Séance en hémicycle du 11 juillet 2019 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Mes chers collègues, par lettre en date du 10 juillet 2019, le Gouvernement demande l’inscription à l’ordre du jour du mardi 23 juillet, après-midi, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi visant à faciliter la gestion et la sortie de l’indivision successorale et l’exploitation d’un aérodrome en Polynésie française, puis des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de transformation de la fonction publique.

Le Gouvernement demande également l’inscription, sous réserve de leur dépôt, des conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet de loi relatif aux compétences de la Collectivité européenne d’Alsace et sur le projet de loi de règlement du budget pour 2018, ou de sa nouvelle lecture.

Acte est donné de ces demandes.

Pour la proposition de loi relative à la Polynésie française, nous pourrions fixer la durée de la discussion générale à quarante-cinq minutes et le délai limite pour le dépôt des amendements de séance au lundi 22 juillet, à douze heures.

Pour le projet de loi de règlement, en cas de nouvelle lecture, nous pourrions fixer le délai limite pour le dépôt des amendements de séance au début de la discussion générale.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

Le Gouvernement demande également l’inscription à l’ordre du jour du mercredi 24 juillet des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles puis, sous réserve de leur dépôt, des conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet de loi relatif à l’énergie et au climat et sur le projet de loi relatif à la création de l’Agence nationale du sport, ainsi que, sous réserve de sa transmission, de la deuxième lecture de la proposition de loi visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires, initialement inscrite le jeudi 25 juillet.

Acte est donné de cette demande.

La durée de la discussion générale pour l’examen des conclusions des commissions mixtes paritaires sur la proposition de loi relative à l’exploitation des réseaux radioélectriques mobiles et sur le projet de loi relatif à la création de l’Agence nationale du sport pourrait être fixée à quarante-cinq minutes chacune. Nous pourrions fixer le délai limite pour le dépôt des amendements de séance sur la proposition de loi relative à l’organisation des communes nouvelles au mardi 23 juillet, à douze heures.

Y a-t-il des observations ?…

Il en est ainsi décidé.

Enfin, le Gouvernement demande le retrait de l’ordre du jour du jeudi 25 juillet de la proposition de loi visant à homologuer des peines d’emprisonnement prévues en Nouvelle-Calédonie. En conséquence, le Sénat ne siégera pas ce jour-là.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés (texte de la commission n° 616, rapport n° 615).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a quelques heures, la presse nous faisait savoir que le Gouvernement américain avait annoncé l’ouverture d’une enquête sur le projet de taxe dont il est question ce matin, ainsi que d’éventuelles représailles, qui pourraient prendre la forme d’une augmentation des droits de douane. Il ne faudrait pas que les conséquences économiques que pourrait avoir cette décision excèdent les résultats de cette taxe, dont le rendement demeure à ce jour assez incertain.

Nous sommes amenés à examiner aujourd’hui les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés.

Nous sommes en effet parvenus à un accord avec nos collègues députés sur ce texte, qui ne comprenait plus que trois articles en discussion. Deux de ces articles sont issus du texte transmis par l’Assemblée nationale ; le plus important est l’article 1er – c’est l’essentiel du texte –, qui crée la taxe sur les services numériques, c’est-à-dire sur certaines activités des géants du numérique.

S’y ajoute l’article 1er bis A, inséré par le Sénat, visant à ce que le Gouvernement donne au Parlement les raisons de son refus de notifier la taxe sur les services numériques à la Commission européenne au titre des aides d’État. Je reviendrai sur ce sujet ; peut-être M. le ministre nous parlera-t-il d’un éventuel risque constitutionnel et de l’intention du Premier ministre de saisir le Conseil constitutionnel sur ce point. Nous estimons pour notre part qu’il existe un éventuel risque quant à la qualification de ce dispositif d’aide d’État ; ce risque devrait être, à notre sens, purgé par une saisine de la Commission européenne.

Parmi les quatre articles que contenait le projet de loi transmis par l’Assemblée nationale au Sénat, on trouvait, outre celui qui portait création de la taxe sur les services numériques, l’article 2, qui figurait déjà dans le texte initial du Gouvernement, dont l’objet était de revenir, en 2019, sur la baisse de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises.

Permettez-moi de prendre quelques instants pour évoquer cette mesure de pur rendement, qui constitue une contrepartie d’un certain nombre de dispositions prises pour répondre au mouvement des gilets jaunes.

Le Sénat a adopté cet article au cours de la première lecture. Cela dit, n’oublions pas qu’une nouvelle modification de la trajectoire en 2020 est encore à prévoir. J’avais d’ailleurs interrogé le Gouvernement à ce sujet. Or, en entérinant un nouveau report dans le projet de loi de finances pour 2020, le Gouvernement se condamnerait à ne pas pouvoir respecter son objectif d’atteindre un taux de 25 % en 2022, ce qui serait évidemment très dommageable pour notre compétitivité et la confiance des entreprises. Plus on repousse cet objectif, plus, par définition, il sera difficile à atteindre !

Le Sénat avait également adopté sans modification, dès la première lecture, l’article 1er bis prévoyant la remise d’un rapport.

L’accord a dès lors été obtenu en commission mixte paritaire sans la manifestation d’aucune opposition, ce qui témoigne de l’important travail de compromis réalisé. À ce titre, je salue l’excellente collaboration avec mon collègue rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, Joël Giraud.

Dès la première lecture, les deux assemblées avaient validé le principe même de la création d’une taxe sur les services numériques reposant sur une assiette et des modalités qu’aucun amendement adopté ne tendait à remettre drastiquement en cause.

En effet, nous partageons tous l’objectif d’assurer une juste répartition de l’imposition des entreprises, quels que soient leurs modèles d’activité, répartition qui tienne compte du développement du numérique. Or le système fiscal international actuel ne nous le permet pas. Une réforme est à l’étude, sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE. Elle pourrait se concrétiser plus rapidement que nous l’anticipions lorsque le projet de taxe avait été envisagé à l’échelon européen.

Dans ces conditions, la solution dont nous discutons constitue un pis-aller, un moindre mal, c’est-à-dire pas même un plan B, mais un plan C.

L’information divulguée ce matin selon laquelle le Gouvernement américain aurait lancé une enquête contre la taxe en question montre que la solution internationale est la seule possible à terme. C’est pourquoi nous avions souhaité que cette taxe ait un caractère temporaire : nous la considérons comme un encouragement, comme une étape vers une taxation à l’échelle de l’OCDE. Quand on innove seul, on prend toujours des risques !

En outre, nous le reconnaissons tous, cette imposition est imparfaite économiquement, puisqu’elle taxe le chiffre d’affaires, plutôt que les bénéfices, et qu’elle peut conduire à une double imposition des entreprises qui acquittent déjà leurs impôts sur les bénéfices qu’elles réalisent en France. À ce titre, aucune solution juridique n’était pleinement satisfaisante ; par volonté de compromis, la commission mixte paritaire n’a malheureusement pas conservé la déduction de la taxe sur la contribution sociale de solidarité des sociétés, ou C3S, que nous avions introduite.

Cette taxe sera également complexe du point de vue de sa mise en œuvre. Elle doit être considérée comme un palliatif, comme une étape temporaire, dans l’attente d’une décision multilatérale plus adaptée, que le Gouvernement espère aussi pousser au travers d’elle.

Compte tenu de ces éléments, le Sénat avait souhaité limiter la durée de cette taxe dans le temps, soit jusqu’en 2021. Nous avons des raisons de croire, ou du moins d’espérer qu’un accord international pourrait être adopté d’ici à cette date.

Toutefois, nous avons accepté lors de la réunion de la commission mixte paritaire de ne pas retenir cette date butoir, afin de laisser au Gouvernement une pleine marge de manœuvre pour négocier à l’échelon international. Nous savons, monsieur le ministre, combien ces négociations sont complexes : vous l’avez éprouvé à l’échelle européenne. Nous avons remplacé cette limitation dans le temps par l’obligation pour le Gouvernement de mentionner expressément, dans le rapport prévu sur l’application de la taxe, la date à laquelle l’accord international s’y substituerait.

Juridiquement, la taxe sur les services numériques constitue un pari à bien des égards : son assiette vise à territorialiser des revenus générés par les utilisateurs français sans qu’ils soient effectivement déclarés en France, en s’extrayant des conventions fiscales internationales de répartition des bénéfices.

Nous avons fait en sorte de sécuriser le dispositif, en réduisant les risques juridiques identifiés et les sources potentielles de contentieux. Peut-être, monsieur le ministre, reviendrez-vous sur les risques constitutionnels encourus.

À ce titre, la commission mixte paritaire est revenue sur l’exclusion du champ de la taxe des services par abonnement, ainsi que des systèmes informatisés de réservation. En revanche, la disposition introduite par le Sénat précisant les conditions d’assujettissement des entreprises de manière à permettre la perception de la taxe dès 2019 a été conservée.

Plusieurs ajustements techniques et de coordination ont par ailleurs été opérés en commission mixte paritaire.

Surtout, le Sénat s’est préoccupé du risque de remise en cause de la taxe au titre des aides d’État.

Sans préjuger le fond, il nous paraissait essentiel de respecter la forme, qui commande de notifier tout projet d’aide à la Commission européenne.

Si la taxe était, par malheur, qualifiée d’aide d’État, sans notification préalable, elle serait invalidée quand bien même elle ne serait pas contraire aux traités européens.

Certes, monsieur le ministre, il faut être audacieux, mais vous prenez à mon sens un risque juridique inutile en persistant à ne pas donner notification de cette taxe novatrice.

Faute de pouvoir obliger le Gouvernement à le faire, je me félicite donc que la commission mixte paritaire ait conservé l’article 1er bis A : au moins, le Gouvernement devra justifier son choix auprès de la représentation nationale.

Sur le dispositif de la taxe lui-même, il convient de noter que les initiatives du Sénat ont permis d’aboutir à deux compromis.

Le premier permet d’exclure de l’assiette de la taxe les services connexes à la mise en relation des utilisateurs, dans des conditions économiquement fidèles à l’objectif. Cela concerne essentiellement la logistique.

Le second aboutit à préciser les critères de localisation des terminaux en France, de manière à respecter les exigences de protection des données personnelles.

Voilà l’accord auquel nous sommes parvenus. On peut toujours regretter que telle ou telle mesure ne soit pas retenue : c’est le principe même d’un compromis.

Le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire a été adopté sans modification par l’Assemblée nationale la semaine dernière.

Désormais, la taxe sur les services numériques va pouvoir entrer en vigueur, concrétisant la volonté que nous avons tous de parvenir à une plus juste imposition des géants du numérique, dans l’attente d’une solution internationale plus adaptée et pérenne.

Monsieur le ministre, ce texte est un encouragement, une étape vers une solution qui, à défaut d’être européenne, se trouvera à l’échelon de l’OCDE. Il représente une certaine prise de risques dont nous sommes tous conscients. C’est dans cet esprit que le Sénat a souhaité voir aboutir cette commission mixte paritaire et adopter cette taxe très novatrice.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de vous retrouver ce matin pour l’adoption définitive d’un projet de loi important, qui porte à la fois sur la révision de la trajectoire de l’impôt sur les sociétés et sur la taxation des géants du numérique.

Je tiens à saluer le sens des responsabilités du Sénat, qui a su trouver un accord avec l’Assemblée nationale de manière à parvenir à un texte identique. Je vous remercie de la qualité du travail fourni au cours de l’examen de ce texte, qui a permis d’en améliorer certaines dispositions, notamment pour ce qui est de la taxation des géants du numérique, comme vient de le rappeler M. le rapporteur.

Le premier volet de ce texte porte sur la baisse de l’impôt sur les sociétés. Je tiens à redire que l’engagement du Président de la République de parvenir à un taux d’impôt sur les sociétés passant de 33, 3 % à 25 % pour toutes les entreprises, sans exception, d’ici à 2022 sera tenu.

C’est une question de compétitivité vitale pour nos entreprises, qui doivent dégager des marges de manœuvre pour investir, pour innover, pour connaître la réussite dans le combat technologique du XXIe siècle. C’est aussi un élément clé d’attractivité. Si nous sommes devenus le pays le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers, c’est précisément parce que nous avons pris des engagements fiscaux en ce sens, de manière à développer des investissements et des emplois dans nos territoires.

Cette baisse du taux sera mise en œuvre pour toutes les entreprises dès 2020. Je veux notamment rassurer les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros : elles seront, elles aussi, concernées, puisque le taux d’impôt sur les sociétés passera pour elles de 33, 3 % à 31 %. Pour les autres entreprises, ce taux passera de 31 % à 28 %.

J’ai parfaitement conscience du décalage qui peut exister par rapport aux précédentes annonces du Gouvernement : le taux s’établira à 31 % pour les plus grandes entreprises, mais il n’en reste pas moins que l’impôt sur les sociétés baisse. Il est normal qu’il diminue un peu moins rapidement pour ces entreprises, car cela nous permet de dégager 700 millions d’euros, ce qui participe au financement des baisses des impôts pesant sur les ménages. Ce n’est que justice de demander aux plus grandes entreprises de faire un effort un peu plus important, tout en maintenant la baisse générale de l’impôt sur les sociétés et en conservant l’objectif d’un taux de 25 % en 2022.

Le deuxième sujet qui nous rassemble ce matin est la taxation des géants du numérique.

Je veux rappeler que cette taxation n’est le fruit ni du hasard ni d’une quelconque lubie de certains États européens. Elle repose d’abord sur un diagnostic du nouveau modèle économique auquel nous sommes confrontés au XXIe siècle. Aujourd’hui, la valeur est créée par les données, par leur accumulation, leur concentration et leur commercialisation, que ces données soient privées ou, pour certaines, publiques. C’est ce qui permet aux plateformes de faire de la publicité ciblée et de développer leur activité économique. La donnée fait la valeur.

Pourtant, la taxation de la donnée n’est pas la même que celle des services et des biens manufacturés. C’est à la fois totalement injuste et totalement inefficace. La responsabilité des pouvoirs publics est de tenir compte de cette nouvelle réalité, de ce nouveau modèle économique, et de parvenir à mettre en œuvre une taxation qui soit juste entre ceux qui continuent de produire des biens manufacturés et d’offrir des services, d’une part, et toutes ces nouvelles entreprises qui créent de la valeur à partir des données, d’autre part.

Or la situation actuelle est bien différente. Selon le rapport de la Commission européenne, la taxation des données est inférieure de quatorze points à celle des autres activités économiques.

Nous ne faisons donc que rétablir de la justice fiscale. Nous voulons construire, pour le XXIe siècle, une fiscalité qui soit à la fois juste et efficace. Nous voulons imposer à ce nouveau modèle économique les mêmes règles fiscales que celles qui s’appliquent à toutes les autres activités économiques. C’est fondamentalement une question à la fois de justice et d’efficacité ! Comment pourrons-nous, demain, financer nos biens publics, nos investissements environnementaux, nos écoles, nos crèches, nos hôpitaux, nos collèges, si nous continuons à taxer ceux qui créent le moins de valeur sans taxer au même niveau ceux qui créent le plus de valeur, c’est-à-dire l’activité numérique et les données ?

C’est donc un principe de justice et d’efficacité qui nous a guidés dans le combat que je mène depuis deux ans avec le Président de la République pour convaincre les États européens, un par un, d’avancer dans cette direction.

La taxe que nous vous proposons ce matin a un taux de 3 %. Elle porte sur le chiffre d’affaires, qui est aujourd’hui la seule donnée disponible et crédible qui nous permette de mettre en place une telle imposition. Elle ne vise que les entreprises dont le chiffre d’affaires numérique – j’insiste sur ce dernier mot – est supérieur à 750 millions d’euros à l’échelon international et à 25 millions au plan national. Le chiffre d’affaires total de ces entreprises peut être bien plus élevé, mais c’est uniquement le chiffre d’affaires numérique qui sert de base fiscale.

Enfin, cette taxe est temporaire. Je redis à cette tribune que, dès que l’OCDE aura adopté une solution crédible de taxation des activités du numérique, la France retirera sa taxe nationale. Je veux être très clair avec vous sur ce point.

Quelles conclusions pouvons-nous tirer du débat que nous avons eu et des différentes réactions que cette taxe nationale sur les activités numériques suscite ?

D’abord, on peut déduire une conclusion nationale. Je tiens à répéter à M. de Montgolfier que la sécurité juridique de cette taxe est confirmée, à l’échelon national, par le Conseil d’État et, au plan européen, par la Commission européenne, puisque le dispositif que nous adoptons est celui-là même qui avait été proposé par la Commission.

Cela dit, il est à mon sens de bonne politique d’avoir prévu un rapport d’évaluation de cette taxe et un rapport sur l’évolution des négociations internationales ; j’en remercie le Sénat. Dès lors que je prends l’engagement de retirer cette taxe nationale dès qu’une décision efficace aura été adoptée à l’échelle internationale, à celle de l’OCDE, il est sage et légitime de prévoir un rapport sur ces négociations.

Des conclusions doivent également être tirées à l’échelon européen. Je me suis battu, depuis 2017, pour convaincre nos partenaires européens. Au début, nous étions deux pays, puis cinq, dès l’automne de 2017 : l’Espagne, l’Italie, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la France. À la fin du mois d’octobre, nous étions dix-neuf États. Une proposition a été faite par la Commission européenne, dont on a débattu au long de réunions des ministres des finances européens.

En toute dernière étape, vingt-quatre États étaient prêts à adopter cette solution de taxation du chiffre d’affaires des géants du numérique, par souci de justice et d’efficacité. Toutefois, quatre États européens ont pu bloquer l’accord qui rassemblait les vingt-quatre autres : la Suède, la Finlande, le Danemark et l’Irlande. Je ne me résigne pas à ce que, en Europe, une minorité puisse bloquer la majorité. Je considère que, s’il y a une conclusion à tirer de ces débats européens, c’est bien la nécessité de passer de l’unanimité à la majorité qualifiée pour les décisions portant sur certaines dispositions fiscales.

Marques d ’ approbation sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire

Enfin, nous sommes face à une réaction américaine. Le représentant au commerce des États-Unis, M. Robert Lightizer, m’a écrit pour me signaler que l’administration américaine allait ouvrir une procédure au titre de la section 301 du Trade Act de 1974 en raison de l’adoption de cette taxe sur les géants du numérique. J’ai eu hier une longue conversation avec le secrétaire américain du trésor, M. Steven Mnuchin, qui m’a lui aussi averti de l’ouverture de cette procédure.

Je veux rappeler que c’est la première fois, dans l’histoire des relations entre les États-Unis et la France, que l’administration américaine décide d’engager une procédure au titre de la section 301. Je crois profondément qu’entre alliés nous pouvons et nous devons régler nos différends autrement que par la menace. La France est un État souverain. Elle décide, souverainement, de ses dispositions fiscales, et elle continuera de le faire !

Je veux redire à nos partenaires américains que cette taxe doit constituer, pour eux, une incitation à accélérer encore plus les travaux visant à aboutir à une solution internationale quant à la taxation des activités numériques, à l’échelle de l’OCDE. Dans une dizaine de jours se tiendra, à Chantilly, le G7 des ministres des finances. Le secrétaire américain du trésor sera présent. Eh bien, accélérons les travaux à l’échelle internationale, trouvons une solution commune, à l’échelon de l’OCDE, passons par des accords, plutôt que par des menaces ! Cela me semble de meilleure politique pour traiter cette question fondamentale de la taxation des géants du numérique.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Maire

De manière plus générale, chacun voit bien que nous sommes aujourd’hui confrontés à l’émergence de géants économiques qui ont un caractère monopolistique. Ils veulent non seulement contrôler le plus de données possible, créer de la valeur à partir de ces données, mais aussi aller plus loin encore, en échappant, faute de décisions, à un impôt juste et en mettant en place des instruments d’échange qui pourraient, demain, prendre la forme d’une monnaie souveraine.

C’est selon moi notre responsabilité, en tant qu’élus ou que représentants des pouvoirs publics, d’éviter l’émergence d’entreprises qui deviendraient des États privés et auraient tous les privilèges des États sans les contraintes et les contrôles qui vont avec.

Ma détermination à mettre en œuvre une juste taxation du numérique est donc totale, par souci de justice et par souci d’efficacité.

Ma détermination, avec l’ensemble de nos partenaires européens, à instaurer un cadre de régulation des données qui protège la vie privée de nos concitoyens est elle aussi totale.

Ma détermination, enfin, à faire en sorte que le projet d’instrument d’échange mis en place par Facebook, dit Libra, ne devienne pas une monnaie souveraine qui pourrait concurrencer la monnaie des États est tout aussi totale, car je n’accepterai jamais que des entreprises deviennent des États privés !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

« L’impôt finira par absorber la totalité des revenus et entamera le capital, restreignant l’épargne et la production, forçant les capitaux à se cacher ou à fuir. » Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ces paroles catastrophées furent prononcées par l’économiste libéral Paul Leroy-Beaulieu, en 1908, alors qu’était discutée l’une des premières initiatives parlementaires visant à établir, en France, un impôt sur le revenu. Six ans plus tard, dans ce même hémicycle, alors que nos prédécesseurs se préparaient à adopter la loi Caillaux instituant cet impôt, l’opposition de droite accusait « le Sénat d’avoir perdu toute dignité ».

J’ai souhaité entamer mon intervention par ces propos, car ils illustrent les débats, les exagérations, les craintes qui, souvent, accompagnent les projets structurants de certaines époques.

À l’ère du capitalisme industriel et manufacturier, c’était l’impôt sur le revenu qui était au cœur des débats.

Aujourd’hui, c’est le numérique qui prend toujours plus de place dans notre économie, qui modifie nos façons de produire et la répartition des richesses. Ainsi, en France, trois entreprises sur cinq sont passées au big data ; 83 % des Français sont connectés ; le numérique compte pour 5, 5 % du produit intérieur brut français, et cette part est appelée à augmenter. Au total, 700 000 emplois ont été créés dans la filière en quinze ans.

Dans ce cadre, plus que le seul impôt sur le revenu, c’est la taxation des acteurs du numérique qui fait l’objet de toutes les controverses. Ces débats sont d’autant plus aigus que, d’une manière générale, l’imposition des sociétés tend à décroître. Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques, l’OFCE, elle est passée de 35 % à 21, 9 % en moyenne en Europe entre 1995 et 2017.

Ainsi sommes-nous, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans une période charnière. Comme il y a un siècle, nous voyons clairement émerger la nécessité de rétablir la justice fiscale et l’efficacité économique.

Hier, c’était l’imposition sur le revenu qui suscitait des cris d’orfraie ; aujourd’hui, c’est la nécessaire taxation des géants du numérique qui est la cible des critiques les plus acerbes. Hier, certains prophétisaient la disparition de toutes richesses ; aujourd’hui, d’autres pensent que tout un pan de l’activité économique est menacé.

Mes chers collègues, il faut se rendre à l’évidence : nous n’en sommes, c’est certain, qu’au début des discussions sur ce sujet. La taxation des entreprises du numérique – ces dernières échappent aujourd’hui trop facilement à l’impôt grâce à la mobilité de leurs bases fiscales – aura bien lieu, c’est inéluctable. La seule question est celle de sa temporalité : voulons-nous hâter ou ralentir le mouvement ?

Mesure de justice sociale et d’efficacité de la dépense publique, l’impôt est également indissociable de la construction et de la vie démocratique. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 prévoit ainsi une contribution commune aux dépenses d’administration et de fonctionnement de l’État, laquelle est également répartie entre tous les citoyens en raison de leurs facultés. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est plus que temps de faire respecter ce principe fondamental par les Gafam !

Comme nous l’avions dit lors de l’examen du texte en première lecture, nous considérons que le projet de loi n’est qu’un timide premier pas vers des solutions plus durables. Compte tenu de l’ampleur des chiffres d’affaires réalisés par les entreprises numériques et des faibles taux d’imposition auxquels celles-ci sont soumises, nous considérons que l’assiette proposée pourrait être élargie et que le taux d’imposition prévu pourrait être augmenté. Réserver le dispositif à des entreprises réalisant un chiffre d’affaires de 750 millions d’euros à l’échelon mondial et de 25 millions d’euros en France ne nous paraît pas suffisant.

De même, l’instauration d’un taux d’imposition de 3 % ne rapporterait que 400 millions d’euros en 2019 et 650 millions d’euros en 2020. Encore s’agit-il là d’une fourchette haute ! Nous sommes loin des sommes nécessaires au rétablissement de la justice sociale et fiscale, loin également des 3, 2 milliards d’euros que rapportait l’impôt de solidarité sur la fortune – même si les points de vue divergent sur ces montants. Enfin, un tel taux est loin de permettre de compenser ce que nous a coûté depuis 2013 le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, soit, je le rappelle, près de 100 milliards d’euros !

Je rappelle aussi que certains amendements tendaient à retenir un taux plus élevé. Je rappelle également que le texte prévoit de nombreuses exceptions. Ainsi les entreprises qui sont assujetties à l’impôt sur les sociétés et qui payeront la taxe sur les services numériques bénéficieront-elles d’une diminution du résultat soumis à cet impôt. Pour notre part, nous avions proposé la suppression de ce mécanisme.

Les discussions au cours de la réunion de la commission mixte paritaire ont permis de supprimer le caractère exclusivement temporaire de la taxe. C’est une bonne nouvelle, car une épée de Damoclès pesait sur cette taxe, pourtant bien maigre.

Le rapport annuel que nous avions proposé est maintenu. Merci ! C’est la moindre des choses. Nous comptons bien ainsi suivre la manière dont le gouvernement actuel et ses successeurs se mobiliseront pour aboutir à la mise en œuvre d’une taxation européenne ou mondiale. Nous le devons aux utilisateurs des services de ces grandes entreprises ; nous le devons à nos PME et à nos commerçants, qui luttent à armes inégales.

Vous avez fait référence dans votre intervention, monsieur le ministre, à l’attitude extraterritoriale des États-Unis. Cette pratique est assez choquante, pour ne pas dire arrogante, même si elle a eu cours dans d’autres endroits du monde, en raison d’appréciations différentes. Je vous avoue que vos propos sur cette question m’ont satisfait. Vous avez raison, notre souveraineté nationale doit être respectée. Il faut maintenant tenir bon !

M. le ministre approuve d ’ un signe de tête.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

L’enjeu est important. Alors que l’économie du numérique va se structurer dans les années à venir, certains acteurs, on le voit, essaient de passer entre les mailles du filet. Il faut donc tenir bon, je le répète, et accélérer.

L’instauration d’une taxe à l’échelon européen – voire mondial – devrait faire l’objet d’un vote à la majorité qualifiée. Nous devons pouvoir lutter à armes égales. Or je considère qu’un grand nombre de nos entreprises, de nos artisans, de nos commerçants ne luttent pas à armes égales avec les acteurs du numérique. Il faut rétablir de la justice et de l’efficacité.

Nous allons donc nous abstenir, mais c’est une abstention vigilante !

Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Taillé-Polian

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi a fait l’objet de longues discussions, et c’est normal, car la taxe dite GAFA, malgré son faible rendement et son caractère timide eu égard à l’importance du sujet, constitue un symbole fort, comme en témoigne la réaction des États-Unis d’Amérique. Nous devons aujourd’hui tenir bon et mettre en œuvre cette taxe.

C’est la raison principale pour laquelle nous allons voter en faveur de ce projet de loi, car il marque une avancée, certes limitée, modeste, au regard de ce que nous pourrions faire, concernant la participation de toutes les entreprises aux recettes de l’État, en particulier celles du secteur du numérique.

Il s’agit bien ici de répondre aux Français, qui ne comprennent pas – comment pourraient-ils comprendre une situation totalement injustifiable ? – que certains secteurs d’activité bénéficient de fait d’une fiscalité allégée et que les bénéfices des grandes sociétés ne soient pas davantage imposés, contrairement à ceux des petites entreprises ?

Nous aurons certes des divergences sur les taux de l’impôt sur les sociétés ou sur le taux de cette taxe, mais nous nous accordons tous sur une nécessité : toutes les entreprises, parce qu’elles créent de la richesse, doivent contribuer au financement des infrastructures et des services publics. Nous assistons dans le monde à une course effrénée aux baisses des impôts sur les sociétés pour attirer les entreprises. Un célèbre économiste considérait même qu’on en viendrait peut-être un jour à payer des entreprises pour qu’elles s’implantent dans certains territoires. Et j’ai entendu certains théoriciens dire qu’il fallait supprimer les impôts sur les sociétés et tout reporter sur la TVA ! Il faut donc redire que les entreprises doivent participer au financement des infrastructures et des services publics, car c’est aussi grâce à eux, grâce à l’État, qu’elles peuvent s’implanter, créer et développer leur activité.

Les spéculations vont bon train pour refonder le système fiscal. Avec ce texte, nous allons dans le bon sens en plaçant les entreprises face à leurs responsabilités sociales.

Nous ne pouvons par conséquent qu’approuver les évolutions du projet de loi lors de la réunion de la commission mixte paritaire.

Ainsi, la notification de la taxe à la Commission européenne permettra de sécuriser le texte et d’éviter d’éventuels recours des entreprises concernées devant une juridiction européenne. Ces entreprises sont en effet toujours promptes à utiliser les leviers juridiques disponibles pour mettre l’État en difficulté lorsqu’il leur demande de régler leurs factures.

La non-limitation dans le temps de cette taxe permettra de l’appliquer tant qu’un accord n’aura pas été trouvé à l’échelon de l’OCDE. On sait d’expérience combien de telles négociations sont longues parfois, pour ne pas dire incertaines. Étant donné la réaction des États-Unis, qui envoient un bien mauvais signal, on peut se demander si la volonté d’aller dans le bon sens perdurera. Il faut inciter les autorités américaines à se mobiliser pleinement en faveur des réformes conduites par l’OCDE.

La remise de rapports sur la fiscalité s’appliquant aux entreprises du secteur du commerce et sur les résultats de la taxe permettra de vérifier l’efficacité de celle-ci. C’est une bonne chose.

Nous sommes favorables, je l’ai dit, à la création de cette taxe, qui constitue l’amorce d’un processus important, mais nous n’oublions pas pour autant les limites que nous avions identifiées lors du débat au Sénat.

Tout d’abord, cette taxe sur le chiffre d’affaires n’est pas un impôt sur les bénéfices des sociétés et ne répond donc pas à la logique d’un impôt intervenant après un cycle économique, applicable aux seules entreprises bénéficiaires.

Nos interrogations portaient, et portent toujours, sur la capacité qu’auront les services fiscaux à vérifier les déclarations des bases fiscales imposables que les entreprises leur feront parvenir, mais aussi sur la répercussion de cette taxe sur les prix des publicités par les entreprises exerçant une situation de quasi-monopole.

Enfin, il est bon de rappeler le contexte dans lequel ce texte nous a été présenté. Lors de la discussion générale au Sénat, nous avons montré que ce projet de loi répondait surtout aux besoins de financement des mesures annoncées en décembre et en avril derniers par le Président de la République pour faire face à la colère sociale. Nous avions alors indiqué que le compte n’y était pas.

Alors que les recettes nouvelles que pourrait entraîner ce projet de loi sont estimées à 3, 5 milliards d’euros, nous avons jugé qu’elles seraient plutôt de l’ordre de 2 milliards d’euros, soit un montant bien éloigné des 10, 8 milliards d’euros de mesures annoncées. Pour sa part, la commission des finances a estimé très récemment à 25 milliards d’euros le besoin global de financement de ces dernières, soit, on le voit, une différence importante ! Les interrogations demeurent donc sur la façon dont seront financées ces mesures.

Et ces mesures sont variées. Elles vont de la suppression totale de la taxe d’habitation, y compris pour les contribuables les plus aisés, à l’annulation des hausses de la fiscalité écologique – il s’agit là certes de répondre à une forte demande sociale ; pour autant, on n’a pas trouvé les moyens de financer la transition énergétique et les projets écologiques à hauteur des besoins –, de la baisse annoncée de l’impôt sur le revenu à la défiscalisation des heures supplémentaires. Nous déplorons toutefois que des financements ne soient pas prévus pour assurer la qualité ou la pérennité des services publics, en réponse à de nombreuses revendications sociales – je pense au mouvement des urgences. Nous nous interrogeons donc sur l’équilibre budgétaire.

L’apport de recettes que permettra ce texte sera le bienvenu, mais il ne suffira évidemment pas, eu égard aux dépenses annoncées et aux besoins criants.

La question qui est posée dans le cadre de l’examen de ce projet de loi est évidemment européenne. L’instauration de cette taxe à l’échelon national témoigne finalement de l’échec de la France à faire aboutir son projet à l’échelle européenne. Nous étions toutefois d’accord, en cas d’échec au plan européen, pour montrer notre détermination à l’échelon de notre pays. Nous soutenons donc ce texte, la création de cette taxe et la diminution de l’impôt sur les sociétés.

Le groupe socialiste, je le répète, votera donc le texte résultant des travaux de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis que la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés soit parvenue le 26 juin dernier à un accord sur un texte commun entre nos deux assemblées.

Ce projet de loi est important, bien évidemment en termes d’équité fiscale et de recettes budgétaires, mais aussi pour l’image de la France. Notre pays montre ainsi qu’il est capable de jouer un rôle de pionnier en anticipant de futurs accords internationaux, que nous appelons de nos vœux. Il est encore capable de prendre des initiatives, en l’absence d’un accord européen, « plombé » par la règle de l’unanimité, tout en s’affranchissant de la tutelle des États-Unis.

Le président Trump lui-même, dans l’un de ces élans impérialistes qu’il affectionne, à moins que ce ne soit pour des raisons électorales liées à l’approche de l’élection présidentielle américaine, a demandé hier à son administration, comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, une enquête sur l’instauration d’une taxe GAFA en France. J’ignore si le président Trump peut capter Public Sénat, mais sa marque d’intérêt pour le texte dont nous débattons ce matin est un réel honneur pour nous, même si elle n’est pas forcément inspirée par la plus grande bienveillance.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Avant d’évoquer sur le fond la taxation des services numériques, dite taxe GAFA, je reviendrai sur l’article 2 modifiant la trajectoire de l’impôt sur les sociétés.

Il convient en premier lieu de préciser, comme l’a fait le ministre en réitérant les engagements du Gouvernement et du Président de la République, qu’il s’agit non pas d’un changement de cap ou d’un reniement, mais simplement de différer l’application de cette mesure en 2019, peut-être en 2020, pour les seules grandes entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros. Les TPE, PME et ETI bénéficieront bien, elles, de la baisse de l’impôt sur les sociétés, telle qu’elle avait été programmée.

L’article 2 n’a pas été soumis à la commission mixte paritaire puisqu’il avait été adopté conforme par le Sénat le mardi 21 mai dernier.

Je vous rappelle simplement, mes chers collègues, que, lors de cette séance, cet article avait été adopté de justesse, par scrutin public, grâce à une majorité, sinon atypique, du moins inhabituelle. En effet, la commission de finances avait émis un avis favorable sur un amendement de suppression soutenu par le principal groupe de la majorité sénatoriale, qui ensuite n’avait pas voté l’article 2 et s’était abstenu sur l’ensemble du texte. Il s’agissait sans doute d’une posture plutôt que d’une conviction profonde. Vous aviez en effet reconnu vous-même, monsieur le rapporteur, que cette mesure était nécessaire…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Je n’ai pas exclu que l’application de cette mesure puisse être différée à 2020 !

Vous aviez donc reconnu, monsieur le rapporteur, qu’il s’agissait d’une contrepartie aux mesures adoptées au mois de décembre dernier pour répondre au mouvement social auquel notre pays était confronté.

Si je fais ce rappel, c’est que, selon le rapporteur de l’Assemblée nationale, Joël Giraud, dont je partage l’analyse, « l’adoption conforme par le Sénat de l’article 2 sur le taux de l’IS a […] rendu possible un accord sur le texte entre nos deux assemblées ou, à tout le moins, en a grandement accru les chances. » Si je comprends bien, en ne suivant pas votre avis lors de l’examen en première lecture, monsieur le rapporteur, et celui de la commission des finances, nous avons rendu service !

En ce qui concerne la taxe sur les services numériques, les positions du Sénat et de l’Assemblée nationale n’étaient pas très éloignées. Les différences portaient plus sur les modalités, sur le périmètre et sur l’approche de la sécurité juridique. Je tiens à rendre hommage aux deux rapporteurs et aux membres de la commission mixte paritaire, qui ont validé cet accord sur un texte commun. Chacun a fait des efforts et des concessions, qui, à mon sens, n’affaiblissent pas la portée du dispositif mis en place, mais lui assurent sans doute un meilleur équilibre.

Cette issue conclusive a été facilitée par le partage d’un objectif commun : assurer une plus juste répartition de l’imposition des entreprises, quels que soient les modèles d’activité. Il faut bien reconnaître que l’élaboration de mesures dans ce domaine n’est pas aisée et relève en partie de l’innovation. Ces mesures ne répondent toutefois pas de manière totalement satisfaisante à tous les problèmes rencontrés, qu’il s’agisse de l’appréciation de la base de taxation, du risque de double imposition ou de requalification comme aide d’État pour les entreprises qui en seraient exonérées, de la difficulté à préciser la localisation des utilisateurs générant la valeur ajoutée ou de la validité dans le temps du dispositif.

Bien sûr, des approches sensiblement différentes étaient possibles. On aurait ainsi pu s’interroger sur le taux, lequel aurait pu être porté à 3, 5 % ou 4 %, un tel taux correspondant mieux selon certains à un taux d’impôt sur les sociétés de 25 %, notre objectif pour 2022.

On aurait également pu s’interroger sur la possibilité de déduction, pour les entreprises payant déjà l’impôt sur les sociétés en France, de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, puisque le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée sont les deux notions comptables les plus proches, ce qui, économiquement, pouvait paraître assez logique.

Cependant, à ce stade, il convenait avant tout de parvenir à un accord sur un texte commun, susceptible de servir de levier dans les négociations internationales, notamment dans le cadre des travaux de l’OCDE. La validation de ce projet de loi par nos deux assemblées renforce, dans notre pays, mais aussi à l’échelon international, l’incidence de cette mesure, qui peut être symboliquement une marque d’unité nationale.

Bien évidemment, je m’en réjouis. L’ensemble du groupe du RDSE approuvera le texte résultant des travaux de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Union Centriste se réjouit que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord. C’est le signe que, au-delà des clivages et des postures idéologiques, nos deux assemblées sont capables de partager des positions communes lorsqu’il s’agit de justice fiscale. Si elle est évidemment un enjeu économique, l’adaptation de notre fiscalité au déploiement de l’économie numérique est aussi un enjeu éthique.

Sur le sujet qui nous occupait principalement, à savoir la création, à l’article 1er, d’une taxe sur les services numériques, nos deux chambres sont parvenues à un accord, à peine plus de quatre mois après la présentation du projet de loi en conseil des ministres et après une première lecture ayant permis à chacune des deux assemblées d’enrichir et de consolider le texte initial.

Je tiens à féliciter les deux rapporteurs, sans qui l’adoption d’un texte commun, renforcé, mais équilibré, n’aurait pu être possible. Sur les cinq articles que compte le texte final, deux avaient été adoptés en termes identiques au cours de la navette, deux autres ont été adoptés dans la rédaction issue des travaux du Sénat. Une grande partie des modifications que nous avons apportées sont ainsi reprises dans le texte de la commission mixte paritaire. Nous pouvons nous en réjouir.

Je profite également du temps de parole qui m’est imparti pour saluer l’investissement de notre collègue Bernard Delcros, qui a eu l’honneur de représenter le groupe Union Centriste lors de la réunion de la commission mixte paritaire, mais qui ne peut malheureusement être présent aujourd’hui, car il est retenu dans le Cantal par l’accueil d’une mission parlementaire.

Je ne reviendrai pas sur les limites, pour ne pas dire les imperfections économiques de la solution à laquelle nous parvenons à cet instant. Taxer le chiffre d’affaires, c’est en effet taxer aveuglément et sans distinction l’entreprise en pleine croissance qui n’enregistre aucun résultat et celle dont les résultats sont très élevés.

Hélas, aucune technique de déduction n’était juridiquement admissible ni suffisamment solide au regard des règles fixées par les conventions fiscales internationales.

Le mécanisme de déduction de la taxe sur les services numériques de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, qu’avait proposé notre commission des finances avait le mérite d’atténuer l’effet de la double imposition. Il n’aura malheureusement pas prospéré, eu égard au risque d’incompatibilité qu’il présentait avec la réglementation européenne sur les aides d’État.

La meilleure des solutions serait d’ailleurs peut-être, monsieur le ministre, de profiter de l’adoption de ce texte et de la création, même provisoire, de la taxe sur les services numériques pour supprimer la C3S, dont la nocivité a récemment été rappelée par le Conseil d’analyse économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Quoi qu’il en soit, nous devons nous féliciter que bon nombre des modifications introduites par le Sénat à l’article 1er aient été conservées. Je pense à la clarification opportunément apportée sur la territorialisation en matière de publicité ciblée, au report d’un mois de la date limite de paiement de l’acompte en 2019, de celle de la fin de la période de référence retenue pour cet acompte et de la date limite pour opter pour le régime de groupe, ainsi qu’à l’importante précision introduite, sur l’initiative de notre rapporteur général, sur les modalités particulières prévues pour 2019.

Nous devons aussi et surtout nous féliciter de l’adoption de l’article 1er bis A, introduit en commission, sur l’initiative là encore de notre rapporteur général. Il est souhaitable en effet de réduire au minimum, et le plus en amont possible, les risques juridiques identifiés plutôt que de nourrir, en aval, lorsqu’il est souvent trop tard, un éventuel lourd contentieux, extrêmement coûteux et nécessairement préjudiciable pour notre pays et ses finances publiques.

La remise par le Gouvernement d’un rapport sur les motifs de l’absence de notification de la taxe à la Commission européenne procède, dans ces conditions, de la sagesse la plus élémentaire. C’est là, on le sait, la marque de fabrique de notre assemblée !

Plusieurs modifications apportées par le Sénat ont par ailleurs fait l’objet de rédactions de compromis, qui nous satisfont parfaitement. Le souci que nous avons manifesté à travers le bornage temporel de la taxe, entre 2019 et 2021, a manifestement été partagé par nos collègues députés. La commission mixte paritaire a entendu les réserves que nous avons exprimées sur les fragilités d’ordre à la fois économique, juridique et pratique de la taxe, en affirmant plus nettement son caractère provisoire.

De la même façon, si le texte de la commission mixte paritaire revient sur le renvoi à un décret en Conseil d’État que le Sénat avait proposé pour définir les moyens de localisation des utilisateurs, il tient compte de nos inquiétudes, s’agissant notamment de la protection des données personnelles, en retenant un dispositif qui s’inspire habilement de la rédaction de la proposition de directive de la Commission européenne du 21 mars 2018.

Je dirai enfin un mot sur l’article 2, qui prévoit le report de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises en 2019, sur lequel les membres de mon groupe avaient porté en première lecture des appréciations diverses.

À l’instar de Bernard Delcros, je considère cette mesure de rendement nécessaire et son adoption responsable, compte tenu des dispositions que nous avons adoptées en décembre dernier, alors que grandissait la grogne sociale d’un bout l’autre du territoire. Nous veillerons cependant à ce que l’horizon de la trajectoire d’abaissement soit maintenu à 2022.

Grâce à l’implication constructive de chacun, en particulier des deux rapporteurs généraux, un premier pas a été fait aujourd’hui. Sans doute imparfait, assurément insuffisant, ce premier pas demeure néanmoins décisif, car il permettra enfin de faire changer le système d’imposition applicable aux géants du numérique. Nul doute que la voix de la France sera une fois encore un accélérateur indispensable à l’émergence d’une solution internationale, quelles que soient les menaces du président Trump, vous l’avez dit, monsieur le ministre.

Nous voterons donc en faveur de ce texte sans réserve.

Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Laufoaulu

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés.

Nous tenons tout d’abord à saluer les travaux effectués par la commission des finances sur ce texte. Ils ont permis d’apporter des améliorations substantielles au projet de loi adopté par l’Assemblée nationale. Nous nous réjouissons également du succès de la commission mixte paritaire, qui démontre que l’ensemble des parlementaires sont conscients de la nécessité d’agir vite.

Adopter ce texte est d’abord une question de justice fiscale, mais aussi une question de souveraineté, alors que l’Union européenne accuse un sérieux retard dans la course aux datas, richesses d’une nouvelle nature.

À l’heure actuelle, la taxe sur les services numériques est la meilleure réponse que nous puissions apporter à la situation d’injustice fiscale dans laquelle se trouvent les entreprises qui opèrent en France. D’un côté, nos PME et nos ETI subissent les taux d’imposition les plus élevés de l’Union européenne ; de l’autre, de grandes entreprises internationalisées s’organisent pour ne pas acquitter en France tout l’impôt qu’elles doivent.

L’instauration de cette taxe est une première étape utile pour adapter notre modèle fiscal aux évolutions des modèles économiques, mais elle n’est qu’une première étape, qui n’est pas sans présenter certains défauts.

Mon groupe aurait ainsi préféré que cette nouvelle taxe porte sur le bénéfice, plutôt que sur le chiffre d’affaires, qui ne représente pas la capacité contributive des entreprises. Nous resterons donc vigilants à ce que cela ne se généralise pas à d’autres secteurs d’activité.

En l’absence de consensus au sein des pays de l’Union européenne, la France fait aujourd’hui le choix de prendre les devants pour montrer l’exemple. Elle devra continuer à convaincre ses voisins de la suivre pour que le système se généralise à toute l’Union. Nous étions vingt-quatre États membres à voter en faveur d’un tel projet, mais il fallait l’unanimité…

Aujourd’hui, nous sommes les seuls à avoir pris la décision d’agir au plan national et nous saluons sur ce point la détermination du Gouvernement.

La nature multinationale des géants du numérique et la spécificité de leur modèle économique exigent une solution globale que seule la communauté internationale peut offrir. Nous nous réjouissons que la France assume ainsi ses responsabilités sur la scène internationale et ouvre la voie à une solution durable à l’échelle de l’OCDE. Nous espérons que nos partenaires suivront bientôt, afin d’aboutir le plus rapidement possible à la création d’une taxe globale sur les services numériques.

Nous souhaitons de nouveau saluer les travaux de la commission des finances, qui ont également permis d’inscrire cette volonté dans le texte en intégrant une clause d’extinction. Celle-ci permettra de faire le point en temps utile.

Plus que symbolique, cette taxe est cruciale dans un contexte où les géants du numérique s’imposent sans être imposés, tuant dans l’œuf l’éclosion de nouvelles start-up innovantes.

L’hégémonie économique est peut-être acceptée dans un pays qui y aspire, mais, en France, chacun paye son dû. Le groupe Les Indépendants votera en faveur de cette taxe : à défaut d’être parfaite, elle est impérative ; à défaut d’être efficace, elle est équitable ; à défaut d’être internationale, elle existe !

Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Jean-Marc Gabouty applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Rapin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme mon groupe le répète régulièrement, nous ne sommes ni dans l’opposition systématique ni dans l’adoption automatique. Au cas par cas, texte après texte, nous visons à conforter l’intérêt général, soit en adoptant les mesures qui vont dans le bon sens, soit en les modifiant.

Concernant le texte dont nous discutons aujourd’hui, nous nous étions opposés en première lecture à l’article 2, qui reportait d’un an la baisse de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises.

Toutefois, cet article avait été adopté par le Sénat, malgré notre opposition. Par conséquent, la discussion en commission mixte paritaire portait essentiellement sur l’article 1er, instaurant une taxation sur les services numériques. Cette taxe vise notamment les géants du numérique, surnommés les GAFA.

Le 26 juin dernier, la CMP est parvenue à un accord sur ce sujet, chacune des parties ayant fait un pas vers l’autre, afin d’aboutir à un équilibre.

Nous regrettons bien sûr qu’un certain nombre des mesures adoptées par le Sénat ne figurent pas dans le texte de cet accord.

Je pense notamment à la limitation par le Sénat de la taxe aux seules années 2019, 2020 et 2021, cette dernière année étant la date envisagée pour parvenir à un accord au sein de l’OCDE.

La majorité des députés a fait valoir que le bornage dans le temps de la taxe française pourrait réduire la pression mise sur l’OCDE pour aboutir à un accord international.

Je pense également à l’exclusion, prévue par le Sénat, du champ de la taxe des services dont le mode de rémunération repose sur des abonnements.

De même, l’exclusion des systèmes informatisés de réservation a été supprimée. La majorité des députés a estimé que cette mesure aurait pu fragiliser juridiquement l’assiette de la taxe sur les services numériques.

La disposition émanant du Sénat permettant aux redevables d’imputer le montant de la taxe qu’ils ont acquitté sur le montant de contribution sociale de solidarité sur les sociétés, autre impôt de production assis sur le chiffre d’affaires, dont ils sont redevables a été également supprimée par la commission mixte paritaire.

En revanche, certaines mesures adoptées par le Sénat figurent dans le texte de l’accord.

Si la disposition relative à la temporalité évoquée plus avant a été supprimée par la CMP, il a été expressément précisé, dans la partie demandant un rapport annuel au Gouvernement sur l’état d’avancement des négociations au sein de l’OCDE, qu’« un nouveau dispositif mettant en œuvre la solution internationale coordonnée se substituera à cette taxe. » La version antérieure employait les termes « pourrait se substituer ».

Le Parlement prend ainsi pour un fait acquis que la taxe ne sera que temporaire, jusqu’à la conclusion de l’accord international.

La volonté du Sénat de ne pas taxer un certain nombre de services logistiques ou connexes qui sont facturés aux entreprises sur les places de marché a été partagée par les députés ; une rédaction commune améliore et précise le dispositif.

L’article 1er bis A, introduit par le Sénat, a été adopté conforme par la CMP, ce dont nous nous félicitons. Il prévoit que, en l’absence de notification préalable de la taxe sur les services numériques à la Commission européenne, le Gouvernement remet, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport au Parlement sur les raisons pour lesquelles la taxe précitée n’a pas été notifiée à la Commission européenne.

Cet article vise à mettre en garde le Gouvernement sur le risque juridique, lié à l’absence de notification transmise par l’exécutif à la Commission européenne, de remise en cause de la taxe au titre des aides d’État, la taxe ne visant que des entreprises au-dessus d’un certain seuil.

Nous sommes ainsi parvenus à un texte plutôt équilibré. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains adoptera les conclusions de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le chapitre II du titre II de la première partie du livre Ier est ainsi rétabli :

« CHAPITRE II

« Taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique

« Art. 299. – I. – Il est institué une taxe due à raison des sommes encaissées par les entreprises du secteur numérique définies au III, en contrepartie de la fourniture en France, au cours d’une année civile, des services définis au II.

« II. – Les services taxables sont :

« 1° La mise à disposition, par voie de communications électroniques, d’une interface numérique qui permet aux utilisateurs d’entrer en contact avec d’autres utilisateurs et d’interagir avec eux, notamment en vue de la livraison de biens ou de la fourniture de services directement entre ces utilisateurs. Toutefois, la mise à disposition d’une interface numérique n’est pas un service taxable :

« a) Lorsque la personne qui réalise cette mise à disposition utilise l’interface numérique à titre principal pour fournir aux utilisateurs :

« – des contenus numériques ;

« – des services de communications ;

« – des services de paiement, au sens de l’article L. 314-1 du code monétaire et financier ;

« b) Lorsque l’interface numérique est utilisée pour gérer les systèmes et services suivants :

« – les systèmes de règlements interbancaires ou de règlement et de livraison d’instruments financiers, au sens de l’article L. 330-1 du même code ;

« – les plates-formes de négociation définies à l’article L. 420-1 dudit code ou les systèmes de négociation des internalisateurs systématiques définis à l’article L. 533-32 du même code ;

« – les activités de conseil en investissements participatifs, au sens de l’article L. 547-1 du même code, et, s’ils facilitent l’octroi de prêts, les services d’intermédiation en financement participatif, au sens de l’article L. 548-1 du même code ;

« – les autres systèmes de mise en relation, mentionnés dans un arrêté du ministre chargé de l’économie, dont l’activité est soumise à autorisation et l’exécution des prestations soumise à la surveillance d’une autorité de régulation en vue d’assurer la sécurité, la qualité et la transparence de transactions portant sur des instruments financiers, des produits d’épargne ou d’autres actifs financiers ;

« c) Lorsque l’interface numérique a pour objet de permettre l’achat ou la vente de prestations visant à placer des messages publicitaires dans les conditions prévues au 2° du présent II ;

« 2° Les services commercialisés auprès des annonceurs, ou de leurs mandataires, visant à placer sur une interface numérique des messages publicitaires ciblés en fonction de données relatives à l’utilisateur qui la consulte et collectées ou générées à l’occasion de la consultation de telles interfaces, y compris lorsqu’ils sont réalisés au moyen d’interfaces dont la mise à disposition est exclue des services taxables par le c du 1° du présent II. Ces services peuvent notamment comprendre les services d’achat, de stockage et de diffusion de messages publicitaires, de contrôle publicitaire et de mesures de performance ainsi que les services de gestion et de transmission de données relatives aux utilisateurs.

« Sont exclus des services taxables les services mentionnés aux 1° et 2° du présent II fournis entre entreprises appartenant à un même groupe, au sens du dernier alinéa du III.

« III. – Les entreprises mentionnées au I sont celles, quel que soit leur lieu d’établissement, pour lesquelles le montant des sommes encaissées en contrepartie des services taxables lors de l’année civile précédant celle mentionnée au même I excède les deux seuils suivants :

« 1° 750 millions d’euros au titre des services fournis au niveau mondial ;

« 2° 25 millions d’euros au titre des services fournis en France, au sens de l’article 299 bis.

« Pour les entreprises, quelle que soit leur forme, qui sont liées, directement ou indirectement, au sens du II de l’article L. 233-16 du code de commerce, le respect des seuils mentionnés aux 1° et 2° du présent III s’apprécie au niveau du groupe qu’elles constituent.

« Art. 299 bis. – I. – Pour l’application du présent chapitre :

« 1° La France s’entend du territoire national, à l’exception des collectivités régies par l’article 74 de la Constitution, de la Nouvelle-Calédonie, des Terres australes et antarctiques françaises et de l’île de Clipperton ;

« 2° L’utilisateur d’une interface numérique est localisé en France s’il la consulte au moyen d’un terminal situé en France. La localisation en France de ce terminal est déterminée par tout moyen, y compris en fonction de son adresse IP (protocole internet), dans le respect des règles relatives au traitement de données à caractère personnel ;

« 3° Les encaissements versés en contrepartie de la fourniture d’un service taxable défini au 1° du II de l’article 299 s’entendent de l’ensemble des sommes versées par les utilisateurs de cette interface, à l’exception de celles versées en contrepartie de livraisons de biens ou de fournitures de services qui constituent, sur le plan économique, des opérations indépendantes de l’accès et de l’utilisation du service taxable ;

« 4° Les encaissements versés en contrepartie de la fourniture d’un service taxable défini au 2° du même II s’entendent de l’ensemble des sommes versées par les annonceurs, ou leurs mandataires, en contrepartie de la réalisation effective du placement des messages publicitaires ou de toute autre opération qui lui est étroitement liée sur le plan économique.

« II. – Les services taxables mentionnés au 1° du II de l’article 299 sont fournis en France au cours d’une année civile si :

« 1° Lorsque l’interface numérique permet la réalisation, entre utilisateurs de l’interface, de livraisons de biens ou de prestations de services, une telle opération est conclue au cours de cette année par un utilisateur localisé en France ;

« 2° Lorsque l’interface numérique ne permet pas la réalisation de livraisons de biens ou de prestations de services, un de ses utilisateurs dispose au cours de cette année d’un compte ayant été ouvert depuis la France et lui permettant d’accéder à tout ou partie des services disponibles sur cette interface.

« III. – Les services taxables mentionnés au 2° du II de l’article 299 sont fournis en France au cours d’une année civile si :

« 1° Pour les services autres que ceux mentionnés au 2° du présent III, un message publicitaire est placé au cours de cette année sur une interface numérique en fonction de données relatives à un utilisateur qui consulte cette interface en étant localisé en France ;

« 2° Pour les ventes de données qui ont été générées ou collectées à l’occasion de la consultation d’interfaces numériques par des utilisateurs, des données vendues au cours de cette année sont issues de la consultation d’une de ces interfaces par un utilisateur localisé en France.

« IV. – Lorsqu’un service taxable mentionné au II de l’article 299 est fourni en France au cours d’une année civile au sens des II ou III du présent article, le montant des encaissements versés en contrepartie de cette fourniture est défini comme le produit de la totalité des encaissements versés au cours de cette année en contrepartie de ce service par le pourcentage représentatif de la part de ces services rattachée à la France évalué lors de cette même année. Ce pourcentage est égal :

« 1° Pour les services mentionnés au 1° du II, à la proportion des opérations de livraisons de biens ou de fournitures de services pour lesquelles l’un des utilisateurs de l’interface numérique est localisé en France ;

« 2° Pour les services mentionnés au 2° du même II, à la proportion des utilisateurs qui disposent d’un compte ayant été ouvert depuis la France et permettant d’accéder à tout ou partie des services disponibles à partir de l’interface et qui ont utilisé cette interface durant l’année civile concernée ;

« 3° Pour les services mentionnés au 1° du III, à la proportion des messages publicitaires placés sur une interface numérique en fonction de données relatives à un utilisateur qui consulte cette interface en étant localisé en France ;

« 4° Pour les services mentionnés au 2° du même III, à la proportion des utilisateurs pour lesquels tout ou partie des données vendues ont été générées ou collectées à l’occasion de la consultation, lorsqu’ils étaient localisés en France, d’une interface numérique.

« V. –

Supprimé

« Art. 299 ter. – Le fait générateur de la taxe prévue à l’article 299 est constitué par l’achèvement de l’année civile au cours de laquelle l’entreprise définie au III du même article 299 a encaissé des sommes en contrepartie de la fourniture en France de services taxables. Toutefois, en cas de cessation d’activité du redevable, le fait générateur de la taxe intervient lors de cette cessation.

« Le redevable de la taxe est la personne qui encaisse les sommes. La taxe devient exigible lors de l’intervention du fait générateur.

« Art. 299 quater. – I. – La taxe prévue à l’article 299 est assise sur le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, tel que défini au IV de l’article 299 bis, des sommes encaissées par le redevable, lors de l’année au cours de laquelle la taxe devient exigible, en contrepartie d’un service taxable fourni en France.

« Toutefois, ne sont pas prises en compte les sommes versées en contrepartie de la mise à disposition d’une interface numérique qui facilite la vente de produits soumis à accises, au sens du 1 de l’article 1er de la directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE, lorsqu’elles présentent un lien direct et indissociable avec le volume ou la valeur de ces ventes.

« II. – Le montant de la taxe est calculé en appliquant à l’assiette définie au I du présent article un taux de 3 %.

« Art. 299 quinquies. – Pour l’application du présent chapitre, les sommes encaissées dans une monnaie autre que l’euro sont converties en appliquant le dernier taux de change publié au Journal officiel de l’Union européenne, connu au premier jour du mois au cours duquel les sommes sont encaissées.

« Art. 300. – I. – La taxe prévue à l’article 299 est déclarée et liquidée par le redevable selon les modalités suivantes :

« 1° Pour les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée soumis au régime réel normal d’imposition mentionné au 2 de l’article 287, sur l’annexe à la déclaration mentionnée au 1 du même article 287 déposée au titre du mois de mars ou du premier trimestre de l’année qui suit celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible ;

« 2° Pour les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée soumis au régime réel simplifié d’imposition prévu à l’article 302 septies A, sur la déclaration annuelle mentionnée au 3 de l’article 287 déposée au titre de l’exercice au cours duquel la taxe est devenue exigible ;

« 3° Dans tous les autres cas, sur l’annexe à la déclaration prévue au 1 du même article 287, déposée auprès du service de recouvrement dont relève le siège ou le principal établissement du redevable, au plus tard le 25 avril de l’année qui suit celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible.

« II. – La taxe est acquittée dans les conditions prévues à l’article 1693 quater, sauf par les redevables soumis au régime réel simplifié d’imposition prévu à l’article 302 septies A, pour lesquels elle est acquittée dans les conditions prévues à l’article 1692. Sans préjudice des dispositions prévues aux articles L. 16 C et L. 70 A du livre des procédures fiscales, elle est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que les taxes sur le chiffre d’affaires. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ces mêmes taxes.

« III. – Tant que le droit de reprise de l’administration est susceptible de s’exercer, conformément à l’article L. 177 A du livre des procédures fiscales, les redevables conservent, à l’appui de leur comptabilité, l’information des sommes encaissées mensuellement en contrepartie de chacun des services taxables fournis, en distinguant celles se rapportant à un service fourni en France, au sens des II et III de l’article 299 bis du présent code et, le cas échéant, celles exclues de l’assiette en application du second alinéa du I de l’article 299 quater, ainsi que les éléments quantitatifs mensuels utilisés pour calculer les proportions prévues au IV de l’article 299 bis. L’information sur les sommes encaissées mensuellement précise, le cas échéant, le montant encaissé dans une monnaie autre que l’euro et le montant converti en euro selon les modalités prévues à l’article 299 quinquies, en faisant apparaître le taux de change retenu en application du même article 299 quinquies.

« Ces informations sont tenues à la disposition de l’administration et lui sont communiquées à première demande.

« IV. – Lorsque le redevable n’est pas établi dans un État membre de l’Union européenne ou dans tout autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement de l’impôt, il fait accréditer auprès du service des impôts compétent un représentant assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée établi en France, qui s’engage, le cas échéant, à remplir les formalités au nom et pour le compte du représenté et à acquitter la taxe à sa place. » ;

2° Le II quater de la section II du chapitre Ier du livre II est ainsi rétabli :

« II quater : Régime spécial de la taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique

« Art. 1693 quater. – I. – Les redevables de la taxe prévue à l’article 299 autres que ceux soumis au régime réel simplifié d’imposition prévu à l’article 302 septies A ou admis à déposer leurs déclarations par trimestre civil conformément au dernier alinéa du 2 de l’article 287 acquittent cette taxe au moyen de deux acomptes versés lors de l’année au cours de laquelle elle devient exigible et au moins égaux à la moitié du montant dû au titre de l’année précédente.

« Le premier acompte est versé lors de la déclaration de la taxe devenue exigible l’année précédente.

« Le second acompte est versé :

« 1° Pour les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée soumis au régime réel normal d’imposition mentionné au 2 de l’article 287, lors du dépôt de l’annexe à la déclaration mentionnée au 1 du même article 287 déposée au titre du mois de septembre ;

« 2° Dans les autres cas, au plus tard le 25 octobre, lors du dépôt de l’annexe à la déclaration prévue au même 1 déposée auprès du service de recouvrement dont relève le siège ou le principal établissement du redevable.

« II. – Les redevables qui estiment que le paiement d’un acompte conduirait à excéder le montant de la taxe définitivement dû peuvent surseoir au paiement de ce dernier ou minorer son montant.

« Lorsqu’un redevable fait usage de la faculté prévue au premier alinéa du présent II et que le montant de la taxe finalement dû est supérieur de plus de 20 % au montant des acomptes versés, l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 et la majoration prévue à l’article 1731 sont applicables.

« L’intérêt de retard et la majoration mentionnés au deuxième alinéa du présent II sont appliqués à la différence positive entre, d’une part, la somme du montant de chacun des deux acomptes qui auraient été versés en l’absence de modulation à la baisse et, d’autre part, la somme du montant de chacun des deux acomptes effectivement versés.

« III. – Le montant de taxe dû est régularisé lorsqu’elle est déclarée. Le cas échéant, les montants à restituer aux redevables sont imputés sur l’acompte acquitté lors de cette déclaration puis, si nécessaire, sur celui acquitté postérieurement la même année ou, en cas d’absence ou d’insuffisance des acomptes, remboursés.

« Art. 1693 quater A. – En cas de cessation d’activité du redevable, le montant de la taxe prévue à l’article 299 qui est dû au titre de l’année de cessation d’activité est établi immédiatement. Elle est déclarée, acquittée et, le cas échéant, régularisée selon les modalités prévues pour la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable ou, à défaut, dans les soixante jours suivant la cessation d’activité.

« Art. 1693 quater B. – I. – Un redevable de la taxe prévue à l’article 299 qui n’est pas soumis au régime réel simplifié d’imposition prévu à l’article 302 septies A ni admis à déposer ses déclarations par trimestre civil conformément au dernier alinéa du 2 de l’article 287 peut choisir de déclarer et d’acquitter la taxe pour l’ensemble des redevables du groupe, au sens du dernier alinéa du III de l’article 299, auquel il appartient. Dans ce cas, l’article 1693 ter ne s’applique pas à cette taxe.

« Cette option est exercée avec l’accord de l’ensemble des redevables du groupe concerné.

« II. – Le redevable recourant à l’option prévue au I du présent article formule sa demande auprès du service des impôts dont il dépend. Cette option prend effet pour les paiements et remboursements intervenant à compter de la déclaration déposée l’année suivant la réception de la demande par ce service.

« III. – L’option est exercée pour au moins trois années.

« Le redevable renonçant à l’option formule sa demande de renonciation auprès du service des impôts dont il dépend. Cette renonciation prend effet pour les paiements et remboursements intervenant à compter de la déclaration de l’année déposée l’année suivant la réception de la demande par ce service.

« L’option s’applique pour la taxe due par tout nouveau membre du groupe concerné. En cas de désaccord de ce dernier, il est renoncé à l’option dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent III.

« IV. – La déclaration déposée par le redevable recourant à l’option mentionne les montants dus par chaque membre du groupe.

« V. – Le redevable recourant à l’option prévue au I obtient les remboursements de la taxe due par les redevables membres du groupe consolidé, le cas échéant, par imputation des montants dus par les autres membres et acquitte les droits et les intérêts de retard et pénalités prévus au chapitre II du présent livre en conséquence des infractions commises par les redevables membres du groupe.

« VI. – Chaque redevable membre du groupe est tenu solidairement avec le redevable recourant à l’option prévue au I au paiement de la taxe et, le cas échéant, des intérêts de retard et pénalités correspondants que le redevable recourant à l’option prévue au même I est chargé d’acquitter, à hauteur des droits, intérêts et pénalités dont le redevable membre du groupe serait redevable si l’option mentionnée audit I n’avait pas été exercée. » ;

3° À l’article 302 decies, après les mots : « des articles », est insérée la référence : « 299, » ;

Supprimé

II. – Le titre II de la première partie du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° Le I ter de la section II du chapitre Ier est ainsi rédigé :

« I ter : Taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique

« Art. L. 16 C. – L’administration fiscale peut demander au redevable de la taxe prévue à l’article 299 du code général des impôts des justifications sur tous les éléments servant de base au calcul de cette taxe sans que cette demande constitue le début d’une vérification de comptabilité ou d’un examen de comptabilité.

« Cette demande indique expressément au redevable les points sur lesquels elle porte et lui fixe un délai de réponse, qui ne peut être inférieur à deux mois.

« Lorsque le redevable n’a pas répondu ou a répondu de façon insuffisante à la demande de justifications dans le délai prévu par celle-ci, l’administration fiscale lui adresse une mise en demeure de produire ou de compléter sa réponse dans un délai de trente jours, en précisant, le cas échéant, les compléments de réponse souhaités. Cette mise en demeure mentionne la procédure de taxation d’office prévue à l’article L. 70 A du présent livre. » ;

bis Après le troisième alinéa de l’article L. 48, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le redevable membre d’un groupe mentionné à l’article 1693 quater B du code général des impôts, l’information prévue au premier alinéa du présent article porte, en ce qui concerne la taxe prévue à l’article 299 du code général des impôts et les pénalités correspondantes, sur les montants dont ce redevable serait redevable en l’absence d’appartenance au groupe. » ;

ter Au dernier alinéa du même article L. 48, après la référence : « l’article L. 247 », sont insérés les mots : « du présent livre » ;

2° Le B du I de la section V du chapitre Ier est complété par un article L. 70 A ainsi rédigé :

« Art. L. 70 A. – Lorsque, dans les trente jours de la réception de la mise en demeure mentionnée au dernier alinéa de l’article L. 16 C, le redevable s’est abstenu de répondre, n’a pas complété sa réponse ou l’a complétée de manière insuffisante, l’administration fiscale peut procéder à la taxation d’office du redevable au titre de la taxe prévue à l’article 299 du code général des impôts. » ;

3° L’article L. 177 A est ainsi rétabli :

« Art. L. 177 A. – Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 176 du présent livre, pour la taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique prévue à l’article 299 du code général des impôts, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la sixième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions de l’article 299 ter du même code.

« Par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 176 du présent livre, pour la taxe prévue à l’article 299 du code général des impôts, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la dixième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément à l’article 299 ter du même code. »

II bis. –

Supprimé

III. – Par dérogation au I de l’article 1693 quater du code général des impôts, la taxe prévue à l’article 299 du même code due au titre de l’année 2019 donne lieu au paiement d’un acompte unique, acquitté dans les conditions suivantes :

1° Pour les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée soumis au régime réel normal d’imposition mentionné au 2 de l’article 287 dudit code, lors du dépôt de l’annexe à la déclaration mentionnée au 1 du même article 287 déposée au titre du mois d’octobre ;

2° Dans les autres cas, au plus tard le 25 novembre, lors du dépôt de l’annexe à la déclaration prévue au même 1 déposée auprès du service de recouvrement dont relève le siège ou le principal établissement du redevable.

Cet acompte est égal au montant de la taxe qui aurait été liquidée sur la base des sommes encaissées en 2018 en contrepartie du ou des services taxables fournis en France. Le pourcentage représentatif de la part des services rattachés à la France défini au IV de l’article 299 bis du même code est évalué lors de la période comprise entre le lendemain de la publication de la présente loi et le 31 octobre 2019. L’acompte est dû par les personnes pour lesquelles sont dépassés les seuils mentionnés au III de l’article 299 du même code, déterminés à partir de ces mêmes sommes et de ce même pourcentage, sans préjudice de son remboursement lorsqu’il est constaté que les conditions d’assujettissement ne sont pas remplies.

Pour l’assujettissement et la liquidation de la taxe prévue à l’article 299 du même code due au titre de l’année 2019, le pourcentage représentatif de la part des services rattachés à la France défini au IV de l’article 299 bis du même code est évalué lors de la période comprise entre le lendemain de la publication de la présente loi et le 31 décembre 2019.

IV. – L’option prévue à l’article 1693 quater B du code général des impôts peut, pour la taxe prévue à l’article 299 du même code due au titre de l’année 2019, être exercée jusqu’au 31 octobre 2019 et prend effet à partir du premier paiement à compter de cette date.

V. – Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 septembre de chaque année, un rapport sur les négociations conduites au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques pour identifier et mettre en œuvre une solution internationale coordonnée destinée à renforcer l’adéquation des règles fiscales internationales aux évolutions économiques et technologiques modernes. Ce rapport précise notamment, pour chaque proposition figurant dans le document de consultation publique de février 2019 ou toute autre proposition postérieure, la position de la France, de l’Union européenne et de chaque juridiction fiscale participant à ces travaux et la motivation de chacune de ces positions, l’état d’avancement des négociations, les perspectives d’aboutissement et l’impact budgétaire, fiscal, administratif et économique pour la France et les entreprises françaises. Il rend compte aussi, le cas échéant, des progrès des travaux menés sur ces questions dans le cadre de l’Union européenne ou tout autre cadre international pertinent. Il renseigne particulièrement les parlementaires sur les possibilités de la mise en œuvre d’une coopération renforcée pour la fiscalité du numérique à l’échelle européenne.

Il fait également état de l’incidence de ces négociations sur la taxe sur les services numériques prévue à l’article 299 du code général des impôts et indique la date à laquelle un nouveau dispositif mettant en œuvre la solution internationale coordonnée se substituera à cette taxe.

VI. –

Supprimé

En l’absence de notification préalable de la taxe sur les services numériques prévue à l’article 299 du code général des impôts à la Commission européenne en application de l’article 108, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le Gouvernement remet, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport au Parlement sur les raisons pour lesquelles la taxe précitée n’a pas été notifiée à la Commission européenne.

À compter de 2020, le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 septembre de chaque année, un rapport sur les résultats de la taxe prévue à l’article 299 du code général des impôts et sur son impact économique. Ce rapport précise également la répartition du produit de la taxe en fonction, d’une part, des catégories de services mentionnées au II du même article 299 et, d’autre part, de l’origine géographique des groupes redevables.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Ce texte est un excellent signal, notamment face à la menace d’un président qui rompt le multilatéralisme et qui a une conception très particulière des relations internationales, comme nous avons pu le constater en particulier à propos des sanctions infligées à l’Iran.

Cela dit, il est important de faire le lien entre la séance publique et nos différents travaux de contrôle. Nous conduisons actuellement une commission d’enquête sur la souveraineté numérique ; nous avons souligné l’importance de cette souveraineté et cela explique aussi que nous soyons parfois désarmés devant ces géants et l’usage qu’ils font de nos données.

J’espère, monsieur le ministre, que vous prendrez en considération les conclusions de cette commission d’enquête, car ce sujet me semble d’une importance vitale pour notre économie et pour la position de la France dans l’Europe, aujourd’hui comme demain.

Le groupe Union Centriste votera en faveur de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Personne ne demande plus la parole ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble du projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.