Séance en hémicycle du 7 octobre 2010 à 21h00

Résumé de la séance

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La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq.

Photo de Bernard Frimat

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 5, appelé en priorité.

Titre II

DISPOSITIONS APPLICABLES A L’ENSEMBLE DES RÉGIMES

Chapitre Ier

Âge d’ouverture du droit

(Non modifié)

Au début du paragraphe 2 de la sous-section 4 du chapitre Ier du titre IV du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est ajouté un article L. 161-17-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 161 -17 -2. – L’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite mentionné au premier alinéa de l’article L. 351-1 du présent code, à l’article L. 732-18 du code rural et de la pêche maritime, au 1° du I de l’article L. 24 et au 1° de l’article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite est fixé à soixante-deux ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956.

« Cet âge est fixé par décret, de manière croissante à raison de quatre mois par génération et dans la limite de l’âge mentionné au premier alinéa du présent article, pour les assurés nés avant le 1er janvier 1956. »

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le coup de force de la présidence de la commission des affaires sociales du Sénat nous impose d’aborder prématurément, en séance de nuit, les deux principaux articles du projet de loi.

La manœuvre est grossière. Elle témoigne de l’inquiétude du Gouvernement et de sa majorité face au rejet de plus en plus massif de son projet de réforme.

Monsieur le ministre, après avoir tenté ce matin de désamorcer une mobilisation de nos concitoyens qui s’annonce plus forte que jamais, en concédant quelques mesures en faveur des mères de famille ou des parents d’enfants handicapés, vous poursuivez ce soir en essayant d’achever la discussion sur la fin de la retraite à 60 ans avant mardi prochain, nouvelle journée de mobilisation. Voilà la raison de ce coup de force !

Le relèvement progressif de deux années de l’âge légal d’ouverture du droit à une pension de retraite, objet de l’article 5, est en effet la mesure emblématique de votre projet de loi. Cette mesure n’est pas simplement symbolique et idéologique. Elle est révélatrice de votre conception de la société et de la place que vous accordez au travail dans celle-ci.

Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut faire quelque chose pour garantir la pérennité de notre système de retraite par répartition. C’est indéniable ! Mais là où le bât blesse, et nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à s’en rendre compte, c’est lorsqu’il s’agit de trouver des solutions.

Des propositions, nous en avons, et elles sont fondamentalement différentes des vôtres. C’est d’ailleurs une malhonnêteté intellectuelle de votre part, monsieur le ministre, et de celle de votre majorité de prétendre que l’actuelle opposition n’a rien à proposer.

Vous n’y croyez d’ailleurs pas vous-même, car après avoir brutalement demandé que soit mis un terme à la discussion à l’Assemblée nationale, vous tentez maintenant au Sénat, nous l’avons vu ce matin, d’éviter une discussion sérieuse sur les moyens de financer autrement la réforme que vous proposez.

Vous présentez cette mesure de relèvement de l’âge légal de départ à la retraite comme faisant partie des principaux leviers permettant de rétablir l’équilibre financier de notre système par répartition.

Vous avez d’abord prétendu que l’équilibre des régimes de retraite était avant tout un problème démographique. L’allongement de la durée de la vie ne peut tout de même pas être considéré comme une catastrophe économique, mais il exige de trouver un nouveau mode de financement des retraites et, surtout, une autre politique de l’emploi.

Cette mesure d’âge, présentée comme une évidence de bon sens, permet en fait d’évacuer toute discussion sérieuse sur de nouvelles sources de financement.

Certains membres de votre majorité ont, comme nous, mais probablement pour d’autres raisons, des doutes sur les mesures que vous préconisez pour assurer un retour à l’équilibre financier en 2018.

C’est à ce débat que vous voulez échapper, car il révélerait aux yeux de l’opinion publique combien votre réforme est socialement injuste, inefficace, et ferait de notre système de protection sociale, de notre régime de retraite en particulier, l’un des systèmes les plus rétrogrades.

Nous ne répéterons jamais assez combien elle est inéquitable, car elle repose à 85 % sur les salariés et à 15 % sur les revenus du capital, alors que dans le calcul du produit intérieur brut, la part des salaires a considérablement diminué quand celle du capital augmentait.

Non, décidemment, s’attaquer à l’âge légal de départ à la retraite en prétendant que cette mesure participerait au sauvetage de notre système est une posture idéologique.

Votre réforme est injuste, mais elle sera aussi inefficace.

Avec cette mesure d’âge, en maintenant au travail les générations les plus anciennes, vous empêcherez les jeunes d’accéder à la vie active. Et ce, sans compter avec une situation de l’emploi très dégradée qui accélérera la décrue des cotisants, creusant encore plus les déficits.

En refusant d’examiner nos propositions visant à rétablir un juste équilibre de notre système de retraite, vous fuyez le débat. Pourtant, vous n’y échapperez pas, nous y reviendrons à l’occasion de l’examen des articles 5 et 6, qui sont la clé de voûte de votre réforme.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu’importe si Nicolas Sarkozy assurait, dans son programme présidentiel, que « le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer », « le financement des retraites est équilibré jusqu’à l’horizon 2020 » ; qu’importe s’il se targuait d’avoir « voté la retraite à 60 ans » en 1981…

Le « cœur de la réforme » des retraites, selon vos propres termes, monsieur le ministre, est bien le report de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans en 2018, comme le prévoit le présent article.

De Xavier Bertrand au président du Sénat, en passant par Luc Chatel, François Fillon ou Jean-François Copé, tous à droite saluent cet allongement. Il en est un au Gouvernement qui risque pourtant de se faire très discret sur le sujet, c’est votre collègue Éric Besson.

En effet, en février 2003, Éric Besson, alors député PS de la Drôme, était le spécialiste des questions sociales au parti socialiste. Il était alors très critique envers la politique du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, dont la priorité était à l’époque la réforme des retraites promulguée en juillet 2003, après moult négociations avec les syndicats. À ce moment-là, Éric Besson condamnait cette réforme qui, disait-il « n’est pas financée » et « est injuste ».

Le futur ministre de l’identité nationale avançait les arguments suivants contre la retraite à 62 ans : « Comment peut-on demander à ce que l’on travaille jusqu’à 62 ou 65 ans alors que nous n’arrivons pas – je l’ai vu en tant que député et en tant que maire – à trouver du travail pour les chômeurs de plus de 50 ans ? Aujourd’hui le monde de l’entreprise rejette les plus de 50 ans. Et à ceux-là mêmes, il faudra dire : cotisez plus de 40 ans. C’est une aberration ! »

Et il a bien raison ! Du fait de la politique des entreprises, le taux d’activité des plus de 50 ans est, en France, un des plus bas des pays européens. Et l’État actionnaire conduit une politique similaire. Ainsi, à La Poste, l’entreprise a mis au point un plan pour pousser, discrètement mais sûrement, les plus âgés vers la sortie. Le dispositif d’accompagnement de fin d’activité, le DAFA, propose aux anciens, en grande majorité des fonctionnaires, de devancer l’appel. C’est également le cas à France Télécom.

Nous marchons sur la tête ! L’allongement des périodes de cotisation, ainsi que le report de l’âge légal de départ à la retraite vont simplement aboutir à baisser les pensions des personnes qui, de toute manière, ne pourront travailler plus longtemps.

N’oublions pas que, aujourd’hui, 600 000 seniors vivent sous le seuil de pauvreté, et ce chiffre risque fort d’augmenter avec votre réforme.

La politique sociale du Gouvernement va devenir une machine à faire des pauvres. C’est d’autant plus lamentable que, dans le même temps, il continue à mener une politique fiscale avantageuse envers les plus riches, notamment grâce au bouclier fiscal dont nous demandons l’abrogation depuis de nombreuses années.

Pour toutes ces raisons, nous nous prononçons contre votre réforme et contre le report de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

L’article 5, qui vise à compléter titre IV du livre Ier du code de la sécurité sociale, consacre le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Il est présenté comme l’article clé qui permettra de sauver le financement des retraites. De plus, il semble reposer sur une évidence qu’il serait incongru de questionner. C’est pourtant ce que je vais faire, monsieur le ministre, et je vous prie par avance de bien vouloir m’en excuser.

Nous vivons plus longtemps, il est donc normal de travailler plus. Cette idée a été si souvent assénée qu’elle semble frappée au coin du bon sens. La loi de 2003 lui a donné un contenu, en fixant une règle tout à fait arbitraire selon laquelle les gains d’espérance de vie devraient se partager entre, pour un tiers, l’allongement de la durée du travail, et, pour deux tiers, l’allongement de la retraite. Cette formule est tout aussi creuse et dénuée de fondement que la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique.

Des chiffres ronds n’ont jamais tenu lieu de politique et encore moins de règle de justice, nous rappelle fort à propos Pierre Concialdi, économiste à l’Institut de recherches économiques et sociales, dans son récent ouvrage Retraites : en finir avec le catastrophisme dont je vous conseille la lecture. Permettez-moi de vous en livrer quelques extraits.

« Les gouvernements, dont le nôtre, qui affichent cette idée font mine de se tromper d’objectif » : personne n’est dupe. « Ce ne sont pas les gains d’espérance de vie qu’il faut partager, mais les gains de productivité » pour participer au redressement du financement de nos régimes sociaux, notamment du régime des retraites.

Mais là, nous touchons à un tabou : il n’est pas question pour notre gouvernement de déplaire au MEDEF qui, lui, n’entend pas voir remis en cause un partage largement inégalitaire des gains de productivité, au bénéfice des plus gourmands de ses mandants, ceux qui sont abonnés au CAC 40. Il est plus confortable pour eux de voir reculer l’âge légal de départ à la retraite des ouvriers, des employés, des cadres – des soutiers du monde du travail, en somme –, ainsi que des femmes pour trouver des financements sans solliciter davantage leurs capitaux propres, ou seulement à la marge, capitaux avec lesquels ils pourront sans vergogne se livrer à leur jeu favori : la spéculation financière. Or, cette dernière n’apporte rien à notre économie et ne crée aucun emploi mais, en revanche, elle provoque des catastrophes, comme celles que nous avons connues au cours des années 2008-2010, pudiquement baptisées « années de crise ».

Autre argument, proclamé cette fois par le Président de la République à l’occasion des vœux aux partenaires sociaux le 15 janvier dernier : « Cela fait cinquante ans que nous gagnons un trimestre d’espérance de vie par an ». Mais l’espérance de vie à laquelle il se réfère est celle qui est évaluée à la naissance qui, en effet, a beaucoup progressé en 50 ans – je l’ai rappelé en commission des affaires sociales –, le taux de mortalité infantile s’étant effondré, et c’est heureux, de 33, 4 décès pour 1000 en 1957 à 4, 7 pour 1000 en 2007.

Or l’espérance de vie des retraités n’est pas concernée par le taux de mortalité infantile. L’important, pour un retraité, est l’espérance de vie en bonne santé qu’il a à 60 ans. Selon l’INSEE, l’espérance de vie en bonne santé est de 63, 2 ans pour les hommes et de 64, 2 ans pour les femmes. J’ajoute que l’INSEE retient une définition très restrictive de ce que l’on entend par « bonne santé », à savoir « une absence de limitation d’activité dans les gestes de la vie quotidienne et une absence d’incapacité ». Ainsi, une personne en rémission d’un cancer, atteinte d’un diabète correctement soigné ou ayant subi un pontage coronarien est considérée comme étant en bonne santé : sans commentaire !

Selon le rapport du Conseil d’orientation des retraites, l’espérance de vie à 60 ans pourrait augmenter d’un an et demi tous les dix ans, soit 0, 65 trimestre par an. C’est loin de l’allongement dont fait état le Président de la République, mais les thuriféraires de la retraite à 62 ans n’en sont pas à une approximation près.

Quant à l’espérance de vie en bonne santé, elle est déjà aujourd’hui fortement inégalitaire entre les retraités selon les lieux de vie et selon les types de professions qu’ils ont exercés tout au long de leur carrière.

Quoi qu’il en soit, le report de 60 à 62 ans de l’âge légal de départ à la retraite est une mesure idéologique aux conséquences désastreuses pour les plus fragiles de nos concitoyens, les chômeurs, ainsi que pour les femmes, qui sont particulièrement pénalisées. Et, monsieur le ministre, ce n’est pas l’amendement gouvernemental déposé à la hâte ce matin pour essayer de désamorcer le mécontentement populaire qui va sensiblement améliorer les choses.

Une autre conséquence certaine du recul de l’âge légal de la retraite, dont on parle peu, c’est qu’un plus grand nombre de salariés ne seront jamais en retraite, car, hélas ! ils seront décédés ! Si l’espérance de vie augmente, on continue de mourir avant la retraite. Ce recul signifie qu’environ 22 000 personnes supplémentaires de la génération née dans les années soixante-dix ne pourront jamais bénéficier de la retraite parce qu’elles décéderont avant d’avoir atteint l’âge de 62 ans.

Cette disposition de votre projet de loi, qui va transformer un « jeune » retraité en « vieux » chômeur et transférer le mistigri du déficit des caisses de retraite aux caisses de l’UNEDIC est de toute façon attentatoire à l’équité entre nos concitoyens. Cela revient, vous ne pourrez sérieusement me démentir, monsieur le ministre, faire payer largement le financement du système actuel de retraites par les travailleurs modestes.

La grande majorité de nos concitoyens ne saurait admettre une telle hypothèse. Nous nous opposerons donc avec la dernière énergie à l’adoption de cet article déplorable qui met fin à une grande conquête sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous anticipons donc de quelques jours l’examen de l’article 5 qui vise à repousser de 60 à 62 ans l’âge légal d’ouverture du droit à la retraite.

Pour définir un parcours professionnel, il faut tenir compte de plusieurs données : le travail, les conditions travail, la santé au travail, les congés, la formation continue et la retraite.

Je l’ai déjà dit, mais je le répète : chaque fois que les conditions de travail ont été améliorées, elles l’ont été par la gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Chaque fois qu’elles ont reculé, c’est la droite qui l’a décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Et le général de Gaulle, il n’a rien fait ? Vous dites n’importe quoi !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. Il suffit de se référer à l’Histoire pour s’en convaincre. Je vous donnerai des exemples, si vous le souhaitez.

M. Alain Gournac s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Monsieur Gournac, la vérité vous gênerait-elle ?

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

C’est parce qu’il est de droite, c’est normal !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

M. Claude Domeizel. Je pourrais citer les congés payés, les 35 heures, la retraite à 60 ans !

MM. Alain Gournac et Michel Bécot se cachent le visage.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

J’ai entendu dire, à plusieurs reprises, que le passage à la retraite à 60 ans, en 1982, avait été décidé par ordonnance. Quelle différence entre la manière dont les choses se sont passées lorsque François Mitterrand et Pierre Mauroy ont décidé de légiférer par ordonnances pour abaisser l’âge de la retraite à soixante ans et ce qui se passe aujourd'hui ! Cet abaissement était la traduction d’une promesse électorale. Il y a les présidents qui font ce qu’ils ont promis de faire et ceux qui font le contraire ! Entre le Président de la République de 1981, qui avait promis la retraite à soixante ans, et le Président de la République d’aujourd'hui, qui avait promis de ne pas y toucher, il y tout de même une différence. L’essentiel, c’est de faire ce que l’on a promis. Ensuite, que ce soit par le biais d’une loi ou par voie d’ordonnance…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Ce qui intéresse les gens, c’est non pas de savoir comment la retraite à soixante ans a été adoptée, c’est qu’elle ait été votée. Et aujourd’hui, ils veulent la conserver.

Je tiens maintenant à rétablir quelques vérités et à revenir sur certains de vos propos, monsieur le ministre.

D’aucuns soutiennent que le gouvernement de Lionel Jospin n’a rien fait pour les retraites. Dois-je rappeler la création du Fonds de réserve pour les retraites ? Vous êtes bien content de vous en servir, monsieur le ministre. Je vous promets de revenir sur ce sujet et sur votre mensonge.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

On peut en parler tout de suite si vous voulez !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Pas aujourd'hui, nous n’en avons pas le temps. Dois-je rappeler aussi la création du Conseil d’orientation des retraites ?

Sous le gouvernement de Lionel Jospin, le déficit de la sécurité sociale est passé de 54 milliards d’euros à quasiment zéro.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Évidemment, avec 6 % d’augmentation de la masse salariale !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Si nous sommes passés de 54 milliards d’euros à zéro, c’est tout simplement parce le gouvernement de l’époque a eu la volonté de développer l’emploi. C’est l’une des raisons de sa réussite : qui dit emploi dit bonne santé de notre système de protection sociale. En 2002, vous avez trouvé le régime général excédentaire. Et vous allez nous le rendre déficitaire.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Mais on ne va pas vous le rendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Monsieur le ministre, mes chers collègues, telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes opposés à l’article 6, dont nous demandons la suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant d’aborder le fond de cet article, permettez-moi de revenir sur l’organisation de nos travaux.

Alors que le projet de loi compte trente-trois articles, que nous n’avons même pas encore entamé l’examen de l’article 1er, vous avez décidé d’examiner en priorité les articles 5 et 6. Pourquoi ? Parce que votre plan de communication est déjà prévu. En dépit de tout ce que vous pouvez dire, la seule chose qui vous intéresse, c’est de faire adopter le relèvement de l’âge légal avant mardi afin de pouvoir dire à ceux qui s’apprêtent à manifester, qui espèrent encore pouvoir vous faire bouger, que la disposition étant votée, il n’y a plus besoin de lutter. Eh bien, si, il faudra continuer de lutter, quoi qu’il se passe ce week-end !

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Cette manœuvre, monsieur le ministre, est votre marque de fabrique. Elle est révélatrice de la façon dont vous considérez le Parlement. Ce n’est pas une bonne manière faite à notre travail.

La retraite à soixante ans s’inscrit dans une continuité. Le progrès social a accompagné l’histoire de l’humanité. Il s’est traduit, sur l’ensemble du xxe siècle, par l’abolition de toutes les formes de violence et d’exploitation des travailleurs.

La diminution des accidents du travail, la réduction de la durée journalière, puis hebdomadaire, du temps de travail, la suppression du travail des enfants, la création des congés payés, de la retraite, l’allongement des études ont été les étapes essentielles de ce processus.

Contrairement à toutes les tautologies et fausses évidences que vous ne cessez de nous asséner, alors que l’espérance de vie augmentait, le temps de travail a pratiquement été divisé par deux en un siècle : il passé de 2 695 heures par an en 1896 à 1 441 heures aujourd’hui.

Chaque étape de ce progrès social, revendiqué par les salariés, s’est heurtée à l’opposition massive du patronat, soutenu par la droite. De la même façon, aujourd'hui, le patronat, l’UMP et le Gouvernement s’opposent au maintien du progrès social.

On avance toujours les mêmes arguments : ces changements allaient ruiner les entreprises. Ainsi, en 1936, que disaient la droite et le patronat au sujet de la politique du Front populaire et des avancées fantastiques qu’il a permises, notamment l’instauration des congés payés ? Reprenez les articles de presse ! Ils osaient accuser le Front populaire et ses conquêtes, que personne, ensuite, n’a jamais osé remettre en cause, d’avoir ruiné l’économie du pays et préparé la défaite de 1940 !

À chaque fois, vous avancez les mêmes arguments ! À chaque nouveau progrès social, à chaque tentative de préserver un progrès social, vous nous dites que l’on veut affaiblir l’économie. Or l’histoire a prouvé le contraire. La réduction globale du temps de travail s’est accompagnée d’une très forte augmentation de la richesse par habitant, mesurée par le PIB par habitant : tandis que le temps de travail était divisé par deux, la richesse par habitant était multipliée par huit. Ces progrès n’ont donc jamais été accompagnés de décroissances ou de catastrophes économiques pour notre pays.

Le passage, en 1980, de 65 ans à 60 ans de l’âge légal du départ à la retraite reposait sur l’idée d’un « véritable droit au repos que les travailleurs sont fondés à revendiquer en contrepartie des services rendus à la collectivité, à l’issue d’une durée de carrière normale ».

Cette vérité d’hier est toujours valable, car une grande majorité des salariés liquide aujourd'hui sa pension de retraite à l’âge de 60 ans. Ainsi, en 2009, 72 % des attributions de pension de droit direct des hommes à la CNAV et 60 % de celles des femmes concernaient des salariés âgés de soixante ans. Six salariés sur dix liquident leur retraite alors qu’ils ne sont plus en activité. Voilà la réalité !

Les salariés ayant commencé à travailler jeunes arrivent à l’âge de 60 ans en ayant souvent acquis des droits supérieurs à ceux qui sont nécessaires, d’autant que le dispositif « carrières longues » a été considérablement restreint.

À 60 ans, la différence entre l’espérance de vie d’un ouvrier et celle d’un cadre est de sept ans. Or, aujourd’hui, on dit aux ouvriers qu’ils profiteront moins que les autres de leur retraite, qu’ils vont perdre sept ans de pension. Nous n’avons jamais abordé cet aspect sur le fond. Il faudra y venir, et évoquer aussi la question de la pénibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite est une injustice flagrante. Lors de la discussion des amendements, nous aurons l’occasion d’évoquer la réalité économique de la réforme, qui ne permet en rien d’assurer la pérennité du système de retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

M. le président. Mes chers collègues, sachez que je n’en voudrai à aucun d’entre vous de respecter son temps de parole.

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Assuré de votre sympathie, je sais que vous aurez à cœur de faciliter ma tâche.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Je ne suis pas persuadé que nous pourrons ce soir entendre tous les orateurs qui sont inscrits sur l’article 5. En ne dépassant pas les cinq minutes qui vous sont imparties, vous montrerez que le Sénat est une chambre de débat et que l’on s’y exprime dans le respect du règlement.

La parole est à Mme Patricia Schillinger, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes au cœur de la réforme. L’article 5 relève l’âge légal de départ à la retraite et l’âge à partir duquel il est possible de bénéficier d’une retraite à taux plein.

Cet article, cœur même de l’injustice qui caractérise cette réforme, opère une véritable régression sociale.

Cette réforme laisse en suspens la question de la pénibilité, des carrières longues ou encore celle de l’emploi des seniors. Il aurait été beaucoup plus innovant de proposer un système personnalisé, fondé sur le libre choix de la fin d’activité, et de maintenir à 60 ans l’âge légal de départ à la retraite. L’individu doit pouvoir choisir : continuer de travailler ou s’arrêter. La véritable innovation aurait été de permettre à l’individu d’avoir ce choix. Il aurait fallu une implication de l’opinion et une responsabilisation des acteurs économiques et sociaux. Or, aujourd’hui, il ne s’agit que d’une réforme sociale.

L’âge légal de départ à la retraite doit rester fixé à soixante ans, car il s’agit d’une mesure d’équité pour tous ceux qui ont commencé à travailler tôt et qui sont aussi, souvent, les plus modestes. C’est également une garantie pour des salariés usés par le travail, qui souhaitent partir, et une liberté de choix pour tous les Français.

Par ailleurs, il est surprenant que le Président de la République veuille relever l’âge légal de départ à la retraite alors qu’il déclarait, le 23 janvier 2007, dans le journal Le Monde : « Le droit à la retraite à 60 ans doit demeurer, de même que les 35 heures continueront d’être la durée hebdomadaire légale du travail. » Après son élection, il a répété à plusieurs reprises qu’il n’avait aucun mandat pour réformer les retraites. Aujourd’hui, force est de constater qu’il nous a trompés.

Or la parole donnée aux citoyens est sacrée. La réforme des retraites doit faire l’objet d’un véritable débat public, car c’est du bien commun des Français qu’il s’agit. Nul n’a le droit d’y toucher sans demander sans l’avis de nos concitoyens.

Une réforme manquant d’imagination et d’ambition ne peut pas être une bonne réforme. Pour s’adapter à notre société, qui s’est transformée, il faut de l’audace. Une réforme devrait proposer, notamment, de nouveaux moyens de financement. La réduction des solidarités collectives et des acquis sociaux n’a rien d’innovant. Car aujourd’hui, c’est bien cela que vous nous proposez : réduire progressivement les solidarités collectives et favoriser les assurances individuelles.

Dans leurs discours, le Gouvernement et sa majorité ne cessent de prendre pour exemple les modèles étrangers. Or, en France, l’âge moyen d’accès à la retraite est déjà de 61, 5 ans, car, en plus d’avoir atteint 60 ans, il faut avoir cotisé 40, 5 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein. C’est le même âge qu’en Allemagne et qu’en Espagne. Mais on peut partir avec 35 annuités de cotisations en Allemagne, 30 en Grande-Bretagne, contre 41 annuités chez nous.

Comme vous le voyez, les Français ne sont ni des paresseux ni des privilégiés. Il ne faut pas les diviser, les dresser les uns contre les autres. De telles méthodes sont dépassées et archaïques. L’effort doit, au travers d’une retraite choisie, être partagé par tous les salariés, du secteur public comme du secteur privé. L’effort doit aussi être assumé par les détenteurs de capitaux.

Des solutions existent et il est possible de rechercher d’autres financements que les dispositifs actuels. Il faut tout simplement rapprocher la taxation du capital de celle du travail.

N’oublions pas que ces trente dernières années, 10 % de la richesse produite, soit 200 milliards d’euros, ont été transférés de la rémunération du travail vers les profits. Ce transfert a bénéficié aux revenus financiers. Ainsi, en limitant la progression des salaires au profit de la rémunération des actionnaires, on limite aussi les cotisations qui alimentent les caisses de retraites et on crée des déficits. Non, les déficits ne sont pas une fatalité !

Les revenus du capital doivent être mis à contribution parce que les salariés voient de plus en plus la part de leur salaire direct stagner au profit de revenus complémentaires versés sous forme de bonus, de stock-options, mais aussi d’intéressement ou de participation.

Là encore, l’égalité doit être envisagée. Nous vous proposons une mesure d’égalité : le prélèvement de 25 milliards d’euros sur le capital à l’horizon 2025 pour une réforme équilibrée faisant participer tous les revenus au financement des retraites.

La réforme telle qu’elle est présentée est la plus dure d’Europe. Elle est la seule à modifier à la fois la durée de cotisation et l’âge légal de départ à la retraite, avec un financement assuré en majorité par les salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Raymonde Le Texier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Le Texier

Monsieur le président, du fait du bouleversement de l’ordre du jour, Mme Annie Jarraud-Vergnolle m’a demandé de m’exprimer en son nom sur l’article 5, appelé en priorité.

Dans un pays reconnu mondialement pour ses avancées sociales, sa qualité de vie, la longévité de ses habitants, mais également la productivité de ses salariés, comment comprendre que ce gouvernement cherche à sanctionner des hommes et des femmes ayant commencé à travailler jeune sur des métiers souvent pénibles et à pénaliser les femmes, aux carrières hachées, les salariés précaires, de plus en plus nombreux, ou les seniors, qui, pour la plupart d’entre eux, arrêtent de travailler avant 60 ans parce que les entreprises ne veulent plus les embaucher ?

C’est le choix de la société dans laquelle nous voulons vivre qui est en jeu.

Il est totalement inopérant de déconnecter le présent projet de loi sur les retraites d’un projet de loi sur le travail et l’emploi : l’augmentation du taux d’emploi des jeunes et des seniors conditionne la viabilité de toute politique en matière de retraite ! D’autant plus que, pour le Gouvernement, la ressource nécessaire aux financements des retraites est essentiellement assise sur les salaires.

Vos déclarations d’intention sur la mise en place d’accords-cadres non contraignants pour l’emploi des seniors, notamment lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, sont pour le moment demeurées vaines.

Pourtant, le taux d’emploi dans les prochaines décennies sera décisif, puisque le niveau de l’emploi détermine le volume des cotisations : 1 point de masse salariale supplémentaire, c’est 1, 9 milliard d’euros de cotisations en plus ! Mais nous aurons l’occasion d’y revenir lorsque nous examinerons les articles suivants.

Nous avons entendu à plusieurs reprises le Gouvernement et, plus encore, le Président de la République décrier l’abaissement de l’âge de la retraite de 65 ans à 60 ans décidé par François Mitterrand en 1982. Mais cet acquis social du droit à la retraite – je dis bien du « droit à la retraite » – à 60 ans a été bénéfique à bien des égards.

Prenons l’exemple de la microéconomie. La théorie du cycle de vie de Franco Modigliani est un modèle de prise en compte de l’âge du consommateur dans la détermination de la fonction de consommation. L’âge détermine à la fois les revenus de l’individu et son patrimoine.

De l’enfant, important prescripteur qui achète par parents interposés, au jeune adulte, aux revenus faibles et qui a tendance à s’endetter, l’individu plus mûr peut rembourser ses dettes et se constituer des ressources, voire un patrimoine pour ses vieux jours.

On a longtemps cru que le troisième âge constituait une clientèle peu accessible à la nouveauté et peu solvable face au marché. On constate maintenant qu’il s’agit de consommateurs ayant un pouvoir d’achat élevé et une grande variété de besoins spécifiques à satisfaire, compte tenu de leur disponibilité. C’est ce qu’on a pu constater dans le secteur du tourisme.

En effet, selon une enquête réalisée par l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, en 1989, 53 % des personnes âgées de 60 ans à 64 ans réalisaient des séjours touristiques, contre 33 % en 1969, soit une progression de plus de 60 %. Ce taux n’a eu de cesse de croître par la suite, atteignant même 65 % voilà cinq ans.

Et cela ne s’arrête pas là. Non seulement plus de retraités font des séjours, mais ils effectuent 89 % de leurs dépenses sur le territoire national.

Une telle évolution a permis une forte croissance du secteur du tourisme, et même une progression de la formation brute de son capital fixe supérieure à celle de l’ensemble des entreprises.

Par votre réforme, vous allez affaiblir le secteur du tourisme et des loisirs, qui emploie 822 000 personnes.

Nous le savons tous, le maintien de l’ouverture des droits à la retraite à 60 ans est un atout considérable pour notre société. Cet aspect un peu particulier du problème, peut-être pas le plus important compte tenu des trop nombreux retraités qui perçoivent à peine de quoi survivre, est simplement une raison supplémentaire pour vous demander de ne pas légiférer dans l’urgence.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Monsieur le ministre, vous avez déclaré à plusieurs reprises, dans les médias ou devant la commission des affaires sociales, que le projet de loi portant réforme des retraites, dont nous sommes saisis en ce moment, pourrait être « amélioré » – je reprends vos propres termes ! –par notre assemblée. Quel honneur !

Néanmoins, nous ne sommes pas dupes du jeu qui consiste à n’accepter que des amendements ayant une portée mineure, venant de vos propres rangs, visant au maintien du statu quo ou faisant partie d’un numéro de charme à l’égard des centristes !

Non, nous ne sommes pas dupes ! Aucune de ces prétendues avancées ne remettra en cause la philosophie générale du texte sur le fond. En effet, comme nous l’avons constaté ce matin, les décisions viennent directement de l’Élysée !

L’article 5, que nous examinons actuellement, et l’article 6 constituent le noyau dur de votre texte ; ils visent le report de l’âge légal de départ à la retraite de 60 ans à 62 ans.

Je vois bien les motivations qui ont présidé à une telle décision. Il s’agit pour vous de ne pas verser une année et demie de retraites nouvelles. Cela représente une économie de 7 milliards d’euros par an ! Mais, même si je vois bien vos motivations, je les réfute !

Une telle disposition est inacceptable, et ce pour au moins trois raisons.

Premièrement, la mesure que vous proposez ne règle en rien la question financière. Vous vous contentez de transférer des charges nouvelles vers le budget de l’État, vers l’UNEDIC et même – cela devient une habitude de votre gouvernement – vers les collectivités locales, notamment les départements, qui seront ainsi condamnés à verser le revenu de solidarité active, le RSA, des seniors au chômage pendant deux années de plus ! D’ailleurs, Pôle emploi estime à 265 millions d’euros le surcoût ainsi occasionné.

Deuxièmement, et cela a été rappelé par Patricia Schillinger tout à l’heure, votre réforme porte atteinte au libre choix de chacun ! Or la retraite doit être choisie et adaptée aux parcours individuels.

Troisièmement, le projet de loi aggrave la situation des hommes et des femmes qui ont commencé à travailler à 14 ans, 15 ans ou 16 ans, c'est-à-dire les « carrières longues » ! Ce sont ceux qui attendent déjà de partir en retraite, parce qu’ils ont cotisé pendant 42 ans, 43 ans, voire 44 ans et qui cotisent donc aujourd'hui à vide ! Pourquoi ne bénéficient-ils pas d’une pleine prise en compte de leur longue, très longue, durée de cotisations ?

À ce sujet, que dire des 414 000 apprentis que compte notre pays et qui ne cotisent qu’un trimestre pour une année d’apprentissage ?

En ne réglant pas un tel problème, vous acceptez le fait que des années entières de travail et de cotisations de salariés modestes ne soient pas valorisées par le système de retraite.

Par conséquent, le recul de l’âge légal de départ à la retraite est une décision injuste et inefficace.

En outre, comment pouvons-nous accepter une mesure qui ne tient aucun compte de la réalité du marché du travail ?

Ainsi, le taux d’emploi des seniors de 55 ans à 64 ans est, à 38 %, l’un des plus bas d’Europe ! Monsieur le ministre, savez-vous qu’il y a trois ans d’écart entre l’âge moyen de cessation d’activité, 58, 5 ans, et l’âge moyen de liquidation de la retraite, 61, 6 ans ? Cela représente trois années à galérer dans des dispositifs d’attente en tous genres ! Et vous voulez allonger encore plus cette période !

Je viens d’évoquer l’emploi des seniors, mais parlons également de l’emploi des jeunes !

Vous ne pouvez pas l’ignorer, les conditions d’insertion des jeunes sur le marché de l’emploi sont de plus en plus difficiles. Aujourd’hui, le taux de chômage des jeunes actifs peu diplômés est de l’ordre de 40%, contre 10 % pour l’ensemble des jeunes ! La précarité des emplois a considérablement augmenté !

Et ce n’est certainement pas en limitant les outils de l’insertion professionnelle mis à la disposition des jeunes, en particulier par les missions locales, que vous lutterez efficacement contre une telle précarité !

Il faut de toute urgence favoriser et améliorer l’accès des jeunes générations à l’emploi !

Monsieur le ministre, nous vous l’affirmons, l’avenir des retraites se joue aussi et surtout sur le marché du travail.

Nous vous demandons de maintenir l’ouverture des droits à 60 ans, d’écouter celles et ceux, de plus en plus nombreux, qui manifestent dans nos rues contre l’iniquité de votre projet et de cesser de faire preuve de mépris à l’égard des plus fragilisés de nos concitoyens !

Monsieur le ministre, pour mener à bien une réforme des retraites, il faut de l’écoute et de la responsabilité. Vous ne faites preuve ni de l’un ni de l’autre !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Bernadette Bourzai, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernadette Bourzai

L’article 5 vise à reculer l’âge légal de départ à la retraite de 60 ans à 62 ans. Il s’agit d’une mesure particulièrement injuste, qui marque une très grande régression sociale, en particulier pour les femmes. C’est encore plus vrai pour l’article 6, qui recule à 67 ans l’accès à la retraite sans décote.

Comme mes collègues l’ont déjà souligné, le recul de l’âge de départ à la retraite pénalisera physiquement toutes celles et tous ceux qui ont commencé à travailler tôt et qui ont exercé des emplois pénibles.

De plus, un tel recul pénalisera également financièrement toutes celles et tous ceux qui eu des parcours professionnels en « dents de scie » et qui se trouvent dans des situations de plus en plus précaires face à l’emploi à mesure qu’ils avancent en âge. Les personnes qui seront les plus pénalisées par cette réalité sont les femmes. Il s’agit – hélas ! – d’une réalité statistique clairement établie lorsqu’on constate que 86 % des hommes parviennent à valider une carrière complète, contre 44 % seulement pour les femmes, c'est-à-dire deux fois moins.

D’une part, les femmes sont pénalisées dans leur vie professionnelle. En moyenne, leurs salaires sont de 27 % inférieurs à ceux des hommes. Cela est lié au fait que 60 % des emplois non qualifiés et 83 % des emplois à temps partiel sont occupés par des femmes. Pourtant, 1, 5 million de femmes salariées souhaiteraient travailler davantage.

Par ailleurs, le taux de chômage des femmes reste autour de 11 %, contre 9, 7 % pour les hommes. La pression de la précarité sur les femmes est donc très forte.

Tout cela n’explique pas l’écart des salaires. À qualification professionnelle équivalente, l’écart demeure de 10 % à 15 %, ce que rien ne peut justifier. Au-delà des raisons dites « structurelles » et des discriminations indirectes, les femmes sont victimes d’une discrimination directe en matière de salaires, que nombre de lois et d’accords n’ont pas réussi à faire disparaître. En effet, les femmes sont concentrées dans de petites entreprises, qui échappent à la plupart des dispositions législatives et aux accords concernant l’égalité professionnelle et salariale. Or votre proposition de pénalité se limite aux entreprises de plus de cinquante salariés. Il y a donc peu de chances que la situation évolue.

D’autre part, dans un couple, l’arbitrage des carrières se fait encore presque systématiquement en faveur du mari, en cas de mutation professionnelle impliquant un changement de domicile, voire de nature ou de rythme de travail. Les femmes sont prises dans un cercle vicieux, dont la situation professionnelle et salariale inférieure à celle des hommes constitue à la fois la cause et la conséquence.

Or, dans un marché du travail fortement dégradé et concurrentiel, lorsqu’on quitte un emploi à cinquante ans, il n’est pas évident d’en retrouver un autre.

La question des rémunérations à l’embauche place également les personnes avancées en âge face à un dilemme. Il leur faut admettre des rémunérations plus faibles face à de plus jeunes demandeurs d’emploi, alors que, à la différence de ces derniers, le montant des rémunérations perçues dans les vingt-cinq dernières années sert au calcul de celui de la retraite.

Dès lors que le chômage des plus de cinquante ans a augmenté de 17, 6 % depuis un an et que six salariés sur dix sont sans emploi au moment du départ en retraite, les deux ans supplémentaires n’allongent pas arbitrairement la durée de vie active ; ils allongent en réalité la durée de la période de précarité face à l’emploi ! En outre, ils permettent mécaniquement de diminuer le montant de la pension, puisqu’ils font glisser la période des vingt-cinq dernières années sur laquelle est calculée la pension.

Nous savons tous que les retraites des femmes sont nettement inférieures à celles des hommes. Or votre réponse consiste à dire qu’il faut améliorer la situation des femmes dans l’emploi pour améliorer leur situation face à la retraite.

Nous sommes bien d'accord, mais c’est un aveu d’impuissance, monsieur le ministre ! Savez-vous que ce que vous présentez comme une solution, notamment l’égalité salariale, est en réalité l’un des objectifs du combat des femmes depuis des décennies ? Nous sommes ravies d’apprendre aujourd’hui qu’il s’agit simplement d’une mesure qui se décrète. Et je ne doute pas que le Gouvernement décrétera derechef demain matin que l’égalité salariale est un fait en France !

Rassurez-vous, nous ne sommes pas dupes. Personne dans le pays n’a compris que votre texte sur les retraites réglait le long combat des femmes pour l’égalité salariale et professionnelle, qui demeure d’actualité malgré les textes ou accords qui sont intervenus depuis trente ans !

En conclusion, je dirai que votre méthode, qui consiste à ne pas prendre en compte les différentes situations de notre population, constitue une véritable discrimination, …

Debut de section - PermalienPhoto de Bernadette Bourzai

Mme Bernadette Bourzai. … d’ailleurs dénoncée par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, la HALDE, dans son avis du mois septembre dernier. C’est inacceptable !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Notre système de retraites est confronté aux défis du vieillissement de la population et aux conséquences d’une situation de l’emploi dramatique. D’ailleurs, les deux vont de pair.

Pour autant, le projet de réforme des retraites que vous nous proposez dans l’urgence ne répond en fait qu’aux exigences de la notation financière. Il ne garantit en rien la pérennité durable de notre modèle par répartition, quoi que M. Longuet ait pu en dire tout à l’heure.

Bien au contraire, il aggrave les injustices. Sa mesure phare, le relèvement de l’âge minimum de départ à la retraite de 60 à 62 ans, accroît les inégalités et restreint les possibilités de choix des salariés, sur qui reposent l’essentiel des efforts consentis.

Ce sont nos compatriotes aux carrières incomplètes qui pâtiront le plus de la réforme en voyant leur âge de départ à taux plein reculer de 65 à 67 ans à partir de 2016.

Ce sont ainsi les femmes qui seront le plus concernées, et il ne fait aucun doute que nombre d’entre elles vont tomber dans la précarité alors qu’elles forment déjà le gros des bataillons des retraités les plus défavorisés.

Autre constat : à 60 ans, un ouvrier et un cadre ont un écart d’espérance de vie de sept ans. Les travailleurs manuels ne sont pas seulement désavantagés face à la mort : au sein d’une vie plus courte, ils passent aussi plus de temps que la moyenne en situation d’incapacité physique et de dépendance. Ces professions sont en général particulièrement touchées par les limitations fonctionnelles physiques ou sensorielles, qui concernent plus de 60 % des années à vivre après 60 ans. Cette réforme accroîtra fortement les disparités des modes de fin de vie.

Pire, ce sont ces derniers, ceux qui ont commencé à travailler jeune, qui seront les perdants du recul de l’âge de départ à la retraite. Ce sont eux qui cumulent le plus les handicaps sociaux : ils sont les moins diplômés, les plus touchés par les arrêts de travail et ceux qui disposent des plus bas revenus. C’est avant tout ceux-ci qui supporteront finalement principalement les coûts de la réforme. Ils payeront plus pour recevoir moins.

Monsieur le secrétaire d'État, le droit à la retraite est un droit fondamental, et notre système de retraite, fondé sur la solidarité entre les groupes sociaux, est un élément constitutif du pacte social. Son évolution doit se construire par le dialogue, et dans un esprit de justice et de consensus.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Le recul de l’âge de départ à la retraite impliquait nécessairement une sérieuse préparation et un large débat avant de soumettre la proposition aux parlementaires, et non quelques semaines de débat avec les partenaires sociaux et quelques jours de discussion avec les représentants du peuple que nous sommes !

Les sociaux-démocrates suédois ont instauré il y a quelques années trois ans de débat avant de réussir leur réforme des retraites sur un consensus. Vous, vous êtes pressés : 2012 pointe à l’horizon et vous avez hâte d’assumer les promesses que vous avez faites aux plus privilégiés.

Pour conclure, je vous donnerai un conseil : évitez, de grâce, de stigmatiser la gauche, qui a bien préparé le terrain avec des actions dont vous êtes heureux de profiter aujourd'hui. Je pense, notamment, au Fonds de réserve des retraites. Assez de suffisance aussi : il n’y a pas lieu de fanfaronner comme l’a fait cet après-midi le Premier ministre ; on ne peut pas être fier d’une telle réforme !

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

Si nous devions choisir un sous-titre pour l’article 5 concernant l’« âge d’ouverture du droit », ce pourrait être : « Retraites : les femmes payent le prix fort ».

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

Cet article, qui prévoit le report de 60 à 62 ans de l’âge d’ouverture du droit à une pension, s’inscrit dans la continuité des précédentes réformes de 1993 à 2003, lesquelles, malheureusement, ont toutes aggravé les inégalités entre les hommes et les femmes. L’expérience des précédentes réformes que vous avez toutes conduites, mes chers collègues de la majorité, est édifiante tant elles ont amplifié les inégalités.

Les femmes ont de plus en plus de difficultés à valider 40 annuités au cours de leur carrière professionnelle. Seules 43 % d’entre elles y arrivent, contre 86 % pour les hommes.

Le Conseil d’orientation des retraites, le COR, a montré que les personnes nées entre 1963 et 1975 enregistrent déjà, à l’âge de 30 ans, deux trimestres d’activité de différence en défaveur des femmes !

Les écarts de pensions entre les hommes et les femmes sont des gouffres : 827 euros en moyenne pour les femmes contre 1 425 euros pour les hommes. Et, sans pension de réversion, ce chiffre tombe pour les femmes à 790 euros par mois.

Comment pouvez-vous imaginer qu’une femme puisse vivre dignement avec une telle retraite ? Le mépris inscrit dans votre réforme pour les plus précaires aggravera encore plus la situation des femmes.

Augmenter la durée de cotisation et porter l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans accentuera également le casse-tête du calcul des pensions pour ces dernières.

Les dispositions de l’article 5 obligeront toutes les femmes qui ont des carrières incomplètes à effectuer des choix terribles : les femmes qui ont un travail devront travailler bien au-delà de 67 ans afin de compenser la faiblesse de leurs pensions par des surcotes ; les femmes au chômage, elles, seront contraintes soit de percevoir plus longtemps les minimas sociaux dans l’attente des 67 ans, soit de prendre leur retraite avec des décotes importantes.

La double peine infligée à toutes les femmes qui subissent déjà les profondes inégalités de notre société est un scandale !

C’est justement cette société que nous refusons et dont nous dénonçons les modalités d’organisation, cette société où le partage des richesses se fait entre quelques privilégiés et où les inégalités se creusent aussi vite qu’augmentent les profits des entreprises du CAC 40 !

Monsieur le secrétaire d'État, arrêtons-nous sur quelques grands constats.

Dès le début de l’activité professionnelle, des écarts d’emploi se font jour entre les hommes et les femmes. Ces dernières sont les plus touchées par le chômage et le temps partiel. C’est une première injustice à laquelle s’additionne la discrimination salariale : toutes générations confondues, l’écart de salaire est de 18 % à 27 %. La note s’avère donc salée pour les femmes, et votre réforme, même amendée, ne suffira pas à alléger les différences. Elle devrait pourtant chercher à atteindre trois objectifs.

Premièrement, je le dis encore une fois, il faudrait réduire les inégalités durant la vie active en prenant en compte le quotidien des femmes. L’éducation des enfants et les tâches domestiques reposent encore trop souvent sur elles seules. Ce sont autant d’éléments qui pèsent sur l’emploi, le salaire et la carrière des femmes.

Deuxièmement, il faudrait poser la question de l’articulation de la vie professionnelle avec la vie familiale.

Troisièmement, c’est le point le plus important, il faudrait réintégrer dans les régimes de retraite la question de l’égalité des genres.

Notre système de retraite par répartition, largement redistributif et correctif, permet d’atténuer les aléas de la vie. Mais vous n’avez cure de ces corrections et vous leur opposez plutôt l’allongement de la durée de cotisation et la remise en cause des droits familiaux, dans le secteur public comme dans le secteur privé.

Résultat, l’addition de toutes ces mesures injustes pénalise les femmes dont la part parmi les nouveaux retraités concernés par la décote tend à s’accroître, passant de 41 % en 2004 à 51 % en 2007.

De même, trois femmes sur dix doivent attendre l’âge de 65 ans pour compenser les effets d’une carrière incomplète et tenter d’accéder au bénéfice du taux plein.

Si les systèmes de retraites ne peuvent corriger toutes les inégalités professionnelles et sociales dont les femmes sont victimes, ils ne peuvent non plus les ignorer comme vous proposez de le faire avec beaucoup d’aisance, ni rejeter sur la solidarité nationale l’essentiel des correctifs à opérer.

Peut-être préférez-vous, mes chers collègues de la majorité, courir le risque de consacrer, au travers d’une dualité des mécanismes de retraites, une dualité sociale et de genre ? Pour moi, ce serait inacceptable.

C’est bien pourquoi, avec mon groupe, je m’opposerai au report de 60 à 62 ans de l’âge d’ouverture du droit à la retraite.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

C’est bien connu, ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent qui change de sens !

Malgré l’engagement pris par le plus haut responsable de l’État devant les Françaises et les Français de ne pas toucher à la retraite à 60 ans, alors qu’il les avait assurés qu’il était « important pour lui » de tenir la parole donnée – il avait même révélé à cette occasion qu’il l’avait voté – le couperet est en train de tomber.

Monsieur le secrétaire d'État, je vous plains quelquefois. Si le scénario que vous êtes en train de nous jouer s’était déroulé il y a quelques décennies, faute de SMS et de mails, vous seriez épuisé à force d’aller et retour entre la rue du Faubourg Saint-Honoré et la rue de Vaugirard. Car, à l’évidence, le Gouvernement est dans la stratégie et seulement la stratégie !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

C’est mieux que d’être dans la tactique à courte vue !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Son seul souci, cela a été benoîtement avoué, est de savoir de quelle manière il fera passer la pilule.

C’est ce que prouve également, depuis l’ouverture de nos débats au Sénat, la façon dont il abat les cartes de procédure au fur et à mesure. Comme l’opposition veut mener ce débat au fond et jusqu’au bout, projet contre projet, le Gouvernement demande d’abord la réserve de tous les amendements portant articles additionnels avant l’article 5. De la sorte, il évite d’examiner tout de suite nos propositions, notamment celles qui portent sur le financement.

Comme l’opposition continue malgré tout à vouloir débattre et qu’elle résiste, le Gouvernement exige la priorité sur les articles 5 et 6, qui reportent l’âge de la retraite à 62 ans et l’âge du taux plein à 67 ans.

Le Gouvernement ne cherche pas à instaurer le dialogue sur ce projet de loi, mais il s’inscrit uniquement dans le rapport de force. La considération qu’il porte aux manifestations est révélatrice de cette stratégie de bonneteau !

Mais l’acte final n’est pas encore écrit ! Il faut dire la vérité à nos concitoyens : il n’est nul besoin de reculer l’âge d’ouverture du droit à la retraite pour sauver le système. La réforme que vous voulez faire avaler aux Françaises et aux Français signe, en réalité, sa mort sur ordonnance !

Alors que la politique fiscale de baisse des impôts et de cadeaux menée depuis dix ans a ruiné les finances publiques, votre seul remède est de prendre toujours plus aux salariés en leur demandant maintenant de payer plus en travaillant plus.

Vous nous avez dit ce matin que la retraite était forcément une question d’âge puisque l’on pose toujours la question : « À quel âge prends-tu ta retraite ? » Doit-on vous faire crédit de ce que les véritables raisons qui fondent le projet de loi que vous défendez sont quand même plus élaborées que ce raisonnement ?

La vérité est que cette réforme est plus brutale qu’aucune autre menée en Europe. Elle est également la moins crédible de toutes, car elle prétend faire passer tous le monde sous la même toise, au mépris des différences. Je pense à tous ceux qui n’ont pas toujours pu travailler ou qui n’ont plus de travail, à ceux qui travaillent depuis trop longtemps, à ceux qui sont épuisés.

La vérité est que ce projet n’est pas totalement financé. Nous le savons, rien n’est assuré après 2018, et votre réforme ruine par avance le Fonds de réserve des retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Contrairement à ce que vous affirmez, vous reportez de manière irresponsable la dette sur la jeune génération d’aujourd’hui.

Nos propositions, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur le maintien de l’âge légal de départ à la retraite à 60 ans n’ont rien à voir avec la caricature que vous en faites. Nos propositions sont responsables.

Une note de Pôle emploi dans Repères et Analyses indique : « En lien avec la contraction sans précédent de l’activité économique en 2009 – chute de 2, 5 % du PIB –, l’emploi salarié recule de 1, 5 % entre fin décembre 2008 et fin décembre 2009, soit une perte nette de 256 100 postes de travail. Un tel niveau des destructions nettes d’emploi salarié n’avait jamais été observé depuis l’après-guerre. »

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Monsieur le ministre, ce n’est pas d’un relèvement de 60 à 62 ans de l’âge d’ouverture du droit à pension que notre pays a besoin : notre pays a besoin d’emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

La retraite est une assurance, ce n’est pas seulement une allocation. Ce n’est pas non plus un privilège, c’est un droit pour lequel les salariés ont souscrit toute leur vie.

Une réforme des retraites mérite mieux que ce médiocre exercice de rafistolage, aussi injuste que cynique !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Cet article, point central de la réforme proposée par le Gouvernement, est, pour le groupe socialiste, absolument inacceptable. En effet, le recul de l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans, fût-il progressif, ne manque pas d’inquiéter en raison, notamment, de l’état actuel du marché du travail dans notre nation et, plus particulièrement, de la situation de l’emploi des personnes de plus de 50 ans. Quelle est donc la situation de l’emploi de ces personnes ?

Selon l’INSEE, en 2009, seuls 38, 9 % des personnes âgées de 55 à 64 ans avaient un emploi, niveau inférieur de sept points à la moyenne de l’Union européenne, qui est de 46 %.

Selon les chiffres du ministère, publiés en août de cette année, le taux de chômage des personnes âgées de 50 ans et plus a augmenté de plus de 17 % entre juillet 2009 et juillet 2010.

En outre, depuis 2008, la HALDE et l’OIT publient conjointement, chaque année, un « Baromètre sur les perceptions des discriminations dans les entreprises et la fonction publique ». Selon ce baromètre, en 2009, les discriminations liées à l’emploi constituaient 50 % des saisines de la HALDE et, parmi ces saisines, la discrimination fondée sur l’âge figure au troisième rang des motifs de plainte. Cette discrimination est, d’ailleurs, reconnue par la justice. Je tiens à citer l’exemple d’un agent public de 47 ans seulement, auquel il a été interdit d’intégrer un grade supérieur en raison de son âge, alors qu’il avait réussi le concours lui permettant d’obtenir une telle promotion. Le tribunal administratif de Saint-Denis de La Réunion a reconnu, en mars de cette année, que cette personne avait subi une discrimination liée à son âge.

Ces éléments statistiques doivent nous interroger sur la pertinence de faire passer de 60 à 62 ans l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite.

En effet, de nombreux salariés de plus de 50 ans souhaiteraient pouvoir exercer une activité leur permettant de vivre décemment. Le Gouvernement devrait donc mettre en place une réelle politique de l’emploi en faveur des seniors, plutôt que de vouloir les voir travailler plus longtemps.

Faute d’une telle politique, il est quasiment certain que l’assurance chômage devra payer pour les personnes concernées. Il s’agit purement et simplement d’un transfert de charges, transfert auquel le Gouvernement nous a habitués dans d’autres domaines.

Selon une étude de Pôle emploi – citée dans le journal Les Échos du 28 septembre 2010 –, le relèvement de l’âge de la retraite aura pour conséquence d’empêcher plusieurs milliers de personnes de basculer du chômage vers la retraite.

Selon une note de l’UNEDIC – citée dans le journal La Tribune du 28 septembre 2010 –, la réforme des retraites aura un coût compris entre 440 millions et 530 millions d’euros pour l’assurance chômage, ce qui fait écho à la déclaration de François Fillon, qui a affirmé le 16 septembre dernier que « les partenaires sociaux qui gèrent l’assurance chômage vont devoir intégrer le réforme des retraites ».

Ainsi, il apparaît très clairement que cette réforme ne fait que déplacer un très important problème, au lieu de lui apporter une solution pérenne.

Dans le cadre de son projet alternatif au projet du Gouvernement, le Parti socialiste prévoit une politique dynamique et volontaire pour l’emploi des seniors. Les objectifs de cette politique sont de permettre aux seniors de retrouver une activité, tout en évitant de transférer une partie du coût des retraites sur l’assurance chômage.

Nous persistons par conséquent à refuser l’allongement de la durée de travail, ce qui nous conduit à demander la suppression de l’article 5.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Vous prétendez réformer notre système de retraite pour lui permettre de retrouver l’équilibre, sans aborder une seule fois la question fondamentale de son financement. Nous aurions pu, par exemple, nous attendre à un volet spécifiquement dédié au financement des retraites. Or, à la lecture du projet de loi, nous constatons que ce volet manque cruellement, et pour cause.

En effet, prévoir un volet « financement » aurait supposé de votre part la volonté d’apporter des ressources supplémentaires et, surtout, pérennes, à notre protection sociale. Plutôt que d’agir ainsi et de faire contribuer les millions d’euros qui échappent au financement solidaire de la sécurité sociale, vous avez fait le choix de rallonger la durée de vie professionnelle des salariés, alors que, dans le même temps, les salaires et les pensions ont baissé considérablement, particulièrement depuis 1993, c’est-à-dire depuis la réforme Balladur.

Comment ne pas rappeler que, pour les salariés du secteur privé, le passage aux quarante annuités de cotisation, la prise en compte des vingt-cinq meilleures années et l’indexation des pensions sur les prix ont eu pour effet de diminuer de 10 % à 15 % la valeur des pensions des salariés ayant eu une carrière complète, la baisse atteignant même 20 % à 25% pour ceux n’étant pas parvenu à justifier d’une carrière complète.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on sait déjà que les articles 4, 5 et 6 de ce projet de loi entraineront un écrasement des retraites.

Pourtant, notre pays n’a jamais été aussi riche et les actionnaires ne se sont jamais partagé des dividendes aussi importants. À peine la crise finie, les profits des entreprises cotées au CAC 40 explosaient déjà de 80 %.

La productivité des salariés de notre pays n’a pas cessé de progresser, augmentant de manière continue la masse des richesses produites par salarié. Deux actifs d’aujourd’hui produisent autant, ou presque, que trois actifs en 1983. Tous les économistes le disent, les progrès de la technique et des sciences permettront encore, dans les années à venir, une augmentation considérable du ratio salarié sur valeur ajoutée.

Malgré cela, l’on voudrait nous faire croire que dans un tel contexte économique, il n’y aurait pas d’autres solutions pour financer les retraites que de reporter de deux ans l’âge légal de départ à la retraite.

Il ne s’agit en fait que d’une posture idéologique.

Vous faites travailler plus longtemps les salariés pour permettre aux actionnaires de faire fructifier plus longtemps leurs capitaux, sans jamais exiger que les richesses qu’ils accumulent soient davantage dirigées vers la solidarité.

C’est pour éviter que Nicolas Sarkozy trahisse la promesse qu’il avait faite au MEDEF de ne pas augmenter les impôts que vous procédez de la sorte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Qu’importe s’il manque à un autre engagement, pris non pas devant une minorité de nos concitoyens, mais devant tous les Français, celui de ne pas revenir sur le départ à la retraite à 60 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Souvenez-vous du document de campagne, que vous avez sans doute distribué, mes chers collègues de la majorité, qui indiquait: «la retraite à 60 ans doit rester un droit ». Souvenez-vous des déclarations de Nicolas Sarkozy en mai 2008 : «Je dis que je ne le ferai pas, je n’en ai jamais parlé au pays et cela compte pour moi, je n’ai pas de mandat pour cela ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Ou encore, de cette dernière déclaration, plus récente : « Nous avons toujours été pour la retraite à 60 ans. ».

Finalement, vous supprimez la retraite à 60 ans, ce qui aura tout simplement pour effet de priver les salariés de deux années de vies passées à faire autre chose que travailler, sans toutefois parvenir à financer l’intégralité de votre projet. La preuve en est qu’un grand quotidien national de l’économie annonçait le 30 septembre dernier qu’il manquait au moins 2, 5 milliards d’euros pour que les régimes de retraites soient à l’équilibre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Vera

Il ne faudra donc pas attendre 2018 pour que de nouveaux « mauvais coups » pleuvent, le prochain projet de financement de la sécurité sociale comportera pour les salariés son lot de mauvaises surprises.

Pour toutes ces raisons, nous nous opposerons avec fermeté à cet article 5, qui remet en cause le droit fondamental du départ à la retraite à 60 ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Avec cet article, nous entrons véritablement au cœur des dispositifs « piliers » du projet du gouvernement, piliers qui détruisent le droit à la retraite pour tous dans des conditions décentes.

Tout d’abord, une atteinte, peu anodine, à ces droits, fait passer l’âge de départ légal à la retraite de 60 à 62 ans. Mais comme si cette régression sociale ne suffisait pas, il faut y ajouter l’article précédent, qui prévoit l’allongement de la durée de cotisation des assurés pour la porter à quarante et une annuités et demie.

Enfin, pour s’assurer coûte que coûte que rien ne viendra entraver les intérêts financiers ni de l’État ni des entreprises, on assène le « coup final » : la retraite sans décote n’est assurée qu’à partir de 67 ans, et non plus 65 ans.

Trop soucieux de la réduction de la dette publique pour satisfaire les agences de notation et les marchés financiers, l’État sacrifie donc purement et simplement les salariés.

Le cumul de ces trois principales atteintes portées au régime de retraite actuel aura des conséquences dramatiques pour chaque assuré, qui se verra obligé de choisir entre une retraite avec pension entière accordée très tardivement, amputant ainsi son temps de retraite en bonne santé, ou une retraite à un âge décent, au sacrifice d’une partie de ses cotisations.

Est-ce, franchement, un choix raisonnable et, surtout, efficace tant au plan économique que social ?

Cette réforme est d’autant plus inadmissible qu’elle ne tient pas compte de la pénibilité du travail accompli. Les maigres mesures destinées à prendre en compte les conditions de travail difficiles ne font qu’évoquer le handicap. Une autre question se pose : celle de la reconnaissance collective de la pénibilité de professions en lien avec la nature du travail accompli et de ses conditions d’exercice.

Je voudrais ici, pour appuyer mon propos, évoquer un métier, parmi beaucoup d’autres, que cette réforme impactera énormément. Je veux parler du métier d’enseignant, dont l’exercice jusqu’à 62 et 67 ans serait très difficile et aurait des conséquences importantes pour les enseignants, mais aussi pour les élèves et, in fine, pour l’avenir du pays.

Une étude du Centre de recherches et d’études sur l’âge et les populations au travail de novembre 2009, réalisée à l’initiative de Dominique Cau-Bareille, s’est penchée sur le « vécu du travail et la santé des enseignants en fin de carrière ». Cette étude confirme que beaucoup d’enseignants souhaitent quitter dès que possible un métier qu’ils jugent souvent pénible et fatiguant.

En dehors des conditions d’exercice de ce métier, il faut noter un premier facteur qui pèse nécessairement sur les enseignants. Ce métier, autrefois valorisé, est aujourd’hui dénigré, accompagné de peu de reconnaissance.

Mais au-delà, la fin de carrière des enseignants est assez mal vécue du fait de difficultés propres au métier.

Enseigner signifie en effet être présent, attentif à chaque instant, initier, écouter chaque élève ainsi que les familles, répondre aux attentes et aux espoirs qu’elles placent en eux, ou encore gérer les élèves en difficultés, ainsi que les tensions au sein de l’école, et tout cela dans un contexte de forte réduction de postes, imposée depuis plusieurs années par votre Gouvernement. Tout cela contribue à générer un stress important chez les enseignants, qui s’épuisent au fur et à mesure des années.

Il faut à cela ajouter un élément : les professeurs des écoles entrent dans la vie active assez tardivement, et cette tendance ne va pas aller en s’arrangeant, puisque le recrutement des enseignants se fera désormais au niveau du master. Ainsi, les professeurs des écoles entrent dans la vie active à 27 ans en moyenne.

Que dire, d’ailleurs, de la « masterisation », qui place actuellement de jeunes enseignants sans aucune formation professionnelle devant une classe, ce qui génère beaucoup de souffrance ?

Une profession pénible, une carrière qui commence tard, le fait que près d’un enseignant sur trois est parti à la retraite en 2007 avec une décote, tout cela doit nous fait comprendre la nature des difficultés vécues en fin de carrière.

Qu’en sera-t-il après cette réforme qui repousse à 67 ans l’âge de départ à la retraite sans décote ? Tout laisse à penser que cette profession, dans son exercice comme dans son système de retraite, va se dégrader considérablement. Faut-il rappeler ici toute l’importante de ce métier ?

Les enseignants forment de jeunes citoyens, et l’exercice de ce métier est primordial. Il est essentiel, dans l’intérêt de l’enseignant comme de l’élève, que ce métier s’exerce dans des conditions psychologiques et physiologiques qui permettront à chaque élève de tirer profit du savoir dispensé, mais aussi aux enseignants de ne pas subir leur fin de carrière.

Les enseignants jouent un rôle déterminant pour l’avenir de notre pays. Ce serait mal connaître et reconnaître leur rôle que de les condamner à percevoir une retraite indécente ou à enseigner en mauvaise santé sans plus de passion et ni de motivation.

Je suis, pour toutes ces raisons, formellement opposée à la destruction de la retraite qui nous est proposée par cet article.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

« Mes ouvriers meurent en moyenne à 62 ans. Je n’ai donc aucun problème pour leur offrir la possibilité de partir en retraite à 60 ans. »

Cette formule, dont on ne sait s’il s’agit d’une boutade cynique ou du constat chagriné de la réalité des faits, fut, dans les années 1970, prononcée par l’un de ceux que l’on a pu présenter comme de « grands capitaines d’industrie », en l’espèce M. Francis Bouygues, PDG du groupe du bâtiment et des travaux publics du même nom.

Je ne sais si son fils reprendrait aujourd’hui les mêmes termes pour décrire la situation de ses salariés – au moins pour le cœur de métier originel du groupe –, mais le fait est que cette remarque s’inscrit, sous bien des aspects, au cœur des enjeux de notre débat.

On n’a cessé de nous répéter, depuis plusieurs mois, que l’allongement de la durée de la vie, produit des progrès accomplis par l’ensemble de la société grâce à la sécurité sociale, allait nous imposer de consentir un allongement subséquent de la durée de la vie professionnelle.

En effet, on n’aurait plus 60 ans en 2010 comme on pouvait avoir 60 ans en 1981, lorsque la gauche, enfin arrivée au pouvoir, décidait de faire droit à une très ancienne revendication du mouvement ouvrier, à savoir la retraite à 60 ans.

Les docteurs « la rigueur » qui professent aujourd’hui l’allongement de la durée de la vie active – ce qu’il faut donc bien appeler un recul social – oublient évidemment de rappeler que la décision de fixer l’âge de la retraite à 60 ans n’avait pas vocation à être prise de manière isolée. Pour ceux qui s’en souviennent, la retraite à 60 ans fut accompagnée de la création de la cinquième semaine de congés payés, …

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

… véritable vecteur de développement de l’activité dans le secteur du tourisme au sens large, de la réduction du temps de travail à 39 heures – ce qui nous valut à peu de choses près les mêmes discours ineptes que lors du passage aux 40 heures en 1936 et lors de la mise en place des 35 heures ensuite –, mais aussi de la loi instituant les contrats de solidarité.

La raison d’être de ces contrats de solidarité consistait à faciliter l’insertion sociale et professionnelle des jeunes en assurant un renouvellement des effectifs des entreprises dont un nombre plus ou moins important de salariés étaient appelés à faire valoir leur droit à pension. Le principe du contrat de solidarité, c’était le passage de témoin entre l’ancienne génération, étant enfin parvenue à faire valoir son droit au repos, et la nouvelle, qui pouvait enfin concrétiser son droit au travail.

Que l’on ne s’y trompe pas : sans dispositif digne de ce nom tendant à permettre aux salariés âgés de plus de 50 ans, et singulièrement de 55 ans, de prolonger leur activité professionnelle – or ce texte n’en prévoit aucun car, à l’instar de bien d’autres, il se contente d’offrir aux entreprises de nouvelles exonérations sociales en lieu et place de toute autre mesure ou obligation –, on ne fera qu’installer un nombre grandissant de personnes dans la précarité, le chômage et, à terme, la pauvreté !

Reculer l’âge de départ en retraite, c’est faire payer au monde du travail le prix fort des progrès que ses cotisations – et donc son travail – ont permis à l’ensemble de la société d’accomplir. Il n’est pas vrai que chacun et chacune, dans ce pays, soit à égalité devant l’âge, et donc la retraite. Il est notoire que l’on vit moins longtemps lorsqu’on a été mineur, mouleur noyauteur ou peintre en bâtiment, que lorsqu’on a été instituteur, cadre de banque ou même électricien EDF.

Il est donc injuste de prolonger ces injustices et de les rendre encore plus intolérables avec cet article 5.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

Nous savions déjà que votre gouvernement avait tout fait pour éviter la négociation avec les organisations syndicales. Nous savions aussi que vous aviez tout fait pour éviter le débat à l’Assemblée nationale. Nous savons aujourd’hui que vous voulez également hâter le débat dans notre hémicycle.

Cette précipitation est la preuve que cet article 5, qui porte la retraite à 62 ans d’une manière assez ignominieuse, vous rend quelque peu honteux et que vous avez peur de la capacité de nos concitoyens à se mobiliser. Vous savez également que, sur les bancs de l’opposition, nous sommes entrés en résistance face à votre projet de loi.

M. Woerth parlait hier de consensus sur le report de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite : encore une incantation destinée à démobiliser les salariés ! Mais la réalité est tout autre : nous sommes résolument opposés à cet article 5, qui traduit un recul social sans précédent. Nous sommes contre cet article 5, parce que nous considérons que la mobilisation des sommes qui échappent aujourd’hui à la solidarité pourrait permettre de garantir le maintien du départ à la retraite à 60 ans.

Vous avez d’ailleurs profité de toutes les possibilités que vous donne le règlement de notre assemblée pour nous confisquer le débat sur le financement des retraites. Cela ne nous empêchera pas de porter la contradiction que vous préféreriez escamoter !

De la même manière, la priorité demandée pour les articles 5 et 6 n’entamera en rien notre mobilisation, comme celle des salariés. Vous avez réformé le règlement du Sénat afin, dites-vous, de rendre à notre assemblée la maîtrise de son ordre du jour. Cette maîtrise reste somme toute limitée, puisqu’il suffit au Gouvernement de demander une priorité pour l’obtenir, même si elle répond à des fins peu honorables.

Mais nous ne sommes pas dupes, vous voulez envoyer un signal fort aux manifestants : les deux articles les plus symboliques ayant été adoptés, il n’y aurait plus lieu de manifester. Nous pensons, au contraire, que la mobilisation ne sera que renforcée si vous nous obligez à adopter immédiatement ces deux articles qui témoignent d’une certaine ignominie !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Mme Marie-Agnès Labarre, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

En présentant une proposition de financement pour le maintien de la retraite à 60 ans, les sénateurs du Front de gauche ont montré qu’il était possible de conduire une réforme juste et efficace dans ce pays, et ils sont entendus par le peuple français à un point que vous n’imaginiez sans doute pas !

Brandissant sans cesse l’argument fallacieux de la démographie, comme pour mieux dissimuler vos réelles intentions, vous vous arc-boutez sur votre nouveau dogme : pour faire comme les autres pays européens, vis-à-vis desquels vous établissez d’ailleurs des comparaisons hardies, il faudrait sans délai retarder de deux ans l’âge d’ouverture du droit à la retraite.

Eh bien, si nos amis grecs et espagnols ont dû subir cet affront…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Ils ont pourtant des gouvernements socialistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

… c’est que les biens publics grecs et espagnols ont été pillés par les vautours de la finance... avec votre bénédiction et celle du FMI !

C’est vrai, bon nombre de pays européens ont fait le choix de « passer les bornes », dans tous les sens du terme, qu’ils soient libéraux « pur sucre » ou teintés de social-démocratie. Bon nombre de gouvernements européens ont préféré en effet le financement de la spéculation au financement des régimes sociaux : comme en France, ils ont préféré servir des dividendes plutôt que des salaires.

Voilà pourquoi la corde se tend entre le peuple et vous : il n’est écrit nulle part que la France soit condamnée à ce régime qui enrichit les riches et appauvrit les pauvres. Hurler un mensonge et le répéter en boucle n’a jamais eu pour effet de transformer ce mensonge en vérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Agnès Labarre

Quel est ce mensonge ? Le mensonge, c’est que la France de 2010 n’aurait plus les moyens de s’offrir ce que celle de 1945 et de 1981 lui ont permis de se payer. Le fautif ? La mondialisation.

Quelle est la réalité ? La réalité, c’est que la France n’a jamais été aussi productive, ni aussi riche. Deux salariés produisent aujourd’hui plus de richesse que trois il y a trente ans.

La réalité, c’est que le gouvernement de la France, le vôtre, a choisi de distribuer ce surcroît de richesse de façon injuste, inéquitable, insupportable.

La réalité, Le Parisien de ce jour nous la rappelle en rendant public le rapport de la Cour des comptes sur les niches fiscales et sociales qui bénéficient aux entreprises et, bien sûr, peu à l’emploi ; le manque à gagner pour les caisses de l’État et des organismes sociaux qui en découle s’élève à 172 milliards d’euros.

La réalité, c’est que votre bouclier fiscal a pour effet d’assécher les comptes publics et de placer de fait notre système de solidarité en faillite.

La réalité, c’est qu’on a volé l’argent des salariés pour l’offrir aux financiers qui nous fabriquent cette mondialisation qui vous va si bien et que vous prenez comme prétexte pour nous vendre l’invendable : il faudrait travailler plus durement, plus longtemps, moins se soigner, moins étudier, pour être compétitifs !

Gageons que, grâce à vos bons soins, nous serons compétitifs le jour où nous recommencerons à travailler dès 8 ans, jusqu’à 75 ans, avec des semaines de 48 heures, usines et bureaux ouverts le dimanche, payés à l’heure « productive » et à coups de trique ; le jour où les employeurs n’auront plus à cotiser au chômage. Oui, ce jour-là, le prix de revient de notre production nationale sera enfin revenu au niveau de celui de l’Asie du Sud-Est. Qui sait s’il ne sera pas même inférieure, car ces gens-là, voyez-vous, prétendent aussi gagner et améliorer leur vie !

Voilà pourquoi nous ne sommes pas dupes : le passage à 62 ans n’est qu’une étape, rien qu’une étape dans le processus de déconstruction de notre modèle de société.

Vos 62 ans ne sont même pas crédibles : qui croira qu’on pourra partir sans décote à 62 ans, quand les débuts de carrière sont retardés, chômage oblige, quand les carrières sont morcelées, quand la flexibilité de l’emploi et les temps partiels subis sont érigés en summums de la modernité dans le travail ? Qui partira à la retraite à 62 ans en ayant cotisé le nombre de trimestres que vous exigerez de lui ? Qui partira à la retraite à 62 ans avec une pension de misère, quand vous ne voulez pas entendre que le SMIC lui-même, auquel le futur retraité pourra difficilement prétendre, est un salaire de misère qui ne permet pas de se loger et de se nourrir en même temps ?

En réalité, vous nous inventez la retraite à 67 ans. Pour ce faire, pour faire adhérer les naïfs à vos fausses évidences, vous nous faites le coup de la durée de vie qui s’allonge, en conséquence de quoi, mesdames, messieurs, il est bien normal que la durée de travail s’allonge en proportion...

Mais de quelle vie parlez-vous ? De la vie biologique ou de l’espérance de vie en bonne santé ? Certains de nos concitoyens, voyez-vous, ont un boulot qui ruine leur santé, et il ne s’agit pas seulement des travailleurs de force. Ils se ruineront donc deux ans de plus, si on ne les vire pas avant – voire davantage, pour ceux qui auront besoin de plus qu’une aumône en guise de pension, et ceux-là se répareront moins bien, moins vite et moins sûrement. C’est plus abîmés qu’ils vivront vieux : qui convaincrez-vous que c’est là le destin des travailleurs des pays riches comme le nôtre ?

De plus, vous savez bien que ce n’est pas le nombre d’actifs potentiels qui importe, mais bien le nombre de cotisants, car des actifs au chômage ne participent pas au financement des retraites.

La question première est donc bien celle de l’emploi : si tous les actifs avaient un emploi, la question du financement de toutes les caisses de solidarité existantes serait résolue.

Bref, la retraite, c’est à 60 ans, et il est urgent de l’améliorer, pas de la fusiller ! Puisque nous savons comment nous y prendre, laissez-nous faire !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Monsieur le ministre, vous présentez le recul de l’âge légal de la retraite comme la seule piste sérieuse pour sauver le système par répartition.

Il vous est difficile de nier les conséquences sociales de ce recul : ainsi, les salariés ayant commencé à travailler tôt vont devoir cotiser au-delà de la durée légale et terminer leur carrière dans des conditions pénibles. Des millions de salariés, celles et ceux qui ont eu les parcours les plus chaotiques, les plus précaires, vont devoir travailler jusqu’à 67 ans.

Mais à cette objection sociale, vous opposez un impératif économique : ce serait le prix à payer pour sauver le système. Or, à l’évidence, vous refusez de voir la réalité économique du pays. Vous négligez complètement la réalité du marché du travail…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

La France a l’un des taux d’emploi des actifs de 55 à 64 ans les plus faibles d’Europe, avec 38, 9 % des seniors au travail ! Dans ce domaine, notre pays détient un triste record : la moyenne européenne avoisine en effet les 45, 6 %.

Bien trop souvent, hélas, les salariés sortent du travail par le chômage, par le licenciement, mais pas par la retraite, et 57 % des chômeurs de 50 ans et plus sont des chômeurs de longue durée. Je le répète : seuls 40 % des actifs âgés de plus de 58 ans sont encore au travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Et les autres ? Que vont-ils faire entre 58 et 62 ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Rester deux ans de plus au RMI, au RSA, ou au chômage, sans revenus, en attendant 62 ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Angels

Et ce ne sont pas les quelques mesurettes que vous proposez pour l’emploi des seniors qui vont changer quoi que ce soit à cette dramatique situation. Vous vous contentez de reprendre à votre compte le double discours du MEDEF qui réclame à cor et à cri le recul de l’âge légal, tout en laissant les entreprises se débarrasser prioritairement des salariés les plus âgés.

Votre raisonnement économique ne tient donc pas, puisqu’il revient à transférer le déficit du régime vieillesse vers l’assurance chômage ! C’est un comble, quand on se souvient que vous aviez prévu exactement le contraire, il y a cinq ans, puisque vous prétendiez tout résoudre en transférant une partie des cotisations d’allocations chômage au financement des retraites !

Monsieur le ministre, il n’y a pas de meilleur moyen pour pérenniser le système de retraites que la lutte contre le chômage et une véritable politique de l’emploi ! Or, les chiffres récents témoignent de l’inefficacité de votre politique dans ce domaine.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Cela fait maintenant huit ans, monsieur le ministre, que votre majorité est au pouvoir – huit ans de trop ! Cela fait huit ans qu’elle dispose de tous les leviers. Le bilan est édifiant : tous nos comptes sont dans le rouge ; les déficits se creusent ; le chômage des jeunes et des seniors augmente.

Face à cette situation économique et sociale désastreuse, dont vous êtes comptables, nous pensons aussi qu’il faut agir.

Les socialistes français, tout comme la société française, savent qu’une réforme des retraites est nécessaire, et ce non pour de simples raisons démographiques, lesquelles ont néanmoins leur importance, nous ne l’avons jamais nié.

Les Français savent que cette réforme est nécessaire, mais ils veulent une réforme juste. Ils savent aussi que le seuil des 60 ans constitue pour eux un bouclier social que vous voulez dynamiter.

Qui est concerné par le report de l’âge légal de la retraite de 60 ans à 62 ans ?

Ceux qui ont commencé à travailler tôt : avec ce projet, un salarié ayant débuté dans la vie professionnelle à 18 ans va devoir cotiser 44 annuités ; ceux qui, à quelques années de la retraite, éprouvent une grande fatigue liée à la pénibilité de leur emploi.

Ces ouvriers, ces employés, vous les soumettez à la double peine. Non seulement ils vont devoir attendre deux ans de plus pour pouvoir entamer une nouvelle période de leur existence, mais rien n’est prévu pour eux en matière de pénibilité. Vous confondez pénibilité et invalidité ; c’est consternant !

Vous faites payer par les plus modestes l’essentiel de l’effort de financement ; c’est profondément injuste !

Vous mettez aussi à contribution les collectivités locales : 60 % des Français de plus de 55 ans sont en situation de chômage ; s’ils doivent attendre 62 ans pour toucher leur retraite, cela signifie qu’ils vont devoir passer par la case RMI et RSA.

L’équilibre des comptes que vous nous présentez pour 2018 est factice : c’est notamment l’assurance chômage et les collectivités locales qui vont payer une grande partie de la facture.

Ce n’est pas l’allongement de l’espérance de vie qui est une menace pour nos retraites.

Ces gains de vie, nous les devons à la mise en place de l’État providence, que vous n’avez cessé de vouloir démanteler.

Ces gains de vie, nous les devons à notre modèle social, héritage du Conseil national de la résistance, que vous ne cessez de casser.

L’issue n’est pas dans ce report infini de l’âge légal de la retraite : 62 ans aujourd’hui… Pourquoi pas 65 ans ou 70 ans demain ?

L’issue est dans une politique active en faveur de l’emploi.

Je vous entends encore dire : « Nous irons chercher la croissance avec les dents », ou encore : « Travailler plus pour gagner plus ».

Sans politique de l’emploi, sans une croissance riche en emploi, monsieur le ministre, votre réforme échouera comme a échoué la réforme Fillon de 2003.

Parce que le seuil des 60 ans constitue aujourd’hui le dernier bouclier social des plus modestes, de ceux qui se lèvent tôt pour travailler, nous refusons le report de l’âge légal de la retraite à 62 ans.

C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article 5 du projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Samia Ghali

Que met en jeu l’article 5 du projet de loi ? Une chose simple à comprendre et que nos concitoyens ont parfaitement compris !

Ce qui est en jeu, c’est la justice. C’est la possibilité de partir à la retraite à 60 ans pour ces hommes et ces femmes qui, parce qu’ils ont commencé à travailler jeune ou ont été formés à leur métier par l’apprentissage, ont, dès aujourd’hui, un nombre de trimestres largement suffisant pour pouvoir prétendre bénéficier de leurs droits sans avoir à prolonger leur activité deux années de plus.

Ces hommes et ces femmes, nous voulons les défendre, car ils ont besoin d’une protection, et cette protection, c’est le rempart que constitue la possibilité de partir à la retraite à 60 ans.

L’âge légal actuel est le bouclier social des plus modestes !

Le dispositif des carrières longues ne répond pas à ce défi. Actuellement, environ 300 000 personnes partent chaque année à la retraite à 60 ans en ayant une, voire deux années de cotisation de plus que ce qui leur est nécessaire pour faire valoir leurs droits à pension.

Ces 300 000 personnes vont être directement impactées par votre réforme. Elles en seront les victimes directes.

Aujourd’hui, elles disposent de l’ensemble des trimestres nécessaires pour faire valoir leurs droits à la retraite et on va leur dire, alors qu’elles ont déjà travaillé 41, 42 ou 43 ans, qu’elles doivent aller au-delà de l’âge de 60 ans.

Monsieur le ministre, au salarié qui a commencé à travailler à 18 ans, vous allez demander de cotiser 44 annuités pour pouvoir partir à la retraite, alors que, pour celui qui a commencé à travailler à 22 ans, votre réforme ne va rien changer : il ne pourra pas partir à 60 ans, en tout cas pas sans décote, ce qui fait que son plan de vie ne sera en rien modifié.

Votre projet, c’est donc la redistribution à l’envers !

Avec votre réforme, ce sont les ouvriers et les employés qui, demain, vont payer pour que les cadres supérieurs puissent continuer à prendre leur retraite comme avant.

Votre système est le plus injuste que l’on puisse imaginer !

Ce que nous voulons, c’est au contraire un bouclier social pour que les catégories populaires et les petites classes moyennes puissent être protégées.

Nous ne voulons pas d’un système anti-solidaire, aboutissant, une fois de plus, à ce que les plus modestes soient obligés de payer pour ceux qui ont eu des carrières plus faciles.

Cet article 5 n’est pas fait pour toutes celles et ceux qui ont permis à la France d’être ce qu’elle est – un grand peuple, un grand pays – et pour toutes ces personnes, qui se retrouveraient les plus pauvres alors qu’elles ont travaillé pendant des années, il faudrait que cet article soit retiré.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, messieurs les ministres, je voudrais évoquer, avec une certaine émotion, le soir où la retraite à 60 ans a été votée à l’Assemblée nationale. J’étais alors député et je me souviendrai toujours de ce collègue, député socialiste du département du Nord, qui est monté à la tribune pour parler de tous ces ouvriers qui avaient si longtemps espéré ce jour. Il avait notamment expliqué comment son père s’était battu toute sa vie pour cela et que, décédé avant le vote du texte, il n’avait pu en bénéficier.

Aussi, lorsque M. Nicolas Sarkozy a déclaré que la retraite à 60 ans avait été une erreur, …

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

C’était Michel Rocard !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… j’ai considéré que cette phrase témoignait vraiment d’une méconnaissance de ce que fut la vie de tous ceux-là, de toutes celles-là qui ont travaillé si durement. Pour eux, la retraite à 60 ans était une avancée très importante. C’était l’objectif de décennies et de décennies de luttes et d’espérance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Et nous sommes là, mes chers collègues, en cette soirée et pendant les jours qui viennent, pour parler de ce même sujet.

Laissez-moi vous donner un exemple. Je me suis entretenu, comme sans doute beaucoup d’entre vous avec des chefs d’entreprise, notamment des chefs d’entreprise de PME du secteur du bâtiment. Ces patrons m’ont rappelé que, dans ce type de structures, tout le monde se connaissait et que, par conséquent, ils connaissaient bien la situation de leurs compagnons.

Ils m’ont parlé de celle des maçons qui ont commencé à travailler à l’âge de 16 ans, voire de 14 ans.

Qui, dans cet hémicycle, oserait prétendre qu’un homme ayant commencé à être maçon à 14 ou 16 ans et ayant exercé cette profession toute sa vie ne doit pas avoir le droit de partir à la retraite à 60 ans ?

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Il partira à 59 ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Y a-t-il ici, monsieur le ministre, quelqu’un pour défendre cette position ?

Pour notre part, nous estimons qu’il faut maintenir le droit à la retraite à 60 ans, en considération de toutes celles et de tous ceux qui ont commencé à travailler tôt, ont souvent exercé des métiers difficiles, ont assuré la croissance de notre pays et, franchement, ont bien mérité leur repos.

S’agissant de la pénibilité, nous ne sommes pas du tout d’accord avec votre position. Nous considérons que c’est une humiliation pour ces personnes que d’aller demander au médecin de certifier qu’elles sont bien cassées, qu’elles sont bien malades, qu’elles sont bien blessées, qu’elles ne peuvent plus continuer, qu’elles sont à bout.

Notre conception, c’est qu’un certain nombre de métiers sont, en eux-mêmes, pénibles et devraient ouvrir un droit au départ en retraite anticipé. C’est un droit, monsieur le ministre, il n’est pas nécessaire d’être en invalidité. C’est le droit !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous sommes les héritiers de toutes celles et tous ceux qui se sont battus pour la retraite à 60 ans. Son vote à l’Assemblée nationale et au Sénat a été un vote historique. Nous ne voulons pas revenir dessus.

Bien sûr, il faut changer les choses, mais, s’il faut une réforme, celle-ci doit être juste ! Or une réforme juste doit permettre à tous ceux et à toutes celles dont j’ai parlé de bénéficier de la retraite à 60 ans.

J’espère que nous serons entendus ici, dans cet hémicycle, comme les millions de Français qui le demandent avec toute leur force, tout leur espoir, avec leur colère et avec leur cœur. J’espère qu’enfin, monsieur le ministre, les choses vont bouger autrement qu’avec les concessions que vous avez cru utile d’apporter ce matin et qui ne changent rien au fond.

Le problème est historique : nous sommes solidaires de toute cette histoire et nous le resterons !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je répondrai ultérieurement à tous les orateurs, mais je voudrais dès à présent réagir à l’intervention de M. Jean-Pierre Sueur.

S’il y a vraiment un problème dans le domaine des retraites, c’est un problème d’information et d’explications. Ce que vous dites, monsieur Sueur, ne correspond pas à la réalité.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je ne peux pas laisser passer de tels propos, qui laisseraient penser que nous avons une attitude inhumaine vis-à-vis des membres d’un certain nombre de professions.

Le maçon que vous évoquez, monsieur Sueur, est intégré dans un dispositif de carrière longue. Certes, celui-ci n’a pas été adopté sous votre majorité – c’est certain –, il n’en demeure pas moins que ce maçon, ayant commencé à travailler à 16 ans, a effectué une carrière longue et, de ce fait, pourra prendre sa retraite à 59 ou à 60 ans. Il ne travaillera pas jusqu’à 62 ans.

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Nous prenons donc en compte les personnes qui ont commencé à travailler tôt. Voilà la réalité. On peut polémiquer, on peut avoir des divergences d’appréciation entre majorité et opposition. Heureusement, même… Mais faisons-le en nous appuyant sur des exemples réels, et non sur des faits qui sont dénaturés !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Le dispositif de carrière longue est largement utilisé, puisque 100 000 personnes partent en retraite, chaque année, dans ce cadre. Nous le maintenons, et ce à tel point que nous allons même jusqu’à élargir la population des bénéficiaires en intégrant les personnes qui ont commencé à travailler à 17 ans.

Donc votre maçon, monsieur Sueur, vous pouvez le rassurer : s’il a commencé à travailler à 15 ans ou à 16 ans, il partira en retraite à 60 ans ou avant 60 ans, et c’est normal !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je voulais aussi vous dire qu’à un moment donné il faut s’interroger sur la notion d’espérance de vie. Certains ont d’ailleurs très bien posé la question, même si nous n’en tirons pas tous les mêmes conclusions.

L’espérance de vie…

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

… est différente pour chacun d’entre nous. Elle est aussi différente géographiquement, …

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

… selon qu’il s’agit d’un homme ou d’une femme – nous en avons suffisamment discuté – ou en fonction des catégories sociales. Tous ces critères peuvent évidemment être croisés : votre espérance de vie ne sera pas la même si vous êtes une femme cadre, une femme ouvrière, un homme cadre, ou encore si vous vivez dans le nord ou le sud de la France.

Le sujet est complexe. Mais ce que l’on sait de l’espérance de vie, c’est qu’elle progresse !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Je parle de l’espérance de vie à 60 ans, et non de l’espérance de vie à la naissance, qui tient compte de la mortalité infantile.

Cette espérance de vie à 60 ans a donc considérablement progressé : elle a crû de cinq ans depuis 1982 et le vote de la retraite à 60 ans. Au fond, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, on peut considérer que, lorsque votre majorité a pris cette décision, le seuil de 60 ans correspondait à un âge « plus vieux » – trois ans d’écart – que les 62 ans actuels.

Marques d’approbation sur les travées de l ’ UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

En d’autres termes – vous êtes bien obligés de le reconnaître – aujourd’hui, à 62 ans, on est plus jeune de trois ans qu’à 60 ans en 1982 ! (

La vie, ce n’est pas une photographie. Elle est en mouvement permanent et, lorsque l’espérance de vie progresse, l’âge de départ à la retraite doit évoluer.

Quelqu’un qui aura 62 ans en 2018 sera plus jeune de trois ans – si l’on se réfère à son espérance de vie – qu’une personne qui partait à la retraite à 60 ans en 1982.

Rires et exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. Enfin, monsieur Sueur, je trouve que vous exprimez une curieuse opinion au sujet des médecins, quand vous dites qu’il est humiliant de passer devant un médecin.

Protestations prolongées sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Nous créons la retraite pour pénibilité, c'est-à-dire la possibilité de continuer à prendre sa retraite à 60 ans, …

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

M. Éric Woerth, ministre. … quand tous les autres Français la prendront plus tard, à l’intention de ceux qui ont été exposés à des facteurs de pénibilité. Il est bien normal qu’ils partent plus tôt, mais il faut simplement qu’ils prouvent qu’ils ont bien été exposés à ces facteurs.

Les protestations s’amplifient.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Il y a déjà des listes de maladies professionnelles ! Appuyez-vous dessus !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Sinon beaucoup de gens demanderont à bénéficier du dispositif et ils s’étonneront qu’un tel en profite alors qu’eux en sont exclus. Il faut donc fixer des critères rationnels, le premier étant l’usure physique.

Dans la branche ATMP, le taux d’incapacité est un critère bien connu. Nous avons décidé que les personnes reconnues en incapacité au taux de 10 % pourront partir en retraite à 60 ans. Nous avons fait passer ce taux à 10 % parce que, à partir de ce seuil, monsieur Sueur, on intègre les troubles musculo-squelettiques, qui sont, au fond, la maladie de notre époque.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Les maçons n’ont pas le droit de partir à 60 ans !

Debut de section - Permalien
Éric Woerth, ministre

Ce n’est pas parce qu’ils sont maçons qu’ils ont un métier pénible, c’est parce que, à un moment donné, ils en ressentent les effets physiques. Il y a 36 000 manières d’être maçon, comme vous le savez. Avec ce projet de loi, si un maçon se retrouve avec un taux d’incapacité de 10%, il partira à 60 ans. Si un maçon a commencé à travailler avant 18 ans, il partira à 60 ans.

Donc, de grâce, si l’on veut que le débat soit constructif, il faut être précis et dire les choses telles qu’elles sont.

Bravo ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à Jean-François Voguet, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

Nous venons d’entendre un discours extrêmement réactionnaire, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

M. Jean-François Voguet. … qui fait honte à notre assemblée et au monde du travail.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

C’est maintenant de la condition féminine que je voudrais parler, au nom de Mme Schurch.

S’il est bien une catégorie de salariés qui va subir de plein fouet les effets de la potion libérale que vous vous apprêtez à administrer au monde du travail, ce sont bien les femmes, dans leur ensemble.

Pour traiter la question du recul de l’âge de la retraite, il est en effet patent qu’un regard particulier doit être porté sur la question du travail féminin. Le premier aspect fondamental de cette question, c’est bien évidemment que la France compte un nombre particulièrement élevé de femmes en activité, du fait d’un important développement du salariat dans les années soixante et soixante-dix, très largement accru par le mouvement d’allongement de la scolarité, qui a fortement influé sur le niveau de formation initiale des jeunes filles.

La conséquence de ce processus est connue : en 1968, le taux d’activité féminin était inférieur à 50 % du total de la population féminine en âge de travailler. Aujourd’hui, ce taux d’activité avoisine 80 %.

Ce mouvement continu de développement du nombre de femmes en activité ou recherchant un emploi est évidemment le produit de bien des facteurs, depuis la recherche de l’indépendance financière à la nécessité de disposer de deux revenus dans le ménage en passant par l’allongement de la scolarité, qui conduisent bien souvent les femmes à intégrer le monde du travail par choix plutôt que de se « replier » sur la vie du foyer familial, vers lequel vous voudriez certainement les ramener.

Ce mouvement de féminisation de l’emploi est allé de pair – faut-il le souligner encore ? – avec la tertiarisation de l’économie et l’émergence des fonctions administratives, comptables ou encore juridiques dans les entreprises, fonctions pouvant être assumées aussi bien par des hommes que par des femmes.

Dans un autre ordre d’idées, le travail féminin s’est aussi développé avec l’accroissement de l’emploi public – que vous êtes en train de supprimer – consécutif à la structuration des services publics de l’État comme des autres échelons de pouvoir local et qui allait de pair avec le maillage économique et social du pays. Nous savons tous que le fonctionnaire est souvent, d’abord, une fonctionnaire !

Enfin, la parcellisation des tâches dans de nombreux secteurs industriels et de services, dans la grande distribution a amené au développement d’un emploi féminin déqualifié. Ce sont aujourd’hui les femmes qui sont au premier rang des emplois précaires, du temps partiel imposé, des horaires élastiques et qui demeurent les victimes désignées des inégalités salariales et de promotion.

Seulement voilà, les comptables cyniques qui ont conçu le texte de ce projet de loi viennent de se rendre compte que, plus le temps passait, et plus les femmes étaient en situation d’avoir des carrières complètes, avec le nombre d’annuités nécessaires pour prétendre à une retraite à taux plein, et qu’elles avaient de surcroît l’outrecuidance de vivre plus longtemps que les hommes, …

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Voguet

… en clair, que le déficit structurel des retraites aurait comme raison principale la nécessité de verser des pensions à des femmes – aujourd’hui, 1 000 euros par mois en moyenne ! – et que, de ce fait, les caisses allaient être durablement vidées.

Alors, vous avez sorti la règle à calcul et vous vous êtes dit que deux ans de plus pour partir en retraite, cela pourrait permettre de résoudre une partie du problème avant que le recul symétrique de l’âge de perception de la retraite à taux plein ne freine durablement la croissance de la retraite des femmes.

Jolie manière, vous en conviendrez, de remercier les femmes françaises d’avoir décidé de prendre leur part à l’activité économique de la nation ! C’est la raison pour laquelle nous souhaitons la suppression de cet article.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La parole est à M. Jean-Jacques Pignard, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de vous faire écouter la petite musique centriste puisqu’on l’a peu entendue aujourd’hui. Elle s’exprimera par la voix du mauvais élève qui, au fond de la classe, depuis des heures, entend répéter les mêmes arguments et qui a envie d’en faire valoir d’autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Monsieur Desessard a dit tout à l’heure qu’un amendement centriste sur deux avait été accepté. En tout cas, les sénateurs centristes voteront cet article,

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

…et ce pour deux raisons qui ont trait à la démographie et à la jeunesse.

La démographie, tout d’abord.

On a beaucoup parlé tout à l’heure du Conseil national de la Résistance, et l’historien que je suis a beaucoup d’admiration pour ce qui s’est passé à l’époque. Mais c’était en 1944 et nous sommes en 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Bien sûr que si ! Il y avait des centristes puisque le MRP y était représenté.

J’ai bien entendu tout à l’heure notre éminent collègue François Autain, qui, très justement, à propos de la démographie, disait que le taux de fécondité en France était nettement plus élevé que dans les autres pays européens. Mais, si l’on veut se projeter dans l’avenir, il faut tenir compte de deux éléments. D’abord, petit bémol, avec un nombre moyen de deux enfants par femme, le renouvellement des générations n’est pas assuré ; ce nombre doit être de 2, 1. J’ajoute que le taux actuel est dû à un phénomène que les démographes connaissent bien : le troisième enfant tardif, élément qui a beaucoup joué ces dernières années. Ce phénomène se prolongera-t-il compte tenu de l’évolution de la société vers les familles recomposées ? Je n’en suis pas certain.

En tout cas, une chose est sûre, c’est qu’en 1944 on entrait dans la vie active à 14 ou 15 ans et l’on prenait sa retraite à 65 ans, quand on y arrivait. Parce que l’espérance de vie en bonne santé, c’est un élément que l’on ne connaissait pas en 1944.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Justement, on ne va tout de même pas revenir à cette époque !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

M. Jean-Jacques Pignard. Il faut donc comparer ce qui est comparable. On n’entre plus dans la vie active à 14 ans et l’on prend sa retraite à 60 ans. Par conséquent, à moins de vouloir ramener tous les jeunes au travail à 14 ans et de ne plus s’occuper des personnes âgées

Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Ensuite, la jeunesse.

M. Sueur nous a tout à l’heure fait le coup du monopole du cœur, avec ses souvenirs de l’Assemblée nationale, puis M. Assouline nous a fait celui du monopole de la jeunesse, au motif que seul le parti socialiste la défendait. La gauche n’a pas le monopole du cœur, on le sait depuis très longtemps !

Mon grand-père est mort à 30 ans, durant la Première Guerre mondiale, mon père est mort à 44 ans, et j’ai bien le sentiment d’appartenir à une génération privilégiée, comme beaucoup des baby-boomers qui se trouvent dans cette assemblée. Mais je pense aussi aux jeunes, notamment à mes trois enfants et aux trente-cinq générations de lycéens auxquelles j’ai enseigné. Et si je n’avais pas été élu sénateur, j’aurais volontiers exercé trois ans de plus, madame, sans être fatigué, parce que j’adorais mon métier.

Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Si l’ascenseur social ne fonctionne plus tout à fait comme en 1944, ce n’est pas uniquement en raison de la répartition des revenus du capital et de ceux du travail, comme vous l’avez dit. C’est parce qu’en 1944 l’ascenseur social ne valait que pour nos propres enfants, pour ceux d’Europe, d’Amérique, et même – monsieur Fisher, je vais vous faire plaisir ! – pour ceux d’URSS

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

M. Jean-Jacques Pignard. … et que tout le reste n’existait pas. Aujourd’hui, le gâteau mondial a été redistribué.

Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Si, aujourd'hui, l’ascenseur social fonctionne moins bien pour nos propres enfants, c’est parce qu’il fonctionne mieux dans les pays en voie de développement, comme le montrent les rapports de l’ONU. Cela pose un problème, car nos jeunes seront pénalisés par rapport à notre génération, ce qui est probablement une situation inédite. Alors, ne les pénalisons pas davantage en leur faisant payer les dettes que nous ne voudrions pas assumer, car ce serait leur infliger une double peine !

Vifs applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP. – Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

M. Jean Desessard. La discussion s’arrête donc sur un orateur centriste…

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Frimat

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au vendredi 8 octobre 2010 à neuf heures trente, à quatorze heures trente, le soir et la nuit :

- Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites (713, 2009-2010).

Rapport de M. Dominique Leclerc, fait au nom de la commission des affaires sociales (733, 2009-2010).

Texte de la commission (n° 734, 2009-2010).

Avis de M. Jean-Jacques Jégou, fait au nom de la commission des finances (727, 2009-2010).

Rapport d’information de Mme Jacqueline Panis, fait au nom de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes (721, 2009-2010).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.