La commission a tout d'abord procédé à l'examen des amendements sur la proposition de loi n° 146 (2008-2009), adoptée par l'Assemblée nationale, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants.
En préambule, M. Jean-Claude Etienne, rapporteur, a indiqué que, à l'issue de ses dernières consultations, il proposait à la commission de reporter d'un an l'application de la réforme proposée, c'est-à-dire à la rentrée 2010-2011 plutôt qu'à la rentrée 2009-2010. Le président de la commission ayant déposé un amendement en ce sens, le rapporteur a proposé que ce dernier soit rectifié et devienne l'amendement de la commission, ce que M. Jacques Legendre, président, a accepté ainsi que les autres membres de la commission.
a précisé que le dépôt par son groupe d'un certain nombre d'amendements tendant à obtenir des précisions se justifiait par le fait que la proposition de loi ne fixe qu'un cadre général et renvoie à des textes d'application le soin de déterminer les détails de la réforme. Il a donc jugé souhaitable que la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche précise les orientations envisagées, afin d'éclairer les étudiants.
Il a souligné que les nouvelles technologies ne pouvaient pas remplacer le contact direct avec les enseignants, notamment par le biais d'enseignements dirigés ou de tutorats.
Il a souhaité qu'une réflexion plus approfondie conduise au développement d'une culture commune à toutes les professions de soins, y compris les infirmiers, compte tenu de la nécessaire évolution vers la constitution d'équipes de santé, permettant à l'ensemble des professionnels d'assurer une permanence des soins. Cela suppose que le début de leur formation soit partiellement commun.
Il a considéré que si l'ensemble des questions soulevées par ses amendements ne relevaient pas du domaine législatif, ceux-ci permettaient cependant d'ouvrir d'importants débats en séance publique. En outre, certains sujets - notamment la démographie médicale - concernant à la fois la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et la ministre de la santé, il a proposé que les deux commissions concernées organisent une audition commune, ce que le président de la commission a accepté.
a partagé ce souhait qu'un certain nombre de questions puissent être abordées à l'occasion du débat en séance publique. Elle a relevé que la féminisation de la profession de médecin pouvait partiellement expliquer la désertification médicale dans certaines régions rurales.
Puis elle a évoqué les stratégies de contournement du concours de fin de première année adoptées par un certain nombre d'étudiants qui choisissent de poursuivre une ou deux années d'études en Roumanie avant de repasser le concours en France.
Enfin, elle a regretté que les exigences imposées aux étudiants de première année soient sans rapport avec les qualités qui devront être les leurs dans l'exercice de leur métier.
a souligné que l'ensemble des questions évoquées au-delà du strict objet de la proposition de loi montraient l'utilité d'un débat plus large et préalable à l'examen de la proposition de loi et justifiaient, par conséquent, la demande de renvoi en commission. Il a insisté sur l'importance des informations données en amont aux parlementaires sur les textes d'application, dans la mesure où ce sont souvent ces derniers qui posent problème.
A cet égard, M. Jacques Legendre, président, a souligné que le renforcement du rôle du Parlement, lié à la récente révision constitutionnelle, permettra de consacrer davantage de temps au suivi et au contrôle de l'application des lois.
S'agissant de la mise en place d'un tronc de formation commun à toutes les professions de santé, que beaucoup appellent de leurs voeux, M. Jean-Claude Etienne, rapporteur, a indiqué que la proposition de loi constituait la deuxième étape d'un processus d'intégration ayant déjà concerné médecins, odontologistes et sages-femmes et visant cette fois les pharmaciens. Il lui a semblé cohérent de réussir cette phase avant d'élargir, le cas échéant, le processus.
a souligné que le cadre général fixé par la proposition de loi laissait aux ministres concernés une latitude d'interprétation assez large et qu'il permettait aux universités de mettre en oeuvre la réforme dans le respect de leur autonomie pédagogique.
Il a insisté sur le fait que la sélection, fondée sur des critères de connaissances strictement scientifiques, ne permettait pas de garantir la compétence des futurs professionnels. Enfin, il a salué le fait que les amendements déposés permettent d'obtenir des précisions de la part de la ministre et d'ouvrir d'importants débats au cours desquels les sénateurs pourront exposer leurs positions.
Puis M. Serge Lagauche a estimé qu'il aurait été cohérent que le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, fixe d'abord des objectifs, avant que les formations soient adaptées en conséquence. S'agissant des étudiants choisissant de commencer leur formation à l'étranger, il a rappelé que la Belgique avait, elle aussi, accueilli de nombreux étudiants français, ce qui n'empêchait pas cependant la région Nord-Pas-de-Calais de manquer de médecins.
a insisté sur la nécessité d'élargir le débat avec les ministres et personnalités concernées, les cloisonnements entre formations et l'insuffisance des passerelles posant problème. Il a relevé que l'examen à venir d'une nouvelle loi sur la bioéthique pourrait donner l'opportunité de réfléchir à l'insuffisante formation des futurs professionnels de santé s'agissant des questions d'éthique et des besoins de notre société dans ce domaine.
a estimé que les nouvelles procédures mises en oeuvre à la suite de la révision constitutionnelle supposaient que les sénateurs puissent obtenir les amendements suffisamment en amont pour leur permettre de les examiner dans de bonnes conditions avant la réunion de commission.
a proposé que le Bureau de la commission se saisisse prochainement de cette question.
La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite.
a tout d'abord rappelé que la commission s'était de longue date mobilisée en faveur d'une presse indépendante et dynamique, comme en témoigne la mise en place, en 2007, d'un groupe de travail sur la crise de la presse.
Il a souhaité que l'audition de M. Bernard Spitz soit l'occasion de prolonger ce débat, en revenant sur les principales pistes de réforme du secteur dégagées par les Etats généraux de la presse écrite et sur les suites qu'il convient de leur réserver.
A titre liminaire, M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, a souligné que l'organisation d'Etats généraux de la presse écrite s'était imposée devant la nécessité de mettre un terme à des ajustements jusqu'ici partiels, superficiels et, pour l'essentiel, inopérants. Ces Etats généraux avaient pour objectif de permettre à l'ensemble des acteurs du secteur de rechercher des solutions communes à des difficultés structurelles, pour la première fois envisagées dans leur globalité.
Au-delà des difficultés conjoncturelles auxquelles elle se trouve confrontée, et en particulier la perspective d'un effondrement du marché publicitaire en 2009, la presse écrite doit en effet surmonter des problèmes structurels persistants qui appellent une rénovation profonde de son modèle économique. En effet, l'irruption de concurrents tels que les quotidiens gratuits et la révolution du média Internet, qui captent une part croissante des dépenses des annonceurs publicitaires au détriment de la presse écrite payante, doivent inciter cette dernière à repenser la façon de mettre en avant sa valeur ajoutée dans la diffusion de l'information.
a relevé que la presse quotidienne payante d'information politique et générale était, à l'évidence, la forme de presse la plus exposée aux perspectives économiques douloureuses de l'année 2009. L'impact de la crise financière internationale sur l'équilibre financier des titres de presse est tel que les quatre derniers mois ont été marqués par l'annonce de licenciements massifs dans des journaux américains aussi prestigieux que le Los Angeles Times, le New York Times ou le Chicago Tribune. Cette conjoncture défavorable pénalisera d'autant plus les quotidiens nationaux français qu'elle se greffe sur une dégradation structurelle de leurs bilans entamée depuis plusieurs décennies.
Au départ accompagnés par un mélange d'espoir et de scepticisme, voire d'une certaine hostilité liée à la crainte d'une ingérence croissante du politique dans les médias, les Etats généraux se sont conclus par la publication, le 8 janvier 2009, d'un Livre vert proposant tant des mesures d'urgence qu'un plan global et détaillé de réformes structurelles, accueillis très favorablement par l'ensemble des parties prenantes. La méthode empirique qui a présidé au déroulement des travaux des différents pôles de ces Etats généraux a ainsi démontré que cette initiative répondait à un véritable besoin partagé par tous les acteurs du secteur.
Evoquant les principales propositions de réformes structurelles, M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, est tout d'abord revenu sur la nécessité pour les acteurs de la presse écrite de s'entendre sur une refonte de son système de fabrication. Les coûts engendrés par celui-ci seraient, selon certaines estimations, supérieurs de 30 à 40 % à ceux pratiqués chez nos partenaires européens. Les coûts de fabrication sont ainsi tenus responsables d'un prix de vente des quotidiens sensiblement plus élevé en France que dans le reste de l'Europe. Ces coûts sont le fruit d'équilibres sociaux historiques propres au secteur de la fabrication et de l'impression. Bien que la modernisation du statut des ouvriers du syndicat du Livre et la remise en cause de son monopole d'embauche dans les imprimeries soient des sujets particulièrement délicats, M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, s'est réjoui de la réponse favorable des partenaires sociaux à l'ouverture de négociations sociales en vue de réduire les coûts de fabrication.
Il a ensuite brossé un tableau général du système de distribution de la presse et examiné une série de mesures destinées à pallier son inefficacité. La méthode empirique mise en oeuvre par les Etats généraux a notamment permis, au travers d'un cas pratique consacré au lancement simulé en France d'un équivalent du quotidien allemand Bild Zeitung, de mettre en évidence le lien entre les insuffisances de notre réseau national de distribution et l'absence, dans notre pays, de quotidiens nationaux tirant à plus d'un million d'exemplaires. En effet, la loi dite « Bichet » du 2 avril 1947 consacre le principe d'une clause d'exclusivité du contrat de groupage dans le cadre d'une distribution via un système de coopératives : elle est ainsi à l'origine du monopole des Nouvelles messageries de la presse parisienne (NMPP) dans la distribution des quotidiens nationaux. Cette situation s'oppose à ce que le réseau de distribution des NMPP, dont l'offre est insuffisante, se combine avec celui de la presse quotidienne régionale (PQR), plus étoffé et bénéficiant d'une longue expérience dans le portage à domicile, pour atteindre une masse critique.
Par ailleurs, M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, a souhaité alerter la commission sur la situation inquiétante du métier de diffuseur de presse, dont la rémunération est sensiblement inférieure à celle pratiquée dans le reste de l'Europe, alors même que les coûts de la distribution en France sont proches de la moyenne européenne. Dès lors que les messageries de presse et les dépositaires captent l'essentiel de la valeur ajoutée issue de la distribution de la presse, les marchands de journaux voient progressivement leur métier se réduire à celui de simple manutentionnaire responsable de la gestion des invendus, sans avoir la moindre possibilité de développer une véritable relation commerciale au contact de leur clientèle.
S'agissant du rôle de La Poste dans le système de distribution français, il a observé que, si le service de transport postal s'avérait profitable pour la presse magazine, il n'en allait pas de même pour la presse quotidienne nationale (PQN) dont les taux d'abonnement demeurent très faibles, en particulier du fait de ses carences en matière de portage à domicile.
Dans ces conditions, M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, a indiqué que les Etats généraux de la presse avaient privilégié la voie du pragmatisme, en appelant les acteurs du système de distribution à la concertation dans le cadre d'un comité chargé de suivre, pendant six mois, l'expérimentation de formes alternatives de distribution. Les travaux de ce comité de suivi devraient permettre de formuler, en dernier ressort, des propositions tendant à moderniser le réseau de distribution, sans pour autant modifier la loi « Bichet ». Le développement du portage à domicile, la mutualisation des capacités de distribution entre les réseaux de la PQN et de la PQR, l'assouplissement des règles d'assortiment des titres et la revalorisation de la rémunération des diffuseurs de presse devraient être les principales pistes à l'étude.
Enfin, les réformes structurelles devront également concerner la rénovation du contenu éditorial de nos titres de presse. Ce besoin est particulièrement sensible lorsqu'il s'agit pour la presse écrite payante de s'adapter aux codes de lecture modernes et de redevenir attractive auprès des jeunes de 15 à 25 ans qui envisagent de plus en plus l'information au travers du prisme de la gratuité. M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, s'est ainsi déclaré favorable à la mise en oeuvre de l'abonnement gratuit à un quotidien pour les jeunes atteignant la majorité : cette mesure est susceptible de redonner aux jeunes le goût d'une analyse rigoureuse et sélective de l'information, en leur offrant pendant six mois l'expérience de la lecture régulière d'un journal. Cette mesure est ainsi appelée à exercer un effet vertueux sur la rénovation du contenu éditorial de ces journaux.
En ce qui concerne la problématique des droits d'auteur des journalistes, il a relevé que les Etats généraux de la presse écrite avaient eu la sagesse de s'en remettre au compromis dégagé par un groupe de travail informel en 2007, dans un document appelé le « Blanc ». La solution, équilibrée, repose sur la substitution à un droit lié à la publication d'un contenu sur un support déterminé d'un droit lié à un temps d'exploitation.
Enfin, M. Bernard Spitz, délégué à la coordination des Etats généraux de la presse écrite, a indiqué que trois mesures d'urgence en faveur de la presse pouvaient être envisagées pour l'année 2009 :
- l'instauration d'un moratoire d'un an pour la mise en oeuvre des accords État-Presse-La Poste, qui prévoyaient une forte augmentation des tarifs postaux dans les années à venir ;
- le doublement de la part des investissements publicitaires de l'État dans la presse. Sur près d'une centaine de millions d'euros de dépenses publicitaires, l'État n'en consacre que 20 % à la presse écrite, alors que celle-ci capte environ 37 % du marché publicitaire. À titre d'exemple, en Belgique, les pouvoirs publics réservent à la seule presse écrite l'intégralité de leurs achats publicitaires mais ne lui versent, en revanche, aucun subside ;
- la revalorisation de la rémunération des marchands de journaux au travers d'exonérations temporaires de leurs charges sociales.
Un débat s'est ensuite engagé.
a indiqué qu'il proposerait à la conférence des présidents l'inscription d'un débat en séance publique, au mois de mars 2009, sur l'avenir du secteur de la presse qui sera l'occasion de présenter à la Haute assemblée les conclusions du rapport d'information du groupe de travail de la commission sur la crise de la presse. Ce débat permettra des échanges de vues sur les suites à donner aux conclusions des Etats généraux.
s'est déclaré particulièrement préoccupé par la situation de la presse quotidienne pour l'année 2009, compte tenu des prévisions pessimistes relayées par M. Bernard Spitz. Rappelant le rôle central de la presse dans le dynamisme de notre vie démocratique, il a reconnu à l'État un rôle légitime de régulateur du secteur, afin notamment de l'accompagner dans sa modernisation. Il a vu dans le soutien public un levier indispensable à la pluralité de la presse, rappelant à ce titre que le lancement d'un nouveau quotidien était encore loin de constituer un exercice rentable dès lors que les journaux continuent d'être vendus à un prix inférieur à leur coût de revient.
a constaté la disparition progressive de la lecture de la presse dans les transports publics, notamment dans les trains. Elle s'est également inquiétée du manque d'intérêt croissant des jeunes générations pour la lecture des quotidiens et s'est interrogée sur l'éventuelle disparition, à terme, du support papier de la presse.
a écarté une disparition totale du produit papier de la presse à moyen terme, convenant qu'à l'achèvement de sa transformation numérique, la presse verrait probablement son support traditionnel marginalisé au profit de sa version digitale. Cette transition vers un nouvel équilibre entre les supports a toutefois vocation à se faire dans la durée.
Il s'est refusé à voir une fatalité dans la rupture générationnelle entre la presse écrite payante et son jeune public : le succès des gratuits auprès des 15-25 ans a, en effet, démontré que les jeunes peuvent encore être réconciliés avec la lecture de la presse.
La commission a entendu, ensuite, MM. Daniel Deloit, directeur général de l'École supérieure de journalisme de Lille (ESJ), Alain Girard, premier secrétaire général du Syndicat national des journalistes (SNJ), Alexis Guedj, avocat à la Cour, professeur à l'Université Paris II, et Mme Jacqueline Papet, vice-présidente de la commission paritaire nationale de l'emploi des journalistes (CPNEJ), au cours d'une table ronde sur le métier de journaliste.
Invité à intervenir sur les questions de déontologie, M. Alain Girard a rappelé que la première préoccupation du Syndicat national des journalistes, lors de sa création en 1918, avait été de structurer la profession autour d'un code d'éthique. Cette charte de déontologie, actualisée en 1939, a servi de support à l'élaboration de la Charte européenne des droits et des devoirs des journalistes, adoptée en 1971. Par ailleurs, une charte de la qualité de l'information a été élaborée lors des Assises du journalisme en 2007. Toutefois, ces textes n'ont pas été annexés à la convention collective pour devenir opposables à l'ensemble de la profession. Les Etats généraux de la presse ont abouti, sur cette question, à recommander qu'un « comité des sages » rédige, dans un délai d'un an, un code de déontologie qui scellerait un accord entre journalistes et éditeurs autour d'une meilleure qualité de l'information. Cela enverrait un signal fort en direction d'une opinion publique de plus en plus critique et méfiante à l'égard du travail journalistique. Ce code serait complété par une charte propre à chaque entreprise. Enfin, il a souhaité que la notion d'équipe rédactionnelle fasse l'objet d'une reconnaissance juridique.
a tout d'abord souligné que, compte tenu de la défiance croissante du public à l'égard des journalistes, il est nécessaire de renforcer leur crédibilité. Le rôle du législateur est sur ce point décisif. L'absence de statut juridique des journalistes entretient en effet le soupçon, même si elle ne fait en rien obstacle au contrôle de l'honnêteté de l'information. Protéger le secret des sources, c'est donc affirmer les droits et les devoirs propres aux journalistes et renforcer ainsi leur crédit aux yeux de l'opinion.
Il a ensuite indiqué que l'adossement actuellement envisagé de normes déontologiques aux conventions collectives pouvait faire naître bien des interrogations. Cela conduirait en effet à faire de la juridiction prud'homale l'instance juridictionnelle compétente en matière de déontologie, ce qui n'est que peu satisfaisant. Il conviendrait plutôt de créer un conseil ad hoc composé d'éditeurs, de journalistes et de représentants du public, qui pourrait tenir lieu de juridiction du premier degré en cas de faute déontologique d'un journaliste. Là aussi, le statut et la crédibilité des journalistes en sortiraient renforcés.
a indiqué, en préambule, que les données statistiques sur l'emploi des journalistes étaient peu fournies. Elle s'est félicitée ainsi de la décision prise lors des Etats généraux de la presse écrite de mettre en place un centre de recherche chargé de mutualiser les données sur l'emploi et la formation dans le secteur du journalisme.
Après avoir relevé l'engouement des jeunes pour ce métier, mais aussi l'extrême précarité du marché de l'emploi, elle a précisé qu'il existait 66 écoles de journalisme, la plupart privées, et quelques voies de formation universitaire.
Elle a souligné que seules douze écoles de journalisme étaient reconnues par la commission paritaire nationale de l'emploi des journalistes, qui est chargée, depuis 1976, d'instruire les dossiers de reconnaissance par la profession des cursus de formation. A l'heure actuelle, cette procédure fait l'objet d'un réexamen ; douze écoles reconnues sollicitent à nouveau cet agrément et huit autres écoles se sont portées candidates à la reconnaissance. Les critères de reconnaissance des cursus de formation au métier de journaliste sont également actualisés et les écoles reconnues devront dispenser un enseignement de qualité adapté notamment au marché de l'emploi.
a évoqué en outre la question de la péréquation entre le nombre d'écoles reconnues et leur financement qui est assuré par le versement de la taxe d'apprentissage. Les travaux des Etats généraux de la presse écrite en ont proposé une meilleure répartition entre les différentes formations reconnues.
Elle a indiqué, ensuite, que 2.000 nouvelles cartes de presse étaient attribuées chaque année, seules 15 à 20 % de ces cartes étant délivrées à des journalistes issus d'écoles reconnues.
Après avoir évoqué le problème de l'adéquation entre emploi et formation, elle s'est félicitée de la proposition des Etats généraux de la presse écrite, relayée par le Président de la République, de permettre aux journalistes non diplômés d'une école de journalisme reconnue par la CPNEJ de bénéficier d'une formation spécifique axée en particulier sur l'éthique et la déontologie au cours des trois premières années d'exercice professionnel.
Enfin, évoquant la problématique de la diversité sociale et culturelle, elle a fait remarquer que la quasi-totalité des étudiants en école de journalisme étaient issus du même milieu social, leurs parents appartenant aux catégories socioprofessionnelles supérieures. Elle a signalé ainsi que les écoles de journalisme avaient entrepris un travail de réflexion sur l'examen d'entrée et son adaptation aux évolutions de la société.
a souligné, comme cela a été rappelé lors des Etats généraux de la presse, que la formation reste un atout essentiel pour l'exercice du métier de journaliste et qu'il faut accepter d'assumer le coût d'un cursus de haut niveau. Une idée avancée consiste ainsi à introduire une formation obligatoire, au cours des trois premières années d'activité, pour ceux qui n'auraient pas suivi de formation reconnue.
Puis il a indiqué que l'enseignement du journalisme, qui s'articule en deux années, est à la fois professionnel et professionnalisant. Les étudiants effectuent plusieurs stages et la plupart des cours sont dispensés par des professionnels en activité. Si 100 % des diplômés trouvent un emploi à la sortie de l'école, près de 50 % sont pigistes, ce qui traduit une précarisation de la profession. Cinq ans après la sortie de l'école, 95 % continuent à exercer le métier de journaliste et moins de 10 % restent pigistes.
Il a regretté que l'enjeu de la diversité n'ait pas encore été suffisamment pris en compte, face au constat inacceptable d'une certaine « consanguinité ». Cependant, des écoles ont déjà mis en place un tutorat pour les lycéens, des compléments de bourses sur critères sociaux ou des programmes de formation par apprentissage. D'autres voies d'ouverture sociale sont envisagées, mais le principe du concours d'entrée ne doit pas être remis en cause et il faut rester exigeant sur la maîtrise de la langue et la culture générale.
Il a indiqué, ensuite, qu'une demande d'habilitation au grade de Master du diplôme délivré par l'ESJ, actuellement au niveau bac + 4, est en cours. Enfin, une évolution du modèle de financement de l'école est indispensable : ses ressources proviennent notamment des droits d'inscription des étudiants (fixés à 3 500 euros), de la taxe d'apprentissage, à hauteur de 35 % du budget, et de la subvention du ministère qui ne représente que 3 % de ce budget.
Un large débat a suivi ces interventions.
Après avoir rappelé le caractère fort délicat des questions déontologiques en matière de presse, M. Ivan Renar a souhaité que la faute professionnelle demeure nettement distincte de la faute déontologique.
En réponse à cette remarque, M. Alain Girard a indiqué qu'aux yeux du SNJ, l'essentiel n'était pas la sanction, mais l'instruction. Chaque fois qu'une faute déontologique est commise, il convient en effet de s'intéresser à l'ensemble des responsabilités, qui sont souvent personnelles, mais qui peuvent aussi tenir à l'organisation d'un service ou d'une rédaction. L'essentiel est alors d'engager des actions de prévention, en tirant toutes les conséquences de la faute commise, plutôt qu'en se focalisant sur la responsabilité de tel ou tel membre de la rédaction.
S'agissant de la question de l'instance compétente en matière déontologique, il a exprimé les réticences que lui inspirait la création d'une juridiction ordinale et a fait état de l'existence de la commission d'attribution de la carte professionnelle, qui devait à l'origine jouer un rôle en matière de déontologie. Sans doute serait-il pertinent de lui reconnaître une compétence directe ou indirecte à ce sujet.
s'est étonné de la proposition d'adjoindre à la convention collective des journalistes une charte déontologique qui risque de conduire à une sanction prononcée par un juge en cas de faute déontologique, alors que cette même convention, dans son article 44, prévoit déjà la possibilité de licencier un journaliste pour faute grave en cas de violation des règles d'honneur professionnelles. Il s'est alors interrogé, d'une part, sur la compétence du juge prud'homal pour apprécier la faute déontologique commise par un journaliste dans l'exercice de sa profession et, d'autre part, sur la réalité de la responsabilité juridique incombant au directeur de la publication.
s'est déclaré favorable à l'existence d'une véritable formation au métier de journaliste, au regard des évolutions actuelles qui tendent à donner le sentiment que tout citoyen peut se comporter en journaliste.
Il a fait observer ensuite que le journalisme ne devait pas être confondu avec la communication qui se distingue en termes de méthodes et d'objectifs.
Il a regretté, à l'appui de plusieurs exemples, que le contenu de l'information soit marqué par une dramatisation excessive.
Enfin, il a souligné que les propos sur la promotion de la diversité sociale au sein des écoles de journalisme rejoignaient les conclusions du rapport de la commission des affaires culturelles sur la diversité sociale dans les classes préparatoires aux grandes écoles. Il a exprimé la crainte que l'Institut d'études politiques de Paris, au travers des conventions d'éducation prioritaire, ne double les écoles de journalisme sur le plan de la diversité.
a souligné le manque d'intérêt des journalistes pour les informations relatant des actions constructives, notamment dans le département de la Seine-Saint-Denis.
Il a fait remarquer que le montant des droits d'inscription dans les écoles de journalisme limite l'accès à ces formations.
Après avoir rappelé que le rapport de M. Louis de Broissia sur la presse quotidienne d'information faisait déjà le constat d'une crise des contenus, Mme Catherine Morin-Desailly a souhaité disposer de précisions sur le renouvellement de l'attribution des cartes de presse.
a interrogé les intervenants concernés sur l'articulation des écoles de journalisme avec le service public de l'enseignement supérieur ainsi que sur les règles de répartition de la taxe d'apprentissage.
En réponse aux intervenants, Mme Jacqueline Papet a apporté les précisions suivantes :
- 37 000 journalistes sont en activité, la réglementation en vigueur interdisant à chacun d'eux de se prêter à quelque titre que ce soit à ces actions de communication. Cela étant, la multiplication des professionnels de la communication, alliée à la nécessité d'alimenter de nouveaux supports de diffusion, conduit à compliquer la tâche des journalistes qui doivent apprendre à prendre leur distance avec des supports de communication de plus en plus élaborés ;
- peu de statistiques fiables sont disponibles sur les journalistes. L'une des conclusions des États généraux de la presse est de travailler à les améliorer, afin de disposer d'une image fidèle non seulement des profils, mais encore des parcours et des statuts des journalistes en activité.
a formulé à son tour les observations suivantes :
- la délinéarisation des médias conduit à augmenter de manière très significative le nombre de contenus qui doivent être produits chaque jour. Il en découle une reprise croissante des communiqués de presse et un recours plus important aux outils de communication. Certains grands journaux anglais tirent ainsi 60 à 65 % de leur contenu de communiqués à peine modifiés. La formation des journalistes n'en est que plus nécessaire, 15 % seulement de ces derniers ayant suivi les enseignements prévus au sein d'un cursus reconnu par la profession ;
- la politique éditoriale des entreprises de presse relève bien entendu de la compétence de ces dernières et les écoles de journalisme ne peuvent avoir qu'une influence indirecte sur les pratiques du secteur ;
- le produit de la taxe d'apprentissage représente 35 % du budget de l'ESJ de Lille. Pour d'autres d'établissements, cette proportion s'établit parfois à 50 %. Cependant, cette ressource bénéficie de moins en moins aux écoles de journalisme et il conviendrait donc de créer un organisme unique de collecte, qui serait piloté de manière paritaire ;
- les droits d'inscription de l'ESJ de Lille sont sans doute élevés, mais ils sont loin d'être les plus hauts du secteur. Au surplus, l'investissement que représente la formation d'un étudiant s'approche de 15 000 euros par année. Les droits d'inscription ne couvrent donc qu'une faible part des besoins d'une école. Par ailleurs, l'absence d'harmonisation du niveau des diplômes conduit des élèves titulaires d'un bac+5, obtenu souvent au sein d'un institut d'études politiques, à préparer dans une école de journalisme un diplôme de niveau bac+4. En conséquence, ils perdent tout droit à l'obtention d'une bourse attribuée sur critères sociaux, ce qui contraint les établissements à financer eux-mêmes leur politique sociale ;
- s'agissant de la diversité, le niveau de français et de culture générale est très discriminant, mais il apparaît difficile d'abaisser les exigences en la matière. Mieux vaut donc développer d'autres types d'actions, en insistant notamment sur les formations en alternance.