La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.
Le procès-verbal de la séance du 25 février 2010 a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
J’informe le Sénat que la question orale n° 775 de Mme Michelle Demessine est retirée de l’ordre du jour de la présente séance et remplacée par la question orale n° 863 du même auteur.
La parole est à M. Simon Loueckhote, auteur de la question n° 789, adressée à Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question concerne la prison de Nouvelle-Calédonie.
Depuis les événements relatifs aux évasions à répétition de notre établissement pénitentiaire, qui ont défrayé la chronique et ont valu le rappel en France du directeur et de son adjoint, le Camp Est semble désormais faire l’objet de toutes les attentions.
J’en veux pour preuve les engagements de janvier dernier de Mme le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, en matière d’investissement pour réaliser d’urgence des travaux de rénovation et de sécurisation, pour construire un centre pour peines aménagées et ouvrir 23 postes supplémentaires de surveillant.
J’ai pris acte de ces mesures et l’en remercie au nom de la Nouvelle-Calédonie. Toutefois, deux mois après cette annonce, je souhaiterais connaître l’état d’avancement de ces dernières.
Par ailleurs, il est un aspect qui, nous semble-t-il, n’a pas été encore suffisamment pris en considération : je veux parler de l’aspect social, de la formation des hommes à l’évolution de la société carcérale et de l’accompagnement des détenus dans la prison comme dans leur future réinsertion.
Enfin, l’article L. 381-30-2 du code de la sécurité sociale, créé par la loi n° 94-43 du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et à la protection sociale, prévoit l’affiliation obligatoire des détenus aux assurances maladie et maternité du régime général à compter de leur incarcération, donnant droit, à ce titre, aux prestations en nature pour les membres de leur famille, ainsi qu’une redevance par l’État d’une cotisation pour chaque détenu affilié. Or ce texte ne s’applique pas en Nouvelle-Calédonie.
Monsieur le secrétaire d'État, pourriez-vous nous faire connaître votre position sur ces différents points ?
Monsieur le sénateur, je ne puis pour l’instant apporter une réponse précise à votre question relative à l’application du régime général de l’assurance maladie et maternité en Nouvelle-Calédonie, mais je ne manquerai pas de vous la faire parvenir par écrit, au nom de Mme le garde des sceaux.
Je ne reprendrai pas tous les points que vous avez évoqués, car nous avons déjà apporté dans un courrier adressé à Mme Penchard, ministre chargée de l’outre-mer, le 10 décembre dernier, quelques éléments de réponse, auxquels vous avez d’ailleurs fait allusion.
Concernant l’amélioration des conditions de détention, nous avons effectivement décidé de construire un centre pour peines aménagées d’une capacité de 80 places, qui sera livré au cours de l’année 2012.
Avec la réalisation d’un quartier pour mineurs de 18 places qui devraient être disponibles avant la fin du premier trimestre 2010, soit très prochainement, la capacité de l’établissement passera de 192 places à 290 places.
Par ailleurs, des efforts sont déployés pour achever, à la fin du premier semestre, l’accès à la téléphonie pour les personnes détenues.
Concernant la politique de réinsertion, sur laquelle vous avez insisté, monsieur le sénateur, 124 aménagements de peine ont été accordés en 2009 : 51 semi-libertés, 42 placements à l’extérieur et 31 libérations conditionnelles.
Le développement des aménagements de peines alternatives à la détention est également en cours, répondant en cela à la volonté politique affichée dans le cadre de la loi pénitentiaire. Il concerne notamment le placement extérieur et la semi-liberté ; ce volet sera complété, au cours de ce trimestre, par la mise en œuvre du placement sous surveillance électronique, par le biais des fameux bracelets électroniques. Ces mesures permettront donc d’améliorer la situation d’un certain nombre de personnes.
En outre, s’agissant de l’établissement actuel, nous avons également décidé d’entreprendre des travaux importants pour un coût de près de 1, 5 million d’euros afin de procéder à la rénovation des sanitaires et du réseau électrique, à la réfection des toitures du greffe et de la salle de classe, ainsi qu’à la mise aux normes du mobilier. Bref, nous améliorons les conditions de vie des détenus et les conditions de travail des personnels.
Monsieur le sénateur, vous avez évoqué des évasions à répétition. Sachez que la sécurisation du site représente également un objectif prioritaire. Une nouvelle enceinte est en cours de réalisation, et les travaux d’éclairage de la périmétrie, d’installation de la vidéo-surveillance, de détection périmétrique et de sécurisation électrique seront achevés dans les prochaines semaines. De nouveaux postes protégés seront réalisés pour renforcer le contrôle des flux et la sûreté de l’établissement, et ce dans les délais prévus.
Au demeurant, nous avons demandé à l’Agence publique pour l’immobilier de la justice, l’APIJ, d’étudier la faisabilité d’une opération de restructuration lourde prévoyant notamment le doublement des places disponibles. L’Agence devrait rapidement se rendre sur place, si ce n’est déjà fait, pour étudier ce projet au regard du foncier disponible. En tout état de cause, les résultats de son expertise seront connus avant la fin du présent semestre.
Je ne reviendrai pas sur les moyens humains, car vous les avez vous-même rappelés. Nous avons effectivement renforcé de manière importante l’effectif des surveillants, gradés et officiers. De plus, pour pallier les vacances fonctionnelles, des agents originaires de Nouvelle-Calédonie ont obtenu leur mutation.
Enfin, je vous informe que la Chancellerie a demandé qu’une mission soit diligentée sur le site. Celle-ci a été réalisée les 15 et 16 janvier dernier par l’état-major de sécurité, qui a rejoint le chef de la mission outre-mer alors déjà sur place, et a donné lieu à l’établissement d’un rapport portant diagnostic sur la situation de l’établissement, rapport dont les préconisations sont actuellement en cours de finalisation.
Pour répondre clairement à votre question, il existe bel et bien un réel suivi sur le terrain.
Tels sont les éléments de réponse que je puis vous apporter, monsieur le sénateur.
La parole est à M. Bertrand Auban, auteur de la question n° 782, transmise à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur le programme européen de localisation par satellite Galileo.
Il avait été promis que Toulouse serait le centre de ce programme, toutes les décisions politiques devant être prises au siège de la concession Galileo à Toulouse. Or, trois ans plus tard, la Commission européenne a décidé de reprendre le dossier Galileo en lieu et place des grands industriels du secteur spatial.
Ainsi, Astrium, filiale spatiale d’EADS, et Thales Alenia Space, deux entreprises très implantées à Toulouse, risquent de ne pas obtenir autant que prévu sur ce programme de plus de 3, 4 milliards d’euros.
Déjà, au début du mois de janvier dernier, la Commission européenne a attribué une première tranche de quatorze satellites à une PME allemande au détriment d’Astrium.
Dans une conjoncture très inquiétante du marché de l’emploi et dans une situation d’affaiblissement du tissu industriel français, je demande au Gouvernement d’agir vigoureusement pour que nos entreprises puissent prétendre assurer une part importante du programme Galileo. Quelles mesures de politique industrielle le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre à cette fin ?
Plus généralement, monsieur le secrétaire d'État, j’aimerais connaître la stratégie industrielle du Gouvernement dans le domaine spatial.
Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme Valérie Pécresse, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Connaissant bien ce dossier, monsieur Auban, vous savez bien que, en 2008, après l’échec des laborieuses négociations avec le secteur privé en vue d’une exploitation fondée sur une concession dont le siège était effectivement prévu à Toulouse, la France a vigoureusement soutenu la Commission européenne dans ses négociations avec le Parlement européen afin d’aboutir à un nouveau règlement plaçant le programme sous le contrôle de la Communauté européenne et prévoyant le financement, en totalité, de sa phase de déploiement par les fonds communautaires.
Même si des difficultés subsistent, cette modification en profondeur de la gouvernance du programme a été essentielle au redémarrage de ce dernier sur des bases beaucoup plus saines.
Depuis, le programme Galileo est entré dans sa phase de déploiement ; il devrait être en mesure d’offrir des services opérationnels dès 2013. Trois des six lots du programme ont déjà fait l’objet d’un contrat entre la Commission et des industriels ; les trois autres devraient être conclus rapidement cette année.
L’implantation des deux centres de sécurité a été décidée au début de 2010 ; l’un d’entre eux sera installé à Saint-Germain-en-Laye. L’année 2010 devrait également voir aboutir le choix de la localisation du siège de l’Autorité européenne de supervision du programme Galileo, la GSA.
L’industrie française a largement contribué à ce programme, puisque, au cours de sa première phase, elle a obtenu 16, 6 % des financements réservés aux contrats industriels, soit un taux conforme à celui de la participation de la France à l’enveloppe Galileo de l’European Space Agency, l’ESA, et à son poids dans le produit national brut européen.
Ce taux a même progressé dans la phase de déploiement actuellement en cours, l’industrie française ayant remporté, en valeur, 22 % des contrats. Ce niveau important de participation de l’industrie française devrait pouvoir se maintenir dans le cadre de l’attribution des contrats à venir pour les trois autres lots de cette phase.
Ce programme n’est toutefois qu’un des aspects de la stratégie spatiale de la France, stratégie dynamique et volontariste, comme le démontrent trois événements récents.
Le premier est la contribution déterminante de la France lors du conseil ministériel de l’ESA qui s’est tenu à la Haye fin novembre 2008 pour poursuivre plusieurs programmes et en démarrer de nouveaux en dépit de la crise économique.
Le deuxième événement est l’inscription de 500 millions d’euros consacrés à des projets spatiaux, dont la maîtrise d’ouvrage sera confiée au Centre national d’études spatiales, le CNES, dans le cadre du grand emprunt, afin de préserver le leadership européen de la France dans le secteur spatial. Ces crédits serviront en particulier à la mise au point de la nouvelle fusée Ariane 6 et à l’amélioration technologique de nos satellites.
Enfin, le troisième événement est l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, qui dote l’Union européenne d’une compétence partagée dans le domaine spatial. Cela témoigne de la montée en puissance de l’Union européenne dans ce secteur et met le spatial en bonne position dans la perspective de la prochaine période financière de l’Union européenne, à savoir 2014-2020.
La France a constamment promu et soutenu la volonté de l’Union européenne de s’impliquer dans ce domaine stratégique. Les industries implantées à Toulouse ne manqueront pas de bénéficier de retombées positives, monsieur le sénateur.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai écouté votre réponse avec beaucoup d’attention.
Quoi qu’il en soit, les autorités gouvernementales, par la voix de M. Douste-Blazy, alors ministre des affaires étrangères et maire de Toulouse, avaient à l’époque promis que le siège de la concession Galileo serait à Toulouse.
Galileo est un formidable projet porté par la communauté scientifique locale, avec un savoir-faire éprouvé de ses équipes de recherche et de techniciens, et soutenu par toutes les collectivités territoriales et locales.
Je ne peux que mettre en doute le choix de Saint-Germain-en-Laye, ville peu réputée dans le domaine aéronautique et spatial, m’interroger sur les vraies raisons de cette décision et m’inquiéter de ses répercussions sur la crédibilité de notre pays dans la gestion de ce dossier majeur de la politique spatiale européenne et française.
La parole est à M. Claude Haut, auteur de la question n° 787, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Madame la ministre de la santé et des sports, je voudrais attirer votre attention sur les nombreuses collectivités qui veulent développer le traitement d’eau de baignade par filtration biologique. Ce traitement d’épuration de l’eau biologique et bactériologique offre une alternative intéressante au traitement chimique traditionnel.
L’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, a été saisie le 22 décembre 2006 par votre ministère et par le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer afin d’évaluer les risques sanitaires liés notamment aux baignades à traitement par filtration biologique.
L’AFSSET a rendu son expertise en juillet 2009 ; les porteurs de projet de ce type de baignade sont dans l’attente de la décision concernant ce procédé de traitement et des normes et préconisations auxquelles ils vont se soumettre.
La communauté de communes du Pays d’Apt, la CCPA, dans le Vaucluse, souhaite développer ce type d’épuration des eaux de baignade et attendent votre décision.
En conséquence, madame la ministre, quelles dispositions allez-vous arrêter concernant ce dossier et dans quels délais ? Cette communauté de communes ne pourrait-elle pas obtenir une dérogation dans les limites d’une étude expérimentale ?
Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu appeler mon attention sur les baignades artificielles, en particulier celles qui disposent d’un traitement par filtration biologique.
Comme vous l’avez signalé, ce nouveau procédé a fait l’objet d’expérimentations en France, mais celles-ci ne sont aujourd’hui régies par aucune règle sanitaire.
Ces baignades sont néanmoins soumises à déclaration auprès de la mairie du lieu d’implantation. La personne responsable d’une baignade artificielle est également tenue de surveiller la qualité de l’eau et d’informer le public des résultats de cette surveillance.
Mes services ont étudié avec attention le dossier déposé par la communauté de communes du Pays d’Apt, qui, en effet, sollicite une autorisation d’ouverture à titre expérimental.
Il est important de préciser qu’il n’est pas prévu d’intégrer à la réglementation française une procédure d’autorisation à titre expérimental. En revanche, de nouvelles mesures réglementaires sont en cours d’élaboration pour encadrer ces nouveaux dispositifs.
J’ai saisi l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail afin que les risques sanitaires associés à ce nouveau type de baignades soient évalués et que des prescriptions techniques adaptées soient intégrées dans la réglementation.
En juillet 2009, l’AFSSET a publié ses conclusions, dans lesquelles elle souligne les lacunes actuelles des procédés de traitement par filtration biologique. Elle recommande en conséquence aux concepteurs de tout mettre en œuvre pour mieux comprendre le fonctionnement du système de traitement, notamment la prolifération des bactéries, afin de mieux maîtriser les risques sanitaires.
Sur la base des éléments de ce rapport et après concertation avec les professionnels concernés, les futures dispositions réglementaires devraient paraître en 2010 ; à ce jour, vous comprendrez donc qu’il m’est difficile de vous donner une date plus précise.
Je ne peux pas souscrire à une démarche expérimentale, étant donné les conclusions aussi réservées, sur le plan sanitaire, du rapport de l’AFSSET. Mais en attendant, les collectivités peuvent, pour élaborer leur projet, se référer aux recommandations techniques qui figurent dans ce rapport.
Monsieur le sénateur, soyez assuré que je suis ce dossier avec une particulière attention. Vous aurez des réponses définitives dans quelques semaines, au plus tard dans quelques mois.
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
Je souhaitais, par le biais de cette question, connaître le délai dans lequel des réponses techniques très précises pouvaient être obtenues. Aujourd’hui, vous me rassurez en me répondant que ce sera dans le courant de l’année 2010.
Je ferai bien entendu part de votre réponse à cette communauté de communes ; plus tôt les normes seront fixées, mieux ce sera pour elle !
La parole est à M. Bernard Cazeau, auteur de la question n° 748, adressée à M. le ministre chargé de l’industrie.
Madame la secrétaire d’État, je veux attirer votre attention sur les craintes des salariés de l’imprimerie des timbres-poste et des valeurs fiduciaires, ou ITVF, de Boulazac, en Dordogne.
Sur ce site, l’ITVF contrôle, ce qui est unique en Europe, une grande diversité de technologies d’impression, des plus rares, comme la taille-douce, aux plus modernes, telles que l’offset, l’héliogravure et le numérique. L’ITVF a une tradition de qualité qui lui vaut d’être certifiée selon la norme ISO depuis 1995. Enfin, l’usine de Boulazac est dotée d’un système de protection anti-intrusion et d’une organisation interne de surveillance tout à fait pointue. En cela, La Poste dispose d’une unité moderne pour assurer sa mission de production de timbres.
L’ITVF est toujours parvenue à adapter ses effectifs et son organisation pour contrer la baisse sensible et régulière de la consommation de timbres-poste. Elle s’est modernisée, diversifiée, restructurée. Cette entreprise publique a ainsi versé un tribut particulièrement lourd en matière d’emplois, puisque ses effectifs ont été divisés par deux depuis les années quatre-vingt-dix. Elle est aujourd’hui rentable, de même que la filiale de La Poste à laquelle elle est rattachée, Phil@poste.
À l’occasion d’un projet de réorganisation interne, les salariés ont été informés d’une réduction programmée de 20 % des effectifs dans un proche avenir – l’équivalent de cent suppressions d’emplois –, et cela alors que l’activité est soutenue et que le recours à la sous-traitance s’accroît.
Pourquoi des perspectives aussi brutales ? Le changement de statut de La Poste a-t-il à voir avec cette volonté de diminution des effectifs ? Espère-t-on « vendre par appartements » les activités les plus pointues de la société en y réalisant au préalable des gains drastiques de productivité ?
L’inquiétude est là, et les salariés ont besoin d’y voir clair. Je souhaite par conséquent connaître les intentions du Gouvernement en matière de gestion de l’emploi sur le site de Boulazac.
J’aimerais aussi que vous puissiez nous préciser le projet industriel de la direction de La Poste pour ce site, car les réponses que nous obtenons par ailleurs sont particulièrement laconiques.
Monsieur le sénateur, au nom du Gouvernement, je vous confirme que l’imprimerie des timbres-poste et des valeurs fiduciaires, devenue Phil@poste Boulazac en 2006, est un pôle d’excellence reconnu au-delà de nos frontières, et je suis personnellement bien placée pour le savoir !
Phil@poste est une direction à compétence nationale rattachée à la direction du courrier et chargée de l’ensemble de l’activité philatélique. Elle fabrique deux milliards et demi de timbres Marianne, six cents millions de timbres de collection et trois millions de timbres « collector » ou personnalisés pour un chiffre d’affaires global de 450 millions d’euros en 2009.
L’inquiétude qui est exprimée par les postiers au sujet de leur devenir au sein de l’imprimerie et que vous relayez dans votre question résulte de l’allégement des coûts de structure de 20 % auquel doit procéder l’ensemble des services de la direction du courrier de La Poste, pour faire face à des baisses de volume du courrier très importantes, structurelles et sans précédent.
Je précise que ce plan d’économies ne concerne en aucune façon les services de Phil@poste implantés à Boulazac. Au contraire, cette direction prévoit un plan de modernisation de l’imprimerie en vue d’une plus grande diversification de son activité et d’une intégration du numérique, afin de préparer une nouvelle étape de développement de la philatélie.
Ce plan permettra notamment d’augmenter la part des timbres personnalisés pour répondre à la demande croissante des clients. De nouveaux investissements permettront également de conforter l’imprimerie, en respectant les meilleurs standards de qualité et de performance.
La stratégie de Phil@poste, présentée aux équipes de l’imprimerie le 12 novembre 2009 par sa directrice, comporte un volet industriel ayant notamment pour objectif de permettre à l’établissement de Boulazac de se hisser aux niveaux de sécurité les plus performants sur le marché mondial.
Le nouveau directeur de l’imprimerie, nommé en janvier 2010 sur ce projet industriel, poursuit l’objectif de consolider cet outil industriel en associant à la réflexion l’ensemble des cadres et des personnels de Phil@poste et en intégrant les meilleures pratiques dans ce domaine.
Confiante dans l’avenir de ce projet qui contribuera à l’évolution du développement industriel de la Dordogne, sa directrice a plusieurs fois rencontré les organisations professionnelles et reste particulièrement attentive au climat social au sein de l’établissement. Avec le management local, elle s’est rapprochée du délégué régional, qui est l’interlocuteur privilégié des élus concernés et qui suit ces évolutions avec attention. L’ensemble de ces personnels de La Poste est bien entendu à votre disposition, monsieur le sénateur.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, même si cette dernière me semble très optimiste par rapport à ce que nous savons du dossier.
Espérons que les mesures prévues n’affecteront pas les industries extrêmement compétentes du timbre et de La Poste. Il serait en effet dommage que les timbres et les différentes techniques employées dans cet établissement, qui contribuent au rayonnement de la France à l’étranger, pâtissent de cette évolution. Nous resterons donc vigilants en la matière, afin que les mesures de restructuration que vous venez d’évoquer n’affectent pas notre production de timbres.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteur de la question n° 753, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.
Monsieur le président, ma question, qui s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, porte sur les problèmes de copropriété, et plus particulièrement sur les pratiques tarifaires des syndics professionnels.
La copropriété concerne aujourd’hui 8 millions de logements, regroupant 21 millions de personnes, dont 40 % de ménages modestes. Les charges, en constante hausse, constituent l’une des principales problématiques pour les copropriétaires, en raison, notamment, des pratiques tarifaires des syndics professionnels. Force est de constater la généralisation de pratiques opaques et abusives de la part de nombreux syndics, qui décrédibilisent un mode de propriété pourtant censé être plus accessible.
Ces dérives ont d’ailleurs été constatées et fustigées dans un avis du Conseil national de la consommation, le CNC, rendu le 27 septembre 2007, relatif à l’amélioration de la transparence tarifaire des prestations des syndics de copropriété. Celui-ci prévoyait l’encadrement de la profession de syndic par un arrêté ministériel, après évaluation de l’application de cet avis par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, avant le 31 décembre 2008. Selon l’administration, 92 % des syndics respectaient intégralement, au début de l’année 2009, l’avis du CNC. Cependant, quatre enquêtes menées parallèlement démontraient que le respect de cet avis ne concernait que 60 % des syndics.
Voilà quelques mois, l’association des responsables de copropriété a lancé une nouvelle étude, dont le résultat est très éloigné de celui de la DGCCRF : le taux de non-conformité atteindrait de 50 % à 67 %, alors que la DGCCRF avançait le chiffre de 8 %. Ainsi, les différents résultats contredisent tous l’étude menée par la DGCCRF.
Madame la secrétaire d’État, à ce jour, l’arrêté n’a toujours pas été pris. Dernièrement, j’ai appris qu’une réunion avait eu lieu en février pour convenir d’un projet d’arrêté. Il m’a été rapporté que celui-ci ne refléterait pas l’avis majoritaire des « consommateurs » et usagers. Il ne reprendrait aucune des principales demandes formulées par la majorité des organisations de consommateurs et de copropriétaires et ne réglerait pas les problèmes de surfacturation.
En effet, selon ce projet, les syndics continueraient à facturer, outre les honoraires de base, la tenue des assemblées générales, des frais de tirage trop souvent abusifs, des forfaits supplémentaires injustifiés et excessifs, ainsi que des frais « privatifs » obligatoires et arbitraires.
Madame la secrétaire d’État, depuis plusieurs années, les mauvaises pratiques tarifaires des syndics professionnels sont dénoncées non seulement par de nombreuses associations et organisations de consommateurs et de copropriétaires, mais aussi par les médias. Malheureusement, le problème n’est toujours pas résolu ! Pouvez-vous m’informer de l’évolution du projet d’arrêté relatif aux contrats de syndic ? Celui-ci reprend-il les principales demandes formulées par les organisations de consommateurs et de copropriétaires ?
Madame le sénateur, Hervé Novelli a signé vendredi dernier – c’est donc tout à fait récent – l’arrêté qui fait l’objet de votre question. Je souhaite cependant rappeler le contexte dans lequel il s’inscrit.
Vous l’avez souligné, le Conseil national de la consommation a émis, le 27 septembre 2007, un avis proposant une liste de quarante-quatre prestations relevant de la gestion courante confiée aux syndics de copropriété. Ces recommandations devaient rendre plus lisibles les contrats de syndic et faciliter la comparaison entre les différentes prestations proposées.
Par ailleurs, ainsi que vous l’avez indiqué, Hervé Novelli a demandé à la DGCCRF de réaliser une enquête durant l’année 2008, afin de vérifier l’application de l’avis du CNC pour les contrats renouvelés au cours de l’année. Celle-ci a mis en évidence une application satisfaisante des recommandations du CNC, mais également des marges d’interprétation de certaines rubriques de la recommandation.
Lors des Assises de la consommation qui se sont tenues le 26 octobre 2009, Hervé Novelli a annoncé sa décision de fixer par arrêté la liste des prestations de syndic devant être au minimum couvertes par le forfait annuel payé par les copropriétaires.
Comme je l’ai annoncé, Hervé Novelli a signé l’arrêté « syndics de copropriété » vendredi dernier. Ce dernier reprend la liste des prestations de gestion courante recommandée par le CNC, assortie de précisions sur certains postes de dépenses, afin d’exclure tout risque d’interprétations divergentes.
Les aménagements du projet de texte sont issus d’une consultation approfondie des deux rapporteurs du groupe de travail du CNC et d’une consultation écrite des associations de consommateurs et des organisations professionnelles représentées au CNC.
Cet arrêté permettra de rétablir la confiance des consommateurs envers leur syndic. Pour autant, il ne s’agit pas de pénaliser les nombreux syndics qui ont fait des efforts et respectent déjà l’avis du CNC. Tous les nouveaux contrats signés après le 1er juillet 2010 devront être conformes à cet arrêté.
Par ailleurs, Hervé Novelli a saisi la Commission des clauses abusives, afin de faire la lumière sur le caractère abusif ou non de l’ensemble des clauses figurant dans les contrats de syndic, et notamment l’articulation entre prestations de gestion courante et prestations particulières.
Madame la secrétaire d’État, je tiens à remercier M. Novelli d’avoir signé cet arrêté. J’espère donc que les consommateurs bénéficieront désormais de toute la transparence souhaitable en ce domaine.
La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 773, adressée à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, voilà maintenant plus d’un an et demi, j’ai alerté le Gouvernement sur la situation dramatique des bénéficiaires de l’allocation équivalent retraite, l’AER, supprimée par le Gouvernement en 2008 et rétablie sous la pression en 2009, dans des conditions d’incertitude très difficiles pour les allocataires, lesquels ont pu perdre jusqu’à 600 euros par mois.
Le 15 février dernier, Laurent Wauquiez a annoncé, sans autre précision, la reconduction exceptionnelle de l’allocation équivalent retraite. On compte aujourd’hui 45 000 bénéficiaires de l’AER, dont les familles sont aujourd’hui dépendantes des conditions de mise en œuvre de cette allocation. Les agents de Pôle emploi, dont la charge de travail est déjà très lourde, devront aider dans l’urgence ces personnes à monter leur dossier, sans savoir si la mesure sera rétroactive et sans connaître véritablement les conditions d’obtention de l’AER. Vous en conviendrez avec moi, madame la secrétaire d’État, rien n’est clair !
Depuis plus d’un an et demi, de très nombreuses familles vivent avec cette épée de Damoclès au-dessus de leur tête. C’est bien le Gouvernement qui tient le glaive dans cette affaire. Je vous demande donc instamment, madame la secrétaire d’État, de tranquilliser ces familles et d’apporter un peu de sérénité aux agents de Pôle emploi.
Mes questions seront extrêmement précises. Quand comptez-vous publier le décret de prolongation de l’AER ? Pouvez-vous me confirmer que cette prolongation se fera dans les mêmes conditions qu’en 2009 et que le nombre de trimestres concernés sera identique ? Avez-vous l’intention de prolonger ce dispositif jusqu’à la fin de l’année 2011 ? Avez-vous diligenté une enquête pour comprendre les raisons pour lesquelles autant de personnes, croyant de toute bonne foi pouvoir bénéficier de l’AER, ont adhéré, en 2008, à des plans de départ volontaire ?
Vous le savez, la manifestation qui se déroulera cet après-midi réunira la plupart des 45 000 personnes que je viens d’évoquer, lesquelles ne savent pas si elles pourront, demain, recevoir une retraite décente des services sociaux.
Monsieur le sénateur, au nom de mon collègue Laurent Wauquiez, je vous rappelle que, conformément à votre souhait, le Président de la République a annoncé, dans le cadre de la conférence de l’agenda social, la prorogation en 2010 de l’allocation équivalent retraite, qui garantit aux demandeurs d’emploi un niveau de ressources minimum, revalorisé chaque année, jusqu’au moment de la liquidation de leur retraite.
Cette allocation, versée sous conditions de ressources, se substitue à un revenu de remplacement – allocation de solidarité spécifique ou RSA – ou peut être versée après expiration d’une allocation de chômage. Elle peut également compléter une allocation de chômage d’un faible montant, et est alors dénommée « AER de complément ».
Au cours de l’année dernière, marquée par une période exceptionnelle de crise, le Gouvernement avait décidé, en accord avec les partenaires sociaux, de prolonger cette allocation pour 2009. L’incidence de la crise mondiale continuant malheureusement à peser sur le marché de l’emploi, le Gouvernement a souhaité reconduire cette allocation pour l’année 2010. Cette mesure de justice sociale permet également d’apporter une réponse aux demandeurs d’emploi en fin de droits à l’assurance chômage.
Un décret est actuellement en cours de signature pour prolonger de manière exceptionnelle jusqu’au 31 décembre 2010 la possibilité accordée aux demandeurs d’emploi de bénéficier de cette allocation.
Ainsi, de nouvelles ouvertures de droits pourront être attribuées dès lors que la demande sera déposée avant le 31 décembre 2010 et que le demandeur d’emploi remplira les critères d’attributions suivants : être demandeur d’emploi, être âgé de moins de soixante ans, disposer de ressources inférieures à un plafond déterminé, justifier d’une durée d’assurance vieillesse au moins égale à 161 trimestres.
M. Laurent Wauquiez a demandé au directeur général de Pôle emploi de prendre les mesures nécessaires pour que les personnes concernées puissent bénéficier très rapidement de cette allocation.
Dans le même temps, le Gouvernement est toujours très déterminé quant à l’emploi des seniors, qui ne doivent plus être considérés comme la variable d’ajustement de nos politiques de l’emploi. Vous le savez, des mesures ont été prises pour favoriser leur maintien dans l’emploi, avec notamment l’obligation pour toutes les branches et les entreprises de plus de 300 salariés de négocier des accords sur l’emploi des seniors.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Selon moi, celles et ceux qui ont travaillé toute une vie ne doivent pas perdre leur allocation sous prétexte que les seniors font désormais l’objet d’une politique d’emploi ! Ces personnes sont souvent victimes de plans sociaux qui ne disent pas leur nom, et sont parfois contraintes de quitter leur entreprise.
La suppression de l’AER ne pouvait être envisagée que dans le cadre de la mise en œuvre d’une politique en faveur des seniors. Mais on a mis la charrue devant les bœufs : en supprimant l’AER, on fait porter le fardeau à celles et ceux qui subissent une politique visant à les exclure de l’entreprise.
Je le rappelle, ces personnes se sont vu préciser, parfois de façon écrite, qu’elles toucheraient l’allocation équivalent retraite.
Votre intervention, madame la secrétaire d’État, ne répond qu’en partie à mes préoccupations, puisque vous n’avez pas abordé la question de la rétroactivité. Celles et ceux qui n’ont pas reçu cette allocation au cours des derniers mois doivent pouvoir bénéficier d’une mesure rétroactive. Il est également essentiel que le décret soit publié le plus rapidement possible afin que les agents de Pôle emploi puissent travailler en toute sérénité. En effet, les 45 000 personnes concernées, compte tenu de la grande précarité dans laquelle elles se trouvent, se tournent fort justement vers cet organisme. La publication de ce décret est donc urgente.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, en remplacement de M. Daniel Raoul, auteur de la question n° 780, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Madame la secrétaire d'État, je me fais l’interprète de mon collègue Daniel Raoul, qui souhaite attirer l’attention de Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi sur l’avenir des marchés de définition à la suite de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 10 décembre 2009.
Le code des marchés publics, notamment son article 73 et le IV de son article 74, traite de la procédure dite des « marchés de définition ». Cette procédure permet, dans les cas où un projet ne peut faire l’objet d’un programme précis déterminé à l’avance, d’explorer les possibilités et les conditions d’établissement d’un marché ultérieur. Pour ce faire, l’article 73 dispose ceci : « dans le cadre d’une procédure unique, les prestations d’exécution faisant suite à plusieurs marchés de définition ayant un même objet et exécutés simultanément, sont attribuées après remise en concurrence des seuls titulaires des marchés de définition […] ».
Le travail simultané sur le programme et sa formalisation urbaine ou architecturale, un dialogue soutenu entre maître d’ouvrage et maîtres d’œuvre, très en amont, et une appropriation collective du projet sont les atouts essentiels de cette procédure. Celle-ci est particulièrement utile en matière d’urbanisme, car elle permet d’aborder le fait urbain dans sa complexité et de définir la programmation urbaine dans un processus itératif mieux adapté qu’aucune autre procédure.
Or cette procédure vient d’être condamnée par un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 10 décembre 2009. Les motifs de cette condamnation sont exposés dans l’arrêt : « […] Dans la mesure où ces dispositions prévoient une procédure de marché de définition qui permet à un pouvoir adjudicateur d’attribuer un marché d’exécution à l’un des titulaires des marchés de définition initiaux avec mise en concurrence limitée à ces titulaires, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 et 28 de la directive 2004/18/CE. »
Observons que c’est le fait de limiter le marché d’exécution ultérieur aux seuls titulaires du marché d’études antérieur qui est condamné ; le principe consistant à faire conduire plusieurs études simultanées sur le même objet en vue d’approfondir le programme urbain en concertation étroite avec le maître d’ouvrage n’est en aucun cas dénoncé.
De nombreuses études sont aujourd’hui lancées, mobilisant des moyens importants. Or nous sommes aujourd’hui dans l’ignorance de l’effet de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne sur les procédures en cours qui ont été engagées sur la base du droit existant.
Aussi, mon collègue Daniel Raoul demande tout d’abord comment les dispositifs engagés et ceux d’exécution ultérieurs pourront être conduits à leur terme. En ce qui concerne les marchés d’exécution ultérieurs, les procédures engagées l’ont été sur la base de la perspective de la réalisation de cette deuxième phase ; ne pas les autoriser troublerait significativement l’équilibre économique de la démarche entreprise par les candidats.
Ensuite, mon collègue demande, au cas où des adaptations de règles seraient nécessaires, dans quelle mesure des « passerelles » légales pourraient être introduites rapidement afin de ne pas interrompre les procédures en cours et de permettre de transférer les procédures engagées.
Enfin, il souhaite savoir quelle procédure permettra de remplacer le dispositif des « marchés de définition », et à partir de quand.
M. Daniel Raoul entre dans l’hémicycle.
Daniel Raoul venant à l’instant de nous rejoindre dans cet hémicycle, il aura tout loisir de prendre la parole dès après que Mme la secrétaire d'État lui aura répondu.
M. Daniel Raoul acquiesce.
Monsieur Raoul, compte tenu de la concision de certaines interventions, nous avions un peu d’avance sur notre horaire, et c’est pourquoi M. Claude Bérit-Débat s’est fait votre interprète. Mais vous pourrez bien sûr intervenir en réponse à Mme la ministre.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. M. Bérit-Débat s’est fait l’interprète de M. Raoul. Pour ma part, monsieur le sénateur, j’agirai de même pour ma collègue Christine Lagarde.
Sourires
Comme vous l’avez rappelé, par un arrêt du 10 décembre 2009, la Cour de justice de l’Union européenne a condamné la procédure des marchés de définition prévue à l’article 73 et au IV de l’article 74 du code des marchés publics. Vous avez souligné tout l’intérêt de cette procédure organisée en deux temps : à des marchés de définition succédait un marché d’exécution, qui pouvait être, par exemple, un marché de maîtrise d’œuvre.
Afin de mettre le code des marchés publics en conformité avec la décision de la Cour et de se conformer aux obligations communautaires, cette procédure particulière sera abrogée dans un décret à paraître prochainement.
Quelles sont les conséquences de cette décision sur les contrats passés actuellement sur le fondement de ce dispositif ?
Les marchés de définition et d’exécution attribués avant l’arrêt de la Cour ne sont évidemment pas remis en cause si leur exécution est achevée. Si le marché de définition est achevé, tandis que le marché d’exécution n’a pas encore commencé, une mise en concurrence élargie à d’autres soumissionnaires que les titulaires des marchés de définition initiaux doit être organisée. L’équilibre économique de la procédure ne sera pas bouleversé si les clauses du marché de définition ont prévu le transfert de la propriété intellectuelle de la « définition » du projet à l’acheteur public.
Si le marché de définition ou le marché d’exécution est en cours, la nécessaire stabilité des relations contractuelles et le principe de loyauté que se doivent les parties à un contrat administratif leur interdit de se prévaloir de la décision de la Cour de justice pour tenter d’obtenir la nullité du contrat. En revanche, les personnes publiques sont tenues, pour se conformer à la décision de la Cour de justice, de procéder à la résiliation des marchés d’exécution en cours. À défaut, la France serait exposée à une nouvelle condamnation par la Cour, comme ont été condamnés d’autres pays avant elle.
Le Gouvernement est toutefois très conscient des difficultés pratiques que peut soulever une telle solution, notamment si le marché est en voie d’achèvement. Afin d’y remédier au cas par cas, Christine Lagarde invite les acheteurs publics à saisir la direction des affaires juridiques de Bercy de toute difficulté rencontrée.
Si, depuis l’arrêt de la Cour, les acheteurs publics ne peuvent plus avoir recours à l’article 73 du code des marchés publics, d’autres procédures sont utilisables. Il leur est ainsi possible de conclure plusieurs marchés d’étude, puis de lancer une seconde procédure permettant l’attribution d’un marché ultérieur, conformément aux règles de droit commun prévues par le code des marchés publics.
Le Gouvernement réfléchit actuellement à l’opportunité d’adapter les instruments juridiques existants, afin de répondre aux besoins spécifiques auxquels permettait de répondre la procédure des marchés de définition, désormais interdite, et dont vous avez fort justement souligné tout l’intérêt, monsieur le sénateur.
Madame la secrétaire d’État, l’arrêt rendu en décembre 2009 par la CJUE fait suite à un rappel à l’ordre qu’avait reçu la France au sujet de l’article 73 du code des marchés publics, relatif aux marchés de définition. Aussi, ce problème aurait dû être réglé voilà pratiquement deux ans.
Les collectivités territoriales qui ont engagé des concours de marché de définition se retrouvent confrontées à une grande insécurité juridique. Madame la secrétaire d'État, vous dites que la solution consistera à élargir l’appel d’offres. Certes, mais cela n’est pas entièrement satisfaisant dans la mesure où l’adjudicataire du marché de définition pourrait se trouver exclu, alors même qu’il aurait défini le cahier des charges.
Je ne suis pas certain que la direction des affaires juridiques de Bercy soit à même de trouver une solution simple.
Madame la secrétaire d'État, vous affirmez que les acheteurs publics peuvent d’ores et déjà recourir à d’autres procédures en lieu et place des marchés de définition. Certes, mais à une époque où il est beaucoup question de simplification, je ne suis pas certain que ce soit la bonne voie pour simplifier ce concept en matière urbanistique.
Je pense en particulier à l’appropriation des berges de la Maine, à Angers, vaste chantier pour lequel les collectivités territoriales sont pour l’heure dans l’incapacité totale de définir un programme sur le modèle de ce qui est requis dans le cadre d’un appel d’offres classique.
Seul un marché de définition, parce qu’il fait concourir plusieurs cabinets d’architectes – et je prends au hasard l’exemple du Grand Paris
Sourires
L’incertitude qui pèse sur les marchés d’exécution en cours place les collectivités territoriales dans une grande insécurité juridique. Vous avez beau affirmer, madame la secrétaire d'État, que l’équilibre économique de la procédure ne sera pas bouleversé si les clauses du marché de définition ont prévu le transfert de la propriété intellectuelle de la « définition » du projet à l’acheteur public, je crains que la situation des collectivités territoriales ne demeure très inconfortable sur le plan juridique.
Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de M. le ministre de la culture et de la communication, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures vingt-cinq, est reprise à dix heures trente.
La parole est à M. Claude Bérit-Débat, auteur de la question n° 762, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
Moussu lou ministré, que poudeyri m’adressa à bous en biarnes ou en occitan, ûe lénga que aymi parla e douc soy amourous més que boy lo hà en francés per respect pour lou gouvernament e pour lou parlamén.
Monsieur le ministre, depuis 2008, la Constitution reconnaît les langues régionales comme faisant partie intégrante du patrimoine de la France. Malgré cela, nous attendons toujours le projet de loi pérennisant leur pratique, promis par le Président de la République. En vain semble t-il, si l’on se réfère aux réponses qui nous ont été fournies jusqu’ici.
Pourtant, la vitalité des langues régionales en France ne se dément pas. Une enquête sociolinguistique réalisée en Aquitaine à la fin de l’année 2008 démontre que 250 000 Aquitains – soit un Périgourdin sur six – parlent occitan. Et surtout, 80 % d’entre eux souhaitent le renforcement de son enseignement à l’école.
Malgré cela, l’État rechigne à mettre en place les solutions adaptées pour pérenniser cet engouement incontestable. Aujourd’hui, 500 élèves occitanistes sont répartis dans trois collèges et lycées périgourdins. Leurs effectifs croissants nécessiteraient une augmentation du nombre de postes d’occitan ouvert au CAPES. Hélas ! les heures de cours, et donc les postes d’enseignant, manquent pour répondre convenablement à cette demande.
Plus largement, les cahiers des charges des radios et des chaînes audiovisuelles publiques devraient comprendre la diffusion, mais aussi la production d’émissions en langue régionale. Les médias devraient en effet être un support davantage utilisé pour promouvoir la diversité culturelle. Or le magazine occitan Punt de Vista, certes diffusé sur France 3 Aquitaine, n’a pu voir le jour que parce qu’il est financé par le conseil régional d’Aquitaine.
Loin d’être anachroniques, les langues régionales sont un facteur d’insertion professionnelle et de cohésion sociale. Ainsi, en Dordogne, une formation assure l’apprentissage de l’occitan aux professionnels en charge de l’accompagnement à domicile ou en établissement pour personnes âgées.
Il est reconnu que, pour les aînés, communiquer dans leur langue maternelle est un moyen efficace de maintenir leur capacité cognitive et retarde le développement de maladies de type Alzheimer. On le voit, la culture vient ici au service de la santé.
Monsieur le ministre, comment comptez-vous tenir les promesses présidentielles en faveur de langues régionales dont je n’ai pu évoquer les apports qu’à grands traits ? Pouvez-vous me dire comment vous entendez pérenniser l’occitan, le provençal, le basque, le breton, bref, l’ensemble des langues régionales, c’est-à-dire en fait la culture française qui, comme la nation, si elle est unique, n’est pas pour autant uniforme ?
Monsieur le sénateur, le projet de loi relatif aux langues régionales que le Gouvernement avait envisagé de déposer en mai 2008 était conçu comme un élément au sein d’un dispositif global de développement des langues régionales en France. Il visait en premier lieu à donner une forme institutionnelle au patrimoine linguistique de la nation et, en second lieu, à rassembler dans un même texte des dispositions existantes, mais que leur dispersion rend parfois difficilement accessibles à nos concitoyens.
Or, notre loi fondamentale ayant été modifiée en juillet 2008, le premier objectif a été pleinement atteint puisque le titre XII de la Constitution, consacré aux collectivités territoriales, comporte désormais un article stipulant que « Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France ». Comme vous le savez, monsieur le sénateur, la Constitution a une portée supérieure à tout autre texte législatif national.
Par ailleurs, on peut envisager le développement des langues régionales sans avoir nécessairement à légiférer. En effet, l’appareil législatif et réglementaire actuel offre des possibilités qui ne sont pas toujours exploitées. De la signalisation routière à la publication des actes officiels des collectivités territoriales, il y a maintes occasions de manifester un bilinguisme français-langue régionale.
De nombreuses marges de manœuvre existent, qui pourront être utilisées si les collectivités locales, aux côtés de l’État, font valoir pleinement leurs compétences en la matière, comme les y invite le titre XII de la Constitution.
L’État, de son côté, consent d’ores et déjà un effort important en faveur du développement des langues régionales. Je pense au ministère de l’éducation nationale et à son action en matière d’enseignement, mais aussi au ministère de la culture et de la communication, qui soutient les initiatives contribuant à renforcer la création en langues régionales.
Pour ce qui concerne la langue et la culture occitanes en particulier, sur lesquelles vous m’interrogez également, je tiens à vous dire que mon ministère apporte notamment son soutien financier aux productions cinématographiques et audiovisuelles occitanes, à la création théâtrale – Théâtre La Rampe de Montpellier et Centre dramatique occitan de Toulon – ainsi qu’à la publication et à la traduction d’œuvres littéraires représentatives. Il encourage les actions de valorisation menées dans un cadre interrégional, particulièrement adapté à une langue parlée sur une vaste zone, qu’il s’agisse de l’Estivade de Rodez ou du travail de l’Institut d’études occitanes pour la promotion et la socialisation de la langue. Plusieurs programmes font l’objet d’une coopération avec les conseils régionaux et autres collectivités publiques, dont bénéficie par exemple le Centre inter-régional de développement de l’occitan, à Béziers.
D’une manière générale, sont privilégiées les initiatives qui favorisent et diffusent la création occitane dans sa modernité et qui contribuent à conforter sa place dans le paysage culturel de notre pays.
Monsieur le ministre, les efforts de l’État dans ce domaine me semblent nettement insuffisants.
Vous soutenez qu’il est inutile de légiférer puisque la Constitution mentionne les langues régionales. Ensuite, comme le fait le Gouvernement chaque fois qu’il est interpelé par mes amis occitanistes ou défenseurs des langues régionales, vous dressez un état des lieux de la situation actuelle, affirmant qu’il existe déjà des moyens de promouvoir et de défendre une langue régionale, notamment par le biais de la signalétique. Le maire que j’ai été peut vous dire que ces moyens sont utilisés depuis longtemps. Sans les collectivités locales, rien ne pourrait être fait.
Je souhaite que le Gouvernement dégage des moyens, notamment pour l’apprentissage de la langue régionale. Comme je l’ai indiqué voilà un instant, mon département – pour ne parler que de l’occitan – compte trois lycées et collèges qui accueillent 500 élèves. La demande des jeunes est très forte. Nombre d’entre eux considèrent que l’apprentissage de leur langue maternelle ou paternelle est un moyen de se réapproprier une part de l’histoire de leur région et, au-delà, de la nation tout entière. Parallèlement, 80 % des parents souhaitent qu’un effort soit réalisé dans ce domaine.
Or, le ministère de l’éducation nationale ne fait rien : ni nomination d’enseignants, ni création de postes au CAPES ou d’heures supplémentaires.
Pour vous donner une idée de la disproportion de l’effort consenti par l’État et par les collectivités locales, permettez-moi de rappeler que, au cours de son dernier mandat, le président du conseil régional d’Aquitaine, M. Alain Rousset, a consacré un million d’euros à la promotion de l’occitan, alors que, dans le même temps, l’État ne dépensait que 10 000 ou 20 000 euros.
Il me semble que le ministère de la culture et de la communication devrait accroître la mobilisation des médias, de la télévision. L’émission en occitan Punt de Vista que j’ai mentionnée est entièrement financée par le conseil régional. Sans cet effort, elle n’existerait pas.
Je lance un appel pour que se crée une véritable prise de conscience. Il est bien que les langues régionales soient reconnues dans la Constitution. Encore faut-il leur donner les moyens de vivre, qu’il s’agisse de l’occitan, du basque, du breton, du provençal. Ces langues font la richesse de notre pays et ne portent en rien atteinte à l’unité de la nation.
La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 759, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le ministre, voilà un peu plus d’un an, le 5 mars 2009, était promulguée la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Cette loi a profondément modifié le financement de l’audiovisuel public puisqu’elle prévoyait la suppression de la publicité à la télévision après vingt heures, la création d’une taxe de 0, 9 % sur les opérateurs de télécommunications électroniques, taxe qui est aujourd’hui contestée devant les instances européennes.
Cette loi a également créé une taxe sur les recettes publicitaires des chaînes de télévision et institué un relèvement de la redevance audiovisuelle, rebaptisée « contribution à l’audiovisuel public ». Cette augmentation, de deux euros, a été votée à la quasi-unanimité de notre assemblée.
Lors des débats au Parlement, nous avions déposé plusieurs amendements qui visaient à accroître le produit de la redevance sans en augmenter davantage le montant. Nous avions ainsi suggéré que, dès lors qu’un contribuable possède plusieurs résidences secondaires équipées d’un téléviseur, il acquitte une deuxième redevance, dans la limite d’une redevance et demie par foyer fiscal. Ce n’est en effet que depuis 2005 qu’une seule redevance par foyer est due. Selon la commission Copé, cette mesure aurait rapporté 116 millions d’euros.
Nous avions également suggéré que la redevance puisse s’appliquer à tous les terminaux pouvant recevoir la télévision, y compris les ordinateurs, sous réserve que leurs détenteurs ne soient pas déjà assujettis à la redevance au titre de la possession d’un téléviseur.
À la demande du Gouvernement, nous avions retiré ces amendements, car on nous avait indiqué – par la voix, me semble-t-il, de M. le Premier ministre – qu’un groupe de travail allait être créé dans les meilleurs délais pour réfléchir à la modernisation de la redevance.
Aujourd’hui, c’est-à-dire un an plus tard, force est de constater que ce groupe de travail n’a pas été créé. Monsieur le ministre, pourriez-vous m’indiquer les raisons pour lesquelles cet engagement n’a pas été tenu ? Le Gouvernement envisage-t-il de créer enfin ce groupe de travail et, dans l’affirmative, dans quels délais ? D’une manière plus générale, où en est le Gouvernement dans sa réflexion sur le financement de l’audiovisuel public ?
Monsieur Maurey, la volonté du Sénat de garantir un financement pérenne de l’audiovisuel public est évidemment tout à fait légitime. Vous savez certainement que je m’y associe pleinement. Comme vous, je prête la plus grande attention aux déterminants des recettes de l’audiovisuel public : assiette de la contribution à l’audiovisuel public, montant, champ des bénéficiaires notamment.
Le débat sur la contribution à l’audiovisuel public, qui s’appelait alors redevance audiovisuelle, ouvert en 2008, ne se pose plus aujourd’hui dans les mêmes termes puisque d’importants changements ont eu lieu, notamment sur l’initiative du Parlement.
Le montant de la contribution à l’audiovisuel public a donc été rehaussé, tout d’abord par la loi de finances rectificative pour 2008 du 30 décembre 2008, qui a prévu son indexation sur l’inflation à compter de 2009, ensuite – vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur – par la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, qui a porté ce montant à 120 euros en 2010, soit une augmentation de deux euros supplémentaire.
Rappelons également que, aux termes de cette dernière loi, le programme qui finance le passage à la télévision numérique ne fait plus partie des bénéficiaires de la contribution à l’audiovisuel public.
Le projet de loi de finances pour 2010 a été élaboré en cohérence avec l’ensemble de ces dispositions. Il a été adopté par le Parlement, les rapporteurs saluant d’ailleurs son niveau élevé d’ambition pour le financement des médias.
En ce qui concerne l’assiette de cette contribution et son éventuel élargissement aux nouveaux modes de réception de la télévision, le Gouvernement s’est donné le temps de la réflexion. Il a étudié la question, pour conclure, dans un rapport en cours de transmission au Parlement, qu’il n’y avait pas lieu de modifier les dispositions actuelles. Bien entendu, la vocation de ce document est de nourrir la réflexion, en lien avec les parlementaires.
Soucieux, comme le Parlement, d’une bonne application de la loi et de l’adaptation du système de financement de l’audiovisuel public, le Gouvernement a souhaité mettre en place un comité de suivi, dont les modalités de fonctionnement doivent être établies par décret. Actuellement en cours d’élaboration, ce texte sera publié à l’issue des échanges qui se déroulent actuellement, sur son initiative, avec la Commission européenne à propos du financement de France Télévisions.
Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir rappelé l’attachement de notre assemblée au financement pérenne de l’audiovisuel public. La réévaluation de la redevance, que nous avons votée en dépit de l’opposition d’un certain nombre de responsables politiques de premier plan, représente le fruit d’un combat mené depuis de nombreuses années au Sénat, notamment par notre collègue Catherine Morin-Desailly.
Je suis un peu surpris d’apprendre ce matin que le groupe de travail qui devait être créé ne le sera pas, qu’un rapport, dont on ne sait pas très bien par qui il a été rédigé ni quand il l’a été, va nous être adressé, et qu’un décret est en préparation. Je suis quelque peu étonné de constater que l’engagement de créer une commission pour réfléchir aux évolutions nécessaires de la contribution à l’audiovisuel public ne sera finalement pas tenu.
De même, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, de nombreux problèmes subsistent à propos du financement de l’audiovisuel. Vous avez évoqué la redevance de 0, 9 % sur les opérateurs de télécommunications : on ne sait pas très bien le sort qui sera réservé à cette taxation, contestée devant les instances européennes, et à laquelle j’étais personnellement défavorable.
La question de la suppression de la publicité à la télévision avant vingt heures se pose également, certains responsables remettant aujourd’hui en question l’opportunité de cette décision.
Mais, comme vous le savez certainement, monsieur le ministre, nous aurons l’occasion d’aborder de nouveau ces sujets lors du débat sur le financement de l’audiovisuel public qui sera organisé dans cette assemblée au mois de mai, sur l’initiative de notre groupe.
Mes chers collègues, en attendant l’arrivée de Mme Kosciusko-Morizet et de M. Le Maire, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
Je vous rappelle que ce décalage entre l’avancée de nos travaux et l’arrivée des ministres n’est nullement imputable à ces derniers, mais s’explique par le retrait, ce matin, d’une question figurant à l’ordre du jour.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à dix heures cinquante-cinq.
La parole est à M. Thierry Foucaud, auteur de la question n° 763, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique.
Je souhaiterais ce matin attirer votre attention, madame la secrétaire d’État, sur les difficultés et les nuisances subies par certaines communes de Haute-Normandie et leurs populations du fait du passage en mode numérique pour la réception des programmes de télévision.
Cette mesure relève de l’application de la loi dite de modernisation de la diffusion audiovisuelle. Or, dans ma région, pour certaines villes et leurs habitants, ce texte constitue en réalité une régression. En effet, celui-ci, lors de son adoption, garantissait une couverture de 95 % de la population métropolitaine. Or, sur les 3 500 émetteurs que compte notre pays, 1 874, soit plus de 50 %, ne sont pas numérisés. Il en résulte pour ma région et ses deux départements, la Seine-Maritime et l’Eure, une desserte inférieure aux 95 % exigés. Ainsi, ce ne sont pas moins de trente-neuf communes qui, en tout ou partie, ne peuvent pas recevoir la TNT et rentrent dorénavant dans la catégorie des zones d’ombre.
L’État, pour pallier cette absence de couverture, recommande aux municipalités concernées d’investir à hauteur de 100 000 euros dans des émetteurs complémentaires, dont les frais de fonctionnement s’élèveront annuellement à 50 000 euros. Lorsque l’on connaît les difficultés financières des collectivités territoriales, une telle dépense est inenvisageable.
On propose également aux personnes qui se trouvent dans une zone d’ombre d’avoir recours aux paraboles, au câble et à l’ADSL. Un fonds d’aide a été créé à cet effet pour les téléspectateurs exonérés de la redevance audiovisuelle. Mais quid de celles et de ceux qui, tout en étant imposables, ne sont pas pour autant des nantis, lorsque l’on sait que ces modes de réception supposent la souscription d’un abonnement à Internet ou la location d’un décodeur ?
Enfin, pour ce qui est de l’environnement, peut-on raisonnablement envisager qu’une ville comme Étretat, dont les falaises ou les maisons à colombages ont inspiré tant d’artistes, soit en zone d’ombre et que ses toits soient soudainement hérissés de paraboles à l’esthétique pour le moins discutable ?
Pouvez-vous donc, madame la secrétaire d’État, faire procéder à une révision de la loi d’ici au 1er janvier 2011, en faisant notamment supporter la charge du remplacement de tous les émetteurs existants par les opérateurs de télévision, ce qui permettrait aussi de maintenir l’égalité entre les citoyens par une couverture à 100 % des territoires ?
Monsieur Foucaud, certaines des données que vous avez retenues dans votre intervention sont erronées.
En effet, le passage au tout numérique se fera avant le mois de novembre 2011, région par région. Le basculement a déjà eu lieu en Alsace et en Basse-Normandie, et il interviendra dans les mois qui viennent dans les Pays de la Loire, en Bretagne et en Lorraine.
Le Gouvernement s’est engagé à ce que tous les Français aient accès au numérique, dans des conditions d’équité, y compris territoriale.
Initialement, la loi prévoyait un critère national de 95 % de couverture de la population. Un critère départemental a ensuite été défini par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, afin que ces 95 % intègrent au moins 91 % de la population de chacun des départements.
Mais, comme vous le soulignez, monsieur le sénateur, au-delà de la couverture, se pose également la question de l’accompagnement de ceux qui doivent s’équiper pour le numérique, tout comme de ceux qui ne recevraient pas le numérique par voie hertzienne et qui voudraient par exemple s’équiper de paraboles.
Afin de mener à bien ce projet, l’État investit 333 millions d’euros sur différents programmes.
L’information de nos concitoyens, particulièrement des publics sensibles, est évidemment très importante. Elle se fera notamment à travers un partenariat avec La Poste dans certains départements. Une assistance technique et humaine sera apportée aux personnes âgées et aux personnes handicapées, les plus éloignées du numérique.
Cette information reste toutefois insuffisante, ainsi que l’ont souligné les débats parlementaires. Ainsi, sur ma proposition, le Premier ministre a décidé de compléter le fonds d’aide mis en place pour toutes les personnes exonérées de redevance par un fonds d’aide « parabole », accessible à tous les foyers sans condition de ressources.
Pour répondre concrètement à votre intervention, non, nous ne recommandons pas aux communes d’investir dans des émetteurs numérisés, car ce n’est pas rentable. En revanche, oui, le fonds « parabole » s’adresse à tous les Français sans condition de ressources. Par conséquent, si un Français qui recevait la télévision par son antenne râteau ne reçoit pas le numérique parce que l’émetteur n’est pas numérisé, sa parabole sera financée par le fonds d’aide, quelle que soit sa situation financière.
Non, les paraboles ne sont pas obligatoirement une catastrophe pour l’environnement. En fait, on utilise toujours le terme « parabole », mais la plupart des équipements contemporains n’ont pas cette forme. Il existe des cônes verts que l’on peut placer au fond du jardin et qui ne se remarquent pas, des plaques de format A4 ou A5 qui ont quasiment la couleur des tuiles ou des ardoises. Ces dispositifs peuvent être extrêmement discrets.
Enfin, si une collectivité souhaite néanmoins numériser son émetteur en dépit du fait que nous ne le recommandons pas parce que ce n’est pas rentable, elle peut demander à l’État un accompagnement financier. Ce dernier sera calculé en fonction du nombre de foyers qui auraient bénéficié d’une aide à l’équipement en parabole et qui n’en auront plus besoin puisque la commune choisit de numériser son émetteur. Mais, j’y insiste, ce n’est pas une solution que nous recommandons.
Nous veillons bien sûr à ce que ces cas soient les moins nombreux possible. C’est la raison pour laquelle nous avons notamment demandé au CSA, modifiant la loi pour ce faire, de pousser au maximum la puissance des émetteurs afin qu’une couverture de 91 % et plus soit réalisée dans tous les départements.
Je serais tenté de dire qu’il n’y a rien de nouveau. Mme la secrétaire d’État persiste sur la question du dédommagement et elle ne veut pas reconnaître le problème environnemental posé par les paraboles. Certes, d’autres process existent, mais ils sont très onéreux.
S’agissant du dédommagement, madame la secrétaire d’État, je prendrai l’exemple de la ville de Grand-Couronne, située dans la banlieue de Rouen : 800 des 3 000 foyers que compte la commune ne seront pas couverts par la TNT. Ainsi, 200 000 euros seront dépensés sous forme d’aides alors que la numérisation du relais concerné ne coûterait que 100 000 euros. C’est du gaspillage et c’est un défi au bon sens, car la somme allouée aux foyers concernés ne suffira pas à couvrir la totalité des frais engendrés par le raccordement individuel à la diffusion numérique.
Madame la secrétaire d’État, je vous demande de réexaminer la question. Il n’est pas nécessaire, me semble-t-il, de recourir à ces fonds d’aide qui engagent des sommes considérables : si le remplacement de chaque émetteur était prévu, l’ensemble du réseau pourrait être couvert. Par ailleurs, j’ai noté dans votre réponse le passage du taux de couverture de 95 % à 91 %, et cela m’inquiète un peu plus.
La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 784, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur un mécontentement sourd, latent, mais persistant, qui atteint une très grande partie des producteurs de lait de notre pays, mais aussi l’ensemble des producteurs agricoles, qui connaissent de nombreuses difficultés.
Pour le lait, un accord pour le premier trimestre 2010, signé entre une organisation de producteurs et des transformateurs, a fixé en moyenne à 285 euros la tonne le prix du lait pour la présente année.
Cela correspond à peu de chose près au prix pratiqué au cours du second semestre 2009 mais ne règle absolument pas les difficultés rencontrées par les 90 000 producteurs de lait : il s’agit, en effet, d’un prix moyen et il n’est pas rare que le véritable prix payé à certains producteurs soit plus proche de 245 euros la tonne.
Cet accord sur le prix du lait ne satisfait donc que fort peu de monde.
Il ne satisfait pas les producteurs de lait, et ces derniers l’ont encore fait savoir récemment, monsieur le ministre, lors de l’inauguration du Salon de l’agriculture et peut-être aussi le week-end dernier. En effet, un prix du lait compris entre 24 et 28 centimes le litre ne permet nullement de compenser les coûts d’exploitation : rappelons que les producteurs ont subi une baisse de 54 % de leurs revenus en 2009.
Cet accord ne satisfait pas davantage les transformateurs, les industriels et les coopératives, car ces derniers prétendent qu’ils ne peuvent pas payer plus cher le litre de lait sans compromettre la compétitivité de leurs entreprises.
Quant aux consommateurs, ils constatent tous les jours qu’ils doivent payer le litre de lait en moyenne de 0, 90 à 1, 15 euro, soit quatre fois le prix versé au producteur. Ils constatent également que le prix des produits transformés – le beurre, les yaourts, les fromages – n’a pas baissé malgré la chute spectaculaire des prix à la production.
Ils mettent en cause, sans doute à juste titre, la grande distribution, qui ne répercute pas la baisse des prix ou le fait très insuffisamment, ce que confirme un rapport publié par M. Éric Besson.
Et les grandes surfaces accusent les transformateurs d’avoir profité de la baisse du prix du lait à la production pour reconstituer leurs marges !
On ne sait pas qui dit vrai, mais ce qui me paraît certain, c’est que les producteurs et les consommateurs, aux deux bouts de la chaîne laitière, sont tous les deux perdants.
Monsieur le ministre, ma question est très simple : quelles mesures comptez-vous prendre prochainement à l’échelon national et à l’échelon communautaire, notamment en direction des industriels et de la grande distribution, afin que le lait soit payé aux producteurs à son juste prix, un prix compensant effectivement les coûts de revient de ces derniers et leur permettant de vivre décemment, ce qui ne saurait être le cas avec le prix payé actuellement ?
Monsieur le sénateur, vous avez raison, le prix du lait a connu une baisse très importante en 2009, comparativement à 2008, de l’ordre de 20 %. Le prix de base du lait en 2009 a été de 262 euros à 280 euros la tonne.
Face à cet effondrement des cours du lait, je me suis efforcé d’intervenir le plus rapidement possible pour faire remonter les prix et permettre aux producteurs de couvrir les coûts de revient, et cela demeure ma préoccupation à long terme.
À la suite d’une bataille diplomatique intense et sur l’insistance de la France, la Commission européenne a débloqué en octobre 300 millions d’euros pour faire remonter le cours du lait.
Je précise que s’il est remonté au premier trimestre 2010, c’est uniquement parce que la France a exigé le déblocage des instruments d’intervention européens. Le prix du lait s’est situé au premier trimestre 2010 entre 285 euros et 290 euros les mille litres et il devrait au deuxième trimestre connaître une hausse de 5 % à 11 % par rapport au deuxième trimestre 2009.
Nous ne sommes donc pas restés les bras croisés, nous sommes intervenus avec force pour faire remonter les prix du lait.
Mon principal objectif est très simple : garantir aux producteurs un revenu stable et décent à long terme et ne pas les laisser seuls face à la volatilité des cours des marchés agricoles, qui est une réalité aujourd’hui.
Nous devons pour ce faire continuer à avancer dans deux directions. La première, c’est le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, que le Sénat examinera à partir du 17 mai prochain. Nous proposons de mettre en place des contrats entre les producteurs et les industriels, déterminant un volume et un prix sur une durée de quatre à cinq ans, permettant à chaque producteur de lait de calculer le montant de ses revenus sur plusieurs années, alors qu’il réalise aujourd’hui des investissements de l’ordre de 300 000 à 400 000 euros sans connaître le montant de ses revenus dans les prochains mois.
La seconde direction dans laquelle nous voulons avancer et qui répond à votre préoccupation, c’est plus de transparence sur les prix et sur les marges. Nous souhaitons donner plus de pouvoirs à l’Observatoire des prix et des marges pour tirer les conclusions des observations qu’il formulera. En effet, il n’est pas question que les deux perdants de la chaîne alimentaire soient systématiquement le producteur au début et le consommateur à la fin.
Enfin, l’autre volet tout à fait essentiel, c’est la régulation européenne car, à l’évidence, si nous devons de nouveau faire face à un effondrement des cours du lait, même s’il y a des contrats, même s’il y a l’observatoire, il faut que l’Union européenne puisse de nouveau intervenir massivement et plus rapidement sur les marchés pour donner un filet de sécurité à tous les producteurs de lait en France comme dans les autres pays européens.
Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je sais les efforts que vous consentez de longue date pour faire avancer ce dossier important. Néanmoins, il n’avance peut-être pas aussi vite que le souhaiteraient les agriculteurs et cela a des répercussions sur l’ensemble du monde rural, car lorsque les agriculteurs n’investissent plus, d’autres difficultés apparaissent et c’est toute la chaîne rurale qui est touchée.
Nous serons évidemment à vos côtés lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture pour faire en sorte que les contrats entre les producteurs et les industriels ouvrent des perspectives nouvelles.
Quoi qu’il en soit, je souhaite vivement que vous puissiez appuyer cette démarche de manière que nous puissions revoir un peu de ciel bleu.
La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 786, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Monsieur le président, madame le secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question porte sur l’application de la loi du 10 août 2009 concernant le travail dominical et plus précisément les compensations pour les salariés.
En effet, selon cette loi, les règles du travail dominical diffèrent en fonction du type de commerce et du lieu d’implantation.
Elle permet la création de périmètres d’usage de consommation exceptionnel, les PUCE, pour les commerces de détail, pour lesquels l’ouverture du dimanche rend obligatoires les compensations financières envers les salariés.
En revanche, dans les communes dites « d’intérêt touristique […] d’affluence exceptionnelle », la loi permet l’ouverture dominicale aux établissements de vente au détail. Toutefois, les employeurs ne sont pas obligés d’accorder des compensations à leur personnel.
De plus, les commerces alimentaires de grande et moyenne surface peuvent ouvrir jusqu’à treize heures sans aucune compensation horaire ou financière, et ce sur l’ensemble du territoire.
J’ajoute que concernant les commerces de détail non alimentaires ouverts cinq dimanches par an et situés dans des zones non prévues par la loi, les salariés bénéficient d’une majoration de salaire égale à un trentième de la rémunération habituelle.
En conséquence, bien sûr, de nombreuses disparités surviennent, pour lesquelles les personnels ne bénéficient pas toujours de contreparties.
La grande distribution a pris des engagements, qu’en est-il ?
Il me semble nécessaire de préciser que l’application de la loi s’est peu répandue depuis son vote. C’est donc une loi très discutée, très médiatisée, qui montre ses limites puisqu’elle n’a pas eu la portée escomptée par le Gouvernement.
Sur tous ces points, madame la secrétaire d’État, pouvez-vous m’apporter des garanties sur la tenue des engagements des grandes et moyennes surfaces en matière d’heures supplémentaires, de repos compensatoires et de compensations financières envers leurs salariés ? Pouvez-vous me donner également – c’est très important – une estimation du nombre d’emplois créés depuis l’entrée en vigueur de cette loi ?
Monsieur le sénateur, les commerces de détail alimentaire, au nombre desquels peuvent figurer certaines grandes surfaces à dominante alimentaire, n’ont pas vu leur régime dérogatoire modifié par la loi, hormis la possibilité de prolonger l’ouverture dominicale jusqu’à treize heures au lieu de midi.
Ces établissements, qui bénéficient d’une dérogation de plein droit le dimanche jusqu’à treize heures, appliquent les dispositions de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001. Cette convention prévoit, aux articles 5.14 et suivants, des compensations pour les salariés travaillant occasionnellement ou régulièrement le dimanche.
Pour le travail occasionnel du dimanche, chaque heure de travail effectuée donne lieu à une majoration égale à 100 % du salaire horaire venant s’ajouter à la rémunération mensuelle. Pour le travail habituel du dimanche, la majoration est de 20 % de l’horaire de base pour chaque heure de travail effectuée.
Dans les cas où ces établissements peuvent ouvrir toute la journée du dimanche sur la base d’un arrêté municipal, dans le cadre des cinq dimanches du maire, les compensations légales obligatoires – majoration de salaire et repos compensateur – se cumulent avec les dispositions conventionnelles.
S’agissant des effets sur l’emploi, la loi est une loi d’équilibre, ne visant en rien à revenir sur le principe fondamental du repos dominical, mais tendant simplement à trouver un cadre juridique sécurisé pour les entreprises comme pour les salariés.
Six mois après son adoption, la loi a permis de lever l’insécurité juridique là où elle existait et, par la suite, de préserver et de développer des emplois tant dans ce qui constitue désormais les PUCE, les périmètres d'usage de consommation exceptionnelle, que dans les communes et zones touristiques qui concourent à l’attractivité de la France.
Je vous rappelle qu’un comité, constitué de trois parlementaires appartenant à la majorité et de trois parlementaires appartenant à l’opposition, présentera un rapport sur l’application de la loi un an après sa publication. Une évaluation globale des effets économiques de la loi pourra être présentée dans ce cadre.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de ces précisions. Je souhaite, naturellement, que le Gouvernement soit attentif au versement des compensations de quelque ordre qu’elles soient, et je trouve un peu dommage, même si l’on doit attendre quelques mois encore, de ne pas avoir une idée du nombre d’emplois qui ont pu être créés – si vraiment il en a été créé.
J’attendrai donc le rapport qui doit être présenté !
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, auteur de la question n° 769, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur la protection de l’enfance.
La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance prévoyait l’adoption de décrets pour son application, notamment au regard des divisions I et III de l’article 27. En effet, devaient être fixées les modalités de compensation des charges résultant pour les départements de la mise en œuvre de la loi par le Fonds national de financement de la protection de l’enfance, ainsi que les modalités d’administration de ce fonds par un comité de gestion.
Or, plus de trois ans après la promulgation de cette loi, les décrets ne sont toujours pas publiés, mettant par là même en difficulté majeure les départements compétents en matière d’aide sociale à l’enfance.
Comment expliquer pareil retard, alors que le Premier ministre lui-même, dans une circulaire du 29 février 2008, relevait que « faire en sorte que la loi s’applique rapidement, efficacement et de façon conforme à son esprit est un impératif démocratique » ?
Quelles sont dès lors les intentions du Gouvernement pour réparer dans les meilleurs délais cette carence qui fragilise les budgets des départements chargés d’assumer, de garantir et de pérenniser leurs missions en matière de protection de l’enfance dans le respect de la convention internationale relative aux droits de l’enfant ratifiée en 1990 par la France ?
Il va de soi que ces mêmes départements ne peuvent se satisfaire d’une réponse comme celle qui fut faite à une collègue sénatrice, le 23 juin 2009, où il lui fut expliqué que ce fonds, expressément prévu par la loi, viendrait complexifier et brouiller les financements existants.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, des informations que vous voudrez bien m’apporter sur l’état d’avancement de ces décrets et de l’engagement que vous prendrez d’apporter une solution dans les meilleurs délais possibles.
Madame la sénatrice, je voudrais vous rappeler l’état d’esprit qui a caractérisé le vote de la loi du 5 mars 2007. En effet, elle avait fait l’objet d’un consensus sur tous les bancs de votre Haute Assemblée.
Le Gouvernement a bien compris que vous faisiez preuve, sur toutes les travées de cet hémicycle, d’une très grande vigilance sur l’application de ce texte. Je voudrais vous rassurer sur ce point, car nous sommes animés des mêmes intentions quand il s’agit de l’enfance en danger.
Quel est l’état d’application de la loi ?
Sur la formation des cadres territoriaux chargés de la protection de l’enfance, j’indiquerai qu’un décret d’application a été pris le 30 juillet 2008. Nadine Morano a ensuite signé le décret du 19 décembre 2008, qui définit la nature et les modalités de transmission des informations préoccupantes recueillies par les cellules départementales aux observatoires départementaux de la protection de l’enfance et à l’Observatoire national de l’enfance en danger.
Où en est-on aujourd’hui ? Concrètement, 91 cellules de recueil de l’information préoccupante ont été installées à l’échelon départemental ; 74 protocoles départementaux sont finalisés – 58 ont été signés, 33 observatoires départementaux de protection de l’enfance ont été mis en place et 58 sont en cours d’élaboration.
Nous avons donc aujourd’hui une meilleure appréhension de l’enfance maltraitée et de meilleurs circuits de décision. Il nous faut rester vigilants et améliorer encore ce dispositif, mais nous pouvons aujourd’hui mieux cibler nos actions en faveur de la protection de l’enfance.
Le décret qui organise la nouvelle procédure de « mesure judiciaire d’aide à la gestion du budget familial » est paru le 30 décembre 2008. Ce texte était très attendu par les juges des enfants et les services sociaux.
Le 23 juin 2009, c’est le décret relatif à la formation des professionnels qui travaillent dans le domaine de la protection de l’enfance qui a été publié.
Il reste aujourd’hui deux décrets à signer.
Il s’agit du décret relatif à la médecine scolaire, qui prévoit les modalités d’organisation des quatre visites médicales gratuites prévues par la loi pour les enfants au cours de leurs sixième, neuvième, douzième et quinzième années. Les modalités de ces visites médicales font l’objet d’une enquête de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, actuellement en cours.
Il s’agit aussi, et c’est l’objet de votre question, du Fonds national de financement de la protection de l’enfance. Le décret instituant ce fonds s’est heurté à des difficultés juridiques qui expliquent le retard pris dans sa rédaction.
Le projet de décret est en cours de finalisation technique. Il va très prochainement entrer dans une phase de consultation, notamment auprès du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales, du Comité des finances locales, de la Commission consultative d’évaluation des normes, avant d’être signé par les ministres intéressés.
En tout état de cause, le décret sera publié dans un délai de quatre mois, conformément à la décision du Conseil d’État du 30 décembre 2009, notifiée le 18 janvier 2010.
Ce fonds national apportera aux départements un financement complémentaire dans le domaine de la protection de l’enfance, compétence des conseils généraux depuis les lois de décentralisation. Il sera abondé par l’État et la Caisse nationale des allocations familiales dans les conditions prévues par les lois de finances et de financement de la sécurité sociale de l’année.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir fait un point global sur l’ensemble des décrets qui ont été pris en matière de formation, de transmission aux observatoires départementaux, de cellules de recueillement des observations, de mesures de gestion familiale, de médecine scolaire, qui va se mettre en place.
Ma question portait véritablement sur le fonds national. J’ai bien entendu votre réponse : des arguties juridiques l’ont retardé. Je retiens néanmoins que, après avis du Conseil d’État du 30 décembre 2009, le Gouvernement a quatre mois pour présenter son décret. Nous y sommes presque. Je crois que, dans les départements, nous serons tous vigilants et attendrons la sortie de ce décret, qui met véritablement en cause, je tiens à le souligner, le budget de nos collectivités.
La parole est à Mme Michelle Demessine, auteur de la question n° 863, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées devait poser les bases d’une société moins discriminante. Elle fut au moment de son vote porteuse d’espérances pour des millions de personnes handicapées.
Mais depuis lors, son application lente et souvent a minima, les nombreuses modifications apportées au texte initial, la volonté, au fil du temps, de la vider de sa substance, sont si manifestes que tout porte à croire qu’elle ne fut qu’une loi d’affichage.
Il en est ainsi de l’accès au logement et aux bâtiments publics : le Gouvernement est revenu sur les dispositions initiales, et les dérogations ont aujourd’hui tendance à devenir la règle et non des exceptions, comme avec l’extension des quatre dérogations prévues pour l’ancien aux constructions neuves qu’heureusement le Conseil constitutionnel a déclarée contraire à la Constitution.
Il en est ainsi s’agissant de l’emploi des personnes handicapées : leur taux de chômage, on le sait, est deux fois supérieur au reste de la population. Dans les PME, on ne dénombre que 3 % de personnes handicapées. La loi de 2005 a prévu que les entreprises n’employant pas de personnes handicapées s’acquittent auprès de l’AGEFIPH, l’Association pour la gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des handicapés, de 1 500 fois le SMIC horaire. Pourtant, fin décembre, vous avez reporté de six mois cette sanction financière à l’égard des PME de moins de 50 salariés en arguant du « contexte économique exceptionnel ». Pensez-vous juste que ce soit toujours aux personnes handicapées de faire les sacrifices ?
Et puis, vous le savez bien, pour relever le défi de rendre effectif le droit au travail pour les personnes handicapées, il n’y aura jamais de moment propice si l’État n’affirme pas haut et fort sa volonté. Une fois encore, avec ce report, celle-ci fait défaut.
L’une des grandes avancées de la loi a été de consacrer le droit de chaque enfant à être scolarisé dans l’école de son secteur et d’affirmer le devoir de l’État de mettre en place les moyens financiers nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire.
À l’heure du bilan, force est de constater que l’obligation de scolarisation est loin de concerner l’ensemble des enfants en situation de handicap. Certes, ils sont de plus en plus nombreux à bénéficier de la scolarisation, mais il reste à déplorer que l’éducation nationale, en se désengageant comme elle l’a fait sur le dossier des auxiliaires de vie scolaire, n’a pas mis en place les moyens propres à développer l’accès de tous à l’école.
À l’heure actuelle, ces moyens sont défaillants et entraînent au quotidien des difficultés pour les enfants et adolescents qui se retrouvent victimes de discriminations : discriminations dans l’accès à l’école et également discriminations dans la réalisation, voire la poursuite de leur parcours scolaire. Sans l’égalité des chances ouverte à tous au niveau de l’école et des parcours scolaires, les personnes en situation de handicap se retrouvent dans une spirale de discriminations organisées tout au long de leur vie.
S’agissant de l’innovation principale de la loi, le droit à compensation, la loi a prévu, pour assurer le respect du projet de vie de la personne handicapée, l’élaboration obligatoire d’un plan personnalisé de compensation. Or, une proposition de loi vient de rendre ce droit optionnel et non obligatoire, ce qui reviendra, on le sait, à limiter son champ d’application.
Enfin, malgré la promesse présidentielle d’augmenter de 25 % l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, force aussi est de constater que celle-ci reste inférieure au niveau du seuil de pauvreté. On reste encore très loin de la création d’un revenu d’existence au moins égal au SMIC que revendiquaient avec force, à l’occasion de la loi en 2005, toutes les organisations représentatives du monde des personnes handicapées.
D’autant qu’aujourd’hui, il faut le dire, un certain nombre de mesures de restriction d’accès à la santé décidées par le Gouvernement, avec notamment les franchises médicales, la participation forfaitaire, l’augmentation du forfait hospitalier, la fiscalisation des indemnités journalières des accidents du travail et le déremboursement de médicaments, sont venues encore amputer les maigres ressources des bénéficiaires de l’AAH. Il suffirait pourtant simplement d’augmenter le seuil d’accès à la couverture médicale universelle complémentaire pour que ceux-ci recouvrent un peu plus de dignité devant le droit à la santé, dont ils ont besoin plus que nul autre.
Madame la secrétaire d’État, vous le savez, la colère gronde au sein des personnes handicapées, qui, pour un très grand nombre, se sentent trahies par la non-application d’une loi pourtant prometteuse pour leur droit à la citoyenneté et à une vie digne.
Elle s’exprimera fortement le samedi 27 mars prochain par des manifestations dans toute la France. Qu’allez-vous leur répondre ? Quelles sont les dispositions qu’entend prendre le Gouvernement pour tenir ses engagements, cinq ans après la loi ?
Madame la sénatrice, la loi du 11 février 2005 a affiché de grandes ambitions pour l’égalité des droits et des chances en faveur des personnes handicapées. Le Gouvernement et le Parlement ont, depuis cinq ans, contribué au processus d’amélioration continu de ce texte porteur de tant d’espoir pour les personnes handicapées et leurs familles.
La loi de 2005 concerne les aspects de la vie quotidienne. Au lendemain du cinquième anniversaire de la loi, 150 textes d’application ont été publiés.
Permettez-moi de répondre point par point à vos interrogations.
S’agissant de l’accessibilité des lieux publics et des transports, nous devons redoubler nos efforts pour être au rendez-vous de 2015. Pour cela, trois principes d’action ont été privilégiés : donner un nouvel élan à la politique d’accessibilité, accompagner les entreprises dans la mise en accessibilité et améliorer l’accès aux nouvelles technologies. Grâce à ces actions, le droit opposable à l’accessibilité sera garanti pour 2015.
En ce qui concerne l’emploi, le renforcement des contributions financières en cas de non-respect de l’obligation d’emploi par les entreprises de plus de vingt salariés ou par la fonction publique commence à porter ses fruits.
Actuellement, 750 000 personnes sont dans l’emploi, dont 80 % en milieu ordinaire, ce qui représente une augmentation de 4 % dans le secteur privé depuis 2005. Ainsi, 40 % des entreprises atteignent ou dépassent le taux de 6 %. Dans le secteur public, le taux d’emploi est passé de 3, 7 % en 2005 à 4, 4 % en 2009. Ces chiffres parlent d’eux-mêmes !
La mesure de souplesse accordée aux PME que vous mentionnez est favorable à l’emploi des personnes handicapées, et non l’inverse. La période de six mois est un délai de trésorerie rendu obligatoire par la crise économique sans précédent que traverse notre pays. Je vous rappelle que, pour l’année 2009, les procédures de redressement et de liquidation ont augmenté de 11, 4 % par rapport à 2008. Ce taux a augmenté de 61, 4 % pour les PME. Dans ce contexte, nous devons éviter de fragiliser notre tissu économique.
Passé ce délai de six mois, soit les entreprises auront conduit des actions prévues par la loi du 11 février 2005 et elles s’acquitteront de leur contribution sur la base de 400 fois le SMIC par unité manquante, soit elles n’auront rien accompli et, dans ce cas, elles paieront leur contribution sur la base de 1500 fois le SMIC.
Un autre sujet de préoccupation dont vous faites état est la scolarisation des enfants, des adolescents et des adultes handicapés. Notre mobilisation dans ce domaine permet aujourd’hui à 180 000 élèves d’être accueillis dans les établissements scolaires ordinaires du premier et du second degré, soit 10 000 de plus à chaque rentrée scolaire.
Ce chiffre traduit un accroissement constant et significatif – de 20 % par rapport à 2005 – du nombre d’enfants et de jeunes handicapés accueillis dans les établissements scolaires ordinaires. Le taux global de scolarisation dans le milieu ordinaire est ainsi passé de 66, 5 % en 2005-2006 à 71, 9 % en 2008-2009.
Ces progrès n’auraient pas été possibles sans un effort massif de l’État. À chaque rentrée scolaire depuis 2007, ce sont près de 250 classes nouvelles de CLIS, classes d’intégration scolaire, ou d’UPI, unités pédagogiques d’intégration, qui sont créées.
Près de 20 000 auxiliaires de vie scolaire en équivalent temps plein, ou ETP, soit 5 000 nouveaux auxiliaires de vie scolaire, ou AVS, à chaque rentrée scolaire depuis 2007, plus de 12 700 postes d’enseignants spécialisés et plus de 1 300 enseignants référents assurent les fonctions spécifiques d’encadrement et d’accompagnement de ces élèves.
Enfin, l’État accompagne les personnes handicapées dans leur vie de tous les jours en contribuant à leur maintenir un revenu décent.
L’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, sera revalorisée de 25 % entre 2008 et 2012. Cela représentera, au total, un effort de 1, 4 milliard d’euros : l’AAH atteindra ainsi en 2012 un montant mensuel de 776 euros. Cette allocation permet aujourd’hui à 850 000 personnes de vivre dignement, ce qui représente une dépense totale de 5, 8 milliards d’euros par an.
Beaucoup de choses ont été faites mais il y a encore beaucoup à faire.
Le Comité interministériel du handicap, ou CIH, que le Premier ministre a installé le 9 février dernier, ainsi que l’Observatoire de l’accessibilité et de la conception universelle que Nadine Morano a installé le 11 février vont nous y aider. Nous parviendrons à tenir nos engagements et à être prêts pour 2015 si nous mettons en place un pilotage rigoureux, fondé sur des indicateurs précis.
Vous le voyez, madame la sénatrice, le Gouvernement est au rendez-vous des engagements pris en 2005, et il le restera pour atteindre les objectifs en 2015.
La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 793, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Ma question rejoint celle de Mme Demessine, en élargissant le champ d’intervention. Il s’agit de la remise en cause du financement par l’État de l’aide à domicile pour les personnes âgées, dépendantes et handicapées.
Les associations qui gèrent les soins et services à domicile et les syndicats tirent la sonnette d’alarme face aux difficultés financières qui menacent tant les salariés que les personnes aidées.
Je rappelle que le Président de la République a fait de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées l’un des grands thèmes sociaux de 2010. Dans le même temps, le désengagement de l’État se traduit par la baisse du financement de l’allocation personnalisée d’autonomie, ou APA, qui de 50 % à sa création en 2001 a été ramenée à 30 % en 2009, mais aussi par une restriction de 10 % à 15 % des prestations de compensation du handicap, ou PCH, d’aide à domicile ou d’aide ménagère.
Prises en étau entre les exigences de formation des personnels et ces réductions de trésorerie, les structures d’aide sont mises en péril et se voient dans l’obligation de licencier et par conséquent de restreindre les temps d’intervention. Des milliers d’emplois se trouvent ainsi menacés et des problèmes de dégradation de la qualité du service en découlent, entraînant des risques de maltraitance.
Madame la secrétaire d’État, quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il prendre pour traiter ce sujet capital qui condamne la professionnalisation d’un secteur et porte atteinte à un public déjà fragilisé ?
Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur les services d’aide à domicile qui constituent un dispositif essentiel des politiques de prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées, de maintien et d’accompagnement à domicile de ces mêmes personnes âgées devenues dépendantes et des personnes handicapées.
Comme vous l’indiquez, le secteur de l’aide à domicile se caractérise par la diversité et la pluralité : diversité des publics aidés, diversité des modes d’intervention, complexité des cadres juridiques résultant du droit d’option entre l’agrément par le préfet et l’autorisation par le président du conseil général, pluralité des financeurs publics – conseils généraux, caisses de retraite, caisses des allocations familiales – et des modalités de financement, le plus souvent indirectes, sous la forme d’une aide à la personne, et insuffisamment articulées entre elles.
Je n’insisterai pas sur l’hétérogénéité des pratiques des départements ni sur le niveau très variable des tarifs qu’ils arrêtent pour les services qu’ils ont autorisés.
Cette situation complexe nous oblige collectivement à rechercher les meilleures solutions pour faire évoluer les règles de tarification des services d’aide à domicile. C’est pourquoi, à l’occasion de l’installation du nouveau conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, ou CNSA, interrogée sur ces questions, j’ai demandé à la direction générale de la cohésion sociale, la DGCS, de réunir l’ensemble des acteurs concernés par ce dossier, les financeurs comme les gestionnaires, les représentants des usagers comme ceux des salariés. C’est chose faite : la DGCS a organisé cette table ronde le 22 décembre dernier et trois axes de travail ont été retenus.
D’abord, une mission portant sur les questions de tarification et de financement des services d’aide à domicile sera confiée aux inspections générales des affaires sociales, des finances et de l’administration pour analyser les déterminants du coût des prestations, pour examiner les évolutions du dispositif actuel de tarification et son articulation cohérente et efficiente avec les dispositifs de solvabilisation des caisses de sécurité sociale ou relevant des départements – les APA et les PCH – et pour étudier le renforcement des modalités du contrôle d’effectivité de la dépense publique d’aide à domicile.
Ensuite, un groupe de travail piloté par la DGCS devra établir un état des lieux de l’offre de services et de ses différentes composantes, du profil et des besoins des personnes aidées, des pratiques des départements en termes d’autorisation et de tarification. L’objectif est de constituer un observatoire du secteur de l’aide à domicile, qui souffre d’un manque de données objectives, exhaustives, partagées et disponibles pour tous. Ce groupe travaillera également sur l’efficience des structures et les objectifs à retenir en termes de modernisation, d’adaptation et de mutualisation des services.
Enfin, j’ai demandé à la CNSA de conduire et d’animer un travail avec l’ensemble des acteurs pour définir des références partagées, faisant consensus, sur l’évaluation des besoins, l’élaboration des plans d’aide et les modalités de leur mise en œuvre.
Monsieur le sénateur, les conclusions opérationnelles de ces travaux de remise à plat du système sont attendues à l’automne, pour en tirer des solutions durables en termes de qualité, d’accessibilité et de soutenabilité financière des services d’aide à domicile.
Je remercie Mme la secrétaire d’État de sa réponse, encore que cette dernière ne me satisfasse pas tout à fait dans la mesure où, si j’ai bien compris, les décisions sont remises à l’automne.
Les effets des amputations dont j’ai fait état sont connus : la limitation des plans d’aide, la diminution des motifs et des durées d’intervention et, en conséquence, la remise en cause de l’accessibilité pour tous aux prestations, de la qualité des services et un risque de maltraitance.
Pour les structures et les salariés, ces amputations se traduisent par une remise en cause des efforts de qualification, une détérioration des conditions de travail, et j’en passe…
La DGCS va étudier et modifier la situation, dites-vous, mais l’on ne va pas pour autant revenir à un financement plus équilibré et plus proportionné à ce service rendu indispensable. Vous l’avez d’ailleurs souligné, il s’agit de l’un des services rendus les plus indispensables, compte tenu du vieillissement de la population et des besoins en aide à domicile qui en résultent. Négliger ce secteur serait donc critiquable.
Madame la secrétaire d’État, vous semblez avoir pris en compte la question. Je souhaite que vous y répondiez de façon positive. Des délais trop longs nous obligeraient à licencier, à réduire les soins, ainsi que la qualité de l’intervention et de la formation de nos prestataires de services.
Je me permets d’insister sur l’extrême importance de cette question. En France, 60 000 personnes sont aidées et 10 000 salariés travaillent dans ce secteur : ce n’est pas rien, cela mérite que l’on s’y attarde !
La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 778, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite aujourd’hui revenir vers vous pour évoquer la question des emballages réutilisables pour les eaux, les boissons rafraîchissantes sans alcool et les bières dans le circuit des cafés, hôtels et restaurants, et la nécessité de les promouvoir.
Lors de la discussion au Parlement du projet de loi de programme relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, dit « Grenelle I », un amendement visant à imposer aux cafés, hôtels et restaurants de recourir à des emballages réutilisables pour les bières, les boissons rafraîchissantes sans alcool et les eaux avait été adopté ; toutefois, malheureusement, cette disposition a été supprimée dans le cadre de la commission mixte paritaire, au motif, je le rappelle, qu’un groupe de travail se constituait sur cette question.
De même, lors de l’examen au Sénat, en octobre dernier, du projet de loi Grenelle II, j’ai déposé et défendu un amendement similaire, auquel vous vous êtes opposée, madame la secrétaire d'État, en arguant que, aux termes des conclusions du groupe de travail précité, le bilan d’un tel système n’était positif que pour les circuits courts, c’est-à-dire lorsque, par exemple, le consommateur rapporte une bouteille vide au producteur directement sur le marché.
Outre qu’il est quelque peu étonnant que le Gouvernement ait paru détenir les conclusions d’une étude toujours en cours à ma connaissance, puisqu’elle doit s’achever prochainement, cette réponse me fait craindre une possible confusion, selon que la consignation des emballages réutilisables se trouve réalisée dans la grande distribution ou dans le cadre de la distribution dans les cafés, les hôtels et les restaurants, où elle est déjà largement pratiquée.
En effet, si le bilan écologique de la consignation des emballages réutilisables dans la grande distribution peut évidemment être négatif, il est nécessairement positif, me semble-t-il, dans le cadre de la distribution dans les cafés, hôtels et restaurants, puisque le « circuit retour » existe déjà et que le gisement de bouteilles vides est concentré, homogène et intégré dans des systèmes logistiques de livraison, comme l’a d’ailleurs souligné la Commission européenne dans une communication du 9 mai 2009.
Ce système de consignation n’étant pas nouveau en matière d’emballages en brasserie et en eaux gazeuses – il était même obligatoire entre 1938 et 1989 –, je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir, d’une part, me faire connaître les véritables raisons de votre opposition à la remise en vigueur de ce mécanisme, et, d’autre part, m’expliquer pourquoi les emballages réutilisables semblent condamnés à disparaître alors même que la directive européenne du 20 décembre 1994 encourage leur réutilisation.
Monsieur le sénateur, je me souviens de ce débat sur les consignations. Nous nous opposons à ce mécanisme parce que les conclusions définitives de l’étude portant sur le système de consignation pour les bouteilles réutilisables du secteur des cafés, hôtels et restaurants sont attendues pour la fin du premier semestre de l’année 2010.
Il ressort des conclusions provisoires de cette étude que la généralisation du dispositif de consignation à toutes les boissons du secteur des cafés, hôtels et restaurants ne semble pas pertinente.
En effet, les caractéristiques des marchés sont très différentes selon le type de boissons considéré. Pour nombre d’entre eux, l’intérêt d’une consigne pour réutilisation ou recyclage, par rapport à des dispositions classiques de collecte sélective, n’est pas démontré.
En revanche, pour certaines boissons, notamment dans le cas d’emballages en verre et de fûts métalliques, une consigne pour réutilisation serait de nature à apporter un réel bénéfice environnemental.
À ce titre, comme l’a montré l’état des lieux de la consignation des bouteilles dans le secteur des cafés, hôtels et restaurants en France, la réutilisation est nulle pour le lait, les alcools autres que la bière et le vin, dont les emballages sont extrêmement diversifiés à des fins de commercialisation ; elle est peu développée pour les jus de fruits, qui sont de plus en plus souvent conditionnés dans des briques alimentaires non réutilisables ; elle est minoritaire pour les vins de table et les boissons rafraîchissantes sans alcool ; en revanche, elle est assez développée pour les eaux embouteillées et majoritaire pour les bières.
Les comparaisons internationales confortent ce constat. S’il est envisageable de consolider l’existant, il ne semble pas opportun de chercher à étendre le champ des emballages consignés à des champs qui ne seraient pas pertinents.
Par ailleurs, je note que, selon les études environnementales menées dans d’autres pays européens, la mise en place d’un système obligatoire de consignation des bouteilles réutilisables en verre a entraîné un effet pervers, puisqu’elle a généré un transfert de la consommation vers des emballages à usage unique fabriqués à partir d’autres matériaux. Tout dispositif de consignation devrait donc porter sur l’ensemble des matériaux, et pas uniquement sur le verre.
En conséquence, le Gouvernement proposera une extension du dispositif selon les termes suivants : une consignation pour réutilisation des eaux embouteillées, des boissons rafraîchissantes sans alcool et des bières ayant un volume supérieur à 0, 5 litre ; une consignation pour réutilisation ou recyclage pour les mêmes boissons de volume inférieur à 0, 5 litre.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui est bien plus précise et compréhensible que celle qui m’avait été apportée naguère.
En effet, les mesures adoptées à la suite du Grenelle de l’environnement ne pourront être mises en œuvre que si nous faisons preuve de pédagogie. Elles ne constitueront un succès que si les populations y adhèrent. Les décisions qui seront annoncées et adoptées devront être comprises des Français, et donc bien expliquées à ces derniers.
Madame la secrétaire d'État, je vous remercie des explications tout à fait convaincantes que vous m’avez apportées.
La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 839, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Madame la secrétaire d'État, je veux vous faire part d’un problème très particulier, mais important, qui se pose dans le département du Jura dont je suis le représentant.
Les élus, les associations de pêche et les pêcheurs expriment leur inquiétude face à une rumeur qui est toujours d’actualité, qu’elle soit fondée ou non d'ailleurs – c’est le point sur lequel je souhaite vous interroger –, et qui fait état de l’arrivée de pêcheurs professionnels sur le lac de Vouglans.
En effet, cette éventualité suscite une forte opposition étant donné le contexte local. D’une part, ce lac est hydroélectrique, grâce au grand barrage de Vouglans, qui peut être très rapidement sollicité par EDF en cas de besoin urgent, comme nous l’avons vu encore cette année. D’autre part, la pêche professionnelle, en réduisant fortement la quantité de poissons, aurait un effet négatif sur la pratique des pêcheurs amateurs, très nombreux sur ce lac qu’ils considèrent comme un espace de détente et de repos.
La pêche professionnelle serait aussi un frein au développement touristique du secteur, alors que le département a réalisé des investissements importants en la matière, en aménageant les ports du lac et la base nautique de Bellecin, où viennent s’entraîner les équipes nationales des sports nautiques, notamment l’équipe nationale d’aviron, mais aussi des formations internationales qui pratiquent ce sport.
Le conseil général, la totalité des parlementaires et des élus ainsi que les pêcheurs amateurs sont bien entendu tout à fait défavorables à cette éventualité. Des assemblées générales extraordinaires sont organisées contre la venue des pêcheurs professionnels et des pétitions circulent.
Afin d’apaiser les inquiétudes de tous, je souhaiterais donc, madame la secrétaire d'État, que vous me donniez dans votre réponse, au nom du Gouvernement, l’assurance ferme que le droit de pêche ne sera pas accordé aux pêcheurs professionnels sur le lac de Vouglans.
Monsieur le sénateur, en août 2007, du fait de la découverte de PCB, c'est-à-dire de polychlorobiphényles, que l’on appelle aussi, plus communément, pyralènes, certains préfets ont dû prendre des arrêtés interdisant la pêche de poissons destinés à la consommation et à la commercialisation dans le Rhône, depuis le barrage de Sault-Brenaz, au nord-est de Lyon, jusqu’à la mer.
Ce sont quatorze pêcheurs professionnels, dont dix qui opéraient dans l’estuaire du Rhône, qui ont ainsi été privés totalement de leur outil de travail, et donc de leurs revenus. Nous avons demandé au préfet coordonnateur du bassin Rhône-Méditerranée et aux préfets de département de trouver de nouveaux sites pour ces pêcheurs professionnels.
L’opportunité de réinstaller certains d’entre eux sur le lac de Vouglans avait alors été discutée. Toutefois, l’analyse technique menée à l’époque avait conduit à écarter cette solution. C’est ce que le ministre d’État avait indiqué dans une lettre du 11 août 2008, monsieur le sénateur, en réponse à un courrier que vous lui aviez adressé, conjointement avec Mme Dalloz et MM. Sermier et Pelissard.
Depuis lors, le cas du Rhône n’est malheureusement pas resté isolé. Des arrêtés similaires d’interdiction ont été adoptés en février 2009 sur la Saône. Cette fois, ce sont une bonne vingtaine de pêcheurs qui ont été touchés par ces interdictions. Nous avons donc demandé aux préfets d’intensifier la recherche de nouveaux sites de pêche ; dans ce contexte, il n’était pas envisageable d’exclure a priori le lac de Vouglans, dont la ressource piscicole est réputée abondante.
Cette recherche a permis de réinstaller deux pêcheurs sur le lac Léman. Cependant, il faut rappeler, une fois encore, que la relocalisation d’un pêcheur professionnel n’est pas envisageable si elle remet substantiellement en cause les usages préexistants.
Dans un rapport qu’il a adressé à la fin du mois de janvier dernier, le préfet coordonnateur de bassin m’a précisé que l’ouverture de nouveaux secteurs de pêche sur le domaine public fluvial ne pourra, selon lui, être envisagée qu’au moment du renouvellement des baux de pêche de l’État, c’est-à-dire à la fin de l’année 2011. D’ici là, nous étudierons au cas par cas la situation de chacun des pêcheurs professionnels affectés par ces difficultés. Or il se trouve qu’aucun d’entre eux n’est disposé aujourd’hui à implanter son activité sur le lac de Vouglans…
En tout état de cause, monsieur le sénateur, je vous assure qu’aucune décision ne sera prise sur un tel sujet sans une consultation locale. J’espère que ces éléments de réponse permettront d’apaiser les tensions entre pêcheurs.
Madame la secrétaire d'État, je suis presque rassuré ! Je vous remercie de votre réponse, qui est précise et qui a rappelé le contexte de ce problème et l’éventualité envisagée.
Je prends acte de ce qu’aucun pêcheur professionnel n’est candidat pour l’instant à une installation sur le lac de Vouglans, ce qui est très positif et qui rassurera en partie les pêcheurs amateurs locaux, me semble-t-il.
De même, j’ai bien noté que rien ne serait fait sans une concertation étendue, l’avis des élus locaux, des parlementaires, des associations de pêche et des pêcheurs amateurs devant être pris en considération. Je crois d'ailleurs que vous trouverez ceux-ci unanimement opposés à l’implantation de pêcheurs professionnels sur le lac de Vouglans, pour les raisons que j’ai développées à l’instant.
En attendant la fin de l’année 2011 – j’ose espérer que nous recevrons alors une réponse définitive ! –, nous resterons vigilants.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à midi, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Gérard Larcher.