Jean-Pierre Vial est nommé rapporteur de la proposition de loi n° 586 (2013-2014) visant à faciliter l'expulsion des squatteurs de domicile.
La commission a ensuite procédé au vote sur la publication du rapport d'information de Mme Esther Benbassa et M. Jean-René Lecerf relatif à la « lutte contre les discriminations ».
Nous devons voter sur la publication du rapport d'information de Mme Esther Benbassa et M. Jean-René Lecerf relatif à la lutte contre les discriminations.
La commission autorise la publication du rapport d'information relatif à la lutte contre les discriminations.
La commission examine ensuite le rapport de M. Jean-Pierre Sueur et le texte proposé par la commission pour la proposition de loi n° 553 (2013-2014) tendant à favoriser le recrutement et la formation des sapeurs-pompiers volontaires.
EXAMEN DU RAPPORT
La proposition de loi sur le recrutement et la formation des sapeurs-pompiers volontaires, déposée par Roland Courteau et Marcel Rainaud, a été co-signée par un nombre important d'élus du groupe socialiste. Dans une société trop souvent marquée par l'individualisme, il est important de développer le volontariat. Or le nombre de sapeurs-pompiers volontaires diminue dans bon nombre de départements. Lors du 120ème congrès national des sapeurs-pompiers qui s'est tenu à Chambéry, l'an dernier, Manuel Valls, alors ministre de l'intérieur, a signé un plan d'action de vingt-cinq mesures pour enrayer la chute du volontariat, en facilitant notamment les conditions d'accès à la formation. Il y a trente ou quarante ans, les conditions de recrutement et de formation étaient légères ; l'on en appelait surtout à l'esprit de solidarité dans les communes et dans les villages. Depuis, le recrutement est devenu plus sélectif et les obligations en termes de disponibilité se sont accrues. Le volontariat est devenu contraignant, moins compatible avec un emploi dans une entreprise. Cependant, qui peut considérer que la formation n'est pas nécessaire ? La loi du 20 juillet 2011 a simplifié un certain nombre d'obligations de formation et le décret du 17 mai 2013 a formalisé le dispositif. Notre collègue Yves Rome, qui préside le conseil général de l'Oise et la Conférence nationale des services d'incendie et de secours nous a parlé d'expérimentations intéressantes pour définir des logiques de formation contribuant à enrayer la diminution du nombre de sapeurs- pompiers volontaires.
S'inscrivant dans cet objectif de simplification, la proposition de loi prévoit que la formation initiale des sapeurs-pompiers volontaires qui dure un mois et demi...
puisse être effectuée dans le cadre du service civique. La formation des sapeurs-pompiers est régie par la loi, de même que les orientations du service civique.
Il m'a paru nécessaire de préciser le texte présenté par Roland Courteau. En contrepartie des frais engagés par les collectivités territoriales, les jeunes volontaires doivent s'engager à servir comme sapeurs- pompiers volontaires, sans préjudice, cependant, en cas d'impossibilité. Même si cet engagement n'est que moral, il reste significatif.
Les responsables que nous avons auditionnés - Yves Rome, notamment - nous ont indiqué que la question du coût pour les collectivités locales ne se posait pas en l'espèce, puisqu'avec la baisse du nombre de volontaires, les conseils généraux ont de moins en moins de formations à assumer.
L'élaboration de stratégies efficaces sans déployer de moyens supplémentaires suffit à enrayer la diminution du nombre des sapeurs-pompiers volontaires. Dans un quartier sensible de mon département, la création d'une section de jeunes sapeurs-pompiers, solidement encadrés et formés, a produit des effets considérables, beaucoup de jeunes choisissant de poursuivre dans cette voie. L'intégration d'une formation au secourisme dans le cursus scolaire serait une autre piste pour favoriser le recrutement.
Je ne doute pas de l'intérêt de cette proposition de loi ; je ne m'attends pas pour autant à ce qu'elle fasse des miracles.
Ceux qui s'inscrivent au service civique ne sont pas nombreux. Nous ne relancerons pas le recrutement des sapeurs-pompiers volontaires sans une action de longue haleine. Commençons par faire la promotion du métier. Dans le Rhône, dont je préside le SDIS depuis quinze ans, nous avons commencé par remettre des volontaires là où il n'y en avait plus, c'est-à-dire à Lyon. Nous sommes allés à l'université proposer des aides aux étudiants.
Les sapeurs-pompiers volontaires sont de plus en plus souvent des professionnels. Le système fait qu'un professionnel a un service encore plus léger qu'un professeur d'université ! Il peut donc facilement s'engager comme sapeur-pompier volontaire pendant son temps libre. Dans mon département, nous avons mis en place un service d'hélicoptères pour qu'on ne soit jamais à plus de quinze minutes d'un centre hospitalier. Nos médecins exercent leur métier de médecin les jours pairs et comme volontaires les jours impairs, ajoutant ainsi à leur fixe, un salaire qui n'est pas soumis à l'impôt.
Nous avons mille jeunes sapeurs-pompiers volontaires dans mon département. Cependant ceux qui sont issus du service civique deviennent professionnels parce que depuis la dernière loi, ils sont intégrés sans concours : cette proposition ne fera pas de miracle.
Je vous remercie d'avoir circonscrit l'intérêt de cette proposition de loi et de nous avoir montré d'autres méthodes possibles pour remédier à l'essoufflement du recrutement des sapeurs- pompiers volontaires.
Le nombre des sapeurs-pompiers volontaires ne diminue pas partout. En Seine-et-Marne, nous en comptons 2 800. Un certain nombre de professionnels, recrutés sur concours, s'engagent comme volontaires - c'est le cas des anciens de la brigade de Paris. Si nous voulons relancer le recrutement de volontaires, il faut que les collectivités locales passent contrat avec les entreprises. En nous liant à la Snecma, par exemple, nous avons pu recruter des sapeurs-pompiers volontaires parmi les chefs de la sécurité. Développons cette forme de collaboration. Paradoxalement, seuls les services de l'État n'accomplissent aucun effort.
Notre corps de jeunes sapeurs-pompiers existe depuis longtemps. Il est bien structuré et fonctionne de manière satisfaisante. La plupart de ceux qui en sont issus passent professionnels, ou bien s'engagent comme volontaires. Actuellement, 90 % des professionnels sont recrutés parmi les volontaires. Cette proposition de loi n'aura pas d'effet miraculeux, sauf si le service civique devenait obligatoire...
Si ce texte va dans le bon sens, nous pouvons jouer sur d'autres leviers. Je ne suis pas très favorable à un volontariat exercé principalement par des professionnels grâce à des heures supplémentaires non fiscalisées. Le recul du nombre de sapeurs-pompiers volontaires se constate de manière objective. Nous pourrions y remédier sans passer par une loi, en sensibilisant les élus. Trop souvent, les maires hésitent à recruter des sapeurs-pompiers volontaires, car ils craignent des absences à répétition. Quant aux entreprises, il faudrait leur assurer un dédommagement à hauteur de leurs dépenses et non des vacations versées aux sapeurs-pompiers volontaires.
L'adaptation des disponibilités est un autre levier sur lequel nous pouvons agir. Il est très facile de trouver des volontaires, la nuit ; ce n'est pas la même chose en journée. La rationalisation des casernes - même si elle est parfois bienvenue - a contribué à faire chuter le nombre de sapeurs-pompiers volontaires. Avoir un corps de volontaires disponibles à tout moment, tel est le vrai enjeu. Cela implique d'assouplir les conditions d'engagement, et d'agir auprès des employeurs qui ne voient pas d'un même oeil leurs employés s'absenter quand il s'agit d'éteindre un incendie ou d'amener quelqu'un au CHU. Je voterai sans réserve en faveur de cette proposition de loi. Au-delà du quantitatif, nous devrons nous interroger sur le qualitatif.
Nous sommes en train de mettre en place une mission d'information qui pourra faire l'inventaire des mesures facilitant l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires.
Les données de la question sont objectives. Il est important de lier formation et engagement. Il serait bon de ne pas parler de patriotisme social qu'aux commémorations du 11 novembre. Dans un passé récent, mes collègues Troendlé et Lecerf ont présenté une proposition de loi sur les cinq gestes qui sauvent. En incorporant un module de secourisme au collège, on contribuerait à promouvoir la mission des sapeurs- pompiers volontaires.
Les professeurs d'université travaillent énormément en dehors de leurs heures d'enseignement - recherche, publications, direction de mémoires et de thèses... Notre travail mérite le respect ! Et cela vaut aussi pour les enseignants du secondaire.
De 2010 à 2011, la baisse du nombre de sapeurs-pompiers volontaires a été de 2 000, de 2 300 de 2011 à 2012 et de 700 l'année suivante. L'inflexion de la tendance montre que la loi du 20 juillet 2011 a produit son effet et l'on a commencé à prendre des mesures dans certains départements pour remédier à la désaffection. Certes, monsieur Mercier, la proposition de loi ne règlera pas tout. Elle sera un signal, et d'autres dispositions viendront la compléter. Monsieur Hyest, vous avez pris d'excellentes mesures en Seine-et-Marne. M. Béchu a indiqué à juste titre la nécessité d'agir aussi sur d'autres leviers. Le cas des professionnels qui s'engagent comme volontaires mérite d'être discuté, notamment avec les organisations de sapeurs-pompiers. Aujourd'hui, les volontaires qui s'engagent au titre du service civique ne peuvent accomplir aucun acte opérationnel. Ils sont souvent employés pour encadrer les jeunes sapeurs-pompiers. Il y a dans toutes les catégories professionnelles des personnes qui manquent de zèle ; Mme Benbassa a eu raison de le dire, beaucoup d'universitaires se donnent du mal pour s'acquitter de leurs fonctions.
Monsieur Vandierendonck, la proposition de loi que vous avez mentionnée sur les cinq gestes qui sauvent est de celles que nous avons adoptées à l'unanimité. Évitons cette perte de temps législatif qui fait que des propositions de loi utiles sont votées sans être mises à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. C'est du gâchis.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article unique
L'amendement n° 1 prévoit qu'un jeune qui aura bénéficié de la formation initiale de sapeur-pompier volontaire dans le cadre d'un contrat de service civique - cela représente un coût de 3 700 euros pour la collectivité locale -s'engagera à exercer la mission de sapeur-pompier volontaire.
L'engagement peut être résilié. Il est sans préjudice si le jeune ne peut s'en acquitter pour cause de déménagement, par exemple.
Un système de remboursement est-il prévu si l'engagement n'est pas respecté ?
Le volontaire est rémunéré au titre du service civique. La formation de sapeur- pompier volontaire ne représente que trente-six jours sur les six mois de service civique. Dans le droit commun, aucun remboursement n'est prévu.
L'engagement de sapeur-pompier volontaire est de cinq ans, pour l'instant. Il peut être résilié à tout moment. Nous ne sommes pas obligés de trancher immédiatement.
L'amendement n° 1 est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La commission examine ensuite le rapport de M. Hugues Portelli sur la proposition de loi constitutionnelle n° 779 (2013-2014) visant à rétablir à sept ans la durée du mandat du Président de la République et à le rendre non renouvelable.
Cette proposition de loi constitutionnelle de nos collègues du groupe RDSE, comme celle qu'ont récemment déposée des députés issus d'un groupe politique différent, rétablit le septennat sous une forme non renouvelable. J'ai vu son auteur en audition. Nous rouvrons ainsi un débat pendant depuis 1958. En effet, dans sa rédaction initiale, la Constitution prévoyait un septennat renouvelable pour un Président de la République élu par un collège électoral qui était celui du Sénat. Cette disposition a été modifiée en 1962, par un référendum, controversé, sur la base de l'article 11 de la Constitution, le Général de Gaulle proposant que le Président soit élu au suffrage universel direct. En 2000, la durée du mandat présidentiel a été réduite à cinq ans, par référendum, en application de l'article 89 de la Constitution. Enfin, depuis la réforme constitutionnelle de 2008, le Président de la République ne peut être réélu qu'une seule fois consécutive.
L'article 5 de la Constitution, inchangé depuis 1958, définit le Président de la République comme un arbitre doté de fonctions importantes en situation de crise (droit de dissolution de l'article 12 et pleins pouvoirs de l'article 16). Le Président de la République est également le chef des armées ; il négocie et ratifie les traités en politique étrangère. Cette conception d'un chef d'État n'était pas celle du Général de Gaulle. Dès le début de son premier mandat, il est intervenu dans le domaine de la politique intérieure, a surveillé l'ordre du jour du conseil des ministres et refusé au Premier ministre le titre de chef du Gouvernement, imité en cela par Georges Pompidou. Avant la révision de 1962, il n'a pas hésité à recourir au référendum à deux reprises pour vérifier qu'il conservait le soutien populaire dans l'exercice de son mandat. La révision de 1962 a concrétisé cette pratique.
Pour le Général de Gaulle, le septennat trouvait un correctif dans l'utilisation du référendum pour s'assurer de la confiance des Français, en cours de mandat. Par conséquent, lorsque le 27 avril 1969, 53 % des électeurs ont voté contre le projet de réforme du Sénat, il a démissionné. En revanche, ses successeurs se sont bien gardés de faire leur cette interprétation de la responsabilité du chef de l'État. Jamais ils n'ont utilisé l'article 11 à des fins constitutionnelles. Ils n'ont pas non plus engagé leur responsabilité. Même quand Jacques Chirac a échoué lors de la dissolution de 1997 ou lors du référendum de 2005, il s'est gardé d'en tirer des conséquences politiques, optant pour une pratique du septennat où le Président de la République s'accommode des situations politiques qui surgissent, sans remettre en cause sa responsabilité.
À trois reprises, la présidence a subi une cohabitation - l'invention du terme, sinon du concept, revient à Édouard Balladur -, période durant laquelle les pouvoirs du Président sont réduits aux acquêts de la Constitution, c'est-à-dire aux dispositions de l'article 5. Le Premier ministre gouverne en s'appuyant sur la majorité de l'Assemblée nationale.
En 2000, une révision, à l'initiative de plusieurs auteurs dont le Premier ministre de l'époque, réduit la durée du mandat présidentiel de sept à cinq ans dans le but de limiter la possibilité d'une cohabitation. Cette révision a paradoxalement été initiée par celui qui a le plus bénéficié des prérogatives du Premier ministre en temps de cohabitation, Lionel Jospin. La loi organique de 2001 a mené la logique à son terme, en inversant le calendrier électoral, de sorte que les élections des députés sont désormais conditionnées par celle du Président. François Mitterrand avait dissous à deux reprises l'Assemblée nationale pour obtenir une majorité compacte au lendemain de son élection. La loi organique de 2001 répond à la difficulté rencontrée par Jacques Chirac d'organiser une dissolution juste avant la fin de son mandat.
Lors de l'institution du quinquennat en 2000, Jacques Chirac était hostile à toute limitation du nombre des mandats consécutifs, c'était le « quinquennat sec ». La révision de 2008 a fait de l'élection présidentielle la seule élection où le nombre des mandats consécutifs est limité - suivant en cela le modèle américain.
La proposition de loi constitutionnelle que nous examinons aujourd'hui a deux objets, l'un affiché, l'autre latent. D'une part, elle rend la fonction présidentielle moins conjoncturelle, axée sur le long terme. De Gaulle a été le premier à manier le long terme dans les domaines essentiels (défense, politique étrangère, planification, aménagement du territoire), avec des responsables politiques et administratifs qui sont restés en place longtemps. Dans d'autres secteurs, sa gestion des affaires a été plus chaotique : à l'éducation nationale et aux universités, talon d'Achille de sa politique, les ministres se sont succédé à une cadence rapide.
La vision à long terme des présidents dans le cadre du septennat s'est toutefois constamment heurtée à la crainte de voir leur autorité ruinée par la perte des élections législatives. Cela a été le cas pour de Gaulle en 1967, pour Pompidou en 1973, avec déjà le projet du quinquennat, pour Valéry Giscard d'Estaing en 1978, avec le discours de Verdun-sur-le-Doubs, pour Chirac et Mitterrand, à trois reprises. Tous avaient une vision à long terme, mais un pilotage à court terme de l'action politique.
Le non-renouvellement du mandat présidentiel introduirait une scansion définitive qui interdirait tout rebondissement. Tandis que le Général de Gaulle, réélu, a été confronté à l'échec et a préféré partir, François Mitterrand et Jacques Chirac ont été réélus après une cohabitation : le Premier ministre avec lequel ils ont cohabité est devenu leur adversaire à l'élection présidentielle. Plutôt que de tirer parti de leur fonction de Premier ministre, chacun - Jacques Chirac en 1988, Édouard Balladur en 1995 et Lionel Jospin en 2002 - a préféré essayer de devenir Président de la République, sans tirer les conclusions de ces échecs : c'est le Premier ministre de cohabitation qui est le candidat du bilan, le Président retrouvant la capacité de se forger un nouveau statut politique : François Mitterrand avait été simultanément chef de l'État et chef de l'opposition, situation assez confortable...
L'objet latent de la proposition de loi constitutionnelle, que son auteur ne cherche pas à cacher, est l'abaissement de la fonction présidentielle. Toutes les révisions proposées par des personnalités de tradition radicale depuis 1958, à commencer par Gaston Monnerville, sont marquées par la nostalgie du régime parlementaire et veulent donner au Président de la République un rôle secondaire. Faute de pouvoir abolir son élection au suffrage universel direct - seule élection qui suscite un engouement dans la population - la proposition crée un septennat condamné à se terminer en cohabitation et non renouvelable. Y voir un retour à la version originelle de la Constitution de 1958 reviendrait à oublier que les auteurs de celle-ci ont imposé le tournant de 1962 et la pratique présidentialiste qui a suivi.
Dans la mise en oeuvre de la IIIème République, à l'inverse, la pratique ultra-parlementaire s'est imposée à partir de 1879, avec la fameuse « constitution Grévy ». Alexandre Millerand, Président de la République après la victoire du cartel des gauches...
n'ayant pas pu résister à la Chambre des députés, a dû démissionner. Il est impossible de revenir sur une pratique durablement installée.
La proposition de révision de Jacques Mézard, si elle a le mérite de relancer le débat sur la fonction présidentielle, propose un retour en arrière à l'opposé du sentiment des citoyens, formellement exprimé par un référendum en 2000 - c'est la seule révision constitutionnelle adoptée régulièrement par référendum. Elle est en outre à rebours de l'accélération actuelle du temps politique, illustrée par la réduction du mandat des sénateurs.
Je propose donc de ne pas adopter cette proposition de loi constitutionnelle.
Les raisons de l'institution du septennat furent des plus contingentes. S'il a été reconduit par la IVème et la Vème Républiques, la fonction a considérablement évolué depuis 1958. Il fait figure d'exception dans les régimes démocratiques européens...
au regard des pouvoirs confiés au Président. Depuis 1981, aucun septennat ne s'est déroulé sans cohabitation ; c'était elle qui était visée par la révision de 2000. Cette proposition veut rétablir la présidence dans une fonction arbitrale. À condition que cela soit souhaitable, suffirait-il d'instituer un septennat non renouvelable pour y parvenir ? Cette dernière disposition est préoccupante. Une cohabitation sans espoir de réélection affaiblirait la fonction présidentielle. Un tel choix doit être opéré en connaissance de cause.
Le calendrier actuel de l'élection présidentielle est déterminé par la date de la mort du président Pompidou, il n'a pas été décidé. En revanche, les élections législatives avaient lieu en mars malgré les dissolutions ; elles sont désormais en juin, tant que les élections présidentielles se déroulent à la même date.
Malgré l'exposé lumineux d'Hugues Portelli, mon appréciation est différente de la sienne. La révision de 2000 a créé un déséquilibre dans un système devenu présidentialiste sans cesser d'être dualiste. Il repose aujourd'hui sur une élection présidentielle intensément anticipée : nous souffrons du syndrome de la campagne pré-présidentielle permanente que l'on peut observer depuis un siècle aux États-Unis. Le Président de la République garde néanmoins un pouvoir de dissolution d'une chambre qui est pourtant élue dans la fidélité à ses options. Nous pouvons considérer que la situation actuelle ne peut être que transitoire.
Lionel Jospin sympathisait d'ailleurs avec le régime présidentiel. Dans le tohu-bohu des idées plus ou moins structurées de changement institutionnel qui circulent, il y a une ambivalence entre le rétablissement, largement utopique, d'un régime parlementaire et le renforcement des pouvoirs législatifs du Parlement, au prix de la suppression de la fonction de Premier ministre et donc de la responsabilité devant le Parlement, pour basculer dans un régime présidentiel.
Le Président de la République est élu au suffrage direct dans quatre régimes parlementaires en Europe : en Pologne, en Autriche, en Finlande et au Portugal. Pour ceux qui veulent, comme moi, éviter des emportements redoutables pour la gouvernabilité du pays et revenir à une fonction présidentielle forte mais arbitrale, la proposition de loi est une condition nécessaire, quoique non suffisante. Ce qui la rendrait suffisante serait que les deux familles politiques habituellement au second tour changent le profil de leurs candidats - cela aurait été possible en 2002. Tant que nous en restons au quinquennat et aux législatives consécutives, les candidats seront des « super » premiers ministres, se présentant avec un programme gouvernemental, de sorte qu'il est impossible de retrouver la fonction de Président arbitre. Le droit de dissolution est désuet : on voit mal le Président congédier la majorité dont il a bénéficié, car le précédent de 1997 reste dans les mémoires.
Les fonctions du Président, à l'exception de l'article 16, reproduisent presque à l'identique les dispositions de la loi constitutionnelle de 1875, qui étaient dans l'esprit de leurs auteurs celles d'un monarque constitutionnel. Le septennat était d'ailleurs calqué sur l'espérance d'un rétablissement de la monarchie. La position du rapporteur est étayée, mais la proposition de loi a ses mérites pour qui veut un régime démocratique et un pays gouvernable.
La révision de 2000 a cassé la flexibilité de la Constitution. Avec le phasage absolu entre élection présidentielle et élections législatives, l'élection de l'Assemblée nationale dépend totalement de celle du Président de la République. Quand bien même celui-ci se retrouverait dans la même situation qu'en 1974, il dissoudrait malgré tout. Les partis politiques s'organisent autour de l'élection présidentielle.
Ils changent de nature et voient s'affronter des écuries plutôt que des idées. Que le pouvoir exécutif n'ait pas réussi à convaincre les Français à l'issue des trois derniers quinquennats incite à réfléchir à une évolution de nos institutions.
Le projet principal de la politique française ne peut être que de déterminer la place de notre pays dans l'Europe. Comme cela ne dépend pas que de l'élection du Président, prétendre la réorienter tient de l'imposture. Nous sommes la seule démocratie européenne en voie de présidentialisation : tous les autres pays ont des régimes parlementaires. Cela empêche un discours de vérité sur l'Europe ; la proposition de loi a l'avantage de renverser la tendance.
Nous avons découvert avec le rapport d'Hugues Portelli combien notre collègue passionne ses étudiants...
Quelque chose ne va pas dans le système actuel. Le déplacement en 2000 d'un seul curseur a causé un déséquilibre global de nos institutions. Une pratique nouvelle, celle des primaires, n'a fait qu'accentuer le raccourcissement du temps politique : déjà passé de sept à cinq ans, l'intervalle entre deux campagnes est réduit d'un an par la primaire, et d'une autre année par les déclarations de candidature. Dans notre famille politique, l'intervalle n'a été que de douze mois... L'élection présidentielle domine aujourd'hui et biaise tout le débat politique.
Un rééquilibrage pourrait être tentant, mais j'ai peur de jouer les apprentis sorciers en ne déplaçant que le curseur du septennat non renouvelable, qui pourrait causer un nouveau déséquilibre. Outre le non-alignement des majorités, il y aura forcément un moment où le Président n'aura plus rien à perdre s'il n'est pas rééligible, car il ne sera plus responsable. Le quinquennat biaise notre logique institutionnelle. Mieux aurait valu que le premier vainqueur d'une primaire perde : le fait que 100 % des vainqueurs aient gagné est une incitation à s'y plier. Au lieu d'épouser un effet de mode comme avec le quinquennat, il faudrait envisager un toilettage en profondeur. Sans aller jusqu'à une VIème République, nous pouvons trouver un nouvel équilibre entre Président de la République et Parlement.
Je ne voterai pas cette proposition de loi.
La seule constante dans l'histoire constitutionnelle depuis 1875 - et nous pourrions sans doute remonter à la Monarchie de Juillet - est la distance du texte à la pratique. Mes préférences personnelles vont à la république parlementaire, cet idéal démocratique que nous n'avons pas souvent rencontré. Depuis 1958, nous assistons à une vraie personnalisation - plus qu'à une présidentialisation - du pouvoir, comme nous l'enseignait Jacques Cadart.
Comment lutter contre cette personnalisation ? La cause n'en est pas tant le quinquennat que la suppression de fait de l'autonomie des élections législatives. Les deux derniers présidents ont eu presque les mêmes mots : le Premier ministre exécute la politique que j'ai choisie, il fait ce que je dis... Sauf à prendre les Français pour des girouettes, il est naturel qu'ils votent un mois après comme à la présidentielle. Lorsque le président Mitterrand a demandé à la télévision : « De grâce, ne me donnez pas une majorité ! », il l'a eue quand même, et avec Michel Rocard en prime ! Certes, c'était avec le soutien de quelques centristes occasionnels - comme c'était avec l'approbation d'un grand professeur de droit constitutionnel, cela ne posait pas de problème.
Comment avoir une vraie démocratie ? La question de fond est celle du Premier ministre : il ne joue un rôle qu'en période de cohabitation, désormais difficile à imaginer. La France peut-elle continuer à être représentée internationalement par deux personnes ? Elle est le seul État à être représenté par le chef de l'État au Conseil européen ; au G20, elle l'est par le Président, avec le Premier ministre en période de cohabitation - nous avons vu ce que cela donnait avec François Mitterrand et Édouard Balladur, qui disaient exactement le contraire l'un de l'autre.
Ne faudrait-il pas préférer améliorer le système actuel, plutôt que de poursuivre un rêve, dont je crains qu'il ne se réalise jamais, et mettre en accord le droit et le fait ?
Argument peu glorieux mais important : une révision constitutionnelle d'initiative parlementaire doit être adoptée par les deux chambres puis par référendum. Soumettre une telle révision au référendum n'améliorerait pas grandement notre image. Il faut parfois s'abstenir de prendre des initiatives qui vont tellement à l'encontre du sentiment dominant.
Alain Richard explique que, dans les régimes parlementaires où le président est élu au suffrage direct, les partis sont d'accord pour présenter leurs leaders pour le poste de premier ministre, et non à celui de président, qui est réservé à des personnalités en fin de parcours ou d'importance secondaire. Dans le cas du Portugal, de la Pologne, de la Croatie et de la Finlande, où le président était véritablement le chef de l'exécutif, la constitution a été révisée pour transférer certains de ses pouvoirs au premier ministre, notamment en matière européenne, tout en gardant l'élection au suffrage direct. Ils ont alors pris le modèle irlandais, où la présidence a un rôle sociétal. Le cas le plus intéressant est l'Islande, où l'élection n'a lieu que si les partis ne se sont pas mis d'accord sur un nom.
La personnalisation est un argument réversible. Nous constatons la même personnalisation de la vie politique en Allemagne et au Royaume-Uni, où le chef du parti ayant la majorité à la Chambre est un patron incontesté de la vie politique. Cela ne fonctionne pas ainsi dans un seul cas : en l'absence de majorité. David Cameron a ainsi dû renoncer, à la demande des libéraux, à l'usage du droit de dissolution.
Le débat constitutionnel en France est marqué par l'obsession de réduire le pouvoir du Président. Or le problème réside aussi dans les autres pouvoirs. Si nous ne voulons pas que le Président soit à la fois le chef de l'État et le chef de la majorité, nous devons supprimer le droit de dissolution et la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement.
La France est un pays deux fois centralisé : politiquement, parce que le Président de la République fait tout, et administrativement, à cause de l'absence de contre-pouvoirs, notamment locaux, contrairement à l'Allemagne, où les ministres-présidents des Länder parlent d'égal à égal avec le chancelier au Bundesrat. Avec ce cumul de centralisations au profit du Président, notre système ne peut pas être démocratique, au sens de M. Mercier.
Ces régimes très différents sur le papier fonctionnent de la même façon : le fluide politique emprunte des voies différentes, mais aboutit à une démocratie de l'alternance, avec la nuance du fédéralisme allemand et la possibilité pour la majorité britannique de changer de chef à l'approche des élections, comme ce fut le cas pour Tony Blair et Margaret Thatcher. On ne pourrait pas l'imaginer pour notre pays à l'approche de l'élection présidentielle. Mettre fin à la personnalisation du pouvoir me semble une ambition difficile à réaliser.
La proposition de loi constitutionnelle n'est pas adoptée.
La commission procède ensuite à l'examen du rapport pour avis de M. Michel Delebarre sur la mission « Conseil et contrôle de l'État », programmes « juridictions financières » et « juridictions administratives ».
Nous examinons pour la première fois ensemble les crédits de deux programmes de la mission « Conseil et contrôle de l'État » : le programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives », qui regroupe les moyens affectés au Conseil d'État, aux huit cours administratives d'appel, aux quarante-deux tribunaux administratifs et à la Cour nationale du droit d'asile, et le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières », qui concerne la Cour des comptes et les vingt chambres régionales et territoriales des comptes.
L'effort budgétaire en faveur des juridictions administratives et financières est maintenu cette année. Ces deux budgets ont en commun de présenter une certaine stabilité permettant aux juridictions de disposer de conditions relativement favorables à l'accomplissement de leurs missions. Dans un contexte de fortes contraintes budgétaires, les crédits alloués pour 2015 au programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives » est en progression : + 2,2 % en crédits de paiement. Le plafond d'emplois autorisés est fixé à 3 784 équivalents temps plein travaillés (ETPT), soit la création de trente-cinq nouveaux emplois. Les crédits du programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières » sont, quant à eux, en légère diminution par rapport à l'an dernier : - 0,9 %, mais cette diminution est liée à un ajustement technique. Quant aux moyens humains, ils s'établissent à un niveau constant par rapport aux exercices précédents avec un plafond d'emplois fixé à 1 840 ETPT.
De plus, ces deux programmes bénéficient de conditions d'exécution relativement favorables, puisqu'ils ne sont pas soumis à l'obligation de mise en réserve de crédits en début d'exercice.
D'un point de vue strictement budgétaire donc, ces programmes ne rencontrent pas de difficultés particulières.
Cependant, l'ensemble des personnes que j'ai pu rencontrer pour préparer ce rapport m'ont signalé que cette situation satisfaisante était fragilisée par la forte pression contentieuse subie par les juridictions administratives d'une part, et par la multiplication des missions confiées aux juridictions financières d'autre part.
Concernant les difficultés des juridictions administratives pour faire face à la progression constante du contentieux, je vous rappelle que depuis 2011 l'objectif de ramener à un an en moyenne les délais de jugement devant l'ensemble des juridictions est atteint tous types d'affaires confondues. Cependant, communiquer sur un délai de jugement inférieur à un an risque d'induire le justiciable en erreur car pour les affaires dites « ordinaires », c'est-à-dire hors procédures d'urgence et procédures particulières, ces délais s'établissent plutôt autour de un an et dix mois devant les tribunaux administratifs et un an et deux-trois mois devant les cours administratives d'appel et le Conseil d'État.
Or, l'indicateur qui permettait de mesurer ce délai de règlement pour les affaires ordinaires a été supprimé de la maquette de performance, pour des raisons de « simplification des documents budgétaires ». La suppression de cet indicateur, particulièrement pertinent, me semble dommageable à l'analyse. En tout état de cause, quel que soit l'indicateur utilisé, les délais de jugement des affaires, toutes juridictions confondues, se sont nettement améliorés ces dernières années.
Cependant, après une phase de stabilisation des performances des juridictions administratives à un niveau satisfaisant, selon les personnes entendues lors des auditions préparatoires, ces résultats sont menacés par la poursuite de la montée en puissance des contentieux de masse, tels que celui du droit au logement opposable (DALO), du revenu de solidarité active (RSA) ou des étrangers, qui ont progressé respectivement de 44 %, 77 % et 25 % de 2010 à 2013.
À cela s'ajoute le transfert aux juridictions administratives de nouveaux contentieux par des réformes récentes comme la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, qui donne compétence au juge administratif pour connaître des litiges relatifs au plan de sauvegarde de l'emploi (PSE), ou la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, qui a dépénalisé un nombre important de sanctions visant à réprimer les infractions au droit de la consommation, pour les transformer en sanctions administratives.
Pour faire face à ce niveau d'activité élevé à moyens quasi constants, des réformes de procédure ont été mises en oeuvre, comme la suppression de la possibilité de faire appel pour les contentieux sociaux, le contentieux du permis de conduire ainsi que pour certains permis de construire. Compte tenu de leur entrée en vigueur très récente, nous ne sommes pas encore en mesure de réaliser un premier bilan de l'application de ces dispositions, mais elles mériteront une attention particulière l'an prochain car la dispense d'appel est susceptible de porter atteinte aux droits du justiciable, puisque, une fois l'affaire en cassation, le Conseil d'État ne revient plus sur l'appréciation des faits. De plus, le pourvoi en cassation est plus coûteux pour le justiciable qui doit alors être représenté par un avocat au Conseil.
Toujours pour faire face à ce niveau d'activité élevé, de plus en plus de contentieux sont réglés par un magistrat statuant seul (les contentieux sociaux, les contentieux des étrangers, les litiges relatifs aux permis de conduire...). Bien que le jugement en formation collégiale demeure le principe, environ 60 % des affaires jugées devant les tribunaux administratifs l'ont été par un juge unique ou par ordonnance en 2013.
Si ces procédures de simplifications contentieuses ont permis à la juridiction administrative de faire face à l'augmentation du contentieux et de réduire ses délais de jugement, on peut légitimement s'interroger sur leur impact sur la qualité de la justice rendue. En effet, certains contentieux qui concernent en particulier les publics les plus fragiles, comme par exemple les contentieux sociaux, cumulent : suppression de l'appel, règlement par juge unique et dispense de conclusions du rapporteur public.
Enfin, comme lors des deux exercices précédents, j'ai pu constater un véritable sentiment d'impuissance des magistrats face à certains contentieux pour lesquels l'utilité de l'intervention du juge pose question. Je pense en particulier au droit au logement opposable (DALO). Le juge ne tranche aucune question de droit, il ne règle pas non plus la situation du justiciable, puisqu'il ne peut qu'enjoindre l'administration, sous astreinte, de délivrer un logement. Ce contentieux a progressé de 125 % en cinq ans. Il est donc particulièrement coûteux, pour un résultat très limité. Se pose donc à nouveau la question de la nécessité d'un traitement juridictionnel du problème social du logement...
La multiplication des missions des juridictions financières fragilise leurs bonnes performances. Si l'examen des comptes publics, le contrôle des finances publiques et le contrôle de la gestion des organismes publics constituent la majeure partie de l'activité de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes, les missions des juridictions financières n'ont cessé de s'étendre avec le temps. À titre d'exemple, après la certification des comptes de l'État, de la sécurité sociale et des deux assemblées, le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de l'État, en cours d'examen au Sénat, prévoit l'expérimentation de la certification des comptes des collectivités territoriales les plus importantes.
Pour préserver ces performances satisfaisantes, dans un contexte budgétaire contraint, les juridictions financières ont fait l'objet de réformes organisationnelles et de procédures. Ainsi, en 2012, la carte des juridictions a été réformée pour permettre le regroupement des chambres régionales des comptes en structure de taille critique. Sept CRC ont été fermées. Le coût total de la réforme a été moins important que celui qui avait été prévu : 6,78 millions d'euros contre 13,43 millions d'euros envisagés. Hors dépenses de personnel, le coût budgétaire sera absorbé par les juridictions financières en moins de quatre ans.
Au-delà de l'aspect purement budgétaire, si la période préparatoire de la réforme a été longue et difficile pour les personnels, sa mise en oeuvre semble s'être finalement déroulée de manière relativement apaisée. Aujourd'hui, les juridictions regroupées fonctionnent de manière satisfaisante. La réforme aurait donné une nouvelle dynamique aux juridictions financières. Outre une nouvelle répartition et une requalification des effectifs en faveur de la fonction de contrôle, les regroupements semblent avoir permis des réorganisations, des économies d'échelle, une spécialisation dans certains domaines, une plus grande professionnalisation et des gains de productivité.
La réforme de la carte des juridictions s'est également accompagnée d'une évolution des méthodes de travail des magistrats et des agents. Dans un souci de plus grande efficacité des juridictions financières, la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles a permis au Premier président de la Cour des comptes de fixer des normes professionnelles. Trois arrêtés en date des 18 juillet 2013, 15 janvier 2014 et 4 juillet 2014 ont été pris à ce titre. Parallèlement, afin de mieux coordonner les méthodes de travail et de développer des outils de contrôle homogènes, un centre d'appui métiers a été mis en place à l'automne 2012 à la Cour des comptes, à destination de l'ensemble des juridictions financières. Il a vocation à favoriser le partage des meilleures pratiques, l'élaboration d'outils d'aide au contrôle et la mise en commun des connaissances.
Enfin, la loi du 13 décembre 2011 a renforcé les formations inter-juridictions (FIJ), constituées entre la Cour et des CRC ou entre des CRC. Selon la Cour des comptes, grâce à cette réforme, les juridictions financières sont en mesure de répondre dans un délai beaucoup plus court aux demandes d'enquête, émanant du Parlement et du Gouvernement, qui concernent à la fois le champ de compétence de la Cour et celui des CRC. En septembre 2014, dix-sept FIJ étaient en cours sur des sujets divers comme l'efficacité et le coût du lycée, les finances publiques locales, le logement en Ile-de-France, les maternités...
Si ces structures présentent l'avantage de porter un regard transversal, là où les chambres régionales et territoriales des comptes ne peuvent avoir qu'une vision géographiquement limitée, il faut être prudent dans l'utilisation de cet outil. En effet, depuis la restructuration de la carte des juridictions, et compte tenu du contexte budgétaire contraint, les effectifs ont été calculés au plus juste des besoins des différentes juridictions, au regard de leur programme de contrôle. Il ne faudrait donc pas que les travaux inter-juridictions se développent au détriment des missions de contrôle des CRC. Je ne manquerai donc pas, dans mon rapport pour avis de l'année prochaine, de rendre compte de l'évaluation des formations inter-juridictions actuellement menée par le groupe de travail mis en place par la Cour des comptes sur ce sujet.
Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 164 et 165.
La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Conseil d'État et autres juridictions administratives » et « Cour des comptes et autres juridictions financières » inscrits au projet de loi de finances pour 2015.
La commission procède enfin à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Yves Leconte sur la mission « Direction de l'action du Gouvernement », programme « Protection des droits et libertés ».
Créé à l'occasion de la loi de finances pour 2009 dans un souci de lisibilité budgétaire, ce programme réunissait les onze autorités administratives indépendantes du programme coordination du travail gouvernemental.
Plusieurs évolutions sont intervenues depuis : la création du Défenseur des droits par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui est entré en fonction à compter du 1er mai 2011, la transformation du Conseil supérieur de l'audiovisuel en autorité publique indépendante par la loi du 15 novembre 2013, la création de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique par les lois du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique.
Pour 2015, les autorisations d'engagement demandées s'élèvent à 98 410 885 euros (en baisse de 0,51 % par rapport à 2014), et les crédits de paiement à 98 850 093 euros (en hausse de 4,63 %).
Ces données globales doivent être nuancées par un examen détaillé des dotations de chaque autorité administrative : une forte hausse (pour la CNIL) et des baisses importantes (pour le Défenseur des droits, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique) au titre des autorisations d'engagement, conséquence du renouvellement de baux ; des variations plus limitées en crédits de paiement, sauf pour la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (+ 27,7 %), dues principalement aux évolutions de plafond d'emplois.
Le CSA, quant à lui, bénéficiera d'une subvention de 38 035 396 euros, en hausse de 6,35 % (soit 2 271 949 euros) par rapport aux crédits 2014, relativisée par le fait qu'1,5 million d'euros lui est affecté pour couvrir la taxe sur les salaires à laquelle il est assujetti en raison de son changement de statut.
Certaines autorités ont été auditionnées : le CSA, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, la CNIL et la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité.
Beaucoup d'entre elles mettent en avant des difficultés actuelles ou à venir pour accomplir leurs missions qui s'étendent jugeant leur budget insuffisant et « biaisé » par l'application de la réserve de précaution de 0,5 % sur les dépenses de personnel et 8 % sur celles de fonctionnement. Ainsi le CSA se verra appliquer en 2015 un taux unique de 8 % y compris sur la taxe sur les salaires verra son budget amputé de 1,1 million d'euros supplémentaire.
Le Défenseur des droits, seule autorité de valeur constitutionnelle, a connu une année particulière avec le décès de Dominique Baudis, ce qui a souligné la dépendance de l'institution à l'égard de la personne du Défenseur car à cette occasion la fluidité de la décision a été perturbée.
La loi crée de nouveaux droits qui sont autant de nouvelles missions pour le Défenseur des droits. Lorsque l'administration fonctionne avec des budgets contraints, il devrait y avoir des fonds complémentaires pour que le Défenseur vérifie le respect des droits, qui par ses interventions, participe à une bonne justice en désengorgeant les tribunaux.
La CNIL qui connaît chaque année une croissance à deux chiffres de son activité, recevra de nouvelles compétences par la loi sur le terrorisme adoptée tout récemment.
Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté veut maintenir le rythme de 150 visites par an mais ce sera difficile. De plus les délais de réponse aux courriers ont été significativement rallongés.
La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité traite 6 000 demandes par an et veut recruter un ingénieur pour assurer son indépendance technique.
La mise en réserve porte atteinte à l'indépendance des autorités indépendantes.
La délimitation des compétences entre autorités est également à revoir pour améliorer la lisibilité du programme.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite à donner un avis favorable aux crédits du programme « Protection des droits et libertés ».
Je remercie Monsieur le rapporteur qui donne un avis favorable à l'adoption de ces crédits. Je comprends l'inquiétude des autorités mais je note que ces crédits augmentent de 4,63 % cette année, ce qui est beaucoup par rapport à d'autres collectivités publiques.
Cette augmentation est liée au CSA désormais soumis à une taxe qui lui est compensée. Cette somme de 1,5 million d'euros n'alimentera pas ses crédits de fonctionnement.
La commission des lois a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du programme « Protection des droits et libertés » au sein de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
La réunion est levée à 11 h 30
Présidence de M. Philippe Bas, président -
La réunion est ouverte à 14 h 30