Notre commission s'est attachée, depuis 2015, à suivre le dossier de la réforme du droit européen de la propriété littéraire et artistique au plus près. Sur votre invitation, madame la présidente, les sénateurs qui le souhaitaient ont échangé sur le sujet avec plusieurs eurodéputés. Je vous présenterai pour ma part - et je m'excuse par avance de la longueur de mon propos que j'ai souhaité le plus exhaustif possible - les quatre textes qui constitueront, d'ici à 2018 selon les scénarii les plus optimistes, la réforme tant étendue.
La perspective d'une réforme du droit d'auteur, régi par la directive du 22 mai 2001, fait l'objet, depuis le début de la présidence de Jean-Claude Juncker, des pires craintes d'un monde culturel bousculé par l'économie numérique comme des espoirs les plus fous de consommateurs désireux de limiter les contraintes d'accès aux oeuvres et de défenseurs de l'Internet libre.
Les appréhensions des artistes et des industries culturelles face à la menace d'une réforme d'envergure sensée mettre un terme aux blocages transfrontaliers et à l'insécurité juridique créée par un droit d'auteur jugé inadapté au numérique, ne furent nullement dissipées à la présentation, le 15 janvier 2015, du pré-rapport de Julia Reda devant la commission des affaires juridiques du Parlement européen. Il y était proposé de lever les restrictions à la circulation des contenus et d'harmoniser les exceptions au droit d'auteur appliquées par les États membres. Le texte finalement adopté par le Parlement européen était toutefois plus raisonnable et rappelait utilement la nécessité de préserver un juste équilibre entre les droits et des créateurs et les intérêts des consommateurs.
La même année, la Commission présentait une communication sur le marché unique numérique, affirmant sa volonté de donner un caractère moderne et plus européen à la législation sur le droit d'auteur. Sur ce fondement, était adopté un plan d'action prévoyant l'élargissement de l'accès transfrontalier aux contenus, la création de nouvelles exceptions obligatoires en faveur de la recherche, de l'éducation et des personnes handicapées, le développement de licences pour assurer la juste rémunération des créateurs et des producteurs et le renforcement de la lutte contre le piratage.
Le 14 septembre 2016, était enfin rendu public le projet législatif de réforme du cadre européen applicable au droit d'auteur et aux droits voisins. Le « paquet » proposé comprend quatre textes à l'ambition inégale. Si plusieurs mesures ne suscitent aucune opposition d'envergure, d'autres, au fondement du financement de la création, crispent l'opposition des ayants droit.
Les négociations s'annoncent donc délicates et la commission des affaires européennes du Sénat, par une proposition de résolution européenne en date du 20 janvier 2017, a jugé utile de rappeler les grands principes qui fondent le droit d'auteur et d'appeler à leur défense. Avec ses rapporteurs, nos collègues Colette Mélot et Richard Yung, j'ai auditionné les acteurs concernés et me suis rendu à Bruxelles pour y rencontrer les principaux responsables de ce dossier complexe. Nos travaux s'inscrivent pleinement dans une démarche de soutien aux négociateurs français, soucieux, depuis les premières annonces de 2015, de protéger les auteurs et d'assurer la pérennité de la création européenne.
Le texte central du « paquet » droit d'auteur, la directive sur le droit d'auteur dans le marché unique du numérique, comporte des mesures extrêmement diverses, dont certaines devront être précisées afin de les rendre pleinement réalistes et efficaces.
Pour tenter de rééquilibrer le partage de la valeur entre créateurs et plateformes, le texte oblige ces dernières, lorsqu'elles réalisent un acte de communication au public d'oeuvres protégées (hors placement d'un lien hypertexte) et qu'elles ne bénéficient pas du statut d'hébergeur prévu par la directive du 8 juin 2000 relative au commerce électronique, à conclure des licences avec les ayants droit. La responsabilisation des plateformes constitue un élément essentiel de la réforme mais elle demeurera inopérante si l'acte de communication au public n'est pas mieux défini. À défaut, la frontière entre ce nouveau régime et celui d'exemption de responsabilité prévu par la directive de 2000 ne sera pas clairement établi et l'incertitude juridique profitera aux plateformes.
Elles devront également déployer les moyens techniques nécessaires à la détection automatique des contenus protégés, afin d'éviter a priori leur diffusion en ligne. Une proposition identique relative au filtrage comme moyen de lutte contre le piratage figurait, je vous le rappelle, dans le rapport d'information de nos collègues Loïc Hervé et Corinne Bouchoux sur la Hadopi.
La proposition de directive traite par ailleurs de trois exceptions au droit d'auteur : l'exception pédagogique, celle relative à la fouille de contenus au bénéfice de la recherche, dite text and data mining (TDM), et celle portant sur le patrimoine culturel destinée à permettre aux institutions de numériser leurs collections pour les conserver. Les dispositions qui les concernent ne posent pas difficulté de principe. Toutefois, certaines modalités d'application apparaissent là encore devoir être précisées. Il n'est, en particulier, pas suffisamment porté attention à la préservation des marchés existants ni à la disponibilité préalable d'offres commerciales. En outre, le fait de rendre obligatoire l'exception de TDM dans une définition plus large tant en termes de contenus (contenus audiovisuels et images fixes) que d'usages (usages commerciaux) que celle adoptée par la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique n'est pas souhaitable. Enfin, pour l'ensemble des exceptions susmentionnées, il n'est envisagé aucune rémunération compensatoire au bénéfice des titulaires de droits concernés.
La proposition de directive prévoit également l'obligation, pour les États membres, de faciliter la conclusion de licences destinées à l'exploitation des oeuvres indisponibles. Là encore, le dispositif envisagé est louable mais perfectible : il laisse trop peu de flexibilité aux États membres et, surtout, sa limitation à des fins non commerciales le rend inopérant pour garantir le maintien du système français ReLire, jugé incompatible avec le droit européen par un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) en date du 16 novembre 2016. Compte tenu des sommes engagées et de l'intérêt à mettre les oeuvres indisponibles à la disposition du public, la poursuite de ReLire doit constituer un objectif majeur de la France dans le cadre des négociations relative au « paquet » droit d'auteur.
Plusieurs articles visent, par ailleurs, à améliorer les conditions de rémunération des auteurs et des artistes-interprètes en renforçant la transparence des informations relatives à l'exploitation des oeuvres et en leur garantissant, contractuellement, un revenu additionnel en cas de succès inattendu (clause de best-seller). Notre commission avait approuvé plusieurs mesures en ce sens, concernant à la fois l'industrie musicale et le cinéma, figurant dans la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine. Réjouissons-nous donc de leur transcription, même partielle, en droit européen.
Enfin, le texte consacre la création d'un droit voisin au bénéfice des éditeurs de presse, à propos duquel de nombreuses questions demeurent en suspens. Il n'est certes pas absurde de permettre aux éditeurs de disposer d'un levier de négociation avec les plateformes en matière d'exploitation numérique de leurs contenus. Pour autant, la faisabilité d'une telle disposition demeure incertaine ; en Allemagne et en Espagne, les tentatives de mise en oeuvre d'un droit voisin au profit des éditeurs de presse se sont soldées par des échecs, raison pour laquelle les éditeurs français ont préféré négocier contractuellement avec Google la création d'un fonds de soutien aux projets numériques innovants. Se pose en outre la question de l'articulation d'un tel droit avec le droit d'auteur des journalistes et des photographes de presse, comme de la prise en compte de l'intérêt de ses derniers à ce que leurs productions bénéficient de l'audience la plus élevée possible sur Internet. Le dispositif mérite en conséquence d'être précisé et son impact juridique et économique plus finement analysé, étant entendu qu'il est indispensable de mieux valoriser les contenus de presse alors que la révolution numérique met en danger un grand nombre de titres.
Plus modestement, une seconde proposition de directive concerne la mise en conformité du droit de l'Union européenne avec les dispositions du traité de Marrakech du 30 avril 2014 visant à faciliter l'accès des déficients visuels aux oeuvres de l'écrit. À cet effet, est introduite dans le droit de l'Union européenne une exception obligatoire aux droits de reproduction, de distribution et de mise à la disposition du public pour l'adaptation des oeuvres aux besoins spécifiques des personnes malvoyantes. En complément, un règlement traite des relations entre l'Union européenne et les États tiers dans le cadre de la mise en oeuvre dudit traité.
Sans que le fonds des dispositions proposées soit en cause, chacun reconnaissant la nécessité d'améliorer l'accès des personnes malvoyantes aux publications, la controverse, limitée, porte sur le caractère obligatoire de l'exception, qu'il existe ou non des oeuvres disponibles au format adapté sur le marché, et sur l'impossibilité de prévoir une rémunération compensatoire pour les éditeurs.
Enfin, le quatrième volet du « paquet » droit d'auteur comprend une proposition de règlement, improprement dit « câble et satellite ».Très controversé, ce court texte transpose les principes de la directive « câble et satellite » du 27 septembre 1993, notamment celui du pays d'origine, aux services en ligne des radiodiffuseurs, plus précisément aux transmissions simultanées en ligne (le simulcasting), à la télévision de rattrapage (la catch up) et à la diffusion en ligne d'éléments complémentaires à un programme. Les services de vidéo à la demande ne seraient en revanche pas concernés.
La télévision de rattrapage et la retransmission simultanée en ligne seraient sensées, pour l'application du droit d'auteur, n'avoir lieu que dans le pays d'établissement du radiodiffuseur. L'accord des titulaires de droits ne serait donc plus nécessaire à une exploitation sur le territoire d'un autre État membre, même si les parties conserveraient leur liberté contractuelle de limiter l'exploitation des droits sur une oeuvre, étant évident que les diffuseurs se trouveront généralement en position de force face aux ayants droit.
Par ailleurs, il est proposé d'appliquer une gestion collective obligatoire des droits d'auteur et droits voisins aux modes de diffusion qui, comme l'IPTV (diffusion de programmes télévisés effectuée par le protocole Internet), partagent avec le câble et le satellite des caractéristiques communes, afin d'éviter aux opérateurs d'avoir à négocier avec chaque titulaire de droits.
Les antagonismes sont extrêmement marqués sur ce quatrième texte, en raison du risque de remise en cause du principe de territorialité des droits sur les oeuvres, selon lequel chaque territoire national de diffusion fait l'objet d'une démarche commerciale spécifique. La promotion, à marche forcée, d'un marché unique européen pour le simulcasting et la catch up TV pose deux problèmes majeurs : d'abord, les droits étant acquis pour l'ensemble du territoire de l'Union, leur coût en sera accru et s'établira à un niveau que peu d'acteurs européens auront les moyens d'assumer. Ces technologies, en pleine expansion, pourraient alors économiquement échapper Européens sur leur propre territoire au profit de multinationales, notamment américaines, disposant de l'assise financière nécessaire à l'achat de droits à grande échelle. Ensuite, d'un point de vue culturel, le dispositif comporte, à terme, un risque d'appauvrissement de la création européenne, subtil équilibre des goûts et des cultures nationales. De fait, il n'est pas rare qu'une oeuvre ne soit pas commercialisée dans la totalité des États membres. Il revient aux titulaires de droits de juger de l'opportunité de les céder pour un territoire donné et d'en fixer le prix. Ce modèle vertueux d'adéquation entre l'offre et la demande et entre le prix des droits et le risque commercial permet d'optimiser le financement de la création en Europe. S'il est remis en cause au profit d'un marché unique, il est fort probable que seules les oeuvres « grand public », qui trouveront un écho dans l'ensemble des États membres, bénéficient à l'avenir de financements conséquents, au détriment de la diversité culturelle sur le territoire européen.
En outre, les dégâts que pourrait causer une telle réforme sur le financement de la création européenne seraient multipliés par l'application de dispositions parallèlement discutées par les autorités européennes, dont nombre concernent directement ou indirectement l'exercice du droit d'auteur.
Le 9 décembre 2015, la Commission a adopté une proposition de règlement sur la portabilité des services de contenus en ligne, qui vise à rendre obligatoire la portabilité transfrontière des offres pour une durée limitée. Si les négociations au sein du Conseil ont abouti à un texte respectueux des attentes des consommateurs comme des intérêts des créateurs et des industries culturelles, la phase de trilogue avec le Parlement européen doit encore éviter que le dispositif ne conduise à une remise en cause de la territorialité des droits d'exploitation.
Par ailleurs, le 25 mai 2016 ont été présentées par la Commission européenne une proposition de directive relative à certains aspects des contrats de fourniture de contenus numériques et un règlement visant à interdire le géoblocage et autres formes de discriminations en matière de commerce électronique fondées sur la nationalité ou le lieu de résidence. Ce règlement, s'il exclut les services audiovisuels, concerne la vente de biens culturels « physiques » et pourrait heurter les règles de territorialité du droit d'auteur. En outre, la proposition de directive mérite encore de voir certaines de ses dispositions précisées : la définition des contenus numériques doit viser les supports et non les oeuvres et la notion d'interopérabilité être requalifiée au profit de celle de compatibilité.
Enfin, un contentieux en cours auprès de la DG Concurrence pourrait contribuer à aggraver les conséquences du règlement « câble et satellite ». Il est reproché à la chaîne Sky UK et à plusieurs studios américains d'inclure dans leurs accords de licences des clauses d'exclusivité territoriales impliquant l'interdiction des ventes « passives ». La DG Concurrence pourrait prochainement remettre en cause les exclusivités territoriales accordées aux diffuseurs. Le système de financement des oeuvres, dont les diffuseurs constituent un rouage essentiel, pourrait s'en trouver gravement affaibli. Pire, la liberté contractuelle promise par le règlement « câble et satellite », seule limite à une remise en cause brutale du principe de la territorialité des droits, serait compromise.
Dans la mesure où la forme juridique choisie par la Commission est celle du règlement, qui n'offre aucune souplesse de transposition, il n'est guère d'autre solution que de supprimer l'article concerné.
Grâce à une mobilisation forte des défenseurs du droit d'auteur, la réforme envisagée est finalement moins ambitieuse que ce qui était craint. Pour autant, les négociations, qui ont débuté au Parlement européen, demeurent cruciales pour que nul dispositif ne vienne affaiblir un système de financement déjà fragilisé. Les créateurs doivent se voir offrir une juste rémunération et une protection efficace, notamment contre le vol que constitue le piratage. Il en va de la défense de la diversité linguistique et culturelle et du rôle de la France en soutien des auteurs et des industries culturelles.
Dans cette perspective, les principes fixés par la commission des affaires européennes constituent un rappel utile et je vous proposerai d'adopter sans modification la proposition de résolution.
Merci d'avoir bien souligné les enjeux de ces textes, en continuité des travaux que notre commission a déjà effectués sur les droits d'auteur, un sujet que nous suivons avec la plus grande attention.
Quel est le statut de nos travaux d'aujourd'hui ? Engageons-nous le Sénat tout entier ? Envisage-t-on un débat en séance plénière ?
Sur le fond, cette PPRE va dans le bon sens, nous accompagnons un travail européen important et qui est loin d'être achevé. Cependant, si le groupe écologiste soutient le paragraphe 14 contre le piratage, ce n'est pas parce que nous voudrions restreindre la circulation des oeuvres - au contraire, la priorité des politiques culturelles doit aller au partage, à la circulation des oeuvres -, mais bien parce que nous luttons contre la spoliation des droits et des oeuvres par leur diffusion illégale, en particulier le streaming illégal. Nous sommes satisfaits d'être sortis des affres répressives de la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information (DADVSI) !
Une fois votée, la PPRE engage le Sénat, c'est une alerte que nous adressons au Gouvernement, qu'il peut faire valoir dans les négociations européennes. Un débat en séance plénière n'est pas prévu à ce jour, mais un groupe politique peut tout à fait le proposer.
Je félicite notre rapporteur ; son propos détaillé se justifie par la complexité et l'importance du sujet, même si je regrette que nulle mention n'ait été faite à la révision de la directive relative aux services de médias audiovisuels (SMA), qui a pourtant des points communs avec le « paquet » dont nous discutons, en particulier pour le concept de pays d'origine.
Quel sera le calendrier des textes européens en préparation ? Et celui de leur transposition ?
Ces textes sont effectivement très techniques et nous gagnons à montrer combien, à travers des dispositions que l'Europe présente comme techniques, se règlent des décisions très politiques, des enjeux cruciaux. Ces textes, vous le dites, marquent des avancées, en continuité des combats que la France mène, toujours à l'avant-garde, pour la diversité culturelle, les droits d'auteur, la création et les créateurs.
Dans les instances européennes, on parle beaucoup de donner du poids aux industries culturelles européennes ; mais, comme l'a dit André Malraux, le cinéma est un art avant d'être une industrie et cela vaut pour tous les domaines de la création artistique : il n'y a pas d'industrie culturelle sans créateurs, sans auteurs, et nous devons veiller à ce que la valeur marchande n'en soit pas captée par des intermédiaires. C'est bien pourquoi la territorialité des droits, vous le dites aussi, est l'enjeu essentiel, pour la création comme pour la fiscalité. La remettre en cause, c'est encourager la localisation de la création là où l'on paie le moins d'impôts, là où le système est le moins favorable aux créateurs et aux auteurs eux-mêmes. Nous devons mener le combat pour maintenir la territorialité, c'est primordial pour les auteurs. Aussi aimerais-je que cet enjeu ne se trouve pas noyé dans un ensemble trop large de considérations techniques : il faut bien montrer que la territorialité, c'est la défense des créateurs et des auteurs, de la diversité culturelle, contre le moins-disant culturel et la concentration de la valeur entre les mains de quelques grandes entreprises, toutes américaines.
Si je me réjouis que le Sénat porte une telle PPRE, je regrette que le Gouvernement n'ait pas inscrit à notre ordre du jour la proposition de loi que j'ai déposée pour le référencement des productions des agences de presse et tendant à créer un droit voisin à leur profit - qui s'applique aussi aux éditeurs de presse.
Nous devons être vigilants sur les discussions européennes en cours, c'est certain. Vous dites que s'y opposent deux logiques, avec, d'un côté, les créateurs, les auteurs et, de l'autre, les consuméristes et les tenants de l'internet libre. En réalité, l'opposition sépare plutôt ceux qui sont pour la liberté de création, les droits d'auteur, la diffusion en libre accès des oeuvres culturelles, et ceux qui soumettent la culture à toujours plus de marchandisation, pour en confisquer la valeur économique, ces plateformes qui se concentrent et font peser un risque sur la création et l'accès à la culture. Dans ces conditions, peut-on vraiment parler de progrès ? Ne faut-il pas plutôt parler de résistance à ces attaques répétées contre le droit d'auteur ?
Nous manquons cependant d'une politique européenne offensive en matière culturelle, qui vienne soutenir les auteurs et démocratiser l'accès à la culture. Heureusement qu'il reste les politiques nationales et que les professionnels se défendent ! Aussi, au-delà d'un devoir de vigilance, la France devrait encourager la mise en place d'une politique culturelle européenne plus offensive.
Voyez, cependant, ce que font vos groupes politiques au Parlement européen : un peu de cohérence entre ce que l'on vote au parlement national et au Parlement européen !
Cette PPRE fait une analyse critique utile des projets européens en matière de droit d'auteur, apportant son soutien aux exceptions proportionnées, à la mise en oeuvre du traité de Marrakech de 2013 pour faciliter l'accès des aveugles et malvoyants aux textes, et surtout, réaffirmant notre attachement à ce principe majeur qu'est la territorialité des droits. Les producteurs et les diffuseurs nous disent que la territorialité est garante de la diversité culturelle et de la qualité des oeuvres, il faut les entendre et nous assurer que les grandes plateformes n'accaparent tout simplement pas l'économie de la culture.
La Commission européenne, au nom de la diffusion transfrontalière en ligne, met en cause la territorialité. Les auteurs et diffuseurs, eux, nous disent qu'il vaut mieux raisonner par pays. Monsieur le rapporteur, quels garde-fous vous paraissent les plus propices à garantir la diversité culturelle ?
Quel est le statut de nos débats ? Nous sommes en amont de la réforme européenne, notre PPRE s'adresse au gouvernement, qui peut s'en saisir dans les négociations européennes, puis le Sénat peut faire un avis simple ou motivé à la Commission européenne - de même qu'il peut inscrire ce sujet à son ordre du jour pour un débat en séance plénière.
Le sujet est-il lié à la directive SMA ? Assurément, et nous devrons veiller à ce que l'étude d'impact précise les conséquences.
Quel calendrier pour la réforme ? 2018 au plus tôt, sachant que la matière relève de la codécision et que le Parlement européen n'aura pas trop de cette année pour trouver une position commune.
Nous revient-il d'informer nos concitoyens de la portée politique des mesures d'apparence parfois bien technique de ce « paquet » ? C'est certain - et c'est l'objet du document de synthèse que je vous communique aujourd'hui : ses huit pages présentent les enjeux de cette réforme, il est à la disposition de tous.
Nous avons un devoir de vigilance, y compris contre la marchandisation de la culture - n'oublions pas, cependant, que les droits d'auteur sont une forme de commercialisation. Une partie des acteurs du numérique considèrent que la culture est un bien commun, qui doit être en accès libre et gratuit, comme pour l'Internet libre : il faut leur répondre aussi, en trouvant un point d'équilibre.
Enfin, le meilleur garde-fou est certainement de supprimer tout simplement l'article du projet de règlement dit « câble et satellite », relatif à la territorialité.
Je vous invite à adopter cette PPRE, qui prolonge très directement les travaux que nous menons sur le sujet depuis plusieurs années. Il faut peser dans les négociations en cours - la ministre de la culture nous a dit que le climat en était apaisé, mais nous devons rester pleinement vigilants.
La PPRE est adoptée à l'unanimité.
Nous examinons à présent, en deuxième lecture, le rapport de M. Dominique Bailly sur la proposition de loi visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs.
Le 26 octobre dernier, le Sénat a adopté à l'unanimité en première lecture la proposition de loi n° 826, déposée par votre rapporteur, visant à préserver l'éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité.
Cette proposition de loi, qui constitue le dernier texte de la législature relatif au sport, vise à donner force de loi à des propositions formulées par le Sénat dans plusieurs rapports publiés ces dernières années, et à servir de support pour mettre en oeuvre certaines préconisations émises par les participants à la grande conférence sur le sport professionnel français réunie à l'initiative du secrétaire d'État chargé des sports, M. Thierry Braillard, et qui a rendu son rapport en avril 2016.
Cette proposition de loi ne pourra être définitivement adoptée, compte tenu du calendrier parlementaire et de la suspension des travaux en séance prévue à la fin du mois de février 2017, que si un consensus se dessine permettant d'aboutir rapidement à un texte commun aux deux assemblées. C'est pourquoi j'ai souhaité associer un membre de chaque groupe politique à mes travaux, afin de rechercher en amont le consensus le plus large possible.
À l'issue de l'examen de la proposition de loi par l'Assemblée nationale, et alors que notre assemblée s'apprête à examiner à nouveau ce texte en deuxième lecture le 15 février prochain, la question qui se pose est de savoir si les grands équilibres de cette proposition de loi ont été préservés par l'Assemblée nationale et si le Sénat est en mesure de l'adopter définitivement.
L'examen des modifications adoptées par l'Assemblée nationale permet, il me semble, d'apporter toutes les assurances nécessaires. Non seulement les grands équilibres de la proposition de loi ont été préservés, mais des améliorations rédactionnelles et des précisions techniques importantes ont été apportées. Le Sénat peut donc aujourd'hui adopter ce texte définitivement en séance publique sans craindre de difficultés.
J'en viens maintenant au détail des modifications adoptées par l'Assemblée nationale. L'article 8 bis a été adopté sans modification. Il concerne l'interdiction de recruter une personne en contrat à durée déterminée pour remplacer un salarié gréviste ou réaliser des travaux dangereux.
L'Assemblée nationale a également maintenu la suppression de trois articles.
Par coordination avec les modifications apportées à l'article 5 visant à confier aux Directions nationales de contrôle de gestion, les DNCG, le contrôle des agents sportifs, elle a maintenu la suppression de l'article 4, qui prévoyait une réglementation particulière pour assurer le contrôle des agents sportifs, ainsi que celle de l'article 10 relatif à l'extension du profil biologique. Cette disposition a été adoptée dans la loi n° 2016-1528 du 15 novembre 2016 ratifiant l'ordonnance n° 2015-1682 du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d'autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels et modifiant le code du sport.
Pour les mêmes raisons, elle a maintenu la suppression de l'article 11 relatif au rétablissement de la compétence de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) sur les compétitions sportives qui ne sont pas organisées par une fédération déléguée.
Quinze articles ont été modifiés à la marge.
À l'article 1er, relatif aux chartes d'éthique et de déontologie, l'Assemblée nationale a prévu que seules les fédérations devaient établir de telles chartes, le cas échéant en coordination avec les ligues professionnelles.
Des modifications purement rédactionnelles ont été apportées par ailleurs : à l'article 1er bis, sur la transparence des présidents de fédérations et de ligues ; à l'article 1er ter, qui reconnaît la capacité aux ligues de se porter partie civile ; à l'article 2, relatif à la fraude technologique ; à l'article 3, relatif à l'interdiction de parier au sein d'une même discipline ; à l'article 3 bis, relatif au renforcement de l'infraction de corruption sportive.
L'Assemblée nationale a adopté une nouvelle rédaction de l'article 4 bis sur la convention de présentation concernant les agents sportifs. Les modifications ont pour effet d'encadrer plus étroitement encore le dispositif puisque l'agent sportif membre de l'Union européenne ne pourra recourir à une convention de présentation qu'une fois par saison sportive. Nous avions débattu de ce point.
L'Assemblée nationale a également adopté une nouvelle rédaction de l'article 5 sur le rôle et les pouvoirs des DNCG, qui préserve les avancées importantes adoptées au Sénat. La nouvelle rédaction de l'article L. 132-2 du code du sport maintient en effet les apports du Sénat : capacité à saisir les organes disciplinaires, contrôle des agents sportifs, contrôles sur pièces et sur place, publication des relevés de décision, rapport public.
Elle a ensuite adopté une nouvelle rédaction de certaines dispositions de l'article 6 sur le numéro d'affiliation, qui prévoit que l'association en reste détentrice. Le Sénat s'opposait à ce que l'association soit reconnue « propriétaire » du numéro d'affiliation qui appartient à la fédération. Le terme « détentrice » semble constituer un compromis satisfaisant.
L'Assemblée nationale a adopté une modification rédactionnelle à l'article 6 bis, visant à modifier la référence définissant l'« influence notable », qu'il n'est pas possible d'exercer sur plusieurs clubs.
Elle a ensuite modifié le fameux article 7, relatif à l'exploitation des attributs de la personnalité d'un sportif ou d'un entraîneur professionnel. Outre des précisions rédactionnelles, l'Assemblée nationale a prévu que le plafond de la redevance devait être fixé par une convention ou par un accord collectif national conclu par discipline et que le bénéfice de cette redevance était conditionné à une rémunération minimale également négociée par les partenaires sociaux. Ces précisions apparaissent particulièrement utiles, et plus souples que le dispositif adopté au Sénat, lequel limitait la redevance à 10 % des recettes générées par cette exploitation commerciale.
L'Assemblée nationale a ensuite adopté des modifications rédactionnelles à l'article 7 bis B, qui permet aux collectivités territoriales d'apporter leur garantie aux emprunts contractés par les clubs. Elle a aussi apporté des modifications rédactionnelles à l'article 8, qui ouvre la possibilité pour les fédérations de salarier les arbitres et les juges professionnels.
Les modifications introduites à l'article 9, qui crée une Conférence permanente sur le sport féminin, sont également de nature rédactionnelle, à l'exception de celles qui ont pour effet de supprimer la notion d'observatoire, remplacée par la mission, confiée à la conférence, de mieux faire connaître les pratiques sportives féminines.
Enfin, l'Assemblée nationale a modifié l'article 12 relatif à un accord professionnel pour lutter contre la diffusion sans droits de contenus sportifs sur Internet. Elle a rendu l'accord facultatif, mais la démarche vertueuse est préservée, ce qui était l'essentiel dans le cadre d'une démarche de « droit souple ».
Douze articles additionnels ont été ajoutés, illustrant ainsi l'intérêt que nos collègues députés ont porté à ce texte lors de son examen. Ces articles sont d'importance inégale, même si la plupart constituent des apports importants.
Si l'article 1er quater nouveau se contente ainsi de prévoir des modifications de coordination, le nouvel article 1er quinquies ouvre la possibilité, pour les ligues, de se constituer partie civile pour assurer la sécurité de leurs manifestations sportives.
L'article 2 bis nouveau encadre le pouvoir réglementaire de l'Autorité de régulation des jeux en Ligne (ARJEL) et lui confie un pouvoir de police administrative.
L'article 3 bis A nouveau prévoit la remise d'un rapport avant le 31 décembre 2017 sur la création d'un délit de fraude mécanique et technologique dans le sport et sur l'élargissement des compétences de l'AFLD.
L'article 5 bis nouveau édicte une interdiction de détenir une licence d'agent sportif en cas de condamnation pour fraude fiscale.
L'Assemblée nationale a par ailleurs prévu, à l'article 6 ter nouveau, un rapport sur l'opportunité pour les centres de formation des clubs de bénéficier du régime de financement des centres de formation des apprentis. Nous en avions également débattu.
Elle a précisé, dans l'article 9 ter nouveau, l'article L. 122-7 du code du sport, afin de ne pas empêcher une personne privée de posséder à la fois un club masculin et un club féminin dans une même discipline.
Elle a aussi prévu, à l'article 11 bis nouveau, une dérogation à l'application de l'article L. 212-1 du code du sport, lequel fixe les qualifications nécessaires pour enseigner des pratiques sportives.
L'article 13 nouveau établit l'obligation pour les fédérations de souscrire des garanties pour assurer les sportifs de haut niveau.
L'article 13 bis nouveau précise, quant à lui, le rôle des fédérations concernant les modalités d'accès au haut niveau définies par l'article L. 131-15 du code du sport.
L'article 14 nouveau prévoit que les établissements du réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) devront favoriser la pratique sportive de haut niveau.
Enfin, l'article 15 nouveau prévoit que l'article 3, qui établit une interdiction de parier dans sa discipline, entrera en vigueur au 1er janvier 2018.
La suppression de l'article 7 bis A par l'Assemblée nationale constitue le point de désaccord le plus important entre les deux assemblées à ce stade de la navette. Ce désaccord n'oppose pas majorité et opposition, mais transcende les clivages pour distinguer ceux qui considèrent que les collectivités territoriales, au nom du principe de libre administration, doivent pouvoir financer les infrastructures des clubs qui en restent propriétaires et ceux qui estiment que cette pratique crée un conflit d'intérêts qui n'est pas favorable à l'émancipation du sport professionnel.
En proposant de plafonner le montant des subventions dans les stades et les salles de sport utilisés par les clubs professionnels, les signataires de l'amendement déposé au Sénat, nos collègues Michel Savin et Claude Kern, avaient trouvé un dispositif équilibré permettant d'amorcer la transition vers un nouveau modèle économique du sport professionnel.
Toutefois, pour aboutir, il aurait fallu également permettre aux collectivités territoriales d'aider des clubs professionnels à devenir propriétaires de leurs infrastructures, ce qui n'a pas été possible, compte tenu, notamment, de la position du ministère des finances sur ce sujet.
La suppression de l'article 7 bis A ne constitue donc pas, à proprement parler, une surprise. Au moins votre rapporteur se félicite-t-il que la prise de conscience ait progressé sur la nécessité de faire évoluer le modèle économique du sport professionnel.
Hormis cet article 7 bis A, aucune disposition essentielle n'a été supprimée par l'Assemblée nationale et je rappelle qu'aucun des ajouts n'est de nature à nous poser de difficultés. C'est donc très naturellement que je vous propose d'adopter cette proposition de loi sans modification.
J'observe que si le Sénat en fait de même, la semaine prochaine en séance publique, notre assemblée aura démontré une nouvelle fois son expertise dans le domaine du sport.
Cette proposition de loi ne révolutionnera pas le fonctionnement du sport professionnel, mais elle constitue un premier pas sur certains points, défendus par tous les groupes, tels que l'éthique sportive, l'amélioration de la compétitivité des clubs, avec le contrat commercial, la reconnaissance du droit d'usage du numéro d'affiliation, la lutte contre le streaming illégal et la garantie d'emprunt par les collectivités locales, très attendue par certains clubs professionnels.
Nous avions adopté des amendements, dont certains ont été supprimés par l'Assemblée nationale. Nous voulions, en particulier, aller plus loin en matière de financement, avec l'élargissement de la taxe Buffet aux compétitions étrangères diffusées en France. Il reste donc à rééquilibrer la solidarité entre sport professionnel et sport amateur. Nous souhaitions également renforcer la sécurité juridique et les interventions des agents sportifs français, et garantir un meilleur contrôle des flux ainsi qu'une plus grande transparence des opérations.
Nous avons ouvert le débat sur l'encadrement de la participation des collectivités territoriales au financement des infrastructures utilisées par les clubs professionnels. L'établissement d'une réglementation dans ce domaine nous semblait nécessaire pour éviter les dérives déjà constatées. Les clubs devraient ainsi être encouragés à devenir propriétaires de leurs infrastructures.
Cette proposition de loi répond donc partiellement aux attentes du monde du sport. Je remercie le rapporteur de la qualité des débats. Nous voterons ce texte, en sachant que nous devrons aller plus loin, car le milieu sportif est en pleine mutation.
Le texte qui revient de l'Assemblée nationale est cohérent avec le nôtre. Les dimensions de transparence, de régulation et d'intégrité sont présentes. Sur des points importants, l'Assemblée nationale a même durci notre texte, notamment en matière d'accès au métier d'éducateur sportif ou d'agent sportif. Aujourd'hui, le mercato, c'est-à-dire le marché des transferts d'hiver dans le football professionnel, atteint un niveau financier inédit.
Le Gouvernement a changé d'avis sur l'ARJEL, c'est important pour la lutte contre la corruption sportive. Il convient de consolider le rôle et les moyens d'action de cette autorité, malgré les pressions de Bercy. L'Assemblée nationale a fait une partie du chemin, il faudra aller plus loin.
Il en va de même en ce qui concerne la formation. Les centres de formation des clubs professionnels doivent être consolidés, avec l'attribution du label de centre de formation d'apprentis, ou CFA, et donc du bénéfice de la taxe d'apprentissage. Il faut les conforter, pour éviter que les présidents de clubs ne parviennent à se décharger de leur mission citoyenne et sociale.
L'article 7 bis A a été supprimé. Nous le regrettons, mais nous sommes attachés à un vote conforme, nous voterons donc contre les amendements proposés.
Je salue le travail effectué par le groupe de travail. Cette proposition de loi ne règle pas tous les problèmes, mais elle contient des avancées pour la promotion d'un sport éthique, le renforcement de la déontologie, la préservation des valeurs du sport professionnel ou amateur. Elle doit être votée conforme, même si les amendements du groupe CRC sont intéressants, car ses dispositions sont très attendues par les professionnels du sport. Le RDSE votera donc ce texte.
Je félicite à mon tour le rapporteur. Nous avons pris note des changements positifs apportés par l'Assemblée nationale, qui viennent d'être rappelés.
Je regrette toutefois la suppression de l'article 7 bis A, nous devrons y revenir dans un autre cadre.
Les modifications introduites à l'article 12, qui rendent facultatifs les accords, me conduisent toutefois à douter de l'efficacité de la lutte contre le streaming illégal telle que nous l'avions envisagée.
Nous savons que cette proposition de loi est attendue, nous la voterons donc conforme.
Nous félicitons également le rapporteur et nous félicitons de l'état d'esprit général de ce texte. Nous avons le privilège d'être minoritaires, nous voterons donc les amendements présentés par le groupe CRC à l'issue d'un travail important, en sachant que cela restera sans conséquence sur un texte que nous souhaitons voir adopté conforme.
Nous sommes réservés sur la restriction des conditions d'accès au métier d'éducateur sportif. Il faut des éducateurs vertueux et en bonne forme, mais l'accent mis sur la consommation de produits issus des plantes nous semble exagéré, en comparaison, par exemple, à la question du viol et des agressions sexuelles dont nous avons débattu jeudi matin. On ne vérifie pas le casier judiciaire des animateurs de temps d'activité périscolaire (TAP), parmi lesquels pourraient se trouver des prédateurs. Je ne suis pas favorable à la dépénalisation du cannabis, mais cela me semble moins grave. Nous-mêmes ne sommes pas soumis à un alcootest avant d'aller en séance ! Cet excès de zèle ne me semble pas bienvenu.
Dans l'ensemble, le CRC soutient ce texte, mais il nous est difficile de le voter conforme. Nous partageons le sentiment d'une disproportion concernant l'utilisation de stupéfiants au regard d'autres crimes, d'autant plus que nous sommes favorables à la dépénalisation de l'usage de drogues douces.
Un autre point de discorde concerne la défiscalisation d'une partie de la rémunération des sportifs, que l'éthique nous interdit décidément de soutenir. De même, nous sommes inquiets quant aux risques encourus par les collectivités territoriales en cas de défection des clubs face aux garanties d'emprunt accordées pour la construction d'enceintes sportives.
Il me semble légitime d'interdire l'usage de substances illicites dans le domaine du sport ! Je déplore que ce ne soit pas une condition dans d'autres domaines, mais ce n'est pas une raison pour renoncer à l'exiger dans le domaine sportif. À mon sens, cela vaut également pour les animateurs de TAP, et pour toutes les professions qui travaillent avec des personnes fragiles et doivent donc prêter une attention particulière à leur comportement.
Ce travail était collectif, nous l'avons mené ensemble. Pour que ce texte vive, il faut un vote conforme. Les trois amendements déposés ont leur intérêt, mais cet outil législatif ne nous permet pas d'en appréhender les différentes dimensions. Je vous propose de les retirer ; à défaut, je vous proposerai de les rejeter. Nous vous demandons un vote conforme, pour développer le sport professionnel, mais aussi pour défendre l'éthique.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er quater (nouveau)
L'amendement n° COM-1 n'est pas adopté.
Article 5 bis (nouveau)
L'amendement n° COM-3 n'est pas adopté.
Article 13 (nouveau)
L'amendement n° COM-2 n'est pas adopté.
La proposition de loi est adoptée sans modification.
Je suis ravie d'accueillir M. Bruno Foucher, président de l'Institut français, qui vient nous présenter le contrat d'objectifs et de moyens (COM) de cet organisme pour la période 2017-2019 sur lequel la commission se prononcera la semaine prochaine. Je rappelle que je représente le Sénat au conseil d'orientation stratégique de l'Institut.
Je voudrais d'abord, rappeler l'engagement des équipes de l'Institut français afin de permettre à la France de rayonner sur les deux hémisphères, au travers de notre réseau composé de quelques 160 services d'action culturelle, de 97 instituts français et de 817 alliances françaises, mais également grâce aux collaborations que nous avons nouées avec de nombreux partenaires institutionnels français et étrangers, des institutions culturelles et des collectivités territoriales.
Le contrat d'objectifs et de moyens pour la période 2017-2019 fixe pour les trois années à venir les axes stratégiques que l'Institut français devra suivre.
Ce dernier a pour mission première de développer l'influence et l'attractivité de la France à travers sa culture et sa langue. À travers sa culture dans sa diversité créative, avec une inclination particulière pour les formes nouvelles et la volonté de rencontrer de nouveaux publics. À travers sa langue parce que le français est déjà une langue de demain et qu'il convient de veiller à ce qu'elle puisse non seulement être largement parlée, à la maison, au travail mais aussi sur internet, mais qu'elle le soit correctement, ce qui me semble être le grand défi à moyen terme, souligné par le Chef de l'État lors du dernier sommet de la Francophonie à Madagascar. À travers la langue également parce que notre façon de concevoir, d'exprimer le monde, reste une référence et qu'à l'étranger, il est souvent attendu que nous exprimions notre point de vue dans notre langue sur les grands problèmes contemporains, philosophiques ou scientifiques. La Nuit des Idées qui s'est déroulée dans le monde entier, le 26 janvier dernier, dans quarante pays, a attiré 200 000 spectateurs et provoqué 500 000 connections et 7 millions de tweets. Elle illustre parfaitement cette approche ambitieuse que le contrat d'objectifs et de moyens nous assigne et que l'Institut français entend soutenir.
L'Institut français a pour mission seconde d'animer le dialogue et de favoriser les échanges avec les cultures étrangères en France, en Europe et dans le monde. Il ne s'agit pas d'amener le monde à penser comme nous. Il s'agit de mettre en relief les bénéfices que tire notre culture française du « frottement » avec l'étranger, une reconnaissance que le dialogue avec l'autre est une source d'inspiration tout autant qu'une découverte.
« Les saisons », et l'Institut français en a promu beaucoup, constituent un des vecteurs principaux de cette philosophie. Nous venons de clore la saison France-Corée le 15 décembre dernier avec près de 500 événements croisés qui ont attiré 5 millions de spectateurs sur une année. Nous avons lancé le 16 décembre à Bogota l'année France Colombie par une fête des lumières organisée par la Ville de Lyon qui a réuni, selon la municipalité de Bogota, 900 000 personnes en huit jours. En 2017, la France sera l'invitée d'honneur de la foire de Francfort, la plus grande foire mondiale du livre. Ce choix résulte du constat fait par nos autorités que les jeunes générations en Allemagne et en France se connaissent moins et échangent moins que les générations précédentes. Pour faire se rapprocher cette jeunesse franco-allemande, il a paru utile d'utiliser le vecteur du livre et de l'édition. En favorisant les contacts entre éditeurs allemands et français, nous escomptons créer de nouveaux ponts entre nos deux pays à un moment où la dynamique du couple franco-allemand, sur fond de brexit britannique et d'incertitudes américaines, revêt une importance particulière. J'ajoute sur ce point que le futur pavillon français sera ouvert aux éditeurs du Sud et que notre présence en Allemagne lors de la foire de Francfort comprendra une forte dimension francophone. Les « résidences » que l'Institut français cherche à mettre en valeur et qui connaissent un grand succès auprès des artistes, en sont un autre exemple.
L'une des particularités des programmes de l'Institut français, soulignée par le contrat d'objectifs et de moyens, est de faire bénéficier de notre expertise les pays du Sud, l'Afrique et les Caraïbes en particulier, en développant in situ des événements structurants pour les jeunes créateurs qui les mettent en rapport avec des réseaux professionnels. C'est le cas pour la danse à Ouagadougou dont c'était la dixième édition en novembre dernier : 43 compagnies se sont présentées en provenance de 13 pays africains différents et 15 contrats ont été signés. Ce sera le cas pour la photographie à Bamako avec la biennale que nous sommes en train d'organiser au Mali, ou pour le cinéma au Burkina Faso et à Madagascar. C'est le cas également pour nos programmes « Cinémas du Monde » ou « la Fabrique des Cinémas du Monde » à Cannes : 70 % de nos lauréats étrangers trouvent à Cannes un partenaire pour poursuivre leur aventure. Ces réunions professionnelles profitent également à nos artistes, dans toutes les disciplines, et c'est par ce vecteur que nous réussissons à promouvoir nos créateurs, sur les scènes internationales ou dans les lieux prescripteurs.
Dans le cadre de ce dialogue permanent avec les autres cultures, nous identifions et animons des réseaux d'influence intergénérationnels qui constitueront nos relais de demain dans des pays en mutation importants pour notre diplomatie, notamment au Moyen-Orient. Nous avons ainsi développé trois programmes de mobilité : « Safir Lab » avec les pays arabes qui connaît un très grand succès, « Culture Lab» qui couvre le monde entier et bientôt « Afrique Lab » que nous réalisons avec l'Allemagne en vue d'identifier les futurs entrepreneurs de demain et qui se déroulera au Cameroun, au Ghana, en Côte d'Ivoire, au Sénégal et au Nigéria, ainsi qu'à Berlin et à Paris. La réaffirmation de cet objectif dans le COM est donc de ce point de vue très pertinent.
L'Institut français continuera bien évidemment - c'est le troisième objectif qui lui est demandé de satisfaire - d'appuyer le réseau par des actions de formation touchant toutes les catégories de personnels et de mettre à sa disposition les outils numériques.
Par rapport au contrat d'objectifs et de moyens précédent, celui qui vous est soumis comporte deux changements.
Le premier concerne une recherche plus systématique de la transversalité. Il s'agit, à l'ère du numérique, de tenir compte d'une tendance profonde de la création vers plus d'interdisciplinarité, qui caractérise les nouvelles tendances contemporaines. Le second point concerne la « géographisation » des actions de l'Institut français. Le contrat d'objectifs et de moyens fixe dans ses annexes une cartographie de ses priorités. Trois catégories sont ainsi déterminées.
C'est un plaisir, monsieur le président, de travailler sur le contrat d'objectifs et de moyens de l'Institut Français. Je suis cependant perplexe. L'Institut français d'aujourd'hui ne ressemble pas à celui souhaité par les deux commissions de la culture et des affaires étrangères du Sénat et mis en place en 2010 sous la direction du ministre des affaires étrangères, Bernard Kouchner. Il ne serait pas inutile de s'interroger sur l'évolution de son organisation et de ses moyens, mais je suis davantage préoccupé par l'évolution des crédits qui lui sont accordés. Les crédits budgétaires alloués à l'Institut français au titre du programme 185 sont en baisse continue : 28,7 millions d'euros, soit - 3 % en 2017. Depuis 2011, les crédits d'intervention de l'Institut français ont diminué de 34 %. Le fait que l'Institut français s'implante dans différents pays sans les moyens pour agir m'inquiète. Que va devenir l'image de la culture française ?
Si ce mouvement se poursuit, comment allez-vous atteindre les objectifs que vous venez de nous présenter ? L'universalité des domaines d'intervention de l'Institut français ne risque-t-elle pas d'être remise en cause et, à force d'« écrémer » les actions, ne risque-t-on pas de parvenir à une forme de « saupoudrage », préjudiciable à la lisibilité de l'action de l'Institut français ?
Le projet de COM doit répondre à la contrainte budgétaire : il y est question de mutualisation des moyens, de nouvelles synergies, d'innovation, de thèmes et pays prioritaires, d'optimisation des partenariats, de diversification des ressources, etc. Cette rationalisation est un objectif poursuivi depuis déjà plusieurs années, afin de répondre à la diminution des crédits budgétaires. Disposez-vous encore de beaucoup de marges de manoeuvre en ce sens ? Ce COM a-t-il réellement d'autres ambitions que de gérer la pénurie de ressources ?
Nous souhaitons tous que l'Institut français ait les moyens de son action mais nous sommes arrivés « à l'os ». Je redoute que, dans les prochaines années, on exige de vous encore plus d'efforts, au risque d'aboutir à une caricature de l'Institut français, ce que nous ne voudrions pas.
Vous avez raison, monsieur Legendre, d'appuyer sur ce point délicat. Nous avons déjà eu l'occasion de l'évoquer lors de la réunion du Conseil d'orientation stratégique de l'Institut français, au mois de décembre dernier, au quai d'Orsay.
Monsieur le président, vous avez décrit une vitrine splendide et votre capacité à mobiliser des milliers voire des millions de personnes autour de projets portés par l'Institut. Mais, malheureusement, l'intérieur du magasin ne reflète pas la splendeur déployée. Vous agissez beaucoup avec peu et vos moyens s'amoindrissent, non seulement sur le plan financier, mais également au niveau des effectifs. À l'occasion de certaines de mes visites dans les instituts français, j'ai pu constater une tension au niveau des personnels détachés dont les effectifs sont touchés par les coupes budgétaires.
Vous avez fait référence à l'instauration récente de la tutelle conjointe du ministère des affaires étrangères et du développement international et du ministère de la culture et de la communication, ce dernier contribuant au fonctionnement de l'Institut français de manière symbolique : 1,4 million d'euros en 2017. Le ministère de l'éducation nationale, associé à la définition de la politique de promotion de la langue française à l'étranger, devrait pouvoir également soutenir le réseau culturel. Quelle est la nature des liens entre l'Institut français et ces deux derniers ministères ? Ne devraient-ils pas contribuer davantage à son budget ?
Le projet de COM insiste beaucoup sur la nécessité de promouvoir auprès du public une image innovante et de soutenir de nouvelles formes créatives contemporaines. Ces objectifs sont louables et doivent être encouragés pour que la France conserve son image de pays d'avant-garde dans le domaine culturel. Vous concentrez votre activité sur le domaine artistique. Ne faudrait-il pas aussi vous donner pour objectif d'essayer d'atteindre de plus larges publics dans des domaines tels que la cuisine, la mode, la promotion du patrimoine touristique et qui participent aussi au rayonnement de la France à l'étranger ?
Les médias audiovisuels francophones vous soutiennent dans toutes vos actions. Quels sont les réalisations et les projets de l'Institut français en coopération avec ces médias ? N'y-a-t-il pas là un potentiel important pour démultiplier l'impact de certains événements ?
De même, quelles sont les réalisations et les projets de l'Institut français dans le domaine du numérique, qui constitue un enjeu stratégique pour l'avenir, tant pour la diffusion de la culture que de la langue françaises ?
Que change concrètement l'inscription dans la loi relative à la création, à l'architecture et au patrimoine d'une cotutelle de l'Institut français entre le ministère des affaires étrangères et du développement international et le ministère de la culture et de la communication ?
Ce projet de contrat d'objectifs et de moyens fixe des « objectifs » ambitieux à l'Institut français mais me semble très déséquilibré côté « moyens » : seul le ministère des affaires étrangères et du développement international s'engage à hauteur de 28,7 M€ pour 2017, le ministère de la culture et de la communication ne s'engageant sur aucun montant. Le simple maintien de cette subvention pour charges de service public sur la durée du contrat vous semble-t-il suffisant pour assurer l'atteinte par l'Institut français des objectifs qui lui sont fixés ?
Le projet de COM prévoit que l'Institut français doit « promouvoir le français comme langue de culture et de valeurs ». Qu'entendez-vous par là ? Ne risque-t-on pas, en rabâchant sans cesse que le français est porteur, par lui-même, de « valeurs », de minorer la culture et les valeurs des autres ?
Comment le ministère de l'éducation nationale et l'Agence française de développement (AFD) sont-ils associés à la définition de la politique de promotion de la langue française à l'étranger de l'Institut français ?
Quels sont les outils de « remontée d'informations en provenance du réseau culturel français » dont dispose aujourd'hui l'Institut français ?
Je partage les préoccupations exprimées par mes collègues sur les coupes budgétaires. Pour avoir également la chance de visiter régulièrement les instituts français à l'étranger, je peux témoigner de la variété de leur activité avec des moyens financiers et humains réduits.
Les partenariats résultent de la baisse du budget même s'ils permettent plus de transversalité dans les interventions de l'Institut français.
Auriez-vous quelques exemples pour illustrer la géographisation ? Quels sont les pays prioritaires du deuxième cercle et du troisième cercle ?
Monsieur le président, vous avez rappelé que : « la pensée se fait par la bouche ». Or, lors des auditions du groupe de travail sur la francophonie, Louis Duvernois et moi-même avons été interloqués par un anthropologue qui affirmait que la langue n'était pas porteuse de valeurs. Quel est votre avis à ce sujet ?
Vos questions convergent vers un problème de fond : l'adéquation entre nos missions et les moyens dont nous disposons pour y répondre. Nous avons la volonté d'agir. Je reviens d'Algérie. J'ai croisé, à Alger et à Oran, des équipes très motivées et heureuses dans leur action. Les personnels déploient beaucoup d'imagination et de créativité pour remplir leur mission. Il est vrai que l'opérateur que je représente est multistandard et couvre l'ensemble des champs de la création.
Si le budget diminue encore, je serai amené à sacrifier des secteurs qui font la réputation de la France, comme le cinéma. Le programme de coopération de l'Institut français avec les réalisateurs francophones est important, avec la Fabrique des cinémas du monde que nous cofinançons avec le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), la révélation de jeunes talents, le visionnage dans nos salles des films qui sortent des écoles de cinéma, la projection en marge des festivals de films peu courus, comme ceux de Leos Carax, d'Abdellatif Kechiche, dont nous avons acheté tous les films jusqu'à la sortie d'Adèle dont les droits étaient trop élevés pour nous, ou de François Ozon au moment où il sortait de la Fémis. Nous avons contribué à faire décoller leur carrière internationale.
Il faudra choisir. Nous ne pourrons pas diminuer de 8 % chacun de nos programmes. Dans certains domaines, la participation de l'Institut français devient à un tel point minime que nous n'avons parfois plus voix au chapitre. Nous serons amenés à sacrifier un département comme, par exemple, laisser le cinéma au CNC, qui lui n'a pas vocation à travailler avec les pays du Sud. Douze films que nous avons cofinancés ont été sélectionnés pour le Festival de Cannes l'an dernier pour figurer dans la vitrine internationale du cinéma. Mais l'année prochaine nous ne pourrons pas assurer « l'universalité », mot que vous avez employé, monsieur Legendre. Nous aurons à faire face à une baisse qui entraînera une rupture de contrats avec ceux qui nous soutiennent. Nous ne pourrons pas remplir l'ensemble des missions qui sont les nôtres.
Nous cherchons des moyens de financement. À mon arrivée à l'Institut français, il m'a été conseillé de me tourner vers le mécénat. Mais ce dernier a ses limites : environ 200 entreprises ont une activité de mécénat ; elles sont démarchées par l'ensemble des établissements culturels et ne peuvent répondre à toutes les demandes. Nous avons recours au mécénat pour financer nos « saisons », marque de fabrique de l'Institut, mais pas pour des activités qui changent d'une année sur l'autre. La fondation Bettencourt-Schueller, par exemple, nous aide beaucoup pour le financement de la villa Kujoyama au Japon. Les postes implantés à l'étranger trouvent sur place des relais de mécénat local mais, globalement, ce n'est pas un outil sur lequel il faut compter. De plus, l'esprit du mécénat en France est très différent de celui d'outre-Manche.
J'avais placé beaucoup d'espoir dans les collectivités territoriales. Mais pour élargir le périmètre des acteurs avec lesquels nous aimerions travailler, nous devons amener de part et d'autre un apport à hauteur de 50/50. Or je n'en ai plus les moyens. 450 projets internationaux avec les collectivités territoriales étaient prévus. C'est un programme trop ambitieux. J'ai entamé une tournée des grands élus pour revisiter avec eux une stratégie qui corresponde à notre ADN d'influence, et ne pas disperser notre aide : les maires de Lyon, de Bordeaux, de Nantes et les nouveaux élus des nouvelles grandes régions. Nous ne devons pas nous disperser mais nous concentrer à l'avenir sur des axes prioritaires.
J'ai consulté les présidents des régions Pays de Loire, Hauts-de-France, et je vais rendre visite à ceux des régions Normandie ou Occitanie, mais mes moyens limités ne sont pas attractifs. Les collectivités territoriales restent malgré tout un vecteur de développement.
Au niveau des financements européens, nous avons créé une cellule pour travailler sur les programmes ouverts par la Commission européenne. Nous en avons obtenu plusieurs ces dix dernières années dans le domaine du cinéma. Nous sommes pays-pilote d'un groupe de douze pays au sein de CINED Productions, programme de coopération européenne de création, d'éducation au cinéma et de formation aux nouveaux publics. Nous avons formé 700 professionnels en 2016, le nombre des spectateurs a atteint 6 000 et les chiffres devraient être multipliés par cinq cette année.
La subvention apportée par le ministère de la culture et de la communication est dix-huit fois moins importante que celle du ministère des affaires étrangères. J'ai entrepris des démarches auprès du cabinet de la ministre de la culture pour lui rappeler la tutelle à laquelle était tenu son ministère, pas seulement pour financer des programmes qui les intéressent, mais également pour partager les coûts de structure. Il m'a été répondu de manière sibylline que le ministère des affaires étrangères resterait la tutelle principale de l'Institut français.
Tous les ministères ont leurs contraintes budgétaires et des entités avec lesquelles nous travaillons sur des programmes internationaux qui recoupent les nôtres. Un effort de synergie s'impose.
L'Institut ne reçoit aucune subvention du ministère de l'éducation nationale. Des actions de synergie sont menées, notamment dans le cadre des missions confiées à l'AFD dans le domaine de l'apprentissage du français depuis 2004. À Madagascar, le Président de la République a rappelé que 100 000 professeurs avaient été formés en Afrique et a souhaité la formation de 180 000 supplémentaires avec des moyens mis à disposition pour ce faire.
Le programme de l'Institut français est en soi plutôt réduit, avec des cours de français et des plateformes qui fournissent du matériel pédagogique pour l'ensemble des apprenants. Nous travaillons dans ce domaine d'une manière satisfaisante avec une entité sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale, le Centre international d'études pédagogiques (CIEP), installé à Sèvres, auquel l'Institut apporte sa coopération.
Le CIEP a l'avantage d'être quasiment auto financé par les produits qu'il offre à l'étranger. Il dispose d'une subvention en baisse, avec un budget d'environ 20 millions d'euros. Il est parfaitement adapté au coeur de cible visant à travailler sur les systèmes d'éducation nationaux. Il est complémentaire des Alliances françaises et de l'Institut français. Nous avons quelques 360 000 apprenants dans nos centres, mais l'avenir du français se jouera dans les systèmes nationaux.
L'attractivité n'est pas notre objectif premier, même si l'on en tient compte dans le cadre des saisons croisées où l'on couvre tous les domaines, de la gastronomie à l'ingénierie. Des opérateurs spécifiques travaillent avec ce genre d'outils. L'édition est un acteur avec lequel nous travaillons au quotidien. Nous plaçons des droits d'auteur et des cessions de droit à l'étranger, environ un millier par an. Nous formons également des traducteurs, notamment en associant nouveaux et anciens traducteurs. Chaque année nous travaillons avec une langue différente, l'arabe l'année dernière, l'espagnol cette année. De la même façon, Francfort a été choisie parce qu'il existait un vide dans les relations entre les éditeurs français et allemands. Et la conséquence était que les jeunes Allemands étaient moins intéressés par la France, et inversement. Nous avons essayé de renverser cette tendance en étant l'invité d'honneur de la foire de Francfort. C'est une opération coûteuse mais indispensable.
Je n'ai pas d'opinion sur les valeurs que porte notre langue. Je pense qu'elle en porte, au regard des débats que nous organisons en français. « La nuit des idées » a été portée principalement en français, mais pas exclusivement. Je conteste cette notion américaine de « soft power », concept sociologique qui exprime l'épuisement du « hard power ». La France n'est pas une hyper puissance. Nous ne cherchons pas à convaincre le monde d'épouser nos idées. Notre but n'est pas d'amener l'autre à penser comme nous. Selon moi, seul le dialogue est pédagogique et porteur d'avenir et de paix dans un monde commun. « La nuit des idées » s'est déroulée autour de thèmes multiples et rassembleurs, souvent, mais pas exclusivement, en français. Notre langue n'est pas la seule à porter des thèmes d'universalité. On est dans le domaine de l'échange. Cette transmission de valeurs se situe également à travers la traduction d'ouvrages, notamment avec la Chine et la Corée qui achètent beaucoup de droits.
Quant aux remontées des informations du réseau, nous sommes assez éloignés de notre projet initial. Un des efforts à réaliser vise à ce que cette géographisation colle au réseau. Ce n'est pas parce qu'un pays ne fait pas partie du périmètre prioritaire que nous nous désintéressons de cette zone. Il y aura une itération permanente entre la stratégie que nous élaborons à Paris et le réseau sur le terrain.
En réponse à Mme Lepage, parmi les pays prioritaires, nous avons choisis les pays prescripteurs, où la scène est connue et dispose d'un rayonnement important comme l'Italie, l'Espagne, le Royaume-Uni, l'Allemagne ou encore l'Amérique du Nord. Nous nous sommes également concentrés sur les pays émergents et néo-émergents ainsi que sur les pays qui nous sont proches géographiquement, notamment au sud de la Méditerranée et les pays francophones d'Afrique. Pour ces derniers, on s'intéresse également à leurs créateurs, par exception et par tradition afin de les promouvoir sur les scènes internationales. Partout ailleurs, on ne s'intéresse qu'à nos créateurs.
J'ai plusieurs questions complémentaires. Tout d'abord, quelles sont les actions menées aujourd'hui sur les territoires où la France est intervenue militairement, afin de contribuer, avec d'autres acteurs, à la reconstruction post-conflits ? Je pense, en particulier à la République de Centrafrique qui ne figure pas parmi les pays prioritaires.
Conakry va être Capitale mondiale du livre 2017. Votre participation y est-elle envisagée ?
Enfin, est-il envisagé de développer notre présence culturelle en Iran ?
Le constat est partagé sur le manque de moyens et les rapporteurs en font un portrait presque plus cruel que vous qui en êtes la victime ! J'ai pu constater que la fermeture d'un poste décisif pour la francophonie, à Hué, au Vietnam, qui était un creuset pour toute cette zone du monde, était vraiment dommageable.
Dans votre mission de favoriser les échanges culturels, j'espère que le label « Institut français » arrive à convaincre les consuls d'accorder plus facilement des visas car je constate d'importantes difficultés dans la circulation des artistes. La présentation des artistes étrangers est sabotée par notre représentation à l'international.
Enfin, je salue l'évolution rédactionnelle du COM par rapport aux collectivités qu'il reconnaît enfin comme des partenaires à part entière.
Vous avez des convoitises sur l'AFD qui est riche et mon message est le suivant : il est bon de mettre la culture eu coeur du développement, mais il convient qu'elle soit adossée à des textes qui portent du sens. L'AFD ne doit pas être un simple guichet.
Je vous remercie pour votre énergie à faire rayonner la culture française et les valeurs de la France. Si nous n'avons plus de parole pour éclairer notre histoire, notre culture va se dissoudre.
J'ai bien noté que le pavillon français à la foire de Francfort allait prendre une grande place malgré le coût de cette opération, importante pour renforcer nos relations avec l'Allemagne.
A l'heure du Brexit, que pensez-vous du slogan adopté par Paris, ville candidate à l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ? Un slogan en français n'aurait-il pas été plus approprié que « Made for sharing » ?
L'Institut français entretient de très bonnes relations avec les médias francophones, qu'il s'agisse de France Medias Monde ou de TV5 Monde, qui consacrent une partie de leurs émissions à la diffusion des manifestations organisées par l'Institut.
La République centrafricaine est incluse dans la carte de nos priorités, mais le bâtiment de l'Alliance française a été détruit en raison des instabilités politico-militaires du pays. La relance de l'action culturelle de la France nécessite sa reconstruction, qui n'est cependant pas prévue dans un futur proche.
La Guinée a sollicité une aide financière de la part de l'Institut français afin d'organiser les manifestations liées à la sélection de Conakry comme Capitale mondiale du livre 2017.
Je suis personnellement très attaché au développement d'échanges culturels avec l'Iran, qui complèteraient la relance des relations économiques et politiques entre nos deux pays. Néanmoins, en dépit de mes sollicitations auprès de l'ambassade d'Iran en France, je dois admettre que le gouvernement iranien reste réticent à l'idée de mettre en valeur les artistes de son pays en raison des relations difficiles qu'il entretient quelquefois avec eux.
Je regrette, comme vous, la suppression de l'antenne de l'Institut français à Hué, alors même qu'il existe une véritable appétence des Vietnamiens pour la culture française. Je me réjouis néanmoins de la prochaine ouverture d'un institut français dans le sud du pays, qui sera indépendant du gouvernement vietnamien et qui servira également de résidence pour des artistes.
Lorsque l'AFD s'intéresse à une problématique donnée, elle a tendance à recruter ses propres experts et à développer des solutions sans concertation avec les autres partenaires français, ce qui peut créer des tensions entre administrations. Néanmoins, je peux vous garantir que l'AFD n'a pas l'intention de développer des institutions concurrentes à l'Institut français pour traiter des questions culturelles et que nous collaborons de manière intelligente.
L'utilisation d'un slogan en anglais pour la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024 renvoie à la délicate question de la domination de la langue anglaise au sein du comité international olympique. En témoigne le fait que la plupart des dossiers de candidature sont rédigés en anglais. La France est cependant soucieuse de faire respecter la charte linguistique qui prévoit que le français constitue l'une des langues officielles de l'organisation. Ainsi, lors des Jeux olympiques de Tokyo de 2020, les publicités seront réalisées à la fois en japonais, en anglais et en français.
Le slogan de la ville de Paris, « made for sharing », reprend une publicité pour les biscuits Cadbury !
Un article du Figaro explique que ce slogan a servi pour faire la publicité des bonbons Quality Street !
Au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, je tiens à vous remercier pour votre exposé. Nous donnerons notre avis sur le projet de contrat d'objectifs et de moyens (COM) de l'Institut français pour la période 2017-2019 la semaine prochaine. Je rappelle à l'ensemble des membres de la commission que nous organisons mardi prochain un colloque sur l'éducation et la culture, élément central du partenariat stratégique entre la France et le Maroc, en collaboration avec l'ambassade du Maroc en France.
La réunion est close à 12 h 35.