l’État lui communiquent les éléments qui lui sont nécessaires pour la poursuite de ses missions, sous réserve de l’application des dispositions législatives imposant une obligation de secret.

« Elle rend un avis consultatif et public sur les nominations prévues à l’article 25 de la présente loi.

« Elle élabore chaque année, à destination du Premier ministre et du Parlement, un rapport rendant compte de son activité et synthétisant les travaux d’études, de recherche et d’évaluation. Il comprend également des évaluations, des avis et des recommandations sur les politiques de promotion de l’égalité des chances appliquées dans les administrations publiques. Ce rapport est rendu public.

« L’autorité est composée de membres nommés par décret dont 50 %, appartenant ou non à l’administration, exercent ou ont exercé une activité professionnelle pendant au moins cinq années dans un quartier prioritaire de la politique de la ville au sens de l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ou dans une zone de revitalisation rurale au sens de l’article 61 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. »

II. – Un décret en Conseil d’État précise la composition, les missions et les modalités de fonctionnement de l’autorité instituée par le présent article.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Parmi les obstacles auxquels les jeunes peuvent être confrontés pour accéder à la fonction publique, Yannick L’Horty, dans son rapport au Premier ministre, citait, dans le cadre d’un reflux des recrutements et d’une sélectivité accrue, la montée de la qualité moyenne des candidats en termes de niveau de diplômes, de qualifications ou d’expérience.

Les candidats semblent être de plus en plus surqualifiés pour occuper les postes proposés. En conséquence, les candidats qui ont le niveau de formation et de diplôme requis pour passer les concours sont évincés par ceux dont les diplômes et les niveaux de formation excèdent ceux qui sont demandés. Les moins qualifiés semblent donc finalement exclus de l’accès à l’emploi public.

La part des femmes, majoritaires parmi les fonctionnaires de catégorie C, décroît au fur et à mesure que l’on progresse dans la hiérarchie. De nombreux travaux soulignent ainsi que les inégalités sociales dans l’accès à l’emploi public se sont développées.

En particulier, les enfants d’agents publics sont surreprésentés dans les recrutements publics. Alors que les enfants de cadres du public représentent 2, 6 % des actifs occupés, ils constituent 10 % des cadres de la fonction publique d’État, soit quatre fois plus. Un tiers des agents de la fonction publique d’État sont des enfants de fonctionnaires et cette proportion s’élève à mesure que l’on monte dans la hiérarchie.

Par ailleurs, selon les enquêtes sur l’emploi, et comme le souligne la direction générale de l’administration et de la fonction publique, les immigrés représentaient, en 2010, 5 % des agents de chacun des versants de la fonction publique, contre 10 % de la population dite « d’âge actif ».

Ces éléments chiffrés soulignent l’acuité qui caractérise l’enjeu de promotion de la mixité sociale au sein de la fonction publique et la nécessité de l’égalité des chances. Cet accès inégal à l’emploi public selon le sexe, l’origine, le lieu de résidence ou selon tout autre critère constitue un véritable paradoxe pour la fonction publique, dont la voie d’entrée de référence reste le concours – vous venez de le réaffirmer, madame la ministre –, organisé dans la plus stricte égalité des candidats.

Ce n’est pas un petit sujet, comme en atteste le principe constitutionnel d’égale admissibilité aux emplois publics, posé par l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La mixité sociale et l’égalité des chances au sein de la fonction publique sont des enjeux indissociables du respect et de la vitalité du pacte républicain. Garantir leur existence relève d’une problématique extrêmement complexe, comme il nous est donné de le constater dans le cadre des auditions que nous menons au sein de la mission d’information sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, dont je suis rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

L’article 4 prévoit la création d’une nouvelle autorité publique indépendante afin de garantir une égalité des chances dans la fonction publique. Le concours n’est pas suffisant pour lutter contre les discriminations.

La presse a relayé hier le grand succès des concours d’accès aux écoles en 2021 : il y a eu moins d’autocensure, moins de frais de déplacement. Ces concours à distance semblent être une piste à envisager, au-delà de la crise sanitaire actuelle.

Malgré les programmes d’études intégrés dans les instituts d’études politiques et dans les autres facultés, trop d’élèves n’achèvent pas leurs études universitaires ; ils sont souvent issus du même milieu social, comme le montrent les études de Stéphane Béaud et de Michel Pialoux.

Tout cela nuit à la méritocratie qui vous est si chère, madame la ministre. Les avertissements en ce sens sont constants, comme en témoignent les rapports L’Horty en 2014 ou Rousselle en 2017 sur le manque de diversité dans les écoles, ou, plus récemment, le rapport Borloo en 2018.

Cette autorité indépendante posera un regard neuf sur la situation et pourra disposer de données sur le sujet, alors que, actuellement, les processus de recrutement dans le public comme dans le privé sont opaques. Nous avons besoin d’une publicisation et d’une évaluation plus fines, vous l’avez compris.

Il y a urgence : combien de rapports vous faudra-t-il pour comprendre qu’il faut agir en ce sens pour favoriser l’égalité des chances dans la fonction publique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

L’article 4 comme l’ensemble de cette proposition de loi ont le mérite de sensibiliser chacun à un certain nombre de problèmes, parmi lesquels celui que pointe l’intitulé du chapitre III, « Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État ».

De nombreux collègues se sont déjà exprimés sur la nécessité de faire respecter le principe d’égalité des chances, que ce soit dans les zones de revitalisation rurale ou dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il faut sensibiliser les jeunes, mais ce combat est déjà mené depuis de nombreuses années.

Le texte traite de l’accès à la fonction publique d’État, mais il faut y associer la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière.

Pour garantir l’accès aux concours, il est nécessaire de former les jeunes. À cet égard, l’éducation nationale est très engagée. Les enseignants jouent un rôle fondamental dès le premier cycle, puis au collège et au lycée.

Pour susciter des vocations, nous développons tous des expériences intéressantes, dans nos départements et territoires respectifs. Par exemple, sur un sujet dont on parle beaucoup, à savoir la défense des valeurs de la République et la connaissance des institutions, nous avons développé dans le département des Ardennes des classes de défense et de sécurité globale, au niveau du collège et du lycée.

Le département a la chance de compter encore un régiment, de sorte que, dans ces classes, les élèves se voient offrir un temps pour nouer des liens avec les militaires et explorer plus largement ceux qui lient l’armée à la Nation.

Les classes à option sapeur-pompier, qui existent au collège comme au lycée, peuvent également susciter des vocations.

Ce genre d’initiatives contribue à renforcer le lien que les jeunes peuvent entretenir avec tous les services de l’État qui œuvrent pour la sécurité intérieure, que ce soit la gendarmerie ou la police nationale, les sapeurs-pompiers ou les militaires.

Néanmoins, je suivrai l’avis de la commission des lois sur cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Parmi les obstacles auxquels les jeunes peuvent être confrontés pour accéder à la fonction publique, Yannick L’Horty, dans son rapport au Premier ministre, citait, dans le cadre d’un reflux des recrutements et d’une sélectivité accrue, la montée de la qualité moyenne des candidats en termes de niveau de diplômes, de qualifications ou d’expérience.

Les candidats semblent être de plus en plus surqualifiés pour occuper les postes proposés. En conséquence, les candidats qui ont le niveau de formation et de diplôme requis pour passer les concours sont évincés par ceux dont les diplômes et les niveaux de formation excèdent ceux qui sont demandés. Les moins qualifiés semblent donc finalement exclus de l’accès à l’emploi public.

La part des femmes, majoritaires parmi les fonctionnaires de catégorie C, décroît au fur et à mesure que l’on progresse dans la hiérarchie. De nombreux travaux soulignent ainsi que les inégalités sociales dans l’accès à l’emploi public se sont développées.

En particulier, les enfants d’agents publics sont surreprésentés dans les recrutements publics. Alors que les enfants de cadres du public représentent 2, 6 % des actifs occupés, ils constituent 10 % des cadres de la fonction publique d’État, soit quatre fois plus. Un tiers des agents de la fonction publique d’État sont des enfants de fonctionnaires et cette proportion s’élève à mesure que l’on monte dans la hiérarchie.

Par ailleurs, selon les enquêtes sur l’emploi, et comme le souligne la direction générale de l’administration et de la fonction publique, les immigrés représentaient, en 2010, 5 % des agents de chacun des versants de la fonction publique, contre 10 % de la population dite « d’âge actif ».

Ces éléments chiffrés soulignent l’acuité qui caractérise l’enjeu de promotion de la mixité sociale au sein de la fonction publique et la nécessité de l’égalité des chances. Cet accès inégal à l’emploi public selon le sexe, l’origine, le lieu de résidence ou selon tout autre critère constitue un véritable paradoxe pour la fonction publique, dont la voie d’entrée de référence reste le concours – vous venez de le réaffirmer, madame la ministre –, organisé dans la plus stricte égalité des candidats.

Ce n’est pas un petit sujet, comme en atteste le principe constitutionnel d’égale admissibilité aux emplois publics, posé par l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La mixité sociale et l’égalité des chances au sein de la fonction publique sont des enjeux indissociables du respect et de la vitalité du pacte républicain. Garantir leur existence relève d’une problématique extrêmement complexe, comme il nous est donné de le constater dans le cadre des auditions que nous menons au sein de la mission d’information sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, dont je suis rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Le chapitre III a pour titre « Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État ». J’insisterai pour ma part sur l’enjeu que représente l’évaluation des politiques publiques.

En effet, comme vous le savez, le mérite républicain et la méritocratie, dont il est beaucoup question, s’arrêtent souvent aux portes des quartiers dits « prioritaires » de nos villes, en raison des barrières sociales et des disparités de moyens des services publics.

Les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont attachés à interroger aussi longtemps que nécessaire les mécanismes qui empêchent de passer de l’égalité formelle, celle qui est inscrite aux frontons des écoles, collèges, lycées et mairies, à l’égalité réelle, telle qu’elle est vécue par ces jeunes dans leur accès au monde du travail.

Nous avons été à l’initiative de la création d’une mission d’information sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, dont les travaux sont rapportés par notre collègue Monique Lubin.

Dans ce cadre, nous avons entendu hier Louis Schweitzer, président du Comité d’évaluation de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, ancien président de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), et fin connaisseur des mécanismes de discrimination. Il a tenu des propos qui me sont revenus en écoutant vos interventions dans la discussion générale, mesdames les ministres, et la litanie des mesures que vous avez présentées.

Il a en effet dénoncé le « maquis des différents dispositifs et stratégies qui s’amoncellent » pour lutter contre la pauvreté et contre la discrimination, sans qu’aucune évaluation des politiques engagées ne soit formellement menée. C’est un maquis que l’on impose non seulement aux décideurs, mais aussi aux individus concernés.

L’article 4, s’il était adopté, permettrait de combler ce manque, en prévoyant dans la loi une mission d’évaluation de l’égalité des chances dans la fonction publique, confiée à une nouvelle autorité publique indépendante.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

L’article 4 comme l’ensemble de cette proposition de loi ont le mérite de sensibiliser chacun à un certain nombre de problèmes, parmi lesquels celui que pointe l’intitulé du chapitre III, « Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État ».

De nombreux collègues se sont déjà exprimés sur la nécessité de faire respecter le principe d’égalité des chances, que ce soit dans les zones de revitalisation rurale ou dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il faut sensibiliser les jeunes, mais ce combat est déjà mené depuis de nombreuses années.

Le texte traite de l’accès à la fonction publique d’État, mais il faut y associer la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière.

Pour garantir l’accès aux concours, il est nécessaire de former les jeunes. À cet égard, l’éducation nationale est très engagée. Les enseignants jouent un rôle fondamental dès le premier cycle, puis au collège et au lycée.

Pour susciter des vocations, nous développons tous des expériences intéressantes, dans nos départements et territoires respectifs. Par exemple, sur un sujet dont on parle beaucoup, à savoir la défense des valeurs de la République et la connaissance des institutions, nous avons développé dans le département des Ardennes des classes de défense et de sécurité globale, au niveau du collège et du lycée.

Le département a la chance de compter encore un régiment, de sorte que, dans ces classes, les élèves se voient offrir un temps pour nouer des liens avec les militaires et explorer plus largement ceux qui lient l’armée à la Nation.

Les classes à option sapeur-pompier, qui existent au collège comme au lycée, peuvent également susciter des vocations.

Ce genre d’initiatives contribue à renforcer le lien que les jeunes peuvent entretenir avec tous les services de l’État qui œuvrent pour la sécurité intérieure, que ce soit la gendarmerie ou la police nationale, les sapeurs-pompiers ou les militaires.

Néanmoins, je suivrai l’avis de la commission des lois sur cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Teva Rohfritsch

J’ai fait part dans la discussion générale de l’intérêt que le groupe RDPI porte à cette proposition de loi, qui nous semble néanmoins mériter d’être davantage travaillée.

En effet, encore faut-il s’entendre sur l’objectif de la création d’une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. Si nous sommes d’accord pour défendre l’égalité des chances, nous sommes surtout convaincus par les propos qu’a tenus Mme de Montchalin sur l’égalité des choix.

Je viens d’un territoire français situé à 16 000 kilomètres de la métropole, que je me permettrai de désigner comme un « quartier prioritaire de la ville très éloigné de la métropole » (QPVTEM), mais qui reste au sein de la République. Les jeunes de ce territoire doivent « monter à Paris » pour « faire leur prépa », c’est-à-dire préparer l’accès aux différents concours.

Qu’est-ce que le mérite ? Celui que nous appelons de nos vœux, dans les outre-mer comme dans les régions métropolitaines, c’est de passer les mêmes concours et de les réussir sans quotas.

Pour tenir la promesse républicaine, il est important d’aider les candidats de ces territoires à préparer ces concours et de faire en sorte que des talents puissent émerger. Les candidats issus des « QPVTEM » doivent pouvoir avoir la fierté de réussir les concours dans les mêmes conditions que tout le monde, afin qu’il ne leur soit jamais reproché dans la suite de leur carrière d’avoir bénéficié de quotas.

Le mérite, c’est le talent, et le talent ne doit pas être tiré vers le bas, à cause de dispositions particulières, telles que celles que ce texte propose. Je vous remercie au nom des Polynésiens, des Réunionnais, des Martiniquais, mais aussi des Bretons et des Alsaciens, de faire en sorte que cette promesse républicaine soit la même pour tous.

Nous sommes défavorables à cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Le chapitre III a pour titre « Accompagner et évaluer l’égalité des chances dans la fonction publique d’État ». J’insisterai pour ma part sur l’enjeu que représente l’évaluation des politiques publiques.

En effet, comme vous le savez, le mérite républicain et la méritocratie, dont il est beaucoup question, s’arrêtent souvent aux portes des quartiers dits « prioritaires » de nos villes, en raison des barrières sociales et des disparités de moyens des services publics.

Les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont attachés à interroger aussi longtemps que nécessaire les mécanismes qui empêchent de passer de l’égalité formelle, celle qui est inscrite aux frontons des écoles, collèges, lycées et mairies, à l’égalité réelle, telle qu’elle est vécue par ces jeunes dans leur accès au monde du travail.

Nous avons été à l’initiative de la création d’une mission d’information sur la politique en faveur de l’égalité des chances et de l’émancipation de la jeunesse, dont les travaux sont rapportés par notre collègue Monique Lubin.

Dans ce cadre, nous avons entendu hier Louis Schweitzer, président du Comité d’évaluation de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, ancien président de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde), et fin connaisseur des mécanismes de discrimination. Il a tenu des propos qui me sont revenus en écoutant vos interventions dans la discussion générale, mesdames les ministres, et la litanie des mesures que vous avez présentées.

Il a en effet dénoncé le « maquis des différents dispositifs et stratégies qui s’amoncellent » pour lutter contre la pauvreté et contre la discrimination, sans qu’aucune évaluation des politiques engagées ne soit formellement menée. C’est un maquis que l’on impose non seulement aux décideurs, mais aussi aux individus concernés.

L’article 4, s’il était adopté, permettrait de combler ce manque, en prévoyant dans la loi une mission d’évaluation de l’égalité des chances dans la fonction publique, confiée à une nouvelle autorité publique indépendante.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Je comprends qu’une mission d’information sénatoriale mène actuellement des travaux sur la politique en faveur de l’égalité des chances. J’imagine que d’autres travaux sont en cours. Cela montre l’intérêt que vous portez à ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs. Comme le Gouvernement, vous travaillez par étapes. Nous plaçons les briques les unes après les autres, et c’est aussi votre méthode.

L’article 4 pose plusieurs difficultés d’ordre différent. Premièrement, votre objectif de créer une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique, qui ne serait pas indépendante comme le serait une AAI nouvelle, me semble satisfait par les mesures que nous prenons.

En effet, la direction générale de l’administration de la fonction publique (DGAFP), dont j’ai l’honneur d’être la ministre, publie avec le Défenseur des droits, sur un rythme biannuel, un rapport relatif à la lutte contre les discriminations et à la prise en compte de la diversité de la société française dans la fonction publique, dont il couvre les trois versants. Celui qui paraîtra à l’été 2021, faisant suite à celui de 2019, présentera tous les éléments sur le testing et sur l’évolution des travaux de Yannick L’Horty, que nous continuons à financer, année après année, parce que nous pensons qu’il est utile de disposer de ce regard extérieur, d’une grande rigueur académique, pour alimenter nos travaux.

Toutes les données que produit le service statistique de la DGAFP sont rendues publiques. Je vous propose que la direction interministérielle du numérique (Dinum), également placée sous ma tutelle, travaille avec la DGAFP afin que le maximum de données soient accessibles en open data et facilement consultables sur des séries longues afin de permettre de suivre les évolutions en cours.

Selon moi, il est plus utile qu’une direction existante s’attelle à produire des données de qualité pour les Français que de créer une autorité indépendante, qui aggravera le démembrement de l’action publique et alourdira potentiellement les coûts.

Par ailleurs, je tiens à vous dire que l’ensemble des ministères des employeurs publics mène avec nous une démarche très volontariste sur le Label Diversité. Ce label permet à chacun de professionnaliser les procédures de recrutement pour être plus transparent et pour lutter contre les discriminations. Il fait l’objet d’un audit externe tous les deux ans. Nous pourrons mener avec les parlementaires un travail conjoint de suivi de l’évaluation de ce dispositif.

Enfin, dans le cadre de la loi de 2019, vous avez voté un mécanisme de signalement des actes de discrimination beaucoup plus fort que précédemment, puisque désormais il intervient systématiquement hors des hiérarchies, afin que chacun puisse faire remonter d’éventuelles difficultés liées à une situation de discrimination. Je m’assure d’avoir un suivi quantitatif et qualitatif de ce mécanisme pour être certaine qu’il fonctionne bien.

Pour toutes ces raisons, il me semble que les dispositions de cet article sont déjà satisfaites. Je m’engage à aller plus loin, comme nous en sommes convenus lors de nos échanges, madame la sénatrice, et je vous associerai pleinement à cette évolution, selon votre souhait, pour que nous disposions d’une meilleure photographie et d’une vision plus précise de la dynamique à l’œuvre afin de repérer puis de résorber les discriminations qui existeraient.

Debut de section - PermalienPhoto de Teva Rohfritsch

J’ai fait part dans la discussion générale de l’intérêt que le groupe RDPI porte à cette proposition de loi, qui nous semble néanmoins mériter d’être davantage travaillée.

En effet, encore faut-il s’entendre sur l’objectif de la création d’une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique. Si nous sommes d’accord pour défendre l’égalité des chances, nous sommes surtout convaincus par les propos qu’a tenus Mme de Montchalin sur l’égalité des choix.

Je viens d’un territoire français situé à 16 000 kilomètres de la métropole, que je me permettrai de désigner comme un « quartier prioritaire de la ville très éloigné de la métropole » (QPVTEM), mais qui reste au sein de la République. Les jeunes de ce territoire doivent « monter à Paris » pour « faire leur prépa », c’est-à-dire préparer l’accès aux différents concours.

Qu’est-ce que le mérite ? Celui que nous appelons de nos vœux, dans les outre-mer comme dans les régions métropolitaines, c’est de passer les mêmes concours et de les réussir sans quotas.

Pour tenir la promesse républicaine, il est important d’aider les candidats de ces territoires à préparer ces concours et de faire en sorte que des talents puissent émerger. Les candidats issus des « QPVTEM » doivent pouvoir avoir la fierté de réussir les concours dans les mêmes conditions que tout le monde, afin qu’il ne leur soit jamais reproché dans la suite de leur carrière d’avoir bénéficié de quotas.

Le mérite, c’est le talent, et le talent ne doit pas être tiré vers le bas, à cause de dispositions particulières, telles que celles que ce texte propose. Je vous remercie au nom des Polynésiens, des Réunionnais, des Martiniquais, mais aussi des Bretons et des Alsaciens, de faire en sorte que cette promesse républicaine soit la même pour tous.

Nous sommes défavorables à cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Permettez-moi simplement de vous faire part de mes regrets, madame la ministre. Vous nous dites que des mesures qui satisferont l’objectif que nous visons seront mises en place. Nous ne pourrons que nous réjouir si cette proposition de loi vous a donné des idées, dans un esprit constructif.

Cependant, vous venez d’énumérer l’ensemble des entités qui travaillent déjà à fournir des statistiques et des rapports sur les discriminations, alors que nous proposons dans ce texte de créer une entité qui rassemblerait toutes les données existantes afin de produire un seul rapport plutôt qu’une multitude d’études.

Ainsi, le Gouvernement pourrait mesurer de manière annuelle ou biannuelle les progrès réalisés, ce qui aiderait à contrer le sentiment largement partagé selon lequel les mesures prises ne seraient pas suffisantes. En nous fixant un objectif statistique, nous pourrions prouver le contraire et voir l’évolution de la société. Par conséquent, il est dommage de rejeter la création de cet outil, qui n’existe pas aujourd’hui.

Debut de section - Permalien
Amélie de Montchalin

Je comprends qu’une mission d’information sénatoriale mène actuellement des travaux sur la politique en faveur de l’égalité des chances. J’imagine que d’autres travaux sont en cours. Cela montre l’intérêt que vous portez à ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs. Comme le Gouvernement, vous travaillez par étapes. Nous plaçons les briques les unes après les autres, et c’est aussi votre méthode.

L’article 4 pose plusieurs difficultés d’ordre différent. Premièrement, votre objectif de créer une Autorité pour l’égalité des chances dans la fonction publique, qui ne serait pas indépendante comme le serait une AAI nouvelle, me semble satisfait par les mesures que nous prenons.

En effet, la direction générale de l’administration de la fonction publique (DGAFP), dont j’ai l’honneur d’être la ministre, publie avec le Défenseur des droits, sur un rythme biannuel, un rapport relatif à la lutte contre les discriminations et à la prise en compte de la diversité de la société française dans la fonction publique, dont il couvre les trois versants. Celui qui paraîtra à l’été 2021, faisant suite à celui de 2019, présentera tous les éléments sur le testing et sur l’évolution des travaux de Yannick L’Horty, que nous continuons à financer, année après année, parce que nous pensons qu’il est utile de disposer de ce regard extérieur, d’une grande rigueur académique, pour alimenter nos travaux.

Toutes les données que produit le service statistique de la DGAFP sont rendues publiques. Je vous propose que la direction interministérielle du numérique (Dinum), également placée sous ma tutelle, travaille avec la DGAFP afin que le maximum de données soient accessibles en open data et facilement consultables sur des séries longues afin de permettre de suivre les évolutions en cours.

Selon moi, il est plus utile qu’une direction existante s’attelle à produire des données de qualité pour les Français que de créer une autorité indépendante, qui aggravera le démembrement de l’action publique et alourdira potentiellement les coûts.

Par ailleurs, je tiens à vous dire que l’ensemble des ministères des employeurs publics mène avec nous une démarche très volontariste sur le Label Diversité. Ce label permet à chacun de professionnaliser les procédures de recrutement pour être plus transparent et pour lutter contre les discriminations. Il fait l’objet d’un audit externe tous les deux ans. Nous pourrons mener avec les parlementaires un travail conjoint de suivi de l’évaluation de ce dispositif.

Enfin, dans le cadre de la loi de 2019, vous avez voté un mécanisme de signalement des actes de discrimination beaucoup plus fort que précédemment, puisque désormais il intervient systématiquement hors des hiérarchies, afin que chacun puisse faire remonter d’éventuelles difficultés liées à une situation de discrimination. Je m’assure d’avoir un suivi quantitatif et qualitatif de ce mécanisme pour être certaine qu’il fonctionne bien.

Pour toutes ces raisons, il me semble que les dispositions de cet article sont déjà satisfaites. Je m’engage à aller plus loin, comme nous en sommes convenus lors de nos échanges, madame la sénatrice, et je vous associerai pleinement à cette évolution, selon votre souhait, pour que nous disposions d’une meilleure photographie et d’une vision plus précise de la dynamique à l’œuvre afin de repérer puis de résorber les discriminations qui existeraient.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, sur l’article.

L ’ article 4 n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Permettez-moi simplement de vous faire part de mes regrets, madame la ministre. Vous nous dites que des mesures qui satisferont l’objectif que nous visons seront mises en place. Nous ne pourrons que nous réjouir si cette proposition de loi vous a donné des idées, dans un esprit constructif.

Cependant, vous venez d’énumérer l’ensemble des entités qui travaillent déjà à fournir des statistiques et des rapports sur les discriminations, alors que nous proposons dans ce texte de créer une entité qui rassemblerait toutes les données existantes afin de produire un seul rapport plutôt qu’une multitude d’études.

Ainsi, le Gouvernement pourrait mesurer de manière annuelle ou biannuelle les progrès réalisés, ce qui aiderait à contrer le sentiment largement partagé selon lequel les mesures prises ne seraient pas suffisantes. En nous fixant un objectif statistique, nous pourrions prouver le contraire et voir l’évolution de la société. Par conséquent, il est dommage de rejeter la création de cet outil, qui n’existe pas aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

TITRE II

Accessibilité renforcée au marché du travail

Chapitre Ier

Accentuer la lutte contre les discriminations

Photo de Laurence Rossignol

TITRE II

Accessibilité renforcée au marché du travail

Chapitre Ier

Accentuer la lutte contre les discriminations

Photo de Laurence Rossignol

La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

Article 5

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

Nous souhaitons ajouter le lieu d’origine aux vingt-cinq motifs de discrimination qui figurent actuellement dans le code du travail. En effet, on constate que celui-ci peut servir à contourner les règles de non-discrimination liées à l’appartenance à une prétendue race ou parfois même à une Nation. Son ajout aux motifs mentionnés dans le code du travail permettra d’empêcher de manière plus fine les discriminations à l’embauche dont sont victimes une partie de nos concitoyens.

Ces Français subissent une véritable injustice. J’ai reçu de nombreux témoignages de jeunes qui vont jusqu’à modifier leur adresse postale sur leur CV pour avoir une chance d’obtenir un entretien d’embauche, car cette adresse peut constituer un frein.

Nous ne voulons pas encourager les saisines des conseils des prud’hommes ni créer une surcharge de travail pour les TPE-PME, comme vous nous le reprocherez certainement.

Nous voyons dans cette disposition une formidable opportunité de repenser le modèle de recrutement des entreprises. Voulons-nous des jeunes bien formés et motivés, issus d’un quartier modeste, ou bien un jeune dont le réseau familial a facilité l’embauche ? Nous ne pouvons pas ignorer ce sujet, qu’il se pose dans les quartiers populaires ou dans les zones plus rurales, puisque les sièges des entreprises tendent à s’éloigner.

À l’article L. 1132-1 du code du travail, après le mot : « résidence », sont insérés les mots : «, de son lieu d’origine ».

L ’ article 5 n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

Nous souhaitons ajouter le lieu d’origine aux vingt-cinq motifs de discrimination qui figurent actuellement dans le code du travail. En effet, on constate que celui-ci peut servir à contourner les règles de non-discrimination liées à l’appartenance à une prétendue race ou parfois même à une Nation. Son ajout aux motifs mentionnés dans le code du travail permettra d’empêcher de manière plus fine les discriminations à l’embauche dont sont victimes une partie de nos concitoyens.

Ces Français subissent une véritable injustice. J’ai reçu de nombreux témoignages de jeunes qui vont jusqu’à modifier leur adresse postale sur leur CV pour avoir une chance d’obtenir un entretien d’embauche, car cette adresse peut constituer un frein.

Nous ne voulons pas encourager les saisines des conseils des prud’hommes ni créer une surcharge de travail pour les TPE-PME, comme vous nous le reprocherez certainement.

Nous voyons dans cette disposition une formidable opportunité de repenser le modèle de recrutement des entreprises. Voulons-nous des jeunes bien formés et motivés, issus d’un quartier modeste, ou bien un jeune dont le réseau familial a facilité l’embauche ? Nous ne pouvons pas ignorer ce sujet, qu’il se pose dans les quartiers populaires ou dans les zones plus rurales, puisque les sièges des entreprises tendent à s’éloigner.

Photo de Laurence Rossignol

La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

Article 6

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

En cas de refus de recrutement, il est important que les jeunes, en particulier ceux qui sont issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale, reçoivent une décision motivée de la part de l’entreprise. Elle leur permettra de connaître les aspects positifs et négatifs de leur candidature et de travailler leurs points faibles.

Pour éviter que l’on nous taxe d’idéalisme ou que l’on nous reproche de méconnaître la réalité du terrain, nous présenterons un amendement n° 4 qui aura pour objet de restreindre l’obligation faite aux entreprises de transmettre leur décision motivée aux candidats refusés qui auront été reçus en entretien et qui en auront fait la demande.

Après l’article L. 1221-8 du code du travail, il est inséré un article L. 1221-8-1 ainsi rédigé :

« Art. L.1221 -8 -1. – En cas de refus de recrutement d’un candidat, l’entreprise indique, par tout moyen et dans un délai raisonnable, les motifs de sa décision. »

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 4, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie, Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 1221 -8 -1. – En cas de refus de recrutement d’un candidat auditionné par les instances chargées des recrutements au sein de l’entreprise, celle-ci lui communique par écrit, s’il en fait la demande, les motifs de sa décision. »

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Comme vient de le dire M. Cardon, cet amendement tend à préciser l’obligation faite à l’entreprise d’informer le candidat des motifs de son non-recrutement. Cette information devra se faire par écrit, ce qui ne constitue pas une charge importante pour l’entreprise, dès lors que le périmètre des candidats concernés a été restreint à ceux qui ont été reçus en entretien et qui en font la demande.

L’objectif de cet amendement est de faire progresser les candidats en leur permettant de savoir ce qui n’a pas fonctionné au cours de leur entretien. Il s’agit également de faire en sorte que l’entreprise soit partie prenante de manière positive dans le processus de recrutement.

Enfin, comme l’a dit M. Sueur, nous pensons que le débat aurait été différent si cet amendement avait réellement été intégré à la discussion et à la réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

En cas de refus de recrutement, il est important que les jeunes, en particulier ceux qui sont issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones de revitalisation rurale, reçoivent une décision motivée de la part de l’entreprise. Elle leur permettra de connaître les aspects positifs et négatifs de leur candidature et de travailler leurs points faibles.

Pour éviter que l’on nous taxe d’idéalisme ou que l’on nous reproche de méconnaître la réalité du terrain, nous présenterons un amendement n° 4 qui aura pour objet de restreindre l’obligation faite aux entreprises de transmettre leur décision motivée aux candidats refusés qui auront été reçus en entretien et qui en auront fait la demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

L’amendement n° 4, présenté par M. Sueur, Mme Conway-Mouret, MM. Cardon et Tissot, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Leconte, Marie, Kerrouche et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 1221 -8 -1. – En cas de refus de recrutement d’un candidat auditionné par les instances chargées des recrutements au sein de l’entreprise, celle-ci lui communique par écrit, s’il en fait la demande, les motifs de sa décision. »

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Comme vient de le dire M. Cardon, cet amendement tend à préciser l’obligation faite à l’entreprise d’informer le candidat des motifs de son non-recrutement. Cette information devra se faire par écrit, ce qui ne constitue pas une charge importante pour l’entreprise, dès lors que le périmètre des candidats concernés a été restreint à ceux qui ont été reçus en entretien et qui en font la demande.

L’objectif de cet amendement est de faire progresser les candidats en leur permettant de savoir ce qui n’a pas fonctionné au cours de leur entretien. Il s’agit également de faire en sorte que l’entreprise soit partie prenante de manière positive dans le processus de recrutement.

Enfin, comme l’a dit M. Sueur, nous pensons que le débat aurait été différent si cet amendement avait réellement été intégré à la discussion et à la réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement vise à restreindre l’obligation pour les entreprises de justifier les non-embauches au seul cas où le candidat a été reçu en entretien et en fait la demande. Cette suggestion, qui tend à protéger les candidats, nous a été faite par l’Association française des managers de la diversité. Certains ne sont, en effet, pas prêts à entendre des critiques sur leur comportement en entretien.

En revanche, du point de vue de l’entreprise, si cette mesure réduit sans doute le volume de réponses à traiter, elle n’écarte pas le risque de contentieux devant les prud’hommes.

Les employeurs sont soumis à des obligations de non-discrimination qui sont pénalement sanctionnées. Ils ne doivent pas être considérés comme étant a priori discriminants, alors que leurs difficultés actuelles à recruter les conduisent au contraire à diversifier leurs viviers de candidats.

Une non-embauche est souvent liée à un manque d’« employabilité », justifié par des critères de formation ou de savoir-être. Avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Nadia Hai

Cet amendement a pour objet de prévoir l’obligation pour les entreprises d’indiquer aux candidats les motifs ayant justifié le rejet de leur candidature. Je ne vous ferai pas l’affront, monsieur le sénateur, de vous accuser de faire preuve d’idéalisme.

Cela étant, le sénateur Piednoir nous ayant précédemment fait part de son témoignage, permettez-moi de vous faire part du mien.

Quand j’étais plus jeune, issue des quartiers prioritaires de la ville de Trappes, je recherchais un contrat en alternance et j’ai dû adresser une centaine de candidatures à des entreprises. Très sincèrement, je ne sais pas ce que cela aurait pu m’apporter de lire dans une lettre de refus une formule telle que : « Nous sommes au regret de vous annoncer que votre candidature n’a pas été retenue au motif que nous avons choisi un candidat ayant une expérience supérieure à la vôtre et liée directement à notre secteur d’activité. »

C’est pourquoi nous avons décidé d’agir autrement et de faire évoluer les pratiques existantes, en travaillant sur un référentiel qui vise à lutter contre les discriminations volontaires ou involontaires de la part des entreprises. Ce référentiel a été réalisé par le groupe de travail « Formation à la non-discrimination », qui se réunit régulièrement depuis le mois de juillet 2017, dans le cadre du groupe de dialogue interpartenaires sur la lutte contre les discriminations en entreprise que j’évoquais dans mon propos liminaire.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Cet amendement vise à restreindre l’obligation pour les entreprises de justifier les non-embauches au seul cas où le candidat a été reçu en entretien et en fait la demande. Cette suggestion, qui tend à protéger les candidats, nous a été faite par l’Association française des managers de la diversité. Certains ne sont, en effet, pas prêts à entendre des critiques sur leur comportement en entretien.

En revanche, du point de vue de l’entreprise, si cette mesure réduit sans doute le volume de réponses à traiter, elle n’écarte pas le risque de contentieux devant les prud’hommes.

Les employeurs sont soumis à des obligations de non-discrimination qui sont pénalement sanctionnées. Ils ne doivent pas être considérés comme étant a priori discriminants, alors que leurs difficultés actuelles à recruter les conduisent au contraire à diversifier leurs viviers de candidats.

Une non-embauche est souvent liée à un manque d’« employabilité », justifié par des critères de formation ou de savoir-être. Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - Permalien
Nadia Hai

Cet amendement a pour objet de prévoir l’obligation pour les entreprises d’indiquer aux candidats les motifs ayant justifié le rejet de leur candidature. Je ne vous ferai pas l’affront, monsieur le sénateur, de vous accuser de faire preuve d’idéalisme.

Cela étant, le sénateur Piednoir nous ayant précédemment fait part de son témoignage, permettez-moi de vous faire part du mien.

Quand j’étais plus jeune, issue des quartiers prioritaires de la ville de Trappes, je recherchais un contrat en alternance et j’ai dû adresser une centaine de candidatures à des entreprises. Très sincèrement, je ne sais pas ce que cela aurait pu m’apporter de lire dans une lettre de refus une formule telle que : « Nous sommes au regret de vous annoncer que votre candidature n’a pas été retenue au motif que nous avons choisi un candidat ayant une expérience supérieure à la vôtre et liée directement à notre secteur d’activité. »

C’est pourquoi nous avons décidé d’agir autrement et de faire évoluer les pratiques existantes, en travaillant sur un référentiel qui vise à lutter contre les discriminations volontaires ou involontaires de la part des entreprises. Ce référentiel a été réalisé par le groupe de travail « Formation à la non-discrimination », qui se réunit régulièrement depuis le mois de juillet 2017, dans le cadre du groupe de dialogue interpartenaires sur la lutte contre les discriminations en entreprise que j’évoquais dans mon propos liminaire.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Chapitre II

Faciliter l’adaptation de nos entreprises à la diversité sociale

Photo de Laurence Rossignol

Chapitre II

Faciliter l’adaptation de nos entreprises à la diversité sociale

Photo de Laurence Rossignol

La parole est à M. Rémi Cardon, sur l’article.

Article 7

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

Nous souhaitons ajouter aux missions du comité social et économique (CSE) la promotion de l’égalité des chances.

Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a remplacé, en 2013, l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, lui-même créé en 1995. En 2011, la loi Copé-Zimmermann a imposé un quota de femmes dans les conseils d’administration des entreprises. Alors que cela nous semblait difficile, voire impossible, nous avons collectivement été capables de mettre en avant l’égalité entre les femmes et les hommes. Pourquoi ne continuerions-nous pas en créant des indicateurs sur l’égalité des chances dans les entreprises ? Je ne prétends pas que de tels indicateurs soient faciles à mettre en œuvre, mais je les crois nécessaires.

Mes chers collègues, je demande de la transparence et des informations précises sur ces sujets, loin des radars de la politique, afin de comprendre comment notre société fonctionne. Cette mesure pourrait être symbolique, de mon point de vue.

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après le 5° de l’article L. 2312-8, il est inséré un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les mesures prises en vue de promouvoir l’égalité des chances, notamment en matière de recrutement, de formation professionnelle et de promotion interne. » ;

2° L’article L. 2312-12 est complété par les mots : «, et toute proposition de nature à favoriser l’égalité des chances dans l’entreprise, en procédant à l’évaluation des dispositifs y concourant » ;

3° L’article L. 2312-17 est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° Les actions favorisant l’égalité des chances dans la promotion et l’accès à l’emploi. » ;

4° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2312-18 est complétée par les mots : «, et à l’égalité des chances dans la promotion et l’accès à l’emploi ».

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Certains observateurs ont noté que la mise en place du CSE avait servi de révélateur du climat social propre à chaque entreprise. Là où les relations sont fondées sur la méfiance, les accords du CSE semblent défensifs ; à l’inverse, là où le dialogue social est davantage ancré, les accords créent de nouveaux droits, notamment en matière d’expertise.

Dans ce contexte, il nous a semblé judicieux d’élargir les attributions du CSE et de prévoir qu’il sera informé et consulté sur les mesures prises en vue de promouvoir l’égalité des chances, notamment en matière de recrutement, de formation professionnelle et de promotion interne.

Un de mes collègues a parlé de méritocratie et de talent. Il y a fort longtemps, je pensais que les femmes auraient les mêmes droits que les hommes en politique et qu’elles arriveraient à obtenir les mêmes mandats parce qu’elles étaient méritantes et parce qu’elles avaient du talent. J’étais même défavorable à la loi sur la parité.

Je vous laisse tirer les conclusions de cette expérience… Heureusement que cette loi a été votée, car sinon nous ne serions pas nombreuses dans cet hémicycle, et pourtant, Dieu sait si nous sommes talentueuses !

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Cardon

Nous souhaitons ajouter aux missions du comité social et économique (CSE) la promotion de l’égalité des chances.

Le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a remplacé, en 2013, l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, lui-même créé en 1995. En 2011, la loi Copé-Zimmermann a imposé un quota de femmes dans les conseils d’administration des entreprises. Alors que cela nous semblait difficile, voire impossible, nous avons collectivement été capables de mettre en avant l’égalité entre les femmes et les hommes. Pourquoi ne continuerions-nous pas en créant des indicateurs sur l’égalité des chances dans les entreprises ? Je ne prétends pas que de tels indicateurs soient faciles à mettre en œuvre, mais je les crois nécessaires.

Mes chers collègues, je demande de la transparence et des informations précises sur ces sujets, loin des radars de la politique, afin de comprendre comment notre société fonctionne. Cette mesure pourrait être symbolique, de mon point de vue.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Certains observateurs ont noté que la mise en place du CSE avait servi de révélateur du climat social propre à chaque entreprise. Là où les relations sont fondées sur la méfiance, les accords du CSE semblent défensifs ; à l’inverse, là où le dialogue social est davantage ancré, les accords créent de nouveaux droits, notamment en matière d’expertise.

Dans ce contexte, il nous a semblé judicieux d’élargir les attributions du CSE et de prévoir qu’il sera informé et consulté sur les mesures prises en vue de promouvoir l’égalité des chances, notamment en matière de recrutement, de formation professionnelle et de promotion interne.

Un de mes collègues a parlé de méritocratie et de talent. Il y a fort longtemps, je pensais que les femmes auraient les mêmes droits que les hommes en politique et qu’elles arriveraient à obtenir les mêmes mandats parce qu’elles étaient méritantes et parce qu’elles avaient du talent. J’étais même défavorable à la loi sur la parité.

Je vous laisse tirer les conclusions de cette expérience… Heureusement que cette loi a été votée, car sinon nous ne serions pas nombreuses dans cet hémicycle, et pourtant, Dieu sait si nous sommes talentueuses !

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

L’ensemble des articles du texte ayant été rejetés, je tiens à remercier, avant que le débat ne s’arrête, l’ensemble des orateurs pour la qualité de leurs interventions.

On dit que le courage, c’est chercher la vérité et surtout la dire. Je pense que nous l’avons fait ce matin, en regardant en face la situation de grande précarité dans laquelle se trouve la jeunesse de notre pays, car ce constat fait consensus. Avec mon groupe politique, nous avons tenté d’y remédier en facilitant l’accès à l’emploi et en luttant en même temps contre les discriminations.

Il n’en reste pas moins que je regrette la succession de votes négatifs sur chacun des articles. Ils ont interdit au Sénat de pouvoir se prévaloir d’une réforme, certes modeste, mais qui aurait touché une partie de la société dont les difficultés devraient être au centre de nos préoccupations. Nous aurons à y revenir, je vous l’assure. Le Sénat est passé ce matin à côté d’une solution…

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Guy Benarroche applaudit également.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Je vais mettre aux voix l’article 7.

Mes chers collègues, je rappelle que si cet article n’était pas adopté, il n’y aurait plus lieu de voter sur l’ensemble de la proposition de loi, dans la mesure où les sept articles qui la composent auraient été rejetés ; il n’y aurait donc pas d’explications de vote sur l’ensemble du texte.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

L’ensemble des articles du texte ayant été rejetés, je tiens à remercier, avant que le débat ne s’arrête, l’ensemble des orateurs pour la qualité de leurs interventions.

On dit que le courage, c’est chercher la vérité et surtout la dire. Je pense que nous l’avons fait ce matin, en regardant en face la situation de grande précarité dans laquelle se trouve la jeunesse de notre pays, car ce constat fait consensus. Avec mon groupe politique, nous avons tenté d’y remédier en facilitant l’accès à l’emploi et en luttant en même temps contre les discriminations.

Il n’en reste pas moins que je regrette la succession de votes négatifs sur chacun des articles. Ils ont interdit au Sénat de pouvoir se prévaloir d’une réforme, certes modeste, mais qui aurait touché une partie de la société dont les difficultés devraient être au centre de nos préoccupations. Nous aurons à y revenir, je vous l’assure. Le Sénat est passé ce matin à côté d’une solution…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

J’ai eu l’immense honneur d’être en séance, hier soir, pour l’examen de la proposition de loi du groupe écologiste pour un élevage éthique, juste socialement et soucieux du bien-être animal. J’ai le privilège aujourd’hui de participer à l’examen de cette proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises. J’ai toutefois l’impression que le même scénario se répète.

D’un côté, les membres du Gouvernement, les ministres se succèdent, entre hier soir, aujourd’hui, demain peut-être… Ils nous expliquent à quel point nos propositions de loi sont intéressantes et ont des objectifs louables, mais arguent que la réflexion, le travail, les briques posées petit à petit par le Gouvernement sont telles que nos propositions n’apportent finalement rien. Tout se passe comme si nous ne voyions pas la réalité de la situation au quotidien, comme si nous ne comprenions pas à quel point le Gouvernement répondait aux problèmes qui se posent devant nous.

Effectivement, nous n’avons pas la même vision et nous ne percevons pas le résultat de ces briques qui sont posées les unes à côté des autres sans qu’émerge une architecture plausible d’un point de vue politique.

D’un autre côté, la majorité du Sénat nous explique que le Gouvernement n’a pas les solutions, que nous ne les avons pas non plus, malgré nos objectifs et nos propositions tout à fait louables. En effet, selon cette majorité, aucune des solutions que nous pouvons proposer, même humblement, n’est adaptée à la réalité de la société. Tout nous échapperait. Hier, c’était l’Europe qui nous empêchait de prendre des décisions, en France, concernant l’élevage éthique. Aujourd’hui, la méritocratie et la réalité sociale nous empêcheraient de prendre les mesures nécessaires pour contribuer à rétablir l’égalité des chances.

Pour le récent sénateur que je suis, tout cela est quelque peu frustrant et gênant. Les propositions de loi que nous avons examinées, hier soir et aujourd’hui, n’ont pas pour ambition de résoudre le problème de l’élevage en France ni celui de l’égalité des chances.

Cependant, certaines mesures auraient permis d’avancer sur ces sujets, selon l’avis général qui s’est exprimé en dehors de cet hémicycle, et que partagent même certains sénateurs qui soutiennent le Gouvernement ou qui appartiennent à la majorité sénatoriale.

Le jeu parlementaire nous empêche d’avancer, ce que je trouve dommageable. C’est la raison pour laquelle le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne pouvant voter cette proposition de loi, il le fera avec le cœur, car il approuve un certain nombre des actions qu’elle prévoyait.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Vous avez largement dépassé votre temps de parole !

La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Je vais mettre aux voix l’article 7.

Mes chers collègues, je vous rappelle que, si cet article n’était pas adopté, il n’y aurait plus lieu de voter sur l’ensemble de la proposition de loi, dans la mesure où les sept articles qui la composent auraient été rejetés ; il n’y aurait donc pas d’explications de vote sur l’ensemble du texte.

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Bientôt, nous n’aurons plus que deux minutes pour nous exprimer, la réforme de notre règlement risquant d’être adoptée par cette assemblée. Tel est le choix de la majorité du Sénat…

Mesdames les ministres, je tiens au moins à vous remercier pour ce débat. Notre texte est balayé, tout comme nos amendements, et nous n’avons pas de rapporteur. Dont acte. C’est le sort qui est réservé à l’opposition.

Cependant, nous avons voulu vous interpeller, et nous l’avons fait avec conscience, sur toutes les propositions intéressantes de ce texte. Je regrette, d’ailleurs, que Mme la rapporteure n’ait pas pu présenter, ou en tout cas soutenir, des amendements issus de sa propre majorité, alors qu’il me semble qu’elle y était plutôt favorable. Il aurait été intéressant que la droite sénatoriale puisse se prononcer au travers d’amendements sur un sujet aussi important que celui de l’égalité des chances et l’accès à la haute fonction publique, dans notre pays. Dont acte.

Nous avons néanmoins quelques motifs de satisfaction. Madame la ministre déléguée chargée de la ville, vous avez rappelé à deux ou trois reprises certaines mesures de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté, texte que je connais bien, car j’étais au banc comme ministre pour la défendre.

Qu’on le veuille ou non, dans notre démocratie française et sous la Ve République, le poids de la loi permet de fixer le cap. Je tiens d’ailleurs à vous rappeler, et vous le savez certainement, que certains décrets d’application de ce texte n’ont toujours pas été pris par l’actuel Gouvernement, ce qui est dommageable.

Avançons donc ! Nous continuerons à exercer une vigilance permanente sur les questions d’égalité et même d’équité, car pour reprendre une expression précédemment utilisée, « l’équité, c’est donner plus à ceux qui ont moins ». L’ascenseur social ne peut pas être fermé, toujours et en permanence, aux mêmes jeunes dans ce pays. Tel est l’esprit dans lequel nous avons travaillé avec Mme Conway-Mouret. C’est cela aussi la promesse républicaine.

Nous sommes fiers d’avoir au moins pu permettre que ce débat se tienne ce matin.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

J’ai eu l’immense honneur d’être en séance, hier soir, pour l’examen de la proposition de loi du groupe écologiste pour un élevage éthique, juste socialement et soucieux du bien-être animal. J’ai le privilège aujourd’hui de participer à l’examen de cette proposition de loi pour un meilleur accès des jeunes dans la fonction publique et les entreprises. J’ai toutefois l’impression que le même scénario se répète.

D’un côté, les membres du Gouvernement, les ministres se succèdent, entre hier soir, aujourd’hui, demain peut-être… Ils nous expliquent à quel point nos propositions de loi sont intéressantes et ont des objectifs louables, mais arguent que la réflexion, le travail, les briques posées petit à petit par le Gouvernement sont telles que nos propositions n’apportent finalement rien. Tout se passe comme si nous ne voyions pas la réalité de la situation au quotidien, comme si nous ne comprenions pas à quel point le Gouvernement répondait aux problèmes qui se posent devant nous.

Effectivement, nous n’avons pas la même vision et nous ne percevons pas le résultat de ces briques qui sont posées les unes à côté des autres sans qu’émerge une architecture plausible d’un point de vue politique.

D’un autre côté, la majorité du Sénat nous explique que le Gouvernement n’a pas les solutions, que nous ne les avons pas non plus, malgré nos objectifs et nos propositions tout à fait louables. En effet, selon cette majorité, aucune des solutions que nous pouvons proposer, même humblement, n’est adaptée à la réalité de la société. Tout nous échapperait. Hier, c’était l’Europe qui nous empêchait de prendre des décisions, en France, concernant l’élevage éthique. Aujourd’hui, la méritocratie et la réalité sociale nous empêcheraient de prendre les mesures nécessaires pour contribuer à rétablir l’égalité des chances.

Pour le récent sénateur que je suis, tout cela est quelque peu frustrant et gênant. Les propositions de loi que nous avons examinées, hier soir et aujourd’hui, n’ont pas pour ambition de résoudre le problème de l’élevage en France ni celui de l’égalité des chances.

Cependant, certaines mesures auraient permis d’avancer sur ces sujets, selon l’avis général qui s’est exprimé en dehors de cet hémicycle, et que partagent même certains sénateurs qui soutiennent le Gouvernement ou qui appartiennent à la majorité sénatoriale.

Le jeu parlementaire nous empêche d’avancer, ce que je trouve dommageable. C’est la raison pour laquelle le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne pouvant voter cette proposition de loi, il le fera avec le cœur, car il approuve un certain nombre des actions qu’elle prévoyait.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Vous avez largement dépassé votre temps de parole !

La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Bientôt, nous n’aurons plus que deux minutes pour nous exprimer, la réforme de notre règlement risquant d’être adoptée par cette assemblée. Tel est le choix de la majorité du Sénat…

Mesdames les ministres, je tiens au moins à vous remercier pour ce débat. Notre texte est balayé, tout comme nos amendements, et nous n’avons pas de rapporteur. Dont acte. C’est le sort qui est réservé à l’opposition.

Cependant, nous avons voulu vous interpeller, et nous l’avons fait avec conscience, sur toutes les propositions intéressantes de ce texte. Je regrette, d’ailleurs, que Mme la rapporteure n’ait pas pu présenter, ou en tout cas soutenir, des amendements issus de sa propre majorité, alors qu’il me semble qu’elle y était plutôt favorable. Il aurait été intéressant que la droite sénatoriale puisse se prononcer au travers d’amendements sur un sujet aussi important que celui de l’égalité des chances et l’accès à la haute fonction publique, dans notre pays. Dont acte.

Nous avons néanmoins quelques motifs de satisfaction. Madame la ministre déléguée chargée de la ville, vous avez rappelé à deux ou trois reprises certaines mesures de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté, texte que je connais bien, car j’étais au banc comme ministre pour la défendre.

Qu’on le veuille ou non, dans notre démocratie française et sous la Ve République, le poids de la loi permet de fixer le cap. Je tiens d’ailleurs à vous rappeler, et vous le savez certainement, que certains décrets d’application de ce texte n’ont toujours pas été pris par l’actuel Gouvernement, ce qui est dommageable.

Avançons donc ! Nous continuerons à exercer une vigilance permanente sur les questions d’égalité et même d’équité, car pour reprendre une expression précédemment utilisée, « l’équité, c’est donner plus à ceux qui ont moins ». L’ascenseur social ne peut pas être fermé, toujours et en permanence, aux mêmes jeunes dans ce pays. Tel est l’esprit dans lequel nous avons travaillé avec Mme Conway-Mouret. C’est cela aussi la promesse républicaine.

Nous sommes fiers d’avoir au moins pu permettre que ce débat se tienne ce matin.

L ’ article 7 n ’ est pas adopté.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Les articles de la proposition de loi ayant été successivement rejetés par le Sénat, je constate qu’un vote sur l’ensemble n’est pas nécessaire, puisqu’il n’y a plus de texte.

En conséquence, la proposition de loi n’est pas adoptée.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.

L ’ article 7 n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Rossignol

Les articles de la proposition de loi ayant été successivement rejetés par le Sénat, je constate qu’un vote sur l’ensemble n’est pas nécessaire, puisqu’il n’y a plus de texte.

En conséquence, la proposition de loi n’est pas adoptée.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.