Commission des affaires économiques

Réunion du 20 février 2013 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • plantation
  • vigne
  • vin
  • vitivinicole

La réunion

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La commission examine le rapport et le texte de la commission sur la proposition de résolution européenne n° 286 (2012-2013) adoptée par la commission des affaires européennes en application de l'article 73 quater du Règlement, sur le régime des autorisations de plantation de vigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Si nous n'avons pas connu de situation d'effondrement des prix du vin en Europe, alors que la consommation a baissé depuis plusieurs décennies, si nous n'avons pas connu de situation structurelle de surproduction de vin alors même que la consommation domestique déclinait, nous le devons certainement au système des droits de plantation, qui a permis la mise en oeuvre d'une stratégie de montée en gamme.

Or, dans le cadre de la reforme de l'Organisation commune de marché (OCM) vitivinicole de 2008, la suppression de ce dispositif a été programmée pour 2015, avec possibilité pour les États membres de l'Union européenne de reculer l'échéance de trois ans.

Nous ne connaissons que trop bien les motifs idéologiques d'une telle décision. En matière agricole, l'approche de la Commission européenne et de certains États membres est marquée par l'ultralibéralisme.

La volonté de supprimer toute régulation et de livrer les acteurs économiques aux divagations des marchés a déjà fait beaucoup de dégâts ... et continuera à en faire si nous restons passifs. C'est pourquoi professionnels de la filière viticole et élus ont mené la bataille sans faiblir, depuis 2008, pour sauvegarder les droits de plantation de la vigne. Nous n'avons jamais été aussi près d'aboutir, mais il ne faut pas relâcher notre vigilance. C'est l'objet de la proposition de résolution européenne qui est présentée à notre commission : exiger qu'une solution complète et pérenne soit apportée au niveau communautaire pour maintenir un système de droits de plantation, qui régule les capacités de production de vin en Europe.

J'aborderai dans mon rapport quatre points. Tout d'abord, le dispositif actuel des droits de plantation ainsi que les risques liés à leur disparition totale. Ensuite, le rappel de la bataille menée contre la Commission européenne et ses services pour remettre sur la table le dossier des droits de plantation. Puis, le résumé de la proposition du groupe de haut niveau de décembre dernier, qui constitue une réelle avancée, mais sur laquelle des clarifications doivent encore être apportées. Enfin, la présentation de la proposition de résolution européenne de nos collègues Simon Sutour et Gérard César, adoptée par la commission des affaires européennes, que je propose à la commission des affaires économiques d'adopter, sous réserve de quelques modifications mineures.

Les droits de plantation que nous connaissons aujourd'hui sont le fruit d'une longue histoire. La France a été pionnière avec le décret de 1953, qui a instauré une stricte discipline d'encépagement. L'objectif était à la fois quantitatif, visant à éviter la surproduction, et qualitatif : planter de meilleures vignes pour faire du meilleur vin.

Le dispositif français de contingentement de la capacité de production est apparu suffisamment efficace pour inspirer l'Europe, qui s'est dotée en 1976 d'un dispositif commun à l'ensemble de ses États membres, prévoyant de soumettre à autorisation administrative toute plantation nouvelle de vigne destinée à produire du raisin de cuve.

Système éprouvé, les droits de plantation présentent en particulier un avantage : contrairement aux solutions de gestion des surplus de production - aide au stockage public ou privé, distillation de crise - ils ne coûtent rien aux finances européennes.

La décision de les supprimer lors de la réforme de l'OCM vitivinicole de 2008 est donc pour le moins surprenante. Certes, la Commission européenne nourrissait ainsi l'espoir que la production européenne de vin pourrait s'accroître afin de conquérir les marchés extérieurs, mais sur lesquels les vins européens sont déjà présents, en particulier les vins italiens, espagnols et français, puisque l'Union européenne couvre près de 70 % du volume des exportations mondiales de vin.

Fallait-il pour autant supprimer un dispositif qui permettait d'éviter l'anarchie dans la production de vin européenne ?

La suppression des droits de plantation fait en effet peser de lourds risques sur l'équilibre de la filière vitivinicole :

- un risque de déplacement des zones de production, notamment vers les zones de plaine où les contraintes sont moins fortes que dans les zones traditionnelles de production de vin : meilleure irrigation, terrain plus plat et donc facilité de mécanisation ;

- un risque d'extension des superficies actuelles ou du nombre de producteurs, qui pourrait se faire au détriment de la qualité, avec une industrialisation de la viticulture ;

- un risque de détournement de notoriété, avec la possibilité pour les vins sans indication géographique d'être produits dans la zone géographique d'une appellation d'origine, créant ainsi la confusion dans l'esprit du consommateur.

Toutes ces raisons expliquent que les professionnels et les élus, en particulier ceux de l'association nationale des élus du vin (ANEV), se soient mobilisés pour remettre en cause la libéralisation des droits de plantation, avant qu'arrive l'échéance de sa mise en oeuvre, fixée à 2015.

Après l'Allemagne en mars 2010, la France a demandé en janvier 2011 le maintien des droits de plantation. En avril 2011, 9 États membres ont écrit à la Commission européenne pour demander une réforme de la réforme, rejoints bientôt par la quasi-totalité des États membres producteurs de vin. Allemagne, France, mais aussi Italie, Espagne, Portugal, Autriche, Hongrie, Slovénie, République Tchèque, Bulgarie, Roumanie, Luxembourg, Grèce et Chypre se sont ainsi prononcés pour la remise en cause du choix fait en 2008.

Le Sénat a joué son rôle dans la mobilisation contre la libéralisation des droits de plantation : en février 2011, la Commission des affaires européennes avait adopté une proposition de résolution, devenue résolution du Sénat, demandant le maintien d'un régime d'encadrement des droits de plantation après 2018. Plus récemment, des communiqués de presse ont été publiés à la suite de réunions du groupe d'études Vigne et Vin présidé par notre collègue Gérard César, pour rappeler sur ce point la position unanime des sénateurs, tous groupes politiques confondus.

Le Parlement européen, enfin, est un allié précieux dans cette bataille. Il était hostile à la libéralisation lors de la réforme de l'OCM vitivinicole de 2008, mais il n'y avait pas alors la codécision. Appelé à se prononcer, cette fois en codécision, sur la réforme de la politique agricole commune (PAC), le Parlement européen confirme sa position favorable au maintien des droits de plantation. Sur proposition de son rapporteur, Michel Dantin, la commission Agriculture et développement rural a demandé leur prolongation jusqu'en 2030. Le sujet sera donc immanquablement débattu dans le cadre des réunions du trilogue entre Commission, Conseil et Parlement européen, destinées à aboutir à un accord sur le paquet de réforme de la PAC.

Devant la pression des opinions publiques et des États, le commissaire européen à l'agriculture, M. Dacian Ciolos, a mis en place début 2012 un groupe d'experts de haut niveau (GHN), associant représentants des États membres et des professionnels. Le but de ce groupe était de dresser le bilan du fonctionnement du système actuel de droits de plantation et de faire des propositions. Le peu d'avancées enregistrées lors des premières réunions du GHN ont laissé craindre une manoeuvre dilatoire. La pression a cependant été maintenue et le groupe a finalement présenté des conclusions lors de sa réunion du 14 décembre 2012, qui vont dans le sens d'un maintien d'un système de régulation des droits de plantation au-delà de 2015.

Les propositions du GHN constituent le socle de base de nouvelles propositions législatives en cours de rédaction, qui devront être intégrées à la réforme en cours de la PAC.

Le GHN suggère non pas la reconduction à l'identique du dispositif des droits de plantation, mais la mise en place d'un nouveau système d'encadrement des plantations, qui en serait proche. Il reposerait sur des autorisations administratives non cessibles, qui s'appliqueraient dans tous les États membres à l'exception des États membres n'ayant qu'une production résiduelle de vin, et pour tous les types de vins, y compris ceux sans indication géographique. Ce point est très important car il permet une régulation globale du marché vitivinicole.

Le GHN prévoit la fixation d'un taux plafond annuel d'augmentation des plantations au niveau communautaire, qu'aucun État-membre ne pourra dépasser, afin de limiter la croissance de la capacité de production. Chaque État membre serait libre de choisir un taux plus bas en fonction « de critères objectifs et non-discriminatoires », en prenant en compte les recommandations des organisations professionnelles reconnues et représentatives.

Si la somme des demandes annuelles de plantations nouvelles était inférieure au taux national, elles seraient automatiquement accordées. Dans le cas contraire, les États membres devraient appliquer les critères de priorité définis au niveau communautaire, comme par exemple une priorité aux jeunes agriculteurs, complétés éventuellement de critères nationaux.

Le GHN prévoit que le nouveau dispositif entrerait en application à la date de fin du dispositif des droits de plantation, c'est-à-dire au 1er janvier 2016 pour les États membres qui choisiraient de ne pas opter pour leur prolongement permis jusqu'au 31 décembre 2018. Il serait instauré pour une durée de six ans.

Le chemin fait par le GHN est donc très important. Il n'est plus question aujourd'hui de libéraliser totalement les droits de plantation, mais de moderniser le dispositif, en accordant certaines souplesses.

Il reste encore cependant quelques incertitudes qu'il faudra lever dans les prochaines semaines. La première est procédurale et finalement assez simple à résoudre : les propositions du GHN doivent désormais être traduites en droit européen. Passer par une nouvelle initiative de la Commission européenne, soumise à codécision, prendrait trop de temps. La meilleure formule, vers laquelle nous nous dirigeons, est donc celle d'une proposition de la présidence irlandaise de l'Union européenne, tendant à modifier le texte de l'OCM actuellement en discussion dans le cadre de la réforme de la PAC. Cette proposition est attendue pour la mi-mars.

La deuxième difficulté concerne les équilibres du nouveau régime lui-même. D'abord, il ne s'agit pas que les taux soient fixés à un niveau trop élevé : de ce point de vue, une définition du taux plafond à travers les actes délégués serait plus sûre que si elle était fixée par la Commission seule, sans possibilité d'opposition du Conseil et du Parlement européen. Ensuite, les États membres doivent pouvoir disposer de réelles possibilités de modulation du taux, et ne pas être forcés de s'aligner sur le taux plafond.

La troisième difficulté est celle de la transition. Il est difficilement praticable de maintenir l'ancien système prolongé au choix des États membres jusqu'à la fin 2018, tandis que les autres seraient passés au nouveau système dès le 1er janvier 2016. Une date de mise en oeuvre harmonisée paraît plus pertinente. Un autre problème tient à l'utilisation de la réserve de droits actuellement constituée, qui correspond en France à environ 7 à 8 % de la surface plantée. Ces droits, nés des précédentes campagnes d'arrachage, disparaîtraient avec le nouveau système. Il conviendrait de permettre à leurs actuels titulaires de les exercer avant le basculement dans le nouveau régime, qui pourrait dans ces conditions être fixé au 1er janvier 2019 pour tout le monde.

Enfin, une durée limitée à six ans pour le nouveau système est trop courte. Certes, des obstacles juridiques s'opposent à ce qu'il soit instauré pour une durée totalement indéterminée. Mais il doit au moins y avoir une pérennité sur l'ensemble de la période d'application des textes relatifs à la PAC actuellement en discussion. Cette solution aurait l'avantage de donner une visibilité aux acteurs économiques de la filière vitivinicole.

Je terminerai mon rapport en exprimant mon soutien plein et entier à la proposition de résolution européenne sur le régime des autorisations de plantation de vigne, adoptée le mois dernier par la commission des affaires européennes. Cette proposition de résolution, courte et percutante, salue les avancées en faveur d'un encadrement des plantations de vigne, à rebours de l'option libérale qui avait été retenue jusqu'à présent.

J'en profite pour saluer le travail de notre ministre de l'agriculture, M. Stéphane Le Foll, qui a su nouer les bonnes alliances et fait preuve d'efficacité pour permettre de sortir du statu quo.

Mais la proposition de résolution rappelle aussi que nous sommes au milieu du chemin et elle vise à maintenir la pression sur les partenaires de la France dans la négociation sur le futur système d'encadrement des plantations, dont les détails sont encore à définir.

En adoptant cette proposition de résolution, le Sénat donne une arme supplémentaire de négociation au Gouvernement français pour rappeler les exigences de notre pays en matière de régulation du marché vitivinicole.

Je vous propose d'apporter quelques retouches au texte initial de la commission des affaires européennes :

- pour rappeler que le nouveau régime doit s'appliquer à l'ensemble des États membres ayant une production de vin significative, et pour l'ensemble des catégories de vin ;

- pour exiger que le nouveau dispositif soit pérenne, ce qui constitue une formule plus positive qu'une simple opposition à une durée de six ans. En conséquence, il n'y a plus de sens à demander un rapport à mi-parcours, qui pourrait d'ailleurs être quelque peu dangereux s'il amenait à devoir renégocier le dispositif à peine mis en oeuvre ;

- pour fusionner les alinéas 7 et 9, qui sont redondants, et préciser que l'équilibre des marchés peut être l'un des critères de définition du taux national d'augmentation des plantations.

Les conclusions du GHN rendues le 14 décembre dernier ont constitué un immense soulagement pour le monde viticole, qui voit s'éloigner la perspective d'une libéralisation totale. Tout danger n'est cependant pas définitivement écarté. En adoptant cette proposition de résolution, le Sénat rappelle son hostilité à l'orientation libérale dont les agriculteurs sont les premières victimes, et dont les viticulteurs auraient pu pâtir durement. Nous rappelons également que nous serons vigilants, car le diable est dans les détails, et tant que les négociations n'auront pas abouti sur l'ensemble du dispositif de la future PAC, des « mauvais coups » seront encore possibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Je félicite notre collègue pour son rapport. Nous avons travaillé ensemble sur ce sujet. Le colloque que nous avions organisé en avril 2011 au Sénat a permis de nouer le contact avec les pays producteurs et de faire ensuite avancer le dossier à l'échelle européenne.

La commission des affaires européennes s'est réunie le 20 janvier dernier sur ce texte ; il est donc bien de faire le point un mois plus tard.

Les efforts conjugués des sénateurs, des professionnels, des associations et des élus locaux ont permis de faire avancer les choses. Je remarque que nos collègues députés ne se sont guère investis sur ce thème.

Le délai de six ans actuellement prévu est bien trop court ; il faut davantage de visibilité pour les viticulteurs.

Le taux annuel final doit tenir compte de l'état du marché national, mais aussi régional. Laissons à l'État, avec les interprofessions du secteur, le soin de régler ce point.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Le Cam

Notre groupe est par principe favorable à l'introduction d'éléments de régulation. Nous n'avons pas eu le même succès sur les quotas laitiers, malheureusement, mais le sujet différait il est vrai.

Le taux maximal d'accroissement des surfaces de plantations, fixé par la Commission européenne, soulève un certain nombre d'interrogations.

En janvier, les députés européens ont adopté un amendement maintenant la réglementation actuelle jusqu'en 2030, ce qui va dans le bon sens.

Nous voterons ce rapport car le combat mené est juste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernadette Bourzai

Félicitations au rapporteur. Son travail retrace une période compliquée commencée à Bruxelles en 2007, lorsque la précédente commissaire européenne à l'agriculture, Mme Mariann Fischer Boel, a proposé de libéraliser le marché des droits à plantation. La France a alors demandé une étude d'impact. Puis la réforme de l'OCM vitivinicole a été votée, avec comme objectif la banalisation de la production de vin. Un peu de régulation serait aujourd'hui opportun après une telle période, et le dispositif qui nous a été présenté va en ce sens.

Le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, M. Stéphane Le Foll, a su rassembler une majorité d'États membres de l'Union autour de nous. Le Parlement européen est également favorable au maintien des droits de plantation.

La non cessibilité desdits droits et la pérennisation de la réglementation jusqu'en 2030 sont souhaitables. Je regrette simplement que nous n'ayons pas su mener le même combat sur les quotas laitiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Nous nous réjouissons de cette volonté de régulation. Si nous voulons vraiment sauver la viticulture française, il nous faut jouer sur la qualité, car la concurrence internationale est très forte sur les volumes. Or, la libéralisation des droits à plantation entraînerait nécessairement une baisse de la qualité.

Pourquoi les tableaux de comparaison ne comportent-ils pas d'éléments sur les productions du sud-est de la France ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Les tableaux que vous évoquez ne sont pas ceux du Sénat, mais ceux du rapport de Mme Catherine Vautrin, député en 2010. Ils montrent néanmoins qu'un million d'hectares sont aujourd'hui disponibles dans les zones d'appellation. La libéralisation aurait désorganisé le marché et nuit à la qualité.

C'est bien le Sénat qui est à l'origine de la mobilisation, ainsi que l'a dit notre collègue Gérard César.

Le délai de six ans est trop court, et nous devons proposer un amendement à cet égard.

Il faut tenir compte du marché dans la fixation des taux, je partage entièrement ce point de vue.

Certes, comme l'a souligné notre collègue Gérard Le Cam, des doutes existent, mais nous nous employons à les réduire. Ils étaient d'ailleurs bien plus importants à l'origine.

S'agissant de la fixation du taux au niveau communautaire, il revient à la Commission européenne de faire une proposition, et au Parlement européen et au Conseil de la retenir éventuellement. Le taux national, quant à lui, ne pourra dépasser le taux communautaire. Nous souhaitons que les structures locales soient consultées en vue de sa fixation.

3,2 millions d'hectares de vignes sont plantés dans l'Union européenne, dont 806 241 en France. 1 900 à 2 300 hectares sont plantés chaque année. Si le taux est fixé à un faible niveau, il n'y aura pas de dérapage.

Saluons le travail effectué par le ministre en charge de l'agriculture. L'adoption de ce texte à l'unanimité lui donnerait un appui utile.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L'amendement n° COM-1 rappelle que le nouveau dispositif d'encadrement des plantations de vigne doit s'appliquer à l'ensemble du territoire de l'Union européenne et non sur option des États membres, et qu'il concerne tous les types de vin, les vins sous signe de qualité mais aussi les vins sans indication géographique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

L'expression « production de vin significative » n'a pas de sens très précis ...

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Elle renvoie à la règle européenne « de minimis », pour les pays réalisant des très petites productions.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Il nous manque 40 voix pour obtenir la majorité qualifiée dans les instances européennes. La Pologne en représente 27. Pourquoi ne pas lui permettre de planter un peu de vigne, en échappant au nouveau dispositif, en échange de son soutien ?

L'amendement n° COM-1 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L'amendement n° COM-5 rappelle l'objectif du nouveau dispositif d'autorisation des plantations de vigne, qui est d'équilibrer l'offre et la demande de vin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Vous faites référence à un « objectif d'équilibre de l'offre et de la demande ». Or, si les consommateurs boivent moins, cela a pour conséquence qu'il faudrait réduire les surfaces. Ne doit-il pas y avoir d'autres objectifs, notamment celui d'accroître la demande ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Lorsque vous faites allusion aux « marchés vitivinicoles », de quels marchés parlez-vous : mondiaux ? européens ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

La consommation de vin décroît d'année en année. Ce n'est donc pas la peine d'augmenter les surfaces. Les pays nouvellement producteurs se chargent en outre d'alimenter l'offre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

On ne prend pas en compte la production par hectare. Or, pour le champagne, elle est trop importante dans notre pays. Il vaut mieux jouer sur la qualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Ce thème me semble relever davantage de l'interprofession ...

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Nous faisons référence au marché européen. Nous n'avons pas de moyen d'action directe au niveau mondial, même si la production européenne représente les deux-tiers de la production mondiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

Dans notre proposition de résolution, nous parlons de prise en compte de l'état du marché national et régional.

L'amendement n° COM-5 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L'amendement n° COM-2 indique le souhait du Sénat que l'encadrement des droits de plantations soit pérenne, et non limité à six années, de sorte que la négociation ne s'ouvre pas de nouveau dans quelques années sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Il vaudrait mieux « demander » plutôt que simplement « souhaiter » une telle pérennité.

L'amendement n° COM-2 ainsi modifié est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L'amendement n° COM-6 vise à ce que l'entrée en vigueur du nouveau dispositif d'encadrement des droits de plantation soit simultanée dans tout le territoire de l'Union européenne, pour éviter la confusion qui naîtrait de la coexistence de plusieurs systèmes.

L'amendement n° COM-6 ainsi modifié est adopté.

L'amendement n° COM-3 supprime l'alinéa 7, qui est assez redondant avec les alinéas suivants. Il clarifie les exigences du Sénat sur les deux taux.

Le taux plafond européen doit être fixé à un niveau raisonnable, comme prévu dans la proposition de résolution initiale.

Le taux national, inférieur ou égal au taux plafond, doit pouvoir être défini en fonction de la situation des marchés, car l'objectif du dispositif est d'éviter les déséquilibres économiques au sein de la filière vitivinicole.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Cet amendement répond à la question de notre collègue Gérard Bailly : il s'agit de marchés européens, nationaux et régionaux.

L'amendement n° COM-3 ainsi modifié est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L'amendement n° COM-4 propose de supprimer le rapport à mi-parcours demandé par la proposition de résolution. Bien souvent, un rapport à mi-parcours sert à supprimer un dispositif, ce qui n'est pas notre objectif. Par ailleurs, nous demandons un dispositif pérenne et non plus temporaire limité à six ans. Il n'y a donc plus de mi-parcours.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lasserre

Cela a-t-il un sens de demander ainsi un règlement pour l'éternité ?...

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Notre objectif est que ce dispositif se cale sur la durée de l'OCM vitivinicole, mais celle-ci est renégociée tous les sept ans.

L'amendement n° COM-4 est adopté.

L'ensemble du rapport et du texte est adopté à l'unanimité dans la rédaction issue des travaux de la commission.

La commission des Affaires économiques demande à se saisir pour avis du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires et désigne M. Yannick Vaugrenard comme rapporteur.

La commission des Affaires économiques propose les candidatures de M. Philippe Leroy et de Mme Bernadette Bourzai pour siéger au Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois.

La commission procède à l'audition de M. Jean-René Buisson, président de l'association nationale des industries alimentaires (ANIA).

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je ne vous surprendrai pas en indiquant que le sujet de préoccupation qui nous réunit aujourd'hui concerne la production, la commercialisation et la distribution des produits culinaires transformés. Je le souligne d'emblée, la première priorité est de ne pas entamer la confiance des consommateurs dans la filière agroalimentaire, d'autant que, dans l'affaire dite Spanghero-Comigel, il s'agit non pas d'une crise sanitaire mais d'un cas de fraude. Il est essentiel de rappeler clairement cette distinction et je mentionne simplement, comme je l'ai fait hier au cours de l'audition des trois ministres concernés, que l'utilisation de la viande de cheval plutôt que celle de boeuf peut comporter un avantage du point de vue nutritionnel. Cela étant, les fraudes avérées méritent des sanctions exemplaires car elles risquent de fragiliser l'ensemble de la filière.

Je souhaite, Monsieur le Président, que vous puissiez faire le point de la situation et nous dire, le cas échéant, quelles mesures de contrôle interne nouvelles vous envisagez.

Debut de section - Permalien
Jean-René Buisson, président de l'association nationale des industries alimentaires (ANIA)

Notre profession traverse une période très difficile et sans précédent puisque, comme vous l'avez rappelé, il s'agit d'un cas inédit de fraude sur la nature du produit. Pour vous éviter de réentendre des informations dont vous avez pu prendre connaissance hier lors de l'audition des ministres, je me contenterai d'insister sur la nécessité d'identifier rapidement les responsables de l'opération de substitution de viande de cheval en lieu et place de viande de boeuf. Tant que les enquêtes n'auront pas été menées à leur terme, on risque de laisser peser une suspicion sur l'industrie agroalimentaire dans son ensemble, ce qui cause un préjudice considérable à cette dernière car le doute s'installe dans l'esprit des consommateurs sur les produits alimentaires.

Il est indispensable de bien cadrer les problématiques et les enjeux. A l'heure actuelle, la fraude a été identifiée. Je n'aborderai pas ici les aspects européens de cette affaire tout en rappelant qu'il convient d'éclaircir le rôle des différents traders qui sont intervenus. Au niveau français, la responsabilité de l'entreprise Spanghero est clairement établie puisque cette dernière connaissait la nature exacte des produits qu'elle recevait, le code douanier apportant des indications d'une précision qui ne laisse aucune place au doute. De plus, d'après les informations dont nous disposons, cette entreprise avait, de façon très formelle, passé commande de viande de cheval en Roumanie, et elle semble bien s'être livrée par la suite à un ré-étiquetage de ces produits, l'entreprise roumaine n'ayant a priori rien à se reprocher dans cette opération.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

C'est une information que j'entends pour la première fois : personne encore n'avait affirmé que la commande initiale portait sur de la viande de cheval.

Debut de section - Permalien
Jean-René Buisson, président de l'association nationale des industries alimentaires (ANIA)

Vous avez la primeur de cette information : elle confirme qu'il s'agit bien d'une fraude manifeste. Pour des raisons à la fois politiques et sociales - 300 emplois étant concernés - on a rendu à cette entreprise son agrément, ce qui suscite de légitimes interrogations puisque la coopérative en charge de cette usine n'en a pas suspendu les dirigeants, ce qui me parait reprochable.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Précisons bien la situation : Spanghero est une filiale à 100 % d'une coopérative locale.

Debut de section - Permalien
Jean-René Buisson, président de l'association nationale des industries alimentaires (ANIA)

Exactement. Tout ceci crée un trouble dans la mesure où le pas en arrière que je viens d'évoquer peut conduire l'opinion à se demander si la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) n'a pas pris initialement une décision trop rapide et si l'entreprise Spanghero est véritablement fautive. Or on dispose, à mon sens, de suffisamment d'éléments objectifs qui établissent la responsabilité de cette dernière et il est souhaitable que des sanctions soient prononcées rapidement. Nous souhaitons donc que des décisions soient prises au plan judiciaire et nous envisageons, le cas échéant, de nous porter partie civile.

Par ailleurs, je précise qu'une fois sortie de l'usine Spanghero, la viande a été livrée dans l'entreprise de confection de lasagnes Comigel dont la responsabilité peut être également recherchée. En effet, Comigel a reçu un produit dont l'étiquetage n'était pas conforme à la réglementation puisque le nom du pays n'y figurait pas, comme nous avons pu le vérifier : cela semble donc établir une négligence de sa part. De plus, on peut se demander si cette entreprise, en traitant la viande, n'avait pas la possibilité d'identifier qu'il s'agissait de viande de cheval. Mais, dans l'hypothèse où elle ne décongèle pas la viande - et Comigel affirme que tel est bien le cas - il lui est effectivement difficile de déterminer s'il s'agit de cheval ou de boeuf.

Il faut donc très vite établir clairement les responsabilités pour sortir de cette phase d'incertitude. Redisons-le, nous ne sommes pas dans une situation de crise sanitaire, comme celle de la vache folle dont je garde un souvenir précis. Aujourd'hui le problème est celui de la confiance vis-à-vis de nos entreprises et il convient de la restaurer en sanctionnant la fraude.

Il est difficile de quantifier avec précision les volumes concernés par cette fraude, mais on estime que de 5 % à 15 % des produits à base de viande seraient impliqués.

D'autres sujets sont fréquemment évoqués, notamment par les journalistes, et c'est l'occasion pour moi d'apporter quelques précisions. Tout d'abord, l'opération en cause a fait l'objet d'une procédure de trading assez longue depuis l'usine roumaine jusqu'à l'entreprise Spanghero. Ce sont toutefois des circuits assez classiques d'achats de matière première au niveau européen. Il convient ici de rappeler que les industries alimentaires de notre pays traitent, dans leurs usines, 70 % de la production agricole française, ce qui représente - nous divulguons ce chiffre pour la première fois ce matin - 75 % des approvisionnements en matières premières de l'agroalimentaire. La grande majorité de nos productions bénéficie donc d'un circuit de traçabilité court. J'ajoute que 80 % des productions de nos usines sont consommées en France. Cette prédominance de l'approvisionnement en France explique l'implantation de nos usines sur l'ensemble du territoire et non pas en zone portuaire : tel serait le cas si nos matières premières provenaient de l'étranger. Les industries agroalimentaires sont, de ce fait très concernées par la situation de l'agriculture et par l'évolution de la politique agricole commune.

La raison pour laquelle des achats de viande à l'étranger perdurent est que nous n'avons pas assez de vaches de réforme en France - il en manque chaque année 800 à 900 tonnes qui ne peuvent pas être fournis par la production nationale - ce qui s'explique par des orientations de politique agricole et des choix d'investissements des agriculteurs.

J'indique également que nous sommes plutôt satisfaits de la rapidité de réaction des pouvoirs publics. Ces événements démontrent que le processus de traçabilité a bien fonctionné et il faut souligner que le nôtre est un des meilleurs au monde : en deux jours, la DGCCRF est ainsi parvenue à remonter l'ensemble de la chaine d'approvisionnement européenne. Ce n'est cependant pas suffisant pour traiter le problème inédit et spécifique de fraude sur la nature du produit que nous rencontrons aujourd'hui.

Je rappelle, de manière générale, que notre sécurité alimentaire est l'une des meilleures du monde : par exemple, on recense dans notre pays 200 fois moins d'incidents liés à la qualité des produits par million d'habitants qu'aux Etats-Unis. Ces bons résultats se rattachent à l'efficacité de notre dispositif de contrôle interne et également externe assuré par la DGCCRF. L'action de cette dernière ne doit pas être minimisée et elle se traduit, dans notre secteur agroalimentaire, par des résultats positifs à 99,7 %, ce qui témoigne du haut niveau de conformité de nos productions. Le manque de moyens de la DGCCRF est souvent déploré et nous sommes favorables à leur renforcement.

J'ajoute que nos contrôles internes à la profession portent sur la bactériologie, la propreté et l'hygiène des produits ainsi que sur les conditions de travail et le respect des normes dans l'industrie alimentaire. Cependant, nous ne nous étions pas encore posé la question de savoir si le produit que l'on nous présentait comme du boeuf avait bien cette nature. Cela peut paraitre surprenant de façon rétrospective, mais nos dispositifs de contrôle reposaient sur une certaine relation de confiance avec nos industriels et sur l'hypothèse que des fraudes de nature pénale n'entraient pas dans le cadre de leur comportement raisonnable et prévisible.

Notre objectif consiste désormais à remédier à cette faille. Afin de tenir compte de l'élément nouveau que constitue la fraude sur la nature du produit, nous allons réaménager notre référentiel de contrôle vis-à-vis de nos entreprises, d'une part, en rappelant le cadre existant et, d'autre part, en attirant l'attention sur une liste d'indices qui doivent constituer des signaux d'alerte, par exemple en s'interrogeant sur la provenance de certaines importations de viande ou sur la complexité du circuit d'approvisionnement. De tels indices doivent conduire à déclencher des contrôles en amont du fournisseur final : nous allons ainsi désormais étendre nos contrôles aux fournisseurs des fournisseurs et nous procéderons alors à des tests, non pas nécessairement d'ADN, mais plus vraisemblablement histologiques, l'essentiel étant d'adapter notre appareil à la recherche des fraudes sur la nature du produit. Nous allons également codifier l'ensemble de ces nouvelles procédures.

Le second enjeu, qui est beaucoup plus complexe, concerne la problématique de l'origine des produits alimentaires. L'état des lieux a été dressé et une directive européenne, qui sera applicable fin 2014, prévoit que tout produit élaboré majoritairement à base de viande doit être signalé en termes de pays d'origine. En ce qui concerne la viande de boeuf contenue dans des produits élaborés, la commission européenne est aujourd'hui saisie d'une étude qui doit déboucher à la fin de 2013 sur des conclusions. Nous souhaitons que cette démarche soit accélérée et puisse aboutir dès juin 2013.

Reste enfin à traiter le cas des produits comportant par exemple une douzaine d'ingrédients. Ces derniers soulèvent de complexes problèmes d'étiquetage et il convient, à notre sens, d'éviter de mettre en place une « usine à gaz » au niveau français. C'est, en effet, la législation européenne qui régit normalement ce domaine et nous souhaitons que la question soit examinée et résolue dans ce cadre. Je fais également observer que la question de l'étiquetage est importante mais qu'elle n'a pas de lien direct avec la fraude que nous constatons aujourd'hui puisqu'elle concerne non pas l'origine mais la nature du produit.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Vous l'avez parfaitement démontré, il est quasiment impossible, quelque soient les procédures de contrôle, d'empêcher ou de prévenir une fraude de ce type.

En revanche, je voudrais insister, comme je l'ai fait hier en présence des trois ministres, sur la problématique de notre approvisionnement en protéines végétales génétiquement modifiées (PGM) en provenance notamment d'Amérique du sud ou du nord et qui alimentent 90 à 95 % du bétail français. Je rappelle que nous n'avons pas la possibilité d'utiliser dans notre pays des PGM qui nous permettraient d'améliorer le rendement des productions de protéines végétales, alors que notre commerce extérieur est déficitaire à 85 % dans ce secteur qui concerne une famille de produits - soja, pois, lin - qui s'intègre dans l'alimentation animale. Face à cette situation, je souhaite que notre ministre de l'agriculture s'adresse à l'Union européenne pour solliciter une aide spécifique dans ce domaine afin que notre pays puisse affronter la concurrence extrêmement forte qui se développe.

En second lieu, on doit être très attentif aux difficultés de l'industrie agroalimentaire. Je fais observer que les chiffres qui ont étés cités sur la présence de l'industrie agroalimentaire et la commercialisation de 80 % de ses produits en France témoignent du déficit de la capacité d'exportation de notre pays dans ce secteur. Au-delà d'un nécessaire progrès dans la maitrise des langues étrangères et de l'accompagnement des entreprises à l'exportation, l'effort doit se concentrer sur le développement de produits à forte valeur ajoutée ainsi que d'entreprises de taille intermédiaire trop peu nombreuses aujourd'hui.

Partisan du développement de la concurrence et de l'ouverture des frontières, j'évoque cependant souvent la problématique des salons et de nos centrales d'achat - quatre d'entre elles réalisent 80 % du chiffre d'affaires - qui tend à transformer notre marché en une véritable « passoire » pour les importations.

Debut de section - PermalienPhoto de Renée Nicoux

J'insiste à mon tour sur la nécessité de consolider la relation de confiance qui s'est instaurée entre le consommateur et le producteur afin de ne pas jeter le discrédit sur toute une filière. J'estime souhaitable de communiquer positivement pour souligner la rapidité de la découverte de la fraude, l'efficacité de la DGCCRF et pour rappeler que la profession exerce elle-même des contrôles nombreux et efficaces.

Debut de section - Permalien
Jean-René Buisson, président de l'association nationale des industries alimentaires (ANIA)

Vous venez d'aborder plusieurs sujets différents.

En premier lieu, l'alimentation OGM des animaux est effectivement un enjeu essentiel. J'illustre mon propos en évoquant le thème des farines animales. Je précise que nous ne sommes pas favorables au retour des farines animales. Il convient cependant de rappeler, par exemple, que les poissons d'élevage sont aujourd'hui nourris avec du soja OGM et on nous dit qu'il faudrait 7 kg de poissons pour en produire un seul sans alimentation OGM. Il convient, à notre sens, de trouver dans ce domaine des solutions à la fois efficaces et qui ne soulèvent pas d'inquiétudes en termes de santé publique.

Ensuite, nos résultats à l'exportation ne sont effectivement pas si brillants qu'il n'y parait. Les excédents de l'agroalimentaire se concentrent, en effet, sur les boissons alcoolisées et les produits frais comme le fromage, les autres secteurs étant, dans l'ensemble, déficitaires. Paradoxalement, parmi les entreprises qui bénéficient d'une image et d'une réputation internationale de grande qualité figurent un certain nombre de PME qui ne disposent parfois même pas d'un salarié en charge de l'exportation. Il est donc urgent de mieux organiser nos entreprises pour favoriser leur potentiel à l'exportation.

En troisième lieu, nous sommes attentifs à l'agriculture qui constitue la filière en amont de la nôtre. Il est vrai que la spéculation sur les matières premières entraîne des arbitrages sur le marché agricole et des choix de structures qui ne sont pas favorables à la satisfaction de nos besoins. Même si le sujet est rarement abordé car il n'est pas « politiquement correct », il nous semble que l'agriculture gagnerait à s'organiser différemment afin de mieux s'adapter aux besoins de notre pays.

Nous nous demandons également si les grandes manifestations alimentaires comme le Salon international de l'agroalimentaire (SIAL) ne devraient pas être plus systématiquement organisées à l'étranger pour favoriser nos exportations.

Enfin, les consommateurs souhaitent de façon très légitime savoir ce qu'ils mangent et je signale que nous sommes très actifs en matière d'étiquetage environnemental : la moitié du total des entreprises volontaires pour participer à l'expérimentation conduite par le ministère en charge de l'environnement appartiennent à la filière agroalimentaire. En ce qui concerne l'affichage d'origine, nous allons faire en sorte que des actions rapides et pragmatiques puissent être conduites au niveau de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Je me limiterai à deux remarques. Tout d'abord, je souligne à nouveau que le maïs ou le soja génétiquement modifiés entrent dans la catégorie des plantes et non pas des organismes. La distinction me parait essentielle car une conception extrémiste du slogan « non aux OGM » nous conduirait à stopper la production de vaccins, de bière ou de pain.

Je rappelle également que la plupart des poissons sont carnivores et mangent des protéines animales en mer ou en rivière. Je crois que la distinction pertinente doit ici être faite entre les protéines animales qui émanent de ruminants et celle qui proviennent de poulets, de porcs ou d'animaux omnivores. On voit mal quelles difficultés sanitaires pourraient entrainer l'alimentation des poissons à base d'os de porc, par exemple. En revanche, s'il fallait nourrir les poissons d'élevage avec des rejets de pêche, un très important déficit en ressources halieutiques se manifesterait très rapidement. J'appelle nos collègues écologistes à tenir compte de ces réalités.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

On parlera donc désormais des « poichons », c'est-à-dire des poissons qui mangent des cochons... Notre pays ne me parait pas prêt à ce qu'on réintroduise des farines animales dans la nourriture des animaux. Nous commettrions une grave erreur.

Cette affaire de fraude montre, à mon avis, que l'étiquetage d'origine est indispensable. Certes, un tel étiquetage n'aurait pas empêché la fraude mais je ne suis pas sûr que Findus gagne en notoriété en indiquant « boeuf roumain » sur ses produits. Pour autant, cette affaire a été très bien traitée par vous et par le Gouvernement. L'absence de risque sanitaire a permis une meilleure acceptabilité par nos concitoyens, mais des sanctions restent indispensables.

Seuls certains de nos concitoyens peuvent aujourd'hui se permettre d'acheter des produits de haute qualité. Or le rôle de votre industrie et de notre agriculture est de nourrir les citoyens quelles que soient leurs ressources. Il faut affirmer des choses simples : nous avons une belle industrie agroalimentaire qui fait de bons produits. Le Salon de l'agriculture doit être l'occasion de rassurer les citoyens, de retisser un lien de confiance.

Cette affaire met en également en cause l'ensemble du système, avec, comme on l'a vu dans les journaux, sept ou huit intermédiaires. L'Europe que nous voulons, c'est une Europe de la sécurité : sécurité des biens et des personnes mais aussi sécurité sanitaire. Cette affaire doit permettre d'aller plus loin en matière de traçabilité et de qualité des produits, en favorisant, par exemple, les circuits courts.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Tandonnet

La question de l'indication des origines ne doit pas être circonscrite à la viande. Je pense aux produits phytosanitaires, pour lesquels nous avons une législation stricte mais peu valorisée si bien que des produits étrangers non soumis à un même niveau d'exigence sont vendus dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Il faut en effet agir au plan européen car on ne peut pas se contenter de mesures franco-françaises. Je me demande si tous les pays européens sont au même stade d'exigence que le nôtre pour ce qui concerne l'identification de l'origine des produits et les normes sanitaires ?

Par ailleurs, notre société s'oriente vers les plats cuisinés. Or la multiplicité des produits entrant dans la composition d'un plat rend les choses très compliquées. Il faut donc rendre les informations lisibles tant pour le professionnel que pour le consommateur.

Nous manquons également de vaches de réforme pour la consommation française. Aux difficultés que vous avez soulignées s'ajoutent les conséquences de l'application de la directive Nitrates qui amène certains éleveurs à abandonner leur profession et à retourner leurs prairies pour faire des céréales.

Les ministres ont parlé hier d'une négociation avec la profession pour un contrat de filière. Quel sera exactement le contenu de ce contrat ?

Debut de section - Permalien
Jean-René Buisson, président de l'ANIA

Le problème sous-jacent est celui des prix. Finançons nous convenablement l'alimentation en France ? De l'agriculteur au distributeur, a-t-on un juste prix de l'alimentation ? Au sein du panier de la ménagère, l'alimentation pesait autour de 15 % il y a une dizaine d'années. Elle représente aujourd'hui 10 % et 8 % chez les jeunes. Il faut cependant préciser que les plus modestes consacrent une proportion plus importante de leurs revenus à l'alimentation. Globalement, cette part est en diminution tendancielle. Attention de ne pas faire de l'alimentation une variable d'ajustement ! La pression serait telle qu'il serait difficile d'utiliser des produits de qualité.

Avec l'augmentation du prix des matières premières et la pression importante exercée par la grande distribution sur les entreprises et sur l'agriculture, la question des prix reste déterminante. Il faut donc s'interroger : qu'est-ce que le juste prix d'un produit de qualité ?

Le Salon de l'Agriculture et les moments de communication qui y sont joints doivent être utilisés pour « repositiver » la situation : nous avons une alimentation et une nourriture que la majorité des pays nous envient. Globalement, nous sommes dans une situation bien meilleure que les anglo-saxons.

S'agissant de l'étiquetage d'origine, nous sommes favorables à une évolution, mais elle doit se faire niveau européen. L'Angleterre, l'Allemagne et l'Italie partagent le même état d'esprit. Les autres pays veulent avoir les résultats des études d'impact. Il ne faut pas créer de législation différenciée entre les différents pays européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Concernant les farines animales, les annonces qui ont été faites tombent au mauvais moment. Je suis parfaitement d'accord avec Didier Guillaume : il s'agit d'un vrai risque.

Il faut que notre pays produise ses propres protéines végétales.

La directive Nitrates constitue une étape importante, nécessaire pour la qualité de l'eau et de l'environnement. Les effets collatéraux soulèvent cependant des difficultés. La politique française devrait conforter la politique européenne pour rectifier le tir.

Pour ce qui concerne la volaille, 46 % des produits consommés en France sont importés. Il faut donc reconquérir le marché national.

Je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit s'agissant de la qualité, des outils et des savoir-faire de notre industrie agroalimentaire.

Quant à l'étiquetage, les consommateurs sont très demandeurs d'une amélioration. Ils vont finir par devenir décideurs par rapport à un marché partiellement virtuel.

Debut de section - Permalien
Jean-René Buisson, président de l'ANIA

Effectivement, les politiques européenne et française doivent conduire à réorienter certaines productions agricoles. Nous vivons encore sur un modèle économique d'après-guerre : une politique intensive. Mais le consommateur se pose des questions : il veut savoir ce qu'il mange et souhaiterait une alimentation de proximité qu'il considère comme plus saine. Il souhaite légitimement consommer des produits qu'il voit et qu'il connaît. L'alimentation de proximité ne représente cependant que 3 à 4 % de l'alimentation, avec des produits 40 % plus chers.

Je pense, pour ma part, que l'alimentation de proximité va se développer. Les consommateurs vont être de plus en plus exigeants en matière d'information d'origine et de composition des produits. Un certain retour aux sources se dessine, et cependant les gens travaillent et continueront également à consommer des plats cuisinés.

Il faut aboutir à un nouvel équilibre, ce qui passe par l'information et l'éducation nutritionnelle dès l'école et dans les cantines scolaires. Toutes les opérations que nous avons sponsorisées associant toute la collectivité et visant à mettre l'enfant en contact avec des produits de qualité ont été des réussites.

En fin de compte, cette affaire conduit à se poser des questions fondamentales : comment va-t-on faire manger les Français à l'avenir ? Comment assure-t-on le passage de l'alimentation industrielle et intensive à une alimentation de proximité ?