La commission auditionne M. Eric Trappier, président-directeur général du groupe Dassault Aviation, sur le projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.
Monsieur le Président, c'est un plaisir de vous retrouver, au lendemain du succès du Salon du Bourget. C'est pour nous tous très important. En effet, la commission était très attentive à votre activité et les contrats majeurs que sont les ventes de 24 Rafale à l'Égypte et 24 au Qatar, comme celle de 36 appareils qui devrait se concrétiser avec l'Inde, nous confirment la compétitivité de cet équipement. Vous pourrez par ailleurs nous indiquer l'état d'avancement du dialogue avec l'Inde.
Ces contrats sont un soulagement pour la mise en oeuvre de la loi de programmation militaire (LPM). Nous souhaiterions connaître les conséquences que comportent pour votre entreprise, mais aussi pour l'armée française, les engagements qui ont été pris envers la clientèle. Ce qui nous importe également, c'est votre point de vue industriel sur l'actualisation de la programmation militaire (LPM).
Outre ce qui concerne le Rafale, vous avez d'ambitieux projets en cours ; vous avez ainsi déclaré vouloir élargir votre offre de patrouille maritime. Nous avons entendu la semaine dernière l'Amiral Rogel, qui nous a confirmé que la surveillance maritime était aujourd'hui cruciale, et qu'il convenait de la renforcer. Dans ce cadre, que proposez-vous ?
D'une manière générale, le secteur aéronautique de la défense, dans l'offre française industrielle, constitue un pôle d'excellence mondial. Il y a donc en ce domaine des perspectives à maintenir, pour conserver l'atout français.
Merci par avance pour les éclairages que vous allez apporter à nos travaux. Je vous laisse la parole.
Merci, Monsieur le Président, et merci Mesdames les sénatrices et Messieurs les sénateurs, de m'accueillir ce matin, pour commenter l'actualité du Bourget, et surtout celle de la LPM.
En ce qui concerne le Rafale, il y a matière à satisfaction car « l'équipe France » a gagné ses paris sur cette exportation depuis longtemps attendue. Nous savions que le choix de la polyvalence du Rafale fait par nos armées et la direction générale de l'armement (DGA) était pertinent et que les forces étaient pleinement satisfaites du Rafale quand elles l'ont opéré tant en Afghanistan, qu'en Libye au Mali et plus récemment en Iraq. Cependant jusqu'à présent nous n'avions pas encore réussi à l'exporter. C'est désormais chose faite. Cette réussite provient, au-delà des qualités propres à l'avion et aux démonstrations faites par nos armées en opération, des évolutions d'un contexte stratégique et géopolitique. Cela a directement des effets dans la programmation militaire. En effet, sur 26 avions prévus dans la LPM, 12 sont déjà livrés. Il reste donc 14 Rafale à livrer. Si l'export n'avait pas été au rendez-vous, il y aurait eu un risque d'arrêt de la chaîne pendant plus de quatre ans, susceptible de porter préjudice à la production.
Aujourd'hui, il y a deux contrats en cours : celui qui concerne l'Égypte pour 24 avions, et celui qui concerne le Qatar pour 24 avions également -dont l'accord, signé, n'entrera en vigueur que lorsque nous aurons reçu le premier paiement. Je rappelle que lorsque les 14 avions restant sur les 26 avions prévus par la LPM seront livrés, nous serons à 152 Rafale livrés à l'issue de cette programmation. Ainsi, il restera tout de même, sur la commande de la quatrième tranche, 28 avions à livrer ; cette nouvelle série de livraisons devrait démarrer en 2019 ou 2020, cela reste à confirmer. Enfin, pour respecter le format de 225 avions défini par le Livre blanc pour les armées françaises, en tenant compte de l'attrition, c'est-à-dire des quelques appareils qui ont été perdus depuis la mise en service du Rafale, nous aurons des tranches supplémentaires pour une cinquantaine d'avions qui ne sont pas encore contractualisés.
Pour l'Inde, les négociations se poursuivent. Le schéma contractuel actuel vise à livrer 36 avions dans un premier temps produits en France contre 18 avions dans le contrat MMRCA. En ce qui concerne les 90 avions complémentaires pour arriver aux 126, dont la vente était initialement envisagée, rien aujourd'hui n'est assuré, mais pour répondre aux demandes des autorités indiennes de « Make in India », il y aurait intérêt à prévoir une construction locale pour ces futures commandes.
Le succès appelant le succès, d'autres pays sont aujourd'hui intéressés par le Rafale. Le contrat avec l'Égypte a véritablement ravivé l'intérêt d'un certain nombre de pays avec lesquels nous sommes en discussion ; de nouveaux contrats pourraient se conclure d'ici un an.
Dans le cadre du contrat avec l'Égypte et compte tenu du fait que c'était le premier contrat, l'État a accepté de prélever six avions Rafale sur les forces armées françaises. Trois premiers avions ont été mis au standard égyptien ces derniers mois et seront convoyés cet été vers l'Égypte. Trois autres avions biplaces ont été prélevés pour être livrés l'année prochaine, en avance de phase, à la demande des autorités égyptiennes. Ces six avions seront « remboursés » à l'Armée de l'air d'ici 2018, afin de ne pas gêner la montée en puissance du second escadron Rafale nucléaire. La montée en puissance de l'armée de l'air n'est donc absolument pas touchée par le contrat égyptien. Bien sûr, il faut former les pilotes égyptiens ; cela s'est réalisé au sein de l'armée de l'air, qui apporte dans ce domaine toutes ses compétences sous la responsabilité de Dassault. La tâche ne fut pas difficile car il s'agissait de former des pilotes aguerris de Mirage 2000 et de F16.
En ce qui concerne l'actualisation de la LPM, l'industrie s'est évidemment réjouie de la hausse du budget. Cependant, j'émets une réserve quant à la part du budget de la défense dans le PIB, qui reste insuffisante compte tenu des enjeux et de la cohérence du modèle français reposant sur une industrie qui apporte aux armées les outils de leur souveraineté. Avec un effort de 1,47 % du PIB, la France est éloignée du standard de l'OTAN visant un budget de défense égal à 2 % du PIB, hors pensions. Nous connaissons les contraintes budgétaires du moment, mais nous pensons que dans les années à venir, il faudra revoir cet effort de défense à la hausse, afin de conserver cet outil industriel qui, vous l'avez rappelé, est un succès ; non seulement car les matériels développés répondent de façon adéquate à la demande militaire, mais également car, grâce à l'export, nous avons obtenu un surplus profitable à notre balance commerciale. Ceci n'est pas négligeable pour l'emploi, les commandes à l'export visant des équipements construits sur le sol français. De plus, la technologie militaire permet de renforcer nos positions dans le domaine civil, qui favorise également la balance commerciale. Je vous rappelle que le chiffre d'affaires de Dassault provient à 80 % de l'export, alimenté par cette technologie duale. L'argent public qui est investi dans le secteur de la défense, et particulièrement dans l'aéronautique de défense, est donc véritablement bénéfique à l'économie française.
Concernant la marine, la LPM prévoit la modernisation de l'Atlantique 2, qui est en cours, et la livraison de Falcon 50 de surveillance maritime, qui se révèlent nécessaires au vu de l'actualité. Nous avons également réussi à exporter le Falcon 2000 de surveillance maritime, au Japon, qui était en concurrence avec l'américain Boeing allié au canadien Bombardier. Cette exportation, moins visible, nous ouvre toutefois une nouvelle voie et un nouveau produit, puisque le Falcon 50 n'est plus en production. La vente de ce Falcon 2000, équipé d'un radar Thalès, représente un réel succès qui prouve que la compétitivité française est une réalité dès lors que l'excellence est au rendez-vous.
La LPM prévoit aussi la préparation du futur qui, pour nous, est principalement tournée vers les UCAV (Unmanned Combat Air Vehicle) dans le cadre de la coopération franco-britannique issue des accords de Lancaster House. Il s'agit d'explorer la capacité de développer un avion de chasse commun sans pilote à bord ; le programme s'appelle FCAS DP (Future Combat Air System Demonstration Phase). Ces études ont été lancées l'année dernière et se poursuivent. Dans un an et demi, nous devrions savoir s'il y aura une étape ultérieure.
Enfin, nous pensons que l'Europe se doit de développer le domaine stratégique des drones de surveillance, et particulièrement les drones MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance), afin de s'autonomiser à l'égard des États-Unis. Nous en avons les capacités : nous avons les liaisons de données, les radars, l'électronique et la capacité de l'intégrer dans un objet volant, dans des réseaux. Nous nous sommes ainsi mis d'accord, avec Airbus et Finmeccanica, pour parvenir à une offre industrielle ; et nous nous réjouissons que les trois gouvernements, français, allemand et italien, aient signé une lettre d'intention. Nous attendons à présent un contrat vers l'industrie, qui tarde à venir. Vous avez certainement entendu mes propos relatant ces inquiétudes lors du Salon du Bourget, mais également ceux de Tom Anders. Nous reconnaissons que le Reaper est un bon drone, pour le moment ; mais nous revendiquons la préparation du futur et nous souhaitons que cela puisse se faire en Europe, car il s'agit d'un maillon important de la grande chaîne du système aéronautique. L'automatisation du champ de bataille est en marche et nous avons le choix entre être un sous-traitant des États-Unis ou continuer et poursuivre les efforts de la technologie pour équiper nos forces armées.
Nous avons bien compris les choix politiques et financiers qui doivent être faits pour les avions du futur, avions de combats et drones. Je souhaiterais réagir par rapport à un article récemment paru dans la presse, qui remettait en cause le taux de disponibilité du Rafale. Je souhaitais ainsi faire part de mon témoignage : j'ai eu l'occasion de me rendre sur plusieurs théâtres, sur lesquels les Rafales sont utilisés en opération, et sur le porte-avions, où j'ai constaté des taux de disponibilité supérieurs à 90 %. Le Rafale dit « nucléaire », intervient dans des opérations conventionnelles, où l'armée de l'air apprécie la dimension biplace et la complémentarité pilote-navigateur pour des bombardements ou interventions de longue durée.
Une question se pose au niveau industriel. Le nouveau plan de charge qui se présente à Dassault Aviation aujourd'hui va vous amener à modifier à la fois votre propre organisation et la chaîne de sous-traitance. Comment vous inscrivez vous dans cette perspective ? En ce qui concerne le FCAS, notre inquiétude tient au fait que le Royaume-Uni est engagé dans le JSF (Joint Strike Fighter- F35) qu'il considère comme l'avion du futur ; il convient donc de trouver, dans cette coopération naturellement très utile entre Français et Britanniques, un avenir qui débouche sur des projets industriels communs. Quelles sont les perspectives ?
Félicitations pour les contrats et négociations. Aujourd'hui, nous savons qu'ils concernent des avions construits en France, cependant les accords avec l'Inde prévoyaient une répartition du travail avec la société Hal ; qu'en est-il ? Quelles seraient les conséquences pour le développement national ? Vous aviez réagi face aux commandes de drones Reaper par la France, il y a deux ans ; vous avez toutefois continué à travailler sur des technologies que vous maîtrisez, quelles sont vos perspectives en la matière? Enfin, le succès dans vos négociations permettra-t-il le développement commercial du Falcon et d'autres projets ?
Un article de presse, il y a deux jours, évoquait un rapport du Général Palomeros datant de mars 2013, et un autre hier rapportait les propos d'un haut gradé de l'armée de l'air : ils se faisaient l'écho de problèmes de disponibilité des Rafale et mentionnaient également qu'un certain nombre de livraisons à l'armée de l'air seraient remises en question. Pourriez-vous nous éclairer sur ces propos ? Les ventes d'appareils aux pays étrangers impactent-elle également la version marine du Rafale ?
Vous avez mentionné que l'évolution technologique se fera avec ou sans l'Europe ; comment voyez-vous cette évolution ? L'Européen convaincu que je suis souhaiterait avoir votre vision sur les perspectives compte tenu du contexte financier...
et compte tenu des besoins d'indépendance nationale et européenne, qu'il est primordial de conserver !
Quelles sont les perspectives d'embauche à la suite de l'évolution des carnets de commande ? Dans quels secteurs peut-on espérer des embauches ? Ceci peut également être important en matière de formation.
Quelles sont les conditions financières des ventes de Rafale à l'export ? Il a été dit que ce serait la France qui paierait les Rafales de l'Égypte ; cela était très certainement excessif, mais des avantages ont-ils été concédés et lesquels ? Notre collègue Serge Dassault s'est plaint qu'au-delà du Rafale, il n'y aurait pas de projet en route ; Est-ce votre analyse ? Enfin, les projets d'avions sans pilote condamnent-ils le développement d'une nouvelle génération de chasseurs avec pilote du type Rafale?
Concernant la montée en charge industrielle du Rafale, je souhaiterais rappeler que les 24 avions vendus aux Qataris et les 24 autres vendus aux Egyptiens compensent les avions prévus pour les armées françaises, dont la livraison a ainsi pu être décalée dans la LPM. Par conséquent, à l'heure actuelle, avec ces deux contrats, nous ne montons pas la cadence production mais pallions le trou de production de la LPM.
Cependant, nous nous préparons effectivement à une montée en cadence à la suite du troisième contrat, voire d'un quatrième. J'ai décidé d'anticiper cette augmentation de cadence. Je rappelle que les livraisons initialement prévues pour la France devaient s'effectuer à cadence de 2,5 avions par mois ; aujourd'hui pour des raisons budgétaires, nous en sommes à un par mois, mais cela signifie que nous avons les outillages, la surface, et que toute la chaîne est prête. Nous allons donc recruter du personnel progressivement, de façon être capable d'atteindre la cadence 3, voire au-delà, en 2019 en termes de livraison, soit dès 2016 en termes de fabrication. Nos coopérants Thalès et Safran ainsi que l'ensemble des 500 sous-traitants environ qui travaillent dans l'écosystème du Rafale vont devoir se préparer à cette montée en cadence. Nous les avons déjà réunis. Ces PME et ETI sont satisfaites de cette montée en charge. Nous n'aurons donc pas de réels problèmes à faire cette montée en cadence et nous serons à même d'assumer d'autres contrats sous un an.
Dans cette optique, il est fondamental de pouvoir embaucher du personnel bien formé. Je me permets, à cet égard, une parenthèse : les formations ne sont pas adaptées, dans ce pays touché par le chômage, et particulièrement dans le secteur de l'aéronautique qui se porte bien et qui nécessite d'embaucher des ingénieurs, des techniciens et des compagnons compétents. Nous faisons en sorte de développer l'apprentissage le plus possible, à l'image de ce qui se fait dans la région Aquitaine où nous sommes largement implantés. Le Salon du Bourget, avec « l'avion des métiers », a également été l'occasion de faire connaitre et transmettre l'amour du métier. Le message que je souhaiterais faire passer au Parlement, c'est qu'il faut essayer de regarder les besoins de l'industrie en parallèle des besoins d'éducation. Il serait paradoxal de ne pas réussir à recruter dans un pays qui compte plusieurs millions de chômeurs !
La préparation du futur va pour nous jusqu'à l'après Rafale, étant précisé que le Rafale servira nos armées pour encore au minimum 30 ans. Nous tentons actuellement de concentrer nos efforts sur un moyen terme avec l'UCAV. Le démonstrateur Neuron, qui a effectué plus de 100 vols, a permis de démontrer deux choses : d'une part, nous arrivons, par une automatisation des lois de pilotage avec un donneur d'ordre, pilote au sol, à avoir des trajectoires préprogrammées qui répondent à des besoins de mission ; d'autre part, la furtivité est excellente puisque les résultats se sont révélés supérieurs à ceux que nous escomptions. Il est important de travailler dans ce secteur des avions de combat non pilotés, car le champ de bataille s'automatise et il est important que la France et ses partenaires soient au premier plan de cette recherche. Celle-ci a déjà été conduite au niveau technologique ; maintenant il convient de préciser cette expression de besoin. Nous l'aurions souhaitée européenne, elle est franco-britannique.
Par ailleurs, il résulte de l'absence de retour technologique de l'investissement de 2 milliards de livres sterling consenti par les Britanniques dans le développement du JSF un effet bénéfique sur la coopération franco-britannique. Les Britanniques vont certes obtenir des emplois dans la sous-traitance, grâce aux « offsets », mais cela pose la question que je soulevais dans mes propos liminaires : les Européens veulent-ils juste devenir les sous-traitants des Américains ? Ou désirent-ils conserver une certaine autonomie stratégique qui repose sur la maîtrise des technologies critiques de la défense? Je crois que les Britanniques souhaitent conserver cette autonomie qui est indispensable à la pérennité de leur industrie; il faudra simplement être très attentif au pilotage de la coopération franco-britannique, dans le cadre des accords de Lancaster House, renouvelés et alimentés par les autorités actuelles britanniques et françaises. Excepté l'Italie, il n'y a pas d'autre pays qui s'intéresse à ce projet.
Je me permets une remarque : il existe en Europe, encore aujourd'hui, une préférence américaine. Les pays européens ont tendance à suivre les recommandations de l'OTAN, sous l'influence particulière des États-Unis. Pour ce qui concerne l'aéronautique de combat, la réintégration de la France dans l'OTAN n'a eu aucun impact positif pour notre industrie. L'Europe doit donc s'organiser ; nous verrons ce qu'il ressort du Conseil européen dans quelques jours. L'objectif du dernier Conseil européen destiné à ces sujets, en 2013, était le développement du drone MALE. Or, aujourd'hui, seules la France, l'Allemagne et l'Italie ont exprimé leur volonté de construire un drone MALE. Pour le reste, l'Europe va se tourner à nouveau vers le Reaper. Nous ne souhaitons pas être des sous-traitants des États-Unis ; c'est pourquoi l'achat « sur étagère » des Reaper nous a toujours inquiétés. Certes, nous reconnaissons le besoin d'acheter « sur étagère » ces drones, pour répondre aux besoins des opérations à court terme, mais ce besoin constitue surtout le résultat du manque d'anticipation des Européens. En parallèle de cet achat, il est urgent que des études soient lancées pour engager la génération d'après. Toutefois, cela peut être rattrapé et nous, les trois industriels concernés, demandons une étude à hauteur de trois fois 20 millions d'euros pour pouvoir présenter, d'ici deux ans, ce que nous serions capables de produire.
En ce qui concerne le contrat Rafale avec l'Egypte, il s'agit d'un contrat à prix export normal, sur la base du prix France auquel s'ajoutent les frais liés à l'exportation.
Pour ce qui est de la marine, deux Rafale devraient être livrés en 2015 et deux autres en 2016. Il n'y a donc pas aujourd'hui de crainte à avoir en ce domaine. Le retrait des avions Super-Etendard est en cours de préparation, afin de passer en configuration exclusivement « Rafale » sur le porte-avions. Pour compléter le propos de M. Gautier, la disponibilité des Rafale sur le porte-avions est supérieure à 90 % et j'ai vu, lors de mes visites, tant sur le porte-avions que sur la base de l'armée de l'air d'Al Dhafra des aviateurs plus que satisfaits des qualités du Rafale. La problématique liée au contrat avec l'Égypte est une problématique de court terme ; les prélèvements sur les forces françaises sont tout à fait provisoires. Nous avons par ailleurs trouvé des accords, notamment avec la SIMMAD, pour obtenir des prêts de pièces de rechange que nous rembourserons en nature très rapidement, le temps de fabriquer ces éléments prélevés. Cela ne devait donc pas affecter les disponibilités d'avions sur l'année en cours.
En ce qui concerne les ventes de Falcon, il existe évidemment un effet psychologique du fait du succès de l'équipement militaire mais cela reste un marché très différent. Je vous rappelle que 2000 Falcon volent aujourd'hui partout dans le monde, selon des contrats qui ont été fait un par un, principalement à l'export ; ils ne sont pas particulièrement liés à l'actualité des ventes de Rafale. L'image, cependant, aide toujours à vendre, ainsi que les apports en matière de technologie.
La technologie duale développée dans nos bureaux d'étude permet en effet une fertilisation croisée entre le civil et le militaire ; le civil tire avantage du militaire, notamment sur les commandes de vol, mais le militaire tire réciproquement avantage du civil grâce au processus industriel que nous avons mis en place. Notre impératif sur le Falcon c'est d'être toujours plus compétitifs pour rester concurrentiels face à l'américain Gulfstream, implanté dans le Sud des États-Unis et bénéficiant d'un coût de main d'oeuvre bien inférieur à celui de la France, de capacités de recherche et développement conséquentes et de taxes et impôts largement inférieurs à ceux pratiqués en France. Tout cela permet de construire à moindre coût qu'en France ; c'est pourquoi nous avons dû ouvrir une usine aux États-Unis, et que nous la renforçons aujourd'hui, pour l'aménagement intérieur des Falcon. Cependant nous gardons sur le territoire français la construction des Falcon et des Rafale, en spécialisant les fabrications grâce à la robotisation, à la gestion du cycle de vie et au numérique, afin de rester compétitifs face aux États-Unis, pays à la fois « low cost » et « high tech ».
Dans le cadre de nos fonctions auprès de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, Xavier Pintat et moi avons assisté à une présentation du F16. Nous avons souhaité inviter les membres de la commission de défense et sécurité de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN à voir le Rafale lors de leur prochaine visite en France.
Un des succès de Dassault, c'est que pendant la crise vous avez maintenu votre équipe, notamment les chercheurs et les ingénieurs ; et cela a payé. Concernant les difficultés que nous avons avec les Européens, vous avez raison d'être inquiet. Avec le programme JSF, nous constatons que finalement tous les pays européens ont participé à un effort de recherche dont seuls les Américains ont bénéficié, puisque nous n'en avons rien retiré et que nous leur achetons leurs avions. Que peut-on faire pour mieux convaincre les Européens ? N'y-a-t-il pas de coopération entre sociétés européennes, notamment avec la Suède ? Existe-t-il une coopération avec la Chine ?
A l'inverse des Européens, les Américains ont compris que la puissance est issue non seulement du militaire, mais également de l'économie et de l'industrie. Cette puissance s'exerce, dans l'industrie, sous la forme de l'innovation, qui reste le moteur de l'économie, même en temps de crise. Les dépenses militaires aux États-Unis sont considérées comme bénéfiques par les autorités car elles vont irriguer l'industrie et donc l'économie ; cette vision n'est malheureusement pas partagée ici.
Nombre de pays achètent « sur étagère » aux États-Unis avec le sentiment de payer moins cher ; or, si l'on prend l'exemple des Pays-Bas, on constate que, pour des capacités opérationnelles et techniques égales, ils n'ont obtenu que 37 F35 pour le prix de 83 Rafale, tant la dérive du programme a été grande. Par conséquent, dire que le Rafale est cher est un mensonge. Bien sûr, le Rafale qui est un avion de combat reste par définition coûteux, mais il faut garder en mémoire qu'il a permis grâce à sa polyvalence de rationaliser les flottes en passant de plus de 600 avions de combats à 225.
Que faudrait-il faire pour modifier la vision des Européens ? Soyons pragmatiques : l'Europe d'aujourd'hui est une Europe de marché. Les lois de ce marché ouvert s'appliquent aux Européens seuls, alors que l'accès au marché américain leur est fermé. Une « préférence européenne » ne semble pas possible en raison de l'opposition d'un grand nombre de pays européens. La solution, ce sont les accords bilatéraux, comme ceux de de Lancaster House avec les Britanniques. Il convient donc de stimuler l'Europe. Nous devons aussi renforcer notre coopération avec l'Allemagne, qui reste le pays central en Europe et qui aura besoin de notre soutien dans le renouvellement de ses capacités opérationnelles.
Enfin, en ce qui concerne la Chine, nous sommes toujours sous embargo international de l'Union Européenne, d'une part, et des États-Unis, d'autre part. Ce rappel me permet de souligner que le seul endroit au monde où les budgets de défense sont en baisse, c'est l'Europe ; ils augmentent partout ailleurs, et particulièrement en Inde, Russie et Chine, et se stabilisent à 4 % du PIB aux États-Unis.
Je vous remercie Monsieur le Président. Vos propos sur l'Europe sont intéressants car ils mettent en évidence un certain manque de stratégie. Il faut en effet renforcer notre coopération avec l'Allemagne en particulier. D'une façon générale, il convient de chercher à intégrer pleinement le secteur aéronautique, dans lequel notre leadership international est reconnu, à notre stratégie de développement économique.
La commission examine le rapport de M. Jean-Pierre Raffarin et du texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 494 (2014-2015) actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense.
Je vous quitterai à midi car le Président de la République réunit les présidents des commissions parlementaires pour présenter les conclusions du Conseil de défense qui s'est tenu ce matin après les révélations par Wikileaks de l'écoute par la NSA des autorités françaises.
Je me limiterai à quelques observations générales sur l'actualisation de la loi de programmation militaire (LPM), avant de laisser la parole aux rapporteurs délégués, qui ont collectivement accompli un travail très important, de grande qualité, avec une expertise reconnue.
Les raisons qui nous poussent, au bout de dix-huit mois, à actualiser la douzième loi de programmation, couvrant la période 2014-2019, sont connues.
Les crises extérieures se sont accentuées : Daech est devenue une menace très sérieuse pour notre sécurité ; les « menaces de la force » ont fait leur retour, en Ukraine notamment, avec l'annexion de la Crimée et les actes de guerre dans le Donbass, que peine à contenir l'édifice de « Minsk 2 » créé par le dialogue de Normandie. Enfin, la menace intérieure, que le Livre blanc de 2013 avait pressentie, a pris dramatiquement corps avec les attentats de janvier.
Les « paris » engagés en 2013 se sont réalisés -ou pas- : en positif, avec l'exportation du Rafale, en négatif avec l'absence de produits de cession des fréquences hertziennes qui conduit aujourd'hui le gouvernement à budgétiser les ressources de la défense.
Revenons sur notre rôle : dès 2013, notre commission avait, par un amendement de tous ses rapporteurs en charge de la défense, introduit à l'article 3 la clause de sauvegarde, selon laquelle, en cas de défaut de recettes exceptionnelles (REX), des crédits budgétaires ou autres abonderaient les ressources de la défense pour permettre la réalisation de la programmation. Le Conseil de défense du 29 avril en a ainsi décidé.
De plus, notre contrôle sur pièces et sur place à Bercy le 12 mars sur « les sociétés de projet ou les solutions alternatives », notre débat du 2 avril au Sénat, préparant l'actualisation, ont été des catalyseurs de bonnes décisions. À force de crier qu'il manquait 3 milliards d'euros à la défense, nous avons fini par les obtenir, même si les sociétés de projet ont épouvanté Bercy. Nous sommes heureux des conclusions du Conseil de défense et des bons arbitrages du président de la République, chef des armées. Néanmoins, notre commission ne pourra accepter à l'avenir qu'un grand ministère puisse les contester durablement : nous serons vigilants.
Ce texte est satisfaisant à plus d'un titre : d'abord, il inverse la tendance. Pour la première fois depuis des années, la mobilisation budgétaire repart à la hausse. Ensuite, il fixe des priorités que nous partageons : la protection du territoire national, la cyberdéfense, le renseignement, l'aéromobilité, l'attention portée à l'entraînement, le rôle citoyen des armées, l'accent mis sur la réserve.
Pourtant, notre optimisme est loin d'être béat, car nous devrons attendre le collectif de fin d'année pour mettre en place les crédits budgétaires qui, pour l'instant, sont largement virtuels. Ainsi, la DGA va devoir dépenser 2 milliards d'euros entre le 30 et le 31 décembre ! Le collectif budgétaire devra être examiné le plus tôt possible.
Évidemment, comme avec la précédente LPM, tout se jouera dans l'exécution. Heureusement, nous avons voté en 2013 un « kit de pouvoirs de contrôle » qui se révèle bien utile pour évaluer la mise en oeuvre.
Les REX (immobilier et vente de matériel) qui demeurent à hauteur de 930 millions d'euros, ce qui est très important, nous préoccupent également. D'où des clauses de sauvegarde que nos rapporteurs nous présenteront pour faire appel aux crédits budgétaires.
Le calendrier nous incite également à la vigilance : même si 3,8 milliards d'euros supplémentaires sont annoncés, ce qui est une bonne nouvelle, rien n'est prévu pour 2015 et la majeure partie de l'effort serait fourni en 2018 et 2019.
Au-delà de l'aspect financier, nous mesurons la situation opérationnelle de nos armées, et les tensions sur l'armée de l'air et la marine en particulier, dont les engagements au-delà de leurs contrats opérationnels. Nous nous interrogeons sur les capacités du terrain à s'adapter à ces nouvelles situations et nous resterons vigilants.
J'ai des réserves à l'égard du texte de l'Assemblée sur les associations professionnelles. Nous en avons déjà parlé ici : nous nous trouvons dans une impasse juridique à la suite des décisions de la CEDH et les solutions qui s'offrent à nous ne sont pas forcément satisfaisantes. Le gouvernement avait présenté un texte a minima : je vous propose d'en revenir à sa version qui semble la plus raisonnable.
Le travail que nous avons effectué nous conduit à soutenir ce projet d'actualisation de la LPM, cette mobilisation en faveur de la défense, qui concerne à la fois notre capacité militaire, mais aussi l'excellence de l'industrie française et notre économie. Nous approuvons cette nette inflexion budgétaire, mais nous resterons vigilants car nous savons qu'une victoire sur Bercy n'est jamais définitive : chaque budget annuel est prétexte à une remise en cause, ce qui implique une mobilisation sans faille. C'est pourquoi nous proposerons des clauses de sauvegarde, afin que chacun prenne ses responsabilités.
La parole est maintenant à nos rapporteurs experts.
J'évoquerai l'aspect financier de la programmation militaire, qui est lié à l'évolution des effectifs. N'oublions pas que c'est la première fois qu'une LPM est réévaluée : saluons cette originalité. Satisfaction et vigilance seront les maîtres mots de mon exposé.
Les ressources sont augmentées de 3,8 milliards d'euros de 2016 à 2019. Cette évolution est liée à l'évolution des effectifs puisque la déflation envisagée préserve 18 750 postes. Je rappelle que la précédente LPM avait supprimé 54 000 postes. On ne pouvait plus poursuivre à ce rythme.
Il est logique que les plus fortes hausses budgétaires soient concentrées sur des deux dernières années de la programmation car l'essentiel de ces crédits est destiné à la masse salariale (2,8 milliards sur 3,8 milliards d'euros). La réduction d'effectifs étant étalée d'année en année, c'est en fin de période qu'elle sera la plus importante.
Un milliard d'euros sera consacré au matériel, dont la moitié pour l'achat d'équipements et l'autre pour l'entretien programmé du matériel. Vous connaissez les difficultés rencontrées avec le matériel qui rentre des Opex. Il ne s'agit pas d'acheter du matériel et de ne pas l'entretenir. La LPM prévoyait d'augmenter les crédits destinés à l'entretien, auxquels s'ajoutent ces 500 millions d'euros supplémentaires.
En outre, les opérations d'armement obtiendront la marge financière dégagée par les économies réalisées par le ministère de la défense, grâce à l'évolution favorable de certains indices économiques constatée depuis le vote de la loi de programmation, en décembre 2013 : prix du pétrole, cours de la monnaie et taux d'inflation moins élevés que prévu, la loi ayant été construite sur l'hypothèse d'une inflation de 1,5 % par an. Un milliard d'euros environ devrait ainsi être redéployé en faveur des équipements. Au total, 1,5 milliard d'euros de plus sera donc affecté à l'équipement des forces.
Autre satisfaction, qui répond à nos demandes répétées : la rebudgétisation des recettes exceptionnelles (REX). Alors que Bercy voulait ajouter des REX, nous nous y étions opposés et nous avions obtenu que des crédits budgétaires soient garantis lors du vote de la LPM. Avec cette nouvelle loi, ne demeureront en REX que 730 millions d'euros de cessions immobilières et 200 millions d'euros de cessions de matériels militaires. Cette décision démontre que les contrôles effectués par le Parlement ont porté leurs fruits. Nous avions marqué que ces recettes aléatoires dans le temps remettaient en cause la programmation militaire.
J'en arrive aux motifs de vigilance. D'abord, un système assez sophistiqué devrait permettre, après le vote du collectif budgétaire de fin d'année, de dépenser entre le 30 et le 31 décembre 2 milliards d'euros. Le but est d'éviter un surcroît de report de charges. Nous connaissons les risques de l'accroissement progressif de ces reports d'année en année. La LPM prévoyait leur stabilisation, puis leur réduction. Pour l'instant, ils seront stabilisés grâce aux 2 milliards d'euros qui doivent ainsi être dépensés en toute fin d'année. Faisons donc confiance aux comptables pour réussir cet exploit inédit !
Ma seconde inquiétude pour cette année tient à l'opération Sentinelle qui coûte, d'après la Cour des comptes, un million d'euros par jour, soit environ 300 millions d'euros cette année. Pour financer cette opération, il faudra lever la réserve de précaution du ministère de la défense plus rapidement que d'habitude.
J'aborderai, avec Xavier Pintat, le volet capacitaire de la LPM.
Même si les équilibres fondamentaux ne sont pas bouleversés, cette actualisation apporte divers ajustements importants : amélioration du maintien en conditions opérationnelles (MCO) ; confirmation de commandes et de livraisons supplémentaires. Nous en restons au Livre blanc de 2013 et l'objectif du modèle d'armée retenu à l'horizon 2020, 2025 pour la marine, demeure inchangé.
Le calendrier des programmes d'armement prévus est bien respecté. En particulier, les programmes à effet majeur « Scorpion » pour l'armée de terre et « MRTT » pour l'armée de l'air ont été lancés à l'automne dernier, de même que, début 2015, la réalisation du système de renseignement par satellite « CERES ». Aucun retard n'est à signaler, au-delà de légers glissements, d'ordre technique. L'indisponibilité périodique pour entretien et réparation (IPER) du porte-avions Charles de Gaulle est prolongée de quelques mois, à cause de nécessités industrielles, et la livraison du premier sous-marin nucléaire d'attaque (SNA) Barracuda construit à Cherbourg sera également décalée de quelques mois, pour la raison technique que nous avait exposée l'amiral Rogel. Nous resterons cependant vigilants sur le calendrier de la LPM.
Cette actualisation répond aux nouveaux enjeux stratégiques et aux besoins de sécurité accrus. Outre la cyberdéfense - pour laquelle est prévu, notamment, le recrutement d'un millier de civils et militaires d'active supplémentaires -, la mise à jour capacitaire vise d'abord le renseignement, avec les objectifs en matière de satellites et de drones qu'évoquera M. Xavier Pintat. Outre le domaine aérien, sur lequel je reviendrai, l'effort concerne les forces terrestres, avec l'accélération de la régénération du parc des 800 véhicules blindés légers (VBL) affectés aux opérations extérieures et qui vont être rapatriés. En opération, ces véhicules vieillissent beaucoup plus vite que prévu : il faut donc les remettre à niveau.
Le format de marine à quinze frégates de premier rang, complétées par des frégates de taille intermédiaire de 4 000 tonnes, plus faciles à exporter, sera maintenu. En outre, ce projet de loi confirme l'achat d'un quatrième bâtiment multi-missions (B2M) et l'acquisition patrimoniale de quatre bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers (BSAH), pour les territoires et les départements d'outre-mer.
Depuis notre rapport sur les forces spéciales, nous sommes particulièrement attentifs à leur situation : elles bénéficieront de l'acquisition d'un parc de jumelles de vision nocturne haute performance (16 000 euros pièce), indispensables puisque leurs interventions ont lieu surtout la nuit ; 25 véhicules de patrouilles lourds seront rapidement livrés et certains avions de transport C130-H (Hercules) disponibles à l'escadron Poitou bénéficieront enfin d'un armement offensif, afin de soutenir au sol les opérateurs parachutés.
J'en reviens donc à l'aérien, dont la programmation fait l'objet d'une actualisation substantielle car nous devons pouvoir apporter du matériel et des troupes au loin. Le général Bosser et le général de Villiers nous ont présenté ces brigades aéromobiles.
Les hélicoptères tiennent une place essentielle dans les Opex, mais les appareils sont très sollicités. D'où l'acquisition de sept hélicoptères Tigre supplémentaires, qui seront livrés à l'armée de terre en 2017 et 2018. Il s'agit d'aboutir à un parc de 67 Tigre fin 2019, au standard HAD (hélicoptère appui-destruction), contre 60 selon la LPM initiale. Les 39 Tigre actuels seront progressivement portés à ce standard. Hier soir, nous en avons débattu avec des représentants d'Airbus Helicopters : plutôt que de rénover et de transformer des HAP (hélicoptère appui-protection) en HAD, nous préférons obtenir sept hélicoptères neufs tout de suite et repousser de deux ans la transformation des hélicoptères actuels. Les forces y sont très favorables.
Est également prévue la livraison de six hélicoptères supplémentaires NH90 (dits Caïmans) de version TTH (transport tactique), qui remplaceront progressivement les hélicoptères Puma de l'armée de terre dont la flotte est âgée d'une quarantaine d'années. La livraison de 44 appareils est désormais attendue, d'ici 2019, contre 38 dans la LPM initiale. Le montant prévisionnel de cette commande s'élève à 260 millions d'euros.
Ces renforts, néanmoins, ne présenteront d'intérêt réel que s'ils sont accompagnés d'un effort de maintenance du parc d'hélicoptères existant. Pour l'heure, le taux de disponibilité des Tigre demeure très faible : sur un parc d'exploitation opérationnelle de 35 appareils, 12 seulement sont disponibles. À l'attrition rapide en opérations, s'ajoutent des difficultés techniques des chaînes d'approvisionnement en pièces de rechange, dont les délais de livraison sont longs et, surtout, le vice originel, que nous avions dénoncé à l'époque, de n'avoir acquis que 20 lots de rechange, c'est-à-dire de pièces détachées, pour une commande de 40 Tigre. Très rapidement, l'armée de terre n'a pu faire voler que 20 d'entre eux.
Un plan de réorganisation générale du maintien en condition opérationnelle de ces appareils est engagé, afin d'obtenir des lots de pièces détachées supplémentaires, notamment pour les hélicoptères en opération. Ce plan nous permettra de contractualiser avec les industriels un nouveau pacte de responsabilité, le premier ayant été mal conçu. Enfin, les armées ne disposent plus de maintenanciers en nombre suffisant pour entretenir les hélicoptères. D'où le recrutement de 135 postes supplémentaires d'ici à 2019.
L'actualisation concerne, en deuxième lieu, l'aviation de combat. Je ne reviens pas sur l'exportation du Rafale. Nos inquiétudes sur les livraisons ont été levées et un accord est intervenu afin d'honorer les commandes prévues dans la LPM. La prévision initiale en volume sera maintenue et nous disposerons donc bien d'un second escadron de Rafale nucléaires avant 2018, afin de remplacer les Mirage 2001 d'Istres, sachant que ces Rafale dits nucléaires pourront mener des missions conventionnelles.
Il est aussi prévu d'acquérir 25 nacelles supplémentaires de désignation laser de nouvelle génération, dites TALIOS (Targeting Long range Identification Optronic System) pour les avions Rafale et Mirage 2000. Cette prévision s'ajoute à celle de 20 pods déjà prévus en 2013.
En troisième lieu, l'actualisation concerne le transport aérien. Le rapport annexé à la LPM est modifié afin de mentionner que « sera étudiée » la mise à disposition, d'ici à 2019, d'une capacité de quatre avions C 130 supplémentaires, dont deux équipés pour ravitailler en vol les hélicoptères. Nous manquons en effet d'allonge et nos hélicoptères sont forcés de s'arrêter en cours pour se ravitailler dans le désert. Il s'agit de répondre à la tension apparue, depuis 2013, sur la capacité de projection aérienne tactique. Les quelques Transall C160 qui nous restent sont peu disponibles et coûtent cher en entretien. La montée en puissance de l'A400M, dont le septième appareil a été livré dimanche dernier, répondra, mais avec retard, à nos demandes. Nous allons donc demander aux Américains de nous vendre soit quatre C130H d'occasion, soit des C130J neufs, disposant d'un système de ravitaillement pour les hélicoptères.
Nous avons anticipé la commande des trois derniers avions ravitailleurs de la flotte, passant de neuf à douze MRTT (Multi Role Tanker Transport) prévus. Lors de la LPM en 2013, j'avais présenté un amendement prévoyant cet effort supplémentaire mais il avait été rejeté. Nous avons besoin de ces appareils pour remplacer les C135 qui ont en moyenne une cinquantaine d'années. Ils sont nécessaires pour notre force aérienne stratégique mais aussi pour toute intervention de l'armée de l'air : deux MRTT seront donc livrés plus tôt.
Je souscris bien sûr aux propos de mes collègues rapporteurs du programme 146 sur les aspects financiers et sur le volet capacitaire en général. Mes observations concernent le spatial militaire et les drones.
L'actualisation de la LPM ne modifie pas les équilibres fondamentaux définis en 2013 et ne remet pas en cause le principe de la dissuasion nucléaire, ni ses deux composantes océanique et aéroportée. L'importance de l'effort budgétaire en faveur de la dissuasion est confirmée : il représente 19,7 milliards d'euros pour 2015-2019, soit 12 % du budget de la défense sur cette période.
L'actualisation, en revanche, renforce sensiblement les prévisions de capacités en faveur du renseignement. L'adaptation à la menace actuelle justifie deux mesures importantes.
Premièrement, nos capacités d'observation spatiale sont renforcées par l'acquisition d'un troisième satellite CSO (capacité spatiale d'observation), dans le cadre du programme MUSIS (système multinational d'imagerie spatiale pour la surveillance, la reconnaissance et l'observation), en coopération avec l'Allemagne. Le conseil des ministres franco-allemand qui s'est tenu à Berlin le 31 mars a décidé de mettre en place une coopération entre le futur système allemand d'observation radar par satellite, dit « SARah » et le système CSO, en cours de réalisation sous responsabilité française, qui est la composante optique du programme MUSIS. L'accord comprend, pour la France, l'acquisition d'un segment sol SARah et, pour l'Allemagne, l'acquisition d'un segment sol CSO. Ces segments permettront l'échange d'images entre pays. Cet accord prévoit également le financement par l'Allemagne, aux deux tiers - soit 200 millions d'euros-, d'un troisième satellite CSO, de reconnaissance. La mise en service opérationnel de ce satellite « CSO 3 », à la suite de celle des satellites « CSO-1 » et « CSO-2 » prévue en 2018-2019, est programmée pour 2022.
Deuxièmement, il est désormais prévu d'acquérir une charge utile de renseignement d'origine électromagnétique sur drone MALE (Moyenne altitude longue endurance) Reaper, en vue de renforcer l'appui de nos forces en opérations extérieures. L'acquisition de Reaper avait été fortement soutenue par la commission, à l'initiative des rapporteurs du programme 146. Les deux systèmes, composés de trois vecteurs chacun, qui sont actuellement en possession de nos armées, servent de manière intensive dans la bande sahélo-saharienne et nos forces ne peuvent désormais plus se passer de cet apport essentiel.
L'actualisation de la LPM confirme la livraison de douze drones MALE au total sur la durée de la programmation. Leur efficacité sera accrue grâce à l'acquisition d'une charge utile de renseignement électromagnétique désormais prévue. La piste privilégiée est celle d'une charge américaine, conçue spécifiquement pour les Reaper. Une proposition est en cours d'examen, afin de vérifier que la charge est techniquement intégrable dans la chaîne de renseignement française et qu'elle répond au concept d'emploi national. L'objectif serait d'en disposer dès 2016.
Parallèlement, l'effort de recherche pour une nouvelle génération de drones MALE, à l'horizon 2025, se poursuit. Le 18 mai, en effet, une lettre d'intention entre l'Allemagne, l'Italie et la France a été signée : une étude d'environ deux ans devra déterminer les prérequis opérationnels et élaborer un prototype. Le contrat sera attribué dans le courant de l'année et le montant en serait de l'ordre de 60 millions, partagé entre les trois pays partenaires. La démarche, du reste, est ouverte à d'autres partenaires éventuels, en vue de définir un besoin européen commun.
L'actualisation de la LPM tient également compte des avancées réalisées dans le domaine des drones tactiques. Le programme « SDT » (système de drones tactiques) se poursuit, visant à remplacer, à l'horizon 2017, le système de drones tactiques intérimaires (SDTI) actuellement en service dans l'armée de terre. L'actualisation intègre la poursuite d'études pour l'installation de drones tactiques sur des bâtiments de la marine, menées depuis 2008. L'objectif est de les déployer, notamment sur les futures frégates de taille intermédiaire (FTI), après 2019.
Un mot, pour finir, sur les risques, liés à l'utilisation de « mini-drones », récemment apparus avec quelque 67 survols illégaux d'installations sensibles répertoriés. L'actualisation de la LPM prend en compte ce risque et, même si la menace n'est pas avérée, elle est potentielle pour les activités de la défense.
Il est expressément prévu qu' « une première réponse sera mise en place, avant la fin 2015, par l'achat de moyens existants », afin de détecter, localiser, identifier et éventuellement prendre le contrôle ou détruire ces mini-drones.
Dans le cadre de travaux interministériels menés sous l'égide du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), des solutions capacitaires et d'évolutions des règles de mise en oeuvre sont recherchées. Une campagne d'essais a été menée sur le site de Captieux du centre d'expériences aériennes militaires de l'armée de l'air, avec le concours d'industriels, afin de permettre aux ministères et opérateurs concernés d'acquérir au plus vite les premiers éléments de protection, à partir des solutions technologiques existantes et des matériels disponibles à court terme.
Je salue la présence parmi nous de M. Dominique de Legge, rapporteur pour avis de la commission des finances.
Le projet de loi révise les cibles de déflations d'effectifs prévues par la LPM, afin de tenir compte du nouveau contexte sécuritaire et des besoins qu'il implique. Sur ces 18 750 déflations évitées, 13 400 serviraient à renforcer la mission de protection, afin de pérenniser l'opération Sentinelle, qui déploie en permanence de 7 000 hommes sur le territoire, et de protéger les installations militaires (mission Cuirasse). De plus, 900 postes bénéficieraient au renseignement et à la lutte informatique et 950 à d'autres missions comme le soutien à l'exportation. Il faut noter qu'environ 3 500 « moindres déflations » correspondraient à des déflations non réalisables, c'est-à-dire pour lesquelles le ministère de la défense ne parvient pas à identifier les postes à supprimer. Au total, 95 % de l'allègement des déflations bénéficiera aux forces armées.
En dépit de cette révision, la « manoeuvre » ressources humaines (RH) se poursuit. Le premier enjeu de la programmation à cet égard consiste à obtenir un flux de départs suffisant. Plusieurs mesures ont ainsi été prévues dans la LPM en 2013 pour encourager les militaires à quitter l'institution : le pécule modulable d'incitation au départ, la pension afférente au grade supérieur (PAGS), la promotion fonctionnelle et la disponibilité rénovée. Ce projet de loi abaisse de cinq à deux ans la condition d'ancienneté de grade pour pouvoir bénéficier la PAGS. Pour la promotion fonctionnelle, le texte fixe une condition unique de durée de service de 15 ans pour tous les militaires, alors qu'elle est actuellement de 27 ans pour les officiers et de 17 ans pour les sous-officiers.
Le projet assouplit les dispositifs d'accès des militaires à la fonction publique, en facilitant notamment l'accès des militaires aux concours internes.
Si les aides au départ contribuent à la réalisation des déflations, elles sont aussi un moyen de modifier la pyramide des âges. Cet objectif demeure en effet, même s'il n'est plus chiffré comme dans la LPM initiale. Il s'agit d'un « dépyramidage » infra-catégoriel, visant, à l'intérieur d'une catégorie d'emploi, principalement celle des officiers, les grades supérieurs.
J'en arrive aux associations professionnelles de militaires. Par deux arrêts du 2 octobre 2014, la France a fait l'objet d'une double condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en raison de l'interdiction faite aux militaires de créer et d'adhérer à des groupements ayant pour but la défense de leurs intérêts professionnels. M. Bernard Pêcheur nous a présenté le rapport qu'il a rendu au Président de la République en décembre et ce projet de loi s'en inspire étroitement. Il s'efforce d'abord d'assurer la conformité de notre législation avec la jurisprudence de la Cour de Strasbourg. Certes, il y a d'anciennes et fortes raisons pour justifier l'interdiction des syndicats dans l'armée, comme la sauvegarde de la nécessaire libre disposition de la force armée, récemment évoquée par le Conseil constitutionnel. Toutefois, si la France refusait cette mise en conformité, elle subirait condamnation sur condamnation, ce qui n'est pas envisageable. Le projet de loi crée un nouveau régime juridique, celui des associations professionnelles nationales de militaires (APNM). Ces organismes ne jouiront pas de tous les droits des syndicats au sens classique, d'autant que la CEDH ne nous y oblige pas. Ces associations seront dotées d'un certain nombre de prérogatives de base : droit d'ester en justice et de se porter partie civile dans certains cas et, pour les associations reconnues représentatives selon des critères de respect de la loi et de nombre d'adhérents, droit de participer au dialogue organisé, au niveau national, par les ministres de la défense et de l'intérieur, ainsi que par les autorités militaires, sur les questions générales intéressant la condition militaire.
Le projet de loi a prévu des garanties assez sérieuses pour éviter une dérive de ces associations. D'abord, le droit de grève et le droit d'organiser des manifestations publiques ne sont pas reconnus. Ensuite, l'activité des associations devra rester dans le champ de la « condition militaire » définie par l'article 5, de manière à exclure les questions d'organisation et, bien entendu, tout ce qui touche aux opérations. De même, le droit d'ester en justice exclut expressément les mesures d'organisation. Enfin, les associations seront dissoutes par le juge, à la demande de l'administration, en cas de non-respect des règles fixées par la loi.
La commission des lois de l'Assemblée a, selon Gilbert Roger et moi-même, légèrement déstabilisé ce dispositif, qui semblait globalement équilibré. Nous vous proposerons donc trois amendements afin d'en revenir, pour l'essentiel, au texte initial.
J'évoquerai les restructurations, les réserves et le service militaire volontaire.
Le plan de restructurations pour 2015, annoncé le 15 octobre 2014, n'est pas remis en cause par la réduction des déflations d'effectifs. Le projet global de transformation des armées, directions et services, demeure d'actualité. Toutefois, pour l'avenir, les restructurations devraient être atténuées et concerner plutôt les directions et les services que les régiments.
Après l'entrée en vigueur de la loi, il serait souhaitable de disposer assez rapidement d'une vision d'ensemble des restructurations programmées au niveau des territoires, pour la période 2015-2019, afin que l'actualisation de la LPM ne suscite pas trop d'espoirs qui pourraient ensuite être déçus en cas d'annonce de fermeture de telle ou telle nouvelle base.
J'en viens aux réserves. Le projet de loi assouplit le recours à la réserve opérationnelle, en cas de crise menaçant la sécurité nationale. Ce dispositif est sans doute souhaitable, mais sa portée est relativement limitée au regard de la volonté de passer de 28 000 à 40 000 réservistes (hors gendarmerie). Nous devrons veiller à ce qu'une nouvelle politique des réserves soit réellement mise en oeuvre et dotée de moyens budgétaires suffisants.
Pour moderniser et faire monter en puissance les réserves, une campagne de sensibilisation semblable à celle menée pour le recrutement pourrait être lancée. Il conviendrait aussi de réfléchir à des aménagements juridiques et financiers qui ne sont pas consensuels, d'améliorer l'employabilité des réservistes, non seulement pour la réserve de premier niveau mais aussi pour la réserve de disponibilité, qui a vocation à intervenir en cas de crise majeure et dont le suivi des effectifs doit être renforcé.
Enfin, le projet prévoit l'expérimentation pendant deux ans, à compter du 1er septembre prochain, d'un service militaire volontaire (SMV), annoncé par le Président de la République en février à la suite des attentats de janvier, afin de transposer en métropole le service militaire adapté qui fonctionne bien outre-mer depuis 1961.
Les jeunes âgés de 17 à 25 ans qui sont très éloignés de l'emploi pourront conclure avec le ministère de la défense un contrat dont la durée sera comprise entre six et douze mois. Ils seront encadrés par des militaires qui assureront une formation militaire d'environ un mois, ainsi qu'une formation civique et scolaire en tant que de besoin. Une formation professionnelle pourra également être proposée, en s'appuyant notamment sur les écoles des armées, mais aussi sur des grandes entreprises partenaires comme la SNCF. Les jeunes pourront effectuer des missions de sécurité civile et participer à des chantiers d'application. Ils bénéficieront d'une solde d'environ 340 euros par mois.
L'expérimentation concernera 1 000 jeunes, encadrés par 256 militaires. Il est encore un peu tôt pour estimer précisément le coût du dispositif mais les armées avancent un montant de 35 millions d'euros sur deux ans. Nous vous proposerons quelques amendements. Le principal vise à mutualiser le financement de l'expérimentation entre les différentes missions du budget de l'État qui contribuent à l'insertion professionnelle des jeunes, bien que chacun veuille rester maître en sa chapelle... Il ne serait pas normal que la mission « Défense » finance seule cette expérimentation, où l'armée apporte une réelle plus-value, mais qui ne constitue pas son coeur de métier.
Je rappelle que cette tentative de transposition du SMA en métropole n'est pas la première. En 2005 avait été créé l'Établissement public d'insertion de la défense (Epide) qui ne porte plus de défense que le nom. Prévu au code de la défense, placé sous triple tutelle des ministères de la défense, de l'emploi et de la ville, l'Epide répond aux mêmes objectifs que le SMV. Diffèrent seulement le statut des jeunes, civil d'un côté, militaire de l'autre, et l'encadrement, même si celui de l'Epide est constitué pour un tiers d'anciens militaires. Nous interrogerons le ministre sur les raisons qui ont amené la défense à se retirer progressivement de la gouvernance de l'Epide.
Voici quelques informations rapides sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces ».
Alors que le maintien en condition opérationnelle (MCO) et l'entretien programmé des matériels (EPM) avaient beaucoup souffert dans les LPM précédentes et que nous avions atteint un palier inquiétant, la loi de 2013 a marqué un revirement sensible. Il y est inscrit que l'EPM progressera de 4,3 % par an en moyenne entre 2014 et 2019, afin de stabiliser l'activité et la préparation.
Ce projet prévoit un double mouvement dont nous nous félicitons, mais sur lequel nous devrons rester vigilants. Sur les 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires pour la défense, 500 millions seront consacrés entre 2016 et 2019 à la régénération des matériels. Les armées ne nous ont pas encore fourni un calendrier et une répartition précise de ces crédits mais il est encore tôt. Dans le même temps, l'évolution favorable de différents facteurs économiques permet une sous-exécution des crédits à hauteur d'un milliard d'euros pour l'ensemble de la mission « Défense ». Sans que cela soit précisé, le programme 178 abonde certainement de manière importante cette enveloppe d'économies. Or il serait paradoxal de sous-exécuter les crédits budgétés, de transférer cette « économie » vers un autre programme et d'abonder en même temps le programme 178 de 500 millions d'euros.
Nous devrons rester vigilants sur l'exécution effective des crédits de MCO et d'EPM, d'autant que cette enveloppe supplémentaire de 500 millions est essentielle pour rattraper le retard accumulé les années passées et faire face aux conséquences du niveau élevé d'engagement de nos armées. Selon le général de Villiers, « c'est un minimum, car actuellement, nous consommons plus vite que nous sommes capables de régénérer ». Les matériels sont aujourd'hui mis à rude épreuve, notamment avec l'opération Barkhane dans le Sahel. Certains ne sont pas récupérables.
La révision de la LPM supprime la phrase où les crédits d'EPM progressent de 4,3 % par an en moyenne ; elle conserve toutefois un montant en valeur absolue de 3,5 milliards d'euros par an en moyenne contre 3,4 milliards dans la LPM de 2013.
Le niveau actuel d'engagement, extérieur et intérieur, sollicite les matériels, mais d'abord les hommes de façon intensive. De nombreux congés ont été annulés, des militaires repartent plus fréquemment en Opex, la préparation a été réduite, ce qui n'est pas satisfaisant car elle est indispensable à l'efficacité mais surtout à la sécurité de nos soldats.
La perspective de mobiliser dans la durée 7 000 hommes sur le territoire national pour une opération intérieure doit nous amener à réfléchir à la doctrine d'emploi de ces forces. Comment adapter la formation et la préparation à ces missions nouvelles dans de telles circonstances ? Quels sont les sites à protéger ? Comment le faire au mieux ? Quel est le cadre juridique de ces interventions ? Les procédures actuelles de légitime défense sont-elles adaptées ? Quelle chaine de commandement mettre en place ? Ces questions sont importantes et relativement inédites dans la culture française où les militaires, hormis les gendarmes, ne sont pas appelés à intervenir intensément sur le territoire national.
Le Président de la République a demandé au Premier ministre d'engager une réflexion sur ce sujet : nous souhaitons que le Gouvernement transmette au Parlement le résultat de ses travaux et que le rapport fasse l'objet d'un débat.
Il existe d'autres préoccupations liées à la préparation et à l'emploi des forces mais je ne souhaite laisser la place au débat.
M. Pozzo di Borgo, rapporteur délégué sur ce sujet, est excusé car il participe aux travaux du Conseil de l'Europe.
Je souligne simplement que les événements en Irak, en Syrie, en Ukraine et ailleurs ont démontré le caractère crucial du renseignement. Je me réjouis que le LPM crée 900 emplois supplémentaires, dont les 250 annoncés par le Premier ministre en janvier. Il s'agit de linguistes, d'analystes et de spécialistes de décryptage.
Enfin, il conviendra de mieux mesurer la traçabilité des ressources lorsque la loi sur le renseignement, que nous achevons d'examiner, sera mise en oeuvre.
Au total, le gouvernement nous fait d'excellentes propositions sur le programme 144.
L'actualisation ne porte que très marginalement sur la recherche en matière de défense.
Première observation : la sécurisation des ressources sanctuarise l'effort de recherche qui a souvent servi de variable d'ajustement en période de tension budgétaire.
Deuxième observation : le texte ajoute une priorité en matière de lutte anti-drone, grâce à la prise de conscience de la menace que peuvent représenter ces appareils. La France comme l'Europe se sont laissé dépasser en matière technologique dans le domaine des drones militaires. Ces appareils sont produits par de nombreux pays, dont la Russie et surtout la Chine qui sera le premier producteur et le premier exportateur dans dix ans.
Près de 80 pays disposent désormais de drones. Un processus de prolifération est donc en cours.
Des plateformes armées sophistiquées de type UCAV (Unmanned Combat Air Vehicle) intégrées dans des systèmes aériens complexes sont réservées à quelques grands pays technologiquement avancés. Ces nouveaux engins procureront des capacités d'allonge considérables ; les possibilités de ravitaillement en vol leur permettront de saturer les défenses ennemies.
À l'autre extrémité du spectre, des drones plus rustiques seront à la portée de nombreux États, mais aussi d'organisations diverses, y compris terroristes. Contre cette menace, les défenses aériennes doivent être adaptées et les implications de cette prolifération prises en compte par l'armée de l'air. Pour l'heure, le ministère de la défense travaille à la mise au point de mesure de protection des sites sensibles et de détection des mini-drones. Il importe que cette lutte soit inscrite dans les finalités des études amont. À défaut d'avoir pu maitriser la technologie des drones militaires, la France, pour ne pas être vulnérable, doit engager les études capacitaires et de doctrine nécessaires.
Je regrette seulement que l'enveloppe des crédits destinés aux études amont, fixées à 730 millions d'euros en moyenne annuelle pour toute la période de la programmation, n'ait pas été réévaluée. Je crains que l'ajout d'une nouvelle priorité n'entraîne des réductions sur d'autres programmes. J'interrogerai M. le ministre sur ce point en séance publique.
Le rapport annexé confirme des accords de coopération portant tels que celui conclu avec l'Allemagne et l'Italie pour une nouvelle génération de drone MALE.
Comme je me félicite de l'abandon des sociétés de projet et des engagements du général de Villiers, je ne peux pas émettre d'avis négatif sur la programmation des crédits d'études et de recherche. En revanche, je m'inquiète de la vente des fréquences hertziennes alors que SFR paraît se lancer à la conquête de Bouygues...
Tout a été fort bien dit. Au groupe UDI-UC, nous sommes plusieurs à estimer qu'il faut voter ce projet de loi, d'autant que nous avons bataillé pour obtenir l'actualisation de la LPM. Bien sûr, tout n'est pas parfait, mais les temps sont durs et nous devons nous inspirer de la stratégie de la tortue : faire le dos rond en attendant que la situation économique s'améliore.
L'essentiel, dans cette guerre asymétrique dont nous sommes partie prenante, est d'éviter le décrochage, qui rendrait difficile le rattrapage du temps perdu.
Des solidarités nouvelles sont à inventer, en premier lieu, avec l'Europe qui devrait être davantage concernée. En votant ce projet de loi, nous consoliderons cette première étape.
Les gendarmes sont et restent des militaires, même s'ils sont sous l'autorité du ministère de l'intérieur. Or, je n'ai rien vu les concernant dans ce projet de LPM.
Le groupe socialiste votera ce projet de loi.
L'expérimentation du service militaire volontaire doit être menée, surtout pour soulager la sécurité civile. Outre-mer, nous avons mesuré les bienfaits de ce dispositif.
Les associations professionnelles s'imposent à nous : le Gouvernement a estimé que la LPM devait traiter du sujet en raison de l'urgence du dossier. L'Assemblée nationale a un peu aggravé la situation : nous souscrirons aux amendements de notre commission afin d'en revenir au texte du Gouvernement.
Le groupe socialiste soutiendra des deux mains cette actualisation originale, qui réévalue, pour la première fois, une LPM.
Le groupe Les Républicains se félicite de cette actualisation. Lors du vote de la LPM, nous avions déploré la baisse trop importante des effectifs : elle est corrigée. Nous avions aussi marqué notre inquiétude quant aux REX : elles deviennent des crédits budgétaires. Les exportations sont au rendez-vous. Enfin, les crédits d'équipement repartent à la hausse.
Notre vigilance sera néanmoins toujours grande, car Bercy n'aime pas les lois de programmation. Nous devrons donc défendre avec constance, loi de finances après loi de finances, cette LPM.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains s'abstiendra positivement et la quasi-totalité des commissaires membres de notre groupe votera ce projet de loi.
Nous approuvons le rapport pour sa rigueur et à sa vigilance, mais cela ne préjuge pas de notre vote en séance. En effet, l'actualisation de la LPM a lieu dans un climat marqué par les menaces bien réelles qui pèsent sur le monde, auxquelles nous n'échappons pas. Nous devons nous placer à la hauteur de la gravité des enjeux, sans polémiques politiciennes.
D'un côté nous apprécions les inflexions, notamment la pause dans la baisse des effectifs et le petit coup de pouce budgétaire, le reformatage de notre modèle de ressources humaines ou la réduction du taux d'encadrement, et surtout la reconnaissance du droit d'association des militaires, certes a minima, mais qui constitue un progrès social. Bien sûr, nous préférons la version de l'Assemblée nationale.
En revanche, nous sommes toujours en désaccord avec la sanctuarisation politique et financière de l'arsenal nucléaire au détriment des forces conventionnelles. Nous continuons de penser que des choix plus clairs devraient être faits pour que notre outil de défense réponde véritablement aux défis d'aujourd'hui et aux priorités diplomatiques de la France.
Comme notre opposition de fond à la stratégie développée dans le Livre blanc puis dans la LPM l'emporte sur les avancées de l'actualisation, notre groupe votera probablement contre ce projet de loi en séance.
La commission des finances a émis un avis globalement positif sous réserve de quelques amendements.
Actuellement, nous sommes toujours sous le régime de la loi de finances de 2015, donc les REX de 2,2 milliards d'euros figurent encore dans le budget. À quel moment le gouvernement traduira-t-il concrètement de façon budgétaire sa décision de supprimer les REX liées aux fréquences pour les remplacer par des crédits budgétaires ?
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Comme nous le faisons habituellement, je vous propose de réserver la discussion de l'article 1er et du rapport annexé à la fin de l'examen de ce texte, ainsi nous commencerons la discussion par la programmation.
L'article premier et le rapport annexé sont réservés.
Article 2
L'amendement n° COM-7 améliore les clauses de sauvegarde relative aux REX qui concernent les cessions immobilières et de matériel. Au cas où ces REX ne seraient pas réalisées, nous proposons que des ressources budgétaires s'y substituent.
L'amendement n° COM-1 est un cousin germain : vous proposez de remplacer les REX exclusivement par des crédits budgétaires. Nous avons envisagé d'autres recettes exceptionnelles, mais nos logiques sont voisines. Je me rallie donc volontiers à votre amendement qui est plus maximaliste.
L'amendement n° COM-1 est rectifié pour être rendu identique à l'amendement n° COM-7 de la commission.
L'amendement n° COM-7 et n° COM-1 rect, identiques, sont adoptés.
Nous sommes saisis de deux amendements identiques. L'amendement n° COM-5 permet d'éviter que la décote pour les cessions d'immeubles domaniaux mise à disposition du ministère de la défense s'applique, sinon les recettes attendues s'en trouveraient réduites.
Ces amendements sont en contradiction avec la loi SRU. Il serait curieux que l'îlot Saint-Germain ne puisse disposer d'aucun logement social. Pourquoi ne pas prévoir un seuil de 30 % ?
Articles additionnels après l'article 2
L'amendement n° COM-3 ouvre le débat sur le financement des Opex. Aujourd'hui, le ministère de la défense participe à la réserve générale qui elle-même abonde le ministère de la défense pour le financement du surcoût des Opex, mais comme le ministère de la défense participe bien au financement des Opex, on ne peut affirmer que les crédits budgétaires sont sanctuarisés. Ainsi, en 2014, 120 millions d'euros supplémentaires ont été ponctionnés pour les Opex.
De plus, comme l'a relevé la Cour des comptes, tous les ministères ne sont pas « taxés » de la même façon pour financer la réserve interministérielle. En 2014, la Cour des comptes estime ce prélèvement à 19 % pour le ministère de la défense, alors que le budget de la défense ne représente que 16 % du budget général. Environ 78 millions d'euros auraient ainsi été prélevés en trop.
Cet amendement permettra d'engager une discussion en séance sur la façon dont les Opex doivent être financées. À titre personnel, j'estime que le ministère de la défense n'a pas à payer deux fois alors que nos troupes sont particulièrement sollicitées.
Notre groupe ne votera pas ces amendements identiques, non pas qu'il n'appelle pas de ses voeux un système plus juste de répartition, mais il est difficile de rompre avec une telle tradition. La solidarité interministérielle doit continuer à jouer pour les Opex, et le ministère de la défense ne peut s'en affranchir. Ce ne serait pas un bon signal adressé aux autres ministères. Cela dit, nous sommes heureux que le débat puisse avoir lieu.
Le problème vient de l'évaluation du coût des Opex en loi de finances initiale.
Les amendements identiques n°s COM-3 et COM-9 sont adoptés et l'article additionnel est inséré.
L'amendement n° COM-8 a trait au financement mutualisé pour les opérations intérieures. On ne peut laisser la défense seule sur ce sujet.
Nous y sommes favorables.
L'amendement n° COM-8 est adopté et l'article additionnel est inséré.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'amendement n° COM-10 fixe le délai de remise du rapport d'évaluation au 31 mars 2017. Compte tenu de la charge politique de cette année-là, c'est une bonne idée !
Tout à fait d'accord !
L'amendement n° COM-10 est adopté.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 4 bis
L'article 10 prévoit que le Gouvernement remet chaque année au Parlement, préalablement au débat d'orientation budgétaire, un rapport sur l'exécution de cette loi. L'Assemblée nationale a inséré un article additionnel, selon lequel ce rapport comporte un volet consacré à la politique de gestion des ressources humaines du ministère de la défense ; présente les effectifs du ministère et leur répartition ; en justifie l'évolution pour chaque année de la période 2014-2019 et analyse l'évolution de la masse salariale du ministère. L'amendement n° COM-11 précise que ce nouveau volet comporte un bilan de l'utilisation des mesures d'incitation au départ, qui constituent un important levier de gestion des ressources humaines.
L'amendement n° COM-11 est adopté.
L'article 4 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Articles additionnels après l'article 4 bis
L'amendement n° COM-12 prévoit l'association du Parlement au débat sur la doctrine d'emploi des forces armées sur le territoire national, dans leur mission de protection de la population et de certains sites.
Il est complété par l'amendement n° COM-23, qui porte sur le rapport annexé et prévoit que l'évaluation de l'opération Sentinelle soit l'occasion de conduire cette réflexion.
En effet, il résulte de l'agacement que nous avons ressenti devant les difficultés que notre commission des finances - comme, semble-t-il, votre commission - a rencontrées pour se procurer le rapport Charpin, classé « Confidentiel Défense », le ministère de la défense et Bercy se renvoyant la responsabilité du blocage. Ayant pu, finalement, au bout de six mois, le consulter, je n'ai pas identifié ce qu'il comportait de particulièrement confidentiel. D'ailleurs, le 28 janvier dernier, un magazine en a publié de larges extraits, qu'il ne nous était pas loisible d'utiliser publiquement, puisque c'eût été contrevenir à la protection du secret de la défense nationale !
La commission consultative du secret de la Défense nationale (CCSDN), instituée par la loi du 8 juillet 1998, peut être saisie par un juge, s'il estime qu'un document devrait être déclassifié. L'avis de cette instance, purement consultatif, n'oblige en rien le Gouvernement. Le Parlement devrait, tout comme le juge, pouvoir la saisir. En l'occurrence, elle aurait pu suggérer la déclassification de tout ou partie de ce rapport, sans que le Gouvernement ne soit contraint de suivre son avis.
Si cette affaire, en effet, nous a profondément agacés, cet amendement risque d'ouvrir un peu trop la porte. Aussi nous abstiendrons-nous : voulons-nous donner à toutes les commissions la possibilité de saisir la CCSDN ? Nous sommes le pouvoir législatif et non exécutif. Déjà, nous avons obtenu des pouvoirs de contrôle exceptionnels pour notre commission.
Je me suis inspiré, pour cet amendement, d'une disposition similaire adoptée en 1998, à l'initiative de M. About, par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat...
Si je comprends la démarche de M. de Legge, car nous avons été aussi agacés par la rétention manifeste de ce rapport, je partage néanmoins les inquiétudes de M. Reiner. Ne pourrions-nous pas limiter le pouvoir de saisine de la CCSDN aux présidents de commissions ? Cela n'ouvrirait pas trop la porte, et susciterait un débat utile avec le Gouvernement.
Notre commission a pour tradition de protéger le secret-défense, qui est de plus en plus menacé : nous avons bien vu, dans le texte sur le renseignement, que l'habilitation s'acquiert de plus en plus souvent ès qualités. Pour autant, ce pouvoir de saisine peut être utile, au moins pour la commission des finances, celle des lois et la nôtre... Débattons-en donc en séance ! Si nous avons été irrités par la difficulté à obtenir le rapport Charpin, nous ne souhaitons pas fragiliser le secret-défense.
Certes, mais toutes les administrations ont toujours eu tendance à garder pour elles les informations et à s'opposer à leur communication aux élus. Les présidents de conseil généraux se rappellent sans doute combien il était difficile d'obtenir des renseignements sur l'aide sociale... Il s'agit de lutter contre les corporatismes : à cet égard, le débat est bienvenu.
Protéger des informations classifiées contre un risque de divulgation excessive ne doit pas conduire à en frustrer les parlementaires. Il sera en tout cas utile d'en délibérer en séance.
Je retire donc, pour l'heure, mon amendement, quitte à le présenter en séance, après l'avoir rectifié pour aller dans le sens restrictif que vous suggérez. Il importe en effet d'en débattre, tant il fut irritant de constater que la presse citait allègrement un rapport dont nous n'avions pu obtenir communication.
L'amendement n° COM-4 est retiré.
Les articles 5 et 6 sont adoptés sans modification.
Article 7
Oui, en revenant sur l'élargissement, par l'Assemblée nationale, du droit des APNM (associations professionnelles nationales de militaires) de se porter partie civile : cela risquerait de favoriser une judiciarisation croissante.
Il précise les conditions d'exercice de la liberté d'expression reconnue aux membres des APNM pour les questions relevant de la condition militaire, pour éviter les déclarations intempestives dont les médias sont très friands.
L'amendement n° COM-15 précise le niveau d'implication des représentants des APNM dans les instances de concertation.
Les auditions ont révélé des divergences. Tous sont d'accord pour que les APNM soient intégrées au sein du Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM). En revanche, leur intégration aux Conseils de la fonction militaire (CFM), existant pour chaque armée ou formation rattachée, prévue par l'Assemblée nationale, risquerait de perturber la concertation telle qu'elle est pratiquée dans chaque armée. Nous proposons donc de revenir au texte initial.
Je vote contre.
L'amendement n° COM-15 est adopté.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Les articles 7 ter, 8 et 9 sont adoptés sans modification.
Article 10
L'amendement rédactionnel n° COM-25 est adopté.
L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Les articles 11, 12 et 13 sont adoptés sans modification.
Article 17
L'amendement n° COM-17 prévoit une participation interministérielle à l'expérimentation du SMV (service militaire volontaire). Les armées n'y sont pas favorables, mais déplorent l'étroitesse de leur budget. Je prévois un avis défavorable du Gouvernement.
En effet. Le Gouvernement voudra laisser au ministère de la défense la pleine responsabilité de cette expérimentation pendant seize mois, car le financement mutualisé implique le droit de participer aux décisions ! Or il ne s'agit, à ce stade, que d'une expérimentation d'un service militaire, qui concerne quelque mille personnes pour seize mois. Je comprends les motifs de cet amendement, contraire aux souhaits du ministère de la défense. Nul doute que le Gouvernement aura à coeur de s'exprimer à ce sujet en séance publique.
Les élus locaux que nous sommes s'inquiètent toujours lorsque la clé de financement doit changer en cours d'opération. S'il faut mutualiser, autant le décider dès le début. Pour fonctionner, ce service doit être, bien sûr, placé sous la responsabilité de l'autorité militaire, ce qui est prévu par l'article 17, ce qui ne l'empêche pas de bénéficier de la participation financière des autres ministères concernés.
L'amendement n° COM-17 est adopté.
L'amendement n° COM-18 porte sur les conventions qui peuvent être passées par le ministère de la défense et des organismes d'insertion professionnelle pour mettre en place le SMV.
L'amendement n° COM-18 est adopté, ainsi que l'amendement n° COM-19.
L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 18
L'amendement n° COM-20 supprime les mots « en métropole », pour les besoins de la sécurité civile.
Ainsi, les volontaires du SMV pourront intervenir outre-mer ou à l'étranger...
pour les seules missions de sécurité civile, d'accord.
L'amendement n° COM-20 est adopté.
L'article 18 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 19
Article 23
L'amendement rédactionnel n° COM-27 est adopté.
L'article 23 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'article 24 est adopté sans modification.
Article 25
Article 1er et rapport annexé (précédemment réservés)
À l'article 2 du rapport annexé, l'amendement de coordination n° COM-23 est adopté.
L'amendement n° COM-24 est une initiative de nos rapporteurs « Afrique » Jean-Marie Bockel et Jeanny Lorgeoux et prévoit de maintenir deux composantes, terrestre et aérienne, à Djibouti.
L'amendement n° COM-24 est adopté.
L'article 1er et le rapport annexé, ainsi modifié, sont adoptés dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Chacun a pu expliquer son vote au début de notre discussion.
J'aimerais que notre commission soit informée du montant des crédits consacrés aux opérations extérieures, dont chacun se félicite, et à l'opération Sentinelle. Ces interventions, qui pèsent sur notre budget de défense, ne concernent pas seulement la France, elles participent à l'évidence à la défense des intérêts européens et mondiaux. Leur coût devrait donc être logiquement déduit de l'évaluation de notre déficit public, qui préoccupe tant certains de nos interlocuteurs européens !
Vous ne manquez pas de constance... Votre argumentation est largement partagée au sein de notre commission. Le coût de l'opération Sentinelle s'élève à environ 350 millions d'euros par an, soit, comme l'a rappelé Daniel Reiner, environ un million d'euros par jour. En 2015, les opérations extérieures devraient coûter 1,1 milliard d'euros. Bien sûr, il s'agit d'une prévision : seuls le débat sur le collectif budgétaire de fin d'année, ainsi que celui sur la loi de règlement, préciseront ces chiffres, une fois que les dépenses auront été effectuées.
La commission adopte le texte du projet de loi dans la rédaction issue de ses travaux (le groupe communiste, républicain et citoyen votant contre).
La réunion est levée à 11 h 52
TABLEAU RÉCAPITULATIF SUR LE SORT DES AMENDEMENTS