La commission auditionne M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2014.
L'examen de la loi de programmation militaire et celui de la loi de finances pour 2014 se mêlent en ce moment. Les deux textes sont cohérents. Le cadre financier du projet de loi de finances est conforme à ce que j'avais annoncé dans la loi de programmation militaire : les crédits de la mission défense sont de 31,4 milliards d'euros. Lorsque le Président de la République a reçu dernièrement le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), il a réaffirmé que les crédits défense étaient sanctuarisés, au million d'euros près sur la durée de la programmation. Les ressources exceptionnelles seront, comme prévu, de 1,8 milliard d'euros en 2014 : le programme des investissements d'avenir (PIA) fournira 1,5 milliard d'euros qui iront, via le Centre national d'études spatiales (Cnes) et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) à la recherche en matière spatiale et de dissuasion ; 200 millions d'euros proviendront de cessions d'emprises foncières ; et le reste, de redevances diverses. Les dépenses de fonctionnement diminueront de 100 millions d'euros, soit 11% des 900 millions d'euros d'économies sur l'ensemble du budget de l'Etat. L'effort de mon ministère est significatif ! Il passe par une réorganisation fonctionnelle destinée à rendre plus efficace l'ensemble de la chaîne de décisions, en particulier en matière de ressources humaines et de finances. Cela nous évitera des perturbations telles que celles générées par Louvois ou dans les bases de défense, dont le fonctionnement a été épinglé par votre rapport. J'ai également été stupéfait de constater que si depuis 2008 les effectifs avaient baissé de 10%, le total des rémunérations avait, lui, augmenté de 3%. Cela ne peut pas continuer ! Je suis contraint à cette réorganisation du fait des dysfonctionnements internes du ministère, afin que le titre II, en particulier, soit bien géré. Si cet effet ciseau se poursuivait, il mettrait à mal le respect de la programmation.
Par ailleurs, le budget 2014 correspond aux premières déflations d'effectifs : il y aura 7 881 emplois en moins. J'ai appliqué une méthode d'écoute attentive, en évitant les coupes aveugles. Une analyse fonctionnelle a été menée pour assurer la cohérence entre services et pour que l'effort porte plus sur l'administration et les soutiens que sur les forces opérationnelles. La défense sera néanmoins le premier recruteur de l'État, avec 17 000 recrutements, dont de nombreux jeunes pas ou peu qualifiés, qui seront formés et pourront ensuite trouver des opportunités à l'intérieur ou à l'extérieur des armées. Les priorités que j'avais indiquées sont respectées : les crédits d'équipement passent de 16 à 16,5 milliards d'euros. Un effort particulier a été fait sur l'entretien programmé des matériels dont les crédits augmentent de 5,5%. Cela est valable également pour les petits équipements et les munitions, qui constituent trop souvent une variable d'ajustement, et dont la pénurie en fin d'année handicape la préparation de nos forces. Les études amont sont maintenues à 750 millions d'euros.
Les discussions sont en cours sur le programme d'acquisition avec les principaux industriels de l'armement, qui doivent adapter leurs cadences et souhaitent une lisibilité sur le calendrier. Cela se passe bien. J'ai lu avec intérêt la déclaration commune dans la presse de sept grands patrons du secteur, qui disent en substance : « Ce sera difficile, mais on y arrivera ». C'est aussi ma conviction.
Les commandes de 2014 portent sur les avions ravitailleurs - enfin ! - et sur les drones MALE, les pods de désignation laser du Rafale, le quatrième sous-marin Barracuda, des véhicules du programme Scorpion. Seront livrés le satellite franco-italien spatial Sicral, une frégate Fremm, quatre hélicoptères Tigre, sept hélicoptères NH90, onze Rafale, quatre A400M, que l'on appelle désormais Atlas.
On aurait préféré « Grizzli », mais les Britanniques ont voulu « Atlas ». Comme le géant qui porte le monde, en hommage à sa capacité de portage...
La référence grecque me convient ! Seront également livrés soixante missiles de croisière navals (MDCN) et soixante-dix-sept véhicules blindés de combat d'infanterie (VBCI).
Les opérations extérieures (Opex) donnent lieu à une inscription de 450 millions d'euros, au lieu de 630 auparavant. Si cela n'était pas suffisant, cette ligne serait abondée par péréquation interministérielle : c'est une victoire dans les arbitrages. Mais cela ne sera pas nécessaire : en 2014, le désengagement en Afghanistan sera terminé ; on ne sait pas forcément ce qui se passera après 2014 - on ne connaît pas la position américaine sur le sujet - mais on ne reviendra pas aux niveaux que nous avons connus. L'effectif décroît également au Mali : avec un millier d'hommes, on sera loin des 4 500 hommes - et parfois plus - présents au cours de l'intervention en 2013. L'articulation entre les Opex et les forces pré-positionnées en Afrique sera revue : une Opex de longue durée devient une force pré-positionnée... Il s'agira d'améliorer la réactivité des forces de Djibouti à Dakar, avec plus de sites et moins d'hommes sur chacun. Au Mali comme en République centrafricaine, notre bonne répartition des forces nous donne une capacité de réaction très rapide.
La presse a parlé des restructurations, je les détaillerai à la conférence de presse de cet après-midi. J'ai appliqué la méthode que je vous ai déjà exposée sur les 7 881 postes supprimés, en limitant à un tiers les postes des forces opérationnelles, et en répartissant le reste après une analyse fonctionnelle. Même si elles sont toujours dures à vivre, les mesures de dissolution d'unités sont modestes. Elles concernent tout d'abord la dissolution du quatrième régiment de dragons de Carpiagne, à Marseille.
Je ne prends pas mes décisions en fonction de ce genre de considérations ; mais oui, il est content, car ce régiment est remplacé par le premier régiment étranger de cavalerie (REC) d'Orange. Comme le but est de supprimer une brigade interarmes sur les huit, il faut bien commencer quelque part : j'ai décidé de commencer par ce régiment de chars, et de déménager le premier REC à Carpiagne, car l'implantation d'Orange aurait nécessité des travaux trop importants pour accueillir les véhicules du programme Scorpion. Ce régiment verra ainsi ses capacités d'entraînement augmentées et il se rapprochera d'Aubagne. Le maire d'Orange est mécontent. Pourtant la base aérienne est maintenue.
Concernant l'armée de l'air, le plus difficile sera la fermeture du détachement de Varennes-sur-Allier, où 209 postes seront supprimés d'ici 2015, dont 93 civils et 116 militaires. Il faut en effet regrouper le stockage dans des sites plus denses. J'ai rencontré longuement les élus de Varennes-sur-Allier ; toutes les mesures d'accompagnement nécessaires seront prises en dépit de faible nombre de civils concernés. Un contrat de redynamisation des sites de défense (CRSD) sera ainsi mis en place, ce qui n'était pas prévu à l'origine.
J'ai également décidé deux suppressions sans fermeture de site : celle de la plate-forme aéronautique, sous-employée, de la base aérienne de Dijon, avec un regroupement à Cazaux de la flotte des Alpha jets, que le maire de Dijon a parfaitement compris ; celle d'un escadron de défense sol-air à Luxeuil, parce que ce système n'est plus nécessaire à cet endroit. Il faut aussi mentionner une réduction des effectifs de la base aérienne d'Évreux et des transferts de Creil, où se situe la direction du renseignement militaire, vers Balard. Dans le cadre de la rationalisation des soutiens, j'ai décidé de dissoudre les états-majors de soutien de la défense, pour fluidifier la gestion des bases de défense. Cela concerne 500 personnes. Précisons une chose : en 2013 comme à l'avenir, j'examine une par une les restructurations que l'on me propose avant l'été. Il ne faut pas écouter les différentes rumeurs : avant ma décision, rien n'est dit. Ainsi, on m'avait proposé la fermeture pure et simple de la base aérienne de Luxeuil : ce ne sera finalement pas le cas.
Je reviens à Varennes-sur-Allier, je veillerai à un accompagnement vigilant pour les personnes concernées qui sont 209 - et non 260 comme le dit Le Monde. Rappelons que 150 millions d'euros sont prévus dans la loi de programmation pour abonder le fonds de restructuration de sites et financer les contrats de revitalisation. Varennes-sur-Allier est un cas difficile, non en raison du nombre, puisque les 116 militaires seront mutés progressivement en 2014 et 2015, et que seuls 93 civils sont concernés, pour lesquels un dispositif social sera mis en place. Le problème est la perte de richesse pour la commune. Lorsque j'étais maire, ma commune a été poly-restructurée : trois fois ! Je sais la difficulté du sujet.
Je suis stupéfait par ce vous nous dites sur l'augmentation de la masse salariale qui a accompagné la baisse des effectifs. Avez-vous une explication sur cette situation complètement anormale ?
C'est la faute de tout le monde et de personne. L'organisation interne aboutissait à cette contradiction : recrutements et financement des rémunérations étaient indépendants. C'est ce qui arrive lorsqu'il n'y a pas d'organisation unique. Le patron d'une armée avait naturellement tendance à recruter sans tenir compte de la contrainte globale. C'est pourquoi j'ai donné au secrétariat général pour l'administration (SGA) du ministère, et au directeur des ressources humaines en particulier, la responsabilité globale sur le recrutement et sur le paquet des rémunérations. Des officiers supérieurs en retraite s'en sont offusqués publiquement : « le pouvoir revient aux civils », affirment-ils. Je réponds à cela : à chacun son métier. La réorganisation est le produit d'une quarantaine de réunions menées depuis 2012 pour mettre fin à une irresponsabilité collective, dont Louvois est la dérive extrême, mais qui concernait aussi les bases de défense ou les questions de personnel. Citons par exemple le pourcentage d'officiers, passé de 15,5% en 2008 à 17% après la déflation. Cela ne peut pas rester ainsi.
J'aimerais avoir votre éclairage sur deux sujets. D'une part, l'accompagnement de ceux qui quittent le service actif est confié à Défense Mobilité, pour les officiers. Qu'en est-il pour les sous-officiers et les militaires du rang ? Le dispositif d'attribution de pension après passage au grade supérieur n'est-il pas contradictoire avec l'objectif de maîtrise de la masse salariale ? Vous créez des passerelles avec la fonction publique ; existent-elles vers la fonction publique territoriale ? En tant que maire, je n'en ai pas eu connaissance. Nous peinons à recruter : cela pourrait donc être une piste à explorer.
D'autre part, Louvois est une erreur manifeste. Les responsabilités ont-elles été établies ? Quelle orientation prenez-vous pour sortir de cette situation : un progiciel nouveau qui ne pourra être livré avant trois ans, ou une correction de l'actuel ? Le versement indu de plus de 100 millions d'euros aux militaires aura-t-il des conséquences fiscales ?
Vous remarquerez que je n'ai jamais polémiqué sur la catastrophe que constitue Louvois. Je sais où il y a eu des manques dans la décision : principalement, on n'a pas expérimenté le nouveau système avant de le mettre en service et avant même de vérifier qu'il fonctionnait bien, on a fait disparaître l'ancien avec toute sa mémoire. C'est invraisemblable, scandaleux et lié à l'irresponsabilité que j'évoquais.
Il n'est pas seul responsable. L'ancien système était pour le moins artisanal. Nous avons pris des mesures transitoires d'urgence pour éviter les perturbations les plus graves, qui le sont de moins en moins.
Oui. J'ai renforcé le centre de Nancy pour l'armée de terre, constitué désormais de 400 personnes ; un autre centre à Toulon traite la marine nationale ; c'est un vrai supplice de Sisyphe, où tout est toujours à recommencer. Je prendrai une décision dans peu de temps sur ce sujet : courant octobre ou au plus tard à la mi-novembre. Il faut maintenant tailler dans le vif. Concernant la fiscalité, instruction a été donnée aux agents de Bercy sur tout le territoire d'examiner chaque cas individuellement. Les intéressés peuvent aussi téléphoner à Rambouillet pour faire le point sur leur situation. Le trop perçu doit en effet être remboursé, mais cela pose aussi des problèmes de fiscalité et de charges sociales.
C'est épouvantable. Les femmes de militaires, elles, parlent sur les réseaux sociaux !
Elles ont raison. C'est un vrai tsunami. C'est pourquoi nous réorganisons le ministère. Il a failli arriver la même chose, toutes proportions gardées, pour les bases de défense et pour les pensions.
Le plan d'accompagnement des restructurations comprend déjà un certain nombre de mesures. La loi de programmation militaire les chiffre à 1 milliard d'euros. Je suis d'accord avec vous, il n'y a pas suffisamment d'initiatives en lien avec les collectivités territoriales. Le préfet de région pourrait notamment inciter les maires à s'adresser à Défense Mobilité.
Il pourrait interpeler les associations d'élus, plutôt que les maires : ADF, AMF...
Certaines associations fonctionnent bien, d'autres moins. Mieux vaut s'adresser directement aux employeurs.
La pension afférente au grade supérieur ou la promotion fonctionnelle reviennent moins cher. La mise en oeuvre de ces dispositifs suppose toutefois le vote de la loi c'est pourquoi il est indispensable qu'elle soit votée avant le 31 décembre 2013 pour une mise en oeuvre des dispositifs dès 2014.
Nous sommes quelques-uns à suivre de près la situation malienne, marquée récemment par l'attentat djihadiste et les combats opposant les Touaregs à l'armée malienne. Le président de la République et vous-même avez rencontré le président malien. Votre vision de la situation en a-t-elle été modifiée ? Vous prévoyez d'abaisser à 1 000 nos effectifs sur place : n'est-ce pas trop tôt ?
Le maire d'Orange dit avoir appris par la presse la décision de restructuration concernant son régiment. Les commerçants de la ville sont affolés : vous devriez vous adressez à eux également, et non aux seuls soldats.
Je suis également favorable à une meilleure coopération avec les collectivités territoriales. Les possibilités de recrutement existent. Ma police municipale est composée pour partie d'anciens gendarmes. D'autres postes pourraient aussi intéresser les militaires.
Vous parlez d'une dotation de 150 millions d'euros au fonds de restructuration. Or les 150 derniers millions du fonds précédent n'ont pas tous été consommés. Dans les collectivités locales, nous avons constaté des difficultés...
Nous sommes engagés dans une course contre la montre pour demeurer dans le cadre financier fixé. Dans le passé, le nombre de jours d'entraînement de l'armée de terre était de 90, il est tombé à 83 cette année et la loi de finances initiale pour 2014 en prévoit également 83 : il en manque au moins 7 ! Ensuite, où trouverez-vous les 100 millions d'euros d'économies prévus en 2014, et 600 millions d'économies prévues sur six ans, sur une assiette totale de 3,5 milliards de fonctionnement par an ?
Dans la perspective des élections législatives qui se termineront mi-décembre, nous maintenons au Mali 2 500 hommes, et nous n'engagerons qu'ensuite la baisse, pour atteindre 1 000 en début d'année prochaine.
Al-Qaida au Maghreb islamique a repris ses initiatives. Nos forces spéciales ont dû intervenir à Tombouctou il y a deux jours, ce qui a causé la mort de plusieurs terroristes. Le danger est toujours présent, surtout celui que font planer les Touaregs sur l'armée malienne. Le président Keïta a pris hier des initiatives visant à mater la rébellion à Kati, où demeure le général Sanogo, plus exactement le capitaine Sanogo auto-promu général quatre étoiles.
Il était indispensable que le président malien revienne rapidement de son voyage aux Nations-Unies et à Paris, afin d'affirmer l'autorité légitime qu'il représente. Le processus de réconciliation doit s'engager. Des annonces ont été faites : assises du Nord, réforme de décentralisation. Il serait souhaitable que ces actions soient conduites rapidement. Nous restons prudents. La mission des Nations-Unies au Mali (Minusma) poursuivra son déploiement au Nord. J'ai dit mon sentiment au représentant des Nations-Unies à Bamako il y a dix jours : les choses ne vont pas assez vite.
Le préfet du Vaucluse a rencontré le maire d'Orange. Le ministre ne peut appeler tout le monde personnellement.
Monsieur Dulait, les crédits du précédent fonds ont été consommés, quoique tardivement. Varennes-sur-Allier est un cas d'école, et nous ferons en sorte que la mobilisation des financements soit la plus rapide possible. En plus de 150 millions d'euros du fonds, les entreprises bénéficieront d'un dispositif d'incitation fiscale et sociale et pourront compter sur la mobilisation de la Banque publique d'investissement. Les préfets orchestreront ces dispositifs en vue de la signature, pour les zones les plus touchées par les suppressions d'effectifs, de contrats de redynamisation de site.
La norme d'entraînement de l'armée de terre chute continuellement depuis de nombreuses années. Cette tendance doit cesser. Une augmentation des crédits de l'EPM tous milieux de 5,5% permettra précisément de maintenir cette norme à 83 jours en 2014 comme en 2015, avant de l'augmenter effectivement.
Les 100 millions d'euros d'économie ne concernent que l'année 2014, il n'est pas décidé de les reconduire.
Monsieur le ministre, merci pour les précisions que vous avez apportées concernant la loi de finances pour 2014. Mais quelles bonnes raisons pouvez-vous nous donner de ne pas voter contre la loi de programmation militaire ? Non que j'aie l'intention de m'y opposer, mais vous avez sans doute des arguments politiques qui emporteront notre adhésion définitive. En outre, nous avons auditionné les responsables de l'ensemble de nos forces : ceux de la marine et l'aviation se veulent rassurants, en revanche, au sein de l'armée de terre, l'inquiétude est encore palpable.
J'attire votre attention sur la situation en Centrafrique, qui se dégrade rapidement. Je sais que le gouvernement y est attentif. Comment voyez-vous les choses à ce stade ?
En tant que maire, j'ai fait l'expérience de l'embauche de cadres militaires. Réserviste jusqu'au printemps dernier de la brigade franco-allemande, je n'y allais pas à reculons. Mais de fait, la greffe n'a pas pris. La compétence des militaires n'est nullement en cause : ils sont motivés, et les collectivités sont prêtes à les accueillir. Mais sans doute par manque de préparation, de transition, l'expérience n'a pas été concluante.
Une précision sur notre méthode de travail : je porterai seul une partie des amendements de la commission, avec toutefois nos rapporteurs pour avis sur le budget de la défense, pour ceux qui le souhaiteront. Ils représentent déjà la diversité politique. Introduire les groupes dans ce processus serait source de confusion.
L'Assemblée nationale et le Sénat fonctionnent parfois différemment. Pour notre part, nous étions opposés à la procédure d'urgence sur la loi de programmation militaire. Le débat a certes eu lieu, ici comme à l'Assemblée nationale. Nos collègues députés la souhaitent. Et ici, l'on m'a bien fait comprendre qu'en refusant l'urgence, je mettrais à mal la première année d'exécution de la loi de programmation. Je ne suis pas un perdreau de l'année, je sais qu'il y a plusieurs hypothèses. L'urgence en est une, que mes collègues avaient dénoncée la dernière fois, et qu'ils réclament aujourd'hui... Une autre serait que l'Assemblée nationale examine le texte bien avant le 13 décembre, afin que la procédure ordinaire se déroule sans retarder l'application de la loi. Notre commission est favorable à cette seconde solution.
Et pourtant, je vois bien que l'édifice bâti par la loi est tout d'équilibre et qu'il ne faut pas le déstabiliser.
La loi de programmation militaire prévoit 6 milliards d'euros de ressources exceptionnelles. Lesquelles seront mobilisés dans la loi de finances pour 2014 ?
Ce texte n'est pas exempt de paradoxes : d'une part, entre le maintien des capacités militaires et la suppression de 54 000 emplois ; d'autre part, entre cette suppression et l'augmentation de 3% de la masse salariale. Les chefs d'état-major que nous avons auditionnés n'ont pas été en mesure de nous éclairer. Vis-à-vis du grand public, il faudra faire preuve de beaucoup de pédagogie...
Je veux défendre les officiers en retraite, qui ont à coeur, tout autant que nous tous, de défendre nos intérêts et le rayonnement de la France. Il faut les écouter et les respecter.
Je m'interroge sur l'avenir du 3e régiment de parachutistes d'infanterie de marine de Carcassonne. Il a été dit qu'il ne serait pas être fermé en 2014 - sans doute car le maire de la ville est de votre bord politique. Mais j'y insiste, c'est un régiment d'élite, dont 477 membres sont morts pour la France au cours des dernières décennies. Nous devrions tout faire pour éviter sa fermeture.
J'ai répondu aux officiers en retraite qui ont eu le courage de signer leurs propos. Quant aux lettres anonymes, je n'y donne jamais suite. Le dispositif antérieur ne fonctionnait pas. Les chefs d'état-major ne savent pas vous éclairer : c'est un signe ! Lorsque celui qui décide n'est pas aussi celui qui paye, personne n'est responsable de rien. Le secrétaire général pour l'administration exerce à présent une autorité fonctionnelle renforcée en matière financière et de ressources humaines, mais il ne s'agit nullement de faire noter les soldats par l'administration civile du ministère. Si nous avions appliqué ces principes de saine gestion plus tôt, nous n'aurions pas connu la catastrophe Louvois.
Madame Garriaud-Maylam, nos choix ne sont aucunement fonction des appartenances politiques.
A Dijon, comme à Varennes-sur-Allier ou Luxeuil-les-Bains, nous avons décidé en toute objectivité et dans le souci de préserver la cohérence de notre carte militaire. Nous prendrons les décisions relatives à la prochaine tranche de restructurations l'année prochaine à la même période. Celle relative au 3e RPIMa n'a donc pas été prise, ni celle relative à Castelnaudary. Lorsqu'elles le seront, nous préviendrons bien entendu les collectivités concernées.
Monsieur Bockel, la loi de programmation militaire ne doit pas être un objet d'affrontement partisan. Il y va des intérêts de la nation et de la sécurité du pays. Je ne l'ai, moi-même, jamais abordée sous l'angle partisan. La question qu'il faut se poser est celle-ci : les missions relatives à la sécurité de notre pays sont-elles bien remplies ? Qu'il s'agisse de protection du territoire, de capacité d'intervention ou de dissuasion, la réponse est oui. Les contrats opérationnels passés avec nos forces le confirment. Ajoutez à cela que nos moyens sont sanctuarisés, et que nous sommes le seul pays en Europe, Russie exclue, à y être parvenus.
Certes, il y a une contradiction apparente à sanctuariser les crédits et inscrire une déflation des effectifs. Celle-ci n'est cependant que de 23 400 postes, contre 54 000 dans la précédente loi de programmation, que je continue à gérer...
La nouvelle programmation présente toutefois des éléments nouveaux. Si les effectifs étaient demeurés élevés, nous n'aurions pas pu augmenter les crédits d'équipement, créer plus de 1 000 postes dans les forces spéciales ni 400 dans la cyberdéfense. Enfin, l'administration centrale doit perdre du poids.
Le Conseil de sécurité des Nations unies examinera prochainement une résolution destinée à transformer la mission internationale de soutien à la Centrafrique en opération de maintien de la paix, ce qui garantira notamment sa couverture financière. Nous y sommes favorables, mais au sein du Conseil, le Royaume-Uni s'y oppose. Le blocage devrait être levé, et une fois la résolution votée, nous soutiendrons cette opération. Il faudra alors davantage que les 450 hommes dont nous disposons sur place.
À la différence du Mali, l'intervention en Centrafrique s'apparente davantage à de la police intérieure. L'État n'existe plus, il est ravagé par des bandes rivales de brigands. La situation humanitaire est catastrophique. Seul l'aéroport où stationnent nos forces est encore debout, tout le reste est un capharnaüm. Heureusement nous n'avons presque plus de ressortissants sur place. Il ne faut pas tarder. La fragilisation du centre du continent africain faciliterait la pénétration de groupes djihadistes.
Les ressources exceptionnelles s'élèvent à 1,8 milliard d'euros, dont 1,5 milliard provenant du PIA, 200 millions de ressources immobilières, et le reste de la vente des fréquences 4G.
S'agissant de la procédure législative, la meilleure solution reste peut-être d'avancer l'examen du texte à l'Assemblée nationale. Le Premier ministre n'a pas rendu sa décision sur ce point. Si l'urgence était déclarée, cependant, le débat n'en perdrait guère de substance : il a déjà largement lieu dans cette commission comme dans celle de l'Assemblée nationale. Et soyons conscients que, si nous n'examinons pas en urgence le projet de loi, l'exécution pour 2014 sera menacée.
Surtout qu'il est prévu de revenir à l'Assemblée nationale à partir du 13 février...
Nous partageons vos observations sur la qualité des forces de défense françaises, et nous ne souhaitons pas polémiquer. Notre inquiétude porte sur la répartition des crédits. La précédente loi de programmation a été un échec, nous en convenons. Regardez la loi de programmation de la politique de coopération : on entend de nouveaux objectifs à tout propos, puis chaque nouvelle difficulté ampute les crédits qu'on se proposait d'y inscrire. Entre les gels, les reports, les glissements, quelles garanties avons-nous que cette programmation sera respectée ? Peut-être conviendrait-il de diminuer les objectifs pour s'assurer de les tenir. S'engager sur des théâtres d'opération comme nous prévoyons de le faire coûte cher.
Nous sommes opposés à la procédure d'urgence, car tous les textes y sont soumis. Je le vois en conférence des présidents : le ministre chargé des relations avec le Parlement y fait ce qu'il veut, il impose l'urgence à tout bout de champ. La responsabilité du gouvernement dans cet état de fait est claire !
Le ministre chargé des relations avec le Parlement vient d'un département que je connais bien. Il me semble possible de trouver un compromis.
Le budget de la défense ne doit pas opposer une majorité et une opposition. Lorsque nous en sommes saisis, nous essayons de nous mettre dans la position du décideur : aurions-nous pu faire mieux ? C'est ainsi que nous avons accepté les précédents budgets. Il ne s'agit pas de gommer nos différences - elles font notre charme à la française - mais de faire prévaloir l'intérêt général, à plus forte raison en période de crise. Ce n'est pas un consensus mou, c'est un consensus fort.
Les amendements que nous déposerons auront pour but de garantir la bonne exécution de la loi de programmation : ainsi du pouvoir donné aux rapporteurs spéciaux d'exercer un contrôle sur place et sur pièces. Il s'agit de s'assurer que le ministère n'est pas dépossédé en cours de route des moyens d'assurer ses missions.
Les décisions du conseil de défense engagent le président de la République. Les dépenses de défense sont sanctuarisées, je le répète, car le président de la république l'a redit lundi 30 septembre devant les membres des CFM, « au million d'euros près ». Il y a une obligation de résultats pour les 6,1 milliards d'euros sur la durée de la programmation. En 2013 et 2014, nous étions au rendez-vous. A nouveau, l'édifice est équilibré : lui enlever une pierre le ferait tomber.
La commission examine le rapport de M. Daniel Reiner et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 837 (2012-2013) autorisant la ratification du traité sur le commerce des armes.
Le 2 avril 2013, l'Assemblée générale des Nations unies a, à une très large majorité, adopté le traité sur le commerce des armes : 155 voix pour, 3 voix contre (Syrie, Corée du Nord et Iran), 22 abstentions et 13 pays n'ayant pas pris part au vote. La France l'a signé le 3 juin dernier et il est aujourd'hui soumis à l'approbation sénatoriale.
Je vous rappelle que notre commission travaille depuis longtemps sur ce sujet, nous avons ici même auditionné deux fois notre ambassadeur, M. Simon-Michel, et nous sommes très vigilants sur les exportations d'armements. Nous nous réjouissons donc que ce texte de ratification ait été si rapidement déposé sur le bureau de notre assemblée.
Je ne reviens pas sur la place de la France dans le commerce des armements, vous trouverez toutes les informations dans mon rapport et dans le rapport au Parlement sur les exportations de la France, présenté mi-septembre. Je vais principalement m'attacher à vous présenter ici le contenu du TCA.
Pour commencer, je voudrais faire un rapide rappel de la genèse du TCA. Dès la fin des années 1990, des ONG se positionnent en demandant un instrument universel de régulation du commerce des armes. En parallèle, en 1997, l'ancien Président du Costa-Rica et prix Nobel de la paix, Oscar Arias, accompagné de sept autres prix Nobel, lance un appel pour un code international de conduite juridiquement contraignant sur les transferts d'armes. Au début des années 2000, un collectif d'ONG, « contrôlez les armes » se crée afin de promouvoir la création de cet instrument.
Le Royaume-Uni est le premier des États membres permanents du conseil de sécurité de l'ONU à soutenir ce projet et est rapidement suivi de l'ensemble des États membres de l'Union européenne, au premier rang desquels la France.
L'année 2009 marque un tournant, puisque les Etats-Unis se joignent au soutien au TCA. 153 États membres des Nations unies votent, la même année, pour la mise en place d'un processus officiel qui inclut cinq réunions d'un Comité préparatoire en vue de la conférence de négociations sur le TCA.
Celle-ci se déroule en juillet 2012 mais n'aboutit finalement pas à l'adoption du Traité. En effet, certains pays, au premier rang desquels les États-Unis, souhaitent un délai supplémentaire afin de parfaire la rédaction du Traité.
Une nouvelle conférence diplomatique est alors convoquée en mars 2013, qui se conclut sur la signature du Traité le 2 avril. Parmi les pays abstentionnistes, on trouve la Chine, qui s'est abstenue pour une question de procédure : le contournement de la règle du consensus. La Russie, l'Inde, et certains pays arabes ont, quant à eux, également opté pour l'abstention, mais en raison du contenu même du traité : ils estimaient en effet que le TCA, tel que soumis au vote, comportait trop de lacunes et ne prenait pas assez en compte certaines préoccupations, en particulier des importateurs.
Ce texte est un évènement majeur : les États signataires s'accordent sur la création d'une norme internationale visant à encadrer le commerce légal des armes et à prévenir le commerce illicite. Les ONG auraient voulu un texte plus contraignant, mais dans ce cas il n'aurait vraisemblablement pas été adopté.
Le champ d'application du traité est visé à l'article 2. Ainsi, les armes classiques entrant dans le champ d'application sont les chars de combat, véhicules blindés de combat, systèmes d'artillerie de gros calibre, avions de combat, hélicoptères de combat, navires de guerre, missiles et lanceurs de missiles, armes légères et armes de petit calibre. Les dispositions des articles 6 et 7 s'appliquent également aux munitions et pièces et composants. Elles ne s'appliquent pas, en revanche, aux armes dédiées au maintien de l'ordre (matraques, ...). Les activités, quant à elles, regroupent l'exportation, l'importation, le transit, le transbordement, et le courtage. Elles n'englobent pas le transport international par un État partie ou pour son compte d'armes destinées à son propre usage. Les activités non explicitement commerciales, comme les dons, cessions et prêts d'armes, ne sont pas couvertes par le champ d'application du TCA. Il s'agit là d'une lacune que soulèvent certaines ONG, arguant qu'ainsi, une grande partie des opérations échappent à cette vigilance.
Le point central du Traité est la consécration du droit international humanitaire, qui devient le critère à respecter dans l'évaluation d'une demande d'exportation. Ainsi, l'article 6 prohibe toute exportation d'armement, armes classiques, munitions, pièces et composants, lorsque l'exportation :
- violerait les obligations de l'État exportateur au regard des mesures prises par le Conseil de sécurité des Nations unies. C'est le cas, notamment, des mesures d'embargos sur les armes ;
- violerait les obligations internationales résultant des accords auxquels l'État exportateur est partie, notamment concernant le transfert et trafic illicite d'armes classiques ;
- permettrait la commission de génocides, crimes contre l'humanité, attaques contre des civils, crimes de guerre, et violations graves des conventions de Genève.
Néanmoins, l'application reste difficile, comme l'indiquait la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) dans son avis sur l'avant-projet de TCA en date du 21 février 2013 : comment prouver l'intention d'un État de commettre un génocide, par exemple ?
L'article 7 considère que, pour toute demande d'exportation n'entrant pas dans le champ des exclusions de fait, l'État exportateur doit procéder à une évaluation objective, non discriminatoire, mais la plus complète possible, de l'utilisation de ces armes. L'État receveur de la demande doit en particulier estimer si une exportation d'armes porterait atteinte à la paix et à la sécurité, et pourrait servir à :
- commettre une violation grave au droit international humanitaire ou au droit international des droits de l'homme, ou en faciliter la commission ;
- commettre une infraction, ou en faciliter la commission, au regard des conventions ou protocoles internationaux relatifs au terrorisme ou à la criminalité transnationale auxquels l'État exportateur est partie ;
- commettre ou faciliter la commission d'actes graves de violence fondés sur le sexe, ou contre les femmes et les enfants.
S'il s'avère que c'est le cas, alors l'État doit chercher à atténuer les risques possibles. In fine, s'il considère qu'il existe un risque prépondérant de commission des actes précités, il ne doit pas autoriser l'exportation. Enfin, toute autorisation peut être réexaminée s'il est avéré que de nouvelles informations sont portées à la connaissance de l'État exportateur.
Cet article, en posant explicitement le principe du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, les place au coeur du dispositif d'évaluation. Si nous ne pouvons que nous en réjouir, les termes employés, néanmoins, laissent perplexes.
Il en est ainsi de l'adjectif « prépondérant », qui suscite des controverses. La procédure même d'évaluation des risques, par étape, se conclut sur l'expression de « risque prépondérant », qui doit empêcher l'exportation. Or, la notion de risque prépondérant, en droit international, n'existe pas. Certains États, comme la Nouvelle-Zélande, pour clarifier cette terminologie, ont déclaré qu'ils l'interprèteraient comme étant un risque substantiel. Il conviendra, pour ne pas porter préjudice au Traité et pour éviter des mises en oeuvre différentes entre les États, que l'interprétation soit clarifiée et harmonisée. Également, quid des mesures d'atténuation des risques possibles ? Elles ne sont pas explicitement énoncées, si ce n'est des « mesures de confiance ou des programmes élaborés et arrêtés conjointement par les États exportateurs et importateurs » ...
Autre règle essentielle : la transparence. Ainsi, les États Parties doivent fournir, dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur, un rapport initial détaillé précisant les mesures qu'ils ont prises pour sa mise en oeuvre. De même les États rendent compte des mesures jugées efficaces pour lutter contre le détournement des armes classiques. Ils ont également l'obligation de fournir un rapport annuel concernant les importations et exportations d'armes classiques.
Enfin, sont également prévues par le traité des mesures d'assistance et coopération entre États-Parties dans la mise en oeuvre du Traité, la possibilité d'amendement du TCA lorsqu'il sera entré en vigueur, ou encore la création de structures chargées de sa mise en oeuvre (un secrétariat dédié ainsi qu'une conférence des États-parties).
L'intégration en droit interne ne posera aucun problème. En effet, le droit européen et le droit français étant déjà très avancés en matière de législation sur le commerce des armes, le présent traité s'intègrera de façon fluide, d'autant plus que le champ d'application de la Position commune, qui couvre l'ensemble des équipements militaires de la liste commune de l'Union européenne, est plus vaste que les catégories couvertes par les articles 2, 3 et 4 du TCA. De même, les interdictions et critères d'évaluation des exportations, prévus dans les articles 6 et 7, sont eux-aussi couverts par la Position Commune.
Également, en matière de transparence, le TCA prévoit la rédaction de rapports, or, la France, par son rapport annuel au Parlement sur les exportations d'armements, met déjà en oeuvre cette transparence.
De même, concernant nos accords, le droit français intégrant par définition, et de façon plus étroite, les avancées du traité, les autorisations en cours ont d'ores et déjà été accordées à l'aune des critères du TCA. Il va donc de soi que celui-ci n'aura aucun impact sur les engagements de la France, en matière de fourniture de matériels de défense, ou de coopération dans le domaine de la défense avec nos pays partenaires.
Désormais, la ratification revêt une importance majeure : la France avait fait de l'adoption du TCA une de ses priorités, l'enjeu est désormais son universalisation afin que les principaux acteurs du commerce des armes adhèrent au traité. Rappelons que les ¾ des exportations d'armement sont effectuées par les membres permanents du Conseil de sécurité et Israël.
50 ratifications sont nécessaires pour que le TCA entre en vigueur. À ce jour, 113 pays l'ont signé et 7 l'ont ratifié. Notons que les États-Unis l'ont signé le 25 septembre.
Mes Chers collègues, soyons honnêtes, ce traité n'est pas parfait, il contient quelques lacunes ou failles dans sa rédaction : j'ai évoqué la question du risque prépondérant, on peut également citer l'article 26, qui, selon les ONG, est une des failles du texte : en vertu de celui-ci, l'application du traité ne porte pas atteinte aux obligations souscrites par les États parties en vertu d'accords internationaux, actuels ou futurs, auxquels ils sont parties, pour autant que ces obligations soient compatibles avec le traité. Les ONG nous ont fait part de leurs craintes que cette disposition ne provoque une lecture dérogatoire du Traité, qui se trouverait placé au second plan. Pour ma part, j'encourage notre pays à appliquer le TCA de la façon la plus vertueuse possible afin qu'il ne soit pas vidé de son sens.
Malgré ces imperfections, un texte améliorable est toujours préférable à un texte inexistant!
Rappelons que selon les données recueillies auprès d'Amnesty International, chaque minute, 1 personne est tuée par arme dans le monde, et 15 sont blessées ; 80% des victimes des conflits armés sont des civils ; et 875 millions d'armes à feu sont en libre-circulation dans le monde.
Ce sera tout à l'honneur de la France que de ratifier dans les premiers le TCA.
C'est pourquoi je vous recommande d'adopter ce projet de loi qui fera l'objet d'un examen selon la procédure normale en séance publique le 08 octobre.
La possibilité d'amendement est ouverte 6 ans après l'entrée en vigueur du texte. Les modalités sont prévues à l'article 20 du Traité.
Comment mesurer la bonne application du Traité ? Quant à sa mise en oeuvre, aura-t-elle des effets sur des mesures comme les embargos ?
Le Traité ne prévoit pas de mesure de coercition. Néanmoins on peut supposer que si un Etat ratifie le Traité, c'est qu'il compte respecter ses engagements. De plus, la Conférence des Etats-parties et les ONG veilleront.
Concernant les embargos, ils ne seront pas amoindris du fait de l'article 6, qui prohibe toute exportation qui violerait les obligations de l'État exportateur au regard des mesures prises par le Conseil de sécurité des Nations unies, notamment les embargos.
Il est important que la France soit fournisseur de sécurité collective plutôt que marchand de canon ! Néanmoins les ONG se posent des questions sur la traçabilité et la transparence des exportations. Ne serait-il pas judicieux d'opérer un contrôle parlementaire plus effectif, a posteriori, en s'inspirant de l'exemple de nos voisins ?
Les procédures ont déjà été améliorées en la matière, puisque désormais le Ministre de la défense présente lui-même le rapport au Parlement sur les exportations d'armements. Mais vous avez raison, un contrôle accru est préférable ... à condition que les Parlementaires utilisent cette possibilité.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte le projet de loi à l'unanimité et propose qu'il fasse l'objet d'une procédure normale en séance publique.