Séance en hémicycle du 26 novembre 2015 à 15h00

Résumé de la séance

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  • daech

La séance

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La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3, Public Sénat et le site internet du Sénat.

Je vous demande par ailleurs de rester attentif à votre temps de parole. Treize questions sont à l’ordre du jour : je compte sur la solidarité et la concision de chacun !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Louis Nègre, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, le terrorisme islamiste a causé, le 13 novembre dernier, un massacre sans précédent dans notre pays. C’est la France, pour ce qu’elle est, pour son mode de vie, pour son goût pour la liberté et pour sa jeunesse, qui a été attaquée.

Parmi les islamistes qui ont participé au massacre du Bataclan, il y avait Samy Amimour, jeune Français originaire de Drancy et ancien chauffeur de bus à la RATP. Après un premier départ raté pour le Yémen, il avait été mis en examen, en 2012, et placé sous contrôle judiciaire. Ses papiers lui avaient été retirés ; il semblerait néanmoins qu’il ait pu en obtenir à nouveau. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous éclairer sur ce point précis ?

Par ailleurs – nouvelle faille –, à l’heure des attaques, cela faisait plus de deux ans qu’il ne s’était pas soumis au contrôle strict auquel il était pourtant astreint. Il était parti en Syrie et, malheureusement, il a pu en revenir sans aucune difficulté pour commettre le massacre du 13 novembre à Paris. Comment tout cela a-t-il été possible ?

Monsieur le Premier ministre, comment expliquez-vous de tels dysfonctionnements dans les services de l’État ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls

Monsieur le sénateur, toutes les questions sont légitimes, qu’elles soient posées par les observateurs et commentateurs, par la représentation nationale…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, Premier ministre

… ou, surtout, par les familles des victimes. Tous les Français, ces familles les premières, nous interrogent chaque fois que survient un événement de ce type. Ce n’est pas, malheureusement, la première fois.

Comme beaucoup d’entre vous, sans doute, j’ai assisté à des obsèques, ce matin, en compagnie de parlementaires de Paris ; le fils d’amis avait été tué sur la terrasse d’un café parisien. L’émotion, la dignité, l’incompréhension et la colère y dominaient ; tels sont les sentiments de nos compatriotes.

Aujourd’hui – je vous réponds le plus franchement possible, monsieur le sénateur –, l’action du Gouvernement est tournée résolument vers un seul but : en finir avec Daech.

Cela doit se faire, tout d’abord, en Syrie et en Irak ; le Parlement en discutait hier et Laurent Fabius a présenté ici même la position du Gouvernement. Je veux d’ailleurs saluer le vote plus que large du Sénat, comme de l’Assemblée nationale, en faveur de la poursuite de notre intervention en Syrie, car il représente un signe important.

Le second volet de notre action est la traque des terroristes, en France, mais aussi par une coopération très étroite avec les autres pays européens, notamment la Belgique. Nous avons la volonté très forte de développer encore davantage cette coopération dans le domaine tant de la police que du renseignement. Bernard Cazeneuve a pu rendre compte ici même, la semaine dernière, des avancées qui doivent encore être concrétisées par le Conseil Justice et affaires intérieures dans plusieurs domaines : le PNR – le passenger name record –, le contrôle aux frontières et la lutte acharnée contre le trafic d’armes.

Je veux en outre saluer l’ensemble des initiatives du Président de la République, qui rencontre ce soir le président Poutine à Moscou. Ces initiatives ont pour objectif non seulement de créer cette coalition internationale, mais aussi d’accroître les moyens de lutte contre le terrorisme.

Par ailleurs, en ces moments, vous n’entendrez de ma part aucune parole qui puisse mettre en cause l’action des forces de l’ordre – la police comme la gendarmerie –, qui se sont comportées d’une manière tout à fait extraordinaire au Bataclan ou, voilà quelques jours, à Saint-Denis.

Je ne mettrai pas en cause non plus les services de renseignement, qui sont engagés – les Français le savent – dans une tâche extrêmement difficile. En effet, nous faisons face depuis des mois à près de 1 800 individus déterminés à nous faire la guerre. Et je ne compte que les Français ou les résidents en France, et non ceux qui frappent ailleurs en Europe ou en Afrique du Nord.

Ce phénomène est inédit : nous devons combattre une hydre à deux têtes, qui sévit tant à l’extérieur – en Syrie et en Irak, mais aussi en Libye, ne l’oublions pas – que sur notre territoire. Ces individus sont déterminés et n’ont aucun sens de la vie : ils veulent frapper les Français, notre jeunesse, notre art de vivre et notre culture. Ils nous font la guerre. C’est pourquoi nous la leur faisons.

Toutes les questions qui ont été posées, parmi lesquelles les vôtres, monsieur le sénateur, trouveront sans nul doute une réponse dans le travail que le Parlement sera amené à faire ; c’est à lui d’en décider. Par ailleurs, M. François Molins, procureur de la République de Paris, rend régulièrement compte des avancées de l’enquête.

Dès lors, avant de parler de failles ou d’erreurs, attendons de connaître tous les éléments. À cet égard, je vous ai trouvé bien trop catégorique, monsieur le sénateur.

Aujourd’hui, je vous le dis clairement, la tâche du Gouvernement et de l’État est de rendre coup pour coup, de répondre à l’attaque que nous avons connue, d’écraser Daech et de mettre hors d’état de nuire les terroristes. Pour autant, je n’ai cessé de dire depuis le mois de janvier que nous courions un risque, et la vérité oblige à dire aux Français que ce risque est durable. En effet, quand on mène une guerre, il faut s’attendre à ce que l’ennemi cherche de nouveau à nous atteindre.

Je vous adresse donc, mesdames, messieurs les sénateurs, un appel au rassemblement, à la vigilance, au sérieux, au sang-froid et à la dignité. Au-delà, je l’adresse aux Français, qui doivent pouvoir compter non seulement sur la détermination du Gouvernement, mais aussi sur l’engagement de la représentation nationale dans ce qui est une guerre. Cette guerre, ensemble, nous la gagnerons !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

Monsieur le Premier ministre, nous serons au moins d’accord sur un point : la lutte contre Daech.

Néanmoins, la représentation nationale est en droit de demander au Premier ministre pourquoi un individu qui était fiché et qui, justement, se moquait sur internet des « contrôles passoires » a pu passer à travers les mailles du filet.

Certes, nous approuvons votre appel au rassemblement. Toutefois, si un nouvel acte terroriste a lieu demain matin, que dirons-nous aux parents des victimes s’ils déposent plainte ?

Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Nègre

M. Louis Nègre. Ce n’est pas une nouvelle Constitution qu’il faut : ce sont des actes et des résultats.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Guillaume Arnell, pour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Voilà deux jours, alors que le Président de la République se trouvait à la Maison-Blanche, l’armée turque abattait un chasseur bombardier russe en vol au motif qu’il survolait l’espace aérien turc pour se rendre en Syrie. La destruction de cet appareil constitue incontestablement un précédent. Elle officialise en outre les tensions qu’alimentaient déjà des désaccords entre les deux pays quant à l’analyse et à la gestion du conflit en Syrie.

Dans le même temps, la France est au cœur d’une intense séquence diplomatique visant à transcender les divergences entre les uns et les autres pour constituer une coalition forte et unie contre Daech. Le chef de l’État a successivement rencontré David Cameron, Barack Obama, Angela Merkel et Matteo Renzi. Il se trouve en ce moment même au Kremlin, preuve du rapprochement diplomatique à l’œuvre avec Moscou ; nous nous en félicitons, tant la Russie est incontournable pour combattre Daech et, plus largement, pour trouver une issue à la question syrienne.

À nos yeux, tous les acteurs qui ont pour ennemi Daech et qui comptent dans la région doivent être associés à cette coalition en gestation, y compris le régime syrien en place, mais également l’Iran et la Turquie. Cela semble désormais être aussi la position de la France.

Aussi, monsieur le Premier ministre, où en est-on dans la constitution de la coalition anti-Daech ? Pouvez-vous informer la représentation nationale de l’état des discussions avec nos partenaires ? A-t-on pris contact avec la Turquie ? Nos efforts risquent-ils de se trouver affaiblis par les tensions récentes entre ce pays et la Russie ?

Monsieur le Premier ministre, les divergences bien réelles qui peuvent exister entre États pourront-elles être rapidement surmontées au profit du pragmatisme et du seul objectif prioritaire qui doit nous animer à ce stade, à savoir la destruction de l’État islamique ?

Mme Françoise Laborde applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des anciens combattants et de la mémoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, la France lutte contre Daech. Nous l’avions annoncé, nous le montrons aujourd’hui. Pour autant, la France n’est pas seule.

Le Président de la République avait exprimé son souhait, devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, que soit adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies une résolution, qui devait marquer la détermination de la communauté internationale à lutter contre le terrorisme. C’est chose faite : nous saluons l’adoption, vendredi dernier, à l’unanimité, de la résolution 2249 proposée par la France. Ce texte appelle à l’amplification de la lutte contre Daech et les groupes affiliés à Al-Qaïda.

Il importe à présent, vous avez eu raison de le souligner, que tous les États s’engagent dans ce combat, que ce soit par l’action militaire, par la recherche de solutions politiques au conflit syrien ou par la lutte contre les financements du terrorisme.

À l’échelon européen, la France a invoqué la clause d’assistance mutuelle prévue à l’article 42-7 du traité sur l’Union européenne. Des échanges ont commencé avec des gouvernements européens pour préciser l’appui concret que peuvent nous apporter nos partenaires.

Sur le plan diplomatique, nous devons convaincre les grandes puissances de redoubler d’efforts et de coopérer davantage pour détruire Daech.

Le Premier ministre britannique, David Cameron, était à Paris lundi. Il présente aujourd’hui devant la Chambre des communes une stratégie de lutte contre Daech, dont nous espérons qu’elle recevra un large soutien.

Le Président de la République s’est rendu mardi à Washington, accompagné du ministre des affaires étrangères et du ministre de la défense, pour rencontrer le président Obama. Il se trouve aujourd’hui à Moscou pour discuter avec Vladimir Poutine. Il s’est également entretenu hier soir avec Angela Merkel, qui a promis que l’Allemagne s’engagerait rapidement aux côtés de la France dans la lutte contre Daech. Des discussions auront également lieu dimanche prochain à Paris avec le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, et avec le président chinois.

Nous devons poursuivre nos efforts pour une résolution de la crise syrienne. La solution passe par une transition politique rapide et effective, permettant la mise en place de forces syriennes unies contre Daech. Un processus est engagé à Vienne sous l’égide des Nations unies. Là aussi, la France est une force de proposition. Nous sommes parvenus à rallier les Russes et les Iraniens à ce processus, qu’il faut maintenant accélérer.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Guillaume Arnell, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Je vous remercie de vos explications, monsieur le secrétaire d’État. Je reste malgré tout sur ma faim.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Ma question portait avant tout sur la Turquie. Qu’en est-il donc de ce pays ? Il faut bien se rendre à l’évidence : cette large coalition se trouvera fragilisée si ce partenaire n’en est pas partie intégrante.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Madame la ministre, la France est en deuil : elle pleure les victimes des attentats du 13 novembre dernier. En cette période d’épreuves difficiles, nous avons le devoir, plus que jamais, de renforcer la cohésion nationale et, pour cela, de mettre ardemment en œuvre l’une des valeurs de notre devise républicaine : la fraternité.

Une étude de 2012 mettait déjà en exergue un constat très sombre : une partie de notre jeunesse est oubliée. Quelque 15 % des jeunes ne sont ni en études, ni en formation, ni en emploi. Ils sont invisibles. Un peu plus d’un million de jeunes se trouvent aujourd’hui dans une situation de très grande pauvreté.

Ma question porte plus particulièrement sur le dispositif Garantie jeunes, qui s’adresse à ces jeunes déscolarisés, sans emploi ni formation et souvent très isolés, ayant perdu toute relation sociale, aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural.

La Garantie jeunes est un contrat « donnant, donnant » : pendant un an, en contrepartie d’une aide financière équivalente au revenu de solidarité active – le RSA –, le jeune s’engage à suivre rigoureusement la démarche organisée par une mission locale.

Ce contrat repose sur une notion de confiance et de responsabilité. Il s’agit de redonner au jeune de l’estime de soi, de lui réapprendre à vivre dans un collectif, de l’aider à devenir autonome et capable d’initiative.

Le programme commence par un accompagnement collectif intensif de six semaines, pendant lequel le jeune doit se rendre chaque jour de la semaine et toute la journée à diverses activités. De l’avis de tous, les effets sont très positifs.

Madame la ministre, mes interrogations sont de deux ordres.

Premièrement, quelles dispositions comptez-vous prendre pour que l’ensemble des acteurs associatifs et sociaux connaissent mieux ce dispositif et puissent ainsi mieux repérer les jeunes concernés et les inciter à entrer dans cette démarche ? Par ailleurs, quelles mesures énergiques comptez-vous adopter pour sensibiliser fortement les entreprises et faire en sorte qu’elles jouent le jeu et accueillent les jeunes durant les périodes, prévues dans le contrat, de mise en situation en milieu professionnel ?

Deuxièmement, ce dispositif concernait 28 000 jeunes sur 72 territoires en septembre 2015. Me confirmez-vous l’engagement du Gouvernement de respecter l’objectif annoncé par le Président de la République, à savoir 100 000 bénéficiaires de la Garantie jeunes en 2017.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – M. Martial Bourquin applaudit également.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri

Madame la sénatrice, il me paraît tout d’abord important d’expliciter la situation à laquelle nous sommes confrontés en matière de chômage. Vous l’avez souligné, la croissance démographique de notre pays constitue un défi pour notre économie : certes, nous comptabilisons tous les ans près de 700 000 départs en retraite, mais il faut aussi compter avec une moyenne de 850 000 entrées sur le marché du travail. La difficulté, c’est que le chômage concerne des personnes peu ou pas qualifiées.

Le dispositif Garantie jeunes accompagne d’autres démarches, comme la relance de l’apprentissage ou les emplois d’avenir. Il est à la fois innovant et porteur de résultats. En effet, loin d’être un ensemble de boîtes disposées les unes à côté des autres, il a été conçu à partir des besoins des bénéficiaires. C’est bien là ce qui fait toute la réussite de ce dispositif !

À la fin du mois de septembre 2015, près de 28 000 jeunes en bénéficiaient. D’ici à la fin de l’année, ce contingent sera porté à 45 000 jeunes, et, l’année prochaine, ils seront 60 000 de plus ! Comme le Président de la République l’a rappelé lors de la conférence sociale, la cible est bien fixée à 100 000 jeunes entrant dans le dispositif chaque année, et ce dès 2017. À cette fin, la Garantie jeunes sera étendue à tous les territoires volontaires dès le début de 2016.

Concrètement, un appel à candidatures a été adressé aux préfets au début de ce mois et un courrier a été envoyé à l’ensemble des partenaires – conseils régionaux, conseils départementaux. Je me donne pour objectif que la France entière soit couverte en 2017, et le budget de mon ministère, avec un engagement budgétaire de 123 millions d’euros supplémentaires, porte cette ambition.

Je travaille avec Patrick Kanner pour organiser cette importante montée en charge, tout en respectant l’exigence de ce dispositif. J’entends par là que 95 % des jeunes qui en bénéficient ne sont pas en situation de formation, d’emploi ou de poursuite d’études supérieures et présentent des vulnérabilités les exposant à un risque d’exclusion sociale.

Debut de section - Permalien
Myriam El Khomri

C’est bien sûr un écosystème complet que nous bâtissons, au travers de partenariats ou de conventions avec les entreprises, les missions locales, le service public de l’emploi et les collectivités territoriales.

Il s’agit de notre avenir commun, mesdames, messieurs les sénateurs. C’est pourquoi nous sommes particulièrement mobilisés sur le sujet !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Mme Aline Archimbaud . Je vous remercie d’avoir tenu les objectifs fixés, madame la ministre, et d’affirmer ici votre détermination à continuer de les tenir. À mes yeux, ce sujet porte, pour nous tous et pour la République, une exigence majeure.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Christian Favier, pour le groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

« Nous devons à nos enfants plus qu’un monde libéré du terrorisme » vient de déclarer, avec raison, le Président de la République. Plus qu’une phrase, c’est un engagement, auquel nous souscrivons. Il nous faut alors passer aux actes, en particulier en faveur de notre jeunesse, et l’aider à se construire un autre avenir.

Depuis 2012, des engagements ont été pris, des annonces ont été faites. Les attentes sont fortes pour voir toutes ces promesses se réaliser enfin.

Aussi, il est urgent de nous engager réellement aux côtés de toute notre jeunesse, en nous délivrant du carcan du pacte de stabilité et de croissance, qui brise son quotidien et ses rêves.

Associé au « pacte de sécurité », il nous faut engager un « pacte de solidarité » n’oubliant personne. Il s’agira d’investir dans les services publics de l’éducation, mais aussi dans la formation professionnelle et la défense de l’emploi. Il nous faut tout autant investir dans les politiques publiques d’accès aux transports, au logement, aux soins, à la culture, à toutes les découvertes du monde.

Il est urgent de développer la citoyenneté de tous, de renforcer l’esprit critique, l’engagement de chacun dans une République laïque et fraternelle, où tous seront respectés.

On le sait, la jeunesse a été au premier rang des victimes frappées par les actes barbares que nous venons de subir. Elle doit réellement devenir notre priorité d’aujourd’hui et de demain !

Aussi, monsieur le Premier ministre, quelles politiques publiques comptez-vous mettre en œuvre pour que toute la jeunesse, sans aucune discrimination, ni stigmatisation, puisse redonner sens à sa vie, reprendre confiance et renouer, enfin, avec l’espoir d’un avenir meilleur ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls

Vous tenez des propos parfaitement justes, monsieur Favier, lorsque vous évoquez, de manière générale, la nécessité de faire de l’éducation une priorité, de s’engager en faveur de la formation, de donner un avenir à la jeunesse au travers de l’école, de l’accès à l’emploi, de la culture, des loisirs. En un mot, de donner du sens, tout simplement, à la notion d’engagement !

Il existe une demande très forte d’engagement de la part de la jeunesse, cette jeunesse qui, précisément – c’est probablement ce qui motive votre question –, a été visée par les terroristes. Ces derniers s’en sont pris à son mode de vie, à son envie de s’amuser, de partager un spectacle ou un moment de convivialité, à son souhait de pouvoir vivre librement. Le terrorisme s’attaque à la France parce que nous sommes un peuple libre et que la jeunesse française veut vivre dans la liberté, et avec exigence !

Pour vous répondre le plus franchement possible, oui, monsieur le sénateur, bien sûr, il ne faut faire aucun amalgame. Toutefois, j’ai dans la tête les mots d’un jeune garçon, que j’ai rencontré deux jours après les attentats. Il avait reçu une balle dans le bras et avait vu son ami mourir sur la terrasse du restaurant où ils se trouvaient. Il m’a dit : « Arrêtez avec les discours sur les amalgames. Nous, nous n’en faisons pas ! »

Pour ma part, je réitère les propos que j’ai tenus, hier, à l’Assemblée nationale : nous avons des priorités à traiter pour le bien de notre jeunesse, vous avez raison de le souligner, mais ce n’est parce qu’il y aurait des difficultés dans nos quartiers populaires et que notre jeunesse n’aurait pas d’avenir – ce n’est évidemment pas ce que vous avez dit – que l’on pourrait trouver la moindre excuse ou justification aux événements survenus. Ou alors, cela signifierait qu’un jeune en difficulté, ayant connu l’échec scolaire, un jeune d’origine étrangère, de confession ou de culture musulmane, voire ayant été converti – il ne faut pas oublier le poids de l’islamisme et du salafisme dans les quartiers – se radicaliserait automatiquement, du fait de ces difficultés.

Non ! Il faut bien sûr mener une lutte implacable contre la radicalisation, mais, je vous le dis, mesdames, messieurs les sénateurs, j’en ai assez de ceux qui cherchent en permanence des excuses et des explications culturelles ou sociologiques aux événements qui se sont produits !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste, du RDSE, de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls

Bien entendu, notre priorité doit aller à la jeunesse, et c’est la préoccupation du Gouvernement. Toutefois, il ne faut rien excuser, et aucun d’entre nous, ici, ne fait le moindre amalgame !

Dans le même temps, nous estimons qu’il appartient à l’islam de France de se lever et d’affirmer que l’islamisme et le salafisme doivent être combattus

Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls

Donc, oui, monsieur le sénateur, priorité à la jeunesse, mais aussi, aujourd'hui, priorité à cette démarche qui vise à remettre, partout, la République debout !

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Christian Favier, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

J’espère que vos propos ne s’adressaient pas à nous, monsieur le Premier ministre. Il est très clair dans notre esprit qu’il faut combattre le terrorisme et Daech, jusqu’au bout. Sous cet angle, ma question ne concernait évidemment pas les seuls problèmes qui peuvent être rencontrés dans les quartiers populaires.

J’évoquais la jeunesse, toute la jeunesse de France, qui, aujourd'hui, a effectivement besoin d’une politique plus ambitieuse et qui ne se réduise pas à une simple démarche comptable pour reprendre espoir. Nous voulons mobiliser cette jeunesse, certes pour qu’elle participe à la lutte contre le terrorisme, mais aussi pour qu’elle puisse construire son avenir, ici, dans notre pays, et qu’elle puisse défendre les valeurs de la République.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Esther Benbassa et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Michel Boutant, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Les événements tragiques ayant touché la nation le vendredi 13 novembre, puis le mercredi 18 novembre dernier soulèvent, comme lors de chaque attentat, une myriade de questions légitimes, parmi lesquelles des interrogations sur l’efficacité et le bon format de nos services de sécurité.

Malheureusement, des commentaires parfois peu ou mal informés et des mises en cause malveillantes ont pu être entendus au cours des derniers jours. Vous permettrez donc au membre de la délégation parlementaire au renseignement et de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement que je suis, mes chers collègues, de saluer ici le travail de très grande qualité de nos équipes, où qu’elles se trouvent dans le monde.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste, du RDSE et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Le renseignement est un travail exigeant, un travail de patience, que nos équipes pratiquent dans des conditions souvent difficiles, au service de nos concitoyens et de leur intégrité, mais aussi des intérêts fondamentaux de notre pays et de leur protection.

Depuis la déclaration de l’état d’urgence par le Président de la République, plus de 1 600 perquisitions administratives ont été menées, conduisant à 165 interpellations et à la saisie de près de 230 armes. L’efficacité de l’action des forces de l’ordre, illustrée par ces chiffres, découle de la qualité du renseignement que les services ont pu récolter, au niveau tant technique qu’humain.

Ma question, monsieur le Premier ministre, porte précisément sur les 5 000 emplois de policiers et gendarmes qui ont été annoncés. Quelle répartition entre les services est-elle envisagée pour ces nouveaux moyens humains ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls

Monsieur Boutant, le Président de la République et moi-même avons effectivement pris des engagements forts, dans le sens de la poursuite du renforcement des effectifs et moyens matériels de l’ensemble des services participant à la sécurité dans notre pays, et pas seulement de la police et de la gendarmerie.

La question des services de renseignement, que M. Louis Nègre a également évoquée, est évidemment cruciale dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Grâce au travail du Parlement, Assemblée nationale et Sénat, nous avions tiré les enseignements des événements de Toulouse et Montauban : la Direction générale de la sécurité intérieure a été créée et nous avons voulu remettre sur pied un véritable renseignement territorial. Il est effectivement essentiel, dans les moments que nous connaissons, de pouvoir capter les « signaux faibles » dans notre société. C’est le travail des services territoriaux de police et de gendarmerie.

À la suite des attentats du mois de janvier dernier, nous avions déjà décidé de renforcer notre dispositif de lutte contre le terrorisme. D’importantes créations de postes ont été actées : quelque 2 680 entre 2015 et 2017, au bénéfice de nos forces de sécurité – 1 400 postes –, mais aussi de nos services de justice, de défense ou des douanes.

S’y est ajoutée une augmentation des moyens de renseignement, car les policiers ne suffisent pas. Il faut aussi des hackers et des spécialistes des nouvelles technologies de la communication, notamment des réseaux sociaux, qui peuvent faire face aux nouvelles formes prises par les attaques terroristes. Ces créations d’effectifs ont été accompagnées de moyens supplémentaires en investissement et en équipement, à hauteur, je veux le rappeler, de 425 millions d’euros de crédits.

À la suite des attentats du 13 novembre, conformément aux décisions du Président de la République, les services dont je viens de parler, à savoir la police, la gendarmerie, la justice et les douanes, seront encore renforcés de 8 500 nouveaux postes en 2016 et 2017.

Concernant le renforcement de nos forces de sécurité et de justice, le Gouvernement a d’ores et déjà déposé ce matin deux amendements devant votre assemblée. Il en déposera un troisième pour les douanes d’ici à la fin de la semaine.

Nous réunirons tous les quinze jours à Matignon, vous le savez, les présidents des deux assemblées, les présidents des commissions concernées et les présidents des groupes politiques pour donner des informations précises concernant la lutte contre le terrorisme sur le territoire national, ainsi que nos interventions extérieures. En outre, tous les quinze jours, en alternance avec cette réunion, le ministre de l’intérieur rencontrera les responsables des groupes qui suivent plus particulièrement les questions de sécurité. Il pourra donc répondre plus précisément à votre question. Et bien sûr, le Parlement exerce son contrôle sur la mise en œuvre de l’état d’urgence.

Sans entrer dans le détail, ces renforts iront bien sûr en priorité aux forces de sécurité intérieure – police, gendarmerie, sécurité civile –, qui bénéficieront de 5 000 créations de postes sur deux ans et de moyens nouveaux – ce point est tout à fait essentiel – en équipement et en investissement.

La justice, je veux le souligner, bénéficiera de 2 500 postes, ce qui portera à plus de 6 100 le nombre de créations nettes d’emplois depuis 2012. La consolidation du pôle antiterroriste de Paris est pour nous une priorité, comme l’administration pénitentiaire et la lutte contre la radicalisation en prison.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous aurez donc à discuter ces trois amendements dans le cadre des débats sur le projet de loi de finances pour 2016. Je le redis, nous garantirons les moyens nécessaires et adaptés à nos services de renseignement et à nos forces armées. Le Gouvernement devrait déposer deux amendements en ce sens d’ici à la fin de la semaine.

Je sais, monsieur le sénateur, que, en tant que membre de la délégation parlementaire au renseignement, que préside avec efficacité et discrétion M. Jean-Pierre Raffarin, vous serez particulièrement attentif à cette décision et à cet effort. Le Gouvernement associera pleinement le Parlement, notamment la délégation, car nous savons que, sur ces questions, il faut faire front ensemble.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

L’Occident n’a peut-être pas encore tiré toutes les leçons de ses interventions calamiteuses en Irak et en Libye. Nous cultivons, semble-t-il, une véritable obsession consistant à remplacer des régimes autoritaires et dictatures militaires, au mieux par le chaos, au pire par des dictatures religieuses.

Les pays occidentaux et la France en particulier ont très largement diabolisé Bachar el-Assad et son régime, alors que ce dernier a tout de même l’avantage d’être laïc et protecteur de certaines minorités qui nous sont chères. Nous nous sommes en revanche très peu interrogés sur les ambiguïtés – le mot est faible – des agissements et des objectifs de certains pays de la région, comme la Turquie, l’Arabie saoudite ou le Qatar.

Hier, le Sénat a approuvé à l’unanimité la prolongation de l’intervention de nos forces aériennes en Syrie. Toutefois, vous le savez, la victoire sur Daech nécessite une intervention lourde au sol. Sur qui pouvons-nous compter dans cet engagement terrestre ? Nous ne pouvons pas uniquement compter sur un ensemble hétéroclite de groupes rebelles allant des modérés jusqu’aux plus extrémistes des salafistes proches d’Al-Qaïda.

Il reste heureusement les Kurdes, mais leurs ambitions territoriales sont limitées, ainsi que l’armée régulière syrienne, affaiblie, mais soutenue par la Russie et l’Iran, des pays que nous devons aujourd’hui considérer comme des partenaires majeurs dans les solutions militaires et politiques à mettre en œuvre. Ces constats m’amènent à formuler deux questions.

Premièrement, quelles forces armées pourraient intervenir au sol pour reconquérir le territoire occupé par Daech ?

Deuxièmement, quel pourrait être le périmètre de la réconciliation civile en Syrie que M. le ministre des affaires étrangères évoquait hier dans cet hémicycle ?

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls

Monsieur le sénateur, vous avez eu ce débat hier, et je ne doute pas que nous le poursuivrons. M. le Président de la République aura bien sûr l’occasion d’en rendre compte et d’établir un bilan, dont nous espérons tous qu’il sera positif, après ses nombreuses initiatives.

Je veux insister sur ce qu’a rappelé M. le ministre des affaires étrangères ici même, ou sur ce que j’ai développé moi-même à l’Assemblée nationale à l’occasion de ce débat important. La donne a changé, malheureusement, le 13 novembre dernier, avec les attentats de Paris, et depuis la constatation par les Russes, au lendemain des attentats qui nous ont frappés, que l’explosion d’un avion d’une compagnie russe au-dessus du Sinaï était bien due à un attentat, d’ailleurs revendiqué par Daech.

Nous avons toujours adopté une attitude très solidaire, mais en matière de coopération et d’échange d’informations, nous sommes enfin allés plus loin avec les Américains pour nos frappes en Syrie comme en Irak.

Les choses ont changé pour ce qui concerne les Russes, mais laissons le Président de la République et Vladimir Poutine en parler ce soir à Moscou, puisqu’une résolution voulue par la France a été votée à l’unanimité par le Conseil de sécurité des Nations unies. Il faut maintenant des actes. L’objectif du Président de la République est, comme auparavant, de détruire Daech.

La France n’a jamais frappé le régime syrien au cours de ces deux dernières années, particulièrement au cours de ces derniers mois. Nous n’avons fait que frapper Daech depuis un an dans le cadre d’une coalition engagée en Irak, et depuis quelques semaines en Syrie, où nous avons intensifié ces frappes ces derniers jours.

Il faut réunir une coalition sans exclusive, sans réanimer les fractures, déjà bien vivantes, entre chiites et sunnites, car c’est l’une des clefs de compréhension du problème. Il serait extrêmement dommageable que de nous appuyer uniquement sur un axe chiite ou sur un axe Moscou-Bagdad-Téhéran. Ce n’est pas du tout ce que vous proposez, mais ce serait une erreur fondamentale pour la suite. Quant à l’idée, que vous n’avez pas évoquée, de combattre au sol ou de s’allier par exemple au Hezbollah, elle mérite, me semble-t-il, une certaine réflexion…

Il faut que tout le monde clarifie ses objectifs, et sur ce point vous avez parfaitement raison. C’est pourquoi, dans cette coalition, comme c’est le cas en Irak, où les Russes ne sont pas présents, nous obtenons des résultats, même si c’est très difficile et que cela le restera. Des frappes ont lieu et des troupes agissent au sol – les troupes irakiennes, les milices chiites et les valeureux combattants kurdes, qui ont repris certaines villes, coupant ainsi des axes stratégiques entre Mossoul et Raqqa. Il faut continuer et agir de même en Syrie.

Si nous voulons être efficaces, il faut en effet, de la part de l’opposition modérée, des Kurdes, de tous ceux qui s’engageront, mais sans que nous reproduisions les mêmes erreurs qu’en Libye ou en Irak, éviter toute ambiguïté. Autrement dit, tous les pays, y compris la Turquie, doivent dire bien que l’objectif, c’est Daech. La condition sine qua non pour réussir cette guerre est de sortir des ambiguïtés, d’entrer dans une coalition, dans une coordination, avec ce seul objectif : détruire Daech !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste. – Mme Françoise Laborde et M. Michel Mercier applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Gabouty

M. Jean-Marc Gabouty . Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de votre réponse. Effectivement, il faut faire preuve de cohérence entre l’intervention militaire et la solution politique qui suivra, car l’une conditionne l’autre. Bien entendu, toute réconciliation vise à rapprocher des personnes aujourd’hui opposées. Un effort s’impose donc dans ce domaine.

M. Jean-Marie Bockel applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Alain Chatillon, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le Président de la République a indiqué qu’il ne convenait pas de sacrifier le pacte de sécurité au pacte de stabilité.

Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, j’aimerais savoir pourquoi un risque subsisterait de ce côté, puisque, d’après vos services, le coût d’investissement s’élève à 600 millions d’euros par an pour l’année 2016, ce qui représente à l’évidence, selon les analyses détaillées dont nous disposons, près de 0, 06 % du PIB et de 0, 15 % des charges de l’État.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le sénateur, vous avez été bref dans votre question, à juste titre ; je serai bref dans ma réponse.

Rires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

Le Président de la République a parlé fortement des moyens nécessaires pour assumer nos responsabilités dans la lutte contre Daech à l’extérieur et contre le terrorisme à l’intérieur.

Le Premier ministre a redit, aujourd’hui encore, que nous aurions besoin de moyens supplémentaires en plus de ceux qui ont déjà été attribués cette année. Je vous le rappelle, au début de cette année, après les attentats dits « de Charlie Hebdo », nous avons mis en place pour près d’un milliard d’euros de dépenses supplémentaires, entièrement compensés par un certain nombre d’économies.

Il est donc possible et nécessaire de mobiliser les moyens pour plus de policiers, plus de gendarmes, une justice plus efficace et plus protégée, des douaniers et des moyens dans le renseignement, sans pour autant mettre en cause la responsabilité budgétaire que nous devons assumer.

La responsabilité politique, à savoir la lutte contre le terrorisme, n’est pas antinomique de la responsabilité budgétaire dont j’ai aujourd’hui la charge.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

M. Michel Sapin, ministre. C’est la raison pour laquelle, au travers des amendements qui ont été déposés et avec des amendements ultérieurs, je formulerai des propositions devant votre assemblée, au sein de laquelle a lieu en ce moment la discussion du projet de loi de finances, pour faire en sorte que nos objectifs de baisse des déficits et de maîtrise de la dette soient maintenus et réparent ainsi les dégâts causés par votre majorité il n’y a pas si longtemps.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Alain Chatillon, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

M. Alain Chatillon. Monsieur le ministre, vous le savez, nous avons toujours le souci de l’équilibre et de l’équité, mais aussi celui de faire en sorte que les choses se passent bien.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

Aujourd’hui, la dette de l’État atteint plus de 2 000 milliards d’euros, vous le savez comme moi. Nous perdons chaque seconde quelque 2 350 euros, ne l’oubliez pas.

Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

De grâce, supprimons les contraintes que l’on impose à ceux qui créent de l’emploi !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Chatillon

M. Alain Chatillon. Enfin, et je pense que vous serez tous d’accord avec moi, mes chers collègues, il faut que l’État s’applique la même contrainte qu’il nous impose à nous, au sein des collectivités territoriales, à savoir l’équilibre des budgets en fin d’année !

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Michèle André, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des finances et des comptes publics.

Monsieur le ministre, après les terribles événements du 13 novembre dernier, il est de notre devoir de poursuivre la mise en œuvre des mesures destinées à lutter contre le terrorisme, au-delà de celles qui relèvent de l’état d’urgence. Il faut protéger les populations et renforcer nos services de renseignement. Je vous informe que la commission des finances a adopté aux alentours de midi les amendements complétant la mission « Sécurité », adoptée de ce fait à l’unanimité.

Rappelons-nous aussi que l’un des moyens les plus sûrs d’empêcher les terroristes d’agir est de couper leurs sources de financement. Les recettes de Daech, fruits de l’exploitation pétrolière, du rançonnement des populations et du pillage des antiquités, atteindraient 3 milliards de dollars par an. Pour repérer les flux et tarir les sources, une coopération internationale est indispensable, dans laquelle chaque pays doit prendre d’urgence ses responsabilités.

Ainsi, en France, où les liens entre financement du grand banditisme et du terrorisme sont établis, de nombreuses mesures ont déjà été prises ces derniers mois, notamment dans le cadre du plan de lutte contre le financement du terrorisme annoncé en mars dernier.

Parmi ces mesures, qu’il faut aujourd’hui saluer, on peut citer l’abaissement de 3 000 à 1 000 euros du plafond des paiements en espèces, le signalement à TRACFIN – traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins – de tout dépôt ou retrait d’espèces supérieur à 10 000 euros. Je pourrais citer d’autres exemples, mais le temps me manque. On le voit, la cellule anti-blanchiment TRACFIN est au cœur de ce combat.

Pourtant, l’enjeu est un peu particulier : contrairement à la grande délinquance financière « en col blanc », le financement du terrorisme se caractérise par l’emploi de petites sommes, difficiles à repérer. Il s’agit d’acheter une arme, de louer une voiture, de trouver une cache, etc. Les petits ruisseaux font les grandes rivières. À cet égard, plusieurs pistes sont évoquées pour permettre à TRACFIN de détecter ces « signaux faibles ».

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous fournir des éléments sur les mesures nouvelles que le Gouvernement entend mettre en œuvre en ce sens dans les jours qui viennent ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Madame André, il est un service de renseignement qui est peut-être moins connu que d’autres, et que vous venez d’évoquer : TRACFIN. Ce service a été créé il y a une bonne vingtaine d’années. Chacun le sait dans cet hémicycle, il a pour mission de repérer les mouvements d’argent susceptibles d’être contraires à la probité ou à l’honnêteté, dans quelque domaine que ce soit.

Depuis quelques mois, nous avons demandé à TRACFIN de mobiliser ses forces, son intelligence et ses capacités d’innovation pour lutter contre le financement du terrorisme.

Vous avez insisté avec raison sur les grands mouvements de fonds, qui correspondent, par exemple, aux trafics d’antiquités destinés à financer Daech.

Je me permets d’attirer l’attention de la Haute Assemblée sur ce point. Le trafic de pétrole organisé par Daech a lieu sur place ; il se cantonne à la région. En revanche, le trafic d’antiquités implique des amateurs éclairés des pays développés. Ceux-ci doivent s’interroger sur l’origine des œuvres d’art qu’ils se procurent et songer aux conséquences de leurs acquisitions : ces dernières financent directement Daech !

Il faut en outre lutter contre divers petits mouvements d’argent. Il s’agit là d’un travail plus difficile, plus contraignant. À cet égard, nous avons décidé d’abaisser de 3 000 à 1 000 euros la somme maximale qui peut être acquittée en argent liquide. En effet, nous le savons, bien des membres de groupuscules terroristes ont recours, pour se financer, à des versements en espèces.

De surcroît, nous avons entrepris de lutter contre un mode de paiement qui n’est peut-être pas connu de tous dans cet hémicycle : les cartes prépayées, qui sont achetées et utilisées anonymement. Ces cartes ont été employées pour la préparation des derniers attentats, qui ont eu les conséquences terribles que vous connaissez.

Vous le constatez, ce secteur doit être réglementé et régulé. Aussi TRACFIN doit-il disposer des moyens dont il a besoin.

Debut de section - Permalien
Michel Sapin, ministre

M. Michel Sapin, ministre. Nous avons déjà augmenté les ressources de ce service en 2015, et nous poursuivrons cet effort en 2016 via les moyens supplémentaires qui seront alloués à la sécurité. Je remercie d’ores et déjà le Sénat d’apporter son appui à ce beau et grand service, si utile à la République !

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Françoise Laborde applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Claude Kern, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Kern

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, les heures tragiques que nous traversons exigent, de notre part, un front commun contre la barbarie.

Ce front commun est d’ores et déjà acté, symboliquement et juridiquement. Dans la situation exceptionnelle que nous vivons actuellement, chaque citoyen est responsable, chaque acteur de la vie publique est un relais de poids. Je songe notamment aux maires, qui sont aux avant-postes de la République.

Souhaitant prendre toute leur part aux mesures résultant de l’état d’urgence, ces élus s’interrogent quant à l’absence d’obligation de déclaration de changement de domicile. Pourtant, l’intérêt d’une telle déclaration domiciliaire est largement admis. Cette procédure est d’ailleurs obligatoire dans la plupart des pays d’Europe.

Au reste, un tel dispositif a été institué en Alsace-Moselle par les ordonnances de 1883. Bien qu’il soit au fil du temps tombé en désuétude, nombreux sont les maires de ces départements à témoigner de son utilité pour de multiples formalités administratives.

Il va sans dire que, compte tenu du contexte, cette obligation contribuerait à renforcer la sécurité sur notre territoire.

Certes, il existe des doutes majeurs quant à la compatibilité entre, d’une part, l’instauration, sur l’ensemble du territoire national, de l’obligation de déclaration de domicile et de la tenue d’un registre de domiciliation, et, de l’autre, le principe constitutionnel de liberté d’aller et venir et les dispositions de la loi de 1978. Toutefois, sans basculer dans le « tout sécuritaire », il faudrait faire avancer ce dossier pour garantir les meilleurs droits à nos concitoyens.

Aussi, au nom de l’ensemble des maires, nous souhaitons savoir si le Gouvernement est prêt à mettre en œuvre une telle obligation et à engager une révision constitutionnelle de nature à permettre la création de ce fichier domiciliaire. Il y va de la sécurité de notre pays !

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. François Bonhomme applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la réforme de l’État.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Monsieur le sénateur, je vous remercie de la proposition que vous venez de formuler. Vous suggérez de créer une obligation de domiciliation auprès des services municipaux.

Cette disposition a déjà été débattue l’année dernière, dans le cadre d’une proposition de loi déposée par la députée Virginie Duby-Muller. Au-delà de ce texte, il s’agit d’une question récurrente.

De manière générale, les nouveaux arrivants dans une commune ne sont pas assujettis à l’obligation de déclarer leur domicile à la mairie. Ils sont simplement appelés à communiquer leur adresse spontanément au titre des formalités administratives, notamment pour les démarches d’inscription sur les listes électorales. Le décret du 31 décembre 1947, qui imposait cette déclaration aux ressortissants étrangers, a été abrogé en 2006.

M. Claude Kern le confirme.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Vous évoquez les dispositions particulières applicables en Alsace-Moselle. Néanmoins, je souligne que, dans les départements concernés, le non-respect de cette formalité n’est pas sanctionné à l’heure actuelle.

Vous proposez d’étendre cette obligation à l’ensemble du territoire national. Or, pardonnez-moi de le souligner, cette proposition soulève plus de difficultés qu’elle n’en résoudrait.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Tout d’abord, vous l’avez vous-même admis, la volonté d’instaurer une obligation de déclaration impose d’examiner tout particulièrement les contraintes de constitutionnalité. Au travers de cette procédure, il s’agit de traiter des données personnelles. Or, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel, il n’est pas possible de s’engager dans cette voie.

Ensuite, la création, dans chaque commune, d’un fichier sans finalité précise soulève une difficulté sérieuse au regard de nos principes constitutionnels.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Je songe notamment à la liberté d’aller et venir.

Aussi, je suis au regret de vous opposer les principes fondamentaux de notre cadre constitutionnel. Toutefois, nous pourrons poursuivre la réflexion sur ces questions au cours des mois à venir.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Kern

Madame la secrétaire d’État, je vous avoue ma profonde incompréhension face à la position que vous rappelez et qui, malheureusement, correspond à une situation apparemment figée depuis plusieurs années.

Je déplore l’absence de signes d’ouverture de votre part, alors même que la disposition que je propose pourrait, sans aucun doute, constituer une mesure fondamentale dans le cadre de l’état d’urgence.

Au surplus, je me dois de relever une absence de vision et de courage politiques. Vous annoncez des réformes constitutionnelles sans besoin manifeste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Kern

M. Claude Kern . Or, parallèlement, vous écartez une possibilité de faire évoluer notre droit suprême, quitte à trancher au détriment de la sécurité de nos concitoyens. Où est la logique ?

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Monsieur le ministre, la France est mise à rude épreuve. Les Français ont été touchés dans leur chair comme rarement ils l’ont été. Le conflit est planétaire, et les Français sont partout en danger.

Les Français établis hors de France nous font part de leur inquiétude grandissante. Partout dans le monde ils deviennent des cibles désignées ! La France compte deux millions et demi d’expatriés à travers le monde. Le récent attentat survenu au Mali dans un hôtel où séjournait l’équipage français d’Air France est venu nous le rappeler.

Or les Français expatriés se sentent abandonnés. Nos conseillers consulaires ne sont pas soutenus, alors qu’ils ont pour mission de rassurer nos concitoyens. Le remplacement de nombreuses ambassades par de simples postes de présence diplomatique leur donne le sentiment que leur pays ne veille pas sur eux comme il se doit. Entre 2013 et 2015, treize ambassades ont été supprimées. Douze autres suivront entre 2015 et 2017. Au total, environ 10 000 expatriés sont directement concernés !

Ces représentations françaises ne sont plus dotées que d’un effectif réduit au plus strict minimum. Elles ne disposent d’aucun service de sécurité, à l’inverse de tous les pays où subsistent de véritables ambassades. En cas d’événements tragiques, elles se retrouveront donc à la fois en première ligne et seules face au danger.

Ne pensez-vous pas qu’après les mesures exceptionnelles proposées aux métropolitains, le Gouvernement devrait reconsidérer sa politique de fermeture des ambassades, qui sont un élément essentiel de la sécurité de nos ressortissants ? Qui garantira la sécurité de nos compatriotes expatriés et celle des touristes et hommes d’affaires français de passage dans ces pays, là où ne subsisteraient que des postes de présence diplomatique ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cadic applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la réforme de l’État.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Madame la sénatrice, la sécurité des Français vivant à l’étranger est bel et bien un sujet majeur.

Nos concitoyens vivant à l’étranger sont, comme nous tous, éprouvés par la tragédie qui a touché la France le 13 novembre dernier. Ils ont été très nombreux à exprimer leur peine au sein des ambassades et ils ont pris part au deuil national.

Dans ces circonstances exceptionnelles, le Gouvernement est pleinement engagé pour assurer la sécurité des Français, de tous les Français.

Bien entendu, les Français établis hors de France sont placés dans une situation particulière. Le risque est variable en fonction des pays, mais partout les services de l’État sont mobilisés. La réaction du ministère des affaires étrangères et du développement international a été extrêmement rapide. Dès la nuit des attentats, diverses implantations françaises à l’étranger ont été placées en état de vigilance et de protection maximales. Les autorités locales ont été sollicitées, et elles ont répondu présent.

De plus, il a été décidé d’annuler tous les événements publics prévus dans ces structures et de fermer les instituts français, les antennes de l’Alliance française et les centres culturels d’une quarantaine de postes jusqu’au 17 novembre dernier. En revanche, les établissements scolaires, à l’exception de ceux de Tunisie et de Bruxelles, ont rouvert dès le lundi 16 novembre.

Je puis vous assurer que nous suivons avec attention l’état du risque pour adapter en permanence les mesures de protection de nos ressortissants et de nos implantations.

Madame la sénatrice, la sécurité est l’affaire de tous. Le respect par chacun de mesures souvent simples et de bon sens participe à la sécurité de tous. L’inscription des expatriés au registre des Français établis hors de France et des voyageurs sur Ariane est indispensable pour agir efficacement en temps de crise !

Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Deromedi

Madame la secrétaire d’État, les Français expatriés sont, comme M. le ministre des affaires étrangères le leur dit quand il vient à leur rencontre, les ambassadeurs de la France à l’étranger. Notre pays leur doit, comme aux métropolitains, des mesures exceptionnelles. Un moratoire sur la suppression des ambassades devrait faire partie de ces dispositions.

L’impératif de sécurité est absolu pour tous les Français !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Olivier Cadic applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Roland Courteau, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes.

Harcèlement, mariages forcés, violences à l’égard des femmes, violences conjugales… Combien sont les femmes à périr sous les coups de leur conjoint, concubin ou partenaire pacsé ? Combien sont-elles à souffrir de ce mal d’un autre âge ? Combien d’enfants, victimes collatérales, en restent marqués à vie ? Trop longtemps, ce mal fut sous-estimé, minimisé. Trop longtemps, il fut considéré comme un tabou.

La loi du 4 avril 2006, votée sur l’initiative du Sénat, les lois de 2010, de 2012 et de 2014 ont permis de mieux prévenir ces violences, de mieux protéger les victimes, de mieux sanctionner les auteurs et de mieux lutter contre ce phénomène massif, qui touche des femmes de tous âges, de tous milieux, de toutes origines.

À présent, les tabous commencent à tomber. Le voile du silence se déchire peu à peu. C’est bien la preuve qu’une action volontariste permet de lutter contre ce fléau. Néanmoins, il reste tant à faire !

On aurait pu penser que, en ce début de XXIe siècle, les stéréotypes sexistes seraient renvoyés à l’histoire ancienne, que les violences à l’égard des femmes ne seraient plus que de mauvais souvenirs. C’est vrai, les lois ne peuvent pas tout. Elles permettent pourtant de devancer les mentalités et d’en accélérer les évolutions. Encore faut-il qu’elles soient relayées par d’autres dynamiques, pour qu’évoluent certains schémas profondément ancrés dans les mentalités.

Madame la secrétaire d’État, comment ne pas se féliciter que la lutte contre ce mal d’un autre âge soit l’une de vos principales priorités ?

Au lendemain du 25 novembre, qui, sur l’initiative de la Haute Assemblée, a été déclaré journée nationale de sensibilisation aux violentes faites aux femmes, pouvez-vous nous dire quelles sont vos priorités d’action spécifiques pour 2016 ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des droits des femmes.

Debut de section - Permalien
Pascale Boistard

Monsieur le sénateur, avant tout, je tiens à saluer votre engagement dans la lutte contre les violences faites aux femmes, et en particulier le travail que vous menez à ce titre dans les établissements scolaires de votre circonscription.

Il est essentiel de parler de ces violences et de les condamner, notamment auprès des plus jeunes, qui peuvent également en être témoins ou victimes.

Vous l’avez rappelé, ce sujet est encore tabou. Pour y répondre, la société doit accepter d’entendre l’écho de ces violences insupportables. À cette fin, j’ai lancé une nouvelle campagne destinée à mieux faire connaître le 39-19, numéro d’écoute anonyme et gratuit contre toutes les formes de violence.

Il faut le dire avec force : la culpabilité doit peser non pas sur les femmes, mais sur leurs agresseurs, et rien ne peut justifier des violences psychologiques, physiques ou sexuelles. La manière dont une femme se comporte ou dont elle s’habille ne peut en aucun cas expliquer un viol ou, plus généralement, une agression. Que ces violences aient lieu dans l’espace public ou au sein du foyer, nous devons les condamner fermement et y apporter une réponse.

Je ne citerai que quelques dispositifs mis en œuvre à ce titre : en tout, 400 téléphones « grand danger » sont déployés, 300 lieux d’accueil de jour ont été créés et 241 intervenants sociaux travaillent dans les commissariats et brigades de gendarmerie pour améliorer l’accueil des victimes.

Enfin, nos priorités pour 2016 sont les suivantes : renforcer la lutte contre les viols, développer les formations à l’intention des professionnels, notamment contre les violences insuffisamment dénoncées, qu’il s’agisse de la lesbophobie, de la prostitution ou encore des violences faites aux femmes handicapées ; améliorer la prise en compte de l’impact sur les enfants des violences faites aux femmes dans les couples.

Le Gouvernement agit pour que la lutte contre les violences faites aux femmes change d’échelle. Des dispositifs existent. Il faut les renforcer. Toutefois, il faut que chacun et chacune se mobilise pour les faire connaître davantage et vérifier, sur le terrain, s’ils sont bien appliqués. Nous y veillons, mais nous avons également besoin de vous, comme de la représentation nationale tout entière !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. François Commeinhes, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de François Commeinhes

Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l’État et de la simplification.

Le vendredi 13 novembre dernier, je recevais un courrier de M. le ministre de l’intérieur. À ma demande de créer une nouvelle zone de défense et de sécurité dévolue à la future région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, M. Cazeneuve répondait par la négative.

Pourtant, la création de la nouvelle région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées doit permettre d’instituer une nouvelle zone de défense et de sécurité. Considérant qu’il est important de rapprocher l’action sécuritaire des réalités du terrain et que l’équité territoriale doit prévaloir ; considérant que, au-delà des compétences, les élus se sentent responsables de la sécurité des administrés ; considérant les conclusions du rapport Blazy et l’impératif de coproduction des politiques publiques de sécurité entre les polices municipales, intercommunales et nationales, la mise en corrélation de l’échelon régional s’impose.

On ne peut priver une région vaste comme l’Autriche ou le Benelux d’un commandement sécuritaire spécifique. La territorialisation de l’action sécuritaire visant à répondre aux attentes des citoyens ne peut se réduire à un recours supplémentaire aux polices municipales, que les budgets des collectivités locales ne permettent plus.

Alors que la réforme territoriale a conduit à une remise en question d’ampleur des périmètres et des compétences de nos collectivités, l’État peut, et doit, accompagner cet effort dans sa dimension sécuritaire, en redéfinissant la carte des zones de défense et de sécurité.

Madame la secrétaire d’État, je souhaite donc connaître les intentions de Gouvernement en la matière.

MM. Gérard Bailly et Jean-Baptiste Lemoyne applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la réforme de l’État.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Monsieur Commeinhes, je vous prie d’abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, qui est retenu par les obsèques d’une victime des attentats de Paris.

Vous m’interrogez sur la création d’une zone de défense et de sécurité « Sud Pyrénées », correspondant au périmètre de la région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées.

Aujourd’hui, la France métropolitaine compte sept zones de défense et de sécurité, qui ne constituent pas des échelons opérationnels de sécurité, mais qui permettent la mutualisation des moyens. Il s’agit donc d’un niveau de proximité essentiel dans le soutien au préfet de département pour la gestion locale des crises et en matière d’ordre public.

La réforme territoriale qui crée six nouvelles régions pose en effet la question, dont vous vous saisissez, de l’adaptation de la cartographie des zones de défense aux limites régionales. Dans le sud-ouest, huit départements de la région sont aujourd’hui rattachés à la zone Sud-Ouest et donc à Bordeaux, tandis que ceux de la région Languedoc-Roussillon sont attachés à la zone Sud, basée à Marseille.

Quatre options ont été étudiées. Vous prônez la création d’une huitième zone, mais cette solution n’a pas été retenue. En effet, des travaux ont été engagés et un rapport interinspections a été produit, dont le ministre de l’intérieur a souhaité suivre les recommandations unanimes. Celles-ci conduisaient à ne pas retenir cette proposition, à la faveur du rattachement à la zone Sud.

Deux raisons fondamentales expliquent cette décision. La première est liée aux moyens, dans la mesure où la création d’une nouvelle zone aurait conduit à les démutualiser, ce qui n’est pas souhaitable dès lors qu’il s’agit de gérer au mieux les moyens disponibles ; la seconde est opérationnelle et issue de la volonté de préserver la cohérence de la politique de lutte contre les feux de forêt sur l’arc méditerranéen.

C’est donc la volonté de mieux répondre aux crises, notamment aux feux de forêt, qui a conduit à prendre cette décision.

Debut de section - Permalien
Clotilde Valter

Mme Clotilde Valter, secrétaire d’État. Pour autant, le ministre de l’intérieur a entendu les questions que vous posez. Il cherche, en ce moment, les adaptations susceptibles d’être apportées à cette position.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. François Commeinhes, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de François Commeinhes

M. François Commeinhes . Madame la secrétaire d’État, j’ai déposé en septembre dernier une proposition de loi sur ce sujet, ainsi qu’une résolution spécifique. Le débat doit avoir lieu, et je suis persuadé que ce sera le cas !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Philippe Adnot, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Ma question s’adresse à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique et comprend deux parties.

La première concerne les cartes de l’intercommunalité établies par les préfets. Nous avons pu constater que, dans un certain nombre de départements, les préfets s’étaient allègrement affranchis du respect de la loi en formulant des propositions qui ne tiennent aucun compte de ce que nous avions décidé ici, c’est-à-dire un seuil à 15 000 habitants plutôt qu’à 20 000 et la possibilité de dérogations.

Dans mon département, par exemple, Mme la préfète a proposé la création d’une intercommunalité longue de cent kilomètres et rassemblant les deux tiers de la population du département, sans aucune continuité urbaine !

Madame la ministre, pensez-vous inciter les préfets à respecter la loi et, surtout, comptez-vous leur rappeler qu’ils doivent tenir compte de l’avis des commissions départementales de la coopération intercommunale ? En effet, dans mon département, Mme la préfète dit partout qu’elle ne le fera pas.

Vous avez vous-même suscité la seconde partie de ma question, madame la ministre, en expliquant, hier, que les intercommunalités qui allaient être créées devaient connaître les conséquences de la réforme de la DGF pour pouvoir prendre leur décision. Je suis entièrement d’accord avec vous !

Puisque ladite réforme de la DGF a été repoussée d’un an, envisagez-vous de reculer d’un an également la mise en place des intercommunalités, afin qu’elles puissent décider en connaissance de cause ?

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre de la décentralisation.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Adnot, comme vous le savez, si M. le Premier ministre a pris la décision de reculer d’un an la réforme de la DGF, c’est parce que tous les schémas des EPCI seront intégralement publiés dans six mois.

Reculer d’un an la publication intégrale de ces schémas nous contraindrait donc à reculer d’un an, une nouvelle fois, la réforme de la DGF… Ainsi, nous pourrons peut-être commencer la réforme en l’an 3000 !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Ce n’est pas donc possible.

En revanche, monsieur Adnot, je me suis engagée hier, avec mes services, à permettre à un certain nombre de responsables communaux et intercommunaux de disposer d’une appréciation de leur avenir en fonction des critères futurs de la réforme de la DGF. Bien entendu, tout cela reste très aléatoire.

Certains de ces responsables nous demandent des estimations à l’année n+2 ou n+3, qu’ils ne peuvent pas établir eux-mêmes, compte tenu des perspectives de réforme. Nous allons donc, autant que possible, éclairer les décisions qui devront être prises.

Concernant les schémas eux-mêmes, j’avais expliqué à ce même banc, quand nous débattions de la loi NOTRe, que nous appelions évidemment les préfets à attendre la fin de cette discussion. Lors d’une réunion Place Beauvau, je leur ai demandé, dans le même temps, d’établir une proposition de schéma. Celle-ci, naturellement, doit recueillir l’assentiment de la commission départementale.

Vous vous en souvenez : cette procédure a été coulée dans le marbre de la loi à la suite de votre travail et de celui de vos collègues de l’Assemblée nationale. Le rôle du Sénat a été le plus important, dans la mesure où c’est son texte qui a finalement été retenu.

Quelque 50 % des collectivités doivent donner leur accord, dont la commune principale si elle compte un tiers de la population du département. Il est vrai que, dans certains départements, cette clause pose problème. En effet, la nécessité d’obtenir l’accord d’une commune représentant un tiers de la population pour que le schéma soit accepté donne lieu à des dissensions. Dans votre département, quelques avis divergents se sont par exemple exprimés. Les cas en question restent assez rares, mais c’est la loi !

Ces schémas vont permettre de créer davantage de services ; sur ce point, au moins, vous vous accordez tous. Pour progresser, une véritable concertation entre les élus est nécessaire, car le vote dépendra d’eux. Cette concertation, en particulier avec la ville-centre, est indispensable.

Monsieur Adnot, je ne peux donc faire mieux que rappeler la loi.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Adnot

Ce que nous avons dit hier à propos de la nécessité pour les communes de s’engager dans des intercommunalités impliquait qu’il était important de connaître la situation qui allait leur être faite. Il ne s’agit pas d’aller de report en report. Le préalable est de connaître les règles et les conséquences, afin de pouvoir prendre les bonnes décisions.

J’insiste donc : il est nécessaire que nous connaissions la réforme avant d’établir les nouvelles cartes. À défaut, nous serions conduits à prendre des décisions sans aucune visibilité, ce qui serait bien dommage !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le jeudi 10 décembre prochain, de quinze heures à seize heures, et qu’elles seront retransmises sur France 3, Public Sénat et le site internet du Sénat.

L’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet .