Commission des affaires européennes

Réunion du 10 février 2022 à 9h05

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Mes chers collègues, nous allons aborder ce matin deux sujets très différents, même s'ils ont tous deux une portée économique certaine. Le premier concerne une directive en cours d'adoption sur les salaires minimums dans l'UE. Le second porte sur une autre directive, également en cours d'élaboration, pour sécuriser la pratique des ventes en duty free sur le terminal français d'Eurotunnel, sujet sur lequel notre regrettée collègue Catherine Fournier avait été la première à attirer notre attention après le Brexit.

Nous allons donc d'abord entendre une communication de Pascale Gruny et Laurence Harribey, rapporteures pour notre commission sur les questions sociales, au sujet de la directive qu'a proposée la Commission il y a quinze mois, relative à des salaires minimaux adéquats dans l'Union européenne. Ce texte fait consensus en France où nous disposons déjà d'un salaire minimum, parmi les plus élevés de l'Union. Il ne présente donc pas de difficulté pour notre pays. Au contraire, je crois que nous sommes tous ici convaincus que la concurrence entre travailleurs des différents États membres peut nourrir la défiance à l'égard du bloc européen. Toutefois, le Président de la République en a fait un marqueur fort de la Présidence française du Conseil puisque, dès la présentation qu'il a faite de la PFUE le 9 décembre, il l'a affiché comme une priorité de notre présidence, et déclaré que « cette directive définira non pas un Smic européen comme une moyenne mais tirera tous les bas salaires vers le haut grâce à un salaire minimum décent » . Ces propos ambigus pourraient laisser croire que la directive fixe un plancher de salaire minimum, aussi il me semble important que notre commission soit bien au fait du contenu de ce texte qui sera sous les feux de la rampe durant les prochaines semaines. La France espère en effet trouver dessus un compromis rapide entre les divers États membres qui sont nettement plus réservés, pour différentes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Harribey

La proposition de directive relative à des salaires minimaux adéquats dans l'Union européenne a été présentée par la Commission européenne le 28 octobre 2020.

La présidence française souhaite en effet aboutir mi-mars, soit très rapidement. Nous nous trouvons dans une phase intense de négociations de ce texte, sur lequel le Parlement européen et le Conseil de l'UE ont réussi à définir leurs positions assez vite. La négociation a donc bien avancé en 2021 et nous en sommes maintenant à la phase du trilogue entre le Conseil et le Parlement européen, qui a commencé le 13 janvier dernier.

Avant d'en venir plus précisément au contenu de la directive et à l'état des négociations, il est intéressant de remarquer que nous sommes dans une configuration institutionnelle assez habituelle, pour des initiatives dans le champ social ; une configuration qui se retrouve aussi dans le domaine de la santé, avec un texte de la Commission plutôt ambitieux, qui a été canalisé par le Conseil, alors que le Parlement européen a renforcé un certain nombre de dispositions proposées par la Commission.

L'enjeu est aujourd'hui de parvenir à un texte de compromis pouvant satisfaire les co-législateurs, qui ont tous deux le souhait d'aboutir assez rapidement. L'exercice n'est pas aisé, tant les États membres de l'Est et du Nord de l'Europe notamment ne sont pas prêts à s'éloigner de l'orientation générale du Conseil.

Venons-en d'abord aux objectifs et contenu de la proposition de directive de la Commission. Pascale Gruny fera ensuite un point sur l'état des négociations et les positions respectives du Parlement européen et du Conseil.

Il nous a semblé, en effet, important de nous intéresser à ce texte, qui est hautement symbolique et important sur le plan politique, en ce qu'il participe à construire cette Europe sociale souvent décriée. Il vise à mettre en oeuvre le socle européen des droits sociaux et s'inscrit dans le cadre des engagements pris lors du Sommet social de Porto de mai 2021.

Ce texte est également essentiel, sur le plan économique, en ce qu'il vise à lutter contre la pauvreté au travail, mais aussi contre les distorsions de concurrence au sein du marché intérieur.

Sur 27 États membres, 21 disposent d'une législation nationale qui établit un salaire minimum légal. Les six autres pays (Autriche, Chypre, Danemark, Finlande, Italie et Suède) ont des salaires minimums par branches ou déterminés par négociation entre les partenaires sociaux.

L'écart entre ces salaires minimaux est aujourd'hui important : 13 États membres situés à l'Est et au Sud de l'UE ont un salaire minimum inférieur à 1 000 euros par mois, comme en Bulgarie (332 euros) ou en Hongrie (542 euros). Au contraire, les salaires minimaux sont supérieurs à 1 500 euros, notamment en France (1 603 euros), en Allemagne (1 621 euros), ou au Luxembourg (2 257 euros).

Il convient néanmoins de noter que ces écarts se réduisent lorsque le salaire minimum est exprimé en standards de pouvoir d'achat. Ainsi, d'un ratio de 1 à 7, l'écart de salaire entre la Bulgarie et le Luxembourg passe de 1 à 3 en parité de pouvoir d'achat. Il n'en demeure pas moins que les différences sont importantes, et que près de 10 % de travailleurs de l'UE sont considérés comme travailleurs pauvres.

Pour lutter contre la pauvreté et ces distorsions de concurrence, la proposition de directive - il convient de le mentionner tout de suite - n'a pas pour objectif de fixer un salaire minimum qui serait identique dans tous les États membres. Cela ne serait ni réaliste, ni économiquement pertinent, au vu de ce qu'on vient de souligner.

Cette directive ne vise pas non plus à imposer la mise en place d'un salaire minimum légal dans les pays n'en disposant pas ; elle vise à encadrer les modalités de fixation des salaires. Il s'agit là d'un vrai exercice d'équilibriste, mais respectueux des traités et des compétences des États membres.

La proposition de directive est fondée, en effet, sur l'article 153 du TFUE, paragraphe 1, point b, qui dispose que l'Union soutient et complète l'action des États membres dans le domaine des conditions de travail, dans les limites des principes de subsidiarité et de proportionnalité. Elle n'intervient donc pas directement dans la détermination du niveau de rémunération : de fait, l'article 153 paragraphe 5 du TFUE exclut explicitement les sujets de « rémunération » des compétences de l'Union européenne.

La proposition de la Commission, publiée en octobre 2020, comprenait deux grands axes : le premier consiste à fixer des critères à respecter pour les États membres dans lesquels un salaire minimum légal existe, afin de garantir le caractère adéquat de ce salaire. Le texte de la Commission prévoyait ainsi quatre critères à prendre en compte par les États membres dans la fixation et l'évolution du salaire minimal : le pouvoir d'achat, le niveau général et la répartition des salaires, le taux de croissance des salaires, et l'évolution de la productivité du travail. En plus de ces critères, les États membres devaient également se référer à des valeurs internationales de référence. La Commission avait alors insisté, dans les considérants du texte et sa communication, sur les valeurs de références telles que les taux de 60 % du salaire médian brut ou de 50 % du salaire moyen. Nous y reviendrons.

Le second axe consiste à étendre la protection offerte par les conventions collectives en matière de salaire minimal. On observe, en effet, que dans les pays où la part des travailleurs couverts par des conventions collectives est importante, la proportion de travailleurs à bas salaires tend à être plus faible et les salaires minimaux plus élevés que dans ceux où le taux de couverture est faible, ceci lorsque les conventions sont revues régulièrement. On comprend ainsi la promotion de la négociation collective par la Commission européenne dans ce texte.

Le texte de la Commission prévoyait ainsi, pour les États membres dans lesquels le taux de couverture des conventions collectives est inférieur à 70 % des travailleurs, un élargissement de ce taux de couverture, à travers la mise en place d'un plan d'action, rendu public et notifié chaque année à la Commission. Cette disposition a pu être discutée, car la notification à la Commission pouvait être vue comme un pouvoir de blocage de la Commission.

Il s'agit là des grands axes du texte sur lesquels nous reviendrons, mais qui ont suscité dès sa publication, et même avant, une opposition d'un certain nombre de pays, comme vous pouvez l'imaginer. Ce sont des lignes de fractures assez habituelles, en matière d'initiatives sociales, reflétant la diversité des modèles économiques et sociaux des États membres dans l'Union: les oppositions les plus importantes sont ainsi venues, comme vous vous en doutez, à la fois des pays de l'Est, globalement opposés à l'élévation des standards sociaux, des pays dits frugaux pour qui la convergence sociale n'est pas l'objectif premier de l'UE, et des pays scandinaves attachés à leur modèle de protection sociale et de négociation collective.

Nous avons ainsi pu auditionner les représentations permanentes du Danemark et de la Hongrie, pays qui se sont opposés au texte de compromis du Conseil. Leur opposition repose sur des arguments communs, de nature juridique, mais également sur des justifications économiques et politiques assez différentes. Concernant la Hongrie, nous avons ressenti une opposition politique d'un pays, sous le feu des critiques, et attaché à ses intérêts économiques et au respect des traités. Le Danemark a, quant à lui, exprimé sa crainte de voir son modèle social national - fondé sur les négociations salariales entre partenaires sociaux - qui fonctionne très bien, remis en cause par la création de possibles droits individuels, et par une interprétation extensive du texte de la part de la Cour de justice de l'Union. C'est effectivement une possibilité quand on pense aux arrêts rendus par la Cour sur le temps de travail des militaires et le statut des sapeurs-pompiers. Les syndicats danois ont manifesté contre ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

C'est dans ce contexte que la présidence slovène, après celle des Allemands et des Portugais, a mené les négociations au sein du Conseil, et finalement réussi à adopter un texte de compromis, le 6 décembre dernier. Ce texte tente ainsi de prendre en compte les réticences et spécificités des États membres et l'avis du service juridique du Conseil.

Le résultat : un texte en retrait par rapport à celui de la Commission, mais adopté à une très large majorité : 23 votes pour, 2 votes contre de la part du Danemark et de la Hongrie, 2 abstentions de la part de l'Allemagne, dont le gouvernement n'était pas formé, et de l'Autriche.

Lors de la réunion du Conseil du 6 décembre, un nombre important de délégations a, toutefois, qualifié le texte « d'équilibre fragile » et invité la future présidence française à préserver les compromis atteints au Conseil dans le cadre des trilogues avec le Parlement.

Le texte de la Commission a ainsi été assoupli, par le Conseil, sur plusieurs points. D'abord, le texte change d'intitulé pour souligner que la directive établit un cadre de nature procédurale dans lequel évoluent les salaires minimums nationaux : il s'agit d'une « directive relative à un cadre pour des salaires minimaux adéquats dans l'Union européenne ».

Par ailleurs, il a été clairement indiqué, dans les considérants (n°19), que le taux de couverture des négociations collectives à 70 % n'est pas un objectif, mais simplement un seuil entraînant l'obligation de prévoir un cadre et un plan d'action pour promouvoir les négociations collectives. Autre point de différence à souligner : bien que les quatre critères pour estimer l'adéquation des salaires minimums restent identiques, il a été ajouté, dans le texte, que les États membres pouvaient en faire application en fonction des conditions socioéconomiques nationales.

Le Conseil a, par ailleurs, introduit plus de flexibilité pour les États membres quant au choix des valeurs indicatives de référence pour évaluer le caractère adéquat des salaires, en permettant notamment le recours aux valeurs de référence nationales. Le fait que la proposition initiale de la Commission ait particulièrement mis l'accent sur les indicateurs de « 50 % du salaire moyen brut » et « 60 % du salaire médian brut » a été critiqué par un grand nombre d'États membres. Le cas des mécanismes d'indexation automatique du salaire minimum légal a été reconnu dans le texte, au titre des spécificités nationales, à prendre en compte.

Il a, en outre, été précisé que les traités laissent la compétence aux États membres de décider de variations (c'est-à-dire de niveaux différents de salaires minimums légaux) et de retenues (c'est-à-dire de niveaux de salaires inférieurs aux salaires minimaux légaux) dans le respect cependant des principes de non-discrimination et proportionnalité. Ces dispositions étaient juridiquement sensibles, pour certains pays comme la France, avec la question de la rémunération des apprentis notamment.

Les conditions de collecte des données et de suivi ont également été assouplies, par souci de diminuer la charge administrative en résultant, avec notamment un rapport à rendre à la Commission sur la situation des salaires minimums tous les deux ans au lieu d'un rapport annuel comme prévu dans le texte proposé par la Commission européenne.

Nous sommes désolées pour l'inventaire de ces modifications, qui, bien que non exhaustif, nous semblait nécessaire pour comprendre les points bloquants de ce texte et les enjeux des négociations.

Nous avons donc évoqué le texte du Conseil. Venons-en aux amendements proposés par le Parlement européen.

Le Parlement européen, a, en effet, quelques jours avant l'orientation générale du Conseil, soutenu, le 25 novembre, le mandat de négociation des co-rapporteurs Dennis Radtke (PPE, allemand) et Agnes Jongerius (S&D, néerlandaise) de la commission « Emploi et affaires sociales », poursuivant, à l'inverse, un renforcement général des dispositions de la proposition de la Commission européenne.

Il convient de noter, toutefois, que l'adoption de ce texte au Parlement ne s'est pas fait sans difficulté. C'est ce que nous ont rapporté nos collègues parlementaires européens, de tous bords, que nous avons pu rencontrer en amont de cette communication. Ils nous ont décrit une grande tension au sein des groupes politiques. Il est, en effet, assez peu habituel, au Parlement européen, comme j'ai pu le constater lorsque j'étais député européen, que les lignes de fractures soient davantage entre pays plutôt qu'entre groupes politiques. Les parlementaires scandinaves ont ainsi voté contre le texte.

Le texte du Parlement européen renforce donc le texte de la Commission sur un certain nombre de points, se heurtant ainsi au texte de compromis du Conseil. Voici les principaux : les parlementaires ont souhaité l'inclusion de l'expression « tous les travailleurs » dans le champ d'application de la directive. Ils ont également relevé le seuil de couverture des négociations collectives de 70 % à 80 %, en ajoutant que seuls les syndicats étaient des acteurs légitimes dans le cadre de la négociation collective.

Ils ont modifié les quatre critères pour estimer l'adéquation des salaires, en intégrant « un panier de biens et de services à prix réels » dans le critère lié au pouvoir d'achat, en ajoutant un critère lié au taux de pauvreté et en supprimant le critère lié à la productivité du travail. Il s'agit là des points qui ont été discutés lors du troisième trilogue qui s'est déroulé le 8 février dernier.

Concernant les valeurs de référence, ils ont inscrit, dans le texte, les ratios - tant critiqués - du salaire minimum légal par rapport à 50 % du salaire moyen brut et à 60 % du salaire moyen médian. Cette dernière disposition est jugée juridiquement délicate par la Présidence française qui a ouvert les trilogues le 13 janvier dernier, puisqu'elle intègre dans le texte une disposition relative à la rémunération, pourtant exclue des traités. Par ailleurs, cette disposition ne semble pas opportune, dans la mesure où, par exemple, le salaire minimum légal bulgare atteint 60 % du salaire médian, contrairement au Luxembourg.

Ce sujet ne constitue qu'un parmi d'autres qui semblent donc opposer le Conseil et le Parlement européen, à l'ouverture des trilogues. Pour le moment, les travaux n'ont que peu progressé : ont eu lieu deux réunions les 13 et 31 janvier, durant lesquelles les co-législateurs ont présenté chacun leurs positions respectives. Un troisième trilogue a eu lieu le 8 février, mais nous n'avons pas encore eu connaissance de ses conclusions.

Le Conseil souhaite, en tout cas, préserver les principes qui sous-tendent son orientation générale, à savoir le respect des modèles nationaux de fixation des salaires et la sécurité juridique du texte au regard des traités.

Il s'agit là aussi d'une position majoritairement soutenue par les syndicats français et européens d'employeurs. Même si leur position relève plutôt d'une logique du « en même temps ». Nous n'avons malheureusement pas eu le temps d'auditionner les partenaires sociaux, mais ils nous ont fait parvenir des contributions écrites fort intéressantes. Les représentants des employeurs - assez opposés à la proposition initiale de directive - semblent se satisfaire, dans l'ensemble, du texte adopté par le Conseil, mais ne sont pas favorables à un assouplissement de la directive, comme proposé par le Parlement. A contrario, la Confédération européennes des syndicats a, quant à elle, soutenu dès l'origine la proposition de directive, même si des dissensions internes ont pu apparaître, avec les syndicats scandinaves. Elle soutient majoritairement les avancées du Parlement européen, jugeant le texte du Conseil pas assez ambitieux.

Qu'en est-il de la suite du calendrier ? La présidence française souhaiterait aboutir sur ce texte mi-mars, juste avant les élections présidentielles.

S'agit-il d'un objectif ambitieux ? Certainement au vu des crispations de certains États membres et des enjeux juridiques. Toutefois, la volonté du Président Macron d'aboutir sur ce dossier est forte, laissant à penser que cet objectif reste réalisable. Le Parlement européen semble également vouloir aboutir à un accord rapidement, et même les pays du Nord, comme le Danemark, semblent faits à l'idée qu'un accord intervienne.

Mais attention à ne pas confondre vitesse et précipitation : comme l'a rappelé la Commission européenne lors des trilogues, nous pensons qu'il est essentiel de préserver un équilibre entre rapidité des négociations et qualité de la proposition. L'intérêt supérieur dans ce dossier est celui des Européens qui attendent des avancées concrètes en matière d'Europe sociale, comme ils en attendent sur l'Europe de la santé. Il faut ainsi veiller à ne pas vider de sa substance un texte déjà en retrait par rapport à la proposition de la Commission, tout en gardant à l'esprit le respect des traités et le principe de subsidiarité. Les marges de manoeuvre sont étroites, mais elles existent et il semblerait, effectivement, important de s'en saisir, avant que la présidence de l'Union échoie aux Tchèques ou Suédois... loin d'être les premiers défenseurs de ce texte.

Nous vous remercions pour votre écoute et sommes à votre disposition pour toute question.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Cuypers

Je m'interrogeais sur la notion de salaire décent, car les différences de salaire entre États membres sont très importantes, y compris en Europe, si l'on prend l'exemple de la Suisse. Il me semble ainsi difficile de fixer un salaire minimum identique pour les tous les pays de l'Union européenne. Pourriez-vous m'apporter des précisions sur cette notion de salaire décent ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Je remercie également les rapporteurs pour cette présentation, qui était très éclairante sur un certain nombre de points. Je voulais moi-même revenir sur certains d'entre eux : d'abord sur la valeur symbolique de ce texte, comme vous l'avez indiqué. Je trouve, en effet, que l'Europe est trop souvent considérée comme celle des biens, alors qu'elle doit être « l'Europe des hommes », avec l'affirmation d'une Europe sociale. Il y a effectivement des écarts importants de salaires et de pouvoir d'achat entre les États. Je souhaitais d'ailleurs vous demander des précisions sur la position des pays scandinaves s'agissant de cette proposition de directive.

Par ailleurs, sur le sujet des négociations collectives, je rappellerai que le contexte d'aujourd'hui est un peu différent sur le marché du travail. Il y a plus d'offres que de demandes ; cela se voit dans les revendications salariales actuelles et les équilibres des négociations collectives. Le rôle des partenaires sociaux est d'ailleurs très important dans les négociations des conventions collectives.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique de Legge

Il me semble qu'un des enjeux, plus que le salaire, est la question de pouvoir d'achat. À côté du salaire, deux éléments doivent être également pris en compte, à savoir la politique fiscale et le différentiel entre le salaire net et brut. Il faut, en effet, savoir si la redistribution doit ou non être prise en compte pour estimer le niveau adéquat d'un salaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Vous avez tout à fait raison, tout dépend effectivement du reste à vivre pour le salarié. La question centrale est celle du pouvoir d'achat. J'avais travaillé sur cette question, il y a quelques années, avec Mme Alliot-Marie. Définir le pouvoir d'achat est difficile car les besoins primaires sont différents d'une personne à une autre. Aujourd'hui, par exemple, un téléphone portable est-il un besoin primaire ou secondaire ?

Nous assistons aujourd'hui à un retour de l'inflation et surtout à une hausse des prix de l'énergie. Ces éléments-là sont déterminants et doivent être pris en compte dans le calcul du pouvoir d'achat. La question des critères, définis dans la proposition de directive, est donc sensible ; d'où la difficulté des différentes parties à se mettre d'accord dans les négociations.

Par ailleurs, concernant la remarque de M. Cuypers, je pense qu'il n'est pas souhaitable d'uniformiser les salaires entre les différents pays de l'Union européenne. Ce n'est pas l'objet de la directive. Lorsque j'étais député européen, je me souviens avoir voulu fixer dans un texte une amende de 500 euros. J'avais alors été interpellée par ma collègue bulgare - devenue ensuite commissaire européen - qui m'avait indiqué qu'il n'était pas possible de fixer un tel montant, alors que le salaire minimum dans son pays était aux alentours de 300 euros.

Vous avez raison, M. Joly, l'Europe sociale est une demande des citoyens européens, notamment pour circuler plus facilement d'un pays à un autre. La question des travailleurs détachés est aussi importante. Je suis également favorable à cette « Europe des hommes ». On reproche souvent à l'Union européenne son caractère technocratique, il est donc nécessaire d'avancer sur la question de l'Europe sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Harribey

Je souhaitais apporter quelques compléments. Tout d'abord, il est vrai que les salaires des pays de l'Est notamment, comme la Pologne par exemple, ont augmenté au fil des années. Mais comme l'a dit le Président Rapin, en introduction, il faut éviter que l'Europe sociale soit l'arlésienne et qu'elle avance pour lutter contre ces distorsions de concurrence.

Par ailleurs, comme nous l'avons indiqué dans notre intervention, l'objectif de la directive n'est pas de fixer un salaire minium identique dans toute l'Europe ; il s'agirait d'une hérésie sociale et économique. Je me souviens, à l'époque du référendum sur le traité de Maastricht, j'avais rencontré une dame enceinte, dans un bus, qui craignait de n'avoir plus que quatre semaines de congé maternité avec l'adoption du traité. Je lui ai alors rappelé que les législations étaient très différentes d'un pays à l'autre de l'Union européenne, et que certains pays avaient même des législations plus favorables que celle de la France. J'ai peut-être, à l'époque, fait gagner un vote en faveur du traité !

Ce présent texte sur les salaires minimaux revêt un caractère symbolique important. Mais l'enjeu concret, dans cette directive, est la question du taux de couverture des conventions collectives de 70 % et de la promotion des négociations collectives.

Concernant les pays scandinaves, je suis assez sensible à leur argumentation concernant ce texte, notamment sur les risques engendrés par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne en matière de création de droits individuels. Nous connaissons ce problème en France, notamment avec la question du temps de travail des militaires. La discussion avec les représentants danois m'a passionnée puisqu'on voit bien, là, le risque, avec une interprétation extensive du droit européen de la part de la CJUE, d'un recul dans des pays aux modèles sociaux pourtant avancés.

Le texte proposé par le Conseil est certes en retrait mais il s'agit d'un « petit pas » important afin que l'Europe ne soit pas uniquement une Europe des biens.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Sur la question des conventions collectives, ces dernières n'évoluent pas beaucoup en France. On se heurte à un écrasement des salaires en bas de grille, lorsqu'on veut procéder à des augmentations. C'est dommage.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Cuypers

La question sous-jacente, sur le sujet des salaires minimaux, est la différence « salaires bruts/salaires net ». Comment pourrait-on harmoniser les montants des charges sociales ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Harribey

Une des façons de promouvoir les salaires adéquats dans l'Union est de fixer des critères, comme le fait la directive.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Le brut et le net ne veulent pas dire la même chose en fonction des niveaux de salaire. La taxation atteint 40 %, par exemple, pour un SMIC.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Quel est l'impact de cette directive sur la question des travailleurs détachés ? On sait que les critères doivent être fixés par État membre, mais il faudrait en réalité un SMIC par région, si l'on prend l'exemple de la région Ile-de-France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Un article des Échos de ce matin s'intéresse justement à la question du reste à vivre quand on habite à Paris !

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Harribey

Ces considérations sont bien prises en compte dans la directive, dont un des objectifs est de lutter contre les distorsions de concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Les législations sur les questions du salaire minimum et des travailleurs détachés sont très importantes mais on ne sait pas communiquer. Il faudrait pouvoir dire que ce texte sur les salaires minimaux permet également des progrès sur la question des travailleurs détachés. Cela ferait progresser l'Europe sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Vous avez tout à fait raison, mais la situation sur les salariés détachés est parfois plus complexe. De multiples questions techniques se posent. Si les charges sociales sont les mêmes pour les salariés détachés, devra-t-on servir leur retraite en France ou non par exemple ?

En tant que directrice des ressources humaines, dans le passé, j'ai pu être confrontée au problème des faux salariés détachés. Les entreprises traitent avec des salariés qui sous-traitent leur travail à des salariés étrangers, moins payés. Cela était légal, mais pas très transparent. En France, nous avons plus de travailleurs détachés que nous envoyons de travailleurs dans l'Union.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Mes chers collègues, à l'occasion d'un voyage en dehors de l'Union européenne, en passant par un port ou un aéroport, lequel d'entre nous n'a-t-il jamais fait quelques emplettes dans un magasin duty free pour rapporter un souvenir ou un produit typique à sa famille ou à ses amis ?

Le texte que nous examinons à présent vise à combler, en la matière, l'un des vides juridiques subsistant en conséquence du Brexit, concernant les passagers qui empruntent le tunnel sous la Manche, et souhaiteraient se livrer à ce petit plaisir de shopping du côté français.

Depuis le début de l'an dernier, le passage entre le territoire de l'Union européenne et celui du Royaume Uni devrait en effet, en toute logique, le permettre. Or le droit européen mérite à cet effet d'être clarifié et consolidé.

L'avis politique que nous vous proposons d'adopter présente un certain caractère d'urgence, car il porte sur une proposition de directive soumise à consultation publique par la Commission européenne, jusqu'au lundi 14 février. Cette directive a un objet très précis : elle rétablit et sécurise juridiquement, dans le cadre du droit européen sur les accises, la possibilité, pour les voyageurs qui empruntent les navettes du tunnel sous la Manche, de faire des achats hors taxes, dans le terminal français de Coquelles, dans le Pas-de-Calais, comme ils peuvent déjà le faire dans le terminal anglais de Folkestone, en vertu du droit britannique, et comme peuvent le faire de même, en vertu du droit européen existant, les passagers empruntant les autres modes de transport permettant de traverser la Manche : ferries et avions, dans les terminaux des ports et aéroports. Il s'agit donc de rétablir une situation équitable au regard du droit de la concurrence sur le marché des passagers qui traversent la Manche, dès lors que le Royaume Uni ne fait plus partie de l'Union européenne.

Nous vous proposons d'abord un petit rappel historique, puis nous vous exposerons la situation du droit actuel, avant de vous présenter brièvement le contenu de cette proposition de directive et de notre projet d'avis politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Tout d'abord, un peu d'histoire pour éclairer la nécessité d'un tel texte.

Dans les années 1990, jusqu'en juin 1999 précisément, les ventes hors taxe étaient autorisées à l'intérieur de l'union douanière européenne, sous le régime de la directive TVA de 1991 et de la directive droits d'accises de 1992. A l'époque, le tunnel sous la Manche était expressément mentionné par ces textes et la vente des produits hors taxes était autorisée dans les terminaux français et britanniques. Les conditions de concurrence devaient être équitables entre les différents modes de transport, comme l'expliquait un rapport de la Commission de 1996.

Pour donner une idée de l'importance économique du sujet - ce qui nous a d'ailleurs étonnés au moment des auditions -, en 1998, les ventes hors taxe représentaient 50 % du chiffre d'affaires de SeaFrance, 40% pour P&O, opérateurs de ferries, et 25 % pour Eurotunnel, selon un rapport établi par André Capet, député du Pas-de-Calais, et remis au Premier ministre Lionel Jospin le 1er juillet 1998 sur la suppression des ventes hors taxes en Europe.

À compter du 30 juin 1999, deux directives ont mis fin à cette possibilité pour les voyages intra-communautaires, la traversée de la Manche en faisant bien évidemment partie, puisque le Royaume Uni était alors membre de l'Union européenne. La possibilité de ventes hors taxe fut maintenue pour les seuls voyages par voie maritime ou par voie aérienne vers ou en provenance de pays tiers.

Dans les années 2000, la référence au tunnel sous la Manche disparaît en conséquence des nouvelles directives sur la TVA et sur les accises, toujours en vigueur actuellement. Les ports et aéroports restent autorisés à vendre des produits hors taxes mais seulement pour des voyages vers les États tiers. L'interdiction de vente de produits hors taxe par les terminaux du Tunnel sous la Manche était tout à fait normale tant que le Royaume-Uni appartenait à l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Avec le Brexit, alors qu'on devrait logiquement revenir à la situation des années 1990, le Royaume-Uni étant devenu un État tiers, le texte des directives en vigueur reste inchangé. Les ferries et les ports ont donc retrouvé automatiquement la faculté de vendre des produits hors taxes, dès le tout début de l'année 2021, sans pour autant que le terminal français du tunnel sous la Manche retrouve cette possibilité. Celle-ci est néanmoins ouverte pour son terminal britannique situé à Folkestone, en vertu du droit anglais, désormais indépendant de celui de l'Union.

Cela pose un double problème au regard de la concurrence. D'une part, entre les passagers empruntant le tunnel et ceux qui utilisent d'autres moyens de transport, le bateau ou l'avion, et peuvent acheter en duty free dans les ports et aéroports, particulièrement les ports de Calais et Dunkerque. D'autre part, entre le côté britannique, où un comptoir de vente hors taxe est ouvert, et le côté français du tunnel, où il n'est pas ouvert.

Face à cette situation, des mesures de droit interne ont été prises, qui devaient être complétées au niveau européen, et tel est l'objet de la proposition de directive que nous vous proposons de soutenir par cet avis politique.

Sur le plan interne, le concessionnaire a engagé un dialogue avec le Gouvernement ; les élus locaux et régionaux se sont mobilisés, ainsi que le personnel et les syndicats de l'entreprise concessionnaire. Celle-ci a été ébranlée par le Brexit, puis la crise sanitaire, qui a réduit drastiquement les flux de passagers, et elle est légitime à dénoncer une situation anticoncurrentielle qui a un coût, en termes de revenus et d'emplois locaux, non négligeable. Le Gouvernement a engagé pour sa part des pourparlers avec la Commission européenne sur l'interprétation des directives en vigueur.

En juin 2021, les ministres Olivier Dussopt et Clément Beaune ont publié un communiqué commun faisant état d'une « décision prise suite à un dialogue constructif avec les autorités européennes », qui aboutit à l'insertion dans le projet de loi de finances rectificative d'un article additionnel du Gouvernement, identique à un amendement du président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, autorisant la mise en place d'un comptoir de vente hors taxe dans le terminal français du tunnel sous la Manche. Adopté sans modification par le Sénat, sur avis favorable de la commission des finances, cet article 20 de la loi du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021, est rendu applicable par l'insertion d'une mention dans le Bulletin officiel des finances publiques du 22 juillet 2021. Ce n'est que tardivement, en novembre et à l'issue de l'obtention de toutes les autorisations administratives nécessaires auprès de l'administration des douanes, que la boutique de vente hors-taxes ouvre finalement ses portes, alors que la saison touristique est passée !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Quoi qu'il en soit, ces dispositions nationales reposaient sur une interprétation « souple » des textes européens en vigueur. Une modification de la directive sur les droits d'accises était donc nécessaire, pour exonérer de ceux-ci les tabacs et alcools vendus hors taxe dans le terminal français du tunnel sous la Manche. L'accès à celui-ci étant parfaitement délimité et contrôlé, à la fois par les services de police et les douanes, réservé aux passagers munis de billets et justifiant de leur identité, le risque de fraude est nul.

Cette modification a donc été proposée par la Commission le 16 décembre 2021, selon une procédure législative spéciale, simplifiée, impliquant un avis consultatif du Parlement européen, puis du comité économique et social de l'Union européenne, et un vote à l'unanimité au Conseil de l'Union européenne. Cette initiative est bienvenue dans la mesure où elle sécurise l'ensemble normatif constitué par l'articulation entre le droit européen et le droit national.

Ce texte intervient sous présidence française de l'Union européenne, après avoir auditionné notamment les spécialistes de la Représentation permanente et du Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), nous vous proposons un avis politique qui pourra être pris en compte par la Commission européenne, dans le cadre de l'appel à contributions qu'elle a organisé sur ce texte, afin d'attirer son attention sur l'importance de son adoption rapide.

De portée limitée au seul terminal de Coquelles, dans le Pas-de-Calais, assimilable à tous points de vue et notamment en matière contrôle des voyageurs à un « port sec », cette modification de la directive va dans le sens de la reprise des échanges, après les restrictions dues à la crise sanitaire, de la résilience économique et sociale d'opérateurs durement éprouvés par la crise, et du développement de l'emploi dans la région. Elle répond aussi à une préoccupation de concurrence équitable et à une demande forte des salariés et des syndicats de la principale entreprise concernée.

Elle ne s'étend pas au transport ferroviaire, qui restera exclu du champ du duty free conformément aux autres règles européennes actuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Voilà, mes chers collègues, ce que nous souhaitions porter à votre connaissance. Cet avis politique est clair : il vient renforcer les dispositions de la directive. Nous sommes en parfait accord avec la position de la commission des finances du Sénat, il y a quelques mois, sur le collectif budgétaire.

Dans notre intervention, nous avons évoqué la problématique du transport ferroviaire. Je tenais à préciser qu'en l'espèce, le train reliant la France au Royaume-Uni est un train dans lequel l'on est obligé d'aller une fois que l'on a acheté son billet ; il n'est ainsi pas possible d'utiliser ce même billet à des fins frauduleuses pour accéder à la zone de duty free sans véritablement voyager. La situation est donc bien différente de celle des voyageurs empruntant d'autres trains transfrontaliers ou qui traversent la frontière de l'Union européenne.

C'est en raison de ce risque de fraude que la proposition de directive n'admet que cette exception, et ne s'étend pas à d'autres cas d'espèce comme pourraient le revendiquer certains États membres. La Commission européenne ne transigera pas : le risque de fraude est trop important.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Quel est le volume de chiffre d'affaires généré par ces transactions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

De mémoire, il s'agissait d'un ordre de grandeur d'environ 250 millions d'euros, avant la crise de la Covid, répartis entre les différents opérateurs cités plus haut. Ces chiffres, représentant un volume conséquent, correspondent au duty free français. En réalité, nous ne savons pas exactement le montant que cela représente car cette somme est assujettie au secret fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

En quoi la portée de la directive vient modifier l'ordre juridique existant, dans la mesure où des aménagements avaient déjà été prononcés en faveur d'Eurotunnel ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Une application souple du droit européen avait permis la réouverture du duty free côté français pour les transits entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. Cette réouverture ne s'était concrétisée qu'après la saison touristique. Aujourd'hui Eurotunnel a appelé les gouvernements à stabiliser et officialiser cette situation. En l'état actuel du droit, rien ne garantit à Eurotunnel l'accès au duty free. La directive spécifique qui nous a été présentée, va ainsi permettre d'inscrire dans le droit européen la prise en compte du cas spécifique d'Eurotunnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Cuypers

De mémoire, nous nous étions rendus le 6 janvier 2021 sur le sol britannique. A ce moment-là, nous espérions trouver des commerces ouverts. Or, cela n'avait pas été le cas ! Quelle perte gigantesque ! Peut-être serait-il intéressant d'organiser un nouveau déplacement dans la mesure où un certain nombre de questions restent en suspens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Nous avions pour idée de réaliser un déplacement au Royaume-Uni et en Irlande fin 2021. Seulement, ce dernier a été « malmené » en raison du contexte sanitaire. Si la situation s'améliore, nous pourrions réitérer notre projet et emprunter à ce moment-là le tunnel sous la Manche.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Jean de Nicolay

L'entrée en vigueur de cette directive est-elle immédiate ou bien repoussée à 2028 par exemple ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Le but de cette adoption rapide est de permettre la mise en oeuvre quasi-immédiate de la directive, pour stabiliser au plus vite cet état de fait. Actuellement, les zones sont ouvertes. Si un accord au Conseil est trouvé, l'entrée en vigueur de la directive pourra se faire très rapidement car le Parlement a rendu un avis favorable sur la question et la Commission s'est elle aussi prononcée en faveur de son adoption. Cela peut aller très vite !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Joly

Je souhaiterais ajouter deux éléments complémentaires à ces débats. D'une part, je voudrais insister de nouveau sur la part importante que représentent ces transactions dans le chiffre d'affaires des opérateurs précités - près de 40 % du chiffre d'affaires d'Eurotunnel notamment. D'autre part, les duty free sont des éléments déclencheurs du voyage : les achats génèrent de l'activité ferroviaire. Il faudrait que la directive soit adoptée au plus vite, c'est-à-dire avant la fin de la présidence française du Conseil de l'Union européenne.

La commission des affaires européennes adopte l'avis politique qui sera adressé à la Commission européenne.

Sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2008/118/CE et la directive (UE) 2020/262 (refonte) en ce qui concerne les comptoirs de vente hors taxes situés dans le terminal français du tunnel sous la Manche

La commission des affaires européennes du Sénat,

Vu l'article 113 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE),

Vu la directive 91/680/CEE du Conseil, complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée et modifiant, en vue de l'abolition des frontières fiscales, la directive 77/388/CEE, et notamment son article 28 duodecies du 16 décembre 1991,

Vu la directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992 relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise, et notamment son article 28,

Vu la directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d'accise et abrogeant la directive 92/12/CEE, abrogée et remplacée par la directive (UE) 2020/262 qui entrera en vigueur le 13 février 2023,

Vu la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2008/118/CE et la directive (UE) 2020/262 (refonte) en ce qui concerne les comptoirs de vente hors taxes situés dans le terminal français du tunnel sous la Manche,

Vu le rapport n° 705 (2020-2021) de M. Jean-François Husson, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances du Sénat, déposé le 23 juin 2021, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2021 et notamment son article 7 ter,

Vu l'article 20 de la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021,

Vu le Bulletin officiel des finances publiques du 22 juillet 2021,

Considérant que l'article 13 de la directive (UE) 2020/262 établissant le régime général d'accise indique que « les États membres peuvent exonérer du paiement de l'accise les produits soumis à accise livrés par des comptoirs de vente hors taxes et emportés dans les bagages personnels des voyageurs se rendant dans un territoire tiers ou dans un pays tiers par voie aérienne ou maritime »,

Considérant que la liaison fixe transmanche est un système de fret et de transport de passagers bénéficiant d'un statut particulier en raison du traité de Cantorbéry signé en 1986, par la France et le Royaume-Uni,

Considérant que cette liaison est constituée d'un double tunnel ferroviaire, assorti d'une galerie de service, foré sous la Manche, entre Folkestone (Kent, Royaume-Uni) et Coquelles (Pas-de-Calais, France), ainsi que de terminaux pour le contrôle de l'accès aux tunnels et de la sortie de ceux-ci,

Considérant en conséquence qu'elle présente les caractéristiques d'une liaison maritime avec des contrôles aux frontières à ses deux terminaux d'accès,

Considérant que le terminal de la liaison fixe transmanche et le port de Calais permettent l'un comme l'autre d'effectuer une traversée maritime dans les mêmes conditions,

Considérant que le terminal de la liaison fixe transmanche devrait donc être considéré comme équivalent à un port au sens de la directive 2008/118/CE du Conseil,

Considérant que le 31 décembre 2020, à la suite du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, la liaison fixe transmanche est devenue une liaison transfrontalière entre l'Union et un pays tiers,

Considérant que, ainsi que le permet la directive (UE) 2020/262, les compagnies de transbordeurs ont réintroduit les ventes hors taxes de biens à bord de leurs navires pendant les traversées maritimes vers le Royaume-Uni,

Considérant que des comptoirs de vente hors taxes ont également été ouverts dans les ports de Calais et de Dunkerque,

Considérant en outre, que le Royaume-Uni a déjà autorisé l'ouverture d'un point de vente à son terminal de la liaison fixe transmanche à Folkestone,

Considérant que, à la suite du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, la proposition de directive précitée réintroduit dans la directive 2008/118/CE du Conseil relative au régime général d'accise une disposition antérieure de la directive 92/12/CEE reconnaissant le statut spécifique de la liaison fixe transmanche et la similitude de sa situation avec celle d'un port,

Considérant que ladite proposition rétablit aussi une disposition antérieure autorisant la réouverture de comptoirs de vente hors taxes dans le terminal français de la liaison fixe transmanche à Coquelles, comme c'est notamment le cas dans les ports français de Calais et de Dunkerque ainsi que dans le terminal britannique de la liaison fixe transmanche à Folkestone,

Souligne la nécessité de rétablir l'équité des conditions de concurrence sur le marché des liaisons transmanche, quel que soit le mode de transport utilisé par les voyageurs,

Se félicite que la proposition de directive précitée rétablisse des conditions de concurrence équitables entre le terminal britannique et le terminal français de la liaison transmanche, ainsi qu'entre les différents modes de transports permettant d'effectuer la traversée de la Manche,

Souhaite que le champ d'application de ladite proposition de directive reste strictement limité à la liaison transmanche afin de prévenir tout risque de fraude, les conditions de contrôle des passagers prévalant dans le terminal de Coquelles (Pas-de-Calais, France) permettant de garantir que ceux-ci sont effectivement à destination du Royaume-Uni et munis de billets, ce qui assimile ledit terminal à un « port sec »,

Appelle en conséquence à une adoption rapide de la proposition de directive précitée, afin de contribuer à rétablir durablement des relations aussi fluides que possible entre l'Union européenne et le Royaume-Uni après le Brexit, dans l'intérêt des États, des économies et des citoyens de l'Union européenne,

La réunion est close à 10 h 30.