Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, M. Jacques Legendre, président, a tout d'abord présenté le bilan de l'année parlementaire 2007-2008, qui confirme l'amélioration des conditions de l'application des lois, récemment adoptées.
Il a ainsi rappelé que deux des trois lois votées par le Parlement depuis octobre 2007 dans le secteur de compétences de la commission des affaires culturelles étaient déjà applicables. Il s'agit de :
- la loi du 20 août 2008 instituant un droit d'accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire. A cet égard, le président a relevé un certain paradoxe : celui d'une loi très vite applicable, mais difficile à appliquer !
- la loi du 3 juillet 2008 relative à la lutte contre le trafic de produits dopants ;
Cette loi était d'application directe. Il a souligné que les dispositions résultant des travaux de la commission avaient porté leurs fruits lors du dernier Tour de France, en permettant plus de contrôles et des sanctions plus rapides, notamment de coureurs étrangers ;
- enfin, la loi n° 2008-112 du 8 février 2008 relative aux personnels enseignants de médecine générale, issue d'une proposition de loi sénatoriale.
Le président a noté que cela confirmait une tendance observée au cours de la XIIe législature, puisque l'on constate que près de 65 % des lois votées étaient applicables, 71 % des lois l'étaient devenues en moins d'un an et 100 % en moins de deux ans, marquant une certaine célérité du Gouvernement à mettre en oeuvre rapidement les réformes annoncées par le Président de la République pendant la campagne électorale.
Il a indiqué que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche pouvait être inscrit au tableau d'honneur, la loi d'orientation et de programme pour la recherche étant devenue applicable moins d'un an après sa promulgation, de même que celle relative aux libertés et responsabilités des universités (alors que cette dernière nécessitait 13 décrets d'application).
S'agissant de l'application de la loi de programme pour la recherche, M. Jacques Legendre, président, a souhaité revenir sur la protestation formulée au cours de la dernière réunion de commission par Mme Marie-Christine Blandin, concernant la non-application, par l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES) de dispositions affirmant la nécessité du partage de la connaissance et du dialogue entre la société et ses chercheurs.
Il a observé que l'AERES étant une autorité administrative indépendante (AII), elle n'était donc pas sous la tutelle du ministère de la recherche, ce qui posait effectivement un problème de suivi de l'application des lois. Il a affirmé, cependant, que les AII devraient appliquer les lois.
Il a souligné, à cet égard, comme tel est le cas pour l'Agence française de lutte contre le dopage ou la Délégation à la Langue française, l'intérêt de l'élaboration d'un rapport annuel déposé sur le Bureau du Parlement permettant d'entendre les Présidents de ces autorités et, le cas échéant, de rectifier le tir.
a constaté que le ministère chargé de la culture et de la communication peinait à appliquer les lois relevant de son secteur. Toutefois, cette critique peut être tempérée, dans la mesure où les lois concernées relèvent des secteurs qui seront prochainement réformés. C'est ainsi que la loi relative au droit d'auteur dans la société de l'information, qui attend toujours 10 décrets d'application, sera modifiée par le projet de loi « Création et Internet » et que les lois relatives à la communication vont être revues dans le cadre de la réforme de l'audiovisuel public.
De la même façon, M. Jacques Legendre, président, a noté que si le ministère de l'éducation nationale ne se hâtait pas pour la mise en oeuvre de la loi pour l'avenir de l'école adoptée en avril 2005, c'était aussi parce que le ministre actuel mettait en oeuvre une nouvelle politique qui rendra parfois caduques les dispositions adoptées par le précédent gouvernement.
Enfin, le président a observé que l'année 2008 se caractérisait par une meilleure implication des rapporteurs de la commission des affaires culturelles au suivi de l'application des lois, notamment à travers la participation à plusieurs instances :
- comité de suivi chargé de suivre le passage à l'autonomie des universités ;
- commissions constituées par le ministère de la recherche et de l'enseignement supérieur sur le rapprochement universités-Grandes écoles, ou sur les enseignants chercheurs.
Il a rappelé, en outre, qu'un groupe de travail commun avec la commission des finances avait été mis en place pour réfléchir aux nouvelles modalités de financement des universités, et qu'il avait rendu un rapport d'information au mois de juin 2008.
a également relevé que dans le secteur culturel, Mme Catherine Morin-Desailly avait souhaité faire le point sur les difficultés d'application de la loi relative aux libertés et responsabilités locales dans son volet relatif aux enseignements artistiques et avait publié un rapport d'information dressant un bilan d'étape de la décentralisation dans ce secteur. Elle est depuis invitée à participer à certaines réunions interministérielles destinées à préparer la publication de décrets attendus dans ce secteur.
Par ailleurs, M. Jacques Legendre, président, a constaté peu de progrès en matière d'application du stock de lois plus anciennes, les retards persistant pour ces lois, particulièrement dans les secteurs de la culture, de la communication et de l'éducation.
En conclusion, le président a fait distribuer aux commissaires un document détaillé de l'application de toutes les lois relevant des secteurs de compétences de la commission.
La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France, sur le Rapport au Parlement sur l'emploi de la langue française, dressant un bilan de l'application de la loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française.
À titre liminaire, M. Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France, a présenté le rapport de la délégation générale comme le bilan des évolutions, sur la période 2007-2008, de l'action coordonnée des administrations concernées par la politique linguistique gouvernementale. Il a souligné le fait qu'un tel rapport était présenté à la représentation nationale pour la première fois dans le cadre d'une audition.
Il a observé, tout d'abord, que, malgré la vocation interministérielle de la délégation, les administrations ne communiquaient qu'inégalement les données relatives à la mise en oeuvre, dans leur champ de compétence respectif, de la politique linguistique du Gouvernement. Des enquêtes ponctuelles ont permis, toutefois, d'analyser l'efficacité des actions menées par les administrations pour garantir le droit au français dans deux domaines particulièrement sensibles : le monde du travail et celui de la recherche scientifique.
Une première enquête, menée à partir d'un panel de sept millions de salariés dans des entreprises de vingt salariés et plus, a révélé que 25 % des salariés étaient amenés à recourir, dans le cadre de leur travail, à une langue étrangère, dont l'anglais dans 90 % des cas. En outre, 31 % des personnes interrogées ont déclaré recevoir des messages en langue étrangère, alors que cela représente une gêne pour 23 % d'entre eux, cette situation pouvant éventuellement déboucher sur des sentiments d'exclusion.
a ajouté que ces résultats avaient été exposés à l'occasion d'un séminaire, en décembre 2007, sur le français en tant que langue de l'entreprise. Dans le cadre de cette réunion, les pratiques linguistiques des entreprises ont fait l'objet d'une réflexion approfondie, notamment en matière de défense de la langue française, mais aussi d'amélioration des compétences linguistiques dans le monde de l'entreprise.
En outre, une enquête sur la place du français dans le domaine de la recherche scientifique, menée à partir d'un panel de 2.000 directeurs de laboratoire et directeurs de recherche, a permis de constater la suprématie de l'anglais dans les sciences exactes conjuguée à une domination plus nuancée dans les sciences humaines et sociales. Ces résultats soulignent la nécessité d'encourager beaucoup plus fortement la diffusion des travaux scientifiques en langue française.
s'est employé, ensuite, à commenter l'état de l'application de la loi du 4 août 1994 précitée par les administrations. Il a relevé que, dans le domaine de la consommation, les informations communiquées par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et la Direction générale des douanes (DGD), qui disposent de près de 10 000 agents chargés de veiller à l'application de la loi, ne font pas apparaître d'évolutions significatives : si l'on constate une tendance à l'augmentation du nombre des contraventions, les manquements constatés demeurent de faible gravité et le nombre de décisions des tribunaux en la matière restent stables, de l'ordre d'une centaine par an.
Il a souligné, en revanche, un fait nouveau : les atteintes au droit du travail, s'agissant de l'emploi de la langue française dans les entreprises, rencontrent désormais un écho dans une opinion publique qui témoigne d'une sensibilité accrue vis-à-vis du rôle du français dans le renforcement de la cohésion nationale. Au nombre des affaires portées devant la justice et impliquant des entreprises accusées de ne pas respecter les règles relatives à l'usage du français sur le lieu de travail, figure la décision du tribunal administratif de Paris, du 27 juin 2008, de condamner l'INSERM pour avoir imposé l'usage de la seule langue anglaise dans l'audition des équipes de direction au Conseil scientifique.
Dans ces conditions, M. Xavier North a reconnu qu'un effort massif devrait être engagé en faveur du français dans la recherche et l'enseignement supérieur. Il a notamment fait référence aux données transmises par la Chambre de commerce et d'industrie de Paris qui révèlent une augmentation significative des modules délivrés en anglais dans les écoles de commerce prestigieuses, au détriment de l'enseignement en français.
Il a estimé, par ailleurs, que les efforts en matière de défense de la langue française devaient également être intensifiés dans le domaine de la publicité. Il a notamment insisté sur le fait que l'affichage publicitaire pose de sérieux problèmes de respect de l'usage de la langue française. A cet égard, il a relevé un avis rendu par le Conseil de l'éthique publicitaire en 2007 qui formule un certain nombre de recommandations en vue de susciter l'envie de se réapproprier notre langue chez les publicitaires. Dans cette démarche de sensibilisation, un partenariat avec France Télévisions peut être envisagé.
a rappelé la place importante accordée par la délégation à deux problématiques particulières : la pratique de la langue française par les migrants et la promotion des langues régionales de France.
En matière de lutte contre l'illettrisme, les tests menés lors des journées d'appel et de préparation à la défense révèlent qu'un nombre préoccupant de jeunes (12 % en métropole, 30 % outre-mer en 2007) quittent l'enseignement en grande difficulté de lecture. La bonne maîtrise du français, à l'oral comme à l'écrit, est donc aujourd'hui un objectif prioritaire de l'éducation nationale et des programmes rénovés visant à prévenir l'illettrisme sont entrés en vigueur en 2008 à l'école, et le seront au collège en 2009.
a souligné le rôle du français en tant que vecteur de l'intégration sociale pour les migrants. La loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile a en effet fait de l'évaluation du degré de connaissance de la langue française une étape majeure de l'intégration républicaine dans la société française. En outre, la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale prévoit que la formation professionnelle tout au long de la vie au sein de la fonction publique territoriale comprend des actions de lutte contre l'illettrisme et pour l'apprentissage de la langue française.
Il a, par ailleurs, salué l'implication de la Haute assemblée dans le débat qui a conduit à la reconnaissance constitutionnelle de la valeur patrimoniale des langues régionales de France, à l'occasion de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Leur enseignement, proposé aux élèves dans les écoles, collèges et lycées de France métropolitaine et d'outre-mer, continue de s'inscrire dans le dispositif rénové de l'enseignement des langues régionales mis en place au cours des années scolaires précédentes.
S'agissant du travail d'enrichissement de la langue française, le délégué général a souligné l'importance des travaux de la commission générale de terminologie et de néologie qui produit 317 termes nouveaux, publiés au Journal officiel. Pour répondre au souhait d'une meilleure diffusion de ce vocabulaire, la délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) a modernisé et amélioré son outil de diffusion sur Internet. Un nouveau site en libre accès depuis septembre 2007, intitulé « FranceTerme » offre une base de données regroupant le vocabulaire recommandé, des rubriques destinées à un public diversifié et un outil de collaboration entre les diverses commissions spécialisées.
Sur la place du français dans les organisations internationales, M. Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France, a relevé l'interprétation à la fois restrictive et extensive de la loi à laquelle se prête la délégation générale. Celle-ci met traditionnellement l'accent, tour à tour, sur une organisation internationale, comme cela a été le cas auparavant pour l'Organisation des nations unies (ONU) à New York puis pour les organes de l'ONU en Europe. La délégation générale s'intéresse aujourd'hui plus particulièrement à la place du français dans l'architecture institutionnelle du droit international. Malgré la parité théorique des deux langues officielles de la Cour européenne des droits de l'homme, le français et l'anglais, M. Xavier North a regretté qu'eu égard au rôle central des juristes dans la détermination du régime linguistique applicable, la rédaction des décisions et des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme se caractérise, compte tenu de la répartition entre anglophones et francophones, par un déséquilibre en faveur de l'anglais. Il importe donc d'encourager les diplomates et les fonctionnaires internationaux à intensifier leurs efforts dans la pratique du français au sein des instances juridiques internationales.
La demande de français dans le monde demeure forte : si le nombre de professeurs de français dans le monde reste stable (près de 900.000), celui des étudiants de français dans notre réseau de centres culturels est en augmentation, notamment dans les pays émergents.
En outre, le délégué général a indiqué que, s'agissant de la place du français sur Internet, un rééquilibrage entre l'anglais et les autres langues était en train de s'opérer. Si la place de l'anglais sur la toile a diminué de moitié en grande partie du fait de la montée en puissance du chinois, celle du français demeure satisfaisante dès lors que, pour une communauté francophone évaluée à 1,97 % de la population mondiale, la proportion de contenus francophones sur Internet est estimée à 4,41 %. Il a ajouté que le poids cumulé des langues romanes sur Internet reste considérable : à 100 pages en anglais correspondent 55 pages en langues romanes ; sur le total des pages de la toile (toutes langues confondues), les pages en langues romanes représentent 12,6 %. Or, à l'intérieur de l'espace des langues romanes, le français dépasse l'espagnol et le portugais alors que le nombre d'hispanophones et de lusophones dans le monde (au total 605 millions) est beaucoup plus important que celui des francophones.
Evoquant le XIIe sommet de la francophonie qui s'est tenu à Québec du 17 au 19 octobre 2008, M. Xavier North, délégué général à la langue française et aux langues de France, a relevé que pour la première fois dans l'histoire de la francophonie institutionnelle a été adoptée une résolution spécifique sur la langue française. Dans cette résolution, les chefs d'Etat et de gouvernement demandent notamment au Secrétaire général de la francophonie d'entamer les démarches visant à conclure un pacte linguistique avec les Etats et les gouvernements qui le souhaitent. Ils demandent également à l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) d'accompagner les Etats qui s'engagent en faveur du français pour contribuer à garantir un enseignement de qualité à tous les niveaux de formation.
S'agissant de la place du français dans les institutions de l'Union européenne (UE), le Commissaire européen en charge du multilinguisme, M. Léonard Orban, est intervenu dans le cadre des Etats généraux du multilinguisme, qui se sont tenus le 26 septembre 2008 à la demande de Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication : c'est la première fois que la question a été abordée sous l'angle des langues parlées par les sociétés civiles, et pas seulement en termes de traduction des documents de l'UE dans des langues autres que l'anglais. Ces Etats généraux ont recommandé, notamment, un projet de résolution à soumettre au prochain Conseil des ministres de l'UE chargés de l'éducation, de la culture et de la jeunesse, qui préconise une réflexion sur la pertinence et la faisabilité d'un grand programme européen de soutien à la traduction, qui pourrait être au plurilinguisme ce que le programme ERASMUS est à la mobilité des personnes dans l'UE.
Un large débat s'est ensuite engagé.
Après avoir salué la qualité du rapport de la délégation générale à la langue française et aux langues de France, M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis des crédits de la francophonie, a tout d'abord insisté sur le fait que la francophonie, qui incarne au niveau international la promotion de la langue française, n'était pas une cause perdue, comme en témoigne le récent rapport de M. Hervé Bourges, intitulé : « Pour une renaissance de la francophonie » et remis en juin 2008 au secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie. Il a regretté le manque de visibilité de la politique francophone de la France, soulignant que la politique linguistique du Gouvernement devrait s'articuler plus efficacement avec l'action extérieure de la France en matière de francophonie, véritable vecteur de puissance, encore insuffisamment exploité par notre diplomatie. En outre, il a salué la consécration dans la Constitution de l'attachement de la République à la francophonie, se réjouissant qu'elle apparaisse, au même titre que la construction européenne, dans notre texte fondamental.
a relevé ensuite l'enjeu fondamental que constitue pour la francophonie la compétitivité de la production culturelle à caractère multimédia en langue française. A cet égard, il a souhaité des précisions sur la participation éventuelle de la DGLF à des projets visant à développer l'accessibilité des contenus numériques francophones sur Internet, qui permettraient, peut-être, d'envisager à terme la création d'une bibliothèque numérique francophone ou encore d'un portail francophone.
Il s'est interrogé, en outre, sur la position de la DGLF vis-à-vis de la proposition, formulée dans le rapport de M. Hervé Bourges, visant à créer une « Académie francophone » qui aurait la charge « de penser l'évolution de la langue comme langue vivante, productrice, créatrice, afin d'en protéger le dynamisme et la richesse ».
Enfin, faisant référence, notamment, au rôle exercé par la délégation générale dans le développement de la maîtrise du français par les migrants et dans la lutte contre l'exclusion linguistique, il s'est prononcé en faveur de la mise en oeuvre d'un partenariat avec l'Education nationale, afin de renforcer la place de la francophonie, son histoire, ses valeurs et ses figures de proue, au sein des programmes scolaires. Cette démarche serait en effet susceptible de faire de la francophonie un véritable vecteur de l'intégration en permettant aux jeunes Français issus de l'immigration de faire le lien entre leurs racines parentales et leur nationalité française à travers la célébration dans les manuels scolaires de grandes figures de la culture francophone d'origine africaine ou asiatique, telles que Senghor ou Bourguiba. A cet égard, il a évoqué sa participation à la journée « Lire en fête », en octobre 2008, qui lui a permis de constater une demande d'intégration particulièrement forte de la part de jeunes élèves d'origines très diverses, et ce à travers la lecture ou l'écriture en langue française.
a souligné l'importance du réseau international des professeurs de français ainsi que du réseau d'établissements culturels dont dispose notre pays au travers des alliances françaises et des centres culturels. Il a regretté que les centres culturels et les alliances françaises voient leurs moyens diminuer de façon significative, alors qu'ils connaissent un essor particulièrement dynamique, comme en Inde par exemple. C'est pourquoi il a souhaité une analyse plus fine de la fréquentation de notre réseau culturel extérieur et de son coût global. Il a également rappelé qu'une vision d'ensemble, incluant les établissements de diffusion de la recherche scientifique francophone, était indispensable.
a, pour sa part, regretté la présence insuffisante, dans les messages diffusés aux Jeux Olympiques de Pékin, du français, pourtant langue officielle de l'olympisme.
a déploré que le sanctuaire de la langue française que devraient constituer l'enseignement supérieur et la recherche soit atteint dans sa vocation francophone, comme l'illustre l'affaire de l'INSERM. Il s'est déclaré particulièrement préoccupé par le fait que l'anglais s'impose très largement désormais dans les congrès scientifiques internationaux et que le nombre de publications des revues scientifiques anglophones dépasse sensiblement celui des revues francophones.
a dénoncé l'argument selon lequel un coût trop important de la traduction devrait conduire l'UE à limiter son soutien en faveur de la traduction des documents de travail de la Communauté, trop souvent avancé par nos partenaires anglophones. Il s'est, au contraire, déclaré favorable à un renforcement du soutien financier de l'Union dans le domaine de la traduction et a recommandé la poursuite du développement de la connaissance de la langue des autres dans tous les Etats membres, ceux-ci ne pouvant faire l'économie de l'apprentissage par leurs citoyens d'au moins deux langues de la Communauté.
Il a également souhaité la plus grande vigilance des pouvoirs publics français face à une tendance lourde, dans certains établissements d'enseignement prestigieux, à considérer l'anglais comme principale langue de travail.
leur a apporté les éléments de réponse suivants :
- s'agissant du développement de la production culturelle à caractère multimédia en langue française, il a rappelé la démarche de numérisation entreprise par la délégation générale à travers l'ouverture de portails en langue française. La DGLF participe en effet à des projets visant à développer l'accessibilité des contenus francophones sur Internet, comme en témoigne la mise en ligne d'un portail « Corpus de la parole » qui a pour objectif d'offrir une vitrine des langues pour valoriser le patrimoine linguistique, en donnant accès en ligne à un catalogue collectif de fonds sonores transcrits et numérisés en français et dans différentes langues parlées sur le territoire national ;
- sur la question de l'enrichissement de la langue française et la prise en compte de la créativité linguistique des peuples francophones, le délégué général a souligné la coopération étroite que la délégation entretient avec ses partenaires francophones, notamment suisses et québécois, ces derniers étant particulièrement inventifs en matière de néologie. Concernant la proposition de création d'une académie francophone suggérée par le rapport de M. Hervé Bourges, il a considéré, à titre personnel, qu'il serait préférable d'envisager la transformation du jury du « Prix des cinq continents », dont est membre Jean-Marie-Gustave Le Clézio, Prix Nobel de littérature, en une « Académie des cinq continents » qui permette de valoriser les oeuvres littéraires francophones ;
- soulignant l'importance d'une francophonie au service de la cohésion sociale dans notre pays, il a déclaré que l'étape suivante consisterait en la création d'un portail sur Internet destiné aux migrants désireux de maîtriser la langue française et à leurs formateurs ;
- s'agissant du dispositif français d'établissements culturels à l'étranger, on dénombre approximativement un million d'apprenants de la langue française (940.000 inscriptions en 2007 à des cours de français dans les alliances françaises et les centres culturels français dans le monde). Une étude s'impose très certainement sur le rôle des établissements culturels français, qui ont vocation à participer au rayonnement culturel de notre pays dans le monde ;
- en matière de promotion internationale du patrimoine culturel français il convient de saluer la présence de La Villette au sommet de la francophonie à Québec, l'exportation de l'exposition « Ombres et Lumières » dans plusieurs pays d'Europe centrale et orientale, ainsi que l'action de CulturesFrance en faveur de la valorisation à l'extérieur de la culture française ;
- M. Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre, a pu constater, en sa qualité de Grand témoin de la francophonie aux Jeux Olympiques de Pékin, des progrès considérables dans la présentation des compétitions olympiques en français, bien souvent au premier rang dans l'ordre de présentation ;
- enfin, s'agissant des menaces qui pèsent sur l'évolution du nombre de publications scientifiques en langue française, il a partagé le diagnostic dressé par M. Jean-Claude Etienne. Il a en particulier insisté sur la nécessité de défendre la place du français dans le domaine des sciences humaines et sociales dès lors qu'un concept en langue française n'est jamais tout à fait l'équivalent exact du concept en langue anglaise.
Enfin, la commission a procédé à l'audition de Mme Catherine Bréchignac, présidente du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), accompagnée de MM. Arnold Migus, directeur général, Alain Resplandy-Bernard, secrétaire général, et Arnaud Benedetti, directeur de la communication.
En introduction, M. Arnold Migus, directeur général du CNRS, a rappelé que dans l'ensemble des grands pays industrialisés, la qualité de la recherche est liée à celle de leurs universités, elle-même corrélée à leur degré d'autonomie et à la hauteur de leurs investissements. A ce titre, il s'est réjoui que la France commence à s'aligner sur ce modèle à travers la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités et grâce à l'augmentation des moyens attribués.
Rappelant que le CNRS comprend aujourd'hui 26.000 agents et plus de 7.000 contractuels, il a présenté les grandes lignes de sa réforme :
- sur le fond, le CNRS est transformé en une agence de moyens, qui pilotera un réseau de laboratoires gérés par les universités, comme tel est aujourd'hui le cas des organismes nationaux de recherche en Allemagne, en Grande-Bretagne ou au Japon ;
- sur la forme, il sera divisé en six grands instituts thématiques qui auront une double fonction, d'opérateur pour les laboratoires qu'ils gèrent, et d'agence d'investissement pour les laboratoires qu'ils ne gèrent pas, parce qu'ils dépendent d'un autre institut ou d'une université. M. Arnold Migus a insisté, à cet égard, sur le fait que la transformation du CNRS en agence de moyens serait d'autant plus rapide que le nombre de laboratoires gérés directement par les universités augmenterait.
Il a déclaré que le CNRS avait déjà prévu que les financements seraient effectués sur la base d'un cahier des charges reposant sur les critères suivants :
- la garantie que l'administration du laboratoire est assurée toute l'année ;
- l'existence d'un chef de laboratoire indépendant responsable des marchés passés selon les règles européennes de transparence ;
- et l'alignement sur les meilleures pratiques universitaires.
a souhaité préciser que le rôle d'agence de moyens serait également joué à l'égard des personnels affectés dans les universités.
a évoqué, ensuite, la politique de ressources humaines du CNRS qui permettra d'améliorer le recrutement :
- d'une part, en favorisant une plus grande différenciation dans les salaires, suivant le principe selon lequel pour avoir de bons chercheurs, il faut verser de bons salaires. Outre les primes d'excellence, sont mises en place les « chaires CNRS » qui permettront à des jeunes chercheurs de pouvoir mener leur activité à temps plein pendant 10 ans, avec une prime salariale et une charge d'enseignement réduite. Les promotions peuvent, en outre, intervenir rapidement - le plus jeune directeur de recherche a ainsi 22 ans - et l'évaluation du travail est renforcée grâce à un suivi individuel susceptible d'aboutir à des avis réservés ou d'alerte, voire des licenciements ;
- d'autre part, en encourageant la diversification des modalités de recrutement. A cet égard, la possibilité pour le CNRS d'embaucher des chercheurs en contrat à durée indéterminée, introduite par un amendement à l'Assemblée nationale, sera très utile. En effet, le fort pourcentage de chercheurs étrangers (25 %) impose de leur proposer un statut attractif. En effet, le concours du CNRS est largement ouvert sur l'extérieur afin de recruter les meilleurs éléments et la qualité du recrutement est démontrée par le fort taux de jeunes chercheurs du CNRS financés par le Conseil européen de la recherche, sur la base des « ERC Starting grants ». Sur les 12 % de chercheurs français reçus, plus des trois quarts sont ainsi issus du CNRS, qui représente un contingent plus important que l'ensemble des chercheurs espagnols.
Enfin, évoquant le budget pour 2009, Mme Catherine Bréchignac a souligné que l'apparente stabilité des dotations masquait en réalité une baisse des moyens, du fait de l'augmentation du coût de prise en charge des retraites et de l'annonce de l'augmentation du gel des crédits à hauteur de 6 % pour la recherche et de 0,5 % (contre 0,25 % auparavant) pour les salaires.
Un débat s'est ensuite engagé.
s'est inquiété, tout d'abord, de la baisse de l'emploi scientifique prévue pour ces prochaines années, puis a souhaité connaître quels seraient les liens du CNRS avec l'Agence nationale de la recherche (ANR). Il s'est enfin interrogé sur la pertinence d'exclure les sciences du vivant et les technologies du logiciel du champ de compétences du CNRS.
a souhaité savoir quelles seraient les actions du CNRS pour entraîner les autres acteurs dans sa volonté de réforme.
a déclaré que les primes d'excellence et la possibilité d'embaucher en contrat à durée indéterminée constituaient des éléments de dynamisme intéressants. Il s'est inquiété, néanmoins, des possibilités offertes au CNRS d'étendre son réseau à un plus grand nombre d'universités, dans la mesure où la recherche est le label de la qualité de l'enseignement.
a enfin déploré la complexité du nouveau système mis en place ainsi que la baisse du budget de la recherche, surtout par rapport aux promesses annoncées, et il a mis en avant le risque de dissolution du CNRS en cas d'échec de la réforme.
a apporté les éléments de réponse suivants :
- la place de la France dans la recherche mondiale impose que les universités soient à la fois concurrentes et partenaires, ce qui passe par leur indépendance et un pilotage par une tête de réseau qui doit définir une politique nationale ;
- le CNRS doit garder dans son champ de compétence l'ensemble des disciplines, la pluridisciplinarité étant l'un des atouts majeurs pour faire avancer le front de la recherche. Néanmoins, l'existence de nombreux instituts dans le domaine des sciences de la vie incitera le CNRS à davantage se concentrer, dans ce domaine, sur les interfaces avec les autres disciplines. Une réflexion nationale sur la simplification du paysage de la recherche en sciences de la vie et sur la santé reste souhaitable. Sur la question des technologies du logiciel, la définition de frontières avec les compétences de l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA) et du Commissariat à l'énergie atomique seront assez aisées à trouver ;
- les suppressions d'emplois sont financièrement plus que compensées par l'augmentation de la dotation. Le CNRS recrutera donc moins, mais renforcera son attractivité ;
- alors que la programmation et le financement de la recherche à long terme (plus de trois ans) et à court terme (pour la communauté de recherche émergente) seront assurés par le CNRS, l'ANR aura en charge le financement à moyen terme avec une évaluation des thématiques particulièrement intéressantes à développer ;
- la simplification du fonctionnement de la recherche passe par une gestion indépendante des laboratoires avec une traçabilité de leurs dépenses ;
- le CNRS entraînera les autres acteurs en montrant l'exemple dans son attachement à la réussite de la réforme.
- Présidence de M. Jacques Legendre, président -