La commission entend M. Georges Tron, secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique, sur le projet de loi de finances pour 2011 (mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines »).
Je me réjouis de cette occasion qui m'est donnée, au-delà de la présentation des crédits du programme « Fonction publique», qui n'épuise pas le sujet, de vous exposer les grandes orientations et les principaux chantiers du gouvernement pour 2011 en la matière.
Le programme continue d'assurer ses missions fondamentales, dans la ligne des engagements politiques que nous avons pris avec Eric Woerth lors de la présentation de l'agenda social aux organisations syndicales, en mars 2011.
Les crédits portent sur deux chapitres principaux : l'action sociale interministérielle, pour 60 %, et la formation initiale et continue des fonctionnaires.
L'action sociale interministérielle, avec 138,5 millions porte, d'une part, sur des prestations individuelles anciennes, comme les chèques vacances et de nouvelles, issues des négociations salariales, portant soit sur l'aide aux familles, avec le CESU pour garde d'enfant, soit sur l'aide au logement, avec les aides à l'installation ; d'autre part sur des prestations collectives, comme l'investissement dans les restaurants inter-administratifs, dans la logique habituelle de l'action sociale interministérielle.
En matière de formation, avec une dotation de 82 millions, l'action du ministère s'exerce tant sur la formation initiale qui vise à offrir un socle de connaissances communes aux futurs cadres, de catégorie « A+ », de l'État, formés à l'ENA et aux futurs cadres de catégorie A formés dans les IRA (instituts régionaux d'administration), que sur la formation continue, qui vise à développer la professionnalisation des agents.
La légère inflexion des dotations par rapport à l'année 2011 est à imputer, en premier lieu, à l'effort de 10 % sur les dépenses de fonctionnement et d'intervention demandé aux ministères par la loi de programmation des finances publiques - c'est ainsi que les crédits de la direction générale de l'administration et de la fonction publique diminuent, hors action sociale, de 12 %. En second lieu, les opérateurs sont appelés à contribuer à la rationalisation des effectifs de l'État - soit, pour le programme 148, une réduction, sur la période, de cinq emplois permanents pour les IRA et de douze pour l'ENA - car il ne serait pas normal, j'y ai toujours insisté comme parlementaire, qu'ils échappassent aux règles que s'est fixé l'État. Dans une logique vertueuse, enfin, nous avons autofinancé certaines charges nouvelles, comme la revalorisation de la rémunération des élèves de l'ENA, financée par la réduction de la scolarité de vingt-sept à vingt-quatre mois.
Le programme 148 contribue ainsi à l'effort budgétaire interministériel, tout en continuant d'assurer ses missions fondamentales conformément à l'Agenda social 2010.
Les grandes échéances des mois à venir se résument en quelques verbes d'action.
Mieux dialoguer, tout d'abord, en poursuivant la modernisation du dialogue social engagée avec les accords de Bercy, signés par six organisations représentatives sur huit. Le premier texte que j'ai défendu devant vous visait à mettre en place ce dispositif nouveau, qui doit s'étendre à toute la fonction publique. La plupart des grands textes ont, depuis, été précédés par des accords - je pense notamment, après Bercy, à la convention sur la santé et la sécurité au travail.
La transparence doit devenir la norme, y compris pour ce qui concerne les moyens accordés aux organisations syndicales. J'ai ouvert, il y a quelques semaines, ce grand chantier qui vise à identifier les meilleures voies de modernisation des garanties statutaires et indemnitaires des agents investis de mandats syndicaux et les moyens à leur attribuer pour remplir les missions confiées par leurs mandants. Nous souhaitons pouvoir engager la négociation en 2011.
Mieux recruter, ensuite. Nous entendons ainsi poursuivre la professionnalisation des concours, dont 310 sur 360 ont déjà été révisés, pour la fonction publique de l'État, tandis que la réflexion, que je souhaite encourager, est engagée pour les deux autres fonctions publiques. La reconnaissance des acquis de l'expérience doit, quant à elle, se généraliser, en 2011, à l'ensemble des ministères. Nous optimiserons, dans le cadre du deuxième volet de la RGPP, l'organisation des recrutements, via la mutualisation de l'organisation des concours, laquelle doit également faciliter l'orientation et la préparation des candidats et aider au développement de la mobilité.
Dans les DOM-TOM, nous permettons aux candidats de passer les concours sur place. J'ai pu constater, au cours d'un voyage à la Réunion, il y a quelques semaines, combien les habitants de l'outre-mer étaient sensibles à une disposition qui leur évite d'être défavorisés par l'obligation de se rendre en métropole.
La formation initiale fera également l'objet d'une modernisation, selon les préconisations du rapport Le Bris : individualisation et professionnalisation des formations, réduction des durées de formation - car il n'est pas normal d'avoir, au terme d'années d'études et de formation, à accomplir de surcroît toute une série de stages préalables à l'emploi. L'action sera poursuivie dans ces trois domaines tandis que s'engagera, parallèlement, un travail de rapprochement des écoles de service public.
En matière de formation continue, une initiative de mutualisation des formations communes à plusieurs ministères sera engagée, destinée à en finir avec les redondances, tandis que la qualité des formations sera améliorée, grâce à la labellisation.
L'ENA a fait l'objet d'un projet de réforme qui a trouvé sa traduction législative dans la proposition Warsmann, bientôt soumise à votre examen. L'objectif est de supprimer le classement de sortie actuel pour le remplacer par un dispositif d'appariement entre choix des élèves et choix de l'administration : il n'était pas normal que l'État soit le seul employeur qui n'ait pas son mot à dire dans le recrutement de ses cadres supérieurs. Dorénavant, les élèves indiqueront leur choix préférentiel et l'administration, à l'issue d'un entretien destiné à mesurer l'adéquation du profil du candidat à ses priorités, choisira. Beaucoup d'anciens élèves se sont inquiétés de la neutralité de la fonction publique, qui doit rester prépondérante. C'est pourquoi nous avons prévu qu'une commission, présidée par M. Jouyet, aura charge de prévenir tout risque de népotisme.
La fonction publique de demain doit mieux refléter la composition de la population française. C'est pourquoi notre troisième priorité va à approfondir nos actions d'ouverture à la diversité sous toutes ses formes, et à améliorer l'égalité professionnelle.
C'est ainsi que nous poursuivrons l'effort engagé avec les classes préparatoires intégrées, qui marchent bien puisqu'un tiers des élèves ont intégré les IRA - le succès est moins probant à l'ENA, avec peut-être un reçu sur quinze, mais la gageure était plus grande encore.
La fonction publique se doit également d'être exemplaire en matière d'insertion professionnelle des travailleurs handicapés. Des actions ont déjà été engagées grâce au Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la Fonction publique, mais nous devons aller plus loin encore, en explorant deux pistes : lancer, par circulaire, une campagne de sensibilisation au handicap et mettre en place une journée du handicap dans la fonction publique, grand rendez-vous qui pourrait prendre place début 2011.
Nous entendons également avancer sur la place des femmes dans la fonction publique. Mme Françoise Guégot, qui s'est vu confier une mission, devra identifier les obstacles qui demeurent et ouvrir des voies pour y remédier.
D'autres pistes méritent également d'être explorées, pour améliorer la capacité des femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale, grâce, par exemple, au télétravail, ainsi que pour leur faciliter l'accès aux postes de responsabilité : 10 à 20 % des postes mis à désignation en conseil des ministres pourraient ainsi être ouverts aux femmes.
Quatrième priorité : mieux gérer. La politique de fusion des corps sera poursuivie. Nous engageons également une réflexion sur la mise en place de corps interministériels, notamment pour la filière administrative. Nous nous sommes fixé pour objectif de supprimer 150 corps supplémentaires sur cinq ans. Nous serons ainsi passés de 680 corps en 2005 à 230 en 2015, ce qui facilitera la mobilité, à laquelle je suis très attaché.
Le grand chantier des non-titulaires reste ouvert. Malgré seize plans de titularisation en cinquante ans, les trois fonctions publiques comptent toujours 850.000 agents. Parce qu'il est pour nous essentiel de combattre la précarité, nous entendons travailler à clarifier les cas de recours au contrat, en recherchant des règles incontournables. Il nous faut également offrir des possibilités de passage du CDD au CDI. Le fait est que la loi de 2005, qui interdit de renouveler un CDD plus de six ans, a pu être contournée, grâce à certaines astuces, comme celle qui consiste à interrompre un CDD quelques semaines avant l'échéance des six ans.
L'État aussi.
Nous entendons également offrir des possibilités de titularisation pour les contractuels en CDI, soit par des concours hautement professionnalisés, soit par une voie plus individuelle et plus novatrice dont nous aurons à débattre avec les organisations syndicales. Ce schéma fait déjà l'objet d'une concertation, qui porte également sur les fonctions publiques territoriale et hospitalière. L'objectif est de formaliser un document de négociation d'ici à la fin de l'année, pour déboucher sur un projet de loi au printemps 2011.
Dernière priorité, enfin, mieux rémunérer. Les accords de Bercy de 2008 ont prévu une négociation en deux temps, annuelle et triennale.
La prime de fonctions et de résultats sera étendue aux filières sociale et technique. Elle pourra être étendue aux agents de catégorie C de la filière administrative sur la base du volontariat. Depuis la loi de rénovation du dialogue social, elle peut être mise en place dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière. La mise en oeuvre de l'intéressement collectif, sujet du rapport Diefenbacher passera, pour la fonction publique de l'État, par un décret publié avant la fin 2010. Enfin, la création d'un troisième grade à accès fonctionnel (GRAF) permettra de récompenser une partie des agents ayant occupé des emplois à responsabilité au cours de leur carrière, en leur permettant de maintenir leur rémunération à hauteur de ce qu'ils percevaient dans ces emplois.
Vous voyez que la modernisation de la fonction publique se poursuit, et que l'action va bien au-delà des seuls crédits du programme budgétaire.
Comment concilier l'objectif, nécessaire, de réduction des effectifs et le maintien à même niveau, des services publics ? L'exercice ne trouve-t-il pas, dans certains domaines, ses limites ? Pouvez-vous nous donner quelques précisions sur l'effort d'accompagnement humain et de formation continue mis en oeuvre dans le cadre de la RGPP, dont on sait qu'elle doit conduire à la reconversion obligatoire de certains fonctionnaires ? Quid de l'aide ménagère à domicile, suspendue depuis 2009, et l'une des préoccupations constantes des représentants syndicaux, sachant qu'elle représente un geste social important pour les fonctionnaires à la retraite ? Avez-vous l'intention de poursuivre le prêt mobilité, de 2 000 euros par fonctionnaire, qui ne suscite, en revanche, guère d'enthousiasme - vos services indiquent qu'il a concerné 208 fonctionnaires en 2010 - ou avez-vous entrepris de rechercher une mesure sociale mieux adaptée à la demande des fonctionnaires ?
Le Président de la République a annoncé un texte sur les contractuels. Vous nous avez fourni quelques indications, mais au-delà du problème de la précarité, nous savons qu'ils sont parfois utiles pour répondre à des situations particulières, ceci pour autant que ne soit pas généralisé le principe de leur recrutement, ce qui serait contraire à l'esprit de la fonction publique.
Êtes-vous aujourd'hui en mesure de porter une appréciation sur les effets de la loi de 2009 relative à la mobilité ? L'État a été interpellé sur le respect de ses obligations, issues de la loi de 2005, en matière d'intégration du handicap : où en êtes-vous ?
Je vous remercie de la clarté de votre exposé. Je suis sensible, en particulier, à vos annonces en matière de recrutement et de formation, régis par des dispositifs anciens qui méritent d'être modernisés... Disposez-vous d'éléments chiffrés sur l'évolution de l'absentéisme ? Quelle a été celle des congés de longue durée et des congés de maladie ordinaires, et quel coût représentent-ils ?
Certains fonctionnaires de catégorie C - je pense en particulier à certains ouvriers de plus de quarante ans usés par leurs fonctions - devraient pouvoir changer de profession au sein de la fonction publique, ce qu'aucun dispositif ne permet à l'heure actuelle. Où en êtes-vous de ce grand chantier ?
La presse a parlé de 20 000 emplois fantômes à l'éducation nationale. Pouvez-vous nous donner des informations plus concrètes ?
Je suis en phase, madame Gourault, avec votre approche sur les effectifs. On ne saurait imposer aucune politique unilatérale. Il convient d'y mettre quelque subtilité... Sur la période longue, de 1983 à 2010, et alors que se sont succédé deux vagues de décentralisation, on constate une stabilisation des effectifs de l'État. Cette situation a même frappé quelques sénateurs éminents puisque votre ancien collègue Michel Charasse avait demandé, il y a deux ans, une note sur la question. De fait, si l'on y regarde de près, on constate que les effectifs des administrations centrales ont été un peu réduits, mais que ceux des opérateurs de l'Etat ont en revanche beaucoup cru. Le Parlement, auquel la loi de finances pour 2009 a permis d'exercer son contrôle sur l'ensemble des ETPT (équivalents temps pleins travaillés) de l'État et de ses opérateurs, a pu constater ce transfert. J'ai pu moi-même constater, du temps que je siégeais à l'Assemblée nationale, que le ministère de la culture, par exemple, ne signalait, au fil des ans, que la réduction des effectifs de son administration centrale, en se gardant bien de comptabiliser les effectifs de ses opérateurs.
Notre ambition est de réduire les effectifs de 200 000 emplois en deux fois trois ans. Nous nous sommes fixé cet objectif sur le fondement d'expertises concrètes - depuis les « stratégies nationale de réforme » de M. Woerth, en passant par les « audits » engagés à l'initiative de M. Copé jusqu'à la RGPP. Nous sommes en phase de réorganisation de l'administration déconcentrée de l'État, qui appelle une vigilance toute particulière, ainsi que l'ont souligné les préfets, quant à l'équilibre des administrations de proximité : l'échelon régional ne doit pas étrangler l'échelon départemental...
Le cas de la fonction publique hospitalière est différent, puisque la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ne s'y applique pas. Cela étant, les situations y sont contrastées, selon la qualité de gestion des établissements - nous avons ainsi pu constater que certains hôpitaux posent problème en raison de dysfonctionnements dans la gestion des ressources humaines.
La fonction publique territoriale, quant à elle, a connu d'importants recrutements, hors transferts de compétences : sur les 450 000 embauches réalisées entre 1998 et 2008, seules 120 000 sont imputables à ces transferts. J'ajoute que les recrutements nouveaux sont en grande partie imputables aux communes, alors que les transferts de compétences ont touché les départements et les régions.
C'est donc bien dans ce cadre général que la question des effectifs trouve tout son sens...
Pour tempérer votre propos, permettez-moi de signaler qu'au-delà des transferts dûment identifiés, il en est d'autres, plus souterrains. Les mairies n'ont-elles pas désormais la charge d'établir les passeports ? N'ont-elles pas été conduites, alors que stagnent les effectifs de la police nationale, à embaucher de plus en plus de policiers municipaux, pour répondre aux difficultés locales ? Cela n'explique sans doute pas tout, mais...
Il est vrai que leur développement n'a pas donné lieu à toute la mutualisation qui aurait été souhaitable. Non, je pense surtout au développement des services - crèches, garderies, cantines scolaires (Mme Gourault le confirme), qui répond à une demande forte des habitants.
A noter, j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, que le recrutement des personnels de catégorie C se fait souvent, dans les communes, dans des conditions invraisemblables...
On a supprimé le concours pour simplifier... Mais la catégorie C n'est pas seule touchée... On voit aussi enfler, monsieur le ministre, les membres des cabinets...
De nombreuses communes rurales se heurtent à un problème concret, auquel il faut trouver une solution. Elles sont conduites à fermer les classes maternelles des plus petites écoles, et se retrouvent avec les Atsem (agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles) sur les bras... Cette situation ne fait qu'aggraver le problème des fermetures de classes.
Je suis président d'une communauté d'agglomération qui, avec trois communes de banlieue parisienne, compte 80 000 habitants. Les compétences qu'elle s'est vu transférer concernent 200 agents, or, elle en compte 250. On ne peut l'attribuer à une mauvaise gestion, puisque son ratio entre charges de personnel et charges de fonctionnement est inférieur aux 45 % recommandés. Mais elle verse sur la pente naturelle des administrations, qui les porte à générer toujours des dépenses complémentaires... Je ne nie pas pour autant les charges qui se trouvent de fait transférées aux communes, mais je rappelle simplement ce que je considère comme une propension générale des administrations.
Je me suis entretenu, sur la question des Atsem, avec le centre de gestion de la grande couronne, en particulier avec son président. On crée certes un déremboursement, mais quelle autre solution pour parvenir au reclassement des agents ? L'administration gère elle aussi des ressources humaines : elle doit gérer les charges attachées à cette gestion.
Vous m'avez interrogé sur le recrutement. Il faut pouvoir donner aux agents qui n'ont plus la capacité ou le courage de développer leur carrière via les concours la chance de pouvoir le faire sur le fondement de critères d'évaluation individuels. D'où la validation des acquis de l'expérience. Et la généralisation de l'entretien d'évaluation, qui permet à l'agent de définir ses objectifs et d'aborder la question du déroulement de sa carrière, ce qui doit aider à dégager des pistes de formation.
Nous avons également mis en place, depuis 2007, d'autres outils en faveur de la formation, parmi lesquels le DIF, le droit individuel à formation, dont j'attends, début 2011, un bilan, qui nous aidera à parfaire le dispositif.
L'aide ménagère à domicile, prestation facultative, a été suspendue parce que, servie selon les mêmes modalités qu'aux retraités du privé, elle bénéficiait, dans la fonction publique, à des retraités dont les ressources n'étaient pas faibles ou qui n'étaient pas réellement dépendants. Nous avons donc décidé de demander au comité interministériel à l'action sociale, qui compte des représentants des organisations syndicales, de proposer des modalités alternatives ou un recentrage et de fixer des priorités pour en assurer le financement. Notre objectif est de demander aux partenaires sociaux, sur le fondement d'un diagnostic partagé, de proposer des pistes.
J'en viens à la question des contractuels dont le Président de la République a, dans son discours du 25 janvier dernier, évoqué la situation. L'idée n'est pas d'engager un dix-septième plan de titularisation : on sait qu'une telle démarche n'empêche en rien la reconstitution de poches d'emplois précaires. Nous nous sommes au contraire employés à cerner un vrai problème. Nombreux sont les agents contractuels des collectivités qui aspirent, plus qu'à une titularisation, à un CDI. Ne soyons pas plus royalistes que le roi. Travaillons plutôt à identifier les abus et les détournements, afin de les prévenir. Notre objectif est, de permettre aux agents contractuels en CDD d'accéder à un CDI, en évitant les détournements de la loi dont je rappelle qu'elle transpose une directive européenne. Il ne s'agit nullement de procéder à des titularisations massives : on ne peut pas mettre tout le monde à la même enseigne.
Parmi les outils mis en place par la loi de 2009, l'aide au conjoint, qui permet au couple de déménager ensemble, se révèle le meilleur. Le prêt mobilité, en revanche, Mme Gourault a raison de le souligner, fonctionne mal. Une étude est en cours pour le corriger.
Un des aspects fondamentaux de la réforme de la fonction publique, monsieur Vial, réside bien dans la mobilité. Tout ce qui est incompatible avec sa stimulation mérite d'être écarté. Un exemple. Le point d'indice unique dans la fonction publique nous prive, en période de vaches maigres, de marges de manoeuvre. C'est ainsi que nous n'avons pu porter l'effort particulier que nous aurions souhaité sur la fonction publique hospitalière. Lorsque j'ai émis l'idée de nous affranchir, en sa faveur, du point unique, les organisations syndicales m'ont fait observer que cela nuirait à la mobilité tant souhaitée.
Les outils mis en place en 2009 sont en voie d'évaluation, même si nous avons déjà un aperçu de ce qui marche ou pas. Je souhaite qu'à la mi-2011, le diagnostic soit porté pour préciser les outils complémentaires à mettre en place. Pour l'heure, je ne puis m'avancer davantage.
Le bilan d'application de la loi handicap de 2005 est positif. Elle a permis la mise en place d'un fonds dont les aides se sont, depuis 2006, développées : le nombre de conventions avec un employeur public a ainsi été multiplié par trois, passant de cinquante à cent cinquante. Une circulaire à venir du Premier ministre doit mettre l'accent sur la situation difficile du handicap dans la fonction publique. Nous songeons à instituer une journée d'action spécifique. Certes, les chiffres témoignent d'une diminution du taux d'emploi de personnes handicapées dans la fonction publique, mais nous savons qu'il a fallu corriger ce que j'appellerai un dysfonctionnement dans la solidarité gouvernementale : la situation de l'Education nationale est désormais transparente.
L'absentéisme, dont les chiffres, Monsieur Béteille, figurent au rapport annuel, donne lieu à une expérimentation dans six départements, où le contrôle, dont les modalités, qui conduisaient les médecins à se contrôler les uns les autres, se sont révélées, au vu de leurs réticences, mal opérantes, est confié aux caisses locales d'assurance maladie.
Nous poursuivons deux objectifs. Eviter les abus, tout d'abord. Je suis, comme vous tous, gestionnaire public, et considère qu'il n'est pas juste de laisser se reporter la charge de travail sur les agents les plus consciencieux. Mieux identifier les causes réelles des arrêts, ensuite, exigence sur laquelle la Cour des comptes a attiré l'attention. Pour nous permettre d'être plus efficaces, nous avons besoin d'un recensement précis.
Vous avez évoqué, monsieur le doyen Gélard, la situation des agents de catégorie C. A la suite de l'accord santé-sécurité de novembre 2009, signé par sept organisations syndicales sur neuf, nous avons mis en place une démarche de prévention, incluse dans le cadre des accords. Les agents publics qui souffrent de problèmes liés aux conditions physiques de leur emploi doivent être reclassés dans les conditions les plus opérationnelles. Par où l'on rejoint les problématiques liées à la mobilité.
La mobilité est un des éléments de réponse à ce problème que les syndicats et nous avons bien identifié.
Enfin, il y a eu une rectification concernant 20 300 emplois supplémentaires à l'Education nationale. Il faudrait plutôt dire qu'ils ont réapparu car, je le précise, ces agents ont été rémunérés. Ceux qui dénonçaient une baisse brutale de 16 000 postes ne le crient pas sur les toits. Il faudra un jour que l'on m'explique la répartition des emplois de l'Education nationale, sur laquelle d'éminents sénateurs, dont M. Gouteyron, ont établi un rapport. Il conviendrait de distinguer les emplois d'enseignement et les autres ainsi que les emplois aidés. Parmi les 20 000 emplois en cause, 5 833 correspondent à des stages en responsabilité d'étudiants se destinant à l'enseignement ; 2 900 sont des enseignants vacataires recrutés pour assurer des remplacements ; la mise en place de Chorus a modifié le décompte des emplois (1 300 postes). Nous souhaitons, dans un souci de transparence, parvenir à décompter la totalité des emplois d'un ministère.
Puis la commission entend Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, sur le projet de loi de finances pour 2011 (mission « outre-mer »).
Merci, madame, de venir nous présenter la mission « outre-mer ». Je vous félicite de votre présence active au Gouvernement, et dans la même fonction. L'outre-mer a besoin de continuité.
Je suis très heureuse d'être là ce soir pour échanger avec vous à l'occasion de cette présentation des crédits, même si mes entretiens avec M. Hyest, votre président, et M. Cointat, votre rapporteur, sont fréquents.
Où en sommes-nous par rapport à la loi pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) et le Conseil interministériel de l'outre-mer (CIOM) du 6 novembre 2009 ? Je me rendrai bientôt dans plusieurs départements d'outre-mer pour m'assurer que tout se met bien en place et que nous avons trouvé un rythme de croisière.
La mission que je vous présente s'inscrit dans l'effort national de maîtrise de la dépense publique. Cet effort, juste et proportionné, nous laisse des marges de manoeuvre : les autorisations d'engagement (2 156 millions) diminuent de 0,55%, et les crédits de paiement (1 977 millions) de 2,3%. Certains parlementaires ayant exprimé des craintes, je précise que les engagements pris seront tenus. Cette baisse n'est d'ailleurs que provisoire, puisque le triennal prévoit une augmentation de 2% des autorisations d'engagement et de 6,7% pour les crédits de paiement, qui s'établiront dès 2012 à un niveau supérieur aux montants retenus dans la loi de finances initiale pour 2010.
Certains ont formulé des critiques ou des réserves sur la mise en application des mesures du CIOM et de la LODEOM. Je rappelle que vingt-quatre décrets d'application de celle-ci ont été pris dans l'année de son adoption, ce qui est tout à fait conforme aux délais habituels. La prime « bagasse » augmente de 17% le revenu des planteurs de la Réunion ; les zones franches globales d'activité permettent un abattement de 80% de l'impôt sur les sociétés et de la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties, et de 100% sur la contribution économique territoriale.
Les corrections apportées par la LODEOM donnent lieu à des chiffrages aléatoires, alors qu'il s'agissait de corriger les effets d'aubaine des anciennes lois de défiscalisation. Parlons plutôt du fonds exceptionnel d'investissement, du fonds de garantie en faveur de l'agriculture et de la pêche, de la bonification des prêts aux PME ou encore de la dotation exceptionnelle pour l'équipement de Mayotte et des 10 millions pour la Guyane, et cela dans un contexte particulièrement difficile.
Je veux vous rassurer, les décrets sur la continuité territoriale sont prêts. Nous attendions le feu vert de Bruxelles ; il faudra peut-être refaire le contreseing du fait du changement de Gouvernement, mais cela ne représente que dix jours de plus. J'ai également signé le décret sur l'aide au fret, qu'attendent les opérateurs économiques.
Les trois quarts des 137 mesures prévues par le CIOM sont réalisées ou très avancées. Le 3 novembre, l'Assemblée nationale a adopté un amendement permettant à l'Etat de céder gratuitement ses terrains non bâtis afin de construire des logements sociaux.
Le budget conserve ses capacités d'intervention pour le logement et pour l'emploi. La ligne budgétaire unique (LBU) a été sanctuarisée et, avec les 80 millions du plan de relance, elle représente 274,5 millions. La défiscalisation du logement social constitue un dispositif récent, en modifier les conditions serait délicat ; aussi le Premier ministre a-t-il arbitré contre le rabot de 10%. J'ai rencontré la semaine dernière l'ensemble des bailleurs sociaux au sujet des dossiers en attente, afin d'accélérer leur instruction.
S'agissant de l'emploi et de la formation, le doublement à terme du nombre de stagiaires du service militaire adapté (SMA) permettra d'accueillir 1 000 volontaires de plus dès 2011, conformément aux engagements du Président de la République. N'oublions pas le passeport mobilité qui a permis la prise en charge de 7 000 jeunes avec des résultats plutôt satisfaisants (7 sur 10 obtiennent un diplôme en fin de parcours). L'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) mobilisera toutes ses marges de manoeuvre en 2011. Enfin, le RSA jeunes, que nous n'avions pas pu appliquer immédiatement, sera mis en place l'an prochain.
La continuité territoriale mobilise 45 millions pendant trois ans. Ses critères ont été modifiés ; le décret a été publié. Il s'agit d'attribuer les aides plus équitablement et de manière plus lisible. Nous opèrerons dès l'été 2011 une évaluation pour les territoires très éloignés afin d'envisager les corrections qui seraient nécessaires.
Destinée à favoriser l'emploi durable et à réduire le travail dissimulé, la réduction du coût du travail outre-mer s'inscrit dans une politique de compensation des handicaps naturels. Les besoins estimés par les organismes de sécurité sociale seront couverts sans nouveaux impayés.
L'Etat apporte son soutien aux collectivités locales à travers une politique contractuelle à hauteur de 180 millions en autorisations d'engagement (+ 15 millions) et de 133 millions en crédits de paiement. Un effort particulier est consenti pour Saint-Martin et pour Wallis-et-Futuna.
Mayotte devient un département : la procédure est en bonne voie et l'Assemblée nationale examinera le 23 novembre les projets de loi que vous avez adoptés le 22 octobre. Le calendrier du transfert des compétences à la Nouvelle-Calédonie est respecté et le transfert des compétences en matière d'état civil, de droit civil et commercial et de sécurité civile interviendra dans les délais annoncés. Grâce au Président de la République et au Premier ministre, le processus de réflexion sur l'après 2014 est lancé ; un comité de réflexion a été mis en place.
La Martinique et la Guyane ont fait le choix d'une évolution institutionnelle : après avoir rejeté le passage à l'article 74 de la Constitution, elles ont voté pour le principe d'une collectivité unique dans le cadre de l'article 73. J'ai conduit une phase de consultation et les élus ont pu s'exprimer le 8 novembre devant le chef de l'Etat. Il y avait des divergences sur certaines dispositions mais le Président de la République, qui a rendu les premiers arbitrages sur la gouvernance et le régime électoral, les rendra publics d'ici une dizaine de jours. J'espère que le projet sera présenté au conseil des ministres d'ici la fin de l'année ou au début de l'année prochaine puis soumis au Parlement en 2011.
La Polynésie traverse une période difficile. Elle connaît une instabilité chronique depuis six ans. Une réforme du mode de scrutin assurerait des majorités stables. J'ai présenté les grandes lignes du projet sur place. Nous avons en outre la volonté de réformer la dotation globale de développement économique afin de pérenniser l'appui financier de l'Etat et d'en accroître l'effet de levier tout en renforçant les moyens d'intervention des communes. Nous concilierons la transparence et l'autonomie des collectivités.
Les crédits de la mission ne représentent que 15% de l'effort de l'Etat (12,7 milliards). Ce sont 89 programmes et 27 missions qui apportent la différence. Cela ne me gêne nullement, car nous n'avons pas vocation à devenir l'unique gestionnaire des crédits à l'outre-mer. Je me demande en effet comment les questions ultramarines se règleraient toutes seules, sans ce ministère. Ce serait contradictoire avec notre choix de promouvoir les outre-mer : un ministère transversal est utile.
Permettez-moi de vous livrer enfin cette réflexion : la baisse des crédits ne remet pas en cause les orientations politiques du Gouvernement. Il n'y a pas de raison objective de tenir des discours anxiogènes, ils ont des effets contre-productifs, la sérénité étant indispensable à la reprise économique.
Le périmètre de la mission pour 2011 inclut les contrats de projets Etat-régions, qui ne sont pas des outils de politique contractuelle spécifiques à l'outre-mer, mais non les crédits affectés aux commissaires au développement endogène, propres à la mission - dont je déplore aussi le caractère trop faiblement interministériel. La seule manière de garantir une autorité suffisante vis-à-vis des autres ministres serait de transformer la délégation générale à l'outre-mer en un secrétariat général rattaché directement au Premier ministre et doté des moyens suffisants.
N'est-il pas indispensable d'accroître les capacités d'évaluation, afin de mieux connaître et surtout comparer les effets des divers dispositifs ? Entre la défiscalisation et l'allègement de charges, quel est le plus performant ? Le document transversal n'apporte pas de réponse.
Le conseil interministériel a prévu des adaptations réglementaires afin de promouvoir les cadres ultramarins dans les administrations : où en est-on ? Et qu'en est-il de la coopération entre les départements d'outre-mer et leur environnement régional ? Qu'envisagez-vous pour que la base de Kourou en Guyane produise plus de retombées économiques et financières qu'aujourd'hui ?
La collectivité de Mayotte va devenir un département. Comment accompagner cette évolution ? Je songe en particulier à l'aide sociale à l'enfance, car nombre d'enfants sont abandonnés sur place par les familles reconduites à la frontière. En Nouvelle-Calédonie, M. Frimat et moi-même avons constaté avec satisfaction la progression des transferts, mais sur place, l'inquiétude est grande : l'Etat respectera-t-il ses engagements ? Un exemple : les autorisations d'engagement pour la rénovation du lycée Escoffier ont été votées, les travaux entrepris, mais point de crédits de paiement ! Une solution a été trouvée, mais le délai prévu a été largement dépassé... La mésaventure pourrait se reproduire, au lycée de Pouembout ou à celui de Mont-Dore, il faut une garantie du Gouvernement ! Pareillement, à Mayotte, il ne faudrait pas qu'à l'occasion du transfert, le ministère de l'éducation nationale botte en touche.
La province nord de la Nouvelle-Calédonie est en plein développement, les besoins y sont importants. Or en fin de contrat de développement 2006-2010, la répartition des crédits pose des difficultés, car les dépenses se concentrent en fin de contrat. Il manque 10 millions d'euros, figureront-ils dans le collectif budgétaire de fin d'année ?
Nous connaissons la difficile situation interne de Wallis-et-Futuna, mais le statut juridique n'est plus conforme à la Constitution française ! Tôt ou tard il faudra résoudre ce problème : comment comptez-vous faire ?
Madame la ministre, vous évoquez l'instabilité chronique de la Polynésie. M. Estrosi avait pourtant vanté les vertus attendues de sa « loi de renforcement de la stabilité des institutions ». Nous émettions quelques doutes. Nous ne nous réjouissons pas, cependant, d'avoir eu raison... Quelle est la réaction des intéressés à votre proposition de réforme du mode de scrutin ? Quel calendrier envisagez-vous ?
Le rapport de nos collègues Doligé et Massion, à propos de l'article 77 du projet de loi de finances rattaché à la mission « outre-mer », mentionne le versement au fonds intercommunal de péréquation (FIP) des dotations qui auparavant allaient directement aux communes, à charge pour le fonds de répartir les sommes. Nos collègues rapporteurs spéciaux présenteront un amendement tendant à garantir une stabilité de la dotation territoriale des communes, car celles-ci n'ont déjà pas les moyens de faire face aux investissements nécessaires. Quel écho, sur place, avez-vous reçu à propos de ce nouveau circuit ?
Tous, sans considérations partisanes, nous nous interrogeons sur l'intention du ministère de l'éducation nationale : entend-il faire face à ses obligations ? On commence à entendre que le projet concernant le lycée de Pouembout ne serait pas bien raisonnable, que les besoins ne sont pas manifestes, qu'il ne serait pas simple de faire venir les élèves... Bref, la chanson que l'on entonne quand on veut miner un projet. Mais un lycée dans la province nord, c'est important ! Or nous savons bien comment, lors de la décentralisation, en métropole, le ministère se défaussait en expliquant avec désespoir qu'il n'y avait plus de ligne budgétaire. Il faut que la ligne soit maintenue ainsi que les services logistiques pour le montage du projet et la définition du cahier des charges...
Je me suis rendu avec M. Bel en Guadeloupe et en Martinique. Nous avons rencontré les socio-professionnels - de tous bords - et nous avons compris qu'ils ne partagent pas votre optimisme sur la défiscalisation, en particulier sur sa traduction en logements sociaux...
Les décrets de la LODEOM ont bien tardé, ils apparaissent enfin, je songe au décret sur le fret. Sur le statut de la Martinique et de la Guyane, vous avez évoqué les arbitrages du Président de la République. Les élections devraient se dérouler entre 2012 et 2014 : pouvez-vous nous en dire plus ?
Que va devenir le régime de l'octroi de mer ? Je sais que vous menez des démarches auprès de Bruxelles et que vous attendez une réponse prochaine : avez-vous à ce jour des précisions à nous fournir ? Je crois que ces questions ont été abordées également lors d'une réunion aux Canaries. Les discussions budgétaires européennes ont lieu maintenant, pour la période 2014-2020. Le principe de crédits pour le développement outre-mer est préservé, certes - ce n'est pas le cas pour la métropole - mais quel sera leur volume ? La stratégie de Lisbonne exige aussi des financements, qu'il faudra prendre sur d'autres postes.
La Réunion a été frappée par la crise économique, comme toutes les autres régions ; mais elle est entourée par l'océan Indien et non par d'autres territoires, dont certains auraient mieux résisté ! Je salue votre pugnacité, Madame le ministre, mais je dois vous dire ce qui va mal comme ce qui va bien. Or, en matière de logement, si l'accroissement des autorisations d'engagement, à 274 millions d'euros, est un bon signal, la diminution de 216 à 195 millions des crédits de paiement en est un très mauvais. Utilisons la loi de finances rectificative pour réparer cette erreur, car 5.000 logements sociaux attendent l'agrément pour sortir de terre ! Il faut prévoir un montant de crédits au moins égal à celui de 2010. Le secteur du bâtiment, sur notre île où le tourisme est encore balbutiant, constitue le coeur du réacteur !
Les textes d'application de la LODEOM réduisent considérablement la portée de nos votes, presque au point de les dénaturer. Je songe à la limitation à 50% des aides au logement social, alors que, renseignements pris, Bruxelles n'impose pas de plafonnement s'agissant du logement. Financer les logements sociaux dans le cadre d'une LBU de plus en plus réduite ou sans plus de LBU du tout, c'est une vue de l'esprit. Et que dire de la partie de ping-pong entre les services d'agrément, les constructeurs et la DDE ?
C'est bien là le but ! Bercy demande une preuve que l'arrêté LBU a bien été pris, les services qui signent cet arrêté exigent d'abord une attestation prouvant que l'opération est admise à la défiscalisation. Et quand tout est bloqué, on déplore une sous-consommation des crédits. Pendant ce temps, les gens touchent le RMI, bientôt le RSA, alors qu'ils ne demandent qu'à travailler.
Sur le photovoltaïque, vous avez confondu rabot et guillotine ! Je vous proposerai des amendements pour corriger cela. Certes, il y a eu des escrocs : que l'inspection des finances fasse son travail. Rien de très secret, du reste, et nous n'aurons aucune difficulté à orienter ses recherches. Mais pourquoi ce revirement, qui favorisera l'énergie sale, fuel ou charbon ? Suspendez la défiscalisation sur les grandes installations de plus de 100 kVA, mais ne la supprimez pas ! La commission à laquelle vous demandez des préconisations peut vous remettre son rapport au 31 mars prochain, pourquoi perdre un an, jusqu'à la prochaine loi de finances ? Je préconise quant à moi des mesures de stockage et de régulation pour les grandes installations, mais un agrément au premier euro sur les petites. L'Etat, dans cette affaire, n'a pas fait son travail : c'est dans l'arrêté qui plafonnait le watt-crête que tout s'est joué. Les vautours se sont jetés sur la proie. A l'Etat maintenant de faire le ménage.
Sur le SMA, je n'aurai que des éloges à formuler, car je l'ai utilisé et j'ai constaté que 80% des jeunes trouvent un emploi à la sortie.
Que pensez-vous de la dotation globale de développement économique (DGDE) ? Quel sera son avenir ? En 1996, le Président de la République, ayant décidé un arrêt brutal des expérimentations nucléaires en Polynésie française, a créé un fonds de reconversion. Un premier protocole a été signé par le Premier ministre de l'époque, M. Juppé ; un second, pérennisant cette participation, en 2002. C'était une récompense pour l'effort consenti par notre territoire au nom de la défense de la nation. Le fonds de reconversion économique a été transformé en DGDE puis à présent en dotation globale de l'autonomie. Et demain ?
La situation des communes est catastrophique. Or ce sont des collectivités de l'Etat, sous sa tutelle. Mais le projet de loi de finances pour 2011 ne contient rien en leur faveur, alors que les besoins sont considérables, surtout depuis la loi de 2004 qui leur a confié non plus la distribution d'eau mais la distribution d'eau « potable », non plus la collecte des déchets mais la collecte « et le traitement ». Le budget de la Polynésie participe pour 50% à ces dépenses, le fonds intercommunal de péréquation pour 25%, mais les communes ne parviennent pas à payer le solde : elles ont donc accumulé un milliard de francs Pacifique d'arriérés de paiement... L'Etat va-t-il intervenir en faveur des communes ?
Quant à la défiscalisation, chez nous il n'y à rien à raboter, rien à guillotiner. A La Réunion, où l'on a tant profité du système, guillotinez donc, je n'en serai pas ému. Mais de grâce, Madame la ministre, laissez-nous un peu de temps, cinq ans par exemple, car les premiers dossiers sont à peine bouclés !
Nous avons voulu que les crédits des contrats de projets soit gérés au sein du ministère : la mise en oeuvre est progressive, les crédits concernant les départements et régions d'outre-mer ne sont pas encore tous transférés - 18 millions d'euros en crédits de paiement, en 2011. Les salaires des commissaires ne s'imputent pas sur la mission outre-mer, mais les études qu'ils réalisent, si ! Cela représente 2 millions d'euros.
La commission d'évaluation des politiques publiques outre-mer, créée par la LODEOM, est en cours d'installation, le décret est publié et j'ai demandé aux deux présidents des assemblées d'organiser la désignation des parlementaires qui y siègeront. L'évaluation comparée des subventions et de la défiscalisation est déjà engagée, c'est pourquoi j'ai écarté un amendement inutile en ce sens à l'Assemblée nationale. La promotion des cadres ultramarins à des postes de responsabilité correspond à une volonté du Président de la République, à l'issue de la crise de 2009 : une circulaire de juillet 2010 adressée à tous les ministères leur demande de privilégier, à compétence équivalente, les ultramarins. Une évaluation aura lieu après un an.
Le développement endogène ne peut reposer uniquement sur les échanges avec la métropole. Pour renforcer la coopération régionale, nous proposerons, dans les textes relatifs à l'évolution institutionnelle de la Martinique et de la Guyane, de donner compétence aux présidents de région pour représenter la France dans les instances régionales.
Les retombées économiques de Kourou représentent 26 millions d'euros. C'est un sujet sensible, la compétition en matière spatiale est vive, chinoise en particulier, et il faut préserver ce fleuron européen. Nous travaillons à une répartition plus équitable sur l'ensemble de la Guyane, mais vous avez raison, on peut aller plus loin encore.
L'aide sociale à Mayotte est indispensable, la collectivité ne peut assumer seule cette compétence. Déjà, nous soutenons, par exemple, l'association Tama qui intervient auprès des mineurs isolés. J'envisage de créer un observatoire pour suivre le phénomène.
Lors du dernier comité des signataires de l'accord de Nouméa, deux types de conventions ont été mises en place pour accompagner le transfert de compétences à la collectivité de Nouvelle-Calédonie et leur mise en oeuvre. Sur la question sensible des deux lycées que vous avez cités, le Premier ministre a pris un engagement ; des financements ont été voulus par les parlementaires, le Gouvernement n'en était pas partisan. Mais les crédits ont été débloqués pour les études, 1,5 million d'euros, sur le budget de M. Chatel. Dès 2011, des autorisations de programme sont inscrites, pour 10 millions d'euros ; je ne m'interdis pas de revoir le montant de l'enveloppe en cours d'année, puisque nous en sommes déjà à 50 millions d'investissement.
Dans l'exécution des contrats de développement local, la Nouvelle-Calédonie est le bon élève, avec un taux de consommation des crédits de 85%. Nous avons prévu avec le haut-commissaire que les dépenses intervenant à la fin de l'année puissent entrer dans le nouveau contrat. Le Premier ministre a arbitré : les crédits pour la Nouvelle-Calédonie seront à volume constant, 370 millions d'euros.
Quant à Wallis-et-Futuna, je souhaiterais moi aussi que l'on progresse sur la question du statut, mais aucune proposition n'a de sens sans un consensus de la population, or aujourd'hui les conditions ne sont pas réunies. L'Etat ne peut imposer une évolution, il y a déjà le poids de la coutume, n'ajoutons pas un élément qui risquerait de déstabiliser le territoire.
S'agissant de la Polynésie, j'ai effectivement parlé d'instabilité. Et nous devons contribuer autant que possible à faire émerger la stabilité, mais aucun texte n'y parviendra seul. Nous réformons, mais la stabilité n'est pas garantie ! La population unanime considère que la gestion ne correspond plus aux réalités territoriales. Il faut diminuer le nombre des élus. Nous proposerons un projet comportant un nouveau mode de scrutin, à la proportionnelle avec une dose de majoritaire, et un meilleur encadrement des motions de défiance. Ces deux améliorations sont souhaitées sur place. Mais toucher au nombre d'élus des archipels, c'est prendre le risque de rendre ceux-ci moins soucieux de l'unité de la Polynésie. Voilà le point le plus délicat de la réforme. Néanmoins les élus savent qu'il faut agir et tenter une dernière réforme électorale. La stabilité est un préalable aux décisions courageuses qui s'imposent et que la population attend, sur les déchets, le logement, les équipements...
Quant aux observations de MM. Doligé et Massion, je vous rappelle que la convention signée en 2002 ne garantit pas à la Polynésie les moyens dont elle a besoin. L'enveloppe est renégociable chaque année en loi de finances. Remplacer la convention par trois dotations obligatoires est plus intéressant, ne serait-ce que pour comparer les versements à la collectivité d'outre-mer et la dotation globale de fonctionnement de métropole !
Les dépenses d'investissement n'ont pas à passer par le FIP. Les sommes seront à disposition du haut-commissaire, cela se passera entre l'Etat et les communes. Celles-ci recevront donc une dotation contractualisée, ainsi qu'un soutien du FIP, modulable selon les recettes locales, et 40% des crédits du contrat de projet. La loi organique transfère les compétences au pays, qui les transfère à son tour aux communes afin d'assurer l'autonomie de gestion et les financements nécessaires. La DGDE confortée comme dotation, fixée dans la loi et assortie de clauses de révision, vaut bien mieux qu'une convention qui reste vide de sens si les crédits ne sont pas inscrits en loi de finances. Notre réforme maintient le niveau de la dotation.
Sur la défiscalisation en Polynésie, je ne partage pas votre analyse : oubliez-vous ce dont les structures hôtelières ont bénéficié ? Nous reparlerons de tout cela lors de la réforme fiscale mais nous entendons bien sûr éviter les effets d'aubaine.
Il n'est pas de jour où je ne me penche sur le dossier du logement, central, essentiel pour éviter les tensions sociales. Nous ne voulons pas revivre la crise de février 2009. C'est pourquoi les crédits de la LBU sont sanctuarisés. Cependant, un budget n'obéit pas seulement à des choix politiques, il est établi sous contrainte conjoncturelle ! Le montant des crédits de paiement découle de la politique menée deux voire trois ans auparavant. Je ne m'interdis pas, en cours d'année, d'abonder les lignes. J'ai annoncé 4 millions d'euros d'autorisations d'engagement pour La Réunion et la Guadeloupe et les crédits de paiement du programme 123 recevront 13 millions supplémentaires avant la fin de l'année.
Je veux lever un malentendu. M. Virapoullé parle de textes d'application réduisant la portée du vote politique. J'ai demandé que la circulaire soit réécrite et complétée, en constatant qu'elle était mal comprise par de nombreux parlementaires, donc mal rédigée. Je précise ici que le logement social est financé outre-mer par la LBU, la défiscalisation étant un outil complémentaire ; des opérations peuvent combiner les deux systèmes, mais elles doivent demeurer des exceptions. Le ministre du budget et moi-même travaillons à une nouvelle circulaire, pour mettre un terme aux crispations. En février 2009, au moment de la crise, le logement social était financé uniquement par le biais d'opérations en ventes en l'état futur d'achèvement (VEFA). La défiscalisation n'avait plus d'effet démultiplicateur. Je veux donc rester très vigilante sur ce point. L'agrément avant LBU n'a pas de raison d'être, nous avons donné des instructions afin que les incidents que vous évoquez ne se reproduisent pas.
J'en viens au photovoltaïque. Oui, nous devons faire le ménage. Cette question relève aussi du ministère du budget et de celui de l'écologie. Je conviens que l'effet d'aubaine a nui...
Sutour a parlé des socio-professionnels. Je les rencontrerai à la fin du mois pour clarifier les choses et parler, notamment, du financement des très petites entreprises. Certains dispositifs ne fonctionnent pas, le rôle des banques et d'Oseo ne correspond pas aux espoirs mis en eux.
Le Président de la République s'est exprimé en janvier 2010 sur le statut de la Martinique et de la Guyane. Il souhaite que la collectivité nouvelle se mette en place le plus tôt possible, 2014 semble très éloigné. Nous devons savoir dans quelles conditions on peut accélérer le calendrier. Nous étudions les impossibilités juridiques relatives aux durées des mandats.
Sur l'octroi de mer, nous avons bien avancé. Le rôle de l'Europe est très important pour nos territoires. Les fonds européens sont sollicités pour certaines opérations. Dans le rapport qu'elle publiera le 10 décembre, la Commission formulera ses observations et nous disposerons de la liste des produits supplémentaires, comme la Guyane le souhaite. Notre inquiétude est celle-ci : la Commission acceptera-t-elle la dérogation de l'octroi de mer additionnel ? Nous allons réfléchir à la meilleure manière de défendre ce système. J'ai demandé aux présidents de collectivités de participer à l'élaboration du cahier des charges. Vous évoquez la fraction - 27 millions d'euros - d'octroi de mer attribuée aux communes. Le Président de la République a demandé à M. Hortefeux et à moi-même d'examiner les dotations afin de prendre des décisions en 2011. Notre crainte est que la Commission retire son soutien aux régions ultrapériphériques. Nous espérons de la souplesse par rapport à la stratégie de Lisbonne, sur la nature des opérations à retenir - je songe aux infrastructures. Après la bataille sur l'enveloppe accordée par l'Europe, nous aurons un débat franco-français sur la répartition entre nos différents territoires.
Nous souhaitons que les sommes soient globalisées - je m'en suis ouverte au commissaire européen M. Johannes Hahn. Nous craignons qu'à la faveur du renforcement des pouvoirs du Parlement européen, cette question entre dans ses compétences. Nous ne voudrions pas que les crédits en matière agricole spécifiques à l'outre-mer soient inclus - et dilués - dans ceux de la politique agricole commune. Je serai très vigilante !