Séance en hémicycle du 4 février 2014 à 9h30

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre, en application de l’article 8 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010, la convention entre l’État et le Centre national d’études spatiales relative au programme d’investissements d’avenir, action « Maîtrise des technologies spatiales ».

Ce document a été transmis à la commission des finances, ainsi qu’à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Acte est donné du dépôt de ce document.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Par lettre en date du 30 janvier, M. François Zocchetto, président du groupe UDI-UC, a demandé le retrait de l’ordre du jour de l’espace réservé à son groupe du mercredi 12 février de la proposition de loi visant à modifier l’affectation de la taxe additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base, dite d’accompagnement.

Acte est donné de cette demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 503, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Monsieur le ministre, ma question porte sur le contrôle et l’évaluation de la maintenance aérienne.

La qualité de la maintenance aérienne, avec des contrôles constants et des contraintes réglementaires très strictes, fait de l’avion l’un des modes de transport les plus sûrs du monde.

La complexité croissante des systèmes embarqués des avions requiert des connaissances multidisciplinaires de plus en plus pointues pour réaliser l’entretien de l’appareil, notamment en électronique puisque les appareils de bord sont automatisés pour de multiples tâches, dont les plus importantes sont le pilotage automatique et le calcul de la trajectoire.

Alors que l’externalisation de l’entretien de la maintenance est prévue pour plusieurs types d’appareils, dont les gros porteurs, il semblerait que, depuis quatre ans, une vingtaine de sociétés étrangères responsables de la maintenance d’entretien aient perdu cet agrément.

Un syndicat minoritaire des pilotes de ligne a signalé plusieurs incidents graves sur des avions dont les gros travaux de maintenance ont été réalisés à l’étranger. Ainsi, en 2012, un avion d’Air France a dû interrompre son vol après des pannes de la radio haute fréquence alors qu’il venait de faire l’objet d’une révision technique approfondie en Chine.

Il semblerait que ce genre d’incident, heureusement sans conséquence pour la vie des passagers, ne soit pas isolé. Air France avait pourtant abandonné en 2011 les révisions en Chine après d’autres incidents, mais la compagnie s’est ravisée par la suite.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des précisions sur le contrôle et l’évaluation de l’efficacité de la maintenance aérienne effectuée dans des pays n’ayant pas les mêmes normes de sécurité qu’en France ou dans le reste de l’Union européenne ?

Entendez-vous prendre des mesures spécifiques, telle la publication des résultats des contrôles qui aurait le mérite de rassurer les passagers, et faire preuve d’une plus grande transparence en cas d’incident ?

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Madame la sénatrice, le transport aérien, comme vous le soulignez à juste titre, est l’un des modes de transport les plus sûrs, parce qu’il est également l’un des plus contrôlés.

Conformément à la réglementation européenne, toute compagnie communautaire a la possibilité de sous-traiter des visites d’entretien de ses aéronefs à des ateliers situés en dehors de l’Union européenne. Cependant, les règles applicables à ces ateliers sont strictement les mêmes que celles qui prévalent en Europe. Il ne s’agit donc pas d’un contrôle a minima.

Ces ateliers doivent ainsi disposer d’un agrément délivré par l’Agence européenne de la sécurité aérienne, l’AESA. La liste des agréments délivrés est disponible sur son site internet.

Par ailleurs, les compagnies aériennes ont également le devoir réglementaire de mettre en place des systèmes d’évaluation et de suivi de leurs sous-traitants, notamment de ceux qui sont situés hors de l’Union européenne. Ces systèmes d’évaluation font eux-mêmes l’objet d’une surveillance de la part de leur autorité de surveillance, en l’occurrence la Direction générale de l’aviation civile, la DGAC, pour Air France.

Les résultats de ces contrôles peuvent être communiqués au cas par cas, sur demande – vous souhaitez la transparence, madame la sénatrice, ce qui est légitime –, dans la mesure des réserves qui pourraient être émises par la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA.

Cette importante chaîne de surveillance offre les plus grandes garanties. Elle permet de disposer d’un système très robuste de détection et de notification des erreurs de maintenance et des incidents – il en existe, vous en avez cité – qui pourraient y être liés.

Tous les événements significatifs décelés dans ce domaine sont ainsi connus de l’AESA, de sorte qu’une traçabilité des incidents peut être assurée. Les autorités concernées sont donc en capacité de lancer immédiatement les enquêtes et les analyses nécessaires et d’en tirer toutes les conclusions qui s’imposent.

La suspension de l’agrément de près d’une vingtaine de sociétés étrangères depuis quatre ans démontre le niveau d’exigence et l’efficacité de ce système de surveillance. Les ateliers qui se sont vus retirer leur agrément ne peuvent plus exercer l’entretien et la maintenance des aéronefs immatriculés dans un État membre. C’est une conséquence de l’exigence absolue en termes d’efficacité et de sécurité vis-à-vis des sous-traitants de l’ensemble des compagnies aériennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Je ne doute pas, monsieur le ministre, que la France soit extrêmement vigilante en matière de respect de la réglementation, mais cette dernière s’applique souvent a posteriori, lorsqu’il y a eu des incidents.

Les informations dont je dispose concernent la seule compagnie Air France, que je ne mets pas particulièrement en cause, ma question portant sur tous les avions décollant de France et survolant notre pays. Ainsi une peinture qui ne respectait pas les critères de certification à la chaleur a-t-elle été appliquée en Chine. On a par ailleurs constaté l’absence d’une trentaine de vis sur un panneau de carénage d’une aile. De tels faits, assez graves, doivent se produire dans toutes les compagnies aériennes.

Il est sans doute possible de surveiller un peu plus ce qui se passe en France, mais tel n’est pas le cas en dehors de l’Union européenne. On entend souvent dire qu’un avion est cloué au sol à l’étranger et qu’il ne peut décoller parce qu’il a des problèmes. Notre préoccupation est donc légitime. Il est vrai que l’avion fait plus peur que la voiture, alors que la voiture tue beaucoup plus que l’avion. L’inquiétude des Français s’explique certainement par le fait que, en cas de problème, un accident d’avion cause nettement plus de morts. En outre, certains pilotes s’estiment insuffisamment informés sur les règles de maintenance.

Cette question a également un lien avec l’emploi en France. La sous-traitance croissante d’opérations de maintenance, y compris d’interventions lourdes, entraîne en effet la perte d’emplois dans notre pays. Le critère de prix ne doit pas être le seul à entrer en ligne de compte. Il faut également penser à la sécurité et à l’emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Patrice Gélard, auteur de la question n° 628, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les immobilisations du trafic ferroviaire causées par des accidents corporels survenant sur les lignes du réseau ferré. Les trains sont alors immobilisés pendant une durée allant de deux à quatre heures, selon les cas. Cela entraîne, comme vous le savez, des conséquences extrêmement graves pour les usagers de la SNCF, en particulier pour ceux qui travaillent, pour ceux qui doivent prendre un avion ou passer un examen.

Ces immobilisations sont particulièrement pénibles pour les usagers et sont sources de stress.

Serait-il possible, monsieur le ministre, d’envisager des procédures plus rapides pour dégager les trains ainsi bloqués en raison des procédures judiciaires en cours ?

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, en cas d’accident de personnes sur le réseau ferré national sont en effet mobilisés les services de la SNCF, les services de secours, les services de police ou de gendarmerie, l’officier de police judiciaire – ils interviennent pour établir les éléments constitutifs d’une ouverture d’enquête –, ainsi que, parfois, les pompes funèbres.

Ces différents intervenants doivent être protégés avant et pendant leur intervention aux abords du lieu de l’accident, ce qui nécessite le plus souvent l’arrêt du trafic sur les voies concernées ou contiguës. Les procédures médico-légales et judiciaires, essentielles, doivent également être respectées et prennent beaucoup de temps. C’est pourquoi ces accidents entraînent fréquemment d’importants retards, comme vous le déplorez. J’ai moi-même eu l’occasion de me faire l’écho de ces problèmes auprès de différents services. La rapidité de l’intervention dépend également du site sur lequel s’est produit l’accident.

Un guide d’intervention en milieu ferroviaire a été élaboré à partir de cinq situations types particulièrement perturbantes : les accidents de personne, les incendies sur les voies ou à proximité, les malaises de voyageurs à bord d’un train, la découverte d’un colis abandonné et les alertes à la bombe. Il est important que la sécurité soit optimisée dans ces situations, tant pour les voyageurs eux-mêmes que pour les intervenants.

Ce guide permet de mieux organiser les interfaces entre les services ainsi que les procédures propres d’exercice.

Dans le même but, RFF et la SNCF organisent régulièrement des rencontres avec les services de la préfecture, de la justice, des pompiers, de la police et de la gendarmerie et l’ensemble des services susceptibles d’intervenir selon le scénario concerné.

Nous souhaitons, par ce rapprochement interservices, réduire les délais d’intervention au minimum.

Il est vrai que, en zone dense sensible, la moindre interruption a d’énormes conséquences sur des milliers de personnes et la moindre perturbation du réseau a des répercussions importantes ; tel est le cas notamment en Île-de-France. Du reste, hors des zones denses, les répercussions peuvent également être considérables, parce que la difficulté d’intervention sur site peut entraîner des retards considérables.

Aussi, nous cherchons à identifier avec RFF et la SNCF les marges de progrès en termes de rapidité d’intervention, de limitation des durées d’interruption du trafic, d’amélioration de l’information des usagers. Ces travaux sont en cours ; ils nous permettront de décliner de façon opérationnelle le guide d’intervention pour la région d’Île-de-France et de mobiliser à la première alerte les services devant intervenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Gélard

Monsieur le ministre, je vous remercie de ces explications. Je voudrais simplement préciser que, en cas d’accident de personnes sur une voie, non seulement un train est immobilisé, mais souvent tous les trains qui suivent le sont également. Cependant, il est sans doute possible de faire en sorte que ces derniers puissent, en se dégageant sur une autre voie, reprendre leur trajet normal.

En outre, il faut souligner que les accidents corporels ne constituent pas le seul motif d’interruption de trafic. Par exemple, sur la ligne Paris-Le Havre sur laquelle les incidents de parcours sont particulièrement nombreux, des interruptions se produisent constamment, pour une raison ou pour une autre. En conséquence, nous, les usagers, devons prendre des précautions si nous avons un rendez-vous ; ainsi, j’ai été obligé de prendre un train extrêmement tôt ce matin pour venir dans cet hémicycle, car je suis toujours soumis aux aléas des horaires de la SNCF. Ces aléas sont parfois dus aux accidents de personnes mais aussi à toute une série d’autres causes. Par conséquent, ces trains, qui remplissent une mission de service public et devraient donc être à l’heure, ne le sont en définitive pas toujours.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Robert Laufoaulu, auteur de la question n° 644, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Laufoaulu

Monsieur le ministre, le développement d’un territoire comme Wallis-et-Futuna, constitué de deux îles au milieu du grand Pacifique, ne peut passer que par la mer et l’économie maritime.

Je sais que vous êtes bien conscient de cela, et je vous remercie d’ailleurs d’avoir accédé à ma demande, l’an dernier, d’organiser, à Wallis-et-Futuna, des assises maritimes autonomes et non pas, comme prévu initialement, rattachées à la Nouvelle-Calédonie. Ainsi nous avons pu rendre une contribution dont plusieurs points ont été repris dans le rapport national des Assises, et nous vous en sommes reconnaissants.

Dans le même esprit d’autonomisation des enjeux maritimes, nous sommes, depuis le décret du 6 décembre 2005 sur l’action maritime de l’État en outre-mer, rattachés à la conférence maritime de Nouméa. Quelles que soient la qualité et la force de nos relations avec la Nouvelle-Calédonie, les problématiques maritimes pour Wallis-et-Futuna sont différentes, et le seront plus encore lorsque nous exploiterons les croûtes océaniques dans nos eaux territoriales.

Du reste, du fait de la taille de la Nouvelle-Calédonie et de son autonomie importante, la conférence maritime tient, hélas ! trop peu compte de Wallis-et-Futuna.

Selon moi, il est important de réfléchir aux moyens de remédier à cela, et je souhaiterais donc savoir ce que le Gouvernement compte faire pour mieux prendre en compte nos enjeux maritimes particuliers.

Par ailleurs, concernant le registre d’immatriculation du port de Mata-Utu, je voudrais rebondir sur le rapport du député Arnaud Leroy qui m’avait auditionné et qui a fait d’excellentes propositions pour l’amélioration du pavillon français.

Alors que le Gouvernement nous a demandé de développer les ressources propres du territoire pour moins peser sur le budget de l’État, il me paraît plus que jamais important de nous aider à relancer les immatriculations de navires au registre de Mata-Utu qui n’est nullement, je le rappelle, concurrent des registres des ports français, mais est complémentaire de ceux-ci.

C’est un objectif d’égalité et de justice fiscale que d’obtenir une même fiscalité pour les marins français embarqués sur des navires immatriculés à Mata-Utu que pour ceux dont le navire est immatriculé au Registre international français, ou RIF.

Je souhaiterais également savoir où en est la proposition d’Arnaud Leroy d’autoriser les casinos embarqués pour les navires enregistrés à Mata-Utu, proposition qui permettrait sans conteste d’attirer de nouveaux navires qui, aujourd’hui, préfèrent s’immatriculer sous d’autres pavillons.

Enfin, si nous comprenons qu’il est difficile, dans le contexte budgétaire actuel, d’envisager la création d’un véritable service des affaires maritimes à Wallis-et-Futuna, qui pourrait, sur place, instruire les dossiers d’enregistrement des navires, je souhaite vivement qu’une plus grande souplesse administrative puisse faciliter lesdits enregistrements.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, je vous remercie pour votre question qui est extrêmement importante et se situe dans le droit fil de votre implication dans le cadre des travaux organisés par façade maritime qui nous ont occupés.

Vous le savez, l’économie maritime, comme l’a confirmé le Premier ministre lors des neuvièmes Assises de l’économie maritime et du littoral, est « un gisement d’activités et d’emplois presque sans équivalent ».

L’ambition du Gouvernement est de conquérir 10 % des nouveaux marchés en la matière pour doubler le chiffre d’affaires du secteur au niveau national d’ici à 2020, lequel s’élève actuellement à 50 milliards d’euros. On sous-estime souvent l’enjeu maritime, pourtant très important pour l’ensemble de la nation.

Le développement de l’économie maritime à Wallis-et-Futuna, développement auquel vous participez, ce dont je vous remercie une fois encore, s’inscrit naturellement dans ce cadre et y aura pleinement sa place.

Dès ma prise de fonction, j’ai constaté le manque de coordination des politiques maritimes, de leurs outils et de leurs acteurs. Nous avons donc mis en place un certain nombre d’outils de coordination, à commencer par le Conseil national de la mer et des littoraux, et j’ai organisé les Assises de la mer et du littoral, qui se sont déroulées notamment dans votre territoire.

Vous avez fait référence à l’initiative qui fut la vôtre, et que nous avons cautionnée d’Assises organisées sous l’égide du préfet de Wallis-et-Futuna, en juin 2013, et auxquelles vous avez participé activement.

Grâce à cela, nous disposons d’un certain nombre de propositions sur lesquelles nous nous fonderons pour faire évoluer l’enjeu maritime, et particulièrement l’enjeu régional.

Dans ce cadre, des priorités pour Wallis-et-Futuna ont été définies, telles que la clarification des compétences dans le domaine maritime, la définition de la zone économique exclusive, la mise en valeur des ressources biologiques et minérales de cette zone. Je vous confirme que ces priorités défendues lors des Assises de la mer et du littoral sont intégrées dans le processus d’élaboration de la Stratégie nationale de la mer et du littoral dont l’État va se doter dans les six prochains mois, pour six ans.

Cette stratégie sera concrète et opérationnelle : elle sera déclinée et précisée pour chaque façade maritime par des documents stratégiques de bassin.

Dans le prolongement de ces réflexions, vous posez un certain nombre de questions, qui concernent notamment le registre de Wallis-et-Futuna. Vous avez souligné le travail qui a été confié au député Arnaud Leroy, lequel a produit un rapport de grande qualité. Je vous confirme aussi que le registre de Wallis-et-Futuna devra être juridiquement consolidé, conformément aux préconisations du rapporteur. Je crois d’ailleurs savoir que c’est totalement d’actualité puisque, cette semaine, la compagnie des îles du Ponant en parle avec le préfet de Wallis-et-Futuna, ce qui nous permettra d’ailleurs d’avoir un retour dont je vous remercie de vous faire l’interprète.

Vous évoquez d’autres questions. Je suis également sensible à vos remarques concernant l’organisation des services de l’État. Il s’agit de les simplifier, de les optimiser, mais aussi de ne pas gommer la spécificité des territoires, notamment maritimes, par l’organisation optimisée de l’État.

Enfin, votre question concernant les casinos relève pleinement du ministère de l’intérieur, mais je pourrai, à vos côtés, examiner au niveau interministériel comment une évolution pourrait intervenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Laufoaulu

Monsieur le ministre, je vous remercie vivement de ces réponses positives et encourageantes pour le travail que nous réalisons sur place avec les services de l’État concernant le domaine maritime.

Nous comptons sur vous pour poursuivre ces réflexions et la mise en place d’activités au bénéfice du territoire de Wallis-et-Futuna.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, auteur de la question n° 657, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Monsieur le ministre, je souhaite une nouvelle fois attirer votre attention sur les problèmes de la liaison ferroviaire Paris–Clermont-Ferrand.

En effet, à la suite du report au-delà de 2030 de la réalisation de la ligne Paris–Orléans–Clermont-Ferrand–Lyon, dite POCL, il paraît particulièrement urgent d’améliorer les conditions de service sur cette ligne SNCF où les difficultés sont de toutes sortes : de nombreux retards et dysfonctionnements, arrivée en gare de Paris-Bercy et non plus en gare de Lyon, le manque de confort des trains, mais surtout une durée du trajet qui excède trois heures vingt minutes pour la quasi-totalité des trains, à l’exception du « Volcan » qui assure un aller-retour quotidien en trois heures par trajet.

Dans le Puy-de-Dôme et plus généralement en Auvergne, les milieux économiques, les élus, les voyageurs et les syndicats de cheminots sont extrêmement déçus du manque de considération dont on leur témoigne face à leurs demandes d’amélioration du service sur cette ligne, et la presse régionale se fait régulièrement l’écho du mécontentement exprimé par tous les utilisateurs de celle-ci.

À plusieurs reprises, M. René Souchon, président du conseil régional d’Auvergne, vous a signalé toutes les difficultés de la ligne ferroviaire Paris–Clermont.

Au mois de septembre dernier, mes collègues parlementaires du département du Puy-de-Dôme, Michèle André, sénatrice, Christine Pires-Beaune, députée, et moi-même avons rencontré le directeur des lignes et le directeur Intercités de la SNCF, dans l’espoir d’une amélioration du service.

À ce jour, le problème le plus urgent est celui du matériel roulant, car il n’y a aucune perspective précise pour son renouvellement. Certes, les voitures actuelles ont été rénovées, mais leur confort ne correspond pas du tout à ce que les voyageurs sont en droit d’attendre en 2014. Et l’on ne pourra pas différer de plus de deux ou trois ans l’arrivée d’un matériel moderne et performant.

Sur ce sujet, la direction de la SNCF s’exprime de manière contradictoire puisque tantôt elle promet des rames de TGV restaurées, tantôt elle plaide pour un nouveau matériel.

Alstom, avec son Coradia Liner V200, semble en mesure de répondre à la demande en matériel. Celui-ci pourrait être mis en service en 2017, sous réserve d’utiliser l’accord-cadre SNCF. Ne pas utiliser cet accord-cadre retarderait les délais d’au moins cinq ans, ce qui paraît insupportable.

Monsieur le ministre, c’est à l’État, autorité organisatrice de transport pour les trains d’équilibre du territoire, en l’occurrence pour le Téoz Paris–Clermont-Ferrand, de décider et de prendre en charge les choix à faire, d’autant plus que cette ligne est parfaitement rentable, comme vous le savez.

Aussi je vous demande de bien vouloir me préciser quelles décisions vous allez prendre pour améliorer la desserte ferroviaire Paris–Clermont-Ferrand ainsi que les délais de mise en œuvre de ces décisions.

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, je vous remercie pour votre question. L’occasion m’est ainsi donnée de vous apporter les informations les plus récentes.

Vous savez que la desserte Paris–Clermont-Ferrand constitue l’une des lignes principales d’équilibre du territoire. L’État, en tant qu’autorité organisatrice, y est particulièrement attaché.

L’amélioration de cette ligne ne pourra pas attendre la réalisation future du projet de LGV Paris–Orléans–Clermont-Ferrand–Lyon, dite POCL, que la commission « Mobilité 21 » a d’ailleurs classé parmi les secondes priorités, même si, en raison des incertitudes liées à la saturation de l’axe actuel Paris–Lyon, elle a recommandé que de premiers travaux soient anticipés avant 2030.

J’ai tenu à la mise en place d’un observatoire de la saturation ferroviaire de l’axe Paris–Lyon actuel de façon que nous puissions juger de l’opportunité d’engager des travaux rapidement.

En outre, le préfet de la région Auvergne continue de coordonner des études préalables au projet dans le but d’élaborer un scénario unique à la fin de l’année 2014. Ces échéances nous imposent donc de travailler sur l’amélioration de l’offre de transport actuelle sur la ligne Paris–Clermont.

Je suis attentif aux témoignages des élus.

S’agissant du renouvellement du matériel roulant, le Premier ministre a annoncé en juillet dernier que l’ensemble des trains d’équilibre du territoire seraient renouvelés d’ici à 2025. C’est d’autant plus important qu’aucune commande n’a été passée depuis trente ans en matière de trains Intercités et Corail. L’État a signé le 4 décembre dernier une convention de financement d’un montant de 510 millions d’euros pour une première tranche de renouvellement du matériel. Elle concerne le renouvellement du matériel thermique, qui est obsolète.

Le matériel roulant de la ligne Paris–Clermont-Ferrand est ancien, avec un âge moyen de plus de trente-cinq ans. Il faut bien convenir que, hormis la rénovation de Téoz, rien n’a été fait ces dernières années. Il nous faut donc agir dans l’urgence. Un appel d’offres sera lancé en 2015, pour des premières livraisons à partir de 2018, compte tenu du temps nécessaire à la construction du matériel. La ligne Paris–Clermont-Ferrand sera l’une des lignes bénéficiaires.

Cependant, ce n’est pas suffisant, et nous devons renouveler d’autres matériels.

La SNCF avait proposé d’utiliser des rames de TGV rénovées, mais les services de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, la DGITM, ont mis en évidence un certain nombre d’obstacles techniques. J’ai demandé des éclaircissements, afin de savoir si nous pouvons engager la rénovation des rames Corail tout en recourant à des rames de TGV rénovées pour certains services partiels.

Je le dis très clairement devant vous, qui représentez la nation, la SNCF doit dire des choses vraies quand elle communique. Elle doit être certaine de ce qu’elle dit. En effet, on ne peut pas engager des programmes dans une situation d’incertitude technique et budgétaire. Lorsqu’on s’adresse à des élus, il faut leur indiquer les responsabilités que l’on est capable d’assumer ; j’aurais bientôt l’occasion de le redire au président de la SNCF, Guillaume Pépy.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse détaillée et relativement précise, même si vous ne pouvez pas vous engager sur des dates exactes. Ce que je vous demande, au nom de tous les élus de la région, ainsi que des milieux d’affaires, qui se plaignent beaucoup, c’est de faire en sorte que Clermont soit rapprochée de Paris. La qualité des véhicules est importante, mais la durée du trajet l’est tout autant : trois heures au minimum, c’est vraiment trop. On peut imaginer que, en améliorant l’infrastructure et le matériel, on arrivera à passer sous les trois heures.

Je sais qu’on n’atteindra pas la vitesse des TGV, mais il faut tout de même des améliorations, d’autant que notre ligne aérienne – cela fait également partie du débat – ne s’améliore pas, notamment pour ce qui concerne Orly. Toutes les semaines, mes collègues et moi-même constatons que des usagers sont mécontents du train comme des liaisons aériennes. On ne peut pas laisser nos milieux économiques, qui sont la clientèle principale de ces moyens de transport, désespérer plus longtemps. J’espère donc que Clermont-Ferrand sera bientôt dotée du matériel adéquat.

M. Jean Besson applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Joël Guerriau, auteur de la question n° 637, adressée à M. le ministre du redressement productif.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà moins de dix ans, les Chantiers de l’Atlantique de Saint-Nazaire employaient 5 000 salariés. Ils n’en comptent plus que 2 000 aujourd’hui. S’y ajoutent plusieurs milliers d’emplois dans une soixantaine d’entreprises sous-traitantes.

Tout un bassin d’emploi souffre et s’inquiète. Après plus d’une année sans commande, le groupe sud-coréen STX, en mal de liquidités, a annoncé qu’il cherchait à vendre les Chantiers de Saint-Nazaire. Depuis cette annonce, la situation a évolué: la compagnie Brittany Ferries a annoncé le 14 janvier la signature avec le groupe STX d’un contrat pour la construction d’un des trois plus grands navires à gaz naturel liquéfié du monde. Cela représente 2, 6 millions d’heures de travail et l’équivalent de 500 emplois pendant trois ans.

Le croisiériste MSC, client historique des Chantiers, conditionne quant à lui la signature d’une commande de deux paquebots fermes et de deux options à une baisse de prix, qui rapprocherait l’offre des Chantiers des offres européennes concurrentes. Cette commande, primordiale pour l’avenir des Chantiers, passe par un accord de compétitivité qui tarde à être définitivement validé malgré le feu vert de deux syndicats.

Monsieur le ministre, quelles actions concrètes va mener l’État, actionnaire à 33, 34 % des Chantiers grâce à une politique volontariste datant de 2008, pour permettre la levée des blocages qui rendent incertaine la signature de ce contrat indispensable ? L’incertitude quant à la stabilité de l’actionnariat principal fragilise les Chantiers, dans un contexte de concurrence internationale particulièrement âpre. L’État est-il prêt à s’investir davantage ? Quels plans le Gouvernement mettra-t-il en œuvre pour contribuer à remplir durablement le carnet de commandes des Chantiers de l’Atlantique ?

Debut de section - Permalien
Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord d’excuser l’absence d’Arnaud Montebourg, qui, ne pouvant être présent au Sénat ce matin, m’a demandé de vous répondre. Du reste, compte tenu de la nature de mon portefeuille ministériel, nous travaillons ensemble sur la question des Chantiers de l’Atlantique, qui présentent un véritable intérêt stratégique.

Vous craignez qu’une incertitude quant à la stabilité de l’actionnariat de STX France ne perturbe la compétitivité des Chantiers. Ceux-ci auraient alors plus de difficultés à prendre des commandes mais aussi à structurer la filière, dont nous avons eu l’occasion de souligner le caractère stratégique dans une période de renouvellement des flottes. Vous avez évoqué les perspectives d’adaptation des navires aux stipulations de la convention Marpol ; des commandes devraient en découler.

Il est possible que la restructuration du groupe sud-coréen conduise à la cession de certains de ses actifs, y compris en Europe, et il faut évidemment veiller à ce que cette situation n’affecte pas les perspectives commerciales et financières de l’entreprise. Je peux vous assurer que le Gouvernement suit la situation de très près. En sa qualité d’actionnaire de la Banque publique d’investissement, la BPI, qui détient 33 % du capital des Chantiers, aucune évolution de l’actionnariat ne peut se faire sans qu’il en soit informé. Aucun projet de cet ordre n’a été notifié à ce jour.

Si les intentions du groupe STX devaient se confirmer, il est clair que le Gouvernement serait particulièrement attentif à la qualité du projet industriel formulé par d’éventuels investisseurs ainsi qu’à la crédibilité de leur signature. Je tiens à vous rassurer : ces développements n’affectent en rien l’activité des Chantiers de l’Atlantique. Ceux-ci ont d’importantes commandes à livrer – vous en avez cité certaines –, et espèrent signer bientôt des contrats majeurs. Le financement de l’entreprise et celui des commandes sont séparés de celui du groupe STX. Ni l’emploi ni le savoir-faire des Chantiers ne sont menacés ; nous serons extrêmement attentifs à ce qu’il en demeure ainsi.

Comme vous l’avez souligné, nous entrons dans une période sensible pour le transport maritime, du fait de la montée en puissance du renouvellement des flottes. Tous les grands opérateurs, depuis les groupes internationaux jusqu’à l’acteur maritime national, doivent anticiper ce renouvellement. Il est important que nous puissions nous baser sur la qualité, l’expertise et la robustesse des chantiers navals STX.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Monsieur le ministre, les Chantiers de Saint-Nazaire doivent à leur savoir-faire et à leur technicité d’avoir gardé la confiance de certains clients – vous avez évoqué les perspectives de commande –, malgré un handicap de compétitivité important par rapport aux autres chantiers européens, point que vous n’avez pas mentionné dans votre réponse.

Le maintien du savoir-faire des Chantiers de Saint-Nazaire en France est un enjeu économique considérable : la délocalisation définitive de la construction des méthaniers, après transfert – je devrais dire pillage – de notre technologie, est encore dans nos mémoires ; il s’agit là d’une vraie préoccupation.

Il apparaît clairement que notre handicap de compétitivité, conséquence inavouée de la loi sur les 35 heures, ira croissant, jusqu’à devenir insurmontable. Les réponses que vous faites permettront peut-être de repousser l’échéance, mais elles n’apportent pas de solution pour assurer durablement l’avenir des Chantiers de Saint-Nazaire.

Depuis plus d’une décennie, l’histoire des Chantiers est faite de hauts et de bas, l’euphorie consécutive à la prise d’une grosse commande alternant avec les plans de départs volontaires et un chômage partiel de plus en plus fréquent. L’histoire continuera, de crise en crise et de sauvetage en sauvetage : dans un secteur où la concurrence internationale est particulièrement âpre, donner la possibilité à notre industrie de se battre à armes égales est la seule solution pérenne

Le groupe sud-coréen STX avait annoncé vouloir vendre ses chantiers européens pour faire face à un problème de liquidités. Le devenir de l’un des fleurons de notre industrie passe aussi par un actionnariat majoritaire stable et fiable ; le rôle de l’État revêt une importance considérable à cet égard.

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je sais que nous partageons le désir que les Chantiers de Saint-Nazaire puissent voir leur avenir assuré durablement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 649, adressée à M. le ministre des outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ma question porte sur la politique du Gouvernement en matière d’extension du plateau continental au-delà de la zone des deux cents milles marins dans les territoires ultramarins. En effet, mon groupe n’est pas polarisé sur le sud-ouest métropolitain ; il s’intéresse aux intérêts de la nation et de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Forte de ses onze millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive – c’est la deuxième superficie dans le monde –, la France dispose d’un espace maritime exceptionnel, qu’elle n’a pas su mettre suffisamment en valeur. Les richesses potentielles que recèlent les sous-sols – hydrocarbures, nodules polymétalliques, hydrogène naturel, ressources biologiques – constituent un atout considérable, qui appelle la mise en place d’un modèle de développement efficace économiquement et soucieux de la protection de l’environnement.

L’article 76 de la convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée le 10 décembre 1982, autorise les États côtiers à étendre leur plateau continental au-delà de la limite des deux cents milles marins. En France, cette mesure fait l’objet du programme d’extension raisonnée du plateau continental, ou EXTRAPLAC. Il est essentiel que notre pays concrétise au plus vite les démarches actives engagées afin de saisir cette opportunité.

Je m’attarderai sur un dossier emblématique : le plateau continental français au large de Saint-Pierre-et-Miquelon. La France, réussissant à dépasser une certaine torpeur administrative initiale, a déployé les moyens nécessaires au dépôt du dossier définitif de demande au printemps 2014, conformément à la volonté du Gouvernement. C’est la suite logique du dépôt d’une lettre d’intention au mois de mai 2009, à l’issue de la mobilisation de toute la population de l’archipel. Des travaux avaient été menés au Parlement, et notamment à l’Assemblée nationale par les députés radicaux Annick Girardin et Paul Giacobbi.

Pour permettre le plein déploiement du programme EXTRAPLAC et la mise en œuvre d’une politique maritime ambitieuse, il est essentiel que la France se dote de moyens politiques et financiers à la hauteur des enjeux. L’État doit faire preuve d’une volonté résolue s'agissant tant du dépôt des dossiers définitifs de Saint-Pierre-et-Miquelon, de la Polynésie française et de Clipperton, que de la conduite des négociations avec les États voisins au sujet de la Nouvelle-Calédonie, de la Guyane, de la Guadeloupe, de la Martinique et des îles Kerguelen. Monsieur le ministre, je trouve que l’on ne s’occupe pas suffisamment des îles Kerguelen, Saint-Paul, Amsterdam et Crozet. Il y a là un espace de deux millions de kilomètres carrés qui mérite davantage d’attention de la part de la République.

La volonté résolue de l’État est la condition de la protection de ces environnements par l’entremise de programmes scientifiques de haut niveau et d’une exploitation raisonnée des ressources. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer l’intention du Gouvernement de renforcer dans les plus brefs délais les moyens déployés au service de la stratégie relative à l’extension du plateau continental de la France dans les territoires ultramarins ?

Debut de section - Permalien
Victorin Lurel, ministre des outre-mer

Monsieur le sénateur, vous me donnez l’occasion de faire un point clair sur une question qui, à mon sens, suscite trop de doutes. Je serai donc précis.

Le ministère des outre-mer défend de manière constante les intérêts de nos territoires ultramarins. Il veille à la valorisation et à la préservation la plus complète possible des droits souverains de la France sur les ressources naturelles du sol et du sous-sol marin.

À cet égard, je partage votre avis lorsque vous dites que certains territoires – vous citiez les îles Éparses et l’archipel de Crozet – ne seraient pas suffisamment pris en compte. Aussi ai-je tenu, sitôt arrivé au ministère des outre-mer, à montrer qu’il n’y a pas simplement onze, mais douze territoires, même si certains ne sont pas habités. Par ailleurs, il faut savoir que je suis l’un des rares ministres depuis 1966 à m’être rendu dans ces zones.

Je ne suis pas encore allé aux îles Kerguelen, car il faut trois semaines de voyage, malgré les progrès de la technique, mais je me suis rendu à Tromelin, à Glorieuses, et je dois très bientôt aller à Juan de Nova, où se trouvent des ressources jusqu’ici insoupçonnées.

Debut de section - Permalien
Victorin Lurel, ministre

Le programme EXTRAPLAC, chargé d’étudier la faisabilité des demandes françaises et de constituer les dossiers à déposer auprès de la Commission des limites du plateau continental, la CLPC, a bénéficié des moyens budgétaires nécessaires pour prendre au mieux en compte les intérêts nationaux, en particulier ceux des outre-mer, sans qu’aucun retard ait été enregistré, contrairement à ce que j’entends souvent dire.

La France a respecté la date limite pour déposer les dossiers d’extension du plateau continental auprès du secrétaire général des Nations unies, fixée au 13 mai 2009, en ce qui concerne la Guyane, la Nouvelle-Calédonie, les Antilles françaises, les îles Kerguelen, l’archipel de Crozet, la Réunion, les îles Saint-Paul-et-Amsterdam et Wallis-et-Futuna. La CLPC a d’ailleurs déjà validé l’extension pour un certain nombre de ces territoires, à savoir la Guyane – 76 000 kilomètres carrés –, le sud-ouest de la Nouvelle-Calédonie – 76 300 kilomètres carrés –, les Antilles françaises – 7 408 kilomètres carrés –, les îles Kerguelen – 425 000 kilomètres carrés –, et procède actuellement à l’examen d’autres dossiers.

S’agissant de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane, îles pour lesquelles la CLPC a déjà émis ses recommandations, les négociations de délimitation avec les États voisins – la Barbade, la Dominique et le Suriname – sont largement avancées. En revanche, nous avons d’autres problèmes avec la Dominique et Sainte-Lucie sur la délimitation des eaux territoriales et les conventions de pêche à passer, lesquelles relèvent de l’Union européenne.

Pour la Nouvelle-Calédonie, la CLPC a validé l’extension du plateau continental sur la partie sud-ouest et a gelé l’examen de notre demande portant sur la partie est en raison de l’objection du Vanuatu qui invoque un conflit de souveraineté sur les îles Matthew et Hunter. La France réitère régulièrement sa disponibilité à engager des discussions techniques avec cet État afin de lever l’objection sur cette partie du dossier, sans qu’il soit pour autant donné suite à sa proposition.

Les derniers dossiers que le Gouvernement français entend déposer sont relatifs, comme vous l’avez précisé, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à la Polynésie française. Ils seront déposés respectivement au printemps 2014 – au plus tard dans trois mois – pour le premier, et courant 2015 pour le second. Concernant Saint-Pierre-et-Miquelon, je mesure l’intensité des attentes de nos concitoyens de l’archipel. Conformément à l’engagement très fort pris par le Président de la République sur ce sujet à la fin de l’année 2013, engagement réitéré lors des vœux aux outre-mer le 23 janvier 2014, je vous confirme de la manière la plus claire possible que la France va déposer un dossier faisant valoir ses droits légitimes au titre de son plateau continental au large de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Les seuls territoires pour lesquels la France ne déposera pas de demande d’extension sont Saint-Martin, Saint-Barthélemy, certaines îles Éparses – Glorieuses, Juan de Nova, Bassas de India et Tromelin – et l’île de Clipperton, que vous avez évoquée, en raison de la contiguïté de leur zone économique exclusive avec celles d’États voisins ou de l’absence des critères scientifiques et techniques permettant de justifier l’extension, ce qui est en fait le vrai motif.

Enfin, outre le programme EXTRAPLAC, largement exécuté, les perspectives de développement économique de ressources minérales ont conduit au lancement d’importants travaux par un consortium de scientifiques sur l’exploration et l’exploitation des grands fonds marins. Cette expertise scientifique constituera la première réalisation du programme national de recherche et d’accès aux ressources minérales des grands fonds marins, annoncé par le Premier ministre dans le prolongement du comité interministériel de la mer du 2 décembre 2013. L’expertise porte sur les grands fonds sous juridiction française, ainsi que sur les zones situées au-delà des juridictions françaises.

Telle est la réponse que je tenais à vous faire, monsieur le sénateur, pour vous montrer nos préoccupations et le travail qui est réalisé.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 510, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Monsieur le président, je vais ramener mes collègues de l’île de Clipperton à la région d’Île-de-France, puisque ma question a trait aux risques d’inondation dans notre région.

Alors que la région Midi-Pyrénées a été frappée en juin 2013 par une crue exceptionnelle qui a causé des dégâts catastrophiques pour la population, alors même que le Var et, ces jours derniers, la Gironde viennent également de subir de lourds dommages, les Franciliens s’interrogent sur les risques possibles de crues et d’inondations en Île-de-France.

Située au cœur de trois confluences de la Seine, avec l’Yonne, la Marne et l’Oise, la région d’Île-de-France n’a certes pas enregistré de crue majeure depuis près de soixante ans. Pourtant, les risques sont là, l’urbanisation croissante de la région augmentant sa vulnérabilité à ces menaces.

En effet, depuis vingt-cinq ans, les zones urbanisées ne cessent de croître avec de nombreuses constructions d’habitations, de zones d’activités et d’infrastructures de transport, d’énergie, de communication et de production d’eau, tous éléments qui ne manqueraient pas d’être touchés en cas de crue importante et exceptionnelle.

Aujourd’hui, près de 20 000 hectares sont en zone inondable. Par conséquent, ce sont environ un peu plus de 3 millions d’habitants, dont 70 % à Paris et en petite couronne, ainsi que 2 millions d’emplois qui seraient immédiatement concernés.

Le risque en petite couronne est particulièrement élevé. Le département du Val-de-Marne représente, à lui seul, 27 % des surfaces d’habitat vulnérables avec près de 1 650 hectares. Mon collègue Luc Carvounas, ici présent, qui est maire d’Alfortville, verrait sa commune entièrement submergée, selon le plan de prévention des risques d’inondation, le PPRI.

Nous le savons, la région concentre les principaux pouvoirs économiques, politiques et représente plus du tiers de l’activité économique de la France. Il faut savoir qu’une inondation d’une exceptionnelle intensité paralyserait cinq lignes de RER, la totalité du métro, les cinq grandes gares SNCF, ainsi que les usines d’électricité et de production d’eau. Plus de 340 établissements de santé seraient touchés. Cet impact dépasserait largement la seule zone inondée, puisque plusieurs millions de personnes en subiraient les effets indirects : fragilités électriques, impossibilité de déplacement, désorganisation des services publics.

Certes, même si ce n’est pas l’objet de ma question, les PPRI ont été imposés aux maires, mais leurs effets sont limités. En outre, malgré les aménagements réalisés le long des berges et la mise en place de quatre barrages de rétention en amont de la capitale, on peut s’interroger sur la capacité de ces équipements à résister à une crue d’importance exceptionnelle.

L’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, vient de dévoiler la deuxième partie de son rapport concernant les risques d’une crue exceptionnelle de la Seine à Paris, confirmant que 5 millions de personnes pourraient être touchées, pour un coût financier évalué entre 3 milliards et 30 milliards d’euros. L’OCDE dénonce l’absence de vision stratégique d’ensemble et suggère une meilleure coordination articulée entre les acteurs nationaux, locaux, c’est-à-dire la région, les départements et les municipalités.

Elle préconise également une meilleure gouvernance concernant l’expérimentation du projet de stockage dit de la Bassée. Ce projet de construction d’un cinquième barrage en amont de Paris dans la vallée de la Bassée consiste à réaliser dix bassins de retenue d’eau capables de recevoir de l’eau pompée dans la Seine. Malheureusement, ce projet, au coût particulièrement élevé de 500 millions d’euros, divise bien évidemment les élus.

En réponse à ces préoccupations, notamment ce chevauchement des responsabilités entre l’État, la région et les communes pointé par l’OCDE, monsieur le ministre, la préfecture de police a annoncé au mois de janvier la création d’un comité stratégique local dédié au renforcement de la coordination des acteurs du territoire. Cette structure sera également chargée de mettre en place « une stratégie locale partagée de gestion des risques à l’échelle du territoire francilien à compter de 2015 ». Espérons que nous pourrons attendre jusque-là…

Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire si les enjeux « inondations » sont véritablement pris en compte dans les réflexions d’aménagement de cette future métropole qui va voir le jour et, plus généralement, de la région d’Île-de-France, et quels sont les moyens mis en œuvre pour la gestion de crise ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous invite à bien respecter vos temps de parole, faute de quoi tous les sénateurs ne pourront poser leur question orale sans débat ce matin.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie

Monsieur le sénateur Christian Cambon, j’étais en Bretagne avec M. le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, début janvier ; j’étais avec M. le Premier ministre et M. le ministre de l’intérieur dans le Var, également au mois de janvier ; j’étais chez moi, dans le Sud-Ouest, le week-end dernier, et j’ai pu voir que les Hautes-Pyrénées, les Pyrénées-Atlantiques, mais aussi le Gers, ont été meurtris par des inondations.

Vous avez raison de souligner que ces événements nous rappellent de façon spectaculaire que la France est toujours menacée par de tels phénomènes et que nous devons entrer dans cette culture du risque qui doit nous faire regarder les aléas climatiques avec encore plus d’attention qu’auparavant.

La région parisienne reste elle aussi exposée à ce risque. Nous le savons, la grande crue de 1910 a marqué à jamais les esprits.

Le rapport de l’OCDE, rendu public le 24 janvier 2014, que j’ai lu comme vous, indique que près de 5 millions de personnes pourraient être concernées, directement ou indirectement, si la crue de 1910 se reproduisait aujourd’hui. Près de 430 000 logements pourraient alors être touchés et les dommages directs auraient un coût faramineux de 15 à 20 milliards d’euros.

Pour protéger les Franciliens, différentes mesures ont été prises, qui vont de l’adaptation de l’urbanisation en zone inondable à la mise en œuvre de projets globaux de prévention des inondations, en passant par une gestion de crise efficace.

La réactivité des collectivités locales, l’appui des Établissements publics territoriaux de bassin et des services de l’État sont autant de moyens nécessaires qui peuvent assurer la protection de nos concitoyens.

Même si le risque d’inondation est d’ores et déjà intégré aux projets d’aménagement, la mise en œuvre du Grand Paris constituera aussi une véritable opportunité de progresser dans cette culture du risque que j’évoquais et qui doit désormais nous animer.

L’Établissement public des grands lacs de Seine a élaboré, avec le soutien de l’État, un programme d’action de prévention des inondations qui a été validé au niveau national en décembre 2013 et sera lancé prochainement.

Concernant la gestion de crise, le préfet de police de Paris mobilise régulièrement l’ensemble des opérateurs dont la préparation est primordiale pour mettre en sécurité les installations stratégiques, assurer une continuité des services essentiels tels que l’eau, l’électricité, les déchets, les transports, et faciliter la remise en état.

Comme il en a fait la preuve en Bretagne, dans le Var, dans le Sud-Ouest, comme il le fera à chaque occasion, soyez assuré, monsieur le sénateur, que le Gouvernement restera vigilant et mobilisé pour que la réponse de l’État soit à la hauteur du péril.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Je remercie M. le ministre de nous avoir apporté ces précisions, mais je reste malgré tout un peu inquiet de la faible mobilisation. En tant que maire, je suis assez rarement – pour ne pas dire jamais – convié à des réunions, alors que ma ville borde la Marne sur trois kilomètres. Je n’ai pas le sentiment que, dans notre département particulièrement exposé, il y ait cette sensibilisation des élus, des acteurs. Or nous savons bien que, lorsqu’une crue démarre, il faut très vite apporter des réponses aux populations.

J’espère donc que le comité stratégique mis en place par le préfet de police associera tous les acteurs, dont les maires font à mes yeux partie. Je vous remercie de bien vouloir prendre la mesure de ce problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Jean Besson, auteur de la question n° 686, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

Monsieur le président, mes chers collègues, j’appelle l’attention de M. le ministre sur la conclusion de la procédure de classement du parc naturel régional des Baronnies Provençales.

Le territoire concerné par le projet de parc régional couvre 220 000 hectares, avec une population très faible puisque la densité moyenne y est de quinze habitants au kilomètre carré. Dans le canton de Rémuzat, qui m’est cher car j’en ai été le conseiller général pendant vingt-cinq ans, cette densité est parfois de moins de deux habitants au kilomètre carré, et soixante-deux des communes concernées par le projet comptent aujourd’hui moins de cent habitants.

On comprend aisément les difficultés quotidiennes que les élus ou les habitants rencontrent pour vivre dans ce territoire. Pourtant, ils y sont fermement attachés.

Les Baronnies Provençales sont en effet un territoire d’exception. Elles appartiennent à ce que l’on appelle les « Préalpes », qui bénéficient des influences à la fois méditerranéennes et alpines, d’une biodiversité et de paysages remarquables. On y trouve des femmes et des hommes qui veulent continuer à vivre sur ce territoire.

Il fallait donc s’appuyer sur ces atouts pour fonder un nouveau développement fédérateur des énergies. Avec de nombreux élus de cette région, tout particulièrement Didier Guillaume, président du conseil général de la Drôme, j’ai été un fervent défenseur du projet de création de parc naturel régional.

En 2004, les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur ont toutes deux décidé, le même jour, de lancer la procédure de création de ce parc. À la suite de l’instauration du syndicat mixte des Baronnies Provençales, en 2007, la procédure d’élaboration de la charte du parc a permis d’associer toutes les forces vives du territoire, dans une démarche d’ouverture et de main tendue.

En 2010, au vu de l’avant-projet de charte, la Fédération des parcs naturels régionaux de France et le Conseil national de la protection de la nature ont unanimement souligné la pertinence de ce projet, qui bénéficie également du total soutien du conseil général de la Drôme et du conseil général des Hautes-Alpes.

Quelque quatre-vingt-six communes représentant 30 700 habitants et la totalité des douze communautés de communes, sans discontinuité territoriale, ont approuvé la charte.

Ce projet a reçu un très large soutien à tous les niveaux, quelle que soit la sensibilité politique des différents acteurs. Il a bénéficié du vote favorable de plus des deux tiers des 1 600 élus municipaux appelés à s’exprimer sur la charte.

Les acteurs économiques, sociaux et associatifs sont d’ores et déjà engagés avec le syndicat mixte, les départements et les régions dans des actions qui permettent, chaque jour, de relever le défi du développement de ce territoire. Monsieur le ministre, pour conclure la procédure, seule manque aujourd’hui la décision de classement de l’État.

Je souhaite donc vous interroger sur les prochaines échéances qui permettront de disposer enfin de la reconnaissance et des outils que cette superbe région mérite.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie

Monsieur le sénateur, vous comprendrez que ma réponse s’adresse également à Didier Guillaume, tant je sais que vous avez tous deux partie liée sur ce magnifique projet de création du parc naturel régional des Baronnies Provençales. Je connais votre attachement à ce sujet. Soyez assuré de mon total soutien.

Le périmètre d’étude arrêté en 2004 par les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur présente toutes les qualités requises, que ce soit en termes de richesses naturelles, culturelles et paysagères, pour prétendre au classement en parc naturel régional. Je sais le soutien constant apporté par le conseil général de la Drôme à ce projet. La large consultation des acteurs locaux dans le cadre de la procédure de création a d’ailleurs permis d’en confirmer l’opportunité.

La Fédération des parcs naturels régionaux de France ainsi que le Conseil national de la protection de la nature ont tous deux rendu, en 2010, un avis favorable sur une telle création, soulignant à cette occasion la qualité du projet de la charte.

Mon ministère a également rendu un avis intermédiaire favorable, en relevant notamment la large concertation conduite avec l’ensemble des partenaires tout au long du processus d’élaboration de la charte ainsi que le dynamisme de l’équipe de préfiguration du parc.

Je l’indique solennellement, je souhaite que le projet de parc naturel régional puisse désormais rapidement aboutir. Aux communes qui hésitent et n’ont pas encore approuvé le projet de charte, je veux dire qu’il s’agit d’une chance pour leur territoire. La création d’un parc naturel régional est un projet de développement local durable et n’est pas, comme certains le prétendent, la « mise sous cloche » dudit territoire.

Les services de l’État apporteront tout leur appui à l’équipe de préfiguration, monsieur le sénateur, afin de faire aboutir un projet qui sera utile à la valorisation des Baronnies Provençales. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

M. Jean Besson. M. le ministre connaît très bien le dossier et je l’en remercie. Je voulais simplement ajouter une précision. La carte de la région le montre clairement

L’orateur en brandit une.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

Par conséquent, notre demande est totalement justifiée. Les forces vives que j’ai citées, les élus, le conseil général de la Drôme et celui des Hautes-Alpes seraient bien entendu très déçus si ce projet de parc n’aboutissait pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Luc Carvounas, auteur de la question n° 667, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Carvounas

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur l’avenir des épiceries sociales et solidaires.

Le 27 juin 2013, les présidents du Conseil européen, du Parlement européen et de la Commission européenne ont trouvé un accord pour la création d’un fonds européen d’aide aux plus démunis doté de 3, 5 milliards d’euros sur sept ans.

Je tiens tout d’abord à saluer le rôle déterminant du Gouvernement français dans cette décision, qui a permis de maintenir la totalité des crédits alloués aux associations françaises d’aide alimentaire, alors qu’il était question de supprimer leurs subsides européens.

Cependant, les épiceries sociales et solidaires ont été exclues de fait de ce fonds eu égard à l’obligation faite aux associations de délivrer gratuitement des denrées alimentaires.

Or le modèle des épiceries sociales et solidaires repose précisément sur une participation symbolique de leurs bénéficiaires qui permet aux personnes en difficulté de voir leur dignité respectée et d’alléger leur sensation de dépendance à l’autre, sentiment qui s’ajoute très souvent à celui de déclassement qu’elles éprouvent. De plus, cette participation permet de financer diverses actions d’insertion sociale en matière d’aide au logement, de soutien à l’insertion professionnelle, ou encore d’accès aux soins.

Madame la ministre, pour toutes ces raisons et parce que ces épiceries sont un maillon essentiel de notre modèle de solidarité nationale, je souhaiterais savoir ce que le Gouvernement entend faire pour protéger et pérenniser les épiceries sociales et solidaires. §

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, vous avez raison de saluer la création du Fonds européen d’aide aux plus démunis, le FEAD, qui succède au Programme européen d’aide aux plus démunis. Ce n’était pas gagné d’avance, vous le savez. C’est grâce au combat du Président de la République et du Gouvernement, au soutien sans faille des députés européens ainsi qu’à la mobilisation de l’ensemble des associations qu’a été maintenue une aide alimentaire européenne de 3, 5 milliards d’euros sur la période 2014-2020, soit un montant équivalent à celui qui avait été octroyé pour la période précédente.

Mais les critères sont différents. Pour compenser la baisse des crédits alloués à la France, au mois de décembre dernier, le Gouvernement a décidé de débloquer un crédit exceptionnel de 8, 2 millions d’euros dédié à l’aide alimentaire. Ce crédit augmentera le programme 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » qui finance l’aide alimentaire nationale.

Dans notre pays, trois millions de personnes bénéficient de l’aide alimentaire et dix-huit millions à l’échelle européenne. C’est avant tout pour elles que le Président de la République, le Gouvernement et tous ceux qui se sont mobilisés ont mené ce combat.

Reste le problème que vous soulignez, monsieur le sénateur, des épiceries sociales et solidaires, dont certaines dépendaient hier de l’aide alimentaire européenne par l’intermédiaire de la Fédération française des banques alimentaires. Aujourd’hui, elles sont au nombre de 729 en France. Elles effectuent un travail remarquable et souvent innovant qui va bien au-delà de la simple aide alimentaire, vous avez raison de le relever, et produit du lien social pour accompagner des foyers en extrême difficulté ou des familles précaires.

Cependant, comme vous le soulignez, le règlement du FEAD ne permet pas une participation, même symbolique, de la personne à laquelle est attribuée l’aide, ce qui est en contradiction avec le modèle des épiceries sociales et solidaires, qu’il convient pourtant de soutenir. C’est pourquoi le Gouvernement compensera le manque à gagner pour elles en dédiant près de 8 millions d’euros de crédits – 7, 7 millions d’euros précisément – du programme 304 aux achats de denrées des quatre réseaux qui approvisionnent les épiceries sociales et solidaires, notamment les banques alimentaires et l’Association nationale de développement des épiceries solidaires, l’ANDES, qui réalisent un travail remarquable.

Ces réseaux nous ont déjà fait part de leurs besoins – c’est la raison pour laquelle ceux-ci sont chiffrés – et ces crédits nationaux, dont l’affectation n’interdit en rien la participation du bénéficiaire final, permettront de couvrir leur action. Par ailleurs, il est également important de souligner que les services déconcentrés de l’État en matière d’aide alimentaire sont d’importants relais et soutiens locaux des associations. Nous voulons donc soutenir parallèlement ces deux réseaux.

Enfin, sachez que j’ai reçu le 22 janvier dernier les quatre grandes associations historiques de l’aide alimentaire, afin d’aborder avec elles les sujets sur lesquels nous devons continuer à travailler, parce qu’il ne faut pas se reposer et s’en tenir là. Il convient en effet d’accompagner ces associations pour les aider à faire face à l’afflux de nouveaux bénéficiaires – même si je n’aime pas ce terme –, notamment les travailleurs pauvres, précarisés par la crise et les difficultés du quotidien. Les enjeux sont, d’une part, de s’adapter au mieux à cette situation et, d’autre part, de sécuriser leur budget et de conforter leur financement à l’échelon européen. Nous avons donc encore du chemin à parcourir !

Je vous remercie, monsieur le sénateur, d’avoir posé la question de l’avenir des épiceries sociales et solidaires. Sachez que c’est un réseau que je soutiens ! Dites-le leur : elles n’ont pas de souci à se faire cette année. Mais nous devons continuer à militer ensemble pour leur cause !

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Carvounas

Je vous remercie, madame la ministre, des précisions que vous avez apportées, notamment des crédits de 7, 7 millions d’euros que vous avez annoncés.

Vous avez évoqué le réseau français de 729 épiceries sociales et solidaires. L’une d’elles est implantée sur le territoire de ma commune, Alfortville, et je peux témoigner de son action au quotidien auprès des habitants. Le Gouvernement répond à la nécessité d’accompagner ce réseau si important et je vous en remercie très chaleureusement, madame la ministre.

L’annonce de la création du Fonds européen d’aide aux plus démunis est essentielle. Je me souviens avoir mis en avant, en tant que rapporteur pour avis de la mission « Égalité des territoires, logement et ville », lors des deux derniers exercices budgétaires, notre vigilance sur les aides alimentaires au plan européen. Le Gouvernement a répondu là aussi à cette nécessité et je ne puis que m’en féliciter.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Dominique Watrin, auteur de la question n° 650, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis de nombreuses années, les mineurs retraités estiment que le système de calcul du montant de leurs pensions de retraite est injuste et discriminant à l’égard de ceux d’entre eux ayant pris leur retraite avant 1987.

En effet, le nouveau mode de calcul mis en place en 2001, qui se traduit par une certaine revalorisation du montant des pensions, ne concerne que les mineurs ayant fait valoir leurs droits à la retraite après 1987. Le dispositif engendre maintenant des écarts de plus en plus importants – jusqu’à 25 % – entre les pensions de mineurs ayant cotisé un même nombre d’années.

Le Gouvernement, sous la présidence de M. Nicolas Sarkozy, avait consenti une revalorisation de 5 % de celles-ci. Aussi, estimant qu’un gouvernement de gauche ne peut faire moins, il nous semble opportun d’évaluer le coût budgétaire d’une revalorisation des pensions de ces mineurs de 5 % dès 2014.

Par ailleurs, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour corriger ces discriminations qui touchent également les pensions de réversion des veuves de mineurs dont celles qui ont élevé trois enfants sont déjà pénalisées par la perte de la demi-part fiscale ?

Le second volet de ma question portera encore une fois, madame la ministre, sur l’offre de soins du régime minier. Les centres de santé du régime minier du Nord-Pas-de-Calais, ouverts à toute la population et fortement fréquentés par les ressortissants du régime général, ont permis jusque-là de pérenniser l’offre de soins de proximité dans des conditions tarifaires respectueuses du droit à la santé pour tous – tiers payant, absence de dépassement d’honoraires et d’avance de frais.

Or leur situation ne cesse de se détériorer. À titre d’exemple, 200 personnes attendent un rendez-vous ophtalmologique au centre de santé d’Auchel où l’offre de consultation a été fortement réduite. De même, alors que ce centre réalisait 2 700 actes dentaires dont 1 200 pour le régime minier et 1 500 pour le régime général, en 2013, cette offre a complètement disparu. Les patients sont envoyés vers le centre de santé de Bruay qui ne peut les accueillir.

Les élus locaux, toutes tendances politiques confondues, réclament d’ailleurs une table ronde, afin de revoir à la hausse le projet de restructuration prévu par la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, la CANSSM, qui vide encore plus l’offre de soins sur le secteur de l’Auchellois. Ils souhaitent connaître, madame la ministre, les mesures que vous comptez prendre sans attendre pour répondre aux besoins urgents.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Marisol Touraine, qui présente actuellement le plan cancer en compagnie du Premier ministre et m’a demandé de vous répondre à sa place.

Comme vous le savez, ma collègue s’est particulièrement engagée en faveur du régime minier. Dans ce dernier, les pensions sont calculées selon un mode particulier, en multipliant le nombre de trimestres par la valeur forfaitaire du trimestre. Cette caractéristique d’un montant identique de pension pour une même durée de carrière traduit la volonté d’un traitement identique des retraités, quels que soient les salaires d’activité. À partir de 1987, ce mode de calcul a conduit progressivement à un « décrochage » des pensions servies par rapport à celles du régime général.

Pour y remédier, en 2001, le gouvernement de Lionel Jospin a réformé le mode de calcul des pensions minières : elles sont désormais revalorisées comme les pensions du régime général, ce qui garantit leur pouvoir d’achat. Pour le passé, une revalorisation exceptionnelle a été accordée, afin de compenser le « décrochage » intervenu entre 1987 et 2001.

Une deuxième revalorisation exceptionnelle, à hauteur de 3 %, des pensions qui avaient été liquidées avant 1987 a également eu lieu récemment.

Ces mesures favorables ont permis d’aligner les règles d’évolution des pensions minières sur celles des pensions du régime général, sans remettre en cause les avantages propres au régime minier, notamment l’ouverture des droits à pension à cinquante-cinq ans, avec possibilité d’anticipation à cinquante ans, ou la durée de cotisation à trente annuités.

Pour ce qui concerne les pensions de réversion, elles bénéficient déjà d’un mode de calcul plus favorable que celui qui est applicable aux régimes spéciaux : leur montant correspond à 54 % de celui de la pension du conjoint, contre 50 % dans la plupart des autres régimes spéciaux, fonctions publiques comprises.

Enfin, comme elle a déjà plusieurs fois eu l’occasion de le dire, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé considère que l’offre de santé du régime minier doit s’engager dans une nouvelle dynamique, sous l’égide des agences régionales de santé, les ARS. Il s’agit en effet de répondre, sur l’ensemble des territoires concernés, aux besoins des populations, aux exigences de qualité, comme à celles d’un retour à l’équilibre économique. La convention d’objectifs et de gestion du régime minier, en cours de négociation, fixera pour la période 2014-2017 le cadre et les objectifs de cette offre de santé renouvelée.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Madame la ministre, vous venez de confirmer une compensation très partielle déjà annoncée, c’est-à-dire une revalorisation de 5 % répartie sur plusieurs années pour les pensions liquidées avant 1987, sans annoncer d’autres mesures, alors que les écarts constatés vont jusqu’à 25 %.

Quant aux centres de santé, j’ai bien entendu que Mme Touraine souhaitait qu’une nouvelle dynamique soit engagée sur les territoires, au niveau du bassin minier notamment, à l’égard des centres de santé. Je voudrais la rassurer : les élus, quelle que soit leur tendance politique, ne sont pas partisans du statu quo et pensent que des réorganisations sont effectivement nécessaires, de même que des investissements dans les bâtiments et les équipements, si l’on veut maintenir l’attractivité de ces centres de santé, qui constituent l’un des atouts majeurs pour le rattrapage des retards de soins constatés sur ces territoires.

L’important, dans le contexte socio-économique actuel, avec un taux de chômage atteignant 25 % dans certaines communes, est qu’aucune restructuration ne devrait être engagée si elle ne garantit pas une offre de santé au moins équivalente, notamment les pratiques du tiers payant et des tarifs opposables.

Pour conclure, les élus locaux sont ouverts au dialogue et à l’échange sur ces questions. Ce qu’ils ne supportent pas, c’est de se voir imposer des restructurations qui ne prennent pas en compte les besoins des populations, qu’ils sont les premiers à connaître. C’est pourquoi, sur plusieurs secteurs, ils proposent la constitution de groupes de travail auprès de la CANSSM et de l’ARS, pour chercher ensemble les meilleures solutions. Je ne doute pas, madame la ministre, que vous transmettrez ces propositions à votre collègue chargée de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Ronan Kerdraon, auteur de la question n° 654, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Madame la ministre, selon un récent sondage, 43 % des Français ont renoncé à des soins d’optique en raison de la difficulté à obtenir un rendez-vous – un exemple vient d’ailleurs d’être cité par mon collègue Watrin – et 8 % d’entre eux n’ont jamais consulté d’ophtalmologiste. Dans les prochaines années, cette situation risque de s’aggraver, eu égard au vieillissement de la population et à la baisse du nombre d’ophtalmologistes dans notre pays.

En ce moment, le sujet de l’optique revient souvent sur la scène publique, avec la discussion du projet de loi relatif à la consommation, l’annonce de la stratégie nationale de santé ou le rapport de la Cour des comptes qui préconise des déremboursements. J’y vois donc l’occasion de faire le point sur l’état des métiers de l’optique.

Selon le syndicat des ophtalmologistes, en 2020, seuls huit millions de patients seront pris en charge par les ophtalmologistes, contre dix millions aujourd’hui, alors que les besoins continueront de croître. Face à cette fracture sanitaire croissante, un certain nombre de mesures simples pourraient être mises en œuvre, afin d’améliorer l’accès de nos concitoyens aux soins d’optique.

La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », prévoit d’ailleurs des protocoles de coopération entre professionnels de santé.

Notre pays compte aujourd’hui 25 000 opticiens-lunetiers répartis dans plus de 11 000 magasins d’optique. Ils pourraient être de véritables partenaires de santé des ophtalmologistes et contribuer à la prise en charge des patients, dans le cadre d’un protocole de soins conclu sous l’égide de la Haute Autorité de santé.

Cette délégation de tâches garantirait à la collectivité des économies estimées à 200 millions d’euros, puisque l’examen effectué par un opticien-lunetier serait facturé à un prix moindre et non remboursé par la sécurité sociale. Elle exigerait également d’allonger la formation des opticiens-lunetiers d’une année – trois ans contre deux ans aujourd’hui –, afin de renforcer les compétences de ceux-ci en matière d’examen de vue, d’adaptation de lentilles, voire d’initiation au dépistage.

La troisième année de formation pourrait intégrer deux stages pratiques à l’hôpital et en cabinet médical, encadrés par des ophtalmologistes, afin de faire travailler ensemble ces deux professions, selon des modes opératoires déterminés par les médecins spécialistes.

En outre, ce cycle de formation, qui serait reconnu par l’État et intégré dans le cadre du cursus européen licence-master-doctorat, ou LMD, pourrait être financé par les opticiens eux-mêmes, afin de ne pas alourdir les dépenses de l’État.

Au sein de cette formation, l’instauration d’un numerus clausus semble nécessaire, même à titre provisoire ! Il faut en effet mettre en place une régulation du nombre de diplômés et non pas de la quantité de points de vente, comme ont pu le préconiser certains – je pense notamment à Éric Raoult. Sur les 25 000 opticiens diplômés, 32 % sont gérants, 64 % sont salariés et – fait grave – 13 % sont demandeurs d’emploi, ce qui est parfaitement honteux au regard du coût d’inscription dans une école, pas moins de 6 000 euros !

Madame la ministre, face à cette problématique majeure de santé publique, je vous remercie de bien vouloir me préciser si des mesures de cette nature sont envisageables et les actions que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour faciliter l’accès de nos compatriotes aux soins d’optique de base.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion

Monsieur le député, je vous prie également d’excuser l’absence de Marisol Touraine, pour le motif que j’ai évoqué en répondant au précédent orateur.

Monsieur le sénateur, veux-je dire. N’interprétez pas cette erreur comme un manque de respect à l’égard du Sénat. J’ai dit à plusieurs reprises dans cette enceinte combien je respecte le travail que nous faisons ensemble, dont je veux à nouveau souligner l’extrême qualité.

Vous le rappeliez, l’ophtalmologiste est un professionnel majeur de l’organisation des soins de premier recours. Les orthoptistes et les opticiens-lunetiers exercent pour leur part leur activité dans un champ strictement défini par le code de la santé publique.

Si la formation des opticiens-lunetiers relève du ministère de l’éducation nationale, celle des orthoptistes est, elle, en cours de « réingénierie », sous la responsabilité conjointe du ministère des affaires sociales et de la santé et du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Il est indéniable que la santé visuelle, en particulier l’examen de la vision, constitue un enjeu essentiel, du point de vue tant médical que social, économique et politique. Pour faire face à cet enjeu, le recours au dispositif des coopérations entre professionnels de santé est privilégié par le ministère des affaires sociales et de la santé, ainsi que par les professionnels eux-mêmes.

Les ophtalmologistes sont prêts à déléguer des tâches aux orthoptistes et aux opticiens. Ainsi, des protocoles de coopération ont été élaborés avec le soutien de l’Académie française d’ophtalmologie, des syndicats médicaux et des syndicats d’orthoptistes pour améliorer l’accès aux soins grâce à une meilleure répartition des rôles entre ces professionnels de santé. Ces nouveaux modes d’organisation et de définition des compétences permettent de libérer du temps médical et de réduire les délais d’attente des patients pour une consultation.

Plusieurs de ces protocoles ont déjà reçu un avis favorable de la Haute Autorité de santé. Ils permettent à un orthoptiste de réaliser un bilan visuel, un examen de dépistage de la rétinopathie diabétique, par exemple. De tels protocoles sont déjà appliqués dans la région Pays-de-la-Loire. Concrètement, en cas de renouvellement de lunettes, l’examen physique est réalisé par l’orthoptiste ; suit un contrôle du dossier du patient par le médecin ophtalmologiste ; ce dernier adresse ensuite l’ordonnance de renouvellement dans un délai de quelques jours.

Ce dispositif réduit les délais d’obtention de rendez-vous pour les patients ayant seulement besoin d’un renouvellement de lunettes et améliore les délais de prise en charge par un ophtalmologiste, en permettant à ce spécialiste de se consacrer aux patients dont la santé nécessite des soins plus complexes.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a renforcé le déploiement de ces nouveaux de mode de coopération entre professionnels, en facilitant le financement de ce type de projets.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Je me félicite de vos réponses, madame la ministre, qui vont dans le sens des solutions évoquées dans ma question pour favoriser un meilleur accès aux soins en matière d’optique, et je vous en remercie.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, auteur de la question n° 659, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Ma question est adressée à M. le ministre de l’économie et des finances dont je souhaite attirer l’attention sur le déficit de données statistiques relatives au département de Mayotte.

Devenu le cent unième département depuis le 31 mars 2011, Mayotte s’apprête à entrer de plain-pied dans le droit commun avec la mise en place de la fiscalité propre et son accession au statut de région ultrapériphérique le 1er janvier dernier.

Pourtant, force est de le constater, quel que soit le domaine observé, ce département manque cruellement de données locales chiffrées précises et fiables permettant de mesurer ses évolutions démographiques et ses mutations, et facilitant la mise en œuvre de politiques publiques.

Dans ses articles consacrés au recensement de la population, la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a instauré un recensement quinquennal à Mayotte, alors qu’il se déroule de la même façon qu’en métropole dans les autres départements d’outre-mer. Compte tenu de l’évolution exponentielle de la démographie due à une forte natalité, mais surtout à une pression migratoire excessive, un recensement annuel serait plus adapté. Cette situation constitue un frein considérable à l’établissement de diagnostics partagés quant aux politiques à engager et aux investissements à réaliser. Elle ne permet pas d’établir un plan d’action global adapté pour Mayotte.

Je souhaite donc savoir, madame la ministre, quels moyens le Gouvernement compte mettre en œuvre pour que le système statistique soit développé afin d’assurer une connaissance du territoire à la hauteur de celle des autres départements français, de garantir un rattrapage du système d’information et de disposer, enfin, de chiffres fiables sur les grandes problématiques économiques, démographiques et sociales de l’île.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir excuser Pierre Moscovici, qui m’a demandé de vous répondre à sa place.

Vous avez raison de souligner l’importance de données statistiques. La mise en place d’un système statistique fiable, précis et pérenne demande un effort constant. L’INSEE s’y emploie depuis 1997, année de création d’un établissement à Mayotte devenu aujourd’hui un service régional à part entière. La réalisation de progrès nécessite l’adhésion et l’implication sur le terrain de tous les acteurs, publics et privés.

Je veux notamment souligner que la construction du système statistique repose sur trois piliers : non seulement la mise en place de répertoires et la réalisation d’enquêtes et de recensements, mais aussi l’utilisation de fichiers administratifs, tels les fichiers de revenus fiscaux, des URSSAF, ou encore des permis de construire, par exemple. Les premier et troisième piliers, incontournables en métropole et dans les autres départements d’outre-mer, doivent encore être consolidés à Mayotte. En revanche, depuis 2011, les enquêtes se multiplient, comme en témoigneront les nombreuses publications qui interviendront cette année.

Au titre du rappel des principaux travaux en cours, je commencerai par le répertoire national d’identification des personnes physiques, le RNIPP. Géré depuis 2012 par l’INSEE, il est en phase d’amélioration.

La gestion de l’état civil est aussi assurée par l’INSEE, mais au prix de difficultés et de coûts particulièrement élevés en raison du manque de respect des procédures officielles. En effet, les communes transmettent les actes d’état civil à l’INSEE avec beaucoup trop de retard, voire ne les communiquent pas du tout, ce qui pénalise les Mahorais lors de leurs démarches administratives. À cela s’ajoute le fait qu’un nombre important de décès ne sont pas déclarés en mairie.

Conformément à l’article L. 37 du code électoral, le fichier électoral est également géré par l’INSEE depuis le 1er septembre 2013. Vous le savez, les mêmes difficultés sont rencontrées en l’espèce.

La base permanente des équipements, alimentée par les données communiquées par de nombreux partenaires – la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DRESS, la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance, la DEPP, la gendarmerie, le ministère de la justice, La Poste… – comprend aujourd’hui 167 types d’équipements. Elle intègre Mayotte depuis 2012.

Le dernier recensement de la population a eu lieu cette même année. Les données relatives aux populations communales ont été publiées fin 2012 et les premiers résultats statistiques sont actuellement en cours de diffusion.

Des tableaux et d’autres analyses compléteront cette diffusion pendant cette année. L’INSEE disposera dès lors d’informations très récentes.

Un passage de Mayotte au mode de recensement en continu, en vigueur en métropole et dans les autres DOM, supposerait, d’abord, un changement du cadre législatif en vigueur. Il nécessiterait aussi une préparation longue, des moyens humains et financiers importants, ainsi qu’une implication accrue des communes.

En revanche, les statistiques de comptabilité démographique sont de qualité insuffisante, car elles souffrent de la sous-déclaration chronique des décès.

J’en viens aux enquêtes réalisées auprès des ménages. L’intégration de Mayotte dans ce dispositif nécessite que, sujet par sujet, soient bien analysées les spécificités du territoire, afin de proposer un questionnaire et un protocole de collecte adaptés.

S’agissant de l’enquête Emploi, une enquête expérimentale réalisée dès 2009 a été renouvelée en 2013 selon le même dispositif appliqué aux autres DOM jusqu’à cette année. Elle sera désormais reconduite annuellement, pour répondre à une demande prioritaire de la Commission européenne. Les résultats de l’année 2013 seront publiés au premier semestre 2014 et actualisés ensuite tous les ans. Ainsi, des indicateurs – population active, taux de chômage, temps partiel, secteurs d’activité des personnes ayant un emploi – seront disponibles régulièrement.

Pour ce qui concerne les autres thèmes, l’INSEE a adopté une démarche ambitieuse, consistant à mener une grande enquête par an.

L’indice des prix à la consommation, actuellement calculé par le service régional de Mayotte, doit encore être intégré à la chaîne de production nationale.

Enfin, les statistiques relatives aux entreprises reposent d’abord sur la mise en place du répertoire SIRENE, qui est désormais également pris en charge par l’INSEE.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée

Monsieur le sénateur, afin de respecter le temps de parole qui m’est imparti, je vous communiquerai par écrit une réponse plus complète. J’espère néanmoins que les informations que je vous ai apportées vous donneront satisfaction.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Madame la ministre, les informations que vous venez de me communiquer et dont je vous remercie ne me donnent que partiellement satisfaction, tant la tâche qui reste à accomplir est importante.

Vous en convenez, sans statistiques, sans données fiables, tout projet de développement est extrêmement difficile, voire impossible.

Je me permets d’insister sur cette question centrale, qui ne suscite pourtant guère de débat.

J’ai bien noté toutes les avancées qui ont eu lieu ces derniers temps. Je fais confiance au Gouvernement pour poursuivre dans cette voie, afin de permettre à ce département de partir sur de bonnes bases.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 663, adressée à M. le ministre de la défense.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Le 7 janvier dernier, lors du débat sur l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, mes collègues ont reconnu que si la loi du 5 janvier 2010 constituait l’aboutissement d’un long et nécessaire combat mené à la fois par les associations de victimes et les parlementaires, elle était loin de répondre aux trois principaux objectifs fixés, à savoir reconnaître les faits, simplifier les procédures et apporter une juste indemnisation.

Le constat est sans appel et des chiffres illustrent les dysfonctionnements : sur les 861 dossiers déposés auprès du comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires, le ClVEN, seuls onze ont donné lieu à indemnisation en trois ans. La loi a instauré le principe de présomption de causalité, qui implique que la personne concernée n’a plus à prouver l’existence d’un lien entre la maladie contractée et une exposition aux radiations nucléaires. C’est aux pouvoirs publics de prouver l’absence d’exposition ou, plus exactement, l’absence de conséquences de cette exposition.

Il faut rappeler que ce principe de présomption de causalité n’est admis par la loi qu’à la suite d’un examen préalable du risque relatif aux essais nucléaires auquel le demandeur aurait été exposé. Cette notion de risque négligeable, maintenue dans l’article 4 de la loi précitée, est quasiment impossible à déterminer en raison du manque d’information ou de l’application du principe du secret défense.

Ce risque négligeable, évalué par un logiciel inadapté à cette fonction, devient la source d’inévitables et multiples contentieux et ne peut plus apparaître comme l’élément déterminant de la décision. C’est en appliquant le principe de causalité stricte et en supprimant la notion de risque négligeable, lequel est mesuré par le système de dosimétrie, que l’on pourra parvenir à une véritable reconnaissance et à une indemnisation juste et réparatrice.

Les lieux, les dates d’exposition et les maladies prévus par la loi me semblent représenter des éléments ou, plus exactement, des outils d’analyse suffisants. C’est, d’ailleurs, sur ces points que la plupart des juridictions se fondent pour donner raison aux victimes rejetées par la loi au nom du risque négligeable : je citerai les juridictions de Clermont-Ferrand, Caen, Papeete, Orléans, Montreuil, Pau, Toulon et, plus récemment, Bordeaux, préfecture du département que je représente.

Certes, les amendements adoptés lors de la discussion de la loi de programmation militaire tendant à réformer le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires et à le transformer en une autorité indépendante, notamment, ont permis des avancées au mois de décembre dernier.

Aujourd’hui, il nous faut les rendre concrètes en élaborant un décret d’application qui pourrait comporter, entre autres, la désignation par le Premier ministre d’un interlocuteur unique chargé de suivre les questions des essais nucléaires, la désignation d’un représentant des associations au CIVEN, le renouvellement des experts de la commission consultative de suivi, la possibilité pour les présidents d’associations de se faire représenter en cas d’empêchement, la suppression de la méthode d’examen des dossiers fondée sur des calculs de probabilité non constitutifs d’une preuve. Le décret d’application devrait également prévoir la création d’un lieu de mémoire et la prise en compte du principe de présomption stricte pour tous ceux et celles qui remplissent les conditions en termes de lieu, de dates et de maladie, à l’instar de celui qui est applicable pour les maladies professionnelles en France et dans la législation américaine.

Ces propositions ne sauraient se voir opposer l’article 40 de la Constitution au motif qu’elles grèveraient le budget de la nation. En effet, depuis 2010, un budget dédié de 10 millions d’euros a été « sanctuarisé », même si les crédits ont été très peu consommés à ce jour.

Bien sûr, madame la ministre, une fois que les nouvelles commissions ou comités auront été mis en place, il leur appartiendra de proposer des améliorations de la loi. Je n’ai bien évidemment pas les compétences pour constituer un dossier technique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Il y va, vous le savez, de la crédibilité de l’État, qui a un devoir de reconnaissance et de réparation ! Je compte sur vous, madame la ministre, pour poursuivre, dans un climat de confiance et de dialogue, le travail effectué avec les associations.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Mes chers collègues, je vous appelle à la concision, afin que chaque auteur de question ait le temps d’intervenir !

La parole est à Mme la ministre déléguée.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Jean-Yves Le Drian, qui tient à vous faire part des éléments suivants.

La bonne compréhension du dispositif actuel de reconnaissance et d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français est basée sur un constat reposant sur des chiffres. Permettez-moi de vous citer ceux dont le ministère de la défense dispose : au 1er janvier 2014, le CIVEN avait reçu 880 dossiers, dont 726 étaient complets. Sur ces derniers, seuls 503 satisfont aux critères de lieu, date et maladie prévus par la loi. À l’issue de l’examen de ces 503 dossiers recevables, treize indemnisations ont été proposées. La question qui se pose concerne donc non le pourcentage de dossiers indemnisés, mais bien l’indemnisation effective et juste des personnes qui souffrent aujourd’hui d’une maladie radio-induite du fait de leur exposition à des radiations lors des essais nucléaires français.

Comme vous le soulignez, le dispositif actuel est perfectible. C’est effectivement ce qu’ont montré les différents rapports rédigés au cours de l’année 2013, notamment celui de Mme la sénatrice Corinne Bouchoux et de M. le sénateur Jean-Claude Lenoir que le ministre de la défense tient à remercier une fois encore de leur travail et de leurs recommandations.

L’adoption, le 18 décembre dernier, de la loi relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale a été l’occasion de reprendre certaines d’entre elles. Elle va permettre, dès cette année, de multiples améliorations du dispositif actuel, conformément aux nombreux engagements que Jean-Yves Le Drian avait lui-même pris lors des commissions consultatives.

Je rappelle, notamment, que le périmètre de la loi intègre désormais, comme le ministre de la défense l’avait souhaité, toute la Polynésie, ce qui entraînera certainement des demandes supplémentaires, voire de nouvelles propositions d’indemnisation.

Les critères ne sont donc pas figés : le nombre de maladies, le dispositif d’indemnisation, le périmètre d’application de la loi ont évolué depuis la promulgation de la loi de 2010. Toutefois, il ne peut y avoir de loi juste sans un minimum de critères permettant d’apprécier le lien de causalité entre la situation du demandeur et la pathologie dont il souffre.

Une fois les critères remplis, le mécanisme d’étude du dossier se doit également d’être incontestable.

D’une part, vous devez savoir que le ministre de la défense a autorisé, conformément à l’avis formulé par la Commission consultative du secret de la défense nationale et dans un souci de transparence, la déclassification de plusieurs centaines de dossiers portant sur les essais nucléaires français.

Le secret défense, indispensable à notre sécurité et qui doit être préservé, n’a jamais été un frein à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires. Des engagements sur ce point ont d’ailleurs été pris lors des différentes commissions consultatives.

D’autre part, le dispositif actuel repose sur un processus rigoureux, élaboré à partir de méthodologies recommandées par l’Agence internationale de l’énergie atomique et de données scientifiques reconnues par la communauté internationale.

Loin de se limiter à un simple calcul statistique – le reproche est souvent formulé –, le CIVEN, composé aujourd’hui de scientifiques reconnus, notamment de médecins désignés sur proposition du Haut Conseil de la santé publique, étudie chaque dossier, au cas par cas. Les indemnisations proposées sont certes peu nombreuses, mais elles sont justes. Et c’est indispensable !

Monsieur le sénateur, le ministre de la défense comprend vos arguments, votre demande et a bien noté les chiffres que vous avez cités. Toutefois, et vous le savez aussi bien que lui, plus que de statistiques, ce dont les victimes ont besoin, c’est d’un traitement humain, crédible et compréhensible, répondant à leurs attentes.

C’est ce vers quoi tend la loi de programmation militaire. Soyez assuré que le ministre de la défense veillera personnellement à ce qu’il en soit ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Je connais votre attachement au dialogue et à la concertation. Mais il reste beaucoup à faire. Vous venez de le dire, c’est un problème humain, terrible et dévastateur pour les familles des victimes, lesquelles ont droit à une véritable reconnaissance de la nation. Je vous demande donc de tout faire pour parvenir à des solutions dignes de leurs légitimes attentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 630, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Madame la ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de défendre l’égal accès des enfants à la restauration scolaire sur l’ensemble du territoire national.

Dans son rapport du 28 mars 2013 intitulé L’égal accès des enfants à la cantine de l’école primaire, le Défenseur des droits a fait un certain nombre de recommandations sur les conditions d’accès aux restaurants scolaires, le service rendu par ceux-ci au regard de l’état de santé de l’enfant, des obligations de sécurité alimentaire ou du respect du principe de neutralité religieuse. Le constat y est ainsi dressé du maintien d’une discrimination dans de nombreuses municipalités, qui continuent d’imposer des critères de restriction d’accès à la restauration scolaire.

Les principaux critères invoqués par les collectivités pour motiver le refus d’accès d’un enfant à la restauration scolaire sont, notamment, la priorité d’accès aux enfants dont les parents travaillent, la disponibilité des parents au domicile, le lieu de résidence de la famille sur le territoire de la commune siège de l’école.

Cette discrimination est contraire au principe de garantie d’un égal accès aux services publics, quels que soient le revenu et l’origine sociale de la personne concernée. Elle est contraire à l’article 2 de la Convention internationale des droits de l’enfant, aux termes duquel l’enfant doit être « protégé contre toutes formes de discrimination ou de sanction motivées par [...] les activités [...] de ses parents », ce qui exclut également tout écartement des enfants de la cantine pour impayés.

Face à ce constat, le Défenseur des droits partage l’intention des auteurs de la proposition de loi n° 4305 instaurant le droit à la restauration scolaire, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale, notamment par M. Ayrault lorsqu’il était encore député, et de la proposition de loi n° 561 visant à garantir l’accès de tous les enfants à la restauration scolaire, déposée au Sénat.

Les auteurs de ces deux textes recommandent que le service public de la restauration scolaire, dès lors qu’il a été mis en place, soit ouvert à tous les enfants dont les familles le souhaitent, et précisent « qu’il ne peut être établi aucune discrimination selon la situation familiale, les revenus ou la situation géographique. »

La proposition de loi sénatoriale prévoit également des sanctions : « Tout refus d’inscription ou d’accès à la restauration entraîne un prélèvement sur les ressources fiscales de la commune ou du groupement de communes concernés dont le montant est fixé à 1 % du montant des dépenses réelles de fonctionnement de la commune ou du groupement de communes constatées dans le compte administratif afférent au pénultième exercice multiplié par le nombre d’enfants refusés sans pouvoir excéder 225 000 euros. » C’est précis !

Dans ces conditions, je souhaiterais connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement afin de rendre possible l’accès de tous les enfants à la restauration scolaire.

Il doit s’agir, tout à la fois, de dispositions législatives nécessaires et contraignantes, mais également d’incitations financières permettant aux communes ou aux EPCI à faibles ressources de faire face budgétairement à cette charge importante dans un contexte contraint de réduction des dépenses, or celles dont il est question sont utiles à la population.

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, environ 19 000 communes disposent d’un service de restauration scolaire.

La cantine occupe une place importante dans l’alimentation et le quotidien des enfants. En effet, l’alimentation d’un enfant d’âge scolaire est essentielle pour sa croissance, son développement psychomoteur et ses capacités d’apprentissage. Le repas quotidien servi à l’école primaire est d’autant plus important dans un contexte de précarisation croissante des familles.

Aujourd’hui, plus de 6 millions d’élèves – un élève sur deux en primaire – mangent à la cantine. Les 53 000 établissements scolaires du primaire servent environ 400 millions de repas. La somme moyenne payée par les familles pour un repas s’élève entre 3, 5 et 4 euros.

Comme vous le savez, dans les écoles maternelles et élémentaires, l’organisation de la restauration relève de la commune. Sa gestion est fréquemment assurée par la caisse des écoles, qui donne son avis sur les tarifs et la composition des menus. Les modes d’organisation varient selon la taille des communes, lesquelles peuvent assurer elles-mêmes le service ou le déléguer à des sociétés de restauration privée.

La participation financière des familles est fixée par la commune, sur la base du quotient familial. Celles qui rencontrent des difficultés financières peuvent contacter l’assistante sociale de leur quartier.

Il est aussi important de préciser que la restauration scolaire est un service public facultatif que chaque commune décide librement de mettre en place, dans le respect du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, et dont elle détermine les modalités d’organisation.

En l’état actuel du droit, les communes ne sont pas tenues de créer autant de places qu’il existe d’élèves potentiels, ainsi que l’a précisé le Conseil d’État dans sa décision du 13 mai 1994 : « s’agissant d’un service public non obligatoire [...], le principe d’égalité des usagers du service public ne fait pas obstacle à ce que le conseil municipal limite l’accès du service en le réservant à des élèves [...] se trouvant dans une situation différente de l’ensemble des usagers potentiels du service ».

Il appartient alors aux communes de déterminer, dans le cadre d’un règlement, l’ensemble des critères appropriés qu’il convient de prendre en compte afin de pouvoir apprécier dans toutes ses dimensions la situation objective des élèves et de leur famille au regard des caractéristiques de ce service public.

Des critères qui ne prendraient pas en considération la situation sociale de la famille seraient en revanche illégaux. Une vigilance particulière est apportée sur ce point par tous les acteurs concernés.

Par ailleurs, instituer un « droit à la cantine » nécessiterait la création d’une compétence obligatoire pour les communes et la mise à disposition de moyens financiers importants pour adapter la restauration scolaire, qu’il s’agisse du double service, de l’agrandissement et de la rénovation des locaux, etc. Dans un contexte budgétaire contraint, cette solution semble difficile à retenir. Il convient plutôt d’encourager les communes ou les intercommunalités qui n’auraient pas déjà fait ce choix à développer des services de restauration totalement adaptés à leur population scolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Madame la ministre, vous l’aurez compris, ma question ne portait pas sur la transformation d’une compétence facultative de restauration scolaire en compétence obligatoire. Nous connaissons bien les disparités qui existent entre les communes, en termes de capacités financières, sur l’ensemble du territoire national !

Cette question concernait l’égal accès des enfants à la restauration scolaire lorsque ce service existe. De ce point de vue, beaucoup reste à faire, ainsi que l’a constaté le Défenseur des droits. Or votre réponse ne permet pas vraiment d’avancer.

Il me semble nécessaire que l’État s’engage à garantir une forme d’équité des droits sur le territoire national et à aider, le cas échéant, les collectivités qui ont tendance, à leur corps défendant, à limiter l’accès des enfants à la cantine pour des raisons budgétaires. Ce sont des situations que l’on observe assez régulièrement dans nos communes.

Il s’agirait d’aider financièrement les communes qui le souhaitent, et qui se sont engagées à satisfaire ce droit important pour les enfants, à mener cette démarche jusqu’à son terme en évitant de créer des situations de discrimination.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 652, adressée à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la réforme de la fiscalité de l’aménagement du territoire, adoptée dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2010, est entrée en vigueur le 1er mars 2012.

Les services de l’État chargés de l’urbanisme dans le département et les directions départementales des territoires et de la mer, les DDTM, sont seuls compétents pour établir et liquider les taxes d’urbanisme, lesquelles constituent des ressources non négligeables pour les collectivités, et la principale, voire l’unique, source de financement pour les conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement, les CAUE.

Par ailleurs, cette réforme vise à mettre à disposition des collectivités un outil d’aménagement simple, facilement adaptable au territoire et à la politique d’aménagement propre à chacun, l’interface CHORUS.

Or il semble que, dans plusieurs départements, les DDTM rencontrent des difficultés techniques significatives à l’égard de cette application informatique. Ainsi, malgré l’établissement d’un plan d’urgence, d’importants dysfonctionnements subsistent, rendant les services de l’État incapables de fournir aux collectivités l’information sur les montants prévisionnels de taxes à l’échéance légale.

Ces difficultés font craindre également aux collectivités et aux CAUE des retards importants quant à la perception de la taxe d’aménagement en 2013 et en 2014.

Les DDTM doivent notamment fournir avant le 1er mars de chaque année aux collectivités territoriales bénéficiaires les éléments concernant l’année civile précédente nécessaires aux simulations de recettes, en vue de la préparation de leur budget. Il ne s’agit pas non plus de confondre ici le délai d’émission des titres avec les délais effectifs des premiers versements des pétitionnaires et les délais de reversement aux communes ou établissements publics de coopération intercommunale.

Derrière ces aléas techniques se cache toutefois une réalité financière très difficile pour les collectivités. Par exemple, la commune de Belz, située dans le Morbihan, se trouve dans une situation financière délicate, sans aucune capacité d’emprunt, en raison d’un taux d’endettement nettement supérieur à celui des communes de même strate.

La seule capacité d’investissement des collectivités repose donc exclusivement sur leur capacité d’autofinancement, notamment sur les recettes de la taxe d’aménagement.

Madame la ministre, j’insiste sur l’importance de remédier rapidement à ces dysfonctionnements, afin de permettre aux collectivités territoriales et aux CAUE de percevoir dans les plus brefs délais le produit des taxes d’urbanisme.

La mise en œuvre de cette taxe d’aménagement ne peut s’effectuer au détriment des communes qui attendent, impérativement, son versement. Si un délai est nécessaire, il doit être raisonnable. Il paraît aberrant que des moyens techniques suffisants n’aient pas été mis en place pour accompagner la collecte de cette taxe.

En conséquence, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement a-t-il prévues pour remédier à ces dysfonctionnements informatiques dans les meilleurs délais et pour éviter de mettre, une nouvelle fois, en difficulté les collectivités locales ?

Debut de section - Permalien
Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion

Monsieur le sénateur, vous appelez l’attention de Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement sur le processus de liquidation des nouvelles taxes d’urbanisme.

Pour rappel, la mise en œuvre de la réforme de la fiscalité entrée en vigueur le 1er mars 2012 s’est accompagnée du raccordement de l’application ADS2007, outil d’instruction, à l’interface CHORUS pour l’émission des titres à destination des redevables.

Cet important chantier informatique a connu quelques difficultés techniques inhérentes au raccordement d’outils informatiques dans un contexte interministériel, mais les délais serrés impartis par le législateur ont été globalement respectés. Ainsi, l’émission des titres de recettes initialement prévue pour le mois de mai 2013 a été repoussée de deux mois seulement. Depuis la mi-juillet 2013, les difficultés ont été levées et les premiers titres ont été émis.

À ce jour, plus de 200 000 titres ont d’ores et déjà été pris en charge dans l’interface CHORUS, soit environ 320 millions d’euros, sur lesquels 143 millions d’euros ont déjà été reversés aux collectivités. En outre, quelque 30 000 autres sont actuellement en cours de prise en charge.

Depuis cet été, il n’existe plus de problèmes de raccordement à CHORUS ou d’arrêt d’émission de titres. Le flux est désormais continu si l’instruction est réalisée via l’outil ADS2007.

S’agissant des communes morbihannaises, 4 400 titres ont été pris en charge en 2013 pour un montant d’environ 5 225 000 euros, sur lesquels 2 300 000 euros ont, à ce jour, été recouvrés par le comptable public.

Enfin, j’attire votre attention sur le fait que les délais d’émission des titres prévus par la réglementation ne doivent pas être confondus avec le délai effectif de reversement aux communes.

En effet, si l’article L. 331-24 du code de l’urbanisme prévoit l’émission des titres de recettes douze mois et vingt-quatre mois après la date de délivrance de l’autorisation d’urbanisme, pour une estimation de la date des reversements aux collectivités territoriales, il convient de prendre en compte le délai entre la prise en charge du titre par le comptable public et la date d’exigibilité de l’impôt retenue par la réglementation discale, soit environ huit semaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Je me félicite, madame la ministre, de la réponse que vous m’apportez. J’ai bien compris que CHORUS était désormais en état de marche et que, si quelques retards demeurent, la plupart des communes obtiendront prochainement satisfaction.

Je souhaite néanmoins profiter du temps qui m’est encore imparti pour rappeler que les collectivités locales souffrent de plus en plus de la baisse des dotations. Comme le soulignait dans une interview André Laignel, secrétaire général de l’Association des maires de France, elles vont ainsi subir une perte financière de près de 6 %.

Sans doute faudra-t-il à l’avenir écouter les maires et engager des discussions avec les collectivités locales, qui ne pourront plus lancer un certain nombre d’investissements. Selon moi, on peut encore rattraper la situation et modifier la donne pour 2015 ; pour 2014, c’est trop tard, le budget est voté.

Les collectivités sont en grande souffrance. Je peux en témoigner, après avoir fait la tournée des communes à l’occasion des vœux pour la nouvelle année. Je lance donc cet appel au Gouvernement : entendez-les, dans l’intérêt de la population !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 477, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

Monsieur le ministre, ma question porte sur la vaccination des veaux contre la teigne.

La teigne est une zoonose provoquée par une mycose qui est à l’origine de lésions importantes sur les peaux. La contamination entre animaux est directe, par le contact, ou indirecte, par les mangeoires, par exemple. Cette maladie est transmissible à l’homme.

Si la France demeure le premier producteur mondial de cuir de veau, la filière est fragilisée en amont par le problème de la vaccination des veaux contre la teigne. En effet, cette maladie dégrade la qualité de la peau, la rendant impropre à la fabrication de cuir destiné à l’industrie du luxe. La quantité disponible de cette matière première est insuffisante pour faire face au développement du marché du luxe et des exportations françaises.

La Norvège qui a rendu la vaccination contre la teigne obligatoire en 1978 a quasiment éradiqué cette maladie de son territoire.

De plus, grâce à une vaccination systématique, les conditions de vie des bêtes seraient meilleures, leur stress dû aux démangeaisons étant réduit. Une étude menée en 2011 par la Fédération française de la tannerie-mégisserie montre que l’écart de poids entre un veau malade et un veau sain est considérable : il atteint 4, 3 kilogrammes en fin de période d’engraissement, ce qui représente des pertes économiques pour les éleveurs.

La teigne est également à l’origine de telles pertes pour l’ensemble de la filière cuir française, qui enregistre un manque à gagner, les peaux des veaux malades étant sous-valorisées par les tanneurs.

Par conséquent, monsieur le ministre, je souhaite savoir si le Gouvernement envisage de généraliser la vaccination des veaux contre la teigne. Sans préjuger le financement de cette opération, l’envoi d’un signe politique serait important. Au moment où l’on condamne les mauvais traitements infligés aux chats, il me semble important de se préoccuper du confort des petits veaux !

Debut de section - Permalien
Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le sénateur, par cette référence à l’actualité, vous manifestez votre intérêt pour le bien-être des petits veaux...

Cela étant, la teigne a effectivement des conséquences extrêmement négatives sur les peaux, en particulier sur celles des veaux. Chaque année, la France produit environ 137 000 tonnes de cuirs, destinés notamment à la fabrication de produits de luxe. Par conséquent, moins nombreuses sont les maladies, plus forte est la valorisation de ces peaux.

La teigne n’est pas une maladie réglementée. Par conséquent, il n’est pas question de rendre la vaccination obligatoire. En revanche, je suis tout à fait disposé, je l’ai déjà dit et je le répète devant la représentation nationale, à favoriser l’organisation et l’extension de programmes de vaccination à l’échelon régional, avec l’accord des professionnels, afin de limiter les pertes que vous avez évoquées. Tout le monde devrait pouvoir s’y retrouver.

Ainsi, à l’issue d’une négociation dans chaque territoire, un accord-cadre pourrait être défini entre les producteurs, les transformateurs et, bien sûr, les industriels concernés.

En résumé, sur ce sujet, ma disponibilité est totale pour organiser et mettre en œuvre dès que possible une extension des vaccinations dans une logique territoriale.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Grignon

Il est en effet important que le ministère serve de courroie de transmission. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui permettra à toutes les parties prenantes de prendre une décision.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Michel Teston, auteur de la question n° 594, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Monsieur le ministre, à la suite du rapport du professeur en dermatologie Ian White remis au mois de juin 2012, le comité scientifique des produits de consommation de l’Union européenne a proposé de réduire le plus possible la présence de produits potentiellement allergènes dans les cosmétiques et les parfums. Ainsi, le nombre de substances dites « allergènes » risquant d’être proscrites ou limitées pourrait être porté de 26 à 80, voire à 130.

Or le linalol, substance reconnue comme potentiellement allergène, est présent dans l’extrait et l’huile essentielle de lavande. Les producteurs de lavande et de lavandin craignent que l’évolution de la réglementation européenne ne conduise à la limitation, voire à la suppression, de ces ingrédients des préparations destinées aux produits de la parfumerie, de la cosmétique et de la parapharmacie.

Au-delà, l’ensemble des producteurs de plantes aromatiques et médicinales expriment de fortes inquiétudes quant à l’avenir de leurs productions d’huiles essentielles. En Ardèche, cette filière compte plus d’une centaine exploitations représentant une surface de 540 hectares, dont 497 hectares sont consacrés à la lavande et au lavandin.

En outre, une telle décision aurait de fortes conséquences sur l’activité de l’entreprise française de la parfumerie et de la cosmétique. La qualité et l’efficacité de ses produits en seraient affectées, ce qui ferait peser des risques importants sur des milliers d’emplois au sein de la filière.

Le règlement européen d’enregistrement, d’évaluation, d’autorisation et de restriction des substances chimiques, dit « REACH », considère les huiles essentielles comme des produits chimiques. En conséquence, les producteurs de plantes aromatiques et médicinales devront fournir des études toxicologiques très poussées sur leurs produits, entraînant des coûts supplémentaires insupportables pour leurs exploitations.

Alors que les alcools ou les huiles de consommation, autres produits issus de la distillation classique des plantes, sont considérés comme des produits agricoles, il paraît incohérent que les huiles essentielles soient considérées comme des substances chimiques.

Monsieur le ministre, quelles réponses pouvez-vous apporter à l’inquiétude exprimée par les producteurs de plantes aromatiques et médicinales, en particulier par ceux de lavande et de lavandin, face aux évolutions envisagées de la réglementation européenne ?

Debut de section - Permalien
Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le sénateur, j’ai eu l’occasion d’évoquer cette question avec les professionnels de la filière à la fin de l’année dernière. J’ai déjà été sensibilisé à ce sujet quand j’étais député européen.

Grâce aux six réglementations mises en place par l’Union européenne, en particulier le règlement REACH, la protection des consommateurs européens contre les molécules chimiques est l’une des plus élevées, sinon la plus élevée du monde.

Vous l’avez évoqué, il se trouve qu’une partie des huiles essentielles, pourtant à base de produits naturels, contient un certain nombre de substances cataloguées comme des produits chimiques et non comme des produits agricoles.

Le ministère de l’agriculture a déjà engagé plusieurs actions en faveur de la filière. Ainsi, en 2008, le pré-enregistrement a été mis en place grâce aux aides de FranceAgriMer. Cet établissement a également financé des actions et des études visant à aider les distilleries au cours des différentes étapes d’enregistrement. En 2013, au total, 160 000 euros ont été affectés à ce secteur.

Sur ce sujet, il nous faut maintenant développer une stratégie à l’échelon européen. En effet, indépendamment des coûts supplémentaires que cela entraîne, les conséquences des directives actuelles en termes d’étiquetage sont importantes. Vous l’avez soulevé, pour l’huile essentielle et les parfums de lavande, le nouvel étiquetage imposé serait dissuasif et serait proche de celui de l’eau de Javel ! C’est un véritable problème.

À la suite de ma rencontre avec des représentants de la filière, j’ai décidé la mise en place d’une mission au sein de la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt de la région PACA, pour accompagner les responsables de la filière dans la préparation de leurs analyses et démarches visant à plaider auprès de la Commission européenne un traitement spécifique.

En effet, parce que les huiles essentielles contiennent des substances chimiques, il faut veiller à informer les consommateurs. En revanche, il s’agit de produits chimiques traditionnels qui ne peuvent être assimilés à des produits chimiques basiques, car ils n’appellent pas la même utilisation. La lavande est un produit naturel, reconnu depuis des siècles.

Il faut donc obtenir une dérogation pour ces huiles essentielles naturelles, que tout le monde connaît et utilise, afin que les étiquetages de la lavande et des parfums issus de la distillerie ne soient ceux d’un produit chimique.

La mission est créée et a commencé à travailler. Dès que nous aurons défini un cadre juridique, nous plaiderons la défense de la lavande auprès de la Commission européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Teston

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

Je rappelle que la lavande et le lavandin, plus généralement les plantes aromatiques et médicinales, sont des productions particulièrement adaptées aux montagnes sèches et méditerranéennes. Elles peuvent donc difficilement être remplacées.

Je salue par ailleurs l’accompagnement financier apporté par l’État aux distilleries pour le pré-enregistrement et l’enregistrement, qui sont des démarches imposées par le règlement européen REACH.

Enfin, j’approuve la volonté que vous venez d’exprimer de plaider auprès de la Commission européenne en faveur d’un règlement spécifique pour les huiles essentielles. En effet, vous l’avez souligné, il s’agit de produits naturels composés certes d’éléments chimiques, mais qui sont depuis longtemps, et sans doute à raison, reconnus comme ne présentant aucun danger réel pour les consommateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Louis Nègre, auteur de la question n° 612, adressée à M. le ministre de l'économie et des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

Monsieur le ministre, j’ai posé cette question orale sans débat voilà plusieurs semaines, ainsi qu’en atteste le Journal officiel du Sénat du 24 octobre 2013. Elle porte sur les conditions de recours aux marchés globaux de conception, de réalisation et d’exploitation ou de maintenance en vue de la réalisation de travaux relevant de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d’ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d’œuvre privée.

Plus précisément, je souhaite connaître l’interprétation qu’il convient de retenir des dispositions du deuxième alinéa du paragraphe II de l’article 73 du code des marchés publics issu du décret n° 2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés publics et modifié par le décret n° 2011-1000 du 25 août 2011 aux termes duquel « si un tel marché [qui associe l’exploitation ou la maintenance à la conception et à la réalisation de prestations afin de remplir des objectifs chiffrés de performance] comprend la réalisation de travaux qui relèvent de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985, l’entrepreneur ne peut être associé à la conception que pour la réalisation d’engagements de performance énergétique dans un ou des bâtiments existants, ou pour des motifs d’ordre technique tels que définis à l’article 37. ».

Cette disposition autorise-t-elle le recours à ce type de marchés pour la conception, la construction et l’exploitation ou la maintenance d’ouvrages de bâtiments neufs ou d’ouvrages d’infrastructures neufs ou existants relevant de la loi précitée du 12 juillet 1985, dès lors qu’il existe seulement des « motifs d’ordre technique rendant nécessaire l’association de l’entrepreneur aux études de l’ouvrage » visés à l’article 37 du même code, indépendamment de tout engagement de performance énergétique ?

Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, de toutes les précisions que vous voudrez bien m’apporter sur ce sujet quelque peu technique et complexe.

Debut de section - Permalien
Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt

Monsieur le sénateur, veuillez tout d’abord excuser l’absence de M. Pierre Moscovici, qui ne peut malheureusement pas être présent aujourd’hui.

Je vais tâcher de répondre aussi clairement que possible à cette question très technique, posée par un spécialiste, et qui comprenait en outre des références précises au code des marchés publics.

Le marché de conception, de réalisation et d’exploitation ou de maintenance est régi par le code précité, dont l’article 73 introduit une dérogation au principe de la division du marché en plusieurs lots, ou allotissement, puisqu’il permet de confier plusieurs missions à un même opérateur.

Le recours à des contrats globaux doit permettre de remplir des objectifs chiffrés de performance définis, notamment en termes de niveau d’activité, de qualité de service, d’efficacité énergétique ou d’incidence écologique.

Si un projet doit tenir compte de l’ensemble de ces éléments, il peut être mené par un opérateur unique.

La loi relative à la maîtrise d’ouvrage publique, dite « loi MPO », prévoit les conditions de recours aux contrats globaux qui dérogent au principe de base de séparation de la mission de maître d’œuvre ou d’architecte – la conception – de celle d’entrepreneur – la réalisation. Lorsque les marchés portent sur des travaux relevant de la loi MOP et qu’ils associent la conception et la réalisation, deux cas distincts peuvent être rencontrés.

Premièrement, en cas de travaux sur des bâtiments existants, le marché ne peut concerner que des engagements de performance énergétique définis contractuellement.

Deuxièmement, en cas de construction neuve, la conception-réalisation doit être justifiée par des motifs techniques particuliers, notamment des contraintes de spécificités techniques de construction et d’utilisation du bâtiment. C’est pourquoi, à titre d’exemple, nous avons fait voter le recours à un tel contrat global pour le marché de l’exposition universelle de Milan 2015, pour laquelle il existait de fortes contraintes techniques pour la réalisation du pavillon France, notamment en matière de performance énergétique, et des objectifs multiples en termes de service, de présence et de publicité.

Telles sont, monsieur le sénateur, les raisons qui peuvent justifier une dérogation au principe de l’allotissement des marchés publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui éclaircit ce dossier délicat et complexe, sur lequel nous avions besoin de précisions pour avancer.

Je me suis toutefois aperçu que cette procédure avait déjà été utilisée récemment par une communauté d’agglomération du Sud de la France, en vue de concevoir la réhabilitation et la maintenance d’une piscine pour atteindre des objectifs de performance énergétique. Il a également été fait recours à cette procédure dans plusieurs autres cas, par exemple la réalisation d’une chaufferie au bois et d’un réseau de chaleur.

Votre réponse vient confirmer que des motifs d’ordre technique peuvent justifier cette dérogation.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. André Reichardt, auteur de la question n° 648, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Monsieur le ministre, la mise en place d’un marché unique sans harmonisation sociale européenne révèle jour après jour ses effets désastreux, notamment à travers des pratiques de dumping social qui mettent à mal nos entreprises et nos emplois, tout particulièrement dans les régions frontalières comme l’Alsace.

Le 15 octobre 2013, la réunion des ministres européens du travail portant sur la directive Détachement avait ainsi permis de mettre en évidence des abus importants quant à l’utilisation de la main-d’œuvre détachée en matière de coût du travail et de réglementation sociale, mais elle s’était soldée par une absence de décisions. Fort heureusement, les ministres des Vingt-Huit se sont enfin mis d’accord, lundi 9 décembre 2013, pour réguler le détachement des travailleurs d’un pays à l’autre de l’Union européenne. Il a notamment été décidé que chaque gouvernement sera libre de définir les mesures de contrôle qu’il jugera nécessaires pour combattre les fraudes.

C’est ainsi, monsieur le ministre, que vous avez signé voilà à peine deux semaines une instruction avec les ministres chargés des transports, de la concurrence, des douanes, du redressement productif et de l’intérieur pour renforcer l’action de contrôle contre le dumping social dans les transports routiers. Je me félicite de cette action.

Toutefois, il est tout aussi urgent d’agir en faveur d’autres secteurs, très directement concernés, comme le bâtiment ou la production de légumes, dont les acteurs ne cessent de nous interpeller.

Ainsi, pouvez-vous nous dire quelles mesures le Gouvernement compte prendre à l’égard de ces derniers ?

Outre la nécessité de donner des moyens aux autorités de contrôle nationales et de mettre fin au détournement de la réglementation sociale européenne via une procédure harmonisée, il est à mon sens absolument nécessaire, si l’on veut lutter contre le dumping social en faisant preuve d’une véritable convergence européenne, d’une part, de mettre en place un salaire minimal européen – vaste programme s’il en est ! –, d’autre part, de prévoir des pratiques sociales harmonisées dans le marché unique européen.

Les acteurs des différents secteurs concernés s’inquiètent naturellement des mesures qui seront prises à cet égard et ils souhaiteraient obtenir des précisions sur la stratégie du Gouvernement sur cette question, tout particulièrement sur la politique que va mener la France auprès de l’Union européenne.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Monsieur le sénateur, votre question, qui est en fait double, rejoint une même préoccupation, celle de la lutte contre le dumping social dans l’espace européen.

Ce dernier doit être un espace de progrès social, et non de régression sociale, surtout lorsqu’il est question de la violation des règles qui sont censées s’imposer à tous, quel que soit le secteur concerné. Nous ne pouvons tolérer cette exploitation scandaleuse de salariés, quand bien même viendraient-ils d’autres pays européens que le nôtre, exploitation dont les conséquences en termes de concurrence déloyale peuvent de surcroît être destructrices pour notre tissu économique, que ce soit dans les domaines du transport, du bâtiment, de l’agroalimentaire ou de la production agricole, en l’occurrence légumière.

Pour vous répondre, je me permettrai de développer deux grands sujets, mais très rapidement, afin de rester dans les limites du temps qui m’est imparti.

Nous entendons tout d’abord lutter contre les abus considérables commis en matière de détachement de travailleurs européens en France. Comme vous le savez, monsieur le sénateur, de nombreux travailleurs français sont aussi détachés à l’étranger, et il me semble que vous êtes tout autant que nous attaché à la libre circulation, à condition qu’elle s’exerce dans le respect des règles qui ont été fixées par l’Union européenne. Or tel n’est pas le cas aujourd’hui.

Après de nombreuses années, nous avons enfin pu obtenir, le 9 décembre dernier, un accord largement majoritaire de l’ensemble des États européens. Cet accord permettra à chaque pays de mettre en place des mesures de contrôle. En effet, les règles régissant le travail diffèrent d’un pays à l’autre, de même que les documents nécessaires pour justifier du respect de ces règles. Chaque État pourra donc exiger une liste ouverte de documents permettant de vérifier le respect du droit du travail.

Nous avons aussi le devoir de rendre solidairement responsables le donneur d’ordre et les différentes entreprises sous-traitantes concernées, même si cela vaut peut-être moins dans le domaine légumier, où l’abus est parfois simplement dû au lien entre une exploitation et un pourvoyeur de main-d’œuvre. Toutefois, encore faut-il que la règle existe au plan européen et, en l’occurrence, cet accord a permis de la renforcer.

Viennent ensuite les décisions nationales. Dans quelques semaines, mesdames, messieurs les sénateurs, vous aurez à examiner une proposition de loi qui vise à intégrer dans le droit français les conséquences de l’accord européen, ce qui nous permettra de disposer de l’outil juridique nécessaire pour poursuivre un certain nombre de situations illégales.

Enfin – vous l’avez remarqué à propos du transport routier, monsieur le sénateur, mais je le fais dans beaucoup d’autres domaines –, j’ai demandé à mes services, en collaboration avec ceux de l’URSSAF et du ministère de l’intérieur, de renforcer les contrôles effectifs sur le terrain. Ces contrôles, qui sont à la fois dissuasifs et curatifs, devraient permettre de faire utilement reculer les abus dans ce domaine.

Au-delà, vous avez raison d’inscrire votre question dans le champ plus large d’une Europe sociale, une Europe qui contribue à élever le socle des protections plutôt qu’à l’abaisser vers le niveau le plus bas. C’est un enjeu décisif et, grâce à la coopération entre l’Allemagne et la France, nous avons justement pu relancer une vraie Europe sociale. Étant un élu d’Alsace, vous êtes bien placé pour savoir que la perspective de la mise en place d’un SMIC en Allemagne est considérée comme un véritable progrès, non seulement pour les travailleurs allemands, mais aussi pour de nombreux secteurs en France qui pâtissent aujourd’hui de l’absence de salaire minimal.

Ce retour de l’Europe sociale me paraît extrêmement bénéfique. Nous devons maintenant aller plus loin, passer aux mesures concrètes et faire en sorte qu’un socle de droits minimaux s’applique véritablement sur l’ensemble du territoire européen. Voilà, monsieur le sénateur, une belle bataille que nous pouvons mener ensemble !

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et me permettrai deux observations.

Tout d’abord, s’agissant des contrôles, tout particulièrement dans la région que vous avez bien voulu citer, il est indispensable de développer la même énergie dans le secteur du bâtiment, dans lequel les entreprises locales éprouvent de nombreuses difficultés du fait de ces pratiques. Je n’oublie pas non plus les producteurs de légumes, que j’ai également évoqués.

Pour ce qui concerne l’harmonisation sociale, vous avez raison d’indiquer qu’il convient d’aller vers une élévation du socle de prestations qui devra obligatoirement se traduire par une modification, à terme, de la directive européenne pertinente. Il faudrait désormais que s’appliquent, non seulement les règles de droit du travail du pays d’accueil, mais également les règles sociales. En d’autres termes, il faudrait aussi que les travailleurs détachés soient amenés, le cas échéant, à participer à une contribution sociale dans le pays d’accueil, ce qui permettrait de régler une grande partie des difficultés actuellement liées à ce dumping social.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Roland Courteau, auteur de la question n° 660, transmise à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Monsieur le ministre, ma question, qui rejoint celle qui vient d’être posée, fait suite à l’intervention grandissante, sur le territoire français, en particulier en Languedoc-Roussillon, d’entreprises établies dans un autre État membre de l’Union européenne, lesquelles agissent en dehors du cadre réglementaire français, ce qui leur permet ainsi d’obtenir des marchés à des prix que les entreprises établies en France ne peuvent soutenir.

Par ailleurs, comme vous le savez, la pratique des détachements est devenue un problème majeur. Et, sous couvert de libre circulation, un véritable dumping social se développe.

Certes, il n’est pas question de remettre en cause la libre prestation de services dans le cadre du marché unique européen, dès lors que celle-ci s’exerce en conformité avec les règles légales.

Mais force est de le constater, la loi sur le détachement de salariés est facilement contournée par les entreprises à bas coûts qui mettent à profit les fossés sociaux et fiscaux existant entre les pays membres.

J’observe que les régimes de prestation de services et de détachement sont détournés pour conduire à de véritables filières de mise à disposition de personnel, sans respect des règles de droit du travail et sans que soient assumées les charges qui s’appliquent aux entreprises françaises.

Ainsi, par exemple, sont proposés par courrier des services de recrutement d’ouvriers polonais en contrat de détachement dont les taux horaires se situent entre 14, 50 euros et 17, 50 euros, salaire, charges sociales, indemnités de congés payés compris… Il faut comparer ces montants avec le taux horaire moyen en France, plusieurs fois supérieur.

Je veux signaler également qu’au sein des dix-sept pays membres de la zone euro, le coût du travail horaire, calculé en additionnant salaires et traitements aux charges sociales, va de 8, 10 euros en Estonie à 39, 30 euros en Belgique.

Enfin, il n’est pas acceptable qu’une entreprise étrangère ne respecte pas l’ensemble des droits sociaux et fiscaux des pays où s’effectue le travail. De plus, cette impunité – quasiment garantie durant des années –, dont ont bénéficié ces dérives est vécue comme une très grande injustice et une concurrence déloyale par ceux qui, en France, s’efforcent de respecter les règles.

Bref, de nouveaux garde-fous contre le dumping social sont absolument nécessaires. Il n’est pas moins indispensable d’établir toutes les responsabilités dès lors que des agissements frauduleux sont constatés.

Le 9 décembre dernier, monsieur le ministre, vous avez obtenu de vos collègues européens un accord sur un renforcement des contrôles afin de lutter contre les dérives relatives au statut des travailleurs détachés, notamment en responsabilisant les sous-traitants.

J’apprécie d’autant plus votre action que le phénomène que je dénonce est particulièrement dévastateur pour les entreprises françaises du bâtiment, et donc pour l’emploi. La région Languedoc-Roussillon souffre particulièrement de ces dérives : 4 200 emplois ont été perdus entre 2007 et 2012 dans ce secteur !

Pouvez-vous, à la suite de l’accord obtenu à l’échelon européen, me faire connaître les mesures que vous entendez prendre pour mettre enfin un terme à de telles pratiques.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Monsieur le sénateur, je vais placer ma réponse dans le prolongement de celle que je viens de faire à M. Reichardt.

Dans le secteur du bâtiment, puisque c’est principalement celui sur lequel vous m’interrogez, les dérives, manifestes et massives, s’appuient sur des mécanismes extrêmement sophistiqués : s’il existe bien un donneur d’ordre, ce dernier va s’adresser à un sous-traitant, qui s’adressera à un autre sous-traitant d’une nationalité différente, lequel s’adressera à son tour à un autre sous-traitant, d’une nationalité encore différente…

Afin de lutter efficacement contre ces dérives et de rendre le donneur d’ordre responsable de ce qui se passe sur son chantier, il fallait mettre en place, sur l’ensemble du territoire européen, une obligation permettant d’engager la responsabilité des donneurs d’ordre vis-à-vis de leurs sous-traitants.

C’est là le cœur de la décision du 9 décembre dernier qui, je le rappelle, n’a pas été prise à l’unanimité. Certains pays sont restés sur cette position extrêmement dogmatique – je pense en particulier à la Grande-Bretagne – selon laquelle le laisser-faire vaut toujours mieux que la réglementation. Non ! À un moment donné, la réglementation est nécessaire pour permettre d’éviter ces dérives extrêmement préjudiciables aux salariés comme au tissu économique lui-même.

Cette responsabilité solidaire va donc être instaurée sur l’ensemble du territoire européen. Sans attendre, vous aurez, je le répète, mesdames, messieurs les sénateurs, à débattre dans les semaines qui viennent de la mise en place de cette responsabilité dans tous les secteurs, notamment celui du bâtiment où cela est particulièrement nécessaire.

La législation française sera en conformité avec la future directive avant même que celle-ci ne soit définitivement adoptée par le Parlement européen ! Il s’agit d’un progrès considérable, qui peut être mis en place extrêmement rapidement.

Je terminerai, monsieur le sénateur, en disant que la situation que vous décrivez en Languedoc-Roussillon existe aussi dans de nombreuses autres régions du territoire français. Nous le constatons, la proximité des frontières peut faciliter l’apparition de mécanismes délictueux.

Toutefois, je voudrais que chacun prenne ses responsabilités. En effet, si certaines dérives ont été dénoncées sur le territoire national, c’est aussi parce que des entreprises françaises les ont acceptées. Les mêmes qui vont se plaindre, à juste titre, d’abus ayant des conséquences catastrophiques sur l’emploi en France, sont aussi celles qui répondront à ces petites annonces ou petits tracts que vous avez décrits et qui ne sont rien d’autre que la description d’un délit, personne n’ignorant qu’il est impossible de payer un ouvrier – fût-il polonais – au tarif horaire que vous avez annoncé en respectant le droit du travail. Chacun doit donc se sentir responsable, même les entreprises.

Pour ma part, je suis prêt à accompagner, y compris à travers de meilleurs contrôles, la lutte contre ces dérives et cette concurrence tout à fait déloyale, mais, je le répète, je demande à chacun de prendre ses responsabilités. Je sais qu’au Sénat, vous serez unanimement favorables à cet appel à la responsabilité. Nous aurons les moyens juridiques, nous aurons les contrôles, nous aurons les sanctions, mais il faut aussi que chacun soit droit dans ses bottes !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et de votre action face à ce problème majeur.

Nous ne pouvons tolérer ni les conditions de travail et d’hébergement indignes réservées aux travailleurs détachés, nouvelles figures de l’esclavage moderne, ni les conséquences de cette concurrence déloyale sur la compétitivité de nos entreprises.

Je sais que la croissance et l’emploi sont une priorité pour le Gouvernement, au plan tant national qu’européen. Toutefois, cette croissance n’a de sens que si elle bénéficie à tous, ce qui implique de lutter contre le dumping social et le travail low cost.

L’Europe, en ce domaine, doit faire plus. Ce que les Européens attendent, c’est une Europe solidaire, c’est une croissance solidaire ! Tel est le sens de votre action ; je vous en félicite et vous en remercie, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à quatorze heures trente.