Nous examinons ce matin le rapport de notre collègue Claude Kern sur le projet de loi portant ratification de l'ordonnance du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, qui sera débattu en séance publique le 2 juillet prochain.
Ce texte assez baroque s'inscrit dans le prolongement de la loi du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, dont Claude Kern était rapporteur pour avis au nom de notre commission, et Muriel Jourda rapporteur au fond pour la commission des lois. Nos collègues échangent cette fois les rôles.
En effet, on ne change pas une équipe qui gagne ! J'ai plaisir à travailler de nouveau avec notre collègue du Morbihan, même si je n'ai eu qu'une semaine pour préparer ce rapport.
Ce projet de loi, quelque peu baroque en effet, a été conçu par le Gouvernement comme un texte purement technique qui, initialement, devait se limiter à deux articles. L'article 1er a pour objet de ratifier l'ordonnance du 20 mars 2019 relative aux voies réservées et à la police de la circulation pour les jeux olympiques et paralympiques de 2024, tandis que l'article 2 attribue à la juridiction administrative le contentieux des déférés préfectoraux portant sur des opérations d'urbanisme, d'aménagement et de maîtrise foncière afférentes à ces jeux.
Notre commission a délégué au fond à la commission des lois l'examen des deux premiers articles de ce projet de loi, et elle n'aurait pas eu à connaître du texte si le Gouvernement en était resté là.
Mais, entre-temps, la réalité du projet de loi a beaucoup changé, comme nous l'a indiqué le président de l'Agence nationale du sport, Jean Castex.
Le Gouvernement avait prévu de créer l'Agence nationale du sport par voie réglementaire et la convention constitutive du groupement d'intérêt public avait été approuvée par arrêté du 20 avril 2019.
Or le Conseil d'État a relevé que plusieurs dispositions de la convention constitutive nécessitaient de recourir à la loi, compte tenu en particulier des distances prises avec les règles relatives aux groupements d'intérêt public définies par la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit.
L'article 3, dont nous sommes saisis, sécurise le régime juridique de la nouvelle agence en actant dans la loi la création de l'Agence nationale du sport. Son objet premier n'est pas de clarifier son organisation, encore moins d'associer le Parlement à son fonctionnement.
Si, dans l'esprit du Gouvernement, cet article constitue une simple formalité, il évoque enfin officiellement l'Agence nationale du sport et je vous propose d'en faire une opportunité pour débattre d'une évolution majeure de notre modèle sportif.
En effet, nul ne doit mésestimer la portée du changement qui est opéré à travers les dispositions essentiellement techniques de cet article 3. Comme l'a très bien observé le Conseil d'État, la création de l'Agence nationale du sport revient pour l'État à se dessaisir des deux principales dimensions de la politique du sport : le soutien au sport de haut niveau et à la haute performance sportive, d'une part, le développement de l'accès à la pratique sportive, d'autre part. Il n'est pas anodin de noter que les recommandations du Conseil d'État, qui justifient pour l'essentiel l'article 3 du projet de loi, visent précisément à préserver une forme de contrôle de l'État sur l'Agence nationale du sport, au nom du principe selon lequel « les agences ne constituent pas des entités indépendantes et doivent intervenir dans un cadre qui leur est fixé par l'État ».
Si le Gouvernement entend donc, à travers cet article, maintenir une tutelle sur une institution à laquelle il entend confier des aspects essentiels de la politique du sport, j'observe que le projet de loi reste silencieux sur d'autres aspects, plus particulièrement le contrôle du Parlement ainsi que la place des collectivités territoriales et des fédérations sportives dans la gouvernance territoriale de l'Agence.
Les insuffisances de ce texte sont tellement nombreuses que certains d'entre nous ne souhaitent pas en discuter - je pense notamment aux signataires de l'amendement de suppression de l'article 3. On peut comprendre cette position de principe favorable au statu quo, mais supprimer l'article 3 reviendrait à nier les insuffisances de notre modèle sportif, qui nourrit un fort mécontentement de la part des fédérations sportives comme des collectivités territoriales. Que dire, par ailleurs, de nos résultats sportifs, qui stagnent à un niveau souvent insuffisant compte tenu de la qualité de nos athlètes et des moyens mobilisés ?
Je crois donc utile de nous inscrire dans le cadre de cette réforme, qui a été conçue conjointement par le Gouvernement, les collectivités territoriales et les fédérations sportives tout en associant les acteurs du monde économique.
Dans les premières esquisses de l'Agence, il était prévu que celle-ci se concentre sur le haut niveau, dans la perspective des jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, mais les acteurs de terrain ont souhaité que la pratique sportive ne soit pas oubliée.
La double compétence est ainsi inscrite au fronton de l'Agence nationale du sport. Le texte proposé pour le nouvel article L. 112-10 du code du sport prévoit, en effet, que celle-ci est chargée de favoriser le sport de haut niveau et la haute performance sportive, en particulier dans les disciplines olympiques et paralympiques, mais aussi de développer l'accès à la pratique sportive.
Le Conseil d'État a souhaité mentionner que cette délégation de compétence s'exerçait dans le cadre de la stratégie définie par l'État dans une convention d'objectifs signée entre l'Agence et l'État. Il était nécessaire de passer par la loi pour rappeler le rôle du Gouvernement dans la détermination de la politique publique du sport et la stratégie nationale et internationale en matière de sport de haut niveau, de haute performance sportive et de développement de la pratique sportive. J'observe néanmoins que la rédaction du projet de loi fait peu de cas du rôle du Parlement, tant pour contribuer à l'élaboration de cette politique publique que pour contrôler sa mise en oeuvre. Pourquoi ne pas s'inspirer des contrats d'objectifs et de moyens dans l'audiovisuel public, qui associent les commissions de la culture et des finances dans l'élaboration et la mise en oeuvre de la stratégie des entreprises publiques ? Pourquoi, par ailleurs, ne pas prévoir la présence de parlementaires au conseil d'administration ? Je vous ferai des propositions en ce sens.
Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 112-10 précise ensuite les modalités d'intervention de l'Agence nationale du sport : il lui revient d'apporter son concours aux projets et aux acteurs, notamment les fédérations sportives, contribuant au sport de haut niveau, à la haute performance sportive et au développement de l'accès à la pratique sportive.
Enfin, le dernier alinéa proposé pour ce nouvel article n'est pas le moins important : il prévoit pour l'Agence nationale du sport un statut de groupement d'intérêt public (GIP) particulier, qui relève des dispositions générales de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, mais qui comporte aussi des dérogations.
La principale dérogation aux principes du GIP concerne les ressources de l'Agence nationale du sport. Selon l'article 98 de la loi du 17 mai 2011, les partenaires du GIP doivent mettre en commun les moyens nécessaires à l'exercice de leurs activités. Or, en l'espèce, comme le précise le nouvel article L. 112-11 du code du sport, l'essentiel des ressources de l'Agence proviendra des trois taxes affectées dont bénéficiait déjà le Centre national pour le développement du sport, le CNDS. Cette dérogation peut surprendre, mais elle est nécessaire. Personne en effet ne peut imaginer que les crédits très importants, supérieurs à 12 milliards d'euros, que les collectivités territoriales consacrent chaque année au financement du sport transitent par l'Agence.
Le même article L. 112-11 rend obligatoires la présence d'un commissaire du Gouvernement et le contrôle économique et financier de l'État, alors qu'il ne s'agit que d'une faculté selon la loi du 17 mai 2011. Il est aussi prévu que l'Agence publie annuellement un rapport d'activité.
Pourquoi, dans ces conditions, recourir à un GIP ? Le statut d'établissement public aurait pu également être retenu, d'autant qu'il avait servi pour le CNDS. La réponse du ministère et de la direction de l'Agence tient à la souplesse que permet le GIP, en termes de gestion, avec le recours possible à des professionnels de droit privé, et de financement - l'Agence n'exclue pas de développer des financements innovants comme la commercialisation de marques propres ou le financement participatif.
Si le statut de GIP apparaît donc pertinent pour lancer l'Agence, il ne devrait pas être pérenne, le Conseil d'État ayant rappelé que « le choix du statut de GIP n'est adapté qu'à des collaborations dédiées à un projet ou à la phase de mise en place d'une agence ». La convention constitutive prévoit d'ailleurs dans son article 4 que, d'ici le 31 décembre 2025 au plus tard, l'action de l'Agence « sera évaluée de manière globale et indépendante afin que les membres puissent confirmer le bien-fondé du GIP et de ce nouveau modèle sportif ».
Si l'existence de l'Agence n'est donc pas garantie au-delà des jeux de Paris 2024, une autre incertitude concerne la mise en place de la gouvernance territoriale, plus particulièrement les concours apportés à la pratique du sport pour tous.
Le texte proposé pour le nouvel article L. 112-12 du code du sport ouvre un débat sensible en faisant du préfet de région le délégué territorial de l'Agence nationale du sport au niveau régional. Selon les services du ministère des sports, les règles constitutives des GIP obligent à désigner dans la loi le responsable de l'échelon territorial, lorsqu'il y en a un. Il ne serait donc pas possible de prévoir que le délégué territorial est élu par les différents partenaires. Par ailleurs, si le rôle de ce délégué n'est pas précisé dans l'article 3, on peut imaginer qu'il pourrait lui incomber d'ordonnancer des dépenses essentiellement publiques et qu'il n'est pas anormal que ce rôle revienne au représentant de l'État. Je vous proposerai d'adopter une précision en ce sens.
Pour autant, cette désignation du préfet suscite une réaction défavorable du mouvement sportif, qui craint à la fois un investissement variable de ce haut fonctionnaire selon les territoires et une gestion directive de la concertation dans l'hypothèse où il lui reviendrait d'animer les conférences régionales du sport et les conférences des financeurs.
Pour répondre à ces objections sérieuses, il me semblerait pertinent d'inscrire dès maintenant dans la loi le principe de la création des conférences régionales du sport en charge d'établir le projet territorial et des conférences des financeurs. La loi pourrait prévoir que ces deux types de structures élisent leurs présidents en leur sein, ce qui exclurait dans les faits une présidence du préfet. J'ajoute que l'inscription des modalités de la gouvernance territoriale dans la loi permettrait de mettre un terme au soupçon de report de la construction du second pilier de l'Agence nationale du sport relatif au développement de la pratique du sport.
À l'issue de la première série d'auditions conduites dans le cadre de la mission d'information sur les nouveaux territoires du sport, je ne peux que partager ces inquiétudes, mes interlocuteurs ayant tous indiqué qu'ils ne disposaient d'aucune précision sur la mise en place de ce pilier territorial. Certains ont même considéré qu'il faudrait plusieurs années pour qu'une nouvelle organisation succède au CNDS, dont les commissions territoriales ont été maintenues en activité malgré la suppression de l'établissement public.
Les autres dispositions de l'article 3 concernent la lutte contre la corruption et l'application des règles relatives à la transparence de la vie publique. Le nouvel article L. 112-13 prévoit en particulier les modalités de soumission de l'Agence nationale du sport au contrôle de l'Agence française anticorruption. Par ailleurs, le président, le directeur général et le responsable de la haute performance sont soumis aux obligations de déclaration de situation patrimoniale et de déclaration d'intérêts prévues par l'article 11 de la loi du 11 octobre 2013.
Vous l'aurez compris, mes chers collègues, la création de l'Agence nationale du sport constitue bien le coeur du projet de loi. C'est pourquoi je vous proposerai de modifier l'intitulé du projet de loi, qui ne la mentionne pas.
Par ailleurs, par cohérence avec les travaux menés avec notre collègue Michel Savin sur l'avenir des conseillers techniques sportifs, il m'a semblé également opportun de prévoir que ces cadres d'État, dont le ministère des sports ne voulait plus et que beaucoup de fédérations n'ont pas les moyens d'accueillir, rejoignent l'orbite de la nouvelle Agence nationale du sport. Celle-ci pourrait avoir la responsabilité de leurs affectations, de leur formation et de l'évaluation de leurs compétences, en veillant à leur répartition équitable entre les disciplines.
Cette proposition pourrait permettre de mettre un terme à une crise qui n'a que trop duré et, surtout, d'assurer la cohérence de la réforme souhaitée par le Gouvernement, en donnant à l'Agence les ressources humaines nécessaires pour accomplir ses missions.
En conclusion, je vous propose que nous saisissions l'occasion de l'examen de ce projet de loi pour apporter d'indispensables garanties à la nécessaire réforme de notre modèle sportif.
Mme Jourda devant ensuite nous quitter, nous allons examiner les amendements portant sur les articles délégués à la commission des lois, avant de passer au débat général et à l'examen de l'article 3.
EXAMEN DES ARTICLES DÉLÉGUÉS À LA COMMISSION DES LOIS
Article 1er (délégué)
L'article 1er correspond à l'intitulé initial du projet de loi : il prévoit la ratification par le Parlement de l'ordonnance sur les voies réservées qui seront utilisées pour les jeux de 2024.
Les portions de voies réservées à la circulation des véhicules de sécurité et des véhicules accrédités seront déterminées ultérieurement par décret. Il est désormais prévu 289 kilomètres de voies réservées, du 1er juillet au 1er septembre 2024, contre 324 kilomètres dans le dossier de candidature et 366 kilomètres dans un deuxième temps. Leur but est d'assurer la fluidité et la sécurité de la circulation. Des voies annexes sont également prévues pour assurer le délestage des voies réservées et la desserte des sites.
La police de la circulation et du stationnement est transférée sur ces voies au préfet de police pour l'Île-de-France et aux préfets des zones de défense et de sécurité pour les autres départements. Par ailleurs, en Île-de-France exclusivement, la coordination des travaux est confiée au préfet de police pour les voies réservées, par souci de cohérence.
L'article 2 du projet de loi se fixe un objectif d'harmonisation. Pour raccourcir les délais de procédure, la loi relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 prévoyait que les recours contre les opérations d'urbanisme, d'aménagement et de maîtrise foncière relatives aux jeux soient examinés directement par la Cour administrative d'appel, pour gagner du temps. Le Conseil d'État a demandé que le champ de cette compétence soit élargi au déféré préfectoral, si jamais le préfet était tenté de contester un projet de chantier piloté par l'État...
L'amendement COM-6 précise l'ordonnance du 20 mars 2019. Il mentionne tout d'abord que les voies réservées devront être activées de manière proportionnée aux objectifs de sécurité et de fluidité poursuivis, afin d'inciter le Gouvernement à poursuivre ses efforts pour restreindre au strict nécessaire le nombre de voies concernées.
Il encadre ensuite les conditions dans lesquelles les autorités préfectorales se verront déléguer, pendant la période des jeux, le pouvoir de police de la circulation, en prévoyant notamment que les autorités normalement détentrices de ce pouvoir soient préalablement consultées.
Enfin, il précise les conditions dans lesquelles le préfet de police sera, en Île-de-France, saisi pour avis des projets de travaux et d'aménagement portant sur les voies réservées.
L'amendement COM-6 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2 (délégué)
L'amendement COM-7 réécrit la fin de cet article afin d'éviter toute référence, dans la loi, à une disposition de nature réglementaire. Il renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de procéder à l'énumération des actes concernés par la dérogation procédurale que j'ai mentionnée précédemment.
L'amendement COM-7 est adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Nous reprenons la discussion sur l'ensemble du texte.
Malgré nos demandes réitérées depuis un mois, la commission n'a pas pu auditionner la ministre des sports. Grâce à mon intervention auprès de Marc Fesneau, certains ont pu la rencontrer hier midi, dans des conditions qui n'étaient vraiment pas idéales. Je n'ai jamais préparé un texte dans de telles conditions !
Hier, la ministre a argué qu'il s'agissait d'un texte technique sur lequel il était inutile que nous nous attardions...
Il a été question d'un texte baroque ; je dirai que le Gouvernement est en plein flou artistique ! Même l'intitulé du texte n'est pas approprié. Le Parlement en est totalement absent, de même que les collectivités territoriales, et le ministère abandonne une partie de ses compétences.
On parle d'un budget de 300 millions d'euros pour l'Agence. Le rapporteur peut-il le confirmer ?
Enfin, j'exprime une nouvelle fois notre mécontentement du report de la liaison CDG Express.
L'intitulé du texte est trompeur. La ministre prétend que les articles 1er et 2 sont techniques, et que l'article 3 prend en compte les remarques du Conseil d'État. Mais elle était mal à l'aise, hier, quand nous lui avons posé des questions pertinentes sur le rôle de l'Agence, ses moyens et le contrôle du Parlement.
Les collectivités territoriales financent en grande partie les équipements sportifs. Il faut leur trouver une place dans le dispositif.
Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup... En l'occurrence, il s'agit de la nouvelle position de l'Agence nationale du sport. Si tous les pouvoirs sont transférés aux préfets de région, à quoi servira, demain, le ministère des sports ?
Les propositions de Claude Kern vont dans le bon sens ; nous les suivrons sans hésitation.
L'Agence nationale du sport est devenue, de façon assez cavalière, le sujet principal de ce projet de loi.
Ceux qui portent des amendements de suppression de l'article 3 ne refusent pas le dialogue, mais ils auraient préféré un débat global sur l'organisation du sport dans notre pays - la ministre nous a confirmé hier le dépôt d'un projet de loi en 2020.
En créant cette agence, on sépare encore un peu plus le sport de haut niveau et le sport de masse, alors que les deux vont de pair. Les professionnels de la haute performance peuvent très bien se recruter au sein de la fonction publique, a fortiori avec les assouplissements prévus par le projet de loi de transformation de la fonction publique.
Je me dis que ce texte créera, dans les territoires, une véritable usine à gaz, alors que ces derniers demandent une pause pour pouvoir absorber les dernières modifications législatives et réglementaires.
Le risque de disparition du ministère des sports est réel : hier, la ministre nous a assuré de son maintien jusqu'aux jeux Olympiques... Et après ?
Certaines politiques portées aujourd'hui par le ministère des sports pourraient, demain, être placées dans les territoires sous l'égide des directeurs académiques des services de l'éducation nationale (Dasen). On peut comprendre la logique d'un pôle regroupant l'éducation populaire, la vie associative et le sport, mais il doit être porté par un ministre au niveau national.
Le président de l'Agence nationale du sport lui-même évoque une « voie baroque »...
Hier, la ministre a déclaré que l'Agence était un outil de l'État. Elle risque en réalité de devenir la politique sportive de l'État. On attend depuis deux ans la grande réforme du modèle sportif français, mais le Premier ministre n'a même pas évoqué le sport dans son discours de politique générale.
Plusieurs initiatives semblent converger vers le démantèlement du ministère des sports : diminution du budget en 2018 et 2019, transfert de la moitié des fonctionnaires du ministère aux fédérations sportives, fusion des corps d'inspection générale de la jeunesse et des sports et de l'éducation nationale, directions régionales de la jeunesse et des sports soumises à la tutelle des rectorats dans la circulaire du 12 juin dernier...
Le pôle éducatif et sportif envisagé au sein du ministère de l'éducation nationale sera demain très largement suffisant pour gérer les 120 millions d'euros de budget alloués au ministère des sports.
Notre amendement de suppression de l'article 3 n'est pas fait pour boycotter, mais pour alerter.
Nous voterons également contre l'amendement COM-12 relatif à la représentation des parlementaires, préférant en rester à la proposition de loi déposée par Michel Savin et cosignée par tous les groupes politiques, et contre l'amendement COM-10, car nous ne pensons pas que le Medef ou le secteur marchand en général doive intervenir sur la répartition des conseillers techniques sportifs (CTS).
Je partage l'analyse du rapporteur sur la gouvernance de l'ANS, qui comporte trop de zones d'ombre. Il nous faut préciser le rôle du Parlement et décliner le rôle de l'agence dans les territoires - la ministre a insisté sur sa mission de proximité.
Nous devons enfin être vigilants sur le développement des politiques publiques - sport santé, sport pour tous, sport féminin - et sur le possible affaiblissement du ministère des sports, voire sa disparition après 2024.
J'insiste sur le sort réservé aux CTS et sur les problèmes de financement qui se poseront pour les fédérations. Nous devons impérativement déposer des amendements solides sur le sujet.
De nouveau, une réforme lourde de conséquences est lancée sans concertation - c'est désormais la marque de fabrique de ce gouvernement - et, de nouveau, l'État tente de faire les poches de ses partenaires, qu'il s'agisse des collectivités ou du monde du sport.
Plus fondamentalement, nous nous éloignons du modèle français d'organisation du sport, fondé sur une parité entre le mouvement sportif et l'État, pour aller vers un modèle plus anglo-saxon.
Pourtant, dans une France de plus en plus divisée, le sport reste une grammaire commune essentielle. Les cadres sportifs bénévoles nous rappellent le sens de l'engagement, dans une société qui demande toujours plus de droits et a tendance à oublier les devoirs.
L'allégorie de la démocratie athénienne, à laquelle nous nous référons fréquemment, repose sur la pensée et le sport. Ne l'oublions pas ! L'implication de l'État dans le sport, c'est aussi le creuset de notre communauté nationale !
La baisse du budget des sports et la répartition des fonds alloués à l'ANS sont de vrais sujets. Il ne suffit pas que l'État promette de ne pas se désengager. Nous devons l'obliger à maintenir une participation plancher.
La réforme du mécénat me préoccupe également, car les entreprises font aussi vivre les clubs à travers l'événementiel sportif.
Avec cette manie de créer des structures parapubliques, les grandes politiques publiques échappent au regard de l'État, qui se dispense ainsi de veiller à l'équité territoriale.
Je souscris aux propos de Bruno Retailleau quant à la rupture du modèle républicain. Alors que l'État est le garant de l'intérêt général depuis la seconde guerre mondiale, nous nous dirigeons aujourd'hui vers un modèle anglo-saxon où l'intérêt général est conçu comme la somme des intérêts particuliers.
Dans son dossier de candidature, la France s'était engagée à ce que les jeux ne soient pas une source de nuisance pour la population. Nous en sommes loin ! L'État a renoncé à la réalisation de certains transports en commun et, pour éviter le chaos, on attribue aujourd'hui au préfet de police des pouvoirs spéciaux qui vont avoir pour conséquence la relégation de certaines populations.
En revanche, il était nécessaire de renoncer au CDG Express, car l'État était incapable de nous garantir que la ligne B du RER serait épargnée par les travaux.
L'audition de la ministre, hier, ne m'a rassurée ni sur les clefs de répartition du financement ni sur le rôle du ministère à l'avenir. Par ailleurs, les instances de l'éducation nationale sont-elles prêtes à prendre leur part dans le domaine du sport ? Il ne me semble pas qu'une concertation ait eu lieu.
La voie qui nous mène aux jeux olympiques me semble bien incertaine...
La concertation a eu lieu avec les fédérations sportives et les représentants des élus locaux, mais pas avec les parlementaires.
Oui, c'est une remise en cause du modèle sportif français, mais elle a été demandée par les fédérations et les représentants des territoires, dans le but d'améliorer les résultats des sportifs français.
Le budget de l'Agence est en effet de 300 millions d'euros, car il reste 44,9 millions d'euros à verser pour financer les projets déjà engagés par le CNDS.
La circulaire du 12 juin dernier sur l'organisation des territoires pose beaucoup de questions sur le devenir du ministère des sports. Les transferts vers l'éducation nationale apparaissent clairement. Les recteurs et les Dasen vont gérer le dispositif « sport pour tous » et, après 2024, beaucoup pensent que le ministère sera remplacé par une direction des sports au sein du ministère de l'éducation nationale.
Hier, le principal conseiller de la ministre a pointé une petite incertitude sur le dépôt du projet de loi relatif au sport en 2020.
Monsieur Lozach, les directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale ne sont pas placées sous la tutelle des rectorats ; elles sont intégrées dans les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte). Les directions départementales, en revanche, sont rattachées au rectorat.
Mon amendement sur les CTS ne donne pas les coudées franches au Medef ; leur gestion sera confiée au responsable chargé de la haute performance.
Enfin, la clef de répartition des financements n'existe pas aujourd'hui ; elle sera négociée au cas par cas. La notion de guichet unique constitue toutefois une avancée.
Avant de passer à l'examen de l'article 3, il nous revient de définir le périmètre précis d'application du texte, afin de juger de la recevabilité des amendements au regard de l'article 45 de la Constitution.
Je vous propose que le périmètre du texte s'étende aux dispositions relatives à la gestion de la circulation routière pendant les jeux de 2024 dans les départements accueillant des épreuves ainsi que dans les départements limitrophes ; aux dispositions relatives à la répartition des compétences entre juridictions pour le traitement du contentieux portant sur les opérations d'urbanisme, d'aménagement et de maîtrise foncière afférentes aux jeux ; aux dispositions relatives à la gouvernance et au contrôle de l'ANS ; aux dispositions relatives à l'organisation nationale et territoriale de l'ANS ; enfin, aux dispositions relatives aux missions de l'ANS dans l'organisation du sport de haut niveau et de la haute performance sportive, ainsi que dans le développement de l'accès à la pratique sportive.
Compte tenu du périmètre du texte ainsi défini, aucun des amendements déposés n'est susceptible d'être déclaré irrecevable sur le fondement de l'article 45 de la Constitution et du troisième alinéa de l'article 48 du règlement du Sénat.
EXAMEN DE L'ARTICLE 3
L'amendement COM-1 vise à supprimer l'article 3.
La suppression de l'Agence nationale du sport ne satisferait ni les fédérations sportives ni les collectivités territoriales.
Nous préférons vous proposer de renforcer les garanties entourant le fonctionnement de la nouvelle Agence, notamment en termes de gouvernance territoriale.
En conséquence, l'avis est défavorable.
À ma connaissance, les associations d'élus ne demandaient pas spécialement la création de l'ANS. Cela étant, nous ne déclarons pas la guerre à l'Agence, mais elle constitue un élément, parmi d'autres, d'une politique globale.
L'amendement COM-1 n'est pas adopté.
L'amendement COM-8 vise à préciser que l'Agence apporte son concours à la réalisation des projets des collectivités territoriales et de leurs groupements. Les collectivités constituent en effet des partenaires de l'ANS, au même titre que les fédérations sportives. Elles représentent par ailleurs le premier financeur du sport français à travers les équipements de proximité.
L'amendement COM-8 est adopté.
L'amendement COM-9 vise à préciser la mission de délégué territorial de l'ANS, confiée, de droit, au préfet de région. Il lui reviendrait, en particulier, de veiller au développement des projets dans les territoires carencés et de mettre en oeuvre les concours financiers selon les orientations arrêtées par les conférences des financeurs. Il ne lui reviendrait pas, en revanche, d'animer les conférences régionales du sport et les conférences des financeurs, qui désigneraient en leur sein leurs présidents.
L'amendement COM-9 est adopté.
L'amendement COM-10 prévoit d'insérer 24 alinéas après l'alinéa 11 de l'article 3 pour inscrire dans la loi les modalités de gouvernance territoriale de l'ANS.
Il pose tout d'abord le principe de la création dans chaque région d'une conférence régionale du sport chargée d'établir un projet sportif territorial. Ce dernier donnerait lieu à la conclusion de contrats pluriannuels d'orientation et de financement précisant les actions que les membres des conférences des financeurs s'engageraient à conduire, ainsi que les ressources humaines, matérielles et financières qui y seraient dédiées.
Par ailleurs, la conférence régionale du sport serait consultée lors de l'élaboration du projet de convention territoriale d'exercice concerté de la compétence sport avant son adoption par la conférence territoriale de l'action publique.
L'amendement prévoit enfin que chaque conférence régionale du sport institue une ou plusieurs conférences des financeurs du sport chargées de coordonner les concours financiers apportés aux projets territoriaux. La rédaction ne précise pas le périmètre territorial de ces conférences, qui pourront recouvrir un ou plusieurs départements, un bassin de vie, une métropole... Ces conférences éliraient leurs présidents en leur sein.
Les associations d'élus et le Comité national olympique et sportif français, le CNOSF, ont été étroitement associés à la rédaction de cet amendement.
Au sein de la métropole du Grand Paris, les établissements publics territoriaux détiennent également en partie la compétence sportive. Serait-il possible de les mentionner expressément dans le texte ?
Nous souscrivons à la création des conférences régionales du sport, qui vient combler un manque de la loi Notre. En revanche, l'institution par ces dernières de conférences des financeurs du sport nous pose problème. N'imposons pas d'usine à gaz et laissons de la souplesse aux territoires.
On laisse de la souplesse en laissant les territoires libres de créer une ou plusieurs conférences. En revanche, on ne croit pas à la création spontanée.
Au regard de mon expérience dans le domaine de la culture, il me semble en effet pertinent de les rendre obligatoires.
L'amendement COM-10 rectifié est adopté.
L'amendement COM-11 propose que le Parlement donne un avis sur la convention d'objectifs signée entre l'État et l'Agence nationale du sport sur le modèle des contrats d'objectifs et de moyens prévus dans l'audiovisuel public.
L'amendement COM-11 est adopté.
La création de l'Agence nationale du sport, qui devrait jouer un rôle fondamental dans la mise en oeuvre de la politique du sport, s'est faite sans associer le Parlement. Il semble donc naturel que le conseil d'administration de l'Agence comprenne en son sein des parlementaires qui pourront veiller à préserver l'existence d'une politique publique du sport substantielle.
Notre collègue Michel Savin avait souhaité dans une proposition de loi en date du 18 février 2019 que deux députés et deux sénateurs intègrent le conseil d'administration sans voix délibérative. Nous proposons plutôt, avec l'amendement COM-12, que les parlementaires puissent exercer pleinement leur rôle avec voix délibérative : deux sénateurs, dont un titulaire et un suppléant et deux députés, dont un titulaire et un suppléant.
Il s'agit de se plier aux statuts.
L'amendement COM-12 est adopté.
L'amendement COM-13 donne compétence à l'Agence nationale du sport pour affecter les conseillers techniques sportifs. Je propose de rectifier l'amendement pour préciser que cette mission incombe au responsable de la haute performance.
L'amendement COM-13 rectifié est adopté.
L'amendement COM-14 modifie l'intitulé du projet de loi, qui devient « relatif à la création de l'Agence nationale du sport et à diverses dispositions relatives à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. »
L'amendement COM-14 est adopté.
Dans la loi NOTRe, la conférence territoriale de l'action publique est convoquée par le président de la région. Ce texte prévoit un système différent. Un jour, il faudra harmoniser.
Le projet de loi est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Ça y est ! L'arlésienne est de retour : le Centre national de la musique (CNM) refait surface. Alors que le cinéma dispose depuis 1947 d'un établissement dédié, le Centre national du cinéma (CNC), doté de moyens significatifs et en mesure de faire dialoguer et coordonner les différentes composantes du secteur, tel n'est pas le cas de la musique.
Pourtant, la musique enregistrée et les spectacles représentent une part essentielle de la production culturelle française, avec un chiffre d'affaires global de 1,5 milliard d'euros, supérieur à celui du cinéma. C'est peut-être pour cela que ce regroupement n'existe pas...
La création d'un centre national de la musique est évoquée depuis 2011, à la suite du rapport réalisé par Franck Riester et Didier Selles. À l'époque, et alors que l'ensemble des acteurs, en pleine panique, étaient prêts à s'engager, le projet avait été abandonné, faute de moyens, peu après l'arrivée en poste d'Aurélie Filippetti, ce dont la filière garde un fort ressentiment - les auditions l'ont confirmé.
Pour autant, la nécessité de constituer un centre national dédié est plus que jamais d'actualité, et repose sur deux séries de constats.
Premier constat, la révolution numérique a profondément bouleversé le secteur. Le numérique avait affecté la création dans les années 1980. Parmi les industries culturelles, la musique est le premier secteur à avoir été frappé par la crise due à l'arrivée d'innovations numériques révolutionnant la consommation de produits culturels.
Dès la fin des années 90, le piratage de morceaux, via Napster et ses dérivés, a considérablement fragilisé l'économie de la filière. L'édition musicale a été particulièrement touchée, le chiffre d'affaires de la musique enregistrée ayant été divisé par trois entre 2002 et 2015. Un secteur autrefois florissant a ainsi été très brutalement confronté à une perte massive et rapide de revenus. C'est ce que j'appelais le moment de panique - et le mot n'est pas trop fort.
L'édition phonographique est cependant parvenue à renouveler son modèle économique et ses modes de production pour renouer avec la croissance. Je renvoie à l'excellent rapport pour avis de notre collègue Françoise Laborde sur le dernier projet de loi de finances, qui a souligné que, depuis 2013, le chiffre d'affaires du streaming avait été multiplié par près de trois, le nombre d'écoutes par cinq et le nombre d'abonnés payants par trois : les foyers français sont 4,4 millions à être abonnés.
Cette crise contraste avec la situation, bien meilleure, du spectacle vivant, qui pèse presque deux fois plus que la musique enregistrée. Les concerts sont en quelque sorte devenus un nouvel eldorado pour l'industrie musicale, même si cela ne va pas sans un certain nombre de difficultés, avec une concentration croissante des acteurs. Par ailleurs, le secteur du spectacle vivant est fragilisé ces dernières années par l'explosion des coûts de sécurité à cause du risque d'attentats. Je vous renvoie aux nombreuses communications que notre collègue Sylvie Robert, rapporteure pour avis des crédits « Création », nous a faites à ce sujet ces deux dernières années.
Second constat : le secteur demeure toujours très éclaté. La révolution numérique a remis en question un équilibre qui reposait sur la suprématie de la musique enregistrée. À l'instar de la situation sociale de notre pays, le secteur de la musique est en effet traversé depuis des années par des lignes de fracture multiples : musique enregistrée et spectacle vivant, secteur subventionné et secteur privé, musique savante et musiques populaires, pratique professionnelle et pratique amateur... Dans le métier, on a coutume de dire qu'on a un oeil sur la partition... et un oeil sur le tiroir-caisse !
Les différents acteurs n'ont pas su jusqu'à présent construire une culture commune et présenter un front uni pour défendre des intérêts communs et valoriser le secteur, ce qui ne fait qu'exacerber la question de la composition du conseil d'administration du Centre national de la musique. Platon disait que si l'on veut connaître un peuple, il faut écouter sa musique. C'est particulièrement vrai pour notre pays aujourd'hui. Cette incapacité à susciter du consensus comporte des risques importants à moyen terme.
En effet, la musique va devoir affronter des enjeux majeurs liés à l'expansion des technologies numériques : la défense de la conception européenne du droit d'auteur, par opposition au modèle anglo-saxon du copyright, menacée jusqu'à Bruxelles comme l'ont montré les difficultés d'adoption de la directive sur les droits d'auteur ; la question du partage de la valeur entre l'ensemble des acteurs de la filière musicale, à commencer par les artistes, face à la position désormais incontournable prise par les plateformes de musique en ligne par abonnement ; l'impact sur la diversité culturelle des algorithmes mis en oeuvre par les services de streaming, qui sont susceptibles, comme cela est déjà le cas pour l'information - un sujet sur lequel notre présidente a beaucoup travaillé - d'influencer très fortement les choix des utilisateurs, au risque d'une uniformisation des goûts.
L'industrie musicale avait très mal vécu l'abandon en 2012 du premier projet de Centre national de la musique. Dans ce contexte, la relance du projet au printemps 2017 par Françoise Nyssen, alors ministre de la culture, a fait renaître beaucoup d'espoir. Les conclusions du rapport de Roch-Olivier Maistre - intitulé « rassembler la musique », titre qui dit tout - en faveur d'un établissement public chargé d'observer, d'appuyer le développement international et de soutenir le secteur, dans une optique de diversité culturelle, ont été unanimement saluées par les acteurs de la filière.
La mission de préfiguration du centre confiée aux députés Pascal Bois et Émilie Cariou, avec lesquels j'ai pu échanger la semaine dernière, a débouché sur le dépôt, le 27 mars dernier, d'une proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le 6 mai.
Première grande idée de la proposition de loi, la création, au 1er janvier prochain, d'un EPIC placé sous la tutelle du ministère de la culture, dénommé Centre national de la musique et intervenant dans le champ de la musique et des variétés - et quand je dis musique, je fais évidemment référence à toutes les esthétiques musicales : il faut en finir avec les chapelles. Cet établissement a vocation à rassembler plusieurs organismes qui interviennent aujourd'hui en appui à ce secteur : d'une part un établissement public, le Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, communément appelé CNV, qui a pour mission de soutenir le spectacle vivant de musiques actuelles et de variétés, et d'autre part, quatre associations de droit privé, à savoir le Bureau export ou Burex, qui accompagne la filière musicale française dans l'accompagnement de ses artistes à l'export, le Fonds pour la création musicale (FCM), qui apporte son soutien à la création musicale au sens large - vidéos, festivals, concerts, tournées, premières parties, disques, et j'en passe - le centre d'information et de ressources pour les musiques actuelles, plus connu sous le nom d'Irma, qui remplit une mission d'information, d'orientation, de conseil et de formation à destination des acteurs des musiques actuelles, et le Club action des labels et disquaires indépendants (Calif) qui soutient le maintien de l'activité et l'implantation de magasins de disques dans nos territoires.
Savez-vous, à ce propos, combien y a-t-il de disquaires à Paris ?
Il faudra que je le demande au Calif. Il vous a été distribué un document présentant le schéma global de la fusion de ces structures.
Le CNM a vocation à exercer les missions précédemment dévolues à ces organismes en matière d'information, de formation, d'expertise, de valorisation du patrimoine musical, de développement international, de développement territorial et de soutien à ce secteur, en les étendant à l'ensemble du champ musical.
Il devrait également être chargé d'une mission d'observation confiée au CNV par la loi relative à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP), mais que celui-ci n'avait jamais pu exercer jusqu'ici, faute d'accord sur la gouvernance de l'observatoire. L'exploitation de données agrégées est un point très important, car le secteur dispose d'une mine d'informations qu'il est difficile de rassembler.
Il devrait par ailleurs disposer de nouvelles responsabilités en matière de développement de l'éducation artistique et culturelle, de promotion de la parité au sein des professions musicales, de veille technologique et de soutien à l'innovation.
Je vous proposerai plusieurs amendements pour clarifier ces différentes missions ou leur exercice. La compétence du CNM en matière de structuration de la filière à l'échelle des territoires me semble notamment trop imprécise.
Qui dit regroupement de structures existantes dit organisation des modalités de leur rattachement. C'est évidemment bien plus aisé pour le CNV qui est un établissement public. La proposition de loi prévoit sa suppression le 1er janvier 2020 pour lui permettre de se fondre dans le CNM. En revanche, il faudra que les quatre associations de droit privé votent leur dissolution avant de rejoindre le CNM. Elles pourront conclure des conventions avec l'établissement pour organiser préalablement les modalités de leur rattachement, que ce soit en ce qui concerne la reprise de leurs personnels, le fléchage de leurs réserves financières, ou les évolutions susceptibles d'affecter les programmes d'aides qu'elles ont mis en place. Le FCM occupe des locaux dont les baux devront être résiliés : l'intégration ne sera pas toujours facile.
Deuxième idée, les moyens d'action du futur CNM devraient provenir de quatre sources : la taxe sur les spectacles de variétés actuellement perçue par le CNV, des subventions de l'État et des fonds accordés volontairement par les organismes de gestion collective, ainsi que de la gestion de deux crédits d'impôt, pour s'élever à 78 millions d'euros.
La viabilité d'un centre qui n'est à l'heure actuelle que la collection d'organismes existants n'est pas certaine. S'il y a bien une logique juridique à créer le CNM par la loi, la cohérence d'ensemble aurait dû conduire le Gouvernement à s'engager lors du débat sur le montant qu'il entendait y consacrer. Le rapport Bois-Cariou a fixé un plancher de 20 millions d'euros - quand on connaît l'expertise financière d'Émilie Cariou et de Catherine Ruggeri, présidente du comité de pilotage, on sait que ce n'est pas une parole en l'air. Or, dans le contexte actuel de raréfaction de la ressource publique et d'attaques répétées contre les crédits d'impôt destinés à la création, aucune décision ne semble avoir été prise, ce qui plonge tous nos interlocuteurs dans l'expectative et ravive de fortes divisions dans la profession.
J'estime pour ma part que le soutien du Gouvernement à la proposition de loi devra se concrétiser lors du prochain projet de loi de finances. À ce stade avancé de la procédure, le recul que traduirait l'absence d'un signal budgétaire fort paralyserait les initiatives des acteurs privés et signerait la fin des ambitions de la filière.
Nous sommes donc dans la situation paradoxale de devoir nous prononcer sur un texte dont nous partageons tous, je crois, très largement les finalités, mais « à l'aveugle » - nous commençons à en avoir l'habitude - tant que les moyens n'auront pas été clairement arrêtés en loi de finances. Notre commission s'est maintes fois penchée sur la question des ressources liées à la création, avec à chaque fois le même constat : les ressources du cinéma, en particulier via la fiscalité affectée, sont infiniment plus importantes que celles de la musique ! Ce n'est pas normal. Ce poids du CNC - qui souligne, au passage, l'intérêt pour un secteur d'activité de disposer d'un établissement public - attire d'ailleurs régulièrement l'attention de certains collègues députés, qui voudraient réduire sensiblement ses moyens... En tout état de cause, plusieurs solutions existent, comme affecter la taxe dite « YouTube » au CNM plutôt qu'au CNC, ce qui rapporterait environ 7 millions d'euros par an. Cette hypothèse est d'ailleurs reprise par Pascal Bois et Émilie Cariou, qui souhaite également affecter une partie de la taxe sur les opérateurs de communications électroniques (TOCE) pour environ 10 millions. Toujours est-il que le débat promet d'être vif : donner des moyens au CNM revient soit à priver le CNC de ressources, soit à creuser un peu plus le déficit... Nous en débattrons lors de l'examen de la loi de finances.
De la même manière, nous n'avons pas véritablement la main sur les modalités de gouvernance, objet de l'article 2. Comme le CNM ne constitue pas une nouvelle catégorie d'établissement public, puisqu'il existe déjà plusieurs établissements qui poursuivent un objet analogue - Centre national du cinéma, Centre national du livre, Centre national de la danse -, la composition de son conseil d'administration relève du pouvoir réglementaire, sauf à ce que nous voulions une gouvernance totalement différente, ce qui n'est pas notre cas.
Je ne vous cache pas que ces questions de gouvernance agitent particulièrement la filière musicale. Les représentants de celle-ci sont aujourd'hui majoritaires dans la composition des conseils d'administration des cinq organismes qui devraient disparaître au profit du CNM. Aucun des acteurs ne remet en cause la place prépondérante qui pourrait revenir aux représentants de l'État dans le dispositif, tant l'État semble le seul à même à la fois de porter une vision stratégique intégrant l'ensemble des composantes de la politique musicale et de faire émerger l'intérêt général. Chacun se souvient des paroles fortes du Premier ministre dans son discours de politique générale : « qui paie décide, qui décide assume. »
Mais beaucoup s'inquiètent de perdre leur pouvoir de décision si, pour des raisons d'efficacité auxquelles je souscris, il était décidé de mettre en place un conseil d'administration à effectif réduit. Gardons à l'esprit que certains acteurs de la filière musicale, à savoir les organismes de gestion collective, sont appelés à contribuer directement au financement de l'établissement. D'autres, comme les entrepreneurs de spectacles vivants, devraient y contribuer indirectement par le biais de la taxe sur les spectacles de variétés, dont le produit devrait être affecté au CNM.
Nos collègues députés ont eu la bonne idée de suivre l'une des recommandations du rapport Bois-Cariou et de créer un conseil professionnel destiné à représenter l'ensemble de la filière musicale. Il faudra veiller à assurer un équilibre entre la composition du conseil d'administration et celle du conseil professionnel pour réussir à concilier efficacité du processus de décision, préservation de l'intérêt général et nécessité de permettre à chacun de s'exprimer. Il me paraît essentiel que les différents acteurs de la filière musicale n'aient pas le sentiment d'y perdre en se rassemblant au sein de cette nouvelle maison commune, faute de quoi le risque serait que certaines des associations de droit privé refusent in fine de rejoindre le CNM, ce qui ferait perdre beaucoup de son intérêt au projet.
Pour ma part, je crois aussi que les collectivités territoriales ne doivent pas être oubliées dans cette gouvernance au regard de leur contribution à l'animation et au financement de la politique musicale dans les territoires - c'est dans le rôle du Sénat d'y veiller. Je vous proposerai un amendement en ce sens. Je m'interroge également sur la présence de parlementaires dans le conseil d'administration du CNM qui se révèle bien souvent bénéfique pour dégager des équilibres dans les établissements où la gouvernance se révèle complexe - je pense à Radio France. L'ensemble de ces questions devraient être tranchées dans les prochaines semaines par le comité de pilotage du CNM, sur la base des arbitrages rendus par le ministre de la culture.
En dehors de ces points de vigilance, nous ne pouvons qu'apporter notre soutien à cette proposition de loi qui rejoint nos préoccupations. La séance publique sera pour nous l'occasion de faire préciser au ministre sa pensée sur les moyens et la gouvernance, et de préparer le débat budgétaire qui constituera le vrai lancement du CNM - ou sa fin. Je termine en rappelant le rôle central des auteurs-compositeurs, sans qui la musique n'existe pas.
Merci à notre rapporteur, qui nous a permis d'assister à des auditions très intéressantes. Je partage la quasi-totalité de ce propos. Le CNM est attendu depuis tant d'années, maintenant... Je commencerai sans doute mon intervention en discussion générale en disant : « c'est maintenant ou jamais ! ». Nous avons l'expérience de textes peu consensuels entre l'Assemblée nationale et le Sénat. J'espère que ce ne sera pas le cas ici. Il ne faudrait pas que le CNM soit un CNV amélioré, comme le CNV avait été un fonds de soutien amélioré. De grandes mutations sont à l'oeuvre ; l'idéal serait que le CNM devienne non seulement un outil de régulation et de promotion du secteur, mais qu'il agisse au service d'une politique publique.
Je n'oublie pas les artistes : ce sont eux, les créateurs de valeur, et on a trop tendance à l'oublier. Il faut prendre en compte les usages nouveaux. Nous sommes tous embarrassés : nous ne savons pas de quels financements le CNM pourra bénéficier, ce qui inquiète toute la filière. Mais nous ne percevons pas de signaux de la part du ministère. Ce qui est attendu, au-delà des 20 millions d'euros dont parle le rapport, c'est un vrai geste de sa part. Il est incroyable que personne ne parle de la taxe YouTube et de la TOCE. Le projet de loi de finances sera la prochaine étape. Je plaide pour que le CNM soit régi par un contrat d'objectifs et de moyens, dans lequel une prise en compte de la pluri-annualité serait bienvenue.
L'État doit être actionnaire majoritaire, si l'on peut dire, du CNM, mais il doit arbitrer vraiment. Toute la gouvernance est renvoyée à un décret. Celle du CNV était pourtant précisée dans la loi Musées de 2002 qui l'a créé. Pourquoi ne pas procéder de la même façon ?
Bien des obstacles ont été franchis dans la négociation avec les acteurs de la filière, grâce à Mme Ruggeri. Le Burex y participe, alors qu'on ne l'attendait pas. J'espère que les conditions pour faire atterrir ce projet seront réunies. Le secteur de la musique est en grande mutation - j'ai ainsi déposé un amendement sur la métadonnée, car il faut avoir une analyse digne du XXIe siècle sur ce sujet.
Il serait malvenu d'empêcher que ce CNM se constitue. Après 8 ans de réflexion, il est temps ! Le risque d'une disparition complète du projet existe.
Une thématique est centrale, la diversité. L'un des rôles du CNM sera d'assurer la diversité des répertoires et celle des types de pratiques entre amateurs et professionnels, mais aussi de maintenir la vie des labels indépendants quoi font la vie de nos territoires et cette effervescence liée aux festivals qui ne présentent pas des blockbusters. La composition de son conseil d'administration et son financement seront essentiels. Diversité sur le territoire, diversité des acteurs, mais aussi diversité culturelle : la promotion de la chanson francophone est importante. Nous le devons au monde, à qui la langue française apporte des valeurs et des façons de penser différentes.
La musique est une industrie culturelle qui pèse dans le secteur. Ce centre doit l'aider à progresser. Elle représente en effet de très nombreux emplois ailleurs que dans les métropoles. Au moment où la fracture territoriale est reconnue comme un problème central, cela compte.
L'éducation musicale et artistique peut aussi être un outil au service de la diversité : le pass culture devrait s'appuyer sur ce CNM pour éviter le formatage des oreilles des jeunes.
Je remercie vivement notre rapporteur, qui a mené ses auditions avec compétence et... tambour battant ! (sourires). Il a lu la partition du gouvernement rubato : avec ce détachement qui est la marque de fabrique du Sénat. Or comme le disait le grand pédagogue de la musique René Leibowitz, « il n'y a pas de musique possible sans rubato ». Je partage vos réserves, notamment sur le plan financier. On peut craindre un système qui ne repose que sur des ressources indépendantes - crédits d'impôt ou taxes affectées - ce qui prive l'État, et en particulier le Parlement, de contrôle sur les décisions. En bon républicain, je regrette toujours que l'État s'interdise d'intervenir directement, par des crédits budgétaires, dans un domaine, quel qu'il soit.
Mais il est devenu indispensable de réaliser ce mécano administratif, dont on peut espérer qu'il crée une guilde, une corporation garantissant un minimum de cohérence pour résister aux Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft). Aujourd'hui, le monde musical est divisé en différentes chapelles, autant de maisons de paille ou de bois qui ne résisteraient pas bien longtemps, s'il venait à l'idée au grand méchant loup de souffler dessus...
Nous voterons en faveur de cette proposition de loi, mais avec les réserves que nous ré-exprimerons lors de la discussion budgétaire. Nous attendons les engagements du ministre, avec d'autant plus de vigilance que nous attendons toujours que soient tenus ceux d'une autre ministre, celle de l'enseignement supérieur, concernant le déplafonnement de la contribution de vie étudiante et de campus...
Je remercie moi aussi notre rapporteur. J'ai assisté à certaines auditions, ce qui m'a permis par exemple d'apprendre que les variétés comprenaient aussi l'humour, le cabaret et le cirque.
Nous partageons l'idée que le CNM est un bon levier : le CNC a pour ainsi dire montré la voie. Comme le dit justement Sylvie Robert, c'est maintenant ou jamais.
Réunir un établissement public avec des acteurs de droit privé ne sera pas facile. Le CNV avait déjà comme objectif de réunir des données, et a des difficultés à le faire. Le CNM le fera-t-il plus facilement grâce au regroupement ainsi proposé ? Je l'espère.
S'agissant de la gouvernance, une majorité de représentants de l'État au sein du conseil d'administration ne choque personne. Sauf qu'il doit se donner les moyens de peser - je parle de moyens financiers. On parle de 20 millions d'euros. D'où viendront-ils, selon quels critères seront-ils gérés ?
Nous devons attendre la loi de finances. Cela m'inquiète : j'ai peur que l'on déshabille le CNC, ce qui ne serait pas bien accepté. Mais sinon, d'où viendraient ces 20 millions d'euros ? Globalement, nous sommes favorables à l'aboutissement de ce texte.
Je m'associe aux félicitations que mérite notre rapporteur, qui a fait une présentation claire et exhaustive de son rapport. Notre groupe est favorable à la création d'un CNM - véritable arlésienne - capable de promouvoir d'une seule voix la création musicale et son rayonnement. Nous partageons les remarques du rapporteur sur l'absence de précisions concernant le budget. Nous aurions préféré que les mesures financières aient été à tout le moins annoncées au moment de la discussion de ce texte. Nous approuvons les amendements du rapporteur. Nous proposerons par ailleurs notamment de préciser que le conseil professionnel doit être paritaire.
Toutes les filières souhaitent être représentées. La musique classique ou savante se sent en effet écartée, pour ainsi dire le parent pauvre du ministère. Ce sont les collectivités territoriales qui la portent à travers les grands orchestres nationaux ; il faut donc qu'elles soient très clairement associées à cette ambition. L'avenir de ces ensembles mérite une vraie discussion. N'oublions aucun répertoire.
Sur les questions de financement, lorsque nous avons voté la taxe YouTube, j'avais formellement rappelé qu'elle devait aussi financer la musique. Il pourra être utile de le rappeler lors de la discussion de la loi de finances.
Merci pour vos remerciements. Oui, monsieur Ouzoulias, il faut du rubato dans la musique.
Concernant l'application de l'article 45 de la Constitution, je vous propose que le périmètre d'application du texte permettant de juger de la recevabilité des amendements inclue les dispositions relatives au statut, aux missions, à l'organisation ainsi qu'aux modalités d'administration du CNM qu'il est proposé de créer.
Je vous suggère en revanche de considérer que ne présentent pas de lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions sans rapport avec le CNM relatives à l'organisation, au fonctionnement et au financement de la filière musicale et de ses différents acteurs.
Compte tenu du périmètre ainsi défini, aucun des amendements déposés n'est susceptible d'être déclaré irrecevable sur le fondement de cet article.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Nous commençons par l'amendement de précision rédactionnelle COM-1. La rédaction résultant des travaux de l'Assemblée nationale crée une confusion en distinguant les spectacles de variétés du reste du spectacle vivant dont ils sont pourtant partie intégrante. Je propose donc d'inscrire que le périmètre du CNM porte sur la musique et les variétés, ce qui recouvre à la fois les enregistrements et les spectacles et demande à Mme Robert de retirer son amendement COM-24 au profit de celui que je viens de présenter.
Je me rallie à votre rédaction.
L'amendement COM-24 est retiré. L'amendement COM-1 est adopté.
L'amendement COM-2 porte sur un sujet qui m'est personnellement cher : l'égale dignité des répertoires. Roch-Olivier Maistre a eu raison de vouloir « rassembler la musique » et non « les musiques » : il n'y en a qu'une. Parler de musique savante est insupportable. Les passerelles se font d'ailleurs aujourd'hui de plus en plus naturellement.
Les amendements identiques n° COM-33 et COM-34 visent à ce que le CNM respecte le principe des droits culturels - principes défendus depuis plusieurs années par notre commission, qui a contribué à les inscrire dans la loi Notre et dans la loi LCAP - pour favoriser la diversité culturelle, lorsqu'il exerce sa mission de soutien au secteur de la musique et des variétés.
Je suis donc tout à fait favorable à ces amendements, sous réserve d'une rectification pour que leur rédaction concorde avec celle de mon amendement COM-2, que nous venons d'adopter, qui mentionne « le respect de l'égale dignité des répertoires ». Ils seraient alors rédigés ainsi : « Compléter cet alinéa par les mots : et des droits culturels ». S'ils étaient adoptés, l'alinéa 3 de l'article 1er se lirait comme suit : « Soutenir l'ensemble du secteur professionnel, dans toutes ses pratiques et dans toutes ses composantes, et en garantir la diversité, dans le respect de l'égale dignité des répertoires et des droits culturels ; »
Le Sénat inscrirait ainsi une troisième fois dans la loi les droits culturels, qui avaient été retoqués dans un premier temps par l'Assemblée nationale.
Ils ont tellement imprégné cette maison que même les sénateurs qui n'étaient pas encore élus à l'époque de leur inscription dans les précédentes lois se les sont appropriés.
Ces amendements deviennent les amendements COM-33 et COM-34 rectifiés.
Les amendements identiques COM-33 rectifié et COM-34 rectifié sont adoptés.
L'amendement COM-23 a été présenté par une collègue qui n'est pas membre de notre commission, Mme Raimond-Pavero. Si je souscris à son objectif de faire en sorte que le CNM exerce sa mission en concertation avec les collectivités territoriales, il me semble satisfait par l'alinéa 14.
L'amendement n° COM-23 n'est pas adopté.
L'amendement COM-16 confie au CNM une mission spécifique en matière de développement territorial de l'écosystème musical. C'est en effet nécessaire, mais je proposerai un amendement à l'alinéa 14 en ce sens, qui devrait satisfaire ses auteurs. Il me semble en effet que cette mission territoriale gagnerait à être prévue en fin d'article, pour en faire une mission transversale que le CNM devrait prendre en compte dans l'ensemble de ses interventions.
Avant de devenir sénateur, j'avais entendu dire que la qualité du texte était améliorée par son passage au Sénat. L'amendement COM-5 en est l'illustration : en parlant d'artistes français, le texte de l'Assemblée nationale exclurait Stromae et Angèle, par exemple, et bien d'autres artistes, africains notamment, qui sont produits en France sans être français. Il est préférable de cibler le « made in France ».
L'amendement COM-5 est adopté.
Madame Robert, accepteriez-vous de vous rallier à cet amendement, et de retirer votre amendement COM-25 ?
Il parle de « contribuer » et non de « favoriser », comme le vôtre, et me semble donc plus proactif. Mais l'esprit étant le même, je le retire.
L'amendement COM-25 est retiré.
Compte tenu de l'enjeu en matière de développement durable, il n'est pas inutile de préciser avec l'amendement COM-11 que le CNM, en sa qualité d'établissement public, pourra encourager les acteurs de la filière musicale à contribuer à la mise en oeuvre de la politique de l'État en matière de protection de l'environnement.
L'amendement COM-11 est adopté.
L'une des principales missions du CNM devrait être l'observation du secteur. Le manque de données agrégées disponibles fait aujourd'hui cruellement défaut pour mieux comprendre les enjeux de la filière musicale, évaluer l'effet des politiques publiques mises en oeuvre et, le cas échéant, les adapter de manière appropriée.
Pour remplir à bien cette mission, le CNM a besoin de pouvoir recueillir les informations, directement auprès des organismes et des entreprises qui opèrent au sein de la filière musicale. La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine avait prévu un mécanisme pour faciliter la transmission des informations relatives aux données de billetterie, mais d'autres données seront également nécessaires pour permettre au CNM de mener à bien sa mission. C'est l'objet de l'amendement COM-4, qui rappelle en même temps la responsabilité qu'aura le CNM, dans ces conditions, en matière de protection des données à caractère personnel et de respect du secret des affaires.
L'amendement COM-4 est adopté.
L'amendement COM-26 précise que le CNM doit analyser les données. Cela fait à mon sens partie intégrante de sa mission d'observation et il ne me semble pas nécessaire de le mentionner. Le but d'un observatoire est de recueillir des informations, de les exploiter et de restituer les résultats de ces analyses.
Prenons garde à ne pas rajouter trop de détails qui, a contrario, pourrait faire penser que d'autres activités, comme le recueil et la restitution de ses observations, ne seraient pas incluses dans le périmètre de ses missions. Avis défavorable.
Je le maintiens et m'expliquerai en séance.
L'amendement COM-26 n'est pas adopté.
L'amendement COM-22 autorise le CNM à gérer le fonds d'intervention pour la sécurité des sites et des manifestations culturels, créé par un décret du 18 mars 2019.
L'Assemblée nationale a déjà prévu, à l'alinéa 14 du présent article, la possibilité pour le ministre de la culture de confier la gestion de ce fonds au CNM. Il ne le nomme pas en tant que tel pour qu'il puisse continuer à le gérer même s'il devait changer d'appellation - comme ce fut déjà le cas cette année. Je vous présenterai dans quelques instants un amendement pour bien garantir que l'ensemble de la gestion de ce fonds pour sa partie consacrée au spectacle vivant puisse bien être confié au CNM. Avis défavorable.
L'amendement COM-22 n'est pas adopté.
L'élargissement du champ d'intervention du CNM à l'éducation artistique et culturelle faisait partie des préconisations du rapport de Roch-Olivier Maistre, au regard des enjeux actuels en matière de démocratisation culturelle et d'égalité des chances. Il s'agit également d'un enjeu pour la filière musicale car, au-delà de la sensibilisation de nouveaux publics à la musique, ce peut être aussi un moyen de faire naître chez certains d'entre eux la vocation de devenir un professionnel de la musique. Pour autant, il est important de préciser avec l'amendement COM-3 que le CNM n'a pas vocation à se substituer au rôle clé joué par l'État, ministère de la culture et ministère de l'éducation nationale en tête, et les collectivités territoriales en matière d'éducation artistique et culturelle dans le domaine musical.
L'amendement COM-3 est adopté.
L'amendement COM-6 confie au CNM une mission à part entière de structuration de la filière musicale dans les territoires. Une telle mission a été initiée par le CNV ces dernières années dans le domaine du spectacle vivant, avec la signature de contrats de filière avec les collectivités territoriales et les services déconcentrés de l'État. Il est essentiel que le CNM puisse poursuivre cette mission et l'amplifier à l'ensemble de la filière musicale.
L'amendement COM-6 est adopté.
Madame Robert, je vous propose de retirer votre amendement COM-27 au profit du précédent.
Il y a une différence importante entre les deux : j'intègre les non-professionnels, dont le secteur est très largement structuré par les collectivités territoriales.
Loin de moi l'idée de bouter les non-professionnels hors du dispositif. Mais il est déjà difficile de mettre les professionnels autour de la table ! Nous n'en sommes pas encore là ! Comme l'a dit le ministre, le CNM ne doit pas être un ministère de la culture bis. Et il peut être difficile de séparer professionnels et non-professionnels.
L'amendement COM-27 n'est pas adopté.
L'amendement COM-7 précise la capacité du CNM à pouvoir gérer l'ensemble du fonds d'intervention pour la sécurité des sites et manifestations culturels pour sa partie consacrée au spectacle vivant.
L'amendement COM-7 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
L'amendement COM-17 fixe les missions qui seraient dévolues au conseil d'administration du CNM. Cela me semble prématuré, alors que l'on ignore à ce stade sa composition comme celle du conseil professionnel. J'ajoute que l'approbation du budget, qui est généralement l'une des missions clés confiées à un conseil d'administration, n'est pas citée. Avis défavorable.
L'amendement COM-17 n'est pas adopté.
Les amendements COM-13 et COM-28 détaillent la composition du conseil d'administration du CNM. Les deux visent à y faire figurer des représentants de l'État et des collectivités territoriales comme des représentants des salariés de l'établissement. En revanche ils diffèrent sur le reste de la composition. Le premier propose d'intégrer des représentants des différents acteurs de la filière musicale (auteurs, artistes, entrepreneurs de spectacle vivant, producteur phonographique et éditeurs), tandis que le second ne rentre pas dans le détail des professionnels appelés à y siéger et mentionne également la présence impérative de représentants des OGC et de personnalités qualifiées.
Comme je l'ai indiqué dans mon intervention générale, il est logique de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de fixer la composition du conseil d'administration d'un établissement public à partir du moment où celui-ci ne relève pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics.
Je comprends que la question de la gouvernance vous préoccupe. Mais, nous voyons bien avec ces deux amendements qu'il n'y a pas véritablement d'accord sur les personnalités appelées à y figurer. Il me semblerait par ailleurs regrettable que nous mettions en danger les discussions au sein du comité de pilotage du CNM en prenant des décisions trop hâtives. J'ajoute par ailleurs que l'objectif est d'aboutir à un accord en CMP avec l'Assemblée nationale. Pour avoir rencontré le rapporteur Pascal Bois il y a quelques jours, je crains que ce type de détails ne constitue un casus belli. Avis défavorable.
Je suis moins convaincue par votre dernier argument : je crois que nous devons pousser nos convictions jusqu'au bout, quitte à faire des concessions en commission mixte paritaire (CMP). Mais cela n'enlève rien à vos autres arguments.
Ces amendements pourront être redéposés en séance ; ainsi le ministre pourra préciser ce qu'il prévoit de faire.
L'amendement COM-13 n'est pas adopté, non plus que l'amendement COM-28.
Le mot « privées » nous a fait bondir, suscitant les amendements identiques COM-8 et COM-29 qui le suppriment. L'ouverture du conseil professionnel à l'ensemble des organisations concernées par l'action du CNM est indispensable.
Les amendements identiques COM-8 et COM-29 sont adoptés.
L'amendement COM-31 précise que les modalités de désignation permettent de garantir la parité au sein du conseil professionnel. Avis favorable.
Pour un conseil professionnel, oui.
L'amendement COM-31 est adopté.
Il est vrai que la loi prévoit que la représentativité des organisations syndicales s'apprécie à l'aune de différents critères, au nombre desquels le respect des valeurs républicaines, l'indépendance, la transparence financière, l'ancienneté, l'audience, et autres.
Comme je l'ai expliqué dans mon intervention générale, la composition du conseil professionnel devra s'articuler avec celle du conseil d'administration. Il me paraîtrait regrettable d'exclure à ce stade, par l'adoption d'un tel critère, comme le proposent les amendements identiques COM-15 et COM-32, un certain nombre d'organisations de la possibilité de siéger au sein du conseil professionnel, alors que nous ignorons la manière dont sera composé le conseil d'administration. Il est important que les règles de gouvernance permettent de garantir l'expression de toutes les parties prenantes. Rappelons qu'à la base de ce projet, il y a l'idée de rassembler enfin toute la filière musicale. Par ailleurs, ce critère n'est pas applicable à bon nombre d'organisations appelées à siéger au sein du conseil professionnel.
Rien n'empêchera, de toute façon, le pouvoir réglementaire d'inscrire ce principe dans le décret s'il se révèle pertinent en fonction des solutions qui auront été dégagées pour la gouvernance de l'établissement. Avis défavorable.
Les amendements identiques COM-15 et COM-32 ne sont pas adoptés.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3
L'article 3 est adopté sans modification.
Article 4
L'article 4 est adopté sans modification.
Article 4 bis (nouveau)
L'amendement COM-35 étend les missions que pourraient souhaiter confier les organismes de gestion collective (OGC) au CNM.
En effet, dans sa rédaction actuelle, le champ d'intervention du CNM avec les fonds confiés par les OGC serait limité aux « actions culturelles et éducatives », alors que l'article L. 324-17 du code de la propriété intellectuelle est plus large, puisqu'il comprend les « actions d'aide à la création, à la diffusion du spectacle vivant, au développement de l'éducation artistique et culturelle et à des actions de formation des artistes ».
La nouvelle rédaction proposée par le présent amendement propose donc un simple renvoi à ce paragraphe, afin d'aligner pleinement le champ d'action du CNM sur celui des organismes de gestion collective. Cela pourrait faciliter la mutualisation souhaitable des actions entre les OGC et le CNM.
L'amendement COM-35 est adopté.
L'article 4 bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 5
L'article 5 est adopté sans modification.
Article 6
L'article 6 est adopté sans modification.
Article 7
L'article 7 est adopté sans modification.
Article 7 bis (nouveau)
L'article 7 bis est adopté sans modification.
Article 8
L'article 8 est adopté sans modification.
Article 8 bis (nouveau)
Les articles 8 bis et le suivant sont des demandes de rapports, dont le Sénat n'est guère friand... Celui prévu à l'article 8 bis fixe un délai de quatre mois. Il nous serait donc présenté à la fumée des cierges - trop tard ! D'où mon amendement de suppression COM-36.
L'amendement COM-36 est adopté et l'article 8 bis (nouveau) est supprimé.
Article 8 ter (nouveau)
Même objet, même punition. Le délai est ici de six mois. On peut comprendre les craintes des députés, mais le principe d'une signature de conventions entre chacune des associations et le CNM inscrit à l'article 5, devrait les rassurer. D'où les amendements identiques COM-9 et COM-30.
Les amendements identiques COM-9 COM-30 sont adoptés et l'article 8 ter (nouveau) est supprimé. L'amendement COM-20 devient sans objet, ainsi que l'amendement COM-21.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Il sera intéressant de voir ce qu'il en est ressorti.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La réunion est close à 12 h 5.