Commission des affaires économiques

Réunion du 6 février 2008 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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Debut de section - Permalien
Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Soulignant l'importance des mois à venir en matière agricole, tant du fait du bilan de santé de la politique agricole commune (PAC) que de la présidence française de l'Union européenne à partir du mois de juillet, M. Jean-Paul Emorine, président, a estimé que l'enveloppe consacrée à la PAC, si elle était préservée dans son montant jusqu'à la prochaine réforme prévue en 2013, ferait cependant l'objet d'une nouvelle répartition interne dès cette année. Remerciant l'intervenant de sa présence devant la commission, il l'a invité à exposer la position de son institution sur ces sujets, ainsi que sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (OGM), dont il a fait observer qu'il ne donnait plus lieu à une procédure d'urgence.

Debut de section - Permalien
Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture

Reconnaissant que la PAC connaîtrait d'importantes évolutions d'ici à 2013, M. Luc Guyau a appelé à y substituer une politique alimentaire, agricole et territoriale commune. Rappelant que la PAC avait été créée en vue de faire face à la pénurie alimentaire de l'après-guerre, il a fait remarquer qu'elle avait permis de garantir les consommateurs en quantité, en régularité et en sécurité d'approvisionnement. Soulignant que le coût d'une telle politique -0,38 % du produit intérieur brut européen- était finalement modique et que cette politique donnait lieu à 9 milliards d'euros d'excédents extérieurs, il a regretté que les producteurs fassent l'objet de critiques à chaque crise sanitaire.

Estimant que le bilan de santé de la PAC ne devrait pas, au contraire du précédent, bouleverser ses grands équilibres, tout en initiant de nouvelles orientations inéluctables, il en a exposé les trois grands axes de réforme :

- garantir davantage d'équité. Certaines productions, telles que les fruits et légumes, n'ont jamais été intégrées dans la PAC. Il convient de s'inspirer de l'exemple allemand, où un système de lissage progressif des aides européennes a été mis en place dès 2003 en vue de parvenir en 2012 à une harmonisation entre productions ;

- maintenir des mécanismes régulateurs. Tous les pays, même les plus libéraux, à l'instar de l'Australie, y ont recours. Ils permettent de faire face à des accidents climatiques. L'assurance récolte doit être développée dans ce cadre ;

- conserver l'originalité du modèle agricole européen. Celui-ci garantit en effet un revenu aux exploitants, une diversité de production et un aménagement des territoires ruraux.

Opposé à la modulation, M. Luc Guyau s'est dit en revanche favorable au développement du second pilier, dès lors qu'il ne serait pas financé au moyen du premier. Il a préconisé l'utilisation, au sein de ce dernier, de mécanismes tels que celui de l'article 69 de la PAC, permettant de rééquilibrer le soutien aux différents secteurs de production. Favorable au maintien de mesures d'intervention pour les céréales, il s'est dit opposé à la suppression des jachères.

Appelant la présidence française à donner à l'agriculture de grands axes de développement pour les vingt années à venir, il a souligné l'impact de la flambée des prix des produits agricoles, celle-ci ayant fait prendre conscience au grand public français, et même à un pays traditionnellement libéral comme l'Angleterre, de l'importance de la notion de sécurité alimentaire.

Il a souhaité que les négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) n'aboutissent pas cette année à un accord, les objectifs affichés étant très éloignés des enjeux actuels. Le maintien d'une véritable politique européenne agricole est indispensable stratégiquement et économiquement et le marché représenté par les 500 millions d'Indiens et de Chinois possédant un pouvoir d'achat semblable à celui des occidentaux, offre de réelles opportunités. La présidence française de l'Union doit également s'investir dans une action renforcée avec le continent africain, tant pour des enjeux de développement que pour des motifs économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Jugeant très intéressant d'avoir pu recueillir les avis des 27 Etats membres de l'Union sur le bilan de santé de la PAC à l'occasion d'un des derniers Conseils des ministres européens de l'agriculture où il avait accompagné M. Michel Barnier, M. Jean-Paul Emorine, président, a jugé qu'aux yeux de l'opinion publique les écarts de droits à paiement unique (DPU), de l'ordre parfois d'un à dix, entre les différentes productions étaient inacceptables. Notant que le rapport sur l'avenir de la filière ovine, récemment publié par MM. Gérard Bailly et François Fortassin au nom de la commission, soulignait la faiblesse des aides aux productions ovines, pourtant majoritairement situées dans des zones défavorisées, il a jugé indispensable d'introduire plus d'équité dans le partage d'une enveloppe financière européenne en réduction tendancielle.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

Rappelant l'évolution et l'importance des enjeux alimentaires, M. Dominique Mortemousque a estimé que l'avenir de la France en ce domaine était intimement lié à celui des politiques européennes. Appelant à une utilisation plus souple des fonds affectés à la PAC en fonction de l'évolution des marchés, il a souhaité un développement de l'assurance récolte. Se disant ouvert aux avancées évoquées dans le Grenelle de l'environnement, il a insisté pour que les mesures en résultant soient réalistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Faisant référence aux conclusions du rapport sur l'avenir de l'élevage ovin, M. Charles Revet a plaidé pour un développement des politiques de soutien aux territoires. Il s'est interrogé sur l'augmentation contenue des coûts de production dans les exploitations agricoles, sur la séparation de la propriété du foncier de l'outil de travail et sur l'avenir des biocarburants.

Debut de section - Permalien
Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture

En réponse à l'ensemble de ces interrogations, M. Luc Guyau a apporté les éléments de précision suivants :

- il est délicat d'introduire plus d'équité dans la répartition des aides et la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) a consacré deux rapports à ce sujet, dont il serait utile de s'inspirer, y compris à l'échelle européenne : s'il est indispensable d'opérer des choix entre les différentes productions, encore convient-il de ne pas réaliser de réformes trop brutales afin de ne pas fragiliser nos outils d'exploitation. Mais il est vrai que l'opinion publique acceptera mal le maintien d'un même niveau d'aides au profit d'exploitants dont les revenus ont été très fortement revalorisés suite à la flambée récente des prix de certaines productions ; il convient donc, de façon progressive mais dès à présent, et en s'inspirant de l'exemple allemand, de réduire leur soutien et de reporter les crédits ainsi économisés sur des mécanismes régulateurs ;

- le recours à des procédés assuranciels est opportun pour pallier les crises de nature climatique, mais non pas économique. Si la commissaire européenne à l'agriculture, Mme Mariann Fischer-Boel, estime que les DPU constituent le meilleur instrument de sécurisation des revenus, l'agriculture ne peut cependant pas entièrement en dépendre. Une régulation de l'intervention des différents acteurs est indispensable en cas de grave crise, afin d'éviter une chute brutale du niveau des prix ;

- l'environnement est devenu un enjeu essentiel et la profession agricole s'est investie dans les débats agricoles du Grenelle de l'environnement, ce dernier étant à présent dans sa phase opératoire. Ainsi, la suppression progressive des produits phytosanitaires doit porter en priorité sur ceux destinés aux grandes cultures, dès lors que des molécules de substitution sont disponibles. Il importe aujourd'hui de responsabiliser l'ensemble des utilisateurs de ces produits et d'encourager le recours à des techniques mixtes, associant traitements chimiques et procédés mécaniques ;

- les enjeux entre les différents usages des territoires compliquent la politique agricole ; ainsi, 60.000 hectares disparaissent de la surface agricole utile (SAU) chaque année en France, soit l'équivalent d'un département tous les six ans. La demande de l'APCA pour une plus grande taxation des projets réalisés lors des changements de destination du foncier vers des activités économiques n'a cependant pas été suivie d'effet ;

- le secteur des biocarburants doit être soutenu, mais dans un développement équilibré, afin de ne pas introduire de concurrence avec les productions alimentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

a rappelé que le développement des biocarburants avait répondu au souci de diversifier les débouchés de la production céréalière à un moment où les prix baissaient. Mais la mission d'information de la commission au Brésil a constaté que l'Europe pouvait difficilement rivaliser avec ce pays dans le domaine de la production d'éthanol. Cependant, l'utilisation de diester ou d'huile végétale naturelle, incorporé à hauteur de 10 à 15 % dans le gasoil, pourrait améliorer la sécurité des approvisionnements énergétiques et renforcer la contribution de l'agriculture au développement de l'économie, même si la hausse actuelle du prix des céréales décourage la production de colza et de tournesol.

S'agissant de la prise en compte de l'environnement par l'agriculture, il a estimé qu'un effort de communication important était nécessaire, les agriculteurs étant considérés encore trop souvent -et à tort- comme des pollueurs. Il s'est demandé si un effort communautaire en faveur de la qualité paysagère, qui pourrait passer par un soutien à la conservation des haies, des mares, des bosquets, ne permettrait pas de donner une image plus positive du monde agricole sur ce thème.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

relevant que le revenu des éleveurs ovins continuait de baisser, a estimé que le débat, difficile, sur le bilan de santé de la PAC et sa future réforme serait peut-être facilité si les mécanismes de la politique communautaire tenaient davantage compte de l'évolution de la conjoncture et permettaient de s'y adapter : certains producteurs pourraient accepter une baisse des aides s'ils savaient que celles-ci seraient revues en cas de variation conjoncturelle. Il a également estimé qu'un meilleur étiquetage des produits serait un moyen de résister à la concurrence des importations.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

s'est inquiété du manque de réactivité de la PAC et de l'OMC. Relevant le blocage actuel des négociations au sein de l'OMC, à un moment où la demande des pays émergents provoque un emballement des marchés, il a estimé qu'il n'était pas possible de mettre trois ou cinq ans à réagir à de telles évolutions.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Raoult

a approuvé M. Luc Guyau d'avoir insisté sur la nécessité de maintenir, dans le cadre de la révision de la PAC, des mécanismes de régulation, dont la Commission européenne a tendance à affirmer qu'ils sont devenus inutiles : il faudra en effet s'opposer avec ténacité à cette vision des choses et préserver l'essentiel de ces dispositifs.

Les quotas laitiers ont un rôle à jouer dans l'aménagement du territoire, en préservant la production laitière dans les zones de montagne et les zones fragiles. La France manque déjà d'un million de litres pour remplir ses quotas. Comment cette production supplémentaire pourrait-elle être répartie, et dans quelles régions ?

Cette question est liée au problème de l'installation des jeunes agriculteurs. Si on augmente le volume de production laitière, trouvera-t-on, compte tenu des contraintes liées à cette production, de jeunes exploitants disposés à s'installer dans ce secteur ?

s'est, en revanche, dit surpris par les positions prises par M. Luc Guyau en faveur du maintien du gel possible des terres, M. Jean-Paul Emorine, président, remarquant que ce maintien pouvait introduire un élément de souplesse. Certes, les jachères sont considérées, d'un point de vue écologique, comme utiles pour préserver la biodiversité, mais si l'on a la capacité de produire et de vendre des produits agricoles, faut-il s'en priver ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Boyer

a demandé si la diminution de l'enveloppe financière consacrée à l'agriculture, compensée par la diminution régulière du nombre d'agriculteurs, ne permettrait pas de stabiliser le niveau des aides. Il s'est interrogé sur la capacité de la profession à proposer une mutualisation des aides entre les différentes productions. Revenant sur la question des biocarburants et des usages industriels des produits agricoles, il a également demandé si l'agriculture pourrait répondre aux besoins de l'économie nationale dans les secteurs de l'énergie et de la production de matières plastiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

a souligné, à propos de la jachère et des quotas laitiers, la variabilité des orientations données à la politique agricole, régulièrement remises en cause au bout de quelques années. Il a souligné la nécessité de moderniser les exploitations et de soutenir l'agriculture dans les zones de montagne et les zones difficiles. Il a en outre relevé que la hausse des prix des céréales était intervenue à un moment où les stocks étaient faibles, bénéficiant donc peu aux exploitants. Il a ensuite évoqué le problème des retraites des agriculteurs, rappelant que les promesses déjà anciennes de relever leur niveau minimum aux trois quarts du SMIC étaient encore loin d'être tenues.

Debut de section - Permalien
Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture

En réponse à ces interventions, M. Luc Guyau a notamment apporté les précisions suivantes :

- il est exact que les agriculteurs n'ont pas bénéficié cette année de la flambée des prix des céréales, en raison du développement, qui devrait continuer malgré la conjoncture positive, des ventes contractualisées à terme ;

- la hausse des prix céréaliers a, par ailleurs, d'importantes conséquences pour les producteurs de viandes blanches. Les producteurs de volailles ont pu répercuter une partie de la hausse de leurs coûts de production sur les distributeurs, mais non les producteurs de porc, qui risquent de connaître une situation très difficile, ainsi que les producteurs de viande de lapin -production importante dans certaines régions- dont le prix de vente à la consommation, déjà élevé, ne pourra être augmenté. Si le prix des céréales devait se maintenir à un niveau aussi élevé, il faudrait sans doute envisager, comme cela avait été fait au moment de l'arrivée sur le marché d'aliments de substitution dans l'entre-deux-guerres, de recourir à des mécanismes de mutualisation et de solidarité permettant de faire baisser le prix des céréales incorporées dans l'alimentation du bétail, sauf à courir le risque de la disparition de beaucoup d'exploitations ;

- la production européenne d'éthanol ne peut certainement pas rivaliser avec la production brésilienne, mais il est important de tenir les engagements qui ont été pris vis-à-vis de l'industrie, d'une part parce que l'on ne passera pas à la deuxième ou troisième génération de biocarburants sans investissements industriels et, d'autre part, parce qu'il faut pouvoir satisfaire aux exigences d'incorporation d'éthanol dans l'essence fixées en France et en Europe sans être dépendant des importations. Rappelant qu'il y a moins d'un siècle un quart de la production agricole était consacré à des besoins énergétiques -à travers, par exemple, la traction animale-, M. Luc Guyau a souligné que le développement des usages énergétiques des huiles végétales dépendait aussi de l'évolution des prix du marché ;

- il convient effectivement de déployer des efforts de communication importants, à tous les niveaux, pour expliquer à l'opinion publique les rapports entre agriculture et environnement. L'APCA a créé, il y a quatre ans, une chaîne de télévision intitulée « Terre d'information », qui diffuse chaque année pendant deux mois des informations et des débats au moment du Salon de l'agriculture. Cette chaîne, dont les émissions seront reprises cette année sur Canal Sat, Free, Orange et la TNT Ile-de-France, est appelée à devenir une « télévision événementielle », qui permettra de s'adresser également au public lors d'autres manifestations, comme le Salon de l'alimentation. Mais il faut aussi que les médias ne déforment pas la réalité, comme cela s'est produit récemment, les journaux télévisés ayant annoncé que toute la Vendée était polluée, alors qu'un seul bassin versant était concerné par un problème de qualité de l'eau ;

- la meilleure façon de sécuriser le revenu des agriculteurs est de leur assurer des prix rémunérateurs, mais il est très important de sauvegarder les mécanismes régulateurs de la PAC, même si les institutions communautaires ne semblent pas prêtes à renforcer ces derniers au moyen d'une baisse des primes ;

- l'Europe ne dispose plus de l'instrument de « préférence communautaire ». Aussi il faut inventer des dispositifs alternatifs jouant le rôle de filtres régulateurs, tels que des exigences accrues sur les importations en termes de qualité sanitaire et de protection environnementale ;

- l'OMC compte aujourd'hui plus de 150 membres, contre 49 il y a une quinzaine d'années, et les décisions sont prises à l'unanimité. On a certainement besoin de certaines normes au niveau international, même si 11 % seulement de la production agricole mondiale est consommée en-dehors du pays de production. Cependant, il faut éviter tout accord règlementant les produits agricoles comme les produits manufacturés ;

- les quotas laitiers ont eu le mérite de maintenir la production laitière sur l'ensemble du territoire et il ne sert à rien de les supprimer progressivement tant qu'il n'y aura pas assez de vaches pour augmenter la production : il en faudrait en France 100.000 de plus pour produire le million de tonnes de lait qui manque pour remplir les quotas, sachant qu'il faut trois ans pour produire une vache laitière. Par ailleurs, compte tenu des contraintes qu'elle comporte, la production laitière ne se développera sans doute pas au niveau des exploitations individuelles, mais plutôt dans des structures sociétaires ;

- les jachères peuvent représenter un mécanisme de régulation potentielle et ont aussi fonctionné comme un moyen de reconnaissance environnementale de l'agriculture, avec le développement, par exemple, des jachères faunistiques et floristiques. Il faut, en outre, savoir que la suppression des jachères sur 10 % de la superficie ne se traduira pas par une augmentation de 10 % de la production, car ce ne sont évidemment pas les meilleures terres qui ont été « gelées » ;

- la diminution du nombre d'agriculteurs est préoccupante dans certaines régions où le seuil d'activité et la vie sociale ne sont plus à des niveaux suffisants pour les retenir. Cependant, on constate aussi que rentrent dans le métier de plus en plus de jeunes qui ne sont pas issus du milieu agricole : l'amélioration des revenus agricoles et la perception qu'a la société de l'agriculture sont en fait deux éléments essentiels pour favoriser l'installation des jeunes et le renouvellement des générations ;

- il serait normal que la hausse des petites retraites, annoncée récemment par le Gouvernement, bénéficie aux retraites agricoles.

S'agissant de l'examen au Sénat du projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés dont le Sénat est saisi, M. Luc Guyau a tout d'abord rendu hommage au travail accompli, depuis plusieurs années, par la Haute assemblée sur ce dossier.

Il s'est félicité que le législateur soit appelé à intervenir, relevant toutefois que l'évolution du dossier des OGM dépendrait aussi des exigences européennes et de la mise en jeu de la clause de sauvegarde.

Relevant que les OGM ne constituaient pas à ses yeux « la solution », mais une parmi la panoplie de celles qui pourraient contribuer à adapter la production au développement de la demande, il a estimé essentiel de maintenir l'effort de recherche, y compris au niveau de la recherche fondamentale, pour ne pas devenir dépendant de la production étrangère de semences. Il a par ailleurs souligné que la recherche ne pourrait pas être conduite seulement en milieu confiné.

Il a enfin approuvé les positions prises par la commission pour organiser de manière réaliste la liberté de production ou de consommer avec ou sans OGM, et assurer à la fois la transparence de l'information sur ce sujet et la coexistence des différents types de cultures.

Il a enfin observé que l'interdiction éventuelle de produire en 2008 du maïs génétiquement modifié n'aurait pas de conséquence au niveau national, même si elle obligeait certains producteurs à produire du maïs en utilisant plus de produits phytosanitaires, mais qu'il était essentiel qu'elle ne se traduise pas par une interruption de la recherche cette année.

La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport d'information de MM. Michel Billout, Claude Biwer et Daniel Reiner au nom de la mission d'information sur les transports terrestres.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

a évoqué les origines et le contexte du rapport, et notamment la lettre du 16 juillet 2007 de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat chargé des transports, demandant à M. Jean-Paul Emorine d'intensifier la réflexion sur les moyens et les missions de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (l'AFITF), créée sur décision du Comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire (CIADT) du 18 décembre 2003. L'agence finance notamment les projets d'infrastructures routières, ferroviaires, fluviales ou portuaires, le fret maritime et le transport en commun urbain. Elle poursuit aujourd'hui deux grandes missions : financer les projets décidés lors du CIADT de 2003 et, au nom de l'Etat, le volet transport des contrats de plan Etat-région.

a indiqué que la mission d'information s'était posé initialement deux questions :

- comment assurer un financement pérenne de l'AFITF à partir de 2009 ?

- la composition et les missions de l'AFITF doivent-elles être revues ?

a indiqué qu'au bout de trois mois d'auditions ayant permis de rencontrer une trentaine de personnes, la mission a conclu qu'il n'était pas nécessaire de changer la composition et les missions de l'AFITF, qui ne doit pas devenir une instance de décision politique. Aussi s'est-elle concentrée sur la question des ressources de l'AFITF, en insistant pour que le financement de l'agence soit pérenne et sanctuarisé. Rappelant l'expérience malheureuse du Fonds d'intervention des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN), créé par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) de 1995, M. Francis Grignon, président, a exhorté le Gouvernement à ne pas détourner les ressources affectées de l'AFITF au profit du budget général de l'Etat. Cette sanctuarisation des recettes de l'AFITF permettra de favoriser la compétitivité, le développement du territoire et le développement durable, en tenant compte de l'objectif, fixé par le Grenelle de l'environnement, de réduire de 20 % d'ici à 2020 les émissions actuelles de l'ensemble des transports, afin de les ramener au niveau de 1990. Il s'agit en effet de rattraper au plus vite le retard considérable des investissements en infrastructures de transport et de « remettre la France sur la bonne voie ». Ce déficit en investissement concerne les infrastructures de l'arrière-pays des ports du Havre et de Marseille ou encore la regénération du réseau ferroviaire classique.

a ensuite indiqué que le budget global annuel de l'AFITF, qui s'élève actuellement à 2,2 milliards d'euros environ, devrait avoisiner 3 milliards d'euros en moyenne d'ici à 2012 et 3,6 milliards d'euros à compter de 2013 afin de respecter les engagements pris lors du Grenelle de l'environnement. Or, l'agence ne disposera à partir de 2009 que de trois ressources pérennes, représentant environ 900 millions d'euros : la taxe d'aménagement du territoire, les redevances domaniales et une partie des amendes radar, désormais déplafonnée. L'agence verra en effet complètement disparaître, fin 2008, le produit de cession des sociétés concessionnaires d'autoroutes, qui alimentait presque la moitié de son budget. Toutefois, il convient de rappeler que l'Etat demeure propriétaire des infrastructures concédées et qu'il redeviendra l'exploitant de ces autoroutes, d'ici 20 à 30 ans environ, à l'expiration des contrats de concession. L'agence devra donc trouver, en plus de ses ressources pérennes, 2,1 milliards d'euros par an sur la période 2009-2012 et 2,7 milliards par an sur la période 2013-2020.

Puis M. Francis Grignon, président, a présenté la structure du rapport et a conclu en se félicitant de la décision d'accorder une semaine supplémentaire à la mission d'information pour présenter son rapport en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

a commencé par saluer les bonnes conditions dans lesquelles la mission d'information a pu mener ses travaux, dans un esprit de recherche du consensus le plus large. Il a toutefois regretté que la mission ait été amenée à précipiter quelque peu la rédaction définitive de son rapport, à la suite de l'annonce d'un projet de loi issu du Grenelle de l'environnement, alors même que ce texte risque finalement d'être présenté plus tard que prévu.

Il a précisé que son intervention serait centrée sur la recherche de trois pistes d'économies de l'argent public ainsi que sur la question des péages ferroviaires.

La première piste d'économie consiste à ne retenir que les projets d'infrastructures les plus utiles à la collectivité. Elle devrait amener à procéder, lors du prochain comité interministériel à l'aménagement et à la compétitivité du territoire (CIACT), à une évaluation systématique et objective des coûts et avantages des infrastructures. Il s'agirait ainsi de rompre avec une pratique antérieure, illustrée lors du comité interministériel de 2003 où les projets présentés étaient à la fois très nombreux, peu cohérents et mal coordonnés entre eux.

Il convient aussi d'étudier les projets sur la base d'évaluations plus réalistes que celles actuellement calculées, qui privilégient le gain de temps, alors que ce n'est souvent pas le principal intérêt d'une opération. A cette fin, M. Daniel Reiner, rapporteur, a préconisé l'application de la méthode d'évaluation proposée par l'instruction-cadre du 25 mars 2004. Il a souhaité que le Gouvernement puisse ainsi procéder à des choix fermes et qu'il cesse de donner de faux espoirs aux territoires, son indécision et ses absences de choix ayant trop souvent engendré la déception.

Il a ensuite abordé la deuxième piste d'économie étudiée : revoir les normes techniques de construction et mieux organiser les travaux d'entretien. Les services de l'Etat imposent en effet des normes techniques très élevées et onéreuses, contrairement à ce qui prévaut chez bon nombre de nos voisins européens, qui offrent pourtant un niveau de sécurité routière équivalent. Ainsi ces normes devraient être assouplies et les projets économes encouragés, comme par exemple les routes à deux fois deux voies, qui coûtent deux à trois fois moins cher que les autoroutes. Par ailleurs, il serait nécessaire de massifier les travaux afin de mieux les programmer, aussi bien pour les projets routiers que ferroviaires.

Evoquant les partenariats public-privé (PPP), M. Daniel Reiner, rapporteur, a indiqué qu'ils ne constituaient pas, aux yeux des membres de la mission d'information, une réelle solution aux problèmes de financement. Si les PPP permettent de réduire les délais de construction et d'étaler la dette dans le temps, ils sont toutefois mal adaptés au domaine des transports, compte tenu du montant important de capitaux à investir initialement et de la rentabilité annuelle assez faible des projets, qui nécessite une très longue période d'amortissement.

En revanche, il a indiqué qu'une vraie solution aux problèmes de financement pouvait passer par une meilleure articulation dans le temps entre les différents projets. Il a ainsi préconisé un « tuilage » des travaux pour éviter que les entreprises de BTP alternent des périodes de forte demande sur plusieurs chantiers et des périodes d'inactivité, prenant l'exemple du nécessaire phasage des trois grands chantiers ferroviaires en cours : la deuxième section de la ligne à grande vitesse (LGV) Est, la LGV Bordeaux-Tours et la LGV Rhin-Rhône. De même, il a pris l'exemple des travaux de régénération qui pourraient être programmés différemment afin d'éviter que les entreprises ayant investi dans des machines très coûteuses demeurent de longues périodes sans chantier.

a ensuite présenté la troisième possibilité d'économie concernant les travaux d'entretien sur les voies ferrées. A ce titre, il a rappelé que le réseau classique français était en très mauvais état et que les opérations lourdes de régénération des voies, bien que de plus en plus nécessaires, étaient gênées par le souci de ne pas interrompre le trafic ferroviaire, ce qui conduisait à la multiplication, très coûteuse, de travaux de courte durée, effectués notamment la nuit. Ayant précisé que pour un chanter de huit heures, le temps d'installation et de désinstallation pouvait représenter entre un tiers et la moitié du temps de travail, il a fait valoir que la mission d'information estimait qu'un effort de concentration de ces petits chantiers devrait permettre de réduire rapidement de 20 % le coût de l'entretien ferroviaire.

Enfin, M. Daniel Reiner, rapporteur, a conclu en évoquant la proposition de moduler les péages ferroviaires. Acquittés à Réseau Ferré de France (RFF) par les opérateurs ferroviaires, essentiellement la SNCF, ces péages sont en effet dans la moyenne européenne, ce qui laisse subsister des marges de manoeuvre, par exemple pour augmenter les tarifs sur certaines lignes à grande vitesse extrêmement rentables ou pour inciter les opérateurs à des comportements écologiquement plus vertueux.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

après avoir salué les conditions de travail de la mission d'information et l'intérêt de permettre, en règle générale, l'émergence d'un consensus au sein d'une mission d'information, a regretté un calendrier précipité, tout en remerciant MM. Francis Grignon et Jean-Paul Emorine d'avoir accordé du temps supplémentaire à la mission pour affiner ses réflexions. Si le rapport a été adopté par les trois rapporteurs, les divergences qui ont subsisté ont toutefois donné lieu à des contributions, en fin de rapport, des groupes socialiste d'une part, et communiste, républicain et citoyen d'autre part. Tous les membres de la mission jugent nécessaire la participation des contribuables et des usagers au financement des infrastructures de transport, mais un désaccord demeure quant au poids relatif de ces deux ressources.

Présentant le dispositif de la redevance d'usage pour les poids lourds, il a estimé que cette mesure, soutenue par tous les membres de la mission, constituait la principale source de financement de l'AFITF. Proposition-phare du Grenelle de l'environnement, le principe d'une redevance kilométrique pour les poids lourds, reflétant le coût d'usage réel du réseau routier principal, est désormais acquis, le Gouvernement ayant d'ailleurs prévu de déposer un projet de loi en ce sens au printemps. Favorisant l'indispensable report modal en limitant la part de la route, la redevance d'usage a été instaurée avec succès en Allemagne, en Autriche, en Suisse ou encore en République tchèque.

Cette redevance doit permettre de contribuer au financement des infrastructures de transport et, plus largement, de limiter les évitements d'itinéraires néfastes des poids lourds en transit, qui tendent à ne pas circuler sur les autoroutes à péage pourtant aménagées pour les accueillir. Elle a également pour avantage de faire contribuer les transporteurs étrangers et de permettre aussi une meilleure prise en compte des coûts réels du transport en internalisant les coûts externes, surtout environnementaux. Elle constituerait enfin un outil tarifaire d'orientation du trafic.

Ces différents avantages plaident pour une mise en place rapide du dispositif qui, d'ailleurs, a déjà été autorisé en Alsace à titre expérimental pour les poids lourds de plus de 12 tonnes et pour une période de cinq ans, par la loi de finances pour 2005. Il s'agissait alors d'annuler les reports de trafics constatés depuis l'instauration de la tarification de l'usage des autoroutes allemandes par les camions.

a indiqué que le dispositif de taxation pourrait être étendu à toute la France dès 2011 et s'appliquer sur l'ensemble du réseau routier structurant ainsi que sur le réseau autoroutier. Un champ d'application aussi large soulève toutefois deux questions spécifiques : l'inclusion des routes départementales, d'une part, et celle du réseau autoroutier concédé, d'autre part, qui suscite davantage d'interrogation. En effet, si les routes départementales n'étaient pas comprises dans le champ d'application de la redevance, elles verraient leur trafic augmenter sous l'effet d'un report des poids lourds se détournant des routes nationales devenues payantes. Seuls les conseils généraux volontaires pourraient appliquer cette redevance, dont le produit leur reviendrait de plein droit.

Quant à l'inclusion du réseau autoroutier concédé, elle est également indispensable en raison du risque de report de trafic en provenance des routes nationales. Elle risque toutefois de poser des difficultés d'application au regard du droit communautaire, la directive « Eurovignette » excluant, dans sa rédaction actuelle, la tarification au-dessus du coût des facteurs, sauf pour les zones de montagne, dites « zones à environnement sensible ».

a alors souligné, en accord avec ses collègues rapporteurs et avec M. Charles Revet, qu'il était nécessaire d'adopter une stratégie à deux niveaux. Tout d'abord, il s'agirait de négocier un assouplissement de la directive « Eurovignette » ou de ses conditions d'application. La présidence française de l'Union européenne, qui débutera au mois de juillet 2008, constituerait à cet égard une opportunité à ne pas manquer, même si l'ordre du jour de cette présidence risque d'être très chargé.

Ensuite, et dans l'attente d'une évolution des règles communautaires, il pourrait être envisagé, dès 2009, de faire contribuer les sociétés d'autoroutes, sous une forme alternative à la redevance poids lourds, afin de récupérer tout ou partie du bénéfice que leur procurerait, par ricochet, l'application de la redevance aux seules routes nationales et aux autoroutes non concédées. A ce titre, il ne faudrait pas s'interdire de modifier certains des paramètres de la fiscalité applicable aux entreprises, comme l'impôt sur les sociétés et la redevance domaniale, si l'augmentation du trafic poids lourds ne se traduisait pas par une hausse proportionnelle du produit des prélèvements obligatoires.

a ensuite présenté les hypothèses retenues par le Gouvernement. La redevance ne concernerait que les poids lourds de plus de 3,5 tonnes circulant sur le seul réseau des routes nationales, ces véhicules devant payer 12 centimes d'euro par kilomètre parcouru. La recette attendue serait de l'ordre de 900 millions d'euros par an.

Cela signifie que la redevance pourrait représenter approximativement un milliard et demi d'euros si, comme le préconisent les rapporteurs, le réseau autoroutier concédé était inclus dans le dispositif. La tarification au kilomètre parcouru paraît être la mieux adaptée, une modulation en fonction du niveau de pollution émis par le véhicule n'étant toutefois pas à exclure.

Indépendamment du débat de principe autour du champ d'application de la redevance, sa mise en place pratique est un enjeu majeur. Selon les réflexions actuelles du Gouvernement, l'externalisation de la gestion du projet pourrait intervenir sur la base d'un contrat de partenariat avec un prestataire qui serait responsable de la conception, de la mise en place et de la gestion de l'infrastructure technique. Il existe aujourd'hui deux technologies en la matière : le système du portique et le système satellitaire. Ce dernier semble préférable, car il permettrait d'offrir d'autres services aux camionneurs et il pourrait assurer un suivi des matières dangereuses. Néanmoins, le débat reste ouvert, notamment si une innovation technologique est lancée avant la mise en place de la redevance. La responsabilité de calculer les tarifs, d'encaisser le produit de la redevance et de la reverser à l'AFITF pourrait être confiée au prestataire, moyennant rétribution des services correspondants. De grands groupes industriels pourraient être intéressés par ce nouveau marché, tandis que le contrôle et les sanctions relèveraient de la direction des douanes.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

a précisé qu'en Alsace, la redevance était appliquée sur les routes départementales à la demande du conseil général, qui bénéficiait des sommes ainsi générées. Il a ajouté que le choix technologique satellitaire semblait pour l'instant le meilleur.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

En préalable à son intervention, M. Claude Biwer, rapporteur, a rappelé qu'un travail complémentaire à celui de la mission d'information était en cours de rédaction sous la forme d'un rapport sur le désenclavement des territoires, réalisé dans le cadre de la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire (DADDT).

Il a estimé en effet que si la mission d'information parvenait à proposer des recettes nouvelles, il était tout aussi important que celles-ci financent des projets bénéficiant à l'ensemble des territoires, comme la DADDT devrait le préconiser.

S'agissant plus précisément du rapport de la mission d'information, il a fait valoir que pour garantir une recette de trois milliards d'euros, il était prudent d'explorer des pistes de substitution dans l'hypothèse où le budget général de l'Etat n'interviendrait pas suffisamment et où la redevance poids lourds serait, dans un premier temps au moins, limitée aux seules routes nationales.

Après avoir rappelé, au titre de ces solutions subsidiaires, la proposition d'un relèvement des péages ferroviaires à l'occasion de leur modulation ou l'augmentation de la part des amendes de circulation, il a présenté deux autres sources de financement de substitution envisagées par le rapport : la taxation des plus-values foncières et la création d'une taxe additionnelle sur les assurances des automobiles.

Constatant que la construction d'une infrastructure, telle une gare de ligne à grande vitesse ou une sortie d'autoroute, avait pour effet de donner plus de valeur aux terrains et aux immeubles situés à proximité, il a estimé logique que son financement soit partiellement assuré par ceux qui en bénéficient. Cette captation d'une partie des plus-values foncières devrait pouvoir profiter aussi bien au budget de l'Etat que de l'AFITF ou des collectivités territoriales. Cette mesure est déjà mise en oeuvre dans les pays anglo-saxons ou au Japon, la taxation de la rente foncière représentant dans ce dernier pays entre 30 % et 75 % du chiffre d'affaires des compagnies gestionnaires des lignes ferroviaires. En France même, il existe déjà un système de taxation des terrains rendus constructibles, institué en 2006 par la loi dite « Engagement national pour le logement ».

Sur ce point, M. Claude Biwer, rapporteur, a fait valoir que sa préférence personnelle irait idéalement à une réévaluation générale des bases d'imposition locales afin de tenir compte de l'appréciation de certains terrains et de certaines constructions, ce qui est d'autant plus juste que cela profiterait aux collectivités qui financent plus de 35 % des infrastructures de transport au niveau national.

a présenté les propositions relatives à la taxation des plus-values foncières, tout en reconnaissant qu'elles soulevaient plusieurs questions pratiques. Il a cependant indiqué que le Gouvernement avait bien compris que la mission sénatoriale était très attachée à ce sujet et que, dès lors, un dispositif technique devrait être prochainement proposé, permettant de dégager une recette de quelques dizaines de millions d'euros.

S'agissant de la création éventuelle d'une nouvelle taxe spéciale sur les contrats d'assurance des automobiles, M. Claude Biwer, rapporteur, a commencé sa présentation en indiquant que cette proposition avait été le point politique le plus sensible du rapport, et ce pour deux raisons :

- d'une part, ce projet de taxe représente la recette la plus importante étudiée par le rapport. Une taxe moyenne de 40 euros par an sur les 30 millions de véhicules français rapporterait 1,2 milliard d'euros et permettrait de boucler le besoin de financement de l'AFITF;

- d'autre part, cette proposition de substitution a été rejetée par deux des rapporteurs (MM. Michel Billout et Daniel Reiner), malgré le soutien de la majorité de la mission d'information. Il a précisé que cette divergence d'opinion figurait dans le rapport écrit sous la forme d'une contribution des rapporteurs au nom de leur groupe politique respectif.

En revanche, M. Claude Biwer, rapporteur, a tenu à rappeler l'intérêt de ce prélèvement nouveau, qui pourrait permettre à l'AFITF de tenir les engagements du Grenelle de l'environnement en l'absence d'autres financements pérennes. Il a fait valoir que cette taxe devrait constituer un prélèvement écologique, en termes tant de recettes que de dépenses. S'agissant des modalités de prélèvement, elle serait proportionnelle aux émissions de CO2 et représenterait environ 20 euros pour un véhicule peu polluant et 60 euros pour les véhicules les plus polluants, soit l'équivalent d'un plein d'essence par an. Quant aux dépenses, il s'agirait de financer les projets supplémentaires issus du Grenelle de l'environnement qui concernent en priorité les projets ferroviaires et fluviaux.

Il a terminé en insistant sur l'indispensable rigueur dans la programmation de projets, contrepartie de l'effort financier supplémentaire que la Nation consentirait au travers du prélèvement des nouvelles recettes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

a indiqué qu'il n'y avait pas eu de consensus au sein de la mission au sujet de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance automobile, proposition dont il est l'auteur. Rappelant que l'endettement de la France représente 65 % de son produit intérieur brut et que le besoin de financement d'infrastructures de transport, notamment en matière de voies navigables (liaison Rhin-Rhône), était considérable, il a estimé que cette mesure était la seule susceptible de boucler le financement des projets issus du Grenelle de l'environnement. En effet, grâce à une large assiette d'environ 30 millions de véhicules légers, une taxe de 40 euros en moyenne sur les contrats automobiles génèrerait approximativement 1,2 milliard d'euros. Il a considéré que cette contribution de 40 euros serait modique, voire indolore, car elle représente à peine un plein de carburant ou la somme à payer pour effectuer 300 à 400 kilomètres sur une autoroute.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

a insisté sur la nécessité de faire évoluer les normes techniques des infrastructures dans le sens d'une plus grande économie, prenant à ce titre l'exemple de l'autoroute A29 entre le Pont de Normandie et Amiens. A cette fin, il a estimé indispensable que soient assouplies les règles des appels d'offres aujourd'hui imposées aux collectivités. S'agissant des infrastructures ferroviaires, il s'est inquiété de la situation de RFF qui a dû, en 2007, se contenter d'une stabilisation du produit des redevances qui lui sont versées. Il a en outre estimé indispensable d'accélérer le programme de regénération du réseau par un effort massif et rapide, prenant sur ce point l'exemple de la Suisse. Concernant la redevance sur les poids lourds, il a marqué sa préférence pour le système satellitaire et s'est demandé si, dans tous les cas, la redevance d'usage ne pourrait pas remplacer complètement l'actuelle taxe à l'essieu afin que les transporteurs français ne soient pas désavantagés comparativement à leurs concurrents étrangers qui utilisent largement nos infrastructures routières sans avoir à s'acquitter de cette taxe. Il a en outre estimé que l'extension de la redevance poids lourds au réseau autoroutier concédé était tout à fait défendable face à la Commission européenne, dans la mesure où ce prélèvement à vocation écologique devait bien être distingué du péage autoroutier, lequel vise pour sa part au remboursement des frais de construction et d'entretien de l'autoroute. Il a espéré que la présidence française sera effectivement mise à profit sur ce point, dans la mesure où, de toutes façons, la mise en place progressive de la redevance poids lourds ne débuterait pas en 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de René Beaumont

Puis M. René Beaumont, après avoir indiqué qu'il partageait l'opinion de M. Charles Revet concernant la taxe à l'essieu, a souhaité revenir sur trois points :

- d'abord, il a vivement regretté l'annulation du projet de Canal Rhin-Rhône et la disparition du financement qui lui avait été associé, alors qu'une voie de liaison fluviale entre le Rhône, le Rhin et la Saône demeure toujours aussi indispensable au niveau européen ;

- ensuite, il a considéré que le versement aux conseils généraux de la redevance poids lourds perçue sur les routes départementales était une question majeure, dans la mesure où le réseau départemental s'était fortement agrandi du fait de la récente décentralisation et qu'on pourrait aussi imaginer que l'AFITF bénéficie d'une partie du produit perçu ;

- enfin, il en a appelé à l'intervention régulatrice de l'Etat afin d'éviter des situations telles que celle actuellement rencontrée sur la route Centre-Europe Atlantique, rappelant qu'en l'espèce, un conseil général avait décidé d'interdire la circulation des poids lourds dans un sens, ce qui occasionnait un important report de trafic sur le département voisin, inacceptable pour la vie quotidienne de ses habitants.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Repentin

a estimé que cette mission d'information n'aurait pas été nécessaire si l'Etat n'avait pas cédé ses parts dans le capital des sociétés autoroutières. Rappelant le soutien du groupe socialiste au gouvernement de M. Raffarin qui refusait cette vente, il a regretté la décision du gouvernement de M. de Villepin de céder ses actifs à un prix attractif, privant l'AFITF de ressources importantes. Il a déploré en outre l'absence de participation de l'Etat au financement des infrastructures de transport. S'associant aux conclusions des rapporteurs, il s'est déclaré favorable à un champ d'application le plus large possible de la redevance poids lourds. Concernant l'application de cette redevance aux routes départementales, il a souhaité, à l'instar de M. Beaumont, que l'AFITF bénéficie d'une partie des sommes ainsi collectées. Il a encouragé le Gouvernement français, lors de la prochaine présidence de l'Union européenne, à faire évoluer la directive dite « Eurovignette ». La France étant le pays d'Europe où le nombre de poids lourds étrangers en transit est le plus élevé, il serait juste que ceux-ci participent à l'effort du pays en matière d'infrastructures de transport. Il a souhaité par ailleurs que l'AFITF puisse davantage bénéficier du produit des amendes forfaitaires majorées.

Il s'est en revanche opposé à l'idée de créer une taxe spéciale sur les contrats d'assurance automobile pour trois raisons. Tout d'abord, la presse ne manquerait pas de mettre cette proposition en regard de l'effet d'aubaine dont ont bénéficié, il y a trois ans, les sociétés privées concessionnaires d'autoroute. Ensuite, cette mesure porterait atteinte au pouvoir d'achat des Français, alors que l'automobile représente une dépense contrainte égale aujourd'hui à 12% du budget des ménages. Enfin, elle risquerait de renforcer le nombre d'automobilistes qui conduisent sans assurance, alors que, selon le ministère de l'intérieur, plusieurs centaines de milliers de personnes circulent d'ores et déjà dans l'illégalité.

Il a ajouté que deux pistes de réflexion étaient à approfondir. Tout d'abord, il n'est pas évident que seule l'AFITF doive bénéficier des plus-values foncières liées aux infrastructures de transport, car les collectivités territoriales financent un grand nombre de projets d'urbanisation et de logements sans aide réelle de l'Etat. Ensuite, il a rappelé que la France était la principale destination touristique au monde et qu'à ce titre, une contribution pourrait être spécifiquement demandée aux touristes. Par exemple, les cars de voyageurs ou les véhicules particuliers empruntant, dans les zones de montagne ou sur le littoral, des routes volontairement surdimensionnées pour contenir le flot touristique saisonnier, devraient payer une contribution particulière aux collectivités territoriales chargées d'assurer la construction et l'entretien de ces voies. Il a conclu en déclarant que le groupe socialiste adopterait ce rapport avec les réserves qui viennent d'être évoquées et qui lui sont annexées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

a estimé que le maillage routier n'était pas aussi satisfaisant que ce que les rapporteurs affirmaient. La politique de désenclavement en général demeure absolument indispensable pour accroître la croissance économique et le bien-être des individus. Regrettant l'abandon du projet du canal fluvial qui devait desservir son département, il s'est associé aux remarques de M. Charles Revet pour dénoncer les nombreuses contraintes très onéreuses auxquelles sont soumis les maîtres d'ouvrage. Il s'est dit favorable à la redevance poids lourds, d'autant que son département connaît un transit international important. Rappelant que les lois de décentralisation avaient dévolu aux départements des routes, auparavant nationales, qui suivent très souvent un tracé parallèle aux autoroutes, il a considéré indispensable d'élargir le champ d'application de la redevance poids lourds aux routes départementales structurantes pour éviter les effets de report. Quant à l'éventuelle affectation à l'Etat d'une partie des recettes de la redevance poids lourds sur les routes départementales, il a estimé que l'Etat devait au préalable respecter les engagements financiers envers les collectivités territoriales. Pour contribuer au financement de l'AFITF, il a défendu l'idée d'une taxe spéciale sur les billets TGV et sur les billets d'avion pour l'international, estimant que leurs prix de vente étaient relativement faibles alors que les voyageurs concernés étaient, en règle générale, des personnes dont le pouvoir d'achat est supérieur à la moyenne nationale. Favorable à l'idée d'une taxation des plus-values foncières liées aux infrastructures de transport, il a tenu à souligner que les collectivités territoriales bénéficiaient déjà, à moyen et long termes, de cette manne financière, au travers de la taxe d'habitation, de la taxe sur le foncier non bâti, de la taxe professionnelle et, plus généralement, des créations d'emploi générées par ces nouvelles infrastructures.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

s'interrogeant sur l'objet du rapport d'information, s'est dit étonné de constater qu'il était plus question du financement des infrastructures de transport que de leur organisation, notamment en Ile-de-France. Il a souhaité connaître le sentiment des acteurs de ce dossier, notamment les transporteurs routiers indépendants. Il a tenu à s'associer au propos de M. Thierry Repentin et a demandé que l'Etat fasse systématiquement des économies dans son budget lorsqu'il exige une nouvelle contribution de la part des Français. Rappelant que le budget de l'AFITF était pratiquement égal au budget des investissements dans les transports franciliens, il a regretté que l'attention exclusive accordée à l'AFITF ait exclu de facto du rapport de la mission la question des transports en Ile-de-France. Finalement, il a estimé que le rapport n'avait étudié que la moitié de la problématique des transports et reposait sur une vision fragmentée, alors que l'approche de la mission aurait dû être globale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

a déclaré que la mission était consciente de ces difficultés, mais que les contraintes de calendrier avaient contraint les rapporteurs à réduire le périmètre du rapport.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémy Pointereau

a souscrit aux propos de M. Philippe Dominati sur le thème du rapport de la mission. Il a considéré que le maillage autoroutier n'était pas satisfaisant sur l'axe est-ouest. Concernant les TGV, le Grenelle de l'environnement s'est engagé à construire de nouvelles lignes pour améliorer l'aménagement du territoire et désenclaver de nombreuses régions du centre de la France, comme l'Auvergne ou le Limousin. Il a indiqué que l'intermodalité ne serait efficace que si le maillage du réseau ferroviaire était dense et continu. Il s'est déclaré opposé à de nouvelles taxes sur les transporteurs français, qui sont déjà lourdement pénalisés par de nombreuses contraintes financières comme la taxe à l'essieu ou les obligations annuelles du contrôle technique. Quant à la taxe spéciale sur les contrats d'assurance, il a estimé que les automobilistes étaient déjà lourdement mis à contribution, notamment au travers de la TIPP. Il a conclu en souhaitant que d'autres pistes de financement de l'AFITF soient explorées, comme la modulation des péages ferroviaires ou la contribution des sociétés d'autoroutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

répondant à MM. Rémy Pointereau et Philippe Dominati, a indiqué que la planification des infrastructures de transport n'était pas, à proprement parler, l'objet du rapport, mais que ce thème avait cependant été abordé. Quant à la question de la redevance poids lourds, il a déclaré que la commission des affaires économiques pourra exprimer à nouveau ses points de vue lorsque le projet de loi sera inscrit à l'ordre du jour parlementaire. Il a précisé que les sociétés concessionnaires d'autoroutes risquaient certes de bénéficier d'un effet d'aubaine si elles étaient exclues du champ d'application de la redevance, mais que l'Etat bénéficierait en tout état de cause d'une partie de cette hausse de leurs chiffres d'affaire au travers des taxes actuelles.

Répondant à M. Bailly, il a indiqué qu'il reviendra au conseil général de déterminer les routes départementales assujetties à la redevance poids lourds. Il a conclu en rappelant que toutes les opinions exprimées par les commissaires étaient intégrées dans le rapport.

La commission des affaires économiques a adopté le rapport de la mission d'information sur les transports terrestres, les groupes UC-UDF, socialiste et communiste votant en sa faveur.