La séance est ouverte à neuf heures quarante.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 457, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les délais de paiement excessivement longs mis en œuvre par les organismes paritaires collecteurs agréés, les OPCA, pour le règlement des factures des organismes de formation.
La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a pour objet d’améliorer la situation économique des entreprises, notamment en réduisant les délais de règlement au bénéfice des PME à quarante-cinq jours fin de mois ou à soixante jours à compter de la date d’émission de la facture
Or, selon les dernières enquêtes réalisées par la Fédération de la formation professionnelle auprès de ses adhérents, ces délais de paiement vont de soixante-quinze à cent vingt jours. Ils sont, à l’évidence, contraires aux prescriptions de la loi précitée.
Il est important de souligner que la facture des prestations auprès des OPCA ne peut se faire qu’à prestation échue, qui, dans le secteur de la formation, s’étale très souvent sur plusieurs mois, voire sur quelques années. Les organismes de formation, très majoritairement des PME, doivent donc consentir des efforts de trésorerie importants.
Ces contraintes non seulement pèsent sur la marge de manœuvre financière des organismes de formation, dont la trésorerie est fragilisée, mais également agissent comme un frein sur leurs investissements en matière de recherche et de développement. Les délais de paiement actuellement pratiqués sont donc particulièrement pénalisants pour ces entreprises.
De plus, il convient d’insister sur le fait que les organismes de formation sont tenus d’appliquer les nouveaux délais de paiement à leurs fournisseurs et se trouvent parallèlement confrontés à une incertitude sur le régime des délais de règlement qui leur est applicable en leur qualité de prestataires de services des OPCA.
C’est pourquoi je souhaite savoir si Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi entend donner des instructions à son administration, de telle sorte que cette dernière puisse confirmer que les délais de paiement édictés par la loi de modernisation de l’économie sont applicables au paiement des factures des organismes de formation par les OPCA.
Monsieur Carle, votre question est pertinente. Le Gouvernement partage votre analyse.
En l’état actuel des textes, l’OPCA, qui n’est qu’un intermédiaire entre l’organisme de formation et l’entreprise, n’est, à ce titre, pas soumis aux règles fixées par la loi de modernisation de l’économie concernant les délais de paiement.
Le Gouvernement est tout à fait sensible à votre argumentaire et considère que ce rôle, extrêmement utile, d’intermédiaire des OPCA ne doit pas avoir pour conséquence de fragiliser la trésorerie des organismes de formation, qui, comme vous l’avez dit, sont avant tout des PME.
Les partenaires sociaux intervenant dans le champ de la formation professionnelle ont, de ce point de vue, recommandé aux OPCA, le 7 novembre dernier, de « réduire les délais de paiement des actions de formation qui ne devraient pas excéder un mois à partir du moment où les justificatifs ont été présentés ». Cela va dans le sens souhaité par le Gouvernement et par vous-même, monsieur le sénateur.
Dès lors, il nous semble tout à fait possible que, lors du débat parlementaire qui va prochainement s’engager sur la réforme de la formation professionnelle, ce sujet puisse de nouveau être abordé. Je ne doute pas que vous y apporterez votre utile contribution.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des précisions que vous m’avez apportées.
Le Gouvernement, comme les partenaires sociaux, qui sont, de façon paritaire, gestionnaires des OPCA, souhaite que les délais de paiement dont il est question soient réduits, de façon à ne pas hypothéquer la trésorerie de petites entreprises. Cette volonté va dans le bon sens.
Au-delà des simples recommandations, il serait utile de fixer ces délais de paiement dans une loi. Nous le ferons lors de l’examen du projet de loi que Laurent Wauquiez nous présentera d’ici à quelques semaines. Soyez assurée, madame la secrétaire d’État, que je prendrai part à ce débat.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 471, adressée à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.
Madame la secrétaire d'État, lorsque, voilà quelques mois, nous avons examiné la loi de modernisation de l’économie instituant le statut d’auto-entrepreneur, nous avons évoqué à de nombreuses reprises le risque de concurrence déloyale que ce régime pourrait faire peser, notamment sur les artisans.
Nos inquiétudes sont toujours d’actualité, puisque cette loi n’a ni abrogé ni modifié le décret du 2 avril 1998 relatif à la qualification artisanale et au répertoire des métiers.
Il semblerait que certains auto-entrepreneurs utilisent abusivement la qualification d’artisan, au risque de banaliser celle-ci. Les chambres d’artisanat sont extrêmement inquiètes. Elles avaient d'ailleurs exprimé leur préoccupation lors du vote de ce statut.
Il est naturellement possible de demander aux services de l’État de vérifier que les auto-entrepreneurs disposent des qualifications professionnelles nécessaires, ce qui serait aussi utile à la clientèle.
Il est également envisageable de saisir la justice pour usage irrégulier du terme « artisan ». Même si je ne sais pas exactement quelle protection s’attache à cette qualification, nous ne pouvons, au motif qu’il existe un statut d’auto-entrepreneur, laisser des gens exercer un métier sous l’appellation d’artisan alors qu’ils ne disposent pas des qualifications requises !
Je souhaiterais donc savoir si une politique de communication active est prévue afin de promouvoir et de défendre la qualification dans le secteur de l’artisanat, qui est le premier employeur de France, selon la formule consacrée et illustrée par la publicité.
Mme la secrétaire d'État acquiesce.
Je m’interroge aussi sur les mesures qui pourraient être adoptées afin de protéger les artisans dits qualifiés.
Madame la sénatrice, vous attirez l’attention du Gouvernement sur les risques de distorsion de concurrence à l’égard des artisans, liés au développement très rapide, et d'ailleurs très heureux, du régime d’auto-entrepreneur, lequel concerne, d'ores et déjà, quelque 90 000 personnes.
Votre question porte spécifiquement sur les distorsions de concurrence qui pourraient résulter d’abus de qualifications. Je ne reviendrai pas sur les autres problèmes posés par le statut de l’auto-entrepreneur, qui ont déjà fait l’objet de nombreux débats et auxquels le Gouvernement a apporté des réponses très claires.
Les simplifications qui sont accordées à l’auto-entrepreneur n’empêchent pas celui-ci d’être tenu aux obligations de droit commun en matière de qualification et d’assurance professionnelles, selon l’activité exercée, et sans qu’il ne puisse – j’y insiste ! – obtenir aucune dispense.
L’auto-entrepreneur qui opte pour la non-immatriculation n’est donc pas exempt de l’obligation de qualification professionnelle.
À cet égard, je vous rappelle que le contrôle de la qualification pour les professions concernées, notamment les artisans, n’intervient pas lors de l’immatriculation : il est effectué a posteriori par les agents de la concurrence et de la répression des fraudes ou par les officiers et les agents de police judiciaire.
Il en va exactement de même pour les auto-entrepreneurs : ceux qui souhaitent se prévaloir de la qualité d’artisan doivent impérativement respecter les conditions de droit commun prévues par le décret n° 98-247 du 2 avril 1998.
En matière de communication, puisque vous avez soulevé cette question, madame la sénatrice, je rappelle que le site dédié à ce nouveau régime, d'ailleurs extrêmement consulté et dont l’adresse est « www.lautoentrepreneur.fr », ainsi que les brochures d’information destinées aux auto-entrepreneurs diffusent la liste des activités artisanales réglementées et rappellent l’obligation légale de qualification qui pèse sur l’auto-entrepreneur comme sur tout autre entrepreneur du même secteur.
Le Gouvernement continuera de veiller à communiquer clairement sur ces obligations de qualification professionnelle artisanale, ainsi que, bien entendu, sur leur respect par les autorités administratives compétentes.
Madame la secrétaire d'État, nous ne pouvons que nous féliciter du succès remporté par le nouveau statut de l’auto-entrepreneur, qui est très souple et dont nous avons largement débattu ici.
Toutefois, il reste à régler le problème du contrôle a posteriori et à trouver un moyen d’assurer le respect de la qualification d’artisan, au bénéfice à la fois de la profession qualifiée et des usagers.
Je vous remercie de votre réponse.
La parole est à M. Alain Fouché, auteur de la question n° 452, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
Madame la secrétaire d'État, ma question concerne l’activité vétérinaire dans les parcs zoologiques de France. Comme vous le savez, il s'agit d’un secteur économique et touristique important et sensible.
Je souhaite appeler l’attention du ministre de l’agriculture sur la directive 92/65/CEE, qui, à ce jour, n’est toujours pas traduite en droit français.
Ce texte de 1992 est essentiel pour les parcs zoologiques, puisqu’il énonce les conditions de police sanitaire régissant les échanges intracommunautaires d’animaux et prévoit la mise en place d’un agrément sanitaire pour les établissements respectant les conditions sanitaires définies.
Madame la secrétaire d'État, la transposition de cette directive permettrait d’instaurer, via l’agrément, une forme de reconnaissance de la qualité d’un établissement en matière de politique sanitaire. Par conséquent, elle faciliterait les échanges intracommunautaires d’animaux, qui sont indispensables à la gestion des programmes d’élevage d’espèces menacées.
Aussi, je souhaiterais savoir si la transposition de la directive 92/65/CEE est envisagée prochainement, comme le souhaitent très vivement, bien sûr, les professionnels.
Monsieur le sénateur, le ministre de l’agriculture et de la pêche, Michel Barnier, qui se trouve présent à Bruxelles ce matin, m’a chargée de vous apporter les éléments de réponse suivants.
Vous avez clairement souligné l’intérêt de transposer cette directive concernant les parcs zoologiques, et je n’y reviendrai pas.
Je suis en mesure de vous annoncer que, comme vous le souhaitez, la transposition de la directive 92/65/CEE du Conseil est en cours. Plus précisément, un projet de texte a recueilli le 5 mars dernier – votre question vient donc à point ! – l’avis favorable de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, AFSSA, Le texte doit maintenant recevoir l’aval du service des affaires juridiques du ministère de l’agriculture et de la pêche, puis être soumis à l’avis des organisations professionnelles concernées, qui se prononceront sans doute avec diligence, puisqu’elles attendent la transposition de cette directive avec impatience.
La publication et l’entrée en vigueur de ce texte devraient donc se faire rapidement, à la suite de ces deux prochaines étapes.
Madame la secrétaire d'État, cette réponse me satisfait totalement. Je vous en remercie !
La parole est à Mme Mireille Schurch, auteur de la question n° 453, transmise à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Madame la secrétaire d'État, ma question porte sur les mesures qui favoriseraient la formation des salariés mis au chômage partiel.
Avec plus de 28 % de chômeurs supplémentaires en six mois, la crise a foudroyé l’emploi dans le département de l’Allier. Si les chiffres sont très mauvais dans toute la France, ils sont catastrophiques dans le département dont je suis l’élue.
Les entreprises, particulièrement celles qui sont liées au secteur de l’automobile, ont massivement recours au chômage partiel. Sont concernés les salariés de CGR à Saint Yorre, de Halberg Précision à Cusset, de Potain Manitowoc à Moulins, de PSA Peugeot à Dompierre-sur-Besbre, et, pour le bassin montluçonnais, de Diamecans, Brealu, Goodyear, Dunlop, Amis et bien d’autres.
Plus de 2 000 salariés se trouvent visés par ces mesures de chômage partiel, qui se traduisent par une baisse de salaire mensuel comprise entre 90 et 250 euros selon les cas et estimée à 200 euros en moyenne.
À l’heure où il y a urgence à réfléchir à un changement radical de l’économie, à l’heure où tout le monde s’accorde à considérer que la relance ne peut venir que de la formation, de la recherche et de l’innovation, il me semble opportun de réorienter la production afin que celle-ci réponde aux besoins de la population et soit écologiquement supportable.
Tout doit être mis en œuvre pour que le chômage partiel ne soit pas du temps perdu et moins rémunéré et pour que, au contraire, il soit considéré comme un moment de production intellectuelle au sein de l’entreprise.
Durant des décennies, les dirigeants des entreprises ont délaissé l’investissement dans l’outil de travail, la formation des salariés et la recherche sur notre territoire. Ils ont contraint les salaires pour verser des dividendes à des actionnaires toujours plus exigeants. À cet égard, le cas de la société Continental est symptomatique.
Pourtant, la formation des salariés, qu’elle soit technique, qu’elle porte sur la qualité, la sécurité ou les modes de production, est bénéfique pour les salariés eux-mêmes, dès lors qu’elle s’inscrit bien dans une logique de parcours et permet en même temps d’offrir d’importantes perspectives d’avenir aux entreprises.
Ainsi, une meilleure adaptation aux postes de travail aurait permis à l’entreprise Goodyear Dunlop de Montluçon de diminuer les rebus qu’elle chiffre à plus de 4 millions d’euros en 2008.
Toutefois, pour l’instant, le « coût » d’une heure chômée pour l’entreprise est bien moindre que celui d’une heure de formation. On a calculé que, dans certains cas, il représentait jusqu’à cinq fois moins. Voilà le frein !
Se former plutôt que chômer, telle est la demande forte et justifiée des salariés. Pourquoi le Gouvernement n’aiderait-il pas les entreprises qui privilégient la formation en lieu et place du chômage partiel ?
Les moyens affectés dans le cadre du plan de relance pourraient être utilisés, sous le contrôle de la direction du travail, à la mise en place de formations négociées au sein de l’entreprise.
Ainsi, madame la secrétaire d'État, ne pourriez-vous envisager des mesures visant à rendre le recours à la formation plus attractif pour l’entreprise que l’inactivité du chômage partiel, le salarié percevant alors une rémunération égale au temps de production classique ?
En outre, dans l’immédiat, comment soutiendrez-vous l’accélération de la mise en œuvre du droit individuel à la formation pour les salariés qui peuvent en bénéficier, qui en ont fait la demande dans ces entreprises et qui, pour l’instant, n’ont toujours pas reçu de réponse ?
Madame la sénatrice, tout d'abord, je voudrais vous rappeler les améliorations qui ont été apportées récemment au système d’indemnisation du chômage partiel, à la demande du Président de la République et du Premier ministre.
Ainsi, le niveau de l’indemnisation est passé de 50 % à 60 % de la rémunération brute, et nous avons relevé sensiblement son plancher. En matière financière, l’État a, quant à lui, augmenté de près de 50 % le montant de son aide, en particulier en prenant mieux en compte la situation des PME.
S’agissant de l’accès à la formation professionnelle, sur lequel vous interrogez plus spécifiquement le Gouvernement, les dispositions législatives et réglementaires actuelles permettent, comme vous le souhaitez, d’articuler l’activité partielle et la formation, selon deux modalités.
Premièrement, les salariés placés en position d’activité partielle peuvent, dans le même temps, suivre des formations dites « hors temps de travail », telles que le droit individuel à la formation, que vous avez évoqué, ou le plan de formation pour le développement des compétences.
Le salarié peut y trouver un intérêt, puisqu’il voit son allocation de chômage partiel majorée de l’allocation de formation. Quant à l’entreprise, elle continue à percevoir les allocations versées par l’État au titre du chômage partiel.
Deuxièmement, les entreprises peuvent proposer aux salariés des formations tendant à développer l’« employabilité » – pardonnez-moi ce terme, qui n’est pas très élégant ! – de ces derniers, au titre du plan de formation ou de la période de professionnalisation.
Dans cette position, le salarié voit sa rémunération maintenue. L’entreprise, quant à elle, préserve les compétences de ses personnels dans la perspective d’une reprise économique.
Au-delà des aspects juridiques, il s’agit avant tout de mettre en place les outils de financement opérationnels qui permettront de répondre de manière réactive aux demandes des entreprises comme des salariés, ensuite, compte tenu de l’ampleur inédite de la crise, d’être innovant et d’imaginer des solutions différentes de celles qui ont pu être choisies dans le passé.
S’agissant des financements, des solutions ont déjà été trouvées. Une convention sera signée dans les tout prochains jours entre l’État et le fonds unique de péréquation, géré par les partenaires sociaux : 130 millions d’euros seront alors débloqués pour former les personnes à titre préventif et en complément de l’activité partielle. Parallèlement, 75 millions d’euros supplémentaires seront mobilisés par l’État pour réaliser des actions de formation au profit des entreprises ou dans les secteurs les plus touchés par la crise.
Quant à la mise au point des modalités opérationnelles, le Gouvernement y travaille en lien étroit avec les partenaires sociaux. Il est essentiel que, sur ces problématiques touchant à la formation en temps de crise ainsi que, de manière plus générale, au maintien de nos capacités de production, et au moment où les partenaires sociaux viennent de conclure un accord à l’unanimité sur la formation, l’État et les organisations syndicales et patronales puissent collectivement continuer à discuter pour trouver des solutions innovantes qui, je l’espère, pourront s’appliquer avec succès dans les bassins d’emplois que vous avez évoqués, madame la sénatrice.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, dont je ferai bien entendu part à tous les salariés concernés, qui attendent impatiemment d’occuper ce temps chômé.
J’ai cru comprendre que des mesures innovantes allaient être mises à leur disposition. Nous serons attentifs à leur application sur le plan local.
La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier, auteur de la question n° 411, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Ma question concerne le développement de l’énergie éolienne.
Depuis quelques années, les paysages de la France commencent à changer, avec le développement parfois intensif des éoliennes, qui, à l’instar de ce qui se fait dans certaines zones de l’Europe du Nord, se multiplient un peu partout. Je pense à certains sites qui me sont les plus familiers, notamment à la zone, jusque-là sévère et sauvage, allant de l’Auvergne au Languedoc, où, semble-t-il, on a tendance à implanter des éoliennes en grand nombre.
Ma région, plus particulièrement mon département, l’Aveyron, n’échappe pas à cette règle, ce qui conduit le public à se poser un certain nombre de questions relatives, tout d’abord, à la santé des humains et des animaux, compromise par le bruit et les vibrations, ensuite, à la protection des paysages concernés, enfin, au réel intérêt que présentent pour l’énergie les éoliennes elles-mêmes sur des sites où, pourtant, d’autres formes de production non polluante ont, depuis longtemps, fait leurs preuves.
Ainsi, dans l’Aveyron, l’hydroélectricité apporte une importante contribution à la production nationale, puisqu’elle correspond à peu près à la moitié de celle d’une centrale nucléaire. Or, qu’on le veuille ou non, une éolienne ne fonctionnant en moyenne que quatre-vingt-dix jours par an sera toujours moins opérante qu’un barrage.
J’ai bien noté, comme nous tous ici, que le Grenelle de l’environnement, de même que le paquet « climat-énergie », prévoit une forte augmentation de la production d’énergie renouvelable à l’horizon 2020, de façon qu’elle atteigne 20 % à 23 % de la consommation totale d’énergie française. Je m’en félicite.
J’ai bien noté aussi que, dans ce projet, l’éolienne doit jouer un rôle important.
Cependant, je relève deux difficultés. D’une part, la France ne fabriquant pas d’éoliennes, il faut les acheter à l’étranger, ce qui n’est pas très bon pour notre balance commerciale. D’autre part, le Conseil d’État ayant annulé le prix de rachat de l’électricité éolienne, on ne sait pas de combien, à l’avenir, sera la facture globale, ni quelle sera la charge pesant sur le contribuable avec un taux de retour sur investissement allant jusqu’à 40 % pour les opérateurs.
Dès lors, je reste dubitative face à l’ambition, affichée par certains, de voir tourner, à l’horizon de l’année 2020, quelque 15 000 à 20 000 éoliennes en France.
Quoi qu’il en soit, sachant que, aujourd’hui, pour le seul département de l’Aveyron, 98 éoliennes sont déjà autorisées, que 169 sont en construction et 350 en projet, mes compatriotes s’inquiètent.
C’est pourquoi je tiens à poser une triple question.
De quelle manière les pouvoirs publics pourraient-ils, à l’avenir, faire en sorte que soit encouragée la création de « fermes » d’éoliennes, de préférence au « mitage », hélas trop répandu de nos jours ?
De quelle manière est-il encore possible de mettre les éoliennes dans la catégorie des installations classées pour la protection de l’environnement ?
Enfin, de quelle manière est-il possible d’assurer la maîtrise de l’implantation des éoliennes à travers un schéma départemental et régional à l’élaboration duquel contribueraient les associations d’usagers et de défenseurs de l’environnement ?
Je vous remercie à l’avance, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse.
Madame le sénateur, comme vous l’avez fort bien rappelé, il a été décidé, à l’issue des discussions du Grenelle de l’environnement, une augmentation de 20 millions de tonnes équivalent pétrole de la production d’énergie renouvelable à l’horizon 2020.
Cet objectif ne pourra être atteint sans un fort développement de l’éolien : on estime que cette énergie représente entre un quart et un tiers du potentiel de développement des énergies renouvelables dans notre pays. Il s’agit donc, comme vous l’avez très bien compris, de passer à environ 20 000 mégawatts à l’horizon 2020, soit une multiplication par dix du parc en termes de puissance. Un tel parc devrait être constitué d’environ 8 000 éoliennes.
L’énergie éolienne est l’une des énergies renouvelables les plus compétitives, et dont les perspectives de développement sont très prometteuses. Le développement de l’éolien contribue non seulement à la réduction des émissions de C02, mais aussi à notre indépendance énergétique. Le parc éolien français devrait permettre de réduire les émissions françaises de 1, 65 million de tonnes de CO2 en 2008, et de 16 millions de tonnes en 2020.
Pour ces raisons, le Gouvernement réaffirme son soutien au développement de l’énergie éolienne.
Pour autant, il souhaite favoriser un développement à haute qualité environnementale des énergies renouvelables. Ainsi, le développement des éoliennes doit être réalisé de manière ordonnée, en évitant le mitage du territoire – vous l’avez souligné, madame le sénateur –, de sorte à prévenir les atteintes aux paysages, au patrimoine et à la qualité de vie des riverains.
Le Gouvernement entend donc améliorer la planification territoriale du développement de l’énergie éolienne et favoriser la construction de parcs éoliens de taille plus importante qu’actuellement dans des zones préalablement identifiées.
Compte tenu de l’accroissement prévisible de la taille des parcs éoliens, il sera également nécessaire d’améliorer le processus de concertation locale et l’encadrement réglementaire.
Ces orientations ont été confirmées par l’Assemblée nationale et le Sénat lors du vote à la quasi-unanimité, en première lecture, du projet de loi de programmation relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.
Les mesures correspondant à ces orientations seront présentées dans le projet de loi portant engagement national pour l’environnement.
D’ores et déjà, M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, a adressé une circulaire aux préfets de région afin d’entamer cette démarche de planification, en concertation très étroite avec toutes les parties prenantes, selon la méthode définie lors du Grenelle de l’environnement et que vous avez approuvée.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, qui est rassurante, compte tenu de l’anarchie qui règne dans certains territoires en matière de développement de l’énergie éolienne.
Je ferai, pour ma part, très attention à l’inscription des éoliennes au titre des installations classées pour la protection de l’environnement, point sur lequel vous ne m’avez d’ailleurs pas répondu.
Par ailleurs, le recours à l’énergie solaire photovoltaïque se développe très rapidement et de façon très désordonnée, ce qui doit nous amener, là aussi, à faire preuve de la plus grande vigilance, pour que le travail d’aménagement du territoire et le dialogue avec l’ensemble des parties prenantes que vous avez annoncés se déroulent dans les meilleures conditions possible.
La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 438, adressée à M. le secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.
Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur les soutiens attribués aux territoires classés en zone de revitalisation rurale, ou ZRR.
Aux termes de l’article 19 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a été supprimée l’application du dispositif spécifique d’exonération de charges sociales institué par les articles 15 et 16 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux en faveur des associations et organismes d’intérêt général ayant leur siège dans les ZRR. Le bénéfice de ce dispositif a été maintenu pour tous les contrats de travail conclus avant le 1er novembre 2007.
Pour les nouvelles embauches, cette mesure donne lieu à une exonération moins favorable que celle dont bénéficiaient les organismes d’intérêt général en application du dispositif spécifique. Or, ce dernier répondait à l’objectif d’inciter à la création ou au maintien d’emplois et de favoriser le développement des activités associatives, notamment en milieu rural. Son coût n’était pas disproportionné au regard de la situation actuelle de l’économie et de l’emploi.
Cette suppression de l’exonération touche les hôpitaux, les maisons de retraite, les structures d’accueil pour handicapés, les associations d’aide à domicile situés en ZRR. Ces organismes ou établissements devraient, au contraire, me semble-t-il, bénéficier d’un soutien accru.
C’est pourquoi je vous demande si des mesures correctives de compensation ou de soutien peuvent être mises en place, compte tenu des conséquences de plus en plus négatives en matière d’activité et d’emploi de la suppression de la mesure précitée d’exonération.
Dans la même perspective, je souhaite attirer votre attention sur les zones de revitalisation rurale exclues du bénéfice de la prime d’aménagement du territoire, la PAT, et des zonages AFR, aides à finalité régionale, destinées à favoriser le développement économique de zones géographiques réduites.
Ainsi, le département de la Creuse est classé en totalité en ZRR et est traversé par un mince zonage AFR, ce qui aboutit à une concurrence au sein de son territoire. Jusqu’alors intégralement éligible en AFR, il n’était plus couvert, en 2006, que pour 26 % de sa population.
Cette situation suscite l’incompréhension, voire la colère de nombreux maires des communes les plus fragiles confrontées au cumul des handicaps. Ils ont le sentiment d’être poussés sur le bord de la route.
Les ZRR exclues du bénéfice de la prime d’aménagement du territoire et non éligibles aux AFR ne doivent pas devenir des espaces de marginalisation, ni être perçues ainsi.
Face à cette situation, je vous demande si les ZRR, qui sont par définition des territoires prioritaires d’intervention économique, ont encore un sens et demeurent au cœur de la politique d’équilibre et de développement du territoire menée par le Gouvernement.
Monsieur le sénateur, si vous avez des doutes sur le fait que les zones de revitalisation rurale, telles que chacun les connaît, ont un sens et demeurent au cœur de la politique menée par le Gouvernement, je vous rappellerai qu’un tiers des communes de France est classé en ZRR, que 5, 3 millions de nos concitoyens y vivent et qu’au 31 décembre 2008 le département de la Creuse dans son intégralité était classé en ZRR.
Les mesures fiscales, qui font des ZRR de véritables zones franches pour l’installation d’entreprises – zones franches que le président Jean-Claude Gaudin connaît fort bien, pour les avoir mises en place lorsqu’il était ministre de l’aménagement du territoire, de la ville et de l’intégration – sont très importantes, même si elles restent parfois mal connues.
En matière d’impôts sur les sociétés, elles peuvent aller jusqu’à une exonération totale ou partielle pendant quatorze ans pour une entreprise. C’est aussi grâce aux zones de revitalisation rurale que 8 000 entreprises ont bénéficié, en 2007, d’une exonération de taxe professionnelle, compensée par l’État.
Vous l’avez très bien compris, monsieur le sénateur, l’objectif est bien d’attirer et de maintenir, sur les territoires ruraux et les territoires éligibles, des entreprises créatrices d’emplois – c’est essentiel actuellement –, mais aussi des professions libérales et des professionnels de santé. La loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a d’ailleurs renforcé le dispositif d’exonérations fiscales.
II faut aller plus loin dans l’information des bénéficiaires et la qualité de l’instruction locale des demandes par les services de l’État. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé aux préfets, dans une circulaire du 27 mai 2008, « d’être particulièrement vigilants sur la publicité et la mise en œuvre effective de ces dispositions ».
Au-delà, j’attends beaucoup de l’évaluation complète que les inspections vont mener cette année, comme le prévoit d’ailleurs – vous le savez fort bien, monsieur le sénateur – la loi du 23 février 2005. Elle permettra de mettre en évidence les points à revoir pour améliorer l’efficacité de cette loi.
Par ailleurs, la possibilité que vous évoquez, pour certains organismes ou institutions dont le siège social est situé en zone de revitalisation rurale, de bénéficier d’exonérations de charges sociales dues par l’employeur a d’ores et déjà été maintenue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Cette exonération, valable pour les contrats ayant été conclus avant le 1er novembre 2007, s’applique pour les années 2008 et 2009. II est sage de ne pas revenir sur ce dispositif avant de connaître les résultats de son évaluation globale.
Monsieur le sénateur, vous avez également souhaité m’interroger sur la situation particulière du département de la Creuse au regard du zonage des aides à finalité régionale, pour la période allant de 2007 à 2013.
Comme vous le savez, les autorités françaises ont dû élaborer, en 2005 et 2006, la carte des aides à finalité régionale dans des conditions particulièrement difficiles. La Commission européenne a notamment imposé une réduction, à hauteur de 55 %, de la population éligible sur le territoire français.
Le Gouvernement, conscient des difficultés causées par l’étroitesse de ce périmètre, a décidé de constituer une réserve nationale de zonage des aides à finalité régionale, afin de pouvoir répondre aux sinistres économiques d’ampleur susceptibles de survenir sur les territoires
Ainsi, monsieur le sénateur, pour votre département, dans le cadre du plan d’accompagnement des restructurations de la défense, les autorités françaises ont notifié à la Commission européenne, au début du mois de janvier, l’extension du zonage des aides à finalité régionale sur vingt communes, ce qui représente une augmentation du zonage de 50 %. Cette notification est actuellement en cours d’examen par la Commission européenne.
En conclusion, je voudrais souligner que d’autres dispositifs permettent d’aider les entreprises en dehors des territoires éligibles aux aides à finalité régionale. Il s’agit notamment des aides dites de minimis, qui peuvent être attribuées par l’État et les collectivités locales et dont le montant a récemment été augmenté à 500 000 euros par entreprise pour les années 2008 à 2010.
Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État.
Toutefois, je constate que, en raison d’un certain nombre d’initiatives et de décisions qui, j’en conviens, ne relèvent pas du tout de votre secrétariat d’État, la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux perd une partie de sa substance et de son intérêt.
Quant au zonage des aides à finalité régionale, qui est effectivement lié aux directives européennes, la spécificité des zones de revitalisation rurale n’avait pas été, en son temps, véritablement prise en compte. Mais je sais qu’une extension est à l’ordre du jour et j’espère qu’une réponse favorable nous parviendra bientôt à ce sujet.
Je voudrais également vous signaler, monsieur le secrétaire d’État, que nous attendons la mise en œuvre des dispositions que vous avez annoncées à la fin de l’année 2008, dont l’appel à candidatures pour une nouvelle série de pôles d’excellence rurale. Il me semble effectivement que ces pôles constituent un des leviers du développement local.
La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 456, transmise à Mme la secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique.
Monsieur le secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire, je suis très heureux que ce soit vous qui répondiez à mon importante question sur le devenir de nos territoires ruraux.
Je voudrais appeler l’attention du Gouvernement sur les problèmes posés aux collectivités territoriales par la demande, compréhensible et continue, d’augmentation des débits, voire d’accès au très haut débit, et de développement de la mobilité, ce qui nécessitera une mutation technologique des réseaux.
Afin d’éviter une nouvelle fracture numérique et pour maintenir l’équilibre entre les villes et les campagnes, tous les acteurs publics doivent se mobiliser. Sans cela, une grande partie de nos territoires sera mise à l’écart des développements économiques et sociétaux.
Chacun connaît effectivement le rôle des technologies de communication : elles sont sollicitées de toutes parts dans le cadre du développement des territoires et de la satisfaction des besoins sociaux, y compris dans les zones de revitalisation rurale que nous venons d’évoquer. Le Gouvernement en a fait une grande priorité de l’État, qu’il souhaite traiter dans des délais assez courts, ce dont, bien sûr, nous nous réjouissons.
Mais, monsieur le secrétaire d’État, vous savez que les collectivités ont les plus grandes difficultés à résorber leurs zones blanches ou à créer les conditions d’un accès, pour les citoyens, à des services innovants à un prix juste.
Les territoires les moins denses, où les investissements sont les plus coûteux, ont des ressources fiscales faibles, qui ne leur permettent pas d’atteindre des objectifs ambitieux de développement. Les handicaps économiques engendrés par l’absence, sur ces territoires, de réseaux internet à haut et à très haut débit auront pour conséquence, si nous ne faisons pas progresser le dossier, d’aggraver encore les déséquilibres.
Le plan France numérique 2012 a enfin reconnu le haut débit comme une commodité essentielle, au même titre que l’eau ou l’électricité. C’est pourquoi je suggère la création d’un mécanisme de solidarité nationale pour permettre aux initiatives des collectivités le financement de la montée des débits pour tous. Un fonds de péréquation permettrait d’accompagner les collectivités qui se mobilisent déjà et serait utile tant pour le monde rural que pour les citadins sollicitant ces services quand ils viennent à la campagne.
Cette proposition fait partie des réflexions du Conseil économique, social et environnemental, apparaissant dans son rapport du 11 février 2009 sur les conditions pour le développement numérique des territoires.
Nous savons tous qu’en 1936 pour assurer l’électrification des campagnes, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies, la FNCCR, a aidé à la création d’une caisse de compensation pour apporter « une aide de la distribution urbaine prospère à la distribution rurale ». Cette initiative a abouti à la naissance du Fonds d’amortissement des charges d’électrification, le FACÉ, qui assumait 20 % à 30 % des charges des départements résultant des subventions allouées aux collectivités pour des travaux d’électrification rurale.
Cette expérience, qui a été positive, pourrait être transposée à l’aide au développement numérique des territoires, sachant que, dans la situation actuelle, un tel fonds pourrait aussi participer très positivement au plan de relance de notre économie.
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous demander si, d’une part, vous êtes favorable à cette idée et, d’autre part, si tel est le cas, quand on peut espérer sa réalisation, compte tenu de la nécessité d’intervenir très rapidement afin d’anticiper la demande inéluctable d’une montée des débits dans tous les territoires ?
Cette évolution me semble capitale pour assurer le devenir des territoires ruraux et, comme je l’ai indiqué au début de mon intervention, pour éviter une fracture entre le monde urbain et le monde rural.
Vous avez raison, monsieur le sénateur : aujourd’hui, le numérique est à la fois un élément de la compétitivité des territoires et un facteur de cohésion sociale.
Le Gouvernement a saisi le Conseil économique, social et environnemental de cette question relative à la montée en débit des réseaux internet. Sous la plume d’André Marcon, le CESE vient de rendre un rapport, que je juge d’ailleurs excellent par son analyse et par ses propositions.
Dans toute sa diversité, ce rapport a plébiscité le bénéfice attendu d’une telle augmentation des débits pour les Français, particuliers ou entreprises, et pour la libération des usages. Il a également estimé nécessaire la mise en place d’un mécanisme de péréquation, c’est-à-dire d’une nouvelle taxe. Pour moi, celle-ci pourra constituer une bonne solution, si elle est mise au service de projets.
Rappelons d’abord, monsieur le sénateur, qu’elle ne sera plus nécessaire pour l’accès de tous à internet, que le Président de la République a souhaité voir mis en place d’ici à 2012.
Il faut effectivement se féliciter du plan France numérique 2012 du Gouvernement, qui permet l’émergence d’offres internet de plus de 512 kilobits pour moins de 35 euros par mois, matériel inclus, pour tous les Français, et ce dans un délai rapide. Certes, ce seuil de débit minimum devra évoluer, comme d’ailleurs le plan le prévoit, mais les offres seront labellisées par ma collègue Mme la secrétaire d’État chargée de la prospective et du développement de l’économie numérique d’ici au début de l’année 2009.
Par conséquent, la question se pose réellement quant à la montée en débit du réseau et l’espoir de voir toute la France équipée en fibre optique. Il faut prendre la mesure de l’effort considérable qui est devant nous. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, on estime à 40 milliards ou 50 milliards d’euros les investissements nécessaires pour assurer le raccordement de 90 % des foyers en fibre optique.
Il faut donc être ambitieux, mais il faut aussi être réalistes : nous n’aurons pas tout, tout de suite ! Il est normal que les opérateurs entament leurs déploiements par les zones les plus rentables.
La loi de modernisation de l’économie a récemment fixé le cadre juridique du déploiement des réseaux de fibre optique. Elle instaure un droit à la fibre optique et impose, à partir de 2010, que tous les immeubles neufs en soient prééquipés.
L’investissement privé doit maintenant être libéré. Pour cela, les conditions de mise en œuvre de la mutualisation de la partie terminale des réseaux, notamment à l’intérieur des immeubles, doivent être définies par ma collègue Nathalie Kosciusko-Morizet et par le régulateur.
Au-delà, il faut préparer l’avenir sur l’ensemble du territoire et encourager l’action des collectivités qui s’impliquent. Certaines ont pu se mobiliser autour de projets, d’autres doivent être aidées. C’est pourquoi le Gouvernement mettra en place des instances de concertation au niveau local et accompagnera la réalisation de schémas directeurs du numérique sur leurs territoires.
L’objectif sera d’irriguer 75 % des zones d’activités d’intérêt communautaire de chaque département en très haut débit et de rendre la fibre optique accessible à toutes les communes de plus de 1 000 habitants d’ici à 2014. Une concertation avec les opérateurs et les collectivités est menée en ce sens, par le délégué interministériel à l’aménagement et à la compétitivité des territoires, jusqu’à la fin du mois d’avril.
En résumé, monsieur le sénateur, nous sommes favorables à une péréquation à terme, mais les financements publics ne doivent pas précéder les projets.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir répondu en détail sur les mesures prévues à l’avenir pour éviter une nouvelle fracture numérique. Plus le fonds de compensation que j’évoquais en prenant comme modèle celui qui avait été créé à l’époque de l’électrification des campagnes sera mis en place rapidement, plus la péréquation pourra jouer efficacement et plus les financements adéquats seront obtenus.
Vous avez cité les communes de plus de mille habitants. Mais, ne l’oublions pas, nombreuses sont les PME et les PMI qui sont implantées dans nos territoires ruraux. Le très haut débit s’avère également primordial pour le monde agricole, où tout est désormais pratiquement géré sur informatique.
Pour avoir été jusqu’à très récemment président du conseil général du Jura, je peux vous dire que j’ai reçu ces dernières années un nombre incalculable de lettres, et ce presque tous les jours, de concitoyens m’interrogeant sur le développement des nouveaux moyens de communication dans le département. Par le passé, c’était l’état des routes qui faisait l’objet d’autant d’interpellations : aujourd’hui, ce sont les nouvelles voies de communications, les voies de la modernité qui doivent faire l’objet de notre sollicitude !
Monsieur le secrétaire d’État, les territoires ruraux, notamment les ZRR, si l’on ne veut pas qu’ils prennent encore du retard, ont besoin, au moins autant que les autres, d’avoir accès au très haut débit. Vous me permettrez donc d’insister une nouvelle fois sur ce dossier capital pour notre monde rural et, par là même, pour l'ensemble de notre pays.
La parole est à M. Alain Fauconnier, auteur de la question n° 433, adressée à M. le ministre de l’agriculture et de la pêche.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme d’autres, et sans doute plus que d’autres, le département de l’Aveyron est, par nature, une terre d’excellence agricole et agroalimentaire, premier département moutonnier de France de surcroît, avec ses produits phares que sont, vous le savez, le roquefort, le veau de l’Aveyron et le laguiole, pour ne citer que les plus connus. Monsieur le secrétaire d’État, puisque vous aurez l’occasion de venir, dans quelques jours, dans notre département, vous aurez probablement l’occasion de vous rendre compte par vous-même de la qualité de ces produits !
Préciser toutes ces caractéristiques, c’est souligner, d’entrée, toute la place qu’occupent, dans le paysage économique de l’Aveyron, les trois établissements d’enseignement agricole public que compte le département : les deux lycées d’enseignement général et technologique agricoles, ou LEGTA, que sont les établissements La-Roque à Rodez et Beauregard à Villefranche-de-Rouergue, ainsi que le lycée d’enseignement professionnel agricole, ou LEPA, La-Cazotte à Saint-Affrique.
Ces établissements ont, depuis quelques années, reçu des aides considérables de la région Midi-Pyrénées afin de préparer l’avenir de la profession agricole. À titre d’exemple, je rappellerai que, pour le seul établissement de Saint-Affrique, la région a investi 25 millions d’euros en quinze ans.
Or la réforme du bac professionnel et la révision générale des politiques publiques menacent aujourd’hui gravement l’avenir de l’enseignement agricole. Par voie de conséquence et de manière mécanique, de nombreuses classes fermeront, compromettant ainsi la survie de ces trois établissements et provoquant un grand émoi non seulement chez les enseignants, les élèves, les parents d’élèves, mais aussi chez tous les acteurs de la filière agricole.
Je rappelle au passage que la transformation du cycle de préparation au bac professionnel, dont la durée sera réduite de quatre à trois années dès la rentrée prochaine, entraînera une dégradation des conditions de vie des élèves, avec une diminution progressive des cours de 2 % en moyenne par an jusqu’en 2012. Elle aura pour regrettable conséquence l’exclusion d’un certain nombre de lycéens, lesquels, dans ces conditions, ne pourront en effet suivre le cursus convenablement. Ils quitteront donc cet enseignement pour intégrer la voie de l’apprentissage ou, pire encore, interrompront là leur scolarité.
À l’établissement La-Roque de Rodez, qui a perdu 39 élèves à la rentrée scolaire 2008-2009, dont 30 sur les filières de niveau IV, c’est la fermeture de la classe préparatoire au BTS agroalimentaire, option « Viande », qui est ainsi prévue. Cette annonce a d’ailleurs tout récemment provoqué une forte mobilisation.
Au lycée Beauregard de Villefranche-de-Rouergue, lequel a perdu 16 élèves à la rentrée 2008-2009, c’est la classe de quatrième qui est menacée par un projet de fermeture.
Des inquiétudes se font également jour à l’établissement La-Cazotte de Saint-Affrique, qui a perdu 10 élèves à la rentrée 2008-2009.
Monsieur le secrétaire d’État, tels sont les trois volets relatifs à la situation actuelle de ces établissements, laquelle ne manque donc pas de nous préoccuper.
Ma question sera donc triple.
Qu’en est-il de la préservation des filières, en particulier celles de l’élevage ovin et de l’agriculture biologique ?
Quels sont les aménagements pédagogiques prévus pour accompagner la réduction de quatre à trois années du cycle de préparation au bac professionnel ?
Plus généralement, dans le contexte de bouleversements des politiques agricoles nationales en prévision de l’après-2013, quelles mesures comptez-vous prendre pour que l’enseignement agricole puisse continuer à jouer le rôle fondamental qui est le sien depuis trente ans ?
Monsieur Fauconnier, vous l’avez rappelé, je me rendrai effectivement jeudi prochain dans votre beau département, et ce avec grand plaisir tant l’authenticité y est une valeur encore largement cultivée. Je serai à vos côtés pour analyser les atouts et les faiblesses de ce monde rural qui nous est cher.
Pour en venir à votre question, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Michel Barnier, qui, retenu à Bruxelles, ne peut malheureusement pas être présent au Sénat ce matin. Il m’a donc demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants.
L’enseignement agricole est un enseignement spécifique, implanté au cœur des territoires ruraux, et d’une très grande qualité. Ses résultats en termes de diplômes, d’insertion sociale et professionnelle sont reconnus et souvent cités en exemple de ce qu’il faudrait faire pour que les jeunes réussissent mieux.
Cet enseignement, essentiel pour la conduite des politiques placées sous la responsabilité du ministère de l'agriculture et de la pêche, doit évoluer en réaffirmant sa mission et ses priorités.
Il se doit de contribuer à la compétitivité économique et au développement de notre agriculture. Les formations aux métiers de la production agricole et agroalimentaire sont donc prioritaires.
Il lui faut favoriser l’insertion culturelle, sociale et professionnelle au service des territoires ruraux, au travers, notamment, des classes d’enseignement général.
Il lui incombe de participer au développement du monde rural, sur l’ensemble du territoire national.
Monsieur le sénateur, la rénovation de la voie professionnelle, engagée pour une mise en application à la rentrée prochaine, vise à porter plus de jeunes au niveau du baccalauréat et à promouvoir la voie professionnelle, tout en garantissant une formation de qualité et une insertion performante. Actuellement, seuls 60 % à 65 % des jeunes qui intègrent en première année une classe de brevet d’études professionnelles agricoles, ou BEPA, obtiennent un diplôme de niveau IV en quatre ans.
Cette rénovation vise à faire de la voie professionnelle une filière d’excellence, dans laquelle le plus grand nombre pourra se révéler. Ainsi, l’une des finalités est de faciliter l’accès aux études supérieures, notamment aux BTS, tout en permettant aux jeunes qui rencontrent des difficultés dans l’acquisition des savoirs scolaires de combler leurs lacunes.
Toutefois, la maîtrise des dépenses publiques, rendue plus que jamais nécessaire dans le contexte économique difficile que traverse actuellement notre pays, voire le monde entier, impose à tous les secteurs de l’administration des efforts particuliers, notamment en matière d’emploi public. Comme les autres, l’enseignement agricole doit y contribuer.
Dans ce cadre, et après consultation des partenaires locaux, le directeur régional de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt de Midi-Pyrénées, agissant en tant qu’autorité académique, a formulé les propositions suivantes.
Le lycée professionnel agricole La-Cazotte de Saint-Affrique offre uniquement des formations professionnelles. Il dispose ainsi des trois cycles préparant au baccalauréat professionnel spécialités « Conduite et gestion de l’exploitation agricole » et « Systèmes à dominante élevage », et d’un cycle conduisant au brevet d’études professionnelles agricoles « Activités hippiques », suivi de la filière préparatoire au baccalauréat professionnel spécialité « Élevage et valorisation du cheval ». Il est proposé de maintenir les quatre classes de BEPA à la rentrée prochaine.
Au lycée d’enseignement général et technologique agricole de Villefranche-de-Rouergue, force est de constater que deux classes fonctionnent avec des effectifs inférieurs au seuil requis, dans la filière actuelle préparant au baccalauréat professionnel spécialité « Systèmes à dominante élevage ». À l’entrée de la filière, à la rentrée 2008, le recrutement a chuté de plus de 63 %. La question de sa viabilité est aujourd'hui posée. Cependant, il est proposé, d’un côté, de maintenir la classe à faible effectif à la rentrée 2009, pour répondre à l’attente territoriale, et, de l’autre, de fermer une classe de quatrième.
Quant à la formation conduisant au brevet de technicien supérieur agricole « Industries agroalimentaires » pour la spécialité « Industries des viandes » assurée au LEGTA La-Roque de Rodez, elle est maintenue, malgré un fléchissement dans son recrutement à la rentrée 2008.
Monsieur le sénateur, comme vous pouvez donc le constater, en dépit d’un contexte budgétaire contraint, tout est mis en œuvre pour permettre de maintenir et de conforter, au niveau des territoires, l’enseignement agricole, qui demeure une priorité.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Les nouvelles sont bonnes puisque les fermetures de classes prévues sont reportées, voire annulées. J’en prends acte avec grande satisfaction, et de telles annonces ne manqueront pas de réjouir à la fois les familles et l'ensemble de la filière agricole du département.
Cela étant, je continue, avec beaucoup d’autres, de m’interroger sur l’opportunité de réduire à trois années la durée du cycle de préparation au bac professionnel. Avec le système actuel, un certain nombre d’élèves se voient offrir la possibilité de préparer ce baccalauréat avec une année supplémentaire, en « transitant » pendant deux ans par la voie du BEP. Dans l'enseignement agricole, qui n’est pas comparable avec l'éducation nationale, cette formule a rencontré un véritable succès. Certes, les effectifs concernés sont réduits, mais, chacun le sait, au vu de la situation de l’agriculture aujourd'hui, les établissements d’enseignement agricoles n’accueillent pas beaucoup d’élèves.
Il serait vraiment souhaitable, notamment pour l'enseignement agricole, de conserver des classes « passerelles » ou « d’adaptation ». Grâce à ce système, un certain nombre de jeunes, qui rencontreraient inéluctablement des difficultés s’ils devaient intégrer directement une classe de seconde, peuvent en effet obtenir leur baccalauréat professionnel en quatre ans.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous demande donc de bien vouloir transmettre à M. Barnier cette demande ô combien importante à mes yeux.
La parole est à M. Bernard Vera, auteur de la question n° 450, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur la situation de l’hôpital de Juvisy-sur-Orge, situé dans mon département de l’Essonne, où il est en effet prévu de fermer les services de chirurgie et de maternité, avec, à la clef, la suppression de 170 emplois de personnels de santé.
Or je veux rappeler le rôle particulier de cet hôpital, dans le périmètre duquel se trouvent deux sites classés « Seveso seuil haut », à Grigny et à Athis-Mons, avec des dépôts d’hydrocarbures qui présentent une concentration de risques majeurs en zone urbaine. Le premier dispose d’une grande capacité de stockage permettant l’approvisionnement des stations services du sud de la région parisienne, tandis que le second assure le stockage et la distribution du carburant dédié aux aéronefs de l’aéroport d’Orly.
J’attire notamment votre attention sur l’importance du rôle social de l’hôpital de Juvisy-sur-Orge et, en particulier, de sa maternité, où accouchent 70 % des femmes de la ville de Grigny.
En 1998, cet établissement comptait 80 lits de chirurgie, des urgences et une maternité. Dix ans après, il ne reste plus qu’un service de chirurgie de 24 lits, des urgences et une maternité ; or ces trois services sont menacés de fermeture.
Ce sont 900 accouchements et 2 000 actes chirurgicaux par an qui seraient donc radiés de l’offre de soins, alors même que les besoins de santé des 200 000 habitants du territoire ne cessent de s’accroître.
L’insolvabilité des patients évoquée dans le rapport de la chambre régionale des comptes pour 2006, qui est de 5, 2 % contre 3 % en moyenne sur l’ensemble des établissements de santé, est d’ailleurs révélatrice de la fragilité des populations concernées et de la nécessité de conserver à Juvisy-sur-Orge l’ensemble de ces services.
Madame la ministre, en cas de fermeture, vers quelles structures vont bien pouvoir se tourner les populations ? Les onze hôpitaux publics de l’Essonne sont saturés, le département manque de lits et l’hôpital le plus proche, situé à Longjumeau, connaît lui-même des difficultés, se trouvant contraint de renvoyer ses patients vers l’hôpital d’Orsay.
Nous n’avons pas oublié le cas de cet homme de cinquante-sept ans, décédé faute d’avoir pu trouver une place dans un établissement après des heures d’errance. Victime de troubles respiratoires à Massy, il a été pris en charge dans la nuit du 26 au 27 décembre par une équipe du SAMU de l’Essonne, avant d’être conduit vers l’hôpital de Longjumeau, où il a été victime de plusieurs arrêts cardiaques, « jugulés » par un réanimateur des urgences. Mais, comme cet hôpital ne disposait pas de lit disponible en réanimation, les régulateurs du SAMU de l’Essonne ont parallèlement recherché une place dans tous les hôpitaux de la région pendant plusieurs heures : 24 hôpitaux ont été sollicités avant que l’hôpital Bichat n’apporte une réponse favorable, à cinq heures du matin.
Je crains, hélas, que la politique de santé menée actuellement ne conduise à la multiplication de ces cas dramatiques. C’est pourquoi, madame la ministre, je souhaite, pour ma part, que soit acceptée la demande d’un moratoire, laissant aux différents partenaires – les élus, les autorités, la population et ses représentants – le temps de la concertation, afin que la décision finale prenne en compte les besoins, les réalités sociales locales, et ne repose pas sur la seule logique économique.
Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur la fermeture des services de chirurgie et de maternité de l’hôpital de Juvisy-sur-Orge et vous demandez un moratoire afin de laisser plus de temps à la concertation.
Comme vous l’avez rappelé dans votre intervention, l’hôpital de Juvisy-sur-Orge dessert une population fragile. À ce titre, il joue un rôle social important. Il convient donc de maintenir et de renforcer son service des urgences, ainsi que l’offre de soins en médecine et en soins de suite.
C’est pour cette raison qu’une restructuration était nécessaire. Celle-ci comprend la fermeture des activités de chirurgie et de maternité et l’augmentation de la capacité d’intervention des activités des urgences de médecine et de soins de suite de l’hôpital.
Vous conviendrez qu’il est plus utile, pour la gestion d’un site SEVESO, de renforcer la capacité d’intervention du service des urgences plutôt que celle de la maternité !
La fermeture des services de chirurgie et de maternité obéit à une exigence de qualité et de sécurité des soins, et résulte d’un choix de la communauté médicale. Pour des raisons de sécurité, il n’est pas question de maintenir des services tels que celui de la chirurgie, dont l’activité est extrêmement faible et largement en deçà des seuils reconnus par la profession.
L’hôpital de Juvisy-sur-Orge n’a accueilli, en 2007, que 3, 3 % des patients de son territoire de santé hospitalisés plus de plus de quarante-huit heures. Quant à la maternité, qui réalisait moins de 800 accouchements, elle ne peut pas fonctionner dans des conditions de sécurité suffisantes en l’absence de service de chirurgie.
En outre, plus de 80 % des parturientes de Juvisy et des villes situées à proximité recourent aux autres établissements publics proches : l’hôpital de Longjumeau, le centre hospitalier sud francilien et l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges. Ainsi, dans le cas que vous citez, monsieur le sénateur, ce ne sont pas 70 % des parturientes de la ville de Grigny qui se rendent à Juvisy, mais seulement 19 % de ces femmes.
Les activités de chirurgie et de maternité des hôpitaux proches de l’hôpital de Juvisy ont été renforcées afin de permettre l’accueil de l’ensemble des patients de leur territoire de santé. L’opération qui est menée va donc améliorer l’accès aux soins et la qualité des soins pour les habitants de Juvisy, deux exigences auxquelles, vous le savez, je suis fermement attachée pour le bien de nos concitoyens.
Vous avez rappelé, enfin, le cas de cet homme qui est décédé, en décembre dernier, après avoir été pris en charge par le SAMU et hospitalisé.
L’enquête de l’IGAS qui est en cours a établi qu’il avait été parfaitement pris en charge par le service des urgences de l’hôpital de Longjumeau et réanimé à plusieurs reprises, car son état était très grave. Cette enquête a également prouvé que toutes les possibilités d’accueil existaient bien, à ce moment-là, dans la région parisienne mais que, malheureusement, dans cette situation très tendue, cette personne était très difficilement transportable.
Je souhaite la plus grande transparence sur cette affaire. Je le répète, une enquête de l’IGAS, dont les premiers éléments nous sont parvenus, est en cours. Il vaut mieux, monsieur Vera, se référer à cette enquête avant de se prononcer sur ce cas !
Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Mais vous ne serez pas étonnée si je vous dis qu’elle ne m’a pas convaincu. Je regrette ainsi que vous n’ayez pas répondu favorablement à notre demande de moratoire.
Vous évoquez une restructuration nécessaire et des problèmes de sécurité qui, j’en ai bien peur, masquent en réalité un manque évident de moyens humains et matériels, une situation dénoncée, depuis des années, à la fois par les professionnels de santé et par les usagers.
J’ai bien compris, madame la ministre, que vous aviez l’intention de confirmer cette décision. Je crains que celle-ci ne nous conduise vers une médecine à deux vitesses, écartant progressivement les usagers les plus fragilisés, socialement et économiquement, de notre système de santé. Ils en sont d’ailleurs bien conscients ; c’est sans doute pourquoi plus de 10 000 habitants de ce territoire ont déjà signé l’appel pour sauver leur hôpital.
Le droit à la santé et l’accès aux soins sont inscrits dans la Constitution. Nous ne pouvons accepter qu’ils soient sacrifiés pour enrichir le secteur privé à but lucratif !
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 451, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Madame la ministre, j’ai souhaité vous interpeller ce matin sur la situation financière de l’hôpital de Tours, qui semble rejoindre celle de l’hôpital public en France.
Vous connaissez l’attachement de la population française à l’hôpital public. Plus de neuf Français sur dix, soit 93 % d’entre eux, jugent que le personnel y est compétent, mais 89 % estiment que l’hôpital manque de moyens financiers et humains.
Alors que l’hôpital public traverse d’énormes difficultés, une étude publiée par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES, précise que les « cliniques privées à but lucratif » ont eu un taux de rentabilité financière de 16 % en 2005. Le résultat net du groupe Générale de Santé, leader du marché français des cliniques à but lucratif, a augmenté de plus 91, 2 % entre 2007 et 2008, et 420 millions d’euros ont été versés à ses actionnaires. Un tel résultat pourrait laisser supposer que le secteur privé est efficace financièrement. Or ces résultats recouvrent de nombreux gaspillages.
Le fait de gagner des millions d’euros sur le dos de notre sécurité sociale et des malades, alors même que ceux-ci sont de plus en plus nombreux à ne pouvoir se soigner correctement, ne témoigne pas, me semble-t-il, d’une bonne gestion. Au contraire !
Vous avez introduit, en 2004, la tarification à l’activité, la fameuse T2A, qui devait, d’après ses concepteurs, apporter de l’efficience au système. Puis vous avez décidé, en 2012, d’appliquer le principe de la convergence tarifaire entre le public et le privé. Or les hôpitaux publics soignent tous les patients, quels que soient leurs revenus, leur âge, leur pathologie, et quelle que soit l’heure à laquelle ils se présentent dans leurs services. Les coûts ne sont donc pas comparables.
Le rapport de la Cour des comptes de 2007 sur la sécurité sociale constate que « les dépenses des établissements sous dotation globale sont inférieures de 187 millions d’euros à l’objectif, alors que celles des cliniques privées dépassent l’objectif de 168 millions d’euros ».
Le CHU de Tours rencontre de graves difficultés : l’application de la T2A y est révélatrice de l’aggravation de sa situation financière, qui ne fait que s’amplifier au fil des ans. En 2006, le déficit était de 3 millions d’euros ; il est passé à 5 millions d’euros en 2007, et il atteindrait la somme de 9, 5 millions d’euros cette année.
Je vous demande, madame la ministre, pour répondre aux vœux votés par le dernier conseil d’administration du CHU, d’apporter une aide substantielle à notre hôpital, pour qu’il puisse continuer à jouer le rôle qui est le sien, non pas seulement pour Tours et son agglomération, ou pour le seul département d’Indre-et-Loire, mais aussi pour les départements voisins.
Madame la sénatrice, puisque vous avez commencé votre intervention par une remarque d’ordre général sur l’hôpital public, je tiens à vous rappeler un certain nombre de chiffres.
Les dépenses hospitalières de la France sont les plus élevées au monde. Depuis des années, nous consacrons à l’hôpital public des ressources en constante augmentation, car il a besoin de moyens.
Dans les circonstances extrêmement difficiles de la crise économique mondiale, les dépenses hospitalières de l’hôpital public augmenteront cette année de 3, 1 %. De plus, nous avons mis en place un plan d’investissement de 10 milliards d’euros, qui doit durer jusqu’à la fin de 2011. Je rappelle également que 54 % des établissements publics français sont en excédent budgétaire et que 7 % des établissements concentrent 90 % des déficits. C’est dans ce cadre qu’il nous faut situer le présent débat !
Vous appelez plus précisément mon attention, madame la sénatrice, sur la situation financière du centre hospitalier universitaire de Tours. Ce centre hospitalier est en effet confronté à un déficit qui s’est aggravé en 2008.
Plusieurs mesures vont contribuer à améliorer la situation financière de cet établissement important pour l’offre de soins dans la région Centre.
Au niveau national, et contrairement à ce que vous avez dit, la réforme du financement des établissements de santé a un impact favorable sur le CHU de Tours. Cet établissement reçoit en effet, du fait de la mise en place de la T2A, une dotation bien plus importante que s’il était resté soumis au régime de la dotation globale. Grâce à la tarification à l’activité, il est donc gagnant !
Je signale, en outre, que les modulations que j’ai apportées au calcul de la T2A, modulations liées à la gravité de l’état des patients et à leur situation de précarité, et qui sont entrées en vigueur le 1er mars 2009, lors de l’actuelle campagne tarifaire, sont très favorables au CHU de Tours. Il en est de même de la réforme du financement des missions d’enseignement, de recherche, de recours et d’innovation, les MERRI : compte tenu de ses performances, les moyens alloués à ce titre au CHU de Tours sont renforcés.
Les difficultés de l’établissement ne sont donc aucunement dues au modèle de financement par la tarification à l’activité, bien au contraire.
L’établissement est actuellement dans un processus de reconstruction de ses bâtiments, qui s’achèvera en 2011, et bénéficie de crédits importants à ce titre. Cette politique ambitieuse et nécessaire a pour effet un accroissement très sensible de ses charges d’amortissement et de ses frais.
Compte tenu de cette évolution, un plan de retour à l’équilibre a été voté par le conseil d’administration et a fait l’objet d’engagements contractuels avec l’agence régionale de l’hospitalisation. Dans ce cadre, le CHU s’est engagé dans un processus de réorganisation de ses services, en particulier des blocs opératoires, de la réanimation médicale et de la chirurgie orthopédique. Il en est de même pour les activités de pédiatrie.
Le centre hospitalier régional universitaire doit être en mesure de développer son activité, notamment en cancérologie, compte tenu de l’extension des capacités d’accueil du service d’oncologie médicale.
L’ensemble de ces mesures va contribuer à améliorer la qualité des prises en charge dans le cadre d’une organisation plus efficiente.
Ces efforts font l’objet d’un accompagnement financier. Au-delà des aides accordées pour le financement des investissements, une aide reconductible de 2 millions d’euros destinée au financement des charges d’amortissements a été accordée en 2008. L’établissement a également bénéficié d’aides exceptionnelles : 5 millions d’euros lui ont été attribués sur les trois exercices 2005-2007 et 5 millions d’euros, à nouveau, sur le seul exercice 2008.
Vous l’aurez constaté, le CHU de Tours est entré dans un processus de redressement et de rationalisation qui doit lui permettre de consolider sa situation.
Vous pouvez être rassurée, madame la sénatrice, le Gouvernement, et tout particulièrement la ministre de la santé que je suis, porte une grande attention à cet établissement et l’accompagne dans ses efforts.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, que j’ai écoutée attentivement. Toutefois, je ne partage pas votre point de vue, en particulier sur la répartition actuelle des coûts financiers de santé entre l’hôpital public et le secteur privé.
Je crois qu’on n’intègre pas suffisamment le fait que l’hôpital public se trouve dans l’obligation de prendre en charge des traitements lourds et financièrement très coûteux. Dans le même temps, reviennent au secteur privé les actes les plus lucratifs, ceux dont les traitements, beaucoup plus courts, ont des coûts financiers nettement plus légers que ceux que supporte la plupart du temps l’hôpital public.
Outre que le CHU doit, comme vous l’avez dit, financer son plan de restructuration – la reconstruction de l’ensemble des bâtiments est, en effet, lourde pour son budget – il doit aussi supporter ces activités dont la charge financière est beaucoup plus importante.
Malgré sa situation de pointe dans un certain nombre de domaines, dont celui de la cancérologie que vous avez évoqué, il n’arrive malheureusement pas, aujourd’hui encore, à répondre à l’ensemble des besoins de la population.
Je citerai, à titre d’exemple, la situation douloureuse vécue dernièrement par une famille dont l’enfant atteint de leucémie a dû être transféré vers un centre hospitalier situé dans une autre région, faute d’avoir à Tours les moyens en personnel pour faire face aux besoins.
Cet aspect financier pèse lourd. Si le conseil d’administration de l’hôpital a dernièrement émis un vœu que des moyens financiers supplémentaires soient accordés, ce n’est pas pour le plaisir ! Simplement, il se trouve aujourd’hui acculé à des difficultés auxquelles, je le reconnais bien volontiers, vous avez porté remède l’an dernier en accordant des moyens supplémentaires. Mais aujourd’hui, malgré les efforts de redressement qu’il a engagés, l’hôpital n’est pas en mesure de rétablir la situation.
La parole est à M. Michel Doublet, auteur de la question n° 454, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le plan d’urgence lancé fin 2008, après la conférence sur la situation économique de l’agriculture du 12 novembre 2008, comporte, notamment, des mesures d’allégement des charges financières, sociales et fiscales pesant sur la trésorerie des exploitations agricoles.
Une enveloppe de 60 millions d’euros de crédits du fonds d’allégement des charges, FAC, a été mobilisée sur le plan national pour aider principalement les exploitations spécialisées en élevage à passer le cap difficile de l’année 2009. La répartition de cette enveloppe par département a conduit à attribuer 343 846 euros à celui que je représente, la Charente-Maritime.
Conformément à vos instructions, la mise en place de ce plan d’urgence a fait l’objet d’une large communication auprès des éleveurs de bovins, d’ovins et de caprins de la Charente-Maritime, par l’intermédiaire des organisations professionnelles agricoles, des banques et des centres de gestion, ce qui a engendré un nombre significatif de demandes d’allégement des charges de leur part.
La direction départementale de l’agriculture, DDA, de la Charente-Maritime a assuré le rôle de guichet unique de cette mesure. À ce jour, plus de 410 demandes ont été reçues et instruites en Charente-Maritime, dont 360 environ seraient éligibles au fonds d’allégement des charges, selon les critères d’accès définis en concertation avec les représentants professionnels agricoles du département
Le montant de crédits du FAC qui serait nécessaire pour satisfaire en totalité l’ensemble des demandes éligibles s’élève à plus de 1 680 000 euros, soit presque cinq fois le montant de l’enveloppe disponible.
Or l’enveloppe départementale de 343 846 euros ne permettra de financer qu’une cinquantaine de dossiers prioritaires, ceux de jeunes agriculteurs installés depuis moins de cinq ans.
Aussi, madame le ministre, si un complément de crédits, même partiel, pouvait être obtenu, cela permettrait de financer un plus grand nombre de dossiers, tout en évitant le « saupoudrage », selon des critères de priorité à définir au sein du comité départemental de mise en œuvre de ce plan d’urgence, en classant, par exemple, les dossiers par ordre décroissant de ratio d’endettement.
Je sais, madame le ministre, que, par lettre circulaire en date du 12 décembre 2008 adressée aux préfets, M. le ministre de l’agriculture a indiqué que ces enveloppes départementales ne feraient pas l’objet de modifications et qu’il n’était pas prévu d’en réallouer de nouvelles.
Toutefois, au vu du nombre des dossiers en souffrance et de l’attente des éleveurs, dont les situations sont, pour certaines, extrêmement délicates, nous souhaiterions que vous nous apportiez l’assurance que les dossiers les plus difficiles pourront être traités et que les moyens financiers le permettront.
Monsieur le sénateur, Michel Barnier, actuellement à Bruxelles, ne peut malheureusement pas être présent ce matin au Sénat et vous prie de l’en excuser. Il m’a demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants, ce qui me donne le plaisir de m’adresser à vous.
Vous avez attiré l’attention du ministre de l’agriculture et de la pêche sur l’insuffisance de l’enveloppe allouée à votre département pour faire face aux difficultés des agriculteurs.
Permettez-moi de vous rappeler l’ampleur des moyens que le Gouvernement a mobilisés dès le 12 novembre 2008 dans le cadre d’un plan d’urgence avec la Mutualité sociale agricole et les banques : ils s’élèvent à 250 millions d’euros.
Plus de la moitié de ces moyens a été consacrée à l’allégement des charges. Je citerai, en premier lieu, les charges liées au coût de l’énergie, avec la reconduction du remboursement partiel de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, TIPP, et de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel, TICGN, pour le second semestre. Tous les agriculteurs y ont accès.
Je citerai, en second lieu, les charges sociales et financières. À ce titre, une enveloppe de 90 millions d’euros a été répartie entre les départements, avec une priorité pour les départements d’élevage, pour tenir compte de la forte dégradation du revenu des éleveurs constatée depuis deux ans.
Il revenait au comité départemental que le ministre de l’agriculture et de la pêche a demandé aux préfets d’installer de définir les critères d’accès à ce plan qui devait être ciblé sur les exploitations les plus en difficulté.
Vous demandez une enveloppe complémentaire pour faire face aux demandes. À ce titre, il convient de rappeler que les enveloppes d’allégement des charges sociales et financières sont fongibles à l’intérieur du département. En outre, la réponse aux difficultés de trésorerie d’une exploitation peut passer par l’allégement de charges financières ou par la prise en compte partielle ou totale des cotisations sociales. Je rappellerai, enfin, qu’une enveloppe spécifique de 50 millions d’euros a été dégagée en faveur des éleveurs ovins.
Il apparaît que votre département n’a pas consommé en 2008 la totalité des crédits d’action sanitaire et sociale. Le reliquat s’élèverait à près de 35 000 euros. De même, les crédits de prise en compte des cotisations sociales du plan d’urgence ne seraient pas non plus consommés en totalité : une enveloppe de plus de 15 000 euros est disponible.
Pour l’allégement des charges financières dans le cadre du fonds d’allégement des charges, aucune demande d’enveloppe supplémentaire n’est parvenue au ministère de l’agriculture. Après vérification, il ressort qu’un nombre important de demandes d’éleveurs seraient éligibles pour le comité départemental, comme c’est le cas dans d’autres départements.
Conscient de la difficile situation à laquelle peuvent être confrontés un certain nombre d’agriculteurs, le ministre de l’agriculture et de la pêche est prêt à revoir la situation de votre département, sous réserve de hiérarchiser préalablement les dossiers les plus prioritaires et d’examiner dans les dossiers non financés les possibilités de répondre aux difficultés des exploitations par une prise en compte des cotisations sociales ou par la mobilisation des aides directes pour le secteur ovin, qui bénéficiera en 2010 de la réorientation des aides de la PAC.
Madame la ministre, je constate, au vu des précisions que vous avez bien voulu m’apporter, et dont je vous remercie, qu’une ouverture est envisageable et que nous pourrions obtenir une rallonge financière. Je vais prendre contact directement avec les organisations professionnelles et la DDA pour mettre très rapidement au point des propositions.
La parole est à Mme Catherine Tasca, auteur de la question n° 427, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai visité le 8 décembre dernier la maison d’arrêt de Versailles. Cet établissement accueille, pour moitié, des femmes détenues et, pour l’autre moitié, des hommes qui bénéficient d’un aménagement de peine au titre de la semi-liberté.
Je m’y étais déjà rendue il y a plusieurs années. Cette fois-ci, j’ai visité un établissement dans un très grand état de délabrement, totalement dénué des ressources nécessaires pour effectuer les travaux les plus élémentaires de rénovation et d’entretien.
La maison d’arrêt de Versailles est un bâtiment très ancien, dont la construction remonte à 1750, et les derniers travaux substantiels de mise en conformité et d’amélioration ont été effectués en 1985.
Lors de cette visite, j’ai vu un établissement dont le fonctionnement quotidien n’est rendu possible que par la conscience professionnelle des femmes et des hommes de l’administration pénitentiaire. Ils sont confrontés à un manque flagrant d’effectifs ; même l’encadrement supérieur y est très réduit. Cette situation n’est pas sans conséquence sur la sécurité des détenus et du personnel pénitentiaire, sur l’accomplissement efficace des parcours d’exécution des peines et sur la prise en charge sociale.
Beaucoup de détenus requièrent un suivi médical ou psychothérapeutique que l’état des locaux rend de plus en plus difficile malgré, là encore, l’engagement remarquable des praticiens.
Pouvez-vous me dire, madame la ministre, quelles sont les intentions réelles du Gouvernement concernant la maison d’arrêt de Versailles ?
Avez-vous fait le choix de l’abandon de cet établissement ? Si oui, il n’est pas admissible d’y laisser des détenus dans ces conditions ! Ou bien projetez-vous de le rénover ? Il y aurait alors vraiment extrême urgence !
La maison d’arrêt de Versailles a l’avantage d’être une petite structure avec une capacité d’accueil de 146 places. C’est le type d’établissement qu’il faut, chaque fois qu’il est possible, préférer aux usines pénitentiaires de 500 à 600 places. Les établissements de petite capacité sont, sans aucun doute, les plus à même de répondre à la mission première de la détention, qui est la réinsertion.
Le contrôleur général des prisons, M. Jean-Marie Delarue, détaillait dans un récent rapport la situation des prisons françaises : parcours d’exécution des peines sans contenu, cours de promenade livrées à la violence des détenus, défaut d’encadrement dans la détention. Son constat rejoignait ainsi celui du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe.
Ces rapports alarmants successifs prescrivent des évolutions urgentes et de grande échelle pour nos prisons. Il faut absolument en tirer les enseignements et les traduire en actes.
Les suicides de détenus, qui sont la manifestation la plus douloureuse et la plus violente de l’état de nos prisons, vous imposent d’agir.
Au-delà du seul cas de la maison d’arrêt de Versailles pour laquelle j’attends, vous l’aurez compris, des réponses précises, c’est la politique pénitentiaire du Gouvernement qui est en cause. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre, à Versailles et ailleurs, pour que nos prisons cessent d’être des lieux de privation de dignité ?
Madame le sénateur, vous avez bien voulu appeler mon attention sur la situation de la maison d’arrêt de Versailles. Vous évoquez l’état de cet établissement et l’insuffisance de moyens dévolus à l’administration pénitentiaire pour effectuer les travaux de rénovation et d’entretien. Vous souhaitez également connaître les intentions réelles du Gouvernement concernant l’avenir de cet établissement.
La maison d’arrêt de Versailles, construite en 1750, est située en centre-ville. En 1981, des travaux de rénovation furent entrepris pour aménager une maison d’arrêt de femmes d’une capacité de 87 places et un centre de semi-liberté de 79 places.
L’établissement fait régulièrement l’objet de travaux d’entretien et de maintenance au titre des crédits de fonctionnement déconcentrés. Ainsi, depuis 1996, ont été effectués des travaux d’aménagement des locaux médicaux de l’unité de consultations et de soins ambulatoires – à hauteur de 36 000 euros –, de mise aux normes des cellules disciplinaires – pour un montant de 37 000 euros– et de cloisonnement des sanitaires – pour une somme de 23 100 euros.
Je vous informe que le Gouvernement entend poursuivre cette démarche de rénovation et d’entretien des établissements les plus vétustes, démarche qui a d’ailleurs été accélérée par le biais du plan de relance.
À ce titre, le projet de loi de finances rectificative pour 2009 prévoit une enveloppe de 30 millions d’euros destinée à la réalisation de travaux, dans l’objectif d’améliorer les conditions de travail des personnels mais aussi les conditions de détention.
Une partie de ces crédits permettra d’effectuer un certain nombre de travaux sur le site de la maison d’arrêt de Versailles, notamment un diagnostic technique du bâtiment, pour un montant de 25 000 euros, un câblage informatique de la salle d’entretien de l’ANPE, pour un montant de 2 000 euros, et des travaux d’installations relatives à la sécurité incendie, pour un montant de 18 000 euros.
Ces travaux permettront d’améliorer les conditions de vie des détenus et de travail des personnels pénitentiaires de la maison d’arrêt de Versailles.
Il est vrai toutefois que ces travaux d’entretien ne permettront pas de modifier la structure de cet établissement.
Or je sais que les locaux communs aux détenues dans la maison d’arrêt pour femmes sont de petites tailles, que les ateliers ne permettent pas de développer des activités de formation et que les parloirs sont peu adaptés, aussi bien en termes d’accueil des familles que de déroulement des visites ou des contrôles à pratiquer.
Nous retrouvons d’ailleurs là le débat que nous avons eu lors de l’examen du projet de loi pénitentiaire sur les établissements les plus vétustes, où nous devons rattraper le retard pris en matière de travaux de rénovation faute d’avoir investi dans la rénovation pendant de nombreuses années.
Cet établissement est par ailleurs organisé en dortoirs. Une solution sera apportée à cette situation effectivement peu satisfaisante lorsque la construction d’un nouvel établissement permettra la fermeture de la maison d’arrêt de Versailles, puisque nous avons pour objectif de fermer tous les établissements qui comportent des dortoirs.
Le projet de construction est à l’étude. Cependant, cet établissement n’étant pas le seul concerné, nous sommes en train de procéder à des arbitrages pour déterminer les priorités. La décision sera prise au plus tard à la fin du deuxième semestre de 2009.
Madame le garde des sceaux, il y a dans votre réponse des éléments qui peuvent nous donner quelques espoirs puisque vous évoquez le dégagement dans le collectif budgétaire d’une enveloppe pour des travaux allant au-delà de l’entretien dans plusieurs établissements particulièrement vétustes.
Je dois vous dire tout de même que vos services ne vous informent pas exactement sur ce qui a été fait dans les années passées, car je connais bien l’établissement de Versailles et j’ai constaté moi-même que l’entretien minimum n’y a pas été assuré. C’est au point que certaines parties du bâtiment en viennent à être dangereuses ; je pense notamment aux blocs de la façade qui menacent de s’abattre dans la cour.
Pour ce qui est du passé, j’ai donc le regret, madame le garde des sceaux, de devoir insister sur le fait que le travail n’a pas été fait.
Cela dit, je souhaiterais attirer votre attention sur deux aspects de la situation à laquelle est confrontée – mais elle n’est pas la seule – la maison d’arrêt de Versailles.
Le premier a trait aux locaux. Je dois vous dire que le local dédié à l’accueil des familles et qui devrait notamment permettre, s’agissant d’une prison de femmes, le maintien du lien mère-enfant est absolument indigne, vous le constaterez si vous avez l’occasion de le visiter. Cela sert le cœur de voir ces tout jeunes enfants dans un espace d’à peine plus de six ou huit mètres carrés dont l’état est lamentable et le mobilier tout aussi lamentable et où les conditions nécessaires à un bon contact entre ces enfants et leur mère ne sont absolument pas assurées !
L’entretien des locaux a été notoirement insuffisant et j’espère, madame le garde des sceaux, que les crédits que vous annoncez permettront de remédier à cette situation.
Je veux insister ensuite sur le problème des personnels.
Depuis des années, la prison de Versailles souffre d’une insuffisance de l’encadrement et du sous-effectif. Il y a constamment des postes non pourvus et il faut actuellement recourir à deux membres du personnel de l’établissement de Bois-d’Arcy pour compenser un peu le manque d’effectifs !
Autre défaut dans la gestion des personnels : l’importance de ce que l’on appelle le turn-over ; les changements constants et très rapides des personnels rendent quasi impossible la politique de suivi des détenus. C’est un aspect du problème que je vous demande d’examiner aussi. Il faut donc compléter les effectifs, mais également essayer de les stabiliser.
À ce sujet, madame le garde des sceaux, je vous ai d’ailleurs adressé tout récemment un courrier dans lequel je me suis fait le relai d’une demande des détenus concernant le maintien d’une surveillante qui, semble-t-il, a su faire progresser de façon sensible la qualité des relations entre détenus et personnels pénitentiaires.
J’insiste sur ces deux dimensions, car, si vous aviez l’occasion d’y aller, la prison de Versailles ne vous rendrait pas fière de l’état de nos prisons !
Madame Tasca, croyez bien – vous le savez d’ailleurs – que j’accorde une priorité particulière aux travaux dans les établissements pénitentiaires.
S’agissant des sommes que j’ai citées, je peux vous assurer qu’elles ont été engagées et que les travaux correspondants ont été faits. Je peux parfois ne pas être informée sur l’utilisation des crédits mais, avant de vous répondre, j’ai vérifié si les travaux avaient été réalisés : ils l’ont été et les crédits que je vous ai indiqués leur ont été destinés.
La difficulté, vous le savez, tient à ce que dans les établissements vétustes les crédits étaient souvent utilisés – et la maison d’arrêt de Versailles n’est pas seule dans ce cas – à des travaux de simple mise aux normes, parce que, pendant très longtemps, on ne s’est pas attaqué à la vraie rénovation, à la vraie réhabilitation, voire à la construction de nouveaux établissements pénitentiaires. Le dernier programme d’ampleur date de 1987. Ensuite, les programmes ont été parcellaires.
J’ajoute, sans aucune intention polémique, que, entre 1997 et 2002, 4 % des places ont été fermées et qu’il n’y a eu aucune construction.
Je vous rejoins, madame Tasca, sur la nécessité de fermer les places insalubres où les conditions sont, en effet, épouvantables, mais, pour autant, faut-il s’abstenir de construire des places de prison ?
Pour ma part, je n’en fais pas un débat idéologique. Il est important que les prisonniers soient détenus dans des conditions dignes et, à cette fin, que nous construisions aussi des établissements pénitentiaires, ce que, malheureusement, nous n’avons pas fait pendant trop longtemps. Alors, nous sommes obligés de rattraper le retard.
S’agissant des personnels, vous connaissez les règles de la fonction publique, on ne peut les empêcher de demander des mutations et on ne peut pas davantage instaurer des traitements privilégiés pour une certaine catégorie d’entre eux.
Enfin, vous m’avez en effet saisie d’un courrier ; je vous ai répondu – ma réponse doit être partie ou, en tout cas, partira dès aujourd'hui – que la personne que vous évoquiez pouvait tout à fait demander à être maintenue à la maison d’arrêt de Versailles : la commission administrative paritaire étudiera sa demande de maintien dans l’établissement, si elle le souhaite.
La parole est à Mme Odette Terrade, auteur de la question n° 447, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite vous interroger sur l’inégalité de reclassement entre les fonctionnaires du cadre B de la fonction publique promus dans le cadre A avant le 1er janvier 2007 par rapport à leurs collègues promus postérieurement à cette date.
Cette inégalité résulte de l’application du décret n° 2006-1827, dit « décret Jacob », dont les effets pervers vous ont déjà été signalés à de nombreuses reprises depuis plus de deux ans.
Ainsi, une trentaine de mes collègues parlementaires, députés ou sénateurs, considérant l’injustice de la situation subie par les agents promus avant ce décret, vous ont déjà interrogé.
À ce jour, toutes les démarches et interventions se sont vu opposer un refus fondé en droit sur le principe de la « non-rétroactivité des textes et des actes juridiques ».
Les agents concernés n’ignorent évidemment pas ce principe fondamental de notre droit. Aussi ne revendiquent-ils pas l’application rétroactive du décret Jacob avec effet pécuniaire à la date de leur nomination. Par conséquent, la réponse fondée sur le principe de la non-rétroactivité est une réponse à une question qu’ils ne posent pas.
En revanche, monsieur le secrétaire d'État, ce que ces agents vous demandent, c’est l’adoption de nouvelles mesures statutaires pour corriger les effets du décret Jacob, ainsi que le recommande d’ailleurs le Médiateur de la République, M. Jean-Paul Delevoye.
Dans le numéro 44 de la Revue du Médiateur, paru en février dernier, M. Delevoye écrit en effet : « En l’absence de mesures transitoires entre les deux dispositifs de reclassement, il s’ensuit des franchissements d’ancienneté préjudiciables aux agents promus avant le 1er janvier 2007 en matière non seulement de rémunération mais aussi d’avancement, de mutation et de droits à pension. Selon l’échelon de reclassement, la rémunération mensuelle d’anciens promus peut être ainsi inférieure de plusieurs centaines d’euros à celle de leurs nouveaux collègues.
« De plus, les nouveaux promus […] bénéficieront […] d’un indice de liquidation de leur pension vieillesse supérieur […].
« Enfin, de nombreux effets pervers se sont également manifestés en matière de mutations, du fait que les inspecteurs nouvellement promus et mieux reclassés primeront ceux des promotions antérieures.
« La situation créée pour les personnels promus de la catégorie B à la catégorie A avant le 1er janvier 2007, par le décret n° 2006-1827, n’est donc pas équitable et doit pouvoir être corrigée par la mise en œuvre de mesures transitoires. »
Le Médiateur de la République fait ensuite des propositions.
Les mesures transitoires « devront permettre le reclassement à l’échelon résultant de l’application des dispositions du décret n° 2006-1827 des fonctionnaires issus d’un corps ou d’un cadre d’emploi de catégorie B et nommés dans un corps de catégorie A au titre de la promotion interne, à la date de leur nomination.
« Ce reclassement pourrait alors être assorti d’un effet pécuniaire sans rappel antérieur à compter de la date d’entrée en vigueur de ce décret, soit le 1er janvier 2007. »
Monsieur le secrétaire d'État, on ne saurait être plus clair, et c’est justement ce que les agents attendent !
Ainsi donc, la seule autorité indépendante, dont la compétence ne saurait être contestée, reconnaît pleinement le bien fondé de la demande de ces personnels.
Vous avez vous-même, dans vos dernières réponses aux questions écrites de mes collègues parlementaires, admis la réalité du « désavantage » induit par l’application du décret pour les agents promus antérieurement au 1er janvier 2007.
C’est pourquoi, je vous demande, monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures vous comptez prendre pour mettre en œuvre le plus rapidement possible les recommandations du Médiateur de la République et pour rétablir enfin l’équité entre ces agents soumis aux mêmes critères de sélection et exerçant les mêmes fonctions.
Comme moi, monsieur le secrétaire d'État, la délégation des agents des impôts concernés par cette question, qui est présente dans les tribunes de notre hémicycle ce matin, attend avec impatience votre réponse.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, tout d’abord, excuser Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui ne pouvait être présent ce matin.
Le décret du 23 décembre 2006 que vous évoquez, madame le sénateur, a mis en place un dispositif plus favorable pour les agents promus sur liste d’aptitude au grade d’inspecteur, avec un gain indiciaire d’une cinquantaine de points en moyenne, contre environ vingt-cinq points majorés avec le précédent système. J’assume cette volonté réelle de valoriser les agents les plus méritants.
En ce qui concerne une prétendue rupture d’égalité, je me permets de vous rappeler que le Conseil d’État a déjà jugé, dans une décision du 10 décembre 2004, que le fait de ne prévoir l’application d’une mesure qu’aux agents recrutés à compter de son entrée en vigueur ne constituait pas une discrimination contraire au principe d’égalité des fonctionnaires d’un même corps.
Vous dites que les agents promus avant le 1erjanvier 2007 seraient désavantagés.
En ce qui concerne les mutations, l’administration des impôts a mis en œuvre, en concertation avec les représentants du personnel, des dispositifs aménageant les effets novateurs du décret en faveur des fonctionnaires promus dont le classement était intervenu avant le 1er janvier 2007.
Concrètement, un suivi a été mis en place pour s’assurer qu’un agent issu d’une promotion antérieure ne serait pas devancé par un agent promu après le 1er janvier 2007. En 2008, quatre agents ont pu bénéficier de ce dispositif.
S’agissant de l’avancement, le statut prévoit un nombre d’années de services effectifs en catégorie A pour accéder au grade supérieur, ce qui neutralise les effets du décret en termes de reprise d’ancienneté.
Un autre aménagement a été réalisé pour permettre aux agents issus de listes d’aptitude, d’examens professionnels ou de concours internes antérieurs au 1er janvier 2007 de se porter candidat même s’ils n’ont pas atteint l’échelon requis. En 2008, cinquante-quatre agents ont bénéficié de cet aménagement.
Ainsi, madame le sénateur, permettez-moi de ne pas partager votre avis lorsque vous parlez d’inégalité de traitement entre les fonctionnaires des impôts. Dans le cas présent, non seulement il y a valorisation des mérites individuels, mais encore nous traitons avec équité les agents promus avant le 1er janvier 2007.
Monsieur le secrétaire d'État, je prends acte de votre réponse, même si elle n’est pas de nature à satisfaire les agents concernés.
Vous avez à juste titre rappelé que des mesures avaient été prises. Mais ne serait-il pas préférable de reconsidérer la situation dans son ensemble ?
Il ne s’agit pas de revenir sur le principe de non-rétroactivité. Vous le savez, le règlement de cette question est aussi budgétaire. Le retard pris dans le traitement de ce dossier, voire le refus de le prendre en compte de manière globale, n’est pas sans lien avec la révision générale des politiques publiques et les enjeux budgétaires des ministères.
Cependant, au regard du nombre de fonctionnaires concernés – environ 500 –, le coût que représenteraient des mesures visant à rétablir une égalité de traitement et de grade serait bien moins important que celui qui est engendré pour le reclassement d’autres cadres, pour lesquels les moyens nécessaires ont pu être dégagés.
J’ai personnellement saisi le Médiateur de la République sur ce sujet. S’il m’a apporté la même réponse que vous, monsieur le secrétaire d'État, s’appuyant lui aussi sur la jurisprudence du Conseil d’État constante du fait de la non-rétroactivité des textes, il a rappelé que le Conseil d’État considérait que « l’exercice du pouvoir réglementaire impliqu[ait] pour son détenteur la possibilité de modifier à tout moment les normes qu’il définit » et qu’« il incomb[ait] à l’autorité investie du pouvoir réglementaire [...] d’édicter [...] les mesures transitoires ».
Ainsi, le Conseil d’État et le Médiateur de la République reconnaissent la nécessité de remédier à cette situation. Il ne s’agit ici, selon moi, que de volonté politique.
Accéder à la demande des fonctionnaires subissant une inégalité de traitement ne créerait pas un précédent et ne représenterait pas un coût financier excessif. Dans le secteur privé, cette question aurait certainement déjà été réglée en vertu du principe « à travail égal, salaire égal ».
Monsieur le secrétaire d'État, en refusant de résoudre ce problème rapidement, vous continuez à alimenter le ressentiment des agents concernés. Il serait de meilleure administration de dégager les moyens permettant de régler cette situation, plutôt que d’alimenter un motif de conflit latent.
Je regrette que vous ne preniez pas en compte les propositions et recommandations du Médiateur de la République qui visaient à réparer cette injustice. Il importe de reconsidérer cette question et de ne pas retarder une fois de plus le règlement de ce dossier, qui traîne depuis deux ans.
La parole est à M. Claude Domeizel, auteur de la question n° 448, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le secrétaire d'État, j’attire votre attention sur la situation de certaines communes qui, de plus en plus souvent confrontées au désengagement de La Poste et à la menace de fermeture de leur bureau de poste, acceptent de signer une convention avec cet établissement public pour mettre en place et prendre en charge une agence postale communale.
Certaines communes confient cette nouvelle mission à un personnel recruté spécifiquement à cet effet. D’autres, dans la mesure où les fonctions confiées peuvent correspondre aux missions de leur grade et cadre d’emploi, font appel au personnel titulaire en fonction, dans le cadre de leur temps de travail.
Je m’interroge sur l’attitude à tenir en cas de refus du personnel communal d’exercer ces fonctions. C'est la raison pour laquelle, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande de me préciser la nature de l’agence postale.
Faut-il la considérer comme un service public communal créé par le conseil municipal, dans le cadre duquel le personnel en place est tenu d’assurer les missions qui lui sont confiées ? Dans ce cas, un avis préalable du comité technique paritaire sur les nouvelles compétences prises en charge par la commune est-il nécessaire ? Je pense que oui.
S’agit-il au contraire d’un service public dépassant la compétence communale ? Dans ce cas, les missions ne peuvent être confiées qu’à du personnel communal titulaire en place, sur la base du volontariat, ou à du personnel recruté à cet effet.
Monsieur le secrétaire d'État, sur cette question, les éléments de réponse que vous apporterez seront très utiles.
Monsieur le sénateur, votre question est très importante et concerne un grand nombre de communes. C'est la raison pour laquelle j’y répondrai de manière circonstanciée.
Aux termes de la loi du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications, La Poste a reçu une mission de contribution à l’aménagement du territoire. La loi prévoit que «La Poste contribue, au moyen de son réseau de points de contact, à l’aménagement et au développement du territoire national, en complément de ses obligations de service universel ».
La Poste dispose ainsi de près de 17 000 points de contacts avec le public. Les agences postales communales concourent à l’exercice de cette mission d’aménagement du territoire, leur création faisant l’objet de conventions entre La Poste et les communes, à partir d’un protocole d’accord signé entre cet établissement public et l’Association des maires de France, le 28 avril 2005. Cet accord permet notamment d’offrir aux communes ou communautés de communes qui souhaitent s’engager dans un partenariat avec La Poste un cadre précis et pérenne ainsi qu’un financement assuré sur une période pouvant aller jusqu’à neuf ans.
Les communes restent toutefois tout à fait libres de concourir à l’établissement de telles agences et de signer une convention avec La Poste. Il ne s’agit donc pas d’un service public communal.
La convention type prévoit que les communes fournissent le local de l’agence et qu’un ou plusieurs agents communaux assurent les prestations postales, y compris des services financiers de dépannage, comme le dépôt ou le retrait d’espèces sur un compte courant ou sur un compte d’épargne dans la limite d’un plafond. En contrepartie, La Poste verse à la commune une indemnité compensatrice, qui couvre la rémunération des personnels ainsi que la part du coût du local affecté à l’agence postale.
Le cadre légal dans lequel s’inscrivent ces conventions résulte de deux articles législatifs : l’article 29-1 modifié de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire, d’une part, l’article 30 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Ces dispositions permettent notamment à une commune ou à un établissement public de coopération intercommunale de mettre ses personnels à la disposition de l’agence postale communale ou intercommunale.
Par ailleurs, la loi n°2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale a complété l’article 6 de la loi n°90-568 du 2 juillet 1990 relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications par les dispositions suivantes : « Les conditions dans lesquelles les agents titulaires ou non titulaires de la fonction publique territoriale exercent tout ou partie de leurs fonctions dans le cadre de ce partenariat sont définies par une convention passée entre La Poste et la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunale dont relève l’agent. Cette convention précise notamment la nature des activités que l’agent est appelé à exercer. »
La mise à disposition des fonctionnaires est prévue par les articles 61 et suivants de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. L’article 61 précise : « La mise à disposition est la situation du fonctionnaire qui demeure dans son cadre d’emplois ou corps d’origine, est réputé y occuper un emploi, continue à percevoir la rémunération correspondante, mais qui exerce ses fonctions hors du service où il a vocation à servir. Elle ne peut avoir lieu qu’avec l’accord du fonctionnaire et doit être prévue par une convention conclue entre l’administration d’origine et l’organisme d’accueil. [...] Le fonctionnaire peut être mis à disposition auprès d’un ou de plusieurs organismes pour y effectuer tout ou partie de son service. »
Il ressort donc clairement de ces dispositions qu’un fonctionnaire territorial ne peut être mis à disposition d’un organisme extérieur, y compris pour une partie de son temps de travail, sans que son accord exprès ait été recueilli préalablement.
Dans l’hypothèse du recrutement d’un agent non titulaire, dès lors que l’exercice des missions de gestion de l’agence postale communale est explicitement mentionné dans le contrat de l’intéressé, il n’est pas nécessaire de recueillir l’accord de l’intéressé, la signature du contrat valant accord.
J’en viens à la consultation des instances de dialogue social. Il convient de distinguer le comité technique paritaire de la commission administrative paritaire.
Le comité technique paritaire n’a pas vocation à traiter de questions individuelles. En revanche, l’article 33 de la loi du 26 janvier 1984 précise que cette instance doit être consultée sur les questions relatives « à l’organisation des administrations intéressées » et « aux conditions générales de fonctionnement de ces administrations ». L’élaboration d’une convention entre la commune et La Poste relève de l’organisation administrative et des conditions générales de fonctionnement de ladite commune. Le comité technique paritaire compétent devra donc être avisé du projet de convention.
L’article 30 de la même loi précise que les commissions administratives paritaires « connaissent des questions d’ordre individuel résultant de l’application, notamment, de l’article 25 du titre Ier du statut général des fonctionnaires de l’État et des collectivités territoriales [...] et des articles [...] 61, 62 [...] de la présente loi. »
En visant les articles définissant les règles régissant la mise à disposition des fonctionnaires territoriaux, la loi indique que la commission administrative paritaire compétente pour la catégorie à laquelle appartient le fonctionnaire concerné doit bien être consultée avant la prise de l’arrêté individuel de mise à disposition.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse très complète, qui sera très utile aux collectivités. J’ai bien noté qu’un fonctionnaire territorial ne pouvait se voir imposer une tâche pour laquelle il n’avait pas été recruté.
La parole est à M. Yves Daudigny, auteur de la question n° 383, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Madame la secrétaire d'État, le 11 février dernier, nous avons célébré le quatrième anniversaire de la loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a permis la création des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. Ce ne fut pas sans inquiétude.
À cette occasion, madame la secrétaire d'État, vous avez modestement souligné qu’il restait « des attentes et de vraies marges de progrès possibles, notamment dans le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées ».
Cette loi fondatrice, symbolique, généreuse dans ses principes, a porté les espérances des personnes en situation de handicap et de leurs familles. Elle a déçu.
Certes, les MDPH ont pu se mettre en place grâce à la volonté de tous les acteurs, particulièrement celle des conseils généraux qui, pour beaucoup, sont déjà allés au-delà de leurs obligations légales. Apprécions cette capacité d’intervention des conseils généraux et des départements, tant que celle-ci existe encore !
Aujourd'hui, face à ces situations préoccupantes, tous les départements tirent la sonnette d’alarme. Madame la secrétaire d'État, je me fais devant vous l’écho des inquiétudes dont ils ont fait part lors de la récente réunion de la commission des affaires sociales et familiales de l’Assemblée des départements de France.
Les maisons départementales des personnes handicapées non seulement n’ont pas la capacité, par manque de moyens, de traiter et de répondre à l’ensemble des demandes, mais voient encore leur avenir compromis par les nouveaux domaines de compétences qui sont mis à leur charge.
La problématique est avant tout financière. Il s’agit de la non-compensation par l’État des postes qu’il ne met pas à disposition. Madame la secrétaire d'État, votre attention a été à plusieurs reprises attirée sur cette difficulté extrêmement sensible. Elle est synonyme de non-respect des engagements pris lors de la signature de la convention constitutive du groupement d’intérêt public. C'est la raison pour laquelle certains départements ont souhaité s’engager dans une procédure contentieuse contre l’État.
Par ailleurs, sur le plan structurel, se posent des questions de statut qui ne sont toujours pas tranchées, qu’il s’agisse des personnels ou du statut juridique des MDPH elles-mêmes.
Tous les rapports relèvent la lenteur des mises à disposition volontaires des agents relevant anciennement de la Commission technique d’orientation et de reclassement professionnel, la COTOREP, et de la Commission départementale de l’éducation spéciale, la CDES.
Outre le problème des postes vacants et de leur non-compensation financière, c’est la perte de compétences, de savoir-faire, mais aussi de mémoire des dossiers et des procédures qui est en jeu. L’existence de statuts différents – jusqu’à six ! – représente un handicap important pour la gestion quotidienne des MDPH : comparaison des rémunérations, des avantages sociaux, des droits à congé, crainte pour les promotions éventuelles.
Les nombreux changements de directeurs de MDPH depuis 2005 témoignent de ces difficultés. Il faut encore souligner que les postes mis à disposition l’ont été très majoritairement sur des profils de catégorie C, du fait des structures d’emploi précédentes. Or les MDPH requièrent aujourd’hui des emplois et des qualifications qui prennent en compte les évolutions techniques et les spécificités de ces fonctions.
Enfin, à toutes ces difficultés s’ajoutent celles de nouvelles missions régulièrement mises à la charge des MDPH. Depuis leur création, ces maisons ont dû mettre en œuvre la prestation de compensation du handicap, la PCH, pour les enfants, la PCH en établissement, le financement du transport des enfants et des adultes. Ces dossiers réclament une expertise technique que l’association du réseau des MDPH et des services départementaux, en complément du pilotage réalisé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, permet de réaliser.
S’y ajoutent en outre, à la suite de la réforme de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, depuis le 1er janvier de cette année, les dossiers de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, RQTH.
Ce domaine de l’emploi et de l’insertion professionnelle nécessite de nouvelles coordinations, en l’occurrence avec le service public de l’emploi et les services spécialisés de « Cap Emploi ».
Ainsi, non encore stabilisées, fragilisées par défaut de moyens, les MDPH se trouvent au surplus confrontées, sans véritable préparation, à un champ d’activité très spécifique qui exigerait normalement compétences et relais.
À trop vouloir charger la barque, il est évident qu’on finit par la faire couler !
Les MDPH peuvent pourtant, nous le savons, être le vecteur de l’appréhension d’une autre culture du handicap, qui offre, grâce à une prise en charge individualisée, une réelle égalité des chances à toute personne en situation de handicap.
Encore faut-il, madame la secrétaire d’État, qu’il soit répondu à ces deux questions urgentes : l’État honorera-t-il ses engagements financiers ? A-t-il l’intention d’ouvrir le dossier du statut institutionnel des MDPH actuellement constituées en GIP ?
Vous avez raison, monsieur le sénateur, trois ans après leur création, les maisons départementales des personnes handicapées connaissent des difficultés de fonctionnement. Le Gouvernement en est bien conscient, et nous avons eu de nombreuses occasions d’échanger sur ces questions. Ces difficultés sont effectivement, reconnaissons-le, en partie liées à la constitution et à la gestion des équipes, et notamment aux conditions de la mise à disposition de personnels par l’État.
Je ne peux en revanche pas vous laisser dire que l’État ne s’est pas investi dans ce dispositif : depuis leur création, outre le millier d’agents effectivement mis à disposition par l’ensemble des ministères, ce sont 245 millions d’euros qui ont été consacrés par l’État et la CNSA pour le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées ; ils en restent les premiers financeurs, à hauteur de 60 % de leur budget.
Parce que les MDPH constituent un élément central de la réforme de 2005, l’État respectera les engagements qu’il a pris à leur égard, sur la base de leurs conventions constitutives. Des solutions sont actuellement en cours de discussion et nous espérons pouvoir régler l’ensemble des situations dans les toutes prochaines semaines. Je dois toutefois souligner que les MDPH ne fonctionneront pas correctement sans un investissement des conseils généraux. Or les situations sont, de ce point de vue, très inégales.
Nous examinons également comment mieux accompagner les MDPH dans la mise en œuvre des compétences nouvelles qui leur ont été confiées. Je pense notamment à l’extension de la prestation de compensation du handicap aux enfants, à la réforme de l’allocation aux adultes handicapés et à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé.
Ces missions nouvelles, vous le savez, résultent de la loi du 11 février 2005. Pas moins de 150 décrets ont déjà été publiés pour mettre en œuvre cette ambitieuse loi réformant la politique du handicap. Il nous faut maintenant travailler ensemble pour aller plus loin.
Mais, vous le savez, il faut faire évoluer le statut des MDPH et de leurs personnels pour répondre aux inquiétudes justifiées que vous avez évoquées. Cette évolution se fera naturellement en concertation avec les conseils généraux, qui sont en droit de demander plus de souplesse dans la gestion de ce dispositif.
Quelle que soit la solution qui sortira de cette concertation, elle devra permettre à l’État de jouer son rôle de garant de l’équité territoriale et préserver l’innovation que constitue la participation des associations de personnes handicapées à la gouvernance des MDPH.
Une mission de l’Inspection générale des affaires sociales, confiée récemment à plusieurs professionnels, vient de nous remettre ses conclusions. Sur cette base, nous vous soumettrons des propositions, sur lesquelles nous pourrons travailler ensemble, débattre et avancer.
La politique en faveur des personnes handicapées exige une mobilisation déterminée de l’ensemble des autorités compétentes, qu’il s’agisse de l’État ou des collectivités locales que vous défendez aujourd’hui. Les personnes handicapées sont en effet en droit d’attendre un service de qualité de ces MDPH, qui sont au cœur de la réforme de 2005, portes d’entrée vers l’ensemble des outils qui sont mis à leur disposition pour accompagner leur projet de vie.
C’est une révolution par rapport aux COTOREP et aux CDES, le véritable tournant de cette politique. Nous ferons en sorte, avec votre soutien, que ces maisons départementales des personnes handicapées puissent remplir leurs missions dans les meilleures conditions. Près de 5 milliards d’euros supplémentaires ont été consacrés à la politique du handicap depuis 2005, mais il faut aller encore plus loin et améliorer les outils de gestion.
Nous sommes mobilisés sur cette question et nous avons la ferme intention d’aller jusqu’au bout de la démarche, monsieur le sénateur.
Madame la secrétaire d’État, je me réjouis, pour les personnes handicapées et leurs familles, que les dysfonctionnements en matière de financement ou de non-remplacement de postes soient en voie de résolution. Je ne mets d’ailleurs nullement en cause l’engagement financier de l’État sur l’ensemble du financement.
Je profite de ce dialogue, madame la secrétaire d’État, pour vous confirmer la volonté des conseils généraux, en partenariat avec l’État et les associations représentatives, d’assurer le meilleur accueil des personnes en situation de handicap et de leurs familles, ainsi que le traitement des dossiers dans les meilleurs délais.
Nous voulons construire avec vous et avec les associations, dans les MDPH, cette nouvelle culture que nous attendons tous et qui sera l’expression de la loi du 11 février 2005. Au-delà du bon fonctionnement de ces MDPH, c’est un grand progrès de notre société en matière de solidarité qui est en jeu. La mise en œuvre d’un droit universel à la compensation de la perte d’autonomie, porteur de dignité, sera à l’honneur de notre société.
Nous nous interrogeons néanmoins sur le côté financier : la montée en charge de la PCH et la stagnation des recettes de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie nous inquiètent. Un nouveau report de la charge financière de la prestation de compensation du handicap sur les départements, dans le contexte économique et social actuel, serait absolument insupportable pour les finances des départements.
La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 437, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les difficultés que rencontrent actuellement les caisses d'allocations familiales. Ces dernières font actuellement l’objet d’une importante surcharge de travail liée à un déséquilibre entre leurs missions et les moyens dont elles disposent.
Depuis le début de l’année, de nombreux facteurs sont à l’origine de cette situation de crise : le décalage de calendrier de renouvellement des droits, la complexification de la réglementation, la mise en place régulière de mesures nouvelles, mais aussi les exigences accrues en matière de maîtrise des risques.
Dans le département de la Haute-Loire, par exemple, la situation de la caisse d'allocations familiales s’est notablement dégradée depuis le mois de novembre du fait des 35 000 déclarations complémentaires qu’il a fallu solliciter auprès des allocataires dans le cadre de la campagne de renouvellement des droits.
Les mesures prises pour prévenir ce surcroît de travail n’ont pas suffi à résorber le retard accumulé dans les traitements de dossiers. Il faut aujourd’hui un mois environ pour traiter un dossier, soit deux fois plus de temps qu’en 2008.
À cette difficulté s’ajoute une brusque montée du nombre d’appels téléphoniques et de courriers sur les quatre sites du département. Le soutien à apporter en priorité aux bénéficiaires de minima sociaux pénalise malheureusement les nombreux autres allocataires.
Je crois savoir que d’autres départements connaissent une situation analogue. Je vous le dis avec beaucoup de modération, madame la secrétaire d’État, car nous sommes conscients que vouloir n’est pas synonyme de pouvoir.
Sourires
De plus, très prochainement, le revenu de solidarité active – le RSA – va être mis en place. C’est un enjeu politique majeur pour les caisses d’allocations familiales et les pouvoirs publics. Mais il va engendrer aussi un important supplément de travail.
Parallèlement, les caisses d’allocations familiales semblent réduire leurs aides à l’égard des collectivités locales en matière de crèches ou de haltes-garderies.
Madame le secrétaire d’État, quelles sont les mesures envisagées afin de permettre aux caisses d’allocations familiales de retrouver le plus rapidement possible la bonne qualité des services qu’elles offrent aux allocataires mais aussi aux collectivités ?
Monsieur le sénateur, un certain nombre de caisses d’allocations familiales connaissent effectivement, depuis le mois de novembre 2008, des tensions sur leur charge d’activité. Ainsi que vous l’avez indiqué, ces tensions sont principalement liées à la montée en charge de la politique de maîtrise des risques, avec la mise en place du répertoire national des bénéficiaires ou encore la concentration en fin d’année de la campagne de ressources.
Une large partie de ces tensions est ainsi de nature conjoncturelle, du fait de la mise en œuvre de réformes coïncidant avec la période des congés de fin d’année. La Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, étudie actuellement les moyens de mieux faire face à ces situations, d’une part en organisant un dispositif de répartition de la charge de travail au profit des caisses les plus en difficultés, d’autre part en diffusant les pratiques des CAF qui se sont organisées le plus efficacement pour absorber ce pic d’activité.
Concernant maintenant la généralisation du RSA, prévue dès le mois de juin 2009, le Gouvernement partage votre souci de voir cette réforme s’accompagner des moyens nécessaires à sa mise en œuvre, notamment à destination de ces caisses d'allocations familiales qui seront désormais chargées, avec les caisses de mutualité sociale agricole, d’affilier les nouveaux allocataires, d’instruire leurs droits, de liquider et de verser la prestation, mais aussi de recueillir les informations nécessaires à l’orientation des personnes concernées vers le dispositif d’accompagnement pertinent.
C’est la raison pour laquelle le Premier ministre, sur la base d’une mission conjointe de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale des finances, a souhaité affecter 1 621 emplois dans les caisses d'allocations familiales à la gestion du revenu de solidarité active.
Plus précisément, 614 emplois seront pourvus par les redéploiements internes autorisés par les gains de productivité réalisés au sein de la branche famille grâce à des mesures telles que la suppression de la déclaration de ressources ou le recouvrement des créances, et 1007 postes issus de nouveaux recrutements en 2009 seront affectés au réseau des caisses d'allocations familiales.
Au total, ce sont donc bien 1 621 emplois qui seront mobilisés pour faire face à la charge nouvelle inhérente à la mise en place du RSA au sein des caisses d'allocations familiales.
Ces dépenses de personnel, ainsi que les autres coûts de mise en œuvre – il s’agit principalement de charges de nature informatique, afin de faciliter les modalités de versement du RSA – s’imputeront sur les 100 millions d’euros dédiés à cet usage au sein du Fonds national des solidarités actives.
Si un écart entre les charges induites par la réforme et les moyens alloués à la branche devait apparaître, le Gouvernement saurait prendre les mesures appropriées. Dans le cadre des négociations en cours au sujet de la convention d’objectifs et de gestion 2009-2012, l’État s’assurera que la branche famille dispose de moyens pour faire face à l’ensemble de ses charges.
Des rendez-vous devront être prévus à la fin de l’année 2009 et de l’année 2010 pour faire le point sur la réalité des charges supportées par les CAF et s’assurer que celles-ci sont bien conformes aux prévisions à partir desquelles les moyens accordés à ces caisses ont été estimés.
Ainsi, fortes de ces nouveaux instruments, les caisses d’allocations familiales seront en mesure de remplir l’ensemble de leurs missions et de relever le défi de la généralisation du revenu de solidarité active.
Vous avez également évoqué le soutien et l’accompagnement aux politiques en faveur de la petite enfance. À cet égard, je me permets de vous rappeler que Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille, et Brice Hortefeux, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, ont souligné la volonté déterminée d’augmenter de 200 000 le nombre de places d’accueil pour la petite enfance au cours du quinquennat.
En d’autres termes, l’accompagnement des collectivités locales restera important et ambitieux, afin de renforcer le service rendu aux familles. Il s’agit, et c’est un aspect important, d’œuvrer en faveur de l’égalité professionnelle, par une bonne articulation entre vie familiale et vie professionnelle.
Nous avons bien l’intention de poursuivre nos efforts sur ce sujet également, monsieur le sénateur.
Madame la secrétaire d’État, je constate, et ce n’est pas une surprise pour moi, que vous connaissez véritablement les problèmes de la « France d’en bas ». Nous en sommes également tous conscients, vous êtes une élue sociale, qui sait répondre avec son cœur.
Seulement, comme je l’ai indiqué tout à l’heure, il y a une distinction entre ce que l’on veut faire et ce que l’on peut faire, en particulier depuis quelques mois en France.
Quoi qu’il en soit, je tiens à exprimer le message suivant : même si nous n’avons pas toujours de solution, il est important que les personnes dans une situation de difficulté puissent au moins être écoutées. Comme vous le savez, madame la secrétaire d’État, dans nos permanences, nous sommes parfois désarmés face aux demandes qui nous sont adressées.
Pouvoir expliquer ses problèmes et être écouté est déjà, me semble-t-il, un point important.
Je vous remercie des éléments que vous m’avez apportés, madame la secrétaire d’État.
La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 404, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur certaines dispositions de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
Je le rappelle, au mois de novembre 2004, j’avais pris l’initiative de déposer, avec le soutien du groupe socialiste, notamment de Mme Michèle André, une proposition de loi visant à lutter contre un tel fléau. Après son examen par le Parlement, ce texte est devenu la loi que je viens de mentionner.
La loi du 4 avril 2006 comporte de nombreuses dispositions en matière de prévention et d’éloignement de l’auteur des violences ou de prise en charge sanitaire et sociale des auteurs de violences. Elle complète également l’article 212 du code civil en y incluant la notion de « respect » et fixe l’âge légal du mariage à dix-huit ans pour les filles. En outre, elle introduit le principe de l’aggravation de la peine et l’extension de la circonstance aggravante aux anciens conjoints, concubins, partenaires pacsés, ainsi que plusieurs mesures visant à lutter contre les mariages forcés.
Par ailleurs, et c’est le principal objet de cette question orale, l’article 13 de cette loi dispose : « Le Gouvernement dépose, tous les deux ans, sur le bureau des assemblées parlementaires, un rapport sur la politique nationale de lutte contre les violences au sein des couples, portant notamment sur les conditions d’accueil, de soin et d’hébergement des victimes, leur réinsertion sociale, les modalités de la prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique des auteurs des faits […]. »
Le rapport aurait dû être déposé depuis le 4 avril 2008. Au mois de novembre 2008, j’avais interrogé M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité sur le sujet. Il m’avait été répondu que l’engagement serait tenu et que le rapport serait déposé « d’ici à la fin de l’année 2008 ».
Cet article 13, inséré dans la proposition de loi à la suite de l’adoption d’un amendement que j’avais déposé en première lecture, est très important. Il s’agit de permettre au Gouvernement et au Parlement de disposer d’informations précises sur la politique nationale de lutte contre ce type de violences.
Faut-il le rappeler, les violences subies par les femmes au sein du couple augmentent plus vite que l’ensemble des violences faites aux personnes ?
Certes, si j’en juge par les observations des associations, des progrès ont été accomplis depuis l’adoption de la loi du 4 avril 2008. Surtout, et il convient de le noter, les victimes osent de plus en plus déclarer les violences qu’elles subissent, ce qui n’était pas le cas avant l’adoption de ce texte législatif et les campagnes de sensibilisation que vous avez-vous-même mises en œuvre, madame la secrétaire d’État. En effet, à cette époque, un grand nombre de victimes renonçaient à déposer plainte par manque d’information ou de sensibilisation.
Cela m’amène à répéter qu’il faut encore et encore renforcer les campagnes générales de sensibilisation.
Je me réjouis d’ailleurs que le Premier ministre m’ait fait savoir par courrier – j’imagine que vous n’y êtes pas étrangère, madame la secrétaire d’État – sa décision d’attribuer le label « campagne d’intérêt général » à la lutte contre les violences faites aux femmes pour l’année 2009. Cela, m’a-t-il également été précisé, pourrait permettre d’ouvrir ensuite la voie à la reconnaissance de cette lutte comme « grande cause nationale » pour 2010.
Mais, aux termes de l’article 13, le Parlement doit pouvoir prendre connaissance des conditions d’accueil et de réinsertion sociale des victimes et, ce qui est tout aussi important, des modalités de prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique des auteurs des violences, autant d’indications dont les parlementaires souhaitent pouvoir disposer régulièrement.
Madame la secrétaire d’État, quel bilan peut-on dresser de l’application de ce dispositif législatif en matière de réinsertion sociale des victimes, mais aussi de prise en charge sanitaire et psychologique des auteurs de violence ? Sachez que nous n’entendons pas relâcher notre vigilance face à un tel fléau, trop longtemps sous-estimé ou relégué au rang de simple dispute de ménage.
Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur la mise en œuvre de l’article 13 de la loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs.
Comme vous l’avez rappelé, cet article prévoit que le Gouvernement dépose un rapport relatif à « la politique nationale de lutte contre les violences au sein du couple » tous les deux ans sur les bureaux des assemblées. Je souhaite d’abord vous rassurer : ce rapport est désormais transmis au Parlement.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Certes, c’est très récent, mais c’est fait !
Sourires
J’aurai d’ailleurs l’occasion de revenir sur le contenu de ce document le 19 mars prochain à l’occasion d’une question orale avec débat portant sur cette thématique.
Un tel rapport est important. C’est le premier du genre, en application de la loi du 4 avril 2006, à laquelle vous avez largement contribué. Cela constitue un tournant dans un domaine où il est difficile de mesurer l’efficacité de l’action publique. Il nous a paru important, au risque d’un retard de dépôt, d’y intégrer des mesures qui ont été mises en œuvre très récemment, mais qui sont, nous le savons, importantes et attendues
D’abord, le Gouvernement souhaitait disposer du rapport d’évaluation du premier plan global 2005-2007 de lutte contre les violences faites aux femmes, que j’avais demandé aux inspections générales des affaires sociales, des services judiciaires et de l’administration de réaliser, avec le concours de la police nationale. Ce rapport a été rendu à l’automne.
En outre, certaines mesures phares du plan de lutte contre les violences faites aux femmes ont été mises en œuvre à la fin de l’année 2008 et au début de l’année 2009. Je pense notamment à la mise en place des référents départementaux ou au recrutement des familles d’accueil. Il paraissait essentiel de pouvoir inclure le démarrage de ces réalisations ou expérimentations dans un rapport portant sur l’action du Gouvernement en matière de lutte contre les violences.
Par ailleurs, vous savez combien la question difficile du cadre juridique reconnaissant les violences psychologiques est importante.
Sur cette question, nous faisons des progrès importants. Il nous a également paru indispensable d’intégrer au bilan de ces deux années une avancée très attendue : les résultats du travail mené en partenariat avec le ministère de la justice pour progresser très concrètement dans la définition des violences psychologiques.
Enfin, et comme vous le savez, nous avons accompagné la constitution d’un collectif d’associations.
Comme l’avait suggéré M. le Premier ministre dans son discours du 25 novembre dernier, à l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, ces associations bénéficieront – vous l’avez d’ailleurs rappelé, monsieur le sénateur –, du label « campagne d’intérêt général 2009 contre les violences faites aux femmes ». Ce label a été attribué le 7 mars dernier, en lien avec les associations impliquées dans cette cause. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette décision.
Cette initiative témoigne, s’il en était besoin, de l’engagement du Gouvernement sur ces questions essentielles. Par conséquent, et à partir d’un document que nous avons voulu le plus complet possible, nous évoquerons de nouveau ce sujet le 19 mars prochain à l’occasion de la question orale avec débat posée par Michèle André.
Pour conclure, je voulais vous dire combien le Gouvernement est sensibilisé et mobilisé sur la question de l’information, que vous avez évoquée. Comment peut-on entrer dans les foyers, comment peut-on entrer dans les familles pour encourager les femmes à briser le silence ?
Nous continuerons à mener de telles campagnes de communication et de sensibilisation, notamment sur des points particuliers, comme les violences coutumières, le mariage forcé ou les excisions. Il y aura également des campagnes télévisées. Ainsi, un spot sur les violences conjugales sera lancé au milieu de l’année. En outre, dans le cadre de la préparation de la « grande cause nationale », nous allons réfléchir, avec l’ensemble des têtes de réseau, à des campagnes de communication qui pourront également avoir lieu au cours de l’année 2010.
Notre volonté est véritablement de travailler sur un projet global, de mobiliser tous les ministères, en liaison avec les associations. Nous en sommes convaincus, sur un tel sujet, il faut continuer la mobilisation au quotidien et remettre régulièrement l’ouvrage sur le métier pour parvenir à sensibiliser vraiment la population.
En tout cas, je vous remercie de votre engagement, monsieur le sénateur.
Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse particulièrement précise. Nous nous retrouverons vraisemblablement ici même, jeudi prochain, pour évoquer de nouveau cette question.
M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l’article 13 de la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, le rapport sur la politique nationale de lutte contre les violences au sein des couples.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.