C'est avec plaisir que je vous présente le rapport sur la loi de financement de la sécurité sociale remis au début du mois de septembre. Cette année encore, il est abondant puisqu'il comprend dix-sept insertions regroupées en trois blocs, mais il s'agit de 450 milliards.
Rappelons d'abord la situation financière. Les tableaux d'équilibre font apparaître un déficit de 20,3 milliards pour le régime général, 1,4 milliard pour les autres régimes (essentiellement les retraites agricoles) et 3,2 milliards pour le fonds de solidarité vieillesse (FSV). Le déficit cumulé atteint 25 milliards contre 11,9 milliards en 2008. Le régime général subit un effet de ciseau, ses charges augmentant de 4,3 % mais ses produits connaissant une quasi-stabilité (+ 1,1 %). Toutes les branches du régime général sont en déficit. A 10,5 milliards, celui de la branche maladie a doublé : les dépenses augmentent rapidement alors que les produits, notamment de la contribution sociale généralisée (CSG), ont diminué de 2,6 % ; le prélèvement à la source sur les dividendes a joué en 2008. Le déficit de la branche retraite s'est accru de 30 % malgré des recettes en légère progression. D'une manière générale, la dégradation des comptes de la sécurité sociale se poursuit en 2010 pour atteindre 29,2 milliards et le retour à la croissance ne suffira pas à compenser ce déséquilibre. Malgré des hypothèses optimistes et un Ondam contenu, le déficit resterait de 20 milliards en 2014. Le rapport décrit les solutions de trésorerie mises en oeuvre par l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) en 2009 et 2010.
Le contexte sera modifié en 2011 : vous avez examiné le projet de reprise du déficit par la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Philippe Séguin avait dit à plusieurs reprises qu'il faudrait relever la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), le Gouvernement a préféré affecter des ressources alternatives. Or, il ne suffit pas de transférer le déficit. L'équilibre est un impératif, y retourner constitue un objectif prioritaire. Cela suppose des efforts considérables car une croissance de 2 % ne suffira pas. Il sera difficile d'éviter une majoration des recettes...
La Cour a procédé à une enquête de suivi de ses recommandations de 2007 sur ce qu'on n'appelait pas encore les niches sociales - 178 dispositifs en 2009 ! Depuis 2007, plusieurs lois de financement ont comporté des mesures de taxation de certains revenus exonérés. Il importait de faire le point. Les réalisations sont insuffisantes. Il y a eu le forfait social, passé de 2 % à 4 % puis à 6 %, ainsi que la taxation des stock-options et des indemnités de départ en retraite, mais le coût de ces dispositifs s'est accru d'un milliard entre 2007 et 2010, la perte de recettes pour le régime général représentant 66,7 milliards en 2009, soit 23 % des recettes, contre 57,6 milliards et 22 % des recettes en 2005. Si ces chiffres sont supérieurs à ceux du Gouvernement, c'est que celui-ci sous-estime les mesures décidées sans véritable étude d'impact. La Cour demande donc une étude approfondie car il faut poursuivre et mener à bien l'action engagée. Si on intègre la compensation des exonérations de cotisations, la Cour estime que 15 milliards d'économies sont possibles. Le conseil des prélèvements obligatoires a confirmé ce diagnostic à propos des niches pour les entreprises. L'action doit être sélective et progressive. La généralité des prélèvements devrait être la règle pour la sécurité sociale, sauf à susciter des inégalités. Des recettes accrues ne peuvent dispenser d'un vigoureux effort d'économie.
Les constats et recommandations des années passées relatifs aux tarifs médicaux, à la biologie ou encore aux retraites, restent d'actualité. S'agissant de la gestion, les systèmes d'information de la caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) ne sont pas efficaces, qui mobilisent 1 750 informaticiens sur cinquante sites et, dans les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM), plus de 1 600 autres, aux tâches souvent redondantes. L'absentéisme est plus développé dans les caisses locales que dans les secteurs analogues, avec des pathologies telles que la dépression au travail ; il coûte plusieurs centaines d'emplois.
S'agissant des prestations, malgré les progrès accomplis, la fraude reste très importante. Les enjeux ne sont pas négligeables : la caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) évalue les fraudes à 1 % des prestations distribuées, mais jusqu'à 3 % pour le revenu minimum d'insertion (RMI) et le revenu de solidarité active (RSA). L'ordre de grandeur justifie une action plus énergique. Certaines dépenses croissent très fortement, qu'il s'agisse des soins infirmiers (9 %) ou des transports sanitaires (8 %).
Le rapport analyse la situation financière de quatre-vingt-cinq hôpitaux publics. Nous avons revu à la hausse le constat comptable des déficits car certains errements se poursuivent, ainsi pour les provisions et les reports de charges. Le déséquilibre, d'environ 700 millions, s'explique par la difficile adaptation à la tarification à l'activité (T2A). Les comptes des centres hospitaliers universitaires - centres hospitaliers régionaux (CHU-CHR) sont déficitaires, d'où un endettement croissant qui sert parfois à honorer des emprunts plus anciens voire à faire face à des dépenses courantes. Si tous les hôpitaux ne sont pas en déficit, chacun doit équilibrer ses comptes. Les contrôles demeurent vagues, peu contraignants, insuffisants et les économies indispensables exigent des mesures plus fermes.
Nous essayons de ne pas perdre de vue l'exigence de solidarité et de justice sociale. Assure-t-on un égal accès aux soins et l'égalité de traitement ? L'accès à l'imagerie médicale apparaît insuffisant : 2 % des victimes d'accident vasculaire cérébral (AVC) peuvent recourir en urgence à une imagerie par résonance magnétique (IRM) ; le taux d'utilisation des équipements est hétérogène ; trop généreux, les tarifs assurent des rentes de situation à des radiologues et encouragent des examens inutiles comme les radiographies du crâne.
Les soins dentaires représentent 10 milliards. Ils sont de moins en moins remboursés, la sécurité sociale n'en remboursant plus que le tiers, contre la moitié dans les années quatre-vingt. La participation des assureurs s'est accrue mais les ménages gardent à leur charge un quart de la dépense. C'est particulièrement vrai pour les prothèses. Le suivi est mal assuré par l'assurance maladie, notamment pour les implants, et la nomenclature est obsolète. La Cour formule des propositions pour que l'accès à ces soins ne devienne pas un problème de santé publique, à commencer par le développement de la transparence et de la concurrence : les prothèses sont 3,5 fois plus chères en France qu'aux Pays-Bas. Les dépassements tarifaires devraient être contenus ; il faudrait, à cet effet, modifier le code de la mutualité pour que les mutuelles diminuent le taux de remboursement si le praticien n'est pas conventionné.
Les prestations d'invalidité et de retraite pour inaptitude au travail représentent 10 milliards. La réglementation, qui a mal vieilli, apparaît trop complexe, alors que celle qui régit les handicapés a été aménagée. La Cour recommande une simplification par un rapprochement des prestations et un référentiel commun. Comment expliquer que la perte d'un oeil entraîne une invalidité à 30 % en cas d'accident de travail, de 42 % pour l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et de 65 % pour la pension militaire d'invalidité ? La retraite pour inaptitude pourrait être mieux exploitée.
La réforme des retraites a cherché à garantir l'objectif d'une liberté de choix des assurés. Les taux de la décote et de la surcote sont proches de la neutralité actuarielle. Cependant, la loi a entraîné des effets d'aubaine et l'unité des règles n'est encore qu'apparente. C'est ainsi que les fonctionnaires ont bénéficié immédiatement de la surcote alors que la décote ne s'applique à eux que progressivement. Cela souligne le caractère limité des mesures déjà prises.
Les décisions des commissions de recours amiable présentent une grande hétérogénéité, d'où des inégalités. La Cour souligne également que les paramètres des compensations entre régimes ont vieilli, de sorte que le principe de solidarité s'érode. Le régime général apporte chaque année 300 millions à la SNCF ; les employeurs des industries électriques et gazières (IEG) appliquent un taux de cotisation maladie dérogatoire sur une assiette définie en 1946 et cela sans titre pour les cotisations famille, d'où une perte annuelle de 200 millions pour le régime général, les pensions de retraite des IEG représentant un surcoût de 300 millions. L'adossement au régime général devait être neutre mais les transferts financiers ont été évalués en fonction de paramètres défavorables au régime général.
S'agissant des familles monoparentales, la Cour relève que les aides sociales et fiscales n'empêchent pas la concentration de la pauvreté : le quart de la dépense fiscale liée à la demi-part supplémentaire va aux 10 % les plus aisés. Elle pourrait être redéployée pour aider le retour à l'emploi des plus défavorisés ou la garde d'enfants.
La complexité des aspects internationaux de la sécurité sociale n'est pas de la seule responsabilité de la France. Néanmoins divers organismes interviennent : caisse des Français de l'étranger, centre national des soins à l'étranger, centre des liaisons européennes et internationales de sécurité sociale (Cleiss). On gagnerait à ce que leur coopération s'intensifie, de même que la lutte contre la fraude.
Sur le champ de la protection sanitaire et sociale, la Cour aborde des sujets d'actualité et d'autres, que l'on avait oubliés, pour vous aider à faire évoluer le système dans le respect de ses valeurs fondamentales.
Il n'y a pas de sanction, disait votre prédécesseur. De fait, il n'y en pas d'autre aux dysfonctionnements que vous relevez que les amendements des parlementaires. Lorsque nous l'interrogeons, le Gouvernement se plaît en effet à nous répondre que vos observations manquent de fondement. Aussi aurions-nous besoin d'un argumentaire sur chaque mesure que vous proposez. En avez-vous d'ailleurs calculé le produit total ?
Ma question suivante a trait à la procédure de réforme dans le secteur social. Le Parlement a été saisi de la réforme de la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) et de celle des retraites, mais l'on retrouve les mesures financières dans les lois de financement et de finances pour 2011 ; le volet recettes du PLFSS sera d'ailleurs très lourd. N'aurait-il pas été plus pertinent de nous les communiquer en même temps ? L'Assemblée nationale envisage de proposer pour la Cades une solution différente de celle que nous avions retenue ; ce faisant, ne va-t-elle pas fragiliser l'équilibre des comptes de l'assurance maladie ? Est-il pertinent de mobiliser de manière anticipée le fonds de réserve des retraites (FRR) et de prolonger la Cades de quatre ans. Est-il judicieux de diversifier les ressources de celle-ci ? Enfin, l'établissement d'un tableau patrimonial de la sécurité sociale et la modification de la composition du conseil d'administration de la Cades sont-ils de nature à vous conduire à lever les réserves que vous aviez émises sur cet établissement en certifiant les comptes de l'Etat ?
Alain Vasselle est un expert. Sur les argumentaires, la Cour des comptes est prête à participer à des réunions de travail avec vous.
Pour obtenir des résultats, il faut agir sur la dépense et sur les recettes : l'équilibre s'impose pour la sécurité sociale. Agir sur la dépense, cela veut dire rechercher les économies ; nous n'avons pas de chiffre global à cet égard. Il est également possible de faire évoluer moins fortement la dépense. La Cour ne préconise pas une remise en cause du modèle social, elle signale des marges d'économies possibles, des actions que l'on peut cibler davantage - il y va de 15 milliards pour les niches. Nous proposons une carte, pas un menu, nous amenons une boîte à outils, nous ouvrons des pistes que l'on explorera progressivement si l'on ne veut pas que le malade meure guéri. Mais les parlementaires sauront être sages....
On peut, en situation de crise, concevoir un déséquilibre, à condition qu'il y ait rapidement retour à l'équilibre.
Le Parlement examine quatre projets de loi avec des dispositions à caractère social. La procédure est contrainte pour la Cades car on ne peut déroger à une loi organique que par une disposition organique. Cela peut certes créer une difficulté de calendrier. Lorsque vous l'avez examinée, les mesures financières étaient inconnues. Les mesures pour 2011 figureront dans le PLFSS et dans le PLF - le Premier ministre a rappelé le monopole des lois financières dans une circulaire. La Cour, qui ne veut pas intervenir dans le dialogue entre le Gouvernement et le Parlement, ni entre l'Assemblée nationale et vous, a toujours considéré qu'il fallait assurer une recette pérenne à la Cades et éviter de toucher à sa durée de vie. Des circonstances exceptionnelles peuvent justifier un allongement mais ce n'est pas le choix que nous privilégions dans nos recommandations : nous aimons la CRDS car c'est un prélèvement bien adapté, avec une assiette large, qui évolue en fonction de la croissance économique et suscite la confiance des investisseurs. L'affectation de recettes nouvelles, à la dynamique variable, exige des mécanismes rigoureux de contrôle, comme vous l'avez décidé. Le FRR constitue le seul effort des générations présentes en faveur des futures et la Cour n'est pas totalement rassurée sur le retour à l'équilibre des régimes de retraites en 2018 ; dès lors, sa disparition peut constituer un handicap supplémentaire.
La logique voulait que l'on rattachât plutôt la Cades à l'univers de la sécurité sociale. Le tableau patrimonial et la modification du conseil d'administration marquent une évolution positive, conforme à nos recommandations et qui peut être de nature à lever la réserve que nous avions toujours exprimée sur la Cades : cela va plutôt dans le bon sens.
Je relève qu'il n'y a pas de difficulté pour organiser la levée d'une réserve - il est vrai que cela ne coûte rien... Le groupe de travail de Raoul Briet a couché ses propositions sur le papier. Sont-elles de nature à régler les difficultés de construction et de suivi de l'Ondam signalées par la Cour ? Nous restons sur notre faim quand nous l'analysons et espérons plus de pertinence.
Vous avez donné votre sentiment sur les économies. Pour 2011, le Gouvernement propose d'en réaliser 2,5 milliards, avec un Ondam à 2,9 % et un déficit de 11 milliards. Ces mesures d'ampleur limitée ont un caractère plus conjoncturel que structurel. Vous avez dénoncé l'insuffisance du pilotage du secteur hospitalier : l'administration centrale est défaillante et la maîtrise d'ouvrage stratégique très faible. Quelles initiatives suggérez-vous et le comité de pilotage récemment mis en place suffira-t-il ? Je sors d'une audition avec Mme Podeur, la directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, qui réagit très vivement aux critiques de la Cour...
Certains établissements, notez-vous, sont revenus à l'équilibre. Mais pas tous. Or, la mise sous tutelle d'établissements est très limitée et les déficits demeurent. Le retour à l'équilibre budgétaire n'est-il pas possible partout ? S'agissant de la convergence intersectorielle, où en est-on ? Vous avez évoqué les dépassements de la médecine de ville, ne faudrait-il pas refuser le formidable gâchis de certains examens inutiles ?
On parle toujours d'économies, par référence aux chiffres de l'année précédente, mais ne faudra-t-il pas un jour faire une entorse aux sacro-saints principes de 1945, pour ne plus rembourser les petits risques aux catégories sociales favorisées ? Cela me semble inévitable.
Monsieur le Premier président, pouvez-vous faire le point sur le régime local alsacien ? Sommes-nous mieux placés au niveau de la gestion des dépenses ou des économies ?
Un des principaux thèmes d'actualité porte sur l'ampleur du coup de rabot sur les niches fiscales et sociales. L'enjeu avoisine 120 milliards d'euros, dont 45 milliards au titre des cotisations sociales. Ne pourrait-on aller plus loin pour rétablir une sorte d'égalité ?
Ma deuxième interrogation concerne le reste à charge. Avec François Autain, j'avais déposé l'an dernier un amendement tendant à limiter les dépassements d'honoraires pratiqués par les spécialistes. En vain. On comprend que les mutuelles s'efforcent de mettre en place des verrous. Quelles conséquences ont ces dépassements sur les cotisations complémentaires ?
Aujourd'hui, la Cades va devoir reprendre 130 milliards d'euros de dettes. Le Gouvernement, François Baroin et Alain Vasselle se livrent ici à un jeu de poker menteur. Nous savons tous que la CRDS représente le principal gisement de ressources.
Erigée en thème favori par la majorité de la commission, la lutte contre la fraude sert à stigmatiser les plus pauvres de nos concitoyens,...
malgré une incidence marginale pour les recettes de l'assurance maladie.
Enfin, j'insiste pour que la révision générale des politiques publiques (RGPP) ne porte pas atteinte à l'humanisation des services, à l'heure où six mille emplois ont déjà été supprimés par le traitement automatisé de certaines prestations. Il ne faut pas oublier les fondamentaux !
Les déficiences de la tutelle... La Cour ne partage pas l'opinion de la directrice générale de l'offre de soins, que vous avez rapportée, mais il reste que des mesures structurelles sont souhaitables. Elles sont d'ailleurs annoncées depuis trois ans par l'administration centrale du ministère de la santé. Vous avez mentionné la création d'un comité de pilotage ainsi que d'un groupe de travail. Leur réussite dépendra des ressources humaines mises à leur disposition. Or, la direction générale de l'offre de soins (DGOS) et la direction de la sécurité sociale (DSS) manquent de professionnels comparables à ceux qui existent dans le secteur privé, avec des postes vacants ou non inscrits au budget. Un renforcement est indispensable notamment pour la maîtrise d'ouvrage du système informatique, l'un des plus considérables dans notre pays. Nous pensons en outre que le ministère manque de capacité d'audit, interne ou externe. Il y a là d'importantes marges de progression.
La situation financière de la branche maladie peut être améliorée en agissant sur les ressources et sur les dépenses. Les recettes pourraient être améliorées en diminuant les niches sociales. Les actions engagées à ce titre vont dans le bon sens ; il reste à les intensifier. Il serait également utile de revoir certaines dépenses, comme en matière de radiographie. De même, aucune contrepartie n'a été demandée aux chirurgiens-dentistes lorsque leurs tarifs ont été révisés, alors qu'on aurait pu penser à une certaine maîtrise du coût des prothèses.
En matière de fraude, la Cour ne stigmatise personne. Sans chercher à plaire ni à déplaire, elle exprime ce qu'elle a constaté, à l'issue d'un processus spécifique reposant sur le principe du contradictoire, avec une décision collégiale. Nous disons qu'il ne faut ni surestimer la fraude ni la sous-estimer car un point de fraude aux prestations coûte 3 milliards d'euros. Ce n'est pas négligeable !
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre à la Cour des comptes. - A propos de l'Ondam, nos conclusions rejoignent celles du rapport Briet, citées par Alain Vasselle : accroître la transparence et l'explicitation du calcul avant le vote parlementaire est une bonne chose, de même qu'un suivi plus rapide par la suite. Encore faut-il que l'objectif repose sur des bases réalistes issues de données comptables. La Cour insiste sur ce dernier point.
En matière d'assurance maladie, deux postes de dépenses peuvent faire l'objet d'économies : l'hôpital et les affections de longue durée (ALD).
Les ALD représentent aujourd'hui 65 % du total des remboursements de l'assurance maladie. Contrairement à la représentation nationale et à la Haute Autorité de santé, nous ne nous sommes pas récemment penchés sur ce sujet. Un début de solution figure dans le PLFSS pour 2011, dont une disposition tend à traiter d'une part l'identification de l'affection et le suivi des intéressés, d'autre part leur prise en charge à 100 %. Il sera donc possible d'améliorer la surveillance des personnes présentant un risque aggravé, sans les prendre totalement en charge. La Cour ne méconnaît pas le caractère très sensible du sujet. L'essentiel de ces dépenses est concentré sur un nombre assez faible d'assurés sociaux.
A toutes fins utiles, je précise que nous n'avons pas travaillé sur le bouclier sanitaire... En revanche, nous avons consacré, il y a deux ans, une étude au reste à charge. En moyenne, les Français sont remboursés à 75 % mais avec un nombre croissant de personnes prises en charge à 100 %, il en résulte que les autres voient leur taux de couverture baisser. Certains de nos concitoyens non couverts par le dispositif des ALD pourraient donc trouver abusives des cotisations les laissant assumer une bonne moitié des frais de soins.
J'en viens à l'hôpital. Il est vrai que peu d'établissements sont placés sous tutelle. Et la Cour estime que les plans de redressement mis en place sont peu rigoureux et guère contraignants ; elle regrette l'insuffisance du contrôle exercé sur les résultats obtenus. Cela dit, les nouveaux plans sont plus rudes. Tous les CHU ou presque ont lancé cette année des opérations énergiques de retour à l'équilibre, en raison d'un endettement excessif. Sans être injustifié en soi, le plan « hôpital 2007 » a comporté des investissements surdimensionnés, avec un recours trop massif à l'emprunt pour les financer. Espérons que désormais les ARS suivront tout cela de près : elles n'ont guère le temps d'attendre.
La tarification à l'activité est sans doute le moins mauvais système de financement des hôpitaux, mais ceux-ci n'ont pas pu s'adapter suffisamment vite à la nouvelle donne. D'où les déficits actuels.
Gilbert Barbier a évoqué la convergence intersectorielle, dont nous avions souligné les pré-requis dans des rapports précédents. Nous nous penchons actuellement sur la convergence entre certains groupes homogènes de malades (GHM), en attendant d'avoir une vue plus prospective dans un an.
La Cour a critiqué la connaissance tardive des tarifs hospitaliers, repoussée aujourd'hui en avril ou en mai. Certes, la loi de financement n'est promulguée qu'en décembre, mais ses travaux préparatoires devraient permettre de calculer les tarifs dès le début de l'année. Les objections techniques du ministère ne nous ont pas convaincus.
Le cas particulier de l'Alsace-Moselle est intéressant mais nous ne disposons pas d'étude spécifique.
Pourriez-vous nous exposer les arguments techniques avancés par la DGOS pour justifier le délai nécessaire au calcul des tarifications hospitalières ? Que suggérez-vous au Sénat pour contraindre le Gouvernement à progresser ?
Que pensez-vous du report de la fermeture de certains services de chirurgie ou de certains plateaux techniques ? Ce mouvement augmentera la concentration des établissements mais le véritable enjeu concerne la santé et la sécurité de nos concitoyens.
Dans quelle mesure l'hôpital peut-il contribuer à réduire les dépenses de l'assurance maladie ?
J'en viens aux niches sociales car les calculs des uns et des autres présentent de considérables divergences. Ainsi, l'assiette des stocks-options est évaluée à 3 milliards d'euros par la Cour des comptes alors que le ministère, en annexe au PLFSS, annonce 1,7 milliard. Comment expliquez-vous cet écart ?
L'an dernier, le Gouvernement s'était opposé à ma proposition d'annualiser les allégements de charges ; il semble aujourd'hui l'accepter, tout en affirmant qu'elle ferait disparaître plus de 80 000 emplois. L'objection est-elle fondée ? Peut-on réduire les niches sociales sans compromettre la compétitivité des entreprises et sans nuire à l'emploi ?
La crise a principalement provoqué une baisse drastique des recettes. Il faut donc agir à la fois sur les dépenses et les ressources.
La Cour s'est-elle penchée sur les exonérations dont bénéficient les heures supplémentaires ? A-t-elle étudié leurs conséquences pour l'emploi ?
Le secteur médico-social est financé à la fois par les collectivités territoriales et par l'assurance maladie. Compte tenu de l'état des finances locales, certains proposent de reporter certaines charges sur l'assurance maladie. J'en citerai trois exemples.
D'abord, parmi les 3 milliards d'euros perçus par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), un milliard alimente actuellement l'Ondam pour constituer l'objectif global de dépenses, au lieu de rester affecté aux personnes âgées ou handicapées.
Ensuite, la question du financement des aides soignantes bloque la signature de la convention tripartite de deuxième génération entre l'assurance maladie et les collectivités territoriales.
Enfin, le rapport Jamet propose que l'assurance maladie reprenne à son compte des financements conjoints avec les collectivités territoriales. Je sais que cette suggestion est contraire à tout ce que l'on a dit ce matin, puisqu'elle tend à augmenter les charges de l'assurance maladie...
L'évolution à la hausse de certaines lignes de dépenses est inquiétante. Je pense notamment aux soins infirmiers ou aux transports sanitaires, malgré les efforts de rigueur engagés. A propos des dépenses de gestion, je n'imagine guère qu'un informaticien suggère d'économiser sur le budget de l'informatique... J'insiste aussi sur l'importance de la présence humaine dans les caisses primaires car la dimension relationnelle est fondamentale pour les usagers.
Les niches sociales représentent potentiellement une source considérable de recettes mais on les a toujours justifiées par la recherche d'une efficacité sociale ou économique. Leur incidence effective aujourd'hui constitue un critère déterminant pour trancher leur sort.
Peut-on craindre une accélération du report des dépenses en direction des régimes complémentaires ? Faut-il définir un reste à charge plafond ?
L'hôpital subit la poursuite d'une révolution copernicienne : autrefois, on calculait les dépenses pour en déduire les prix de journée ; ensuite, le budget global a opéré un blocage historique des ressources hospitalières en figeant la situation respective des établissements ; aujourd'hui, les recettes découlant de la tarification à l'activité déterminent le montant des dépenses. Pensez-vous que les hospitaliers puissent suivre le rythme de ces évolutions ?
Enfin, le secteur optionnel créé par la loi HPST peut-il éviter la dérive des dépenses ?
Les agences régionales de santé (ARS) viennent de se mettre en place. Il serait difficile de dresser même un premier bilan.
Les dépenses hospitalières représentent un peu moins de la moitié du budget de l'assurance maladie. Leur part diminue, en France et dans les pays voisins. Cela suggère que l'effort de maîtrise des coûts est plus intense dans le secteur hospitalier qu'en matière de soins de ville.
En 2009, le Haut Conseil de l'assurance maladie a évoqué certaines tendances, avec une progression inférieure à celle du Pib, l'écart se situant entre un demi-point et un point par an. Cette réflexion est-elle gravée dans le marbre ? Je n'en suis pas certain...
S'agissant des stock-options, l'estimation de 3 milliards d'euros a été réalisée à une certaine époque ; le Gouvernement s'est fondé sur une période plus récente pour aboutir à 1,7 milliard. Le rapporteur de la Cour des comptes avait puisé son information directement dans les états financiers des entreprises du CAC 40. Mon prédécesseur, Philippe Séguin, avait repris son estimation. Nous avons fait de même dans notre récent rapport sur les niches fiscales et sociales. Au demeurant, il faut en la matière prendre en considération l'effet que toute nouvelle taxation peut avoir sur les comportements, en réduisant la base taxable. Et n'oublions pas le contexte économique ! En tout état de cause, les chiffrages ne fournissent que des ordres de grandeur. Cela dit, dans la plupart des cas, nous reprenons les montants calculés par Bercy.
Sur le plan conceptuel, l'analyse des niches fiscales et sociales n'est pas sans difficultés quant à leur périmètre et à leur constance, car une niche fiscale d'aujourd'hui peut devenir demain une simple modalité permettant de calculer l'impôt. La plupart des autres pays affrontent les mêmes difficultés.
Les exonérations fiscales ou sociales sont trop souvent décidées sans étude préalable d'impact, ni évaluation par la suite. La Cour publie régulièrement des travaux sur ces dépenses budgétaires transformées en dépenses fiscales.
Le régime applicable aux heures supplémentaires a été chiffré par le conseil des prélèvements obligatoires (CPO) : le coût total du dispositif avoisine 4,1 milliards d'euros, dont 1,2 au titre de l'impôt sur le revenu, avec un certain effet d'aubaine. Le CPO propose plusieurs scénarios, allant de la suppression pure et simple du dispositif à son atténuation sur certains points, par exemple en réintroduisant cette rémunération dans l'assiette de l'impôt sur le revenu. Une question de principe se pose : est-il légitime qu'un revenu du travail soit exonéré de toute contribution fiscale ou sociale ?
Nous pouvons formuler des constats et des suggestions ou poser des questions, mais il revient aux politiques de trancher. Les manquements aux recommandations de la Cour des comptes ne sont pas sanctionnés, ce qui est sain, car l'inverse conduirait au gouvernement des juges. Nous voulons seulement alimenter le débat politique.
J'observe enfin que le déficit de la sécurité sociale est antérieur à la crise. Le problème est donc structurel.
L'exercice auquel vient de se livrer le Premier président est hélas entouré d'une certaine confusion puisque le Gouvernement ignore systématiquement et avec superbe les recommandations formulées par la Cour à propos des comptes sociaux. Cela permet à notre rapporteur général de donner brièvement l'illusion qu'il est dans l'opposition, mais cela ne dure guère, puisqu'il rejoint la majorité en séance publique.
La Cour des comptes a-t-elle évalué l'incidence pour l'emploi de l'exonération de cotisations dont bénéficient les salaires ne dépassant pas 1,6 Smic ? Compensé par le budget général, ce dispositif représente environ 30 milliards d'euros par an.
Mme Ruellan a dit que la tarification à l'activité était le moins mauvais système. Pourtant, des effets pervers subsistent : le dispositif idéal reste à trouver. Par exemple, l'imagerie médicale est couverte par le forfait applicable à l'hospitalisation publique alors qu'elle en est exclue pour le secteur privé. D'où la multiplication excessive des actes dans le privé ; d'où aussi l'appétence des radiologues pour l'activité libérale. Le rapport de la Cour des comptes mentionne cette anomalie. Que pouvez-vous recommander pour l'éliminer ?
Je pense qu'une meilleure interface entre les secteurs sanitaire et médico-social permettrait de raccourcir certaines hospitalisations.
D'autre part, que pensez-vous des réseaux de santé, qui me semblent pouvoir être la meilleure des choses... ou la pire !
Le coût des soins dentaires peut dissuader certains, ce qui fait courir un risque à la santé publique. La Cour a-t-elle des informations sur la renonciation ou le refus de soins opposé aux titulaires de l'aide médicale d'Etat (AME) ?
La fermeture d'établissements ou de services a pour corollaire l'accroissement des transports sanitaires. En outre, les établissements d'accueil ont souvent des frais très élevés, dus à leur hyperspécialisation.
Le rapprochement des secteurs sanitaire et médico-social figure parmi les objectifs des ARS, mais il est trop tôt pour évaluer leur action en ce domaine. La Cour des comptes abordera-t-elle ce thème au cours des années à venir ?
Une précédente loi de financement de la sécurité sociale a créé un secteur optionnel de dépassement d'honoraires. Ce dispositif a-t-il été évalué ?
Avez-vous chiffré la fraude au RMI ?
Quel est le montant des dépenses à la charge de l'assurance maladie entraîné par la vaccination contre la grippe A (H1N1) ?
Enfin, les titulaires de pension d'invalidité ne l'obtiennent en général qu'après deux ans d'arrêt maladie. Votre rapport regrette à ce propos l'absence d'accompagnement vers l'emploi. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Yves Daudigny a évoqué les finances départementales, contraintes, pour ne pas dire asphyxiées, en raison des prestations transférées par l'Etat. A ce propos, j'ai lu avec attention une note de la Cour des comptes demandant que l'Etat revoie les conditions de financement des prestations transférées aux départements « sans leur donner les moyens... de modifier les dispositifs eux-mêmes ». Pourrions-nous dépasser cette formule diplomatiquement satisfaisante mais sibylline, pour obtenir quelques précisions sur les pistes envisagées ?
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre. - Nous nous sommes penchés cette année sur les principes de 1945 et le reste à charge. Antérieurement, nous avions dit qu'en l'absence de réforme structurelle de l'offre de soins, réduire les remboursements serait la seule source d'économies. Certains disent qu'il est déjà trop tard car les réformes structurelles mettent du temps pour produire leurs effets. C'est vrai pour l'hôpital mais aussi pour la médecine de ville.
Bien que la Cour des comptes ne soit pas gauchiste, elle a regretté que l'Etat ait perdu la main en matière d'honoraires, pour avoir tout misé sur le domaine conventionnel.
Monsieur Daudigny, la Cour n'a pas abordé les transferts entre l'Etat et l'assurance maladie, non plus que les charges imposées à la fois aux départements et à la sécurité sociale. J'observe à ce propos que l'enveloppe médico-sociale est fixée chaque année ne varietur, d'où une économie pour la CNSA.
Tout a été dit au sujet des niches.
Nous n'avons pas examiné le nouveau secteur optionnel car il n'a toujours pas été mis en application. Au demeurant, il suscite quelques interrogations, car le passage probable de médecins du secteur I au secteur optionnel ne sera sans doute pas accompagné d'un mouvement symétrique en provenance du secteur II.
M. Autain a dit que le Gouvernement ignorait les recommandations de la Cour.
C'était schématique. Il s'agissait des recettes.
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre. - Certaines de nos recommandations ne sont pas faciles à suivre mais nous ne faisons pas de politique.
M. Autain, si !
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre. - M. Vasselle estime qu'une de ses recommandations repoussée l'an dernier par le Gouvernement pourrait être acceptée pour 2011. Il ne faut donc jamais désespérer ! En outre, les propositions de la Cour restent valables plusieurs années.
Nous n'avons pas chiffré l'incidence qu'auraient pour l'emploi les préconisations du CPO. Quant à l'exonération de cotisations sociales sur les bas salaires, elle profite principalement à des secteurs non délocalisables. C'est utile pour procurer un emploi à des personnes peu qualifiées mais sans effet positif pour le développement du pays. Ainsi, l'industrie textile est moribonde en France alors qu'elle est florissante en Allemagne. Ne favorisant guère l'innovation, cette mesure ne prépare pas l'avenir.
J'en viens à la tarification à l'activité. Il est vertueux de rémunérer les hôpitaux en fonction de ce qu'ils font mais les établissements peinent à réaliser qu'ils sont désormais nus devant la vérité : un déficit signe une attractivité insuffisante ou l'obligation de se restructurer. Sans préconiser la fermeture d'établissements, nous souhaitons que tous équilibrent leurs comptes, quitte à ce qu'une dotation spécifique intervienne dans certaines zones, par exemple en montagne.
Il est exact que la fermeture de services peut augmenter les dépenses de transport, mais trop de trajets entre le domicile et l'hôpital sont indûment pris en charge par l'assurance maladie. De plus, certains patients évitent déjà les services chirurgicaux n'exerçant qu'une faible activité.
La polyvalence des chirurgiens est mise en cause.
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre. - Quant à l'imagerie médicale, je souligne que les appareils fonctionnent davantage dans le secteur privé. En délivrant des autorisations d'équipements lourds sous réserve de coopération entre le secteur public et la médecine libérale, on obtient des plages d'utilisation plus larges. Notre rapport souligne que la tarification excessivement élevée des actes radiologiques freine l'équipement du pays malgré les progrès sur le coût unitaire des actes. Le manque de personnel qualifié aggrave encore la situation.
Monsieur Lorrain, la Cour ne s'est pas penchée cette année sur l'interface entre le secteur sanitaire et les structures médico-sociales, mais l'aval post-hospitalier pose un problème avéré. Nous comptons sur les ARS pour améliorer l'indispensable coordination.
Nous pensons que les maisons de santé constituent une bonne formule, mais nous n'avons pas encore abordé les réseaux de santé. L'an prochain, nous nous pencherons sur la coopération entre l'hôpital et la médecine de ville. Les réseaux de santé prennent souvent appui sur l'hôpital.
Monsieur Milon, nous n'avons pas consacré d'étude spécifique aux titulaires de l'AME, mais la question de l'évitement de soins se pose pour les patients affiliés à la couverture maladie universelle (CMU). Il en va de même pour le refus de soins. Des opérations de testing ont montré que les chirurgiens-dentistes opposaient le plus souvent un refus à ces catégories de patients.
Pour estimer les fraudes au RMI, nous avons repris les travaux de la Cnaf, qui les estime à 3 % au moins des prestations. Ce n'est pas pour surprendre, puisque les personnes rencontrant les plus graves difficultés financières peuvent être tentées d'optimiser les prestations reçues, a fortiori lorsque leurs revenus sont très fluctuants.
Vous avez dû recevoir notre rapport sur la vaccination contre la grippe A (H1N1).
Il ne nous est pas encore parvenu.
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre. - Il a quitté la Cour vendredi. Cette grippe a coûté 95 millions d'euros à l'assurance maladie, répartis pour moitié entre l'hôpital et les soins de ville.
J'en viens aux prestations d'invalidité, vieux système inchangé depuis sa mise en place il y a soixante ans. Les invalides sont les délaissés de la protection sociale, sans doute par manque d'associations les représentant.
Avez-vous évalué l'incidence de la grippe A (H1N1) pour le budget de l'Etat ?
Mme Rolande Ruellan, présidente de la 6e chambre. - Tout figure dans le rapport.
Nous n'avons pas examiné les transferts de prestations entre l'Etat et les départements, comme la prestation de compensation du handicap ou l'allocation personnalisée d'autonomie.
Je propose à M. Vasselle d'organiser une réunion technique consacrée aux niches fiscales et sociales. Bien que la vérité objective soit difficile à établir en ce domaine, nous ne pensons pas que nos calculs pour 2007 aient été surévalués, mais nous avons repris pour 2009 l'estimation du Gouvernement relative aux stock-options. De façon générale, nous ne nous distinguons que par exception des chiffrages ministériels. La principale exception concerne les indemnités de licenciement, les évaluations du Gouvernement nous semblant très insuffisantes.
J'en viens aux tarifs hospitaliers. Idéalement, les gestionnaires voudraient en disposer dès le 1er janvier, alors que le ministère préfère se prononcer au vu des données complètes portant sur l'exercice écoulé. Il nous semble que la relative stabilité des dépenses permettrait de déplacer le curseur vers le début de l'année, ce qui suppose probablement une adaptation réglementaire, tenant compte du fait que le conseil de l'hospitalisation doit formuler un avis. L'administration n'y est d'ailleurs pas totalement opposée, puisque la DGOS par exemple a manifesté un intérêt prudent pour cette idée au cours de la phase contradictoire de nos travaux.
- Présidence commune de Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales, et de M. Jean Arthuis, président de la commission des finances -
Enfin, la commission entend, conjointement avec la commission des finances, une communication de MM. Auguste Cazalet, Albéric de Montgolfier, rapporteurs spéciaux, et Paul Blanc, rapporteur pour avis, sur l'évaluation des coûts de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).
L'allocation aux adultes handicapés ou « AAH », financée par le programme « Handicap et dépendance » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », représentera en 2011 une dépense annuelle de près de 7 milliards d'euros, soit plus de la moitié des crédits de la mission.
L'AAH est accordée aux personnes handicapées remplissant des conditions d'âge, de nationalité, de résidence, d'incapacité et de ressources. Il existe deux régimes d'AAH. Le premier est régi par l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale : à ce titre, sont éligibles de droit à la prestation les personnes dont le taux d'incapacité est supérieur à 80 % ; le second est régi par l'article L. 821-2 du même code : à ce titre, sont éligibles les personnes dont le taux d'incapacité est compris entre 50 % et 79 % et qui connaissent une « restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi ».
Dans les deux cas, l'allocation est versée de façon subsidiaire par rapport aux prestations vieillesse ou invalidité et peut se cumuler avec des revenus d'activité dans la limite d'un plafond annuel d'environ 8 000 euros pour une personne seule. Elle est également différentielle, c'est-à-dire qu'elle compense la différence entre les éventuelles ressources de la personne et le montant maximal de l'AAH. Pour cette raison, on parle de « montant moyen versé » puisque tous les bénéficiaires ne perçoivent pas la même somme. Enfin, l'allocation est « familialisée », l'ensemble des revenus du foyer étant pris en compte pour son calcul. Par exemple, une personne handicapée dont le conjoint gagne plus de 17 000 euros par an ne sera pas éligible à la prestation.
Ce contrôle budgétaire est d'abord né de la volonté de comprendre les déterminants de la dépense au titre de l'AAH. En effet, chaque année, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale, les commissions des finances et des affaires sociales expriment un certain scepticisme à l'égard de la prévision de dépense inscrite dans le budget. De manière systématique, ces crédits apparaissaient sous-évalués au regard des besoins réels. Et, à chaque fois, les lois de règlement successives sont venues confirmer l'analyse.
Dès lors, la première question est la suivante : est-il possible d'appréhender et d'évaluer a priori la dépense d'AAH de manière satisfaisante ? Ou bien les critères d'attribution de cette prestation sont-ils à ce point complexes qu'il n'est pas concevable d'établir une prévision budgétaire fiable ?
Au-delà de cette problématique purement budgétaire, il convient de s'intéresser à la réforme de l'AAH annoncée par le Président de la République en juin 2008. Celle-ci a été construite autour de deux principes. Premièrement, il s'agit d'améliorer les conditions de vie et le niveau de ressources des personnes handicapées : le montant de l'AAH fait ainsi l'objet d'une revalorisation de 25 % sur la durée du quinquennat. Deuxièmement, la réforme cherche à renforcer l'insertion professionnelle des personnes handicapées, selon la formule « faire de l'AAH un tremplin vers l'emploi », ce qui constitue un objectif ambitieux. La seconde question porte donc sur sa mise en oeuvre : pourra-t-elle atteindre les objectifs qu'elle s'est fixé ? Si oui, dans quelles conditions ?
L'AAH constitue une dépense très dynamique, dont la croissance est soutenue. Elle est passée de 4,4 milliards d'euros en 2002 à près de 6,6 milliards cette année et elle pourrait dépasser 7 milliards l'année prochaine. Le nombre de bénéficiaires ne cesse d'augmenter, passant de près de 690 000 en 1998 à environ 885 000 en 2010 et, probablement, plus de 900 000 en 2011. La même tendance s'observe pour le montant moyen versé. D'un peu plus de 490 euros en 2002, il devrait atteindre 625 euros en 2010, en raison, pour partie, de la revalorisation de l'AAH de 25 % d'ici à 2012.
L'évolution de cette dépense n'est pas toujours correctement traduite dans les prévisions budgétaires initiales et, depuis 2006, l'écart croît de façon exponentielle entre la prévision et l'exécution : de 42 millions d'euros en 2006, il devrait atteindre plus de 400 millions en 2010. Il semblerait néanmoins que la prévision inscrite dans le projet de loi de finances pour 2011 soit un peu plus sincère. Peut-être allons-nous abandonner cette « politique de l'autruche » qui consiste à occulter le dynamisme de la prestation, et donc à sous-budgétiser l'AAH.
Car, au-delà même du principe de sincérité budgétaire, sans lequel l'autorisation parlementaire n'a pas de sens, la sous-évaluation de l'AAH a directement pesé sur les comptes de la sécurité sociale. L'AAH est en effet servie par les caisses d'allocations familiales (CAF). Les crédits votés en loi de finances leur sont donc transférés. S'ils sont insuffisants - et c'est le cas chaque année - la sécurité sociale devient créancière de l'État. Pendant plusieurs années, celui-ci a laissé perdurer cette situation. En 2007, un versement exceptionnel d'environ 100 millions d'euros a apuré les dettes contractées au titre de l'AAH. Depuis, les lois de finances rectificatives de fin d'année ont toujours permis de régulariser la situation de l'État.
Il n'en demeure pas moins que, en cours d'année, la sécurité sociale supporte malgré tout la charge de trésorerie liée à cette sous-budgétisation. Le découvert de trésorerie de l'ensemble des régimes de sécurité sociale devrait dépasser, en 2010, 50 milliards d'euros. Il est donc très regrettable que l'État l'alimente, même de manière infime, alors qu'une programmation prudente de la dépense d'AAH permettrait de l'éviter.
Les déterminants de la dépense d'AAH sont nombreux et guère faciles à appréhender ou, plus exactement, il apparaît délicat de les pondérer les uns par rapport aux autres. Je vais en premier lieu distinguer les effets conjoncturels des effets structurels.
Deux effets conjoncturels se conjuguent et peuvent expliquer une partie de la forte progression récente de la dépense : il s'agit, d'une part, de la revalorisation de l'AAH, d'autre part, de la crise économique. La revalorisation emporte d'abord, très logiquement, un effet-prix puisqu'elle conduit mécaniquement à verser un montant moyen plus élevé aux bénéficiaires. C'est d'ailleurs sa finalité. Mais, de manière plus subtile, elle emporte également un effet-volume. En effet, l'AAH est attribuée à la condition que les ressources de la personne handicapée ne dépassent pas un certain plafond. Celui-ci est calculé en fonction du montant maximal de l'AAH - qui fait l'objet d'une revalorisation. En conséquence, la progression du montant d'AAH, et donc du plafond, est beaucoup plus rapide que celle des salaires. Il en résulte qu'un certain nombre de personnes handicapées, qui n'étaient pas éligibles à la prestation car leurs ressources étaient supérieures au plafond, peuvent désormais entrer dans le dispositif. Avec la crise, cet effet-volume est bien évidemment renforcé puisque, en moyenne, les ressources des ménages diminuent.
Voilà pour les effets conjoncturels. Seule la démographie constitue un effet réellement structurant dans l'évolution de l'AAH. En effet, la probabilité de percevoir l'AAH augmente jusqu'à l'âge de quarante-cinq ans, puis se stabilise. Concrètement, cela signifie que la part des « accidentés de la vie » est plus importante que celle des « handicapés de naissance » au sein des allocataires. Or il se trouve que la génération des quarante-six - cinquante-neuf ans est également la plus nombreuse dans l'ensemble de la population française. Ainsi, la concordance de la dynamique démographique propre à l'AAH et de celle de la population française conduit logiquement à augmenter le nombre de bénéficiaires. A l'inverse, au cours des prochaines années, l'arrivée à l'âge de la retraite des bénéficiaires de l'AAH devrait diminuer leur nombre.
Est-il possible de prévoir de manière plus fiable et plus juste la dépense de cette prestation sociale ? En première analyse, il semblerait que non. La conjonction des effets structurels ou conjoncturels, qui peuvent jouer autant à la hausse qu'à la baisse, devrait imposer la plus grande prudence dans l'élaboration des prévisions. Pourtant, il apparaît nettement que la tendance générale de progression de la dépense d'AAH est parfaitement linéaire. L'exercice 2008, première année de revalorisation de l'AAH, marque une inflexion mais la même linéarité semble devoir être observée.
Vos rapporteurs souhaitent, par conséquent, que le montant des crédits inscrits dans le projet de loi de finances corresponde, au minimum, à la tendance moyenne de progression de la dépense observée au cours des cinq dernières années. Sur cette base, la dotation de l'AAH, pour 2011, serait sous-budgétisée d'au moins 100 millions d'euros.
De même, nous proposons que le calcul a priori de la dépense d'AAH ne prenne pas en compte les mesures d'économies escomptées qui, lors des années précédentes, ne se sont pas réalisées. De surcroît, la méthode retenue pour les calculer n'apparaît pas assez fiable. Il serait donc plus juste de ne les constater qu'a posteriori...
Engagée par le Président de la République, en juin 2008, lors de la conférence nationale du handicap, cette réforme opère un renversement de la logique qui a prévalu jusqu'alors, qui consistait à mesurer le taux d'incapacité permanente des personnes handicapées plutôt que d'identifier leurs facultés à exercer une activité professionnelle. Cette nouvelle approche souhaite favoriser l'emploi des personnes handicapées qui sont en mesure de travailler et garantir un niveau de revenu digne à celles qui sont durablement éloignées de l'emploi. Plusieurs mesures devaient y contribuer : la revalorisation de l'AAH de 25 % d'ici à 2012 ; l'évaluation systématique des capacités professionnelles de la personne handicapée à l'occasion d'une première demande d'AAH ou d'un renouvellement et l'obligation pour les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) d'assortir toute reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) d'une décision d'orientation professionnelle ; la suppression de la condition d'inactivité préalable d'un an pour l'attribution de l'AAH aux personnes ayant un taux d'invalidité compris entre 50 % et 80 %, ce qui permet aux bénéficiaires potentiels de percevoir l'AAH dès leur premier jour d'inactivité et les incite à accepter des missions temporaires de courte durée, ce dont on ne peut que se féliciter ; la suppression de la limite d'âge de trente ans opposable aux travailleurs handicapés pour accéder aux contrats d'apprentissage ; enfin, la révision trimestrielle du montant de l'allocation et la mise en place d'un taux de cumul plus avantageux des revenus d'activité avec l'AAH.
Si nous nous réjouissons que les engagements en faveur de la revalorisation de l'AAH aient finalement pu être tenus malgré un contexte budgétaire très contraint, nous devons déplorer en revanche que les mesures susceptibles de favoriser l'insertion professionnelle des bénéficiaires de l'AAH n'aient toujours pas été mises en oeuvre, faute des dispositions réglementaires et des financements nécessaires. Ainsi, dans l'attente de ce décret, l'application des nouvelles modalités de cumul des revenus d'activité avec l'AAH et la mise en place de la déclaration trimestrielle de ressources pour les quelque 80 000 allocataires travaillant dans le milieu ordinaire a été repoussée au 1er janvier 2011.
Nous vous proposerons de renoncer, dans l'immédiat, à mettre en oeuvre cette seconde mesure, très contraignante pour les personnes handicapées et qui suscite une forte réticence des associations. De plus, sa faible portée - elle ne concerne pour l'instant qu'à peine 10 % des allocataires - et les coûts de gestion qui en résultent minorent les économies que l'on pouvait en attendre.
Par ailleurs, les MDPH et le service public de l'emploi ne disposent pas des moyens nécessaires pour s'acquitter des nouvelles missions qui leur ont été confiées, c'est-à-dire l'évaluation des capacités et des compétences professionnelles des nouveaux demandeurs de l'AAH et leur accompagnement vers l'emploi. D'abord, il n'existe aucun outil opérationnel d'évaluation : les experts chargés de construire une grille d'appréciation objective de l'employabilité ont conclu à l'impossibilité d'élaborer un guide barème semblable à celui qui existe pour déterminer le taux d'incapacité. Ensuite, les moyens humains ont été diversement estimés : les personnels nécessaires aux MDPH pour l'évaluation des capacités professionnelles des demandeurs et leur orientation s'élèveraient à 30 équivalents temps plein (ETP), en conservant la méthode actuelle et en ciblant les mesures sur les seuls primo-demandeurs, mais à 429 ETP, en faisant le choix d'entretiens individuels approfondis pour tous les demandeurs. Pour 2011, le Gouvernement a pris le parti de réserver le bénéfice de l'accompagnement vers l'emploi aux primo-demandeurs, tout en prévoyant d'expérimenter de nouvelles modalités d'évaluation et d'orientation dans une quinzaine de départements. Dans le contexte budgétaire actuel, le choix d'une mise en oeuvre progressive de la réforme nous paraît sage. Mais il nous semblerait plus judicieux de la financer en puisant dans les réserves de trésorerie des deux fonds collecteurs que sont l'Agefiph et le Fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (le FIPHFP), plutôt que de solliciter les moyens déjà insuffisants des MDPH.
Il convient également de créer les conditions d'un meilleur accueil des personnes handicapées sur le marché du travail, en mobilisant de façon plus incitative les entreprises de moins de vingt salariés non assujetties à l'obligation d'emploi et en développant la mise en place de partenariats d'insertion et de formation entre les grands groupes, l'Agefiph et les organismes de placement spécialisés.
En même temps, il est indispensable d'expliciter les notions d' « employabilité faible » ou de « restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi ». Ce critère, qui figure à l'article L. 821-2 du code de la sécurité sociale et qui conditionne l'attribution de l'AAH aux demandeurs dont le taux d'incapacité est compris entre 50 % et 79 %, aurait dû faire l'objet d'un décret précisant son contenu et ses modalités d'application. Or il n'est toujours pas paru. Cette carence explique en grande partie les divergences de pratiques observées d'un département à l'autre et conduit à des disparités importantes dans les taux d'attribution des demandes.
Afin de garantir une meilleure équité de traitement des demandes d'AAH, vos rapporteurs recommandent de renforcer les mesures d'harmonisation, d'évaluation et de contrôle des procédures mises en oeuvre par les MDPH. Cela suppose, d'une part, d'intensifier les actions de formation des membres des équipes pluridisciplinaires et des commissions des droits et de l'autonomie ; d'autre part, de renforcer le contrôle de l'État dans la prise de décision en autorisant ses représentants à la CDAPH à demander le réexamen d'un dossier qu'ils considéreraient comme problématique.
A terme, si nous voulons tirer toutes les conséquences de la réforme voulue par le Président de la République, nous n'échapperons pas à une remise à plat de l'actuel régime juridique de l'AAH, qui se caractérise par trop d'incohérences et d'ambiguïtés. Nous pourrions alors abandonner la distinction entre les deux régimes d'AAH fondée sur le seul taux d'incapacité en privilégiant une différenciation des publics selon leur capacité ou non à exercer une activité professionnelle.
Dans ce schéma, l'éligibilité à l'AAH serait conditionnée à un taux d'incapacité supérieur à 50 % et à la nécessité de justifier d'une faible employabilité. Ainsi, ceux qui seraient en mesure de travailler bénéficieraient d'un accompagnement adapté vers l'emploi, tandis que ceux dont la capacité de travail serait jugée trop faible percevraient un complément d'AAH afin de leur assurer une vie digne. Nous devons garder cet objectif à l'esprit même si nous savons que, faute de disposer de travaux préparatoires suffisants, il n'est pas réalisable à court terme.
La réforme de l'AAH n'est donc pas achevée, loin s'en faut. Il convient dès à présent de préparer la prochaine étape, en veillant à ce que les nouvelles règles conditionnant l'attribution de cette prestation gagnent en cohérence et en clarté et ne se traduisent pas par une augmentation non maîtrisée de la dépense et des disparités territoriales grandissantes. Cela suppose que l'État reprenne toute sa place dans l'élaboration des procédures d'évaluation des demandes et qu'il se donne les moyens d'en assurer le contrôle permanent ainsi qu'une évaluation régulière.
Je retiens de vos communications qu'il faudrait, dans le prochain projet de budget, augmenter d'au moins 100 millions d'euros la dépense de l'AAH.
Il faut tenir un langage de vérité et ne pas sous-estimer le coût de cette allocation et, à l'inverse, ne pas surestimer le coût du RSA activité.
Les louables intentions du législateur ont souvent du mal à se concrétiser au profit de ceux qu'elles visaient. La carte des taux d'attribution de l'allocation que vous nous avez distribuée est saisissante. Pourquoi un tel écart entre les départements ? Il y en a certains où l'on est particulièrement handicapé...
Dans les départements qui abritent beaucoup d'établissements spécialisés - la Lozère, par exemple - il y a davantage d'allocataires que dans les autres.
Si le taux de demandes varie d'un département à l'autre, il faut aussi compter avec des différences dans les pratiques et les critères d'attribution.
Le taux d'acceptation des demandes varie, selon les départements, de 50 % à 80 %.
Beaucoup de MDPH ont du mal à recruter des médecins. De plus, elles connaissent des tensions internes du fait de l'actuelle réorganisation et tout cela freine le règlement des dossiers. La solution n'est donc pas, d'emblée, de renforcer le contrôle de l'État.
Mais celui qui paye, ce n'est pas le département ! Il s'agit d'une allocation nationale ; il faut donc une harmonisation.
On peut cumuler l'AAH avec un salaire dans la limite de 8 000 euros annuels. Pourquoi favoriser ce cumul ? Certes, celui qui travaille a des frais mais un handicapé mental a lui aussi des besoins à satisfaire.
En ce qui concerne la sous-estimation des inscriptions budgétaires, nous constatons le même problème pour la dotation de l'aide médicale de l'Etat - l'AME. Peut-on contraindre le Gouvernement à réévaluer le budget prévu pour l'AAH ou l'AME ou bien le rapporteur général de la commission des finances pourra-t-il déposer un amendement de réévaluation sans qu'on lui oppose l'article 40 ?
Puisque l'augmentation du nombre des allocataires s'explique par l'augmentation du nombre des « accidentés de la vie », il serait bon d'évaluer le coût d'une politique de prévention des accidents.
Lorsque les allocataires de quarante-cinq à cinquante-neuf ans atteignent l'âge de la retraite, ils basculent dans le minimum vieillesse. Il faut en anticiper les conséquences pour le fonds de solidarité vieillesse.
Vous parlez de mesures d'économies. Desquelles s'agit-il ?
Il serait bon d'interpeller le Gouvernement sur sa récurrente carence règlementaire : les ministères traînent trop souvent les pieds pour sortir les décrets d'application.
Le département des Pyrénées-Atlantiques abritait beaucoup d'établissements de cure, devenus établissements médico-sociaux, ce qui explique le nombre importants d'allocataires. Et la création en 2006 des MDPH, structures spécialisées bien identifiées tant par les médecins que par les handicapés, a créé un appel d'air, multipliant le nombre de demandes. Ces MDPH présentent l'intérêt de pouvoir faire une évaluation, ce qui est indispensable, même si cela a un coût.
Monsieur Vasselle, je vous signale qu'un handicapé mental peut travailler à temps partiel. Pour un handicapé, le travail, outre le salaire, apporte le sentiment d'être opérationnel.
Le taux d'AAH dans l'Aisne apparaît très élevé, mais la carte que vous nous avez distribuée manque d'une légende explicite.
Il est vrai qu'une légende nous éclairerait ; nous travaillons beaucoup sur la cartographie...
Les entreprises qui n'emploient pas le pourcentage légal de personnes handicapées doivent s'acquitter d'une pénalité...
Il se trouve que l'on a vu arriver devant les commissions de l'autonomie des flux considérables, qui laissent à penser que les entreprises y poussent certains de leurs salariés, pour échapper à la sanction...
Le phénomène est beaucoup moins important que ce que l'on peut croire, tant dans les entreprises que dans la fonction publique. A l'inverse, beaucoup de travailleurs handicapés ne souhaitent pas de reconnaissance de cette qualité, notamment pour ne pas être pénalisés auprès des banques lors d'une demande de crédit.
Pour ce qui concerne les collectivités, il faut leur reconnaître qu'elles ont coutume d'employer des personnes qui auraient pu bénéficier de la reconnaissance, de ceux que, dans un village, on appelle le « simple d'esprit », par souci d'intégration. Il n'est pas anormal qu'elles aient aujourd'hui le souci de le faire reconnaître.
Ceux qui peuvent travailler, monsieur Vasselle, conquièrent un statut social en même temps qu'ils bénéficient d'un complément de revenu et cela est inestimable. Ceux qui ne sont pas en mesure de travailler peuvent, quant à eux, percevoir une allocation complémentaire de 180 euros.
En ce qui concerne l'inscription budgétaire des crédits, je rappelle qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2010, nos deux commissions avaient adopté des amendements visant à faire basculer des crédits du RSA vers le handicap. Or, nous avons eu la surprise de voir les sénateurs présents en séance suivre comme un seul homme l'avis défavorable du Gouvernement... Cela m'a mis dans une sainte colère, au point que je me suis juré que cette année, si nous sommes suivis en commission, nous serions suivis en séance !
S'agissant de l'employabilité des accidentés de la vie, le rapport préconise une prise en charge et la mise en oeuvre d'une action d'insertion dès lors qu'il s'agit d'éviter des troubles postérieurs.
L'impact sur le fonds de solidarité vieillesse ? Avec le vote du texte en cours d'examen sur l'équilibre de notre système de retraites, il restera marginal.
A la lumière des faits, monsieur Lorrain, je me réjouis que l'on ait maintenu, pour les MDPH, le statut de groupement d'intérêt public (GIP), qui préserve la présence de l'État, chargé d'assurer l'égalité de traitement sur l'ensemble du territoire. Il est normal, par ailleurs, que les payeurs aient leur mot à dire.
Lors de l'examen de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST), nous avions présenté un amendement visant à inclure dans l'intitulé le médico-social, et j'avais demandé que les ARS participent aux commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.
Peut-être accusons-nous à tort les entreprises ? A-t-on une idée de l'évolution, sur les trois dernières années, des recettes de l'Agefiph ?
Elles ont augmenté, mais cela tient aussi à l'aggravation des pénalités, qui sont passées, pour une entreprise n'employant aucun salarié handicapé, de 400 à 1 500 fois le Smic. La loi de 2007 avait donné trois ans pour se mettre en règle : aujourd'hui, les pénalités tombent. C'est pourquoi les entreprises ont pris la question à bras le corps. Je dois me rendre la semaine prochaine à Lyon à l'invitation des chambres de commerce pour plancher sur cette problématique.
Tout cela est en effet très délicat.
Le droit d'amendement au projet de loi de finances, monsieur Vasselle, n'est pas une prérogative de la commission des finances. Tout sénateur peut amender des crédits à condition de gager l'amendement sur d'autres crédits pris à l'intérieur de la même mission. S'il apparaît, par exemple, que sur la ligne consacrée au RSA, les crédits sont plus importants que de besoin, chacun aura loisir de présenter un amendement pour sortir une somme de cette ligne en faveur de l'AAH.
Sur tous les amendements présentés l'an passé, la commission des affaires sociales et la commission des finances étaient en parfait accord.
Le Sénat n'est jamais plus fort que lorsque ses commissions sont en accord...
Le même raisonnement vaut pour l'AME mais qui est inscrite sur la mission « Santé ».
Il n'est, en revanche, pas possible de prévoir le transfert de crédits d'une mission à l'autre.
A l'issue de ce débat, la commission des finances et la commission des affaires sociales donnent acte à MM. Auguste Cazalet, Albéric de Montgolfier, rapporteurs spéciaux, et Paul Blanc, rapporteur pour avis, de leur communication et en autorisent la publication sous la forme d'un rapport d'information.
La commission poursuit l'examen des amendements sur le projet de loi n° 713 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme des retraites dans le texte n° 734 (2009-2010) adopté par la commission le 29 septembre 2010 dont M. Dominique Leclerc est le rapporteur.
Article 1er ter
Elle adopte l'amendement n° 1223, présenté par son rapporteur, tendant à confier l'établissement du rapport sur la rénovation des mécanismes de transfert de compensation démographique entre régimes d'assurance vieillesse non plus à la commission de compensation entre régimes de sécurité sociale mais au Cor.