La réunion est ouverte à 17 h 22.
Nous recevons M. Le Foll, qui nous présente le budget pour 2016 de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural » (Casdar). Cette audition constitue aussi l'occasion de faire le tour des enjeux auxquels fait face l'agriculture. Il n'est pas question en revanche d'ouvrir le débat sur la proposition de loi agricole déposée au Sénat, qui sera discutée dans les prochaines semaines.
Les crédits de la mission connaissent une décrue importante depuis plusieurs années, passant de 3,36 milliards d'euros en crédits de paiement pour 2013 à 2,76 milliards d'euros pour 2016. Cette baisse de 600 millions a été enregistrée à périmètre constant. L'agriculture a donc bien été mise à contribution du redressement des comptes publics.
Notre crainte est que les financements à destination de l'agriculture soient à rechercher de plus en plus hors du budget de l'État. On a transféré au Casdar le financement de nombreuses missions, comme le soutien à l'investissement dans les filières, si bien que l'essentiel des ressources de FranceAgrimer pour le soutien aux filières va être issu de ce compte. La charge de gestion administrative, dans le cadre de la simplification et des téléprocédures, est transférée aux agriculteurs eux-mêmes. La réforme de la PAC a eu pour conséquence le transfert de certaines charges du budget national au budget européen, comme la prime à la vache allaitante, ou encore une large part des prêts à l'installation et de la dotation jeunes agriculteurs ainsi que les crédits de soutien aux assurances en agriculture. Il en va de même pour les cofinancements des régions, nécessaires pour toucher les crédits européens du deuxième pilier. C'est autant d'efforts en moins demandés au budget de l'État.
Le budget 2016 a été construit au plus juste, avec des crédits de crise à leur étiage bas, des crédits pour la forêt en baisse sensible. Vous comptez vraisemblablement sur la capacité de l'Office national des forêts (ONF) à trouver des solutions à son besoin récurrent de financement - les collectivités territoriales sont souvent sollicitées. Même les crédits destinés à la sécurité sanitaire sont en réduction sensible.
Or nous connaissons un grave problème avec la résurgence de la fièvre catarrhale ovine (FCO). Nous aimerions obtenir des détails sur l'origine des moyens mis à disposition de l'investissement en agriculture, conformément au plan pour la compétitivité et l'adaptation des exploitations agricoles 2014-2020. Quel sera le rythme d'exécution de ce plan ?
Merci de votre invitation pour discuter du budget de mon ministère. L'agriculture participe à la réduction de la dépense publique et du déficit budgétaire, à laquelle certains sont attachés pour des questions de souveraineté et d'équilibre des comptes. La campagne pour les primaires organisées dans l'opposition révèle de nombreuses propositions en ce sens, allant de 110 à 150 milliards d'euros d'économies. Nous en proposons, de façon plus réaliste, 50 milliards d'euros.
Le ministère de l'agriculture participe à la réduction de la dépense publique. Ses crédits de paiement s'élèvent à 4,5 milliards d'euros, en baisse de 2,8 %. Les moyens du ministère sont consacrés pour moitié à l'enseignement et aux salaires du ministère. Les engagements en faveur des agriculteurs dépassent cependant le cadre de mes crédits.
Le budget européen de la Politique agricole commune passera de 9,132 milliards d'euros en 2013 à 8,936 milliards d'euros en 2017, en raison d'un rééquilibrage des aides des anciens États membres vers les nouveaux. Le montant du deuxième pilier de la PAC passe de 1,279 milliard d'euros à 1,666 milliard d'euros.
Le budget de l'État pour l'agriculture sera en 2016 de 4,465 milliards d'euros et de 4,440 milliards d'euros en 2017. Il rassemble le budget du ministère de l'agriculture, y compris le compte d'affectation spéciale (CAS) pensions, et le Casdar, financé par une taxe sur le chiffre d'affaires de l'agriculture. Il sera abondé par le budget de l'État, 148 millions d'euros en 2015, comme en 2016 et 2017. Les taxes fiscales affectées seront de 412 millions d'euros en 2016 et de 406 millions en 2017. Le financement issu du programme d'investissements d'avenir (PIA) est passé de 40 millions d'euros en 2015 à 70 millions d'euros en 2016. Il redescendra à 40 millions d'euros en 2017.
Autre contribution à l'agriculture, les allègements de charges sociales et fiscales. Pour la production agricole, ils représentaient environ 1 milliard d'euros en 2013, ce qui inclut les allègements Fillon. En 2016 ils s'élèveront à 1,7 milliard et en 2017, à 1,8 milliard. Pour les industries agro-alimentaires, via le CICE et le Pacte de responsabilité, ces allègements passent de 792 millions d'euros en 2013 à 1,76 milliard en 2016 et 1,99 milliard en 2017. Ils doublent pour l'agriculture, et triplent presque pour les industries.
Réduire la dépense publique et accroître la compétitivité des entreprises en excluant le financement par une hausse de la fiscalité est une bonne politique. Les coopératives ne bénéficiant pas du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) a été anticipée pour les coopératives, soit 48 millions d'euros d'économies dès 2015, 86 millions en 2016. Le total, en 2017, atteindra 253 millions d'euros.
Les services agricoles bénéficient d'allègements de charges à hauteur de 720 millions d'euros en 2016 et 812 millions d'euros en 2017, puisque le CICE et le Pacte de responsabilité s'appliquent à tous.
Le total des crédits consacrés à l'agriculture, nationaux et européens, est de 19,9 milliards d'euros en 2016 et de près de 20,14 milliards en 2017, financement de l'équilibre du régime de retraite agricole inclus. La baisse de charges, pour l'agriculture et l'agro-alimentaire, sera d'environ 4,26 milliards au total en 2016 et de 4,6 milliards en 2017. Au total, l'engagement de l'État en faveur de l'agriculture ne baisse pas.
Le plan de soutien à l'élevage répond à la crise des marchés pour éviter de grandes difficultés aux exploitations agricoles. Il mobilisera près de 650 millions d'euros en trois ans, avec un volet de réduction des charges sociales de 180 millions dès cette année, qui seront inscrits en loi de finances rectificative, afin d'agir tout de suite par des mesures d'allègement de charges et de fiscalité, des reports de paiement à la Mutualité sociale agricole (MSA) et la fameuse année blanche. S'y ajoute la mobilisation d'un fonds européen de 63 millions d'euros, dont 43 millions pour compenser le nouveau calcul des cotisations à la MSA, non plus sur trois années mais sur l'année N-1, en l'espèce 2014, ce qui réduit le montant des cotisations pour les éleveurs. Il restera 20 millions d'euros pour financer l'année blanche pour les agriculteurs qui le souhaitent.
Les éleveurs ont aussi accès à l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN), avec une enveloppe nationale de 256 millions d'euros. En y ajoutant la prime herbagère agro-environnementale (PHAE), le montant s'élève à 1,024 milliard d'euros, soit près de 100 millions d'euros de plus qu'en 2015 et 400 millions d'euros de plus qu'en 2014. L'ICHN n'a jamais été autant réévaluée depuis sa création.
Le soutien à l'investissement et à la modernisation des exploitations passe de 56 à 86 millions d'euros. S'y ajouteront les fonds du deuxième pilier de la PAC, dits fonds pour la compétitivité et l'adaptation des exploitations agricoles (PCAE) et la mobilisation d'emprunts au niveau des régions. La mobilisation potentielle en matière d'investissement dans l'agriculture serait d'1 milliard d'euros.
Ce budget a aussi des objectifs stratégiques. Nous avons inscrit dès 2015 les autorisations d'engagements pour les mesures agro-environnementales territorialisées et système. Le décalage entre les autorisations d'engagements et les crédits de paiement est lié au fait que nous avons crédité la totalité de la somme pour lancer le processus, décliné au fil des cinq ans par tranches annuelles de 70 millions environ. Ces mesures agro-environnementales présentent des difficultés techniques mais font l'objet d'une bonne demande.
La dotation du fonds Avenir Bio est maintenue à 4 millions d'euros. Je souhaite accompagner l'essor de l'agriculture biologique avec la structuration d'une filière capable de transformer les produits et de les valoriser sur le marché. On ne peut pas laisser penser qu'en augmentant la production agricole, on résout le problème des débouchés.
Les crédits d'intervention forestiers sont consolidés. Le fonds stratégique se met en place. Il sera crédité de 25 millions d'euros et pourrait atteindre entre 40 et 50 millions d'euros avec l'aide du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). La mobilisation des fonds européens est nécessaire pour accompagner le plan de reconstitution de la forêt landaise après la tempête Klaus, soit 41 millions d'euros. Nos engagements seront tenus fin 2017. La somme totale aura été de 500 millions d'euros.
Nous devons aussi gérer l'ONF. Son contrat d'objectifs et de performance (COP) imposera l'équilibre. Il n'était pas question de faire financer l'ONF par les communes forestières. Il devra équilibrer son fonctionnement et vendre du bois pour dégager des recettes. Nous avons cherché le bon niveau, en évitant des objectifs de vente irréalistes. Le COP sera signé d'ici début décembre.
Nous maintenons nos objectifs d'installation des jeunes. Si nous avons basculé vers un financement du deuxième pilier, l'objectif demeure de 6 000 installations aidées par an. Leur nombre a beaucoup augmenté en 2013, puis il a baissé avec la crise, il est temps de reprendre un meilleur rythme.
Le budget conforte la prise en compte des risques sanitaires et climatiques. La situation de la direction générale de l'alimentation (DGAL) a été redressée afin que les services vétérinaires puissent assurer leurs missions dans des conditions correctes. Un rapport montre que le nombre de fonctionnaires sanitaires varie, entre la France et certains pays européens, selon un facteur de un à trois. L'effort devra être poursuivi car nous sommes en retard. Nous avons freiné la baisse du nombre de ces fonctionnaires en 2012, puis stabilisé leur nombre en 2013 avant d'entreprendre une augmentation de leurs effectifs de 60 en 2014 et d'autant en 2015, 2016 et 2017. La Cour des comptes avait formulé cette demande, tout en réclamant une baisse des dépenses : ses exigences ne sont pas toujours faciles à concilier...
Nous avons mis en place une amorce de fonds de mutualisation avec le contrat-socle. J'ai déjà abordé ce sujet devant vous. Il porte sur les végétaux, donc, pour l'élevage, sur le fourrage. Cette première étape devra être davantage abondée par des moyens du premier pilier pour assurer les agriculteurs face aux aléas climatiques.
Dans l'enseignement agricole, nous avons fixé un objectif de 1 000 emplois créés au cours du quinquennat. Nous en avons déjà créé 780 et en proposons 140 dans l'enseignement technique agricole, 20 dans l'enseignement et la recherche.
Le ministère de l'agriculture participe à la réduction du déficit par des efforts notamment dans les fonctions support. Le secrétaire général mène ce travail dans le dialogue, en accompagnant la suppression de 220 postes d'une amélioration des gains de productivité liés à l'utilisation des nouvelles technologies. Les efforts sont indispensables.
M. Philippe Leroy m'a chargé de poser une question sur la baisse de 16 millions d'euros du budget de l'ONF en 2016. Les communes forestières ne veulent pas payer plus cher pour les frais de garderie.
Lors de la négociation du contrat d'objectifs et de performance de l'ONF, vous avez exhorté les communes forestières à couper plus de bois. Pouvez-vous les assurer de votre soutien contre ceux qui formulent des craintes imaginaires de déforestation sauvage ? La coupe est nécessaire à la régénération.
Pouvez-vous nous préciser l'utilisation des 30 millions d'euros du Fonds chaleur en 2015, et ses perspectives pour 2016 ?
Le cofinancement européen des aléas climatiques est-il assuré pour les prochaines années ? Le problème de la mutualisation, mais aussi de la réassurance, se pose. Le ministère des finances y est opposé depuis des années.
Nous avons évoqué il y a peu les maladies du bois de la vigne, qui provoquent beaucoup de dégâts. Vous avez prévu que le financement de la recherche provienne du Casdar. La recherche a besoin de fonds importants et pérennes.
Ce budget est en nette régression. Vous évoquez les compensations en allègements de charges. Je ne pense pas que ceux-ci soient de nature à rectifier significativement les baisses budgétaires. Je vous demande des éclaircissements.
Les moyens alloués à la gestion des crises et des aléas font l'objet de dispositifs en évolution, tels que les déductions pour investissement (DPI) et les déductions pour aléas (DPA). Celles-ci ne répondent pas à l'ensemble des besoins de l'agriculture puisqu'il faut d'abord des résultats pour y accéder... Il est dommage en tout cas que ces lignes budgétaires soient diminuées. On aurait pu étudier plus efficacement le secteur assurantiel afin d'entrer dans une phase plus incitative. Il existera toujours des secteurs touchés par les aléas et non couverts. Des calamités se produisent chaque année.
On parle beaucoup de la tuberculose, de la fièvre catarrhale. Hélas on dégarnit les moyens financiers de lutte contre les maladies et pour l'abattage obligatoire.
Il y aurait aussi beaucoup à dire sur le compte d'affectation spéciale. La logique d'abondement doit-elle céder le pas à la logique d'appel à projets ? En tout il faut savoir se limiter !
Mme Frédérique Espagnac, rapporteure pour avis des crédits, a été empêchée. Je la remplace au pied levé. Les crédits de paiement, dans ce projet de loi de finances, s'élèvent à 4,5 milliards d'euros contre 4,7 milliards en 2015, en baisse de 2,8 %. Dans la conjoncture budgétaire, cela me semble extrêmement positif puisque des crédits européens atténuent la baisse. Évitons la démagogie de certains qui proposent des économies plus lourdes. Je me félicite du respect des engagements envers les éleveurs, les aides qui les concernent atteignant 1 milliard d'euros en 2017 conformément à l'engagement du Président de la République. Ces aides auront été revalorisées de 60 % en trois ans. Je me félicite aussi du plan de soutien à l'élevage. Le Premier ministre avait présenté, le 3 septembre, des mesures complémentaires à hauteur de 300 millions d'euros en poursuivant cinq objectifs majeurs : assurer des prix rémunérateurs ; alléger les charges ; lutter contre l'endettement avec l'année blanche ; moderniser les outils de production ; simplifier les normes qui pèsent sur notre compétitivité. L'agriculture occupera nos débats lors de l'examen du projet de loi de finances, du projet de loi de finances rectificative et d'une proposition de loi de la majorité sénatoriale.
Ayant embauché un jeune pour s'occuper de mon exploitation en raison de mon activité sénatoriale, je suis toujours sensible aux mesures améliorant l'attractivité du secteur auprès des jeunes générations. J'approuve la stabilité de la dotation de 26 millions d'euros en leur faveur. En deux ans, les moyens consacrés à l'installation et à la modernisation des exploitations ont augmenté de 27 %. Le Gouvernement maintient son objectif de 6 000 installations par an, très important pour le renouvellement des générations.
On ne peut que se féliciter de la création de 185 postes d'enseignement supérieur et de la somme de 1,7 milliard consacrée à ce volet. L'agriculture n'est attractive que si elle est compétitive. Les efforts menés via le Pacte de responsabilité sur les allègements de charges sociales et fiscales commencent à porter leurs fruits. Aussi, le groupe socialiste et républicain est favorable à ce projet de loi de finances.
Hier encore avec M. Macron, nous évoquions l'extension du dispositif de suramortissement aux coopératives d'utilisation de matériel agricole (Cuma). Il semblait favorable à l'élargissement à toutes les caves coopératives. Quelle est votre opinion ?
L'objectif de 6000 installations pour 2016 prolonge l'effort des années précédentes. Pourtant, le niveau des exploitations a bien changé. Je ne vois aucune avancée sur les conditions d'installation, alors qu'un jeune qui s'installe reprend un capital de plus en plus considérable. Nous manquons d'ambition sur ces aspects, dont dépendent de nombreux emplois. Les coopératives agricoles ne bénéficient pas du suramortissement, malgré les modifications récentes introduites par l'Assemblée nationale pour les Cuma. Or la modernisation de l'outil industriel agroalimentaire est stratégique. La couverture des aléas climatiques ne progresse pas, au contraire, elle piétine. Des procédures plus volontaristes sont imaginables, notamment à l'intention des jeunes agriculteurs.
Je vous ai félicité l'an dernier sur l'ambition de votre plan de modernisation. Force est de constater néanmoins qu'il est très inférieur à ceux mis en oeuvre aux Pays-Bas, au Danemark ou en Allemagne. Nous n'avons pas pris la mesure du niveau d'investissement désormais requis dans l'élevage. La filière porc, par exemple, est en panne d'investissement - en dehors de la mise aux normes et des mesures pour le bien-être animal - et sa productivité stagne. Oui, nous pouvons tirer davantage de mètres cubes de la forêt française. Un arbre est fait pour être coupé, à condition d'avoir la capacité de reboiser. Hélas, nous ne le faisons guère...
Cette baisse du budget s'ajoute aux trois précédentes : toujours moins ! Pour les secteurs laitier, bovin et porcin, cette année a été très difficile, je l'ai bien vu en Bretagne. Avez-vous bien perçu la détresse du monde agricole ? Même une petite baisse peut être très douloureuse pour un secteur fragilisé. Une ligne budgétaire est-elle consacrée au développement des circuits courts ? Le commissaire européen, M. Phil Hogan, a récemment évoqué devant nous le stockage privé, pour éviter la saturation des marchés. Une telle politique peut-elle être développée ? Peut-on en profiter pour distribuer de la nourriture aux associations caritatives, qui le réclament depuis des années ? Pour résoudre les difficultés financières de l'ONF, faudra-t-il vendre des forêts ? L'exploitation beaucoup trop intensive des forêts à Gardanne, montrée dans une émission de télévision, sera-t-elle compensée par du reboisement ?
Merci de votre écoute lors de l'assemblée générale des communes forestières, qui s'est tenue il y a quelques semaines à Nancy. Oui, il faut mobiliser plus de bois, mais n'est-il pas paradoxal d'y inciter les communes forestières alors que l'ONF vend des forêts domaniales et que ces communes sont assommées par une diminution proportionnelle de leur DGF ? Nous y sommes déterminés, néanmoins, mais cela aura un coût, puisqu'il faudra atteindre les zones moins accessibles. Le fonds stratégique pourra-t-il être mobilisé, même s'il est plutôt orienté vers le renouvellement des boisements ? Membre du bureau de la Fédération nationale des communes forestières, j'aimerais savoir à quel chiffre vous pensez. Il était de 9,3 millions de mètres cubes dans le dernier contrat d'objectifs et de performance (COP), et nous avons atteint 7,8 millions de mètres cubes.
Merci pour votre présentation synthétique et solide, qui montre votre sérieux budgétaire et dont il ressort pourtant que les moyens publics en faveur de l'agriculture sont préservés. Il est important de montrer la transversalité du budget. Pareillement, le budget du ministre de l'économie est apparemment en baisse. Mais si l'on prend en considération l'ensemble des dispositifs concernant l'économie ou agriculture - CICE, baisses de charges... - on constate une augmentation.
L'agriculture n'est pas un domaine comme les autres : il s'agit de l'indépendance alimentaire d'un pays. Sa compétitivité est minée par des crises structurelles qui, dans l'élevage par exemple, couvent depuis des années. Des efforts sont indispensables, donc. Dans la filière agroalimentaire, nos entreprises ont besoin d'une modernisation très lourde. Celle-ci sera facilitée par la baisse des charges et les politiques d'aide à la compétitivité des entreprises.
J'ai dit à M. Phil Hogan que beaucoup de choses dépendaient de lui : une hausse de quelques centimes du prix du litre de lait, par exemple, réglerait bien des problèmes. Or sa présentation révélait un optimisme incroyable sur les bienfaits du marché. Les élus que nous sommes doivent exiger de l'Europe davantage de solidarité envers les agriculteurs, dont plusieurs dizaines de milliers sont au RSA.
Je ne les conteste nullement, mais souhaite savoir comment nous allons terminer l'année. Certains éleveurs ont vu leur revenu diminuer de moitié... Les aides leur parviendront-elles à temps ? Danone fait pression sur les prix du lait, qui sont déjà très bas. Le consommateur paie-t-il son yaourt moins cher ? Il faudrait vérifier. Les Gaec ne doivent pas pénaliser leurs membres dans l'attribution des aides. Je crois que vous n'aborderez ce problème qu'en loi de finances rectificative. Quid pour 2016 ? Quand les retraites seront-elles portées à 75 % du Smic ? Il paraît qu'une émission télévisée programmée pour le 23 novembre risque de nuire à l'image de l'élevage. Les organismes agricoles réagiront, mais le mieux serait que le ministre lui-même mette les points sur les i !
Les grands prédateurs, dans les massifs, contrarient les efforts que vous faites pour l'agriculture de montagne, qui sont très appréciés. Près de 7,5 millions d'euros doivent financer du gardiennage, des clôtures ou des chiens de protection, mais la zone de présence du prédateur ne cesse de s'étendre, dans le Jura, les Alpes, les Pyrénées ou le Massif central. Jusqu'où pourrez-vous abonder, avec un budget contraint, ce plan « grands prédateurs » ? Ne marche-t-on pas sur la tête ?
Le niveau du fonds d'allégement des charges (FAC) est très bas. Je vous avais interpellé l'an dernier sur le sujet, et l'histoire m'a donné raison. Ne serait-il pas possible d'abonder ce FAC, dont l'utilité n'est plus à démontrer, quitte à reporter ses crédits sur les années suivantes s'ils ne sont pas consommés ? Vous avez transféré l'an dernier les autorisations de mise sur le marché à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). Son budget a-t-il été adapté ? Quel sera son plafond d'emplois ? Où en sont les négociations sur la couverture contre les aléas climatiques ? Certains métiers, comme le maraîchage, y sont très exposés et manquent absolument d'un système d'assurance adéquat.
L'essentiel a été dit par MM. Cabanel et Bourquin. Quand les choses vont bien, il faut le dire. C'est le cas de la viticulture, où le plus dur est derrière nous. Certaines simulations effectuées par le syndicat des vignerons de mon département sur l'impact de la réforme du forfait agricole annoncent une augmentation très importante, jusqu'à 1 500 euros, des cotisations MSA. Vous avez souhaité que des contacts soient établis entre votre ministère et la profession, et une délégation s'est déplacée dans mon département : j'apprécie cette démarche, qui s'est révélée utile et nécessaire. Quelles mesures envisagez-vous pour neutraliser les effets négatifs de cette réforme ?
Merci pour vos questions légitimes et précises. Certes, entre 2013 et 2017, le budget de l'agriculture diminuera de 500 millions d'euros, mais dans le même temps le Pacte de responsabilité apportera à l'agriculture, sans même compter l'industrie agroalimentaire, 800 millions d'euros supplémentaires, puisque son coût passera de 1 à 1, 8 milliard d'euros. Cela compense plus que largement, d'autant que le budget de l'agriculture comprenait aussi les dépenses de fonctionnement du ministère. Si l'on ajoute l'industrie agroalimentaire, le Pacte de responsabilité représentera plus de 4 milliards d'euros, soit une somme supérieure au budget de l'agriculture - dont seule la moitié est consacrée aux politiques d'intervention. Je le répète, les baisses de dépenses publiques sont redistribuées pour accroître la compétitivité. D'où l'importance de la transversalité.
J'avais pris, auprès des communes forestières, l'engagement de ne pas accroître la fiscalité qui les concerne. Je l'ai tenu. Je m'étais aussi engagé à ce que soit réglé le problème des délais de paiement de l'ONF : cela a été fait dans la semaine qui a suivi mon passage à Nancy. Le COP que vous évoquez était irréaliste. Nous devons trouver quel volume de vente de bois assurera les recettes tout en étant susceptible d'être atteint. Nous viserons donc 8,5 millions de mètres cubes. Je suis attaché à l'ONF et au régime forestier de mutualisation, car certaines forêts ne produisent pas de recettes. Entre 2012 et 2013, près de 45 millions d'euros ont été ajoutés à son budget pour compenser le déséquilibre. Depuis, nous l'avons diminué de 36 millions d'euros pour 2015 et 2016. Quand le prix du bois est bas, il faut plus de volume pour assurer la recette. Heureusement, les cours se sont un peu redressés.
Pas uniquement. Nous mobiliserons 6,5 millions de mètre cubes dans les forêts domaniales de l'État.
L'appel à projets sur le Fonds chaleur, doté de 30 millions d'euros mobilisés conjointement par le ministère de l'agriculture et celui de l'environnement, grâce à un financement de l'Ademe, a eu un succès considérable : le montant cumulé des projets présentés est supérieur à l'enveloppe prévue. Et leurs contenus sont intéressants. Mme Royal et moi-même présenterons dans les prochains jours les résultats : il sera difficile de donner satisfaction à tous.
Pour l'instant, le contrat-socle de couverture contre les aléas climatiques fait l'objet d'une réassurance privée. Le taux de couverture n'est pas satisfaisant : 30 % pour les céréales, 35 % pour les grandes cultures, 18 % pour la viticulture et 5 % pour le maraîchage. Il est difficile pour les agriculteurs, en cette période de crise, de consacrer des ressources à l'assurance. Nous pourrions subventionner leurs contrats, mais les assurances ne tarderaient pas à s'adapter en relevant le niveau des primes... Je propose que votre commission auditionne l'ensemble les acteurs concernés et me fasse des propositions. Comment tirer mieux parti des fonds européens ? Nous devons fixer un cadre empêchant que l'apport de la puissance publique ne soit capté par les assurances. Sur ce sujet, le travail parlementaire me sera d'une grande aide.
Oui, les DPI-DPA ne peuvent être utilisées que si l'on a des revenus à provisionner. C'est pourquoi les allégements fiscaux doivent être maintenus et les DPA modifiées pour être rendues plus accessibles. Le taux d'intérêt de retard calculé par Bercy était trop élevé. Nous allons donc le baisser. Le Fonds national de gestion des calamités agricoles sera abondé régulièrement par le produit d'une taxe sur les assurances. Les cagnottes qui se constituent servent en cas de gros aléas. Nous avons toutefois baissé le plafond, puisque, en cas de grosse calamité, l'État est de toute façon obligé d'intervenir.
Nous n'avons pas baissé mais augmenté le budget consacré à la FCO. Le Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnementale (FMSE) apportera une réponse financière aux éleveurs qui ont été obligés de garder des bêtes malades : le projet de loi de finances rectificative débloquera 20 millions d'euros.
Nous avons prévu 3 millions de doses pour faire face à l'exportation de 900 000 bovins avant la fin de l'année, à raison de deux vaccins par tête. Le ministère s'est porté acquéreur de l'ensemble des doses disponibles sur le marché mondial, soit 2,8 millions de doses, pour gérer les exportations et une partie des mouvements réglementés. Nous aurons 4 millions de doses supplémentaires en février prochain. Une réunion se tient en ce moment même avec les laboratoires pour que ceux-ci accroissent leur production dans les mois à venir. C'est que le type de FCO auquel nous avons fait face avait disparu depuis dix ans, et les producteurs de vaccins n'en fabriquent que s'ils ont un débouché. Nous avons négocié avec eux pour anticiper la deuxième vague, une fois vaccinés les bovins à exporter. Nous devrons anticiper le retour à l'herbe au printemps... Et réfléchir à la vaccination : pourquoi la faire si elle ne sert à rien ?
Le suramortissement de 140 % des investissements, au lieu de 100%, est possible jusqu'en juillet 2016. Cela réduit les impôts et le coût de l'investissement. Les agriculteurs individuels bénéficiaient de ce dispositif mais pas les agriculteurs en Cuma. Aussi avons-nous créé un système dérogatoire faisant que la part de l'investissement faite en commun est répercutée sur tous les porteurs de parts et adhérents. Ce n'est pas prévu pour les coopératives viticoles, car elles peuvent être de toutes tailles, et diviser l'avantage par un très grand nombre de membres exige un travail lourd pour un résultat fort mince. Mais elles bénéficient de l'allégement de C3S.
Nous en restons à un objectif de 6 000 installations. La DPU sera de 75 millions d'euros et la dotation jeune agriculteur (DJA) reste à 25 millions d'euros, afin de conserver un niveau total de 100 millions d'euros. La vraie question est la hausse du niveau de capital nécessaire. Pouvons-nous accompagner cette évolution avec les deniers publics ? La solution passe par le partage du capital, qui facilitera son renouvellement. C'est la logique des Gaec, monsieur Bailly ! Nous en agréerons plus de 6 000 en 2015, contre une moyenne de 400 avant la réforme de la PAC. Les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) hommes-femmes ont été massivement converties en Gaec hommes-femmes. Actuellement, les montants de capital en jeu sont considérables, et le rendement est très faible. Mon idée est donc, via les Gaec, d'assurer un renouvellement du capital de façon partielle et régulière. C'est ma façon d'aborder la question...
L'appel à projets du plan national pour l'alimentation représente 600 000 euros par an, mais la question d'argent n'est pas la plus importante : mon souci concerne l'approvisionnement local. Un processus est engagé au sein des administrations, qui commence à porter ses fruits. Ainsi, la restauration collective a signé hier soir avec les marchés de gros une convention favorisant l'approvisionnement local.
Le lendemain de la diffusion du film sur Gardanne, j'étais dans la Sarthe avec le président du Centre national de la propriété forestière (CNPF), qui m'a bien sûr interrogé. Il s'agit d'un projet de chaufferie énorme calibrée pour fonctionner avec du bois importé ; on a ensuite songé à la faire fonctionner avec le bois environnant. Des calculs simples ont montré qu'il faudrait abattre toute la forêt. Pour du sensationnel, faites confiance aux médias ! Comme si nous allions détruire toute la forêt méditerranéenne pour alimenter une chaufferie ! Et après, la chaufferie n'aurait plus qu'à fermer ! Une forêt se gère avec un horizon de plusieurs décennies. Quant à la forêt bretonne, elle ne financera rien en Paca, que M. Le Scouarnec se rassure. Je veux dire aussi à Mme Loisier que les regroupements de forêts ont toujours eu lieu, ils ne signifient pas que nous allons vendre des morceaux de forêt domaniale.
Aucun risque.
Le soutien à l'élevage représentera 600 millions d'euros sur trois ans, dont un volet de baisse de charges sociales de 180 millions d'euros en 2015, sous forme d'allégements de charges, de report de cotisations MSA, de baisse de la fiscalité sur le foncier non bâti, d'année blanche. Le reste constitue le plan d'investissement, qui sera mis en oeuvre année après année. Nous avons commencé en 2015 à porter les petites retraites à 75 % du Smic, et nous parviendrons à 100% en 2017.
Je connais par coeur les problèmes posés par le loup... qui finira par arriver à Paris ! Nous avons autorisé davantage de tirs renforcés. Renégocier la convention de Berne est compliqué, mieux vaut porter nos efforts sur la directive « Habitats ». L'Espagne nous soutient mais les discussions avec l'Italie sont difficiles. Pourtant, nos loups viennent de chez eux... Les pays du Nord, eux, défendent la présence des grands prédateurs en Europe. Bref, ce sujet n'est pas simple. Il faudrait faire passer le loup de la première à la deuxième catégorie d'espèces protégées, car il n'est plus en voie de disparition.
Une équipe s'est déplacée dans l'Aude pour discuter de la réforme du forfait, dont l'impact est évident : sa seule gestion coûtait 7 millions d'euros aux services de Bercy, et il comportait des écarts injustes. Toutes les professions agricoles ont donné leur accord, mais il y a un problème avec la viticulture, surtout en Languedoc-Roussillon, pour des raisons historiques. Les 7 millions d'euros d'économies seront reversés à ceux qui auront des problèmes de transfert. Je suis ce dossier avec attention. Des solutions ont été trouvées dans l'Aude pour compenser les effets pour les perdants.
La ligne d'allégements de charges sur laquelle vous m'avez interrogé ne représente qu'1,5 million d'euros...
Mais le FAC peut mobiliser jusqu'à 100 millions d'euros si nécessaire, auxquels s'ajoutent 50 millions d'euros de la MSA.
Les fonds sont pris sur les réserves de précaution de Bercy. S'ils ne sont pas affectés au FAC, c'est parce que la crise passée, ils ne seront plus à prévoir.
Pour pouvoir répondre très rapidement à une crise comme celle du chou-fleur par exemple. Au début de la crise porcine, ce sont ces crédits que j'ai employés ; la crise s'aggravant, j'ai demandé au Premier ministre de mobiliser la réserve.
Quant à l'Anses, les transferts ont été effectués et les ETP nécessaires créés. Le 15 décembre, lors de la réunion d'évaluation de la loi d'avenir pour l'agriculture à laquelle je vous convie à l'Assemblée nationale, je ferai venir son directeur, qui vous expliquera ces changements et vous dira ce qu'il en pense. Pour l'heure, nous n'avons pas de commentaires négatifs. Ce sera un exercice utile.
M. Macron l'a fait la semaine dernière : il a réuni les membres des deux commissions spéciales qui ont examiné la loi sur la croissance et l'activité, pour faire le point.