Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 8 novembre 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • universitaire
  • université
  • étudiant

La réunion

Source

La commission procède à l'audition de M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur le projet de loi de finances pour 2012

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Monsieur le Ministre, je suis heureuse de vous accueillir pour la première fois devant la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat, compétente également en matière d'enseignement supérieur et de recherche. Ceci mérite d'être précisé car nos collègues de la commission des affaires économiques se préoccupent également de la recherche appliquée.

Nous souhaitons, Monsieur le Ministre, que vous nous présentiez le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche pour 2012 et nous vous donnons donc immédiatement la parole.

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, je suis très heureux de retrouver la commission dans sa nouvelle composition.

Je vais vous rendre rapidement compte du budget tel qu'il est présenté, ce qui permet de restituer l'ampleur des efforts qui ont été accordés à l'enseignement supérieur et à la recherche au cours des années écoulées et de présenter les principales lignes du budget pour 2012.

Le budget 2012 -ce n'est une nouvelle pour personne- est placé sous le signe de la réduction des déficits publics et de la maîtrise de la dépense publique...

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Pour autant, même si l'enseignement et la recherche participent à cet effort collectif, il n'y a pas de rigueur aveugle ; le choix qui a été délibérément fait est de préserver très fortement le secteur de l'enseignement supérieur et de la recherche, en considérant que l'investissement dans les universités et la recherche contribue à préparer notre avenir et doit faire l'objet d'une priorité marquée de notre part.

Cette priorité se mesure à la fois dans ce budget mais également sur la durée puisque nous pouvons maintenant regarder et mesurer l'ampleur de ce qui a été accompli en quatre ans. Plus de 9 milliards d'euros ont été investis dans l'enseignement supérieur sur la période 2007-2012, conforment à l'engagement pris par le Président de la République. N'y sont toutefois pas compris les investissements d'avenir -ce qui pourrait pourtant ajouter 20 milliards d'euros-, le plan de relance ou encore l'opération Campus pour 5 milliards d'euros. On est donc uniquement là sur le coeur de notre activité. Avec la plus grande honnêteté possible, si l'on évalue l'ensemble du surcroît de ressources consacrées à ce secteur, il s'agit donc de 9 milliards d'euros.

Ceci se traduit pour la dépense intérieure d'éducation consacrée à l'université, par le passage de 8.600 euros à 10.180 euros en moyenne par étudiant, soit une augmentation de 18 % qui représente environ le double de tous les rythmes d'augmentation qui ont pu être observés au cours des dernières années, toutes majorités confondues.

On constate le même effort en matière de recherche. La dépense intérieure de recherche, qui s'établit à 43,6 milliards d'euros, a progressé de manière très soutenue depuis 2006, à un rythme de 15 % contre un rythme de 10 % pour la période 2002-2006.

En 2012 -année d'efforts pourtant très soutenus imposés à la quasi-totalité des secteurs de la politique publique- l'enseignement supérieur et la recherche seront très largement épargnés. Je ne dis pas que des efforts ne doivent pas être fournis et que nous n'allons pas chercher à améliorer les méthodes de fonctionnement des universités et des organismes de recherche mais cela n'a rien à voir avec les pays qui nous entourent, ni avec les efforts qui sont demandés aux autres domaines ministériels !

Les crédits budgétaires, en autorisations d'engagement, seront en progression de 428 millions d'euros en 2012, soit 1,7 % d'augmentation. La montée en puissance du crédit d'impôt recherche sera poursuivie à hauteur de 174 millions d'euros ; enfin, les intérêts de l'opération Campus permettront de réaliser 167 millions d'euros d'investissements supplémentaires en 2012 sur des chantiers que l'on voit fleurir sur les différents campus universitaires. J'étais ce matin à Strasbourg où plusieurs opérations remarquables ont commencé, notamment la réhabilitation de la BNU. On peut également évoquer, à Bordeaux, les chantiers sur les sciences humaines, à Lyon les différentes résidences étudiantes qui ont été lancées soit dans le cadre des opérations Campus, soit dans le cadre des investissements d'avenir. S'y ajoutent, au titre des investissements d'avenir, 1,2 milliard de crédits qui seront débloqués pour la seule année 2012 au profit de l'ensemble du secteur. Il s'agit donc là d'une poursuite de l'effort qui se traduit pour l'enseignement supérieur et pour la recherche par des priorités simples et claires.

En matière d'enseignement supérieur, la priorité porte sur l'amélioration des conditions d'études pour les classes moyennes avec la décision de passer à dix mois de bourse : nos étudiants étudiaient dix mois mais les bourses étaient versées sur neuf mois. La rentrée débutait en septembre ; les principales dépenses étaient alors réalisées, or les bourses étaient versées en novembre. Les seuils pour accéder aux bourses aboutissaient à exclure de fait les familles des classes moyennes qui percevaient deux SMIC par foyer. Nous sommes montés à 3,3 SMIC. Il y avait au début 480 000 étudiants boursiers ; nous sommes passés à 600 000, ce qui est un record pour notre pays en termes de nombre de familles aidées par le biais de nos dispositifs.

Ce sont des sujets qui me tiennent à coeur, sur lesquels j'ai beaucoup travaillé en tant que parlementaire. Je considère que cette question de l'ascenseur social est vitale ; c'est l'occasion pour nous d'avoir une traduction opérationnelle des choix et des engagements qui ont été pris.

Le second point concerne la consolidation de l'autonomie des universités. De ce point de vue, les établissements d'enseignement supérieur verront encore cette année leurs moyens augmenter de 237 millions d'euros. Environ 200 millions d'euros seront consacrés à l'augmentation de la masse salariale, 46 millions seront dédiés au fonctionnement de l'ensemble des établissements, notamment pour soutenir le passage à l'autonomie. Le glissement vieillesse-technicité (GVT) a été pris en compte afin de s'assurer que nous donnions bien à nos universités les moyens d'accéder à l'autonomie.

Enfin, le chantier des campus de demain nous tient à coeur. La France souffrait de disposer de campus inadaptés aux conditions d'études modernes, sous-dotés en équipements numériques et qui n'étaient pas au niveau de nos concurrents internationaux. Plus de 167 millions d'euros d'intérêts seront débloqués cette année pour le lancement de nouveaux chantiers directement opérationnels ; ils font actuellement l'objet d'une sélection très poussée, même dans mon ministère.

S'agissant de la recherche, le but est de lui donner les moyens d'être compétitive au plus haut niveau mondial. Quand on investit un euro dans la recherche, on génère 4 à 6 euros supplémentaires de croissance potentielle de PIB à moyen terme. Investir dans la recherche, identifier les domaines d'excellence pour notre pays, c'est construire les emplois de demain, les gisements de compétitivité, donner des points d'appui à nos entreprises. L'investissement dans la recherche est donc absolument central.

Nous poursuivons le travail des investissements d'avenir, avec non seulement des mesures pérennes destinées à soutenir les crédits budgétaires -en augmentation de 40 millions d'euros, l'État devant consacrer 214 millions d'euros supplémentaires au total à la recherche- mais également le crédit d'impôt recherche.

Les secteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche sont une voie de sortie déterminante pour notre pays. Il s'agit de lutter contre nos déficits publics, d'économiser partout où nous le pouvons sur nos dépenses de fonctionnement mais non de connaître une traversée du tunnel sans projet au bout de celui-ci. Il convient de faire de ce pays une nation assise sur sa recherche et son enseignement supérieur et qui construit sa compétitivité sur ces domaines.

En quatre ans, tout a changé : la réforme de l'autonomie des universités, les rapprochements et décloisonnements entre les différentes disciplines. Les partenariats construits de façon beaucoup plus ouverte entre les universités et leur environnement territorial et économique ont métamorphosé le paysage classique de l'université. Cela a réussi non parce qu'il s'agissait d'une volonté gouvernementale et politique mais parce que l'ensemble des acteurs se sont approprié ce changement.

L'espoir, pour notre pays, réside dans l'extraordinaire qualité de son université et de sa recherche. C'est là que se trouvent les leviers qui justifient que, tout au long de ces cinq années, nous ayons investi massivement dans ce secteur. C'est pourquoi, cette année encore, même si nous participons à l'effort collectif, une priorité marquée sera accordée à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Merci, Monsieur le Ministre.

La parole est à Mme Dominique Gillot, rapporteure pour les crédits de l'enseignement supérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Merci pour cet exposé dynamique et clair, Monsieur le Ministre, qui comporte cependant beaucoup de chiffres. On a quelque mal à se repérer dans les documents que nous avons eus. Peut-être contesterez-vous donc un certain nombre de remarques mais je pense que mes observations s'appuient globalement sur des constats qui sont validés.

Les moyens de fonctionnement des universités, malgré ce que vous dites, stagnent du fait des gels de crédit -vous l'avez dit, il faut participer à l'effort de rigueur. Dans le cadre de leur passage à l'autonomie, un transfert de la masse salariale insuffisant et un GVT mal pris en compte placent certaines universités dans l'incapacité d'équilibrer leur budget, voire dans l'obligation de geler des postes pour assurer la rémunération de leurs personnels.

Il serait donc intéressant que vous nous disiez où se situent les crédits supplémentaires annoncés et salués par la Conférence des Présidents d'université pour assurer en partie la prise en charge de l'évolution du GVT. Sur quelle ligne budgétaire ces redéploiements interviendront-ils, la compensation n'étant pas intégrale ?

Par ailleurs, quel organe décidera de la répartition de ces 14,5 millions d'euros annoncés pour compenser en partie le GVT entre les universités ? Sur quels critères ces attributions seront-elles réalisées ?

Concernant les moyens, la mise en oeuvre du système de répartition à la performance et à l'activité procède d'une volonté d'encourager les regroupements. Leur taille et leur mode de gouvernance deviennent donc des critères de sélection déterminants. Comment prenez-vous en compte les difficultés des présidents d'université pour mettre en oeuvre l'application de ces critères sans perturber leur fonctionnement ? Comment éviter la marginalisation des petites universités qui ont des taux de réussite inférieurs aux autres ? L'affectation de moyens inférieurs peut aggraver leur situation plutôt qu'encourager leur dynamisme.

Différents dispositifs ont été mis en place par la loi pour faciliter l'orientation et l'insertion professionnelle des diplômés. On en a fait une mission de service public et ils ont été l'objet d'une première évaluation en octobre 2010. La méthodologie de cette enquête a été très critiquée, les résultats ayant été établis trente mois après la sortie des diplômés. Quel est donc le rôle effectif du diplôme dans l'insertion professionnelle dans ces conditions ?

Malheureusement, la seconde enquête a utilisé la même méthodologie : on ne sait toujours pas ce que deviennent les étudiants qui décrochent en cours d'année. L'enquête ne mesure pas le taux d'emploi mais le taux d'actifs employés ; en outre, cette enquête présente de grandes lacunes au regard de l'insertion professionnelle des diplômés en lettres, en langues et dans les matières artistiques.

Enfin, le rapport du Secours catholique établit qu'un étudiant sur quatre vit dans une situation de grande pauvreté. Quels engagements et améliorations peuvent être, selon vous, apportés à la vie étudiante et au logement ? Certes, vous nous avez dit qu'on a connu un accroissement du nombre de boursiers et une amélioration du montant des bourses ; néanmoins, un certain nombre d'étudiants continuent à vivre dans de grandes difficultés. 30 % d'entre eux sont obligés de travailler pour poursuivre leurs études. Près de 20 % renoncent à se faire soigner faute de moyens et ne sont pas titulaires d'une assurance complémentaire. Je crains que les dispositions de la loi de financement de la Sécurité sociale, avec l'augmentation de la taxe sur les mutuelles, ne viennent encore aggraver la situation sanitaire de nos étudiants.

Quant au logement, le rapport Anciaux, qui avait amené le Gouvernement à prendre un certain nombre d'engagements, est loin d'être appliqué ! Il serait utile de connaître votre sentiment sur les procédures et les orientations destinées à remédier à la misère du logement étudiant.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

La parole est à M. Plancade, rapporteur pour avis sur les crédits de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Plancade

Vous avez dit que ce budget intervenait dans un contexte de crise. Je rappelle que le Président de la République s'était engagé à augmenter chaque d'année d'un milliard d'euros pendant cinq ans le budget de l'enseignement supérieur et de 800 millions d'euros celui de la recherche. Cet objectif sera-t-il tenu ?

En second lieu, l'IFP-énergies nouvelles est sûrement le secteur le plus maltraité de ce budget, alors que c'est sûrement l'institution qui, depuis des années, fait le plus d'efforts en matière de gestion du personnel et de dynamisation de ses propres ressources, sans faire appel à qui que ce soit. Or, le budget de cette institution a baissé de 40 % en euros constants depuis 2002.

L'AERES (agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur) estime que l'IFP constitue un modèle économique basé sur une exceptionnelle valorisation de la recherche, générant des revenus et créant des entreprises et des emplois. Malgré cela, on continue à lui tordre le cou ! Je pense que c'est une mauvaise récompense que vous faites à l'IFP, qui mérite mieux compte tenu des résultats qui sont les siens.

Ma troisième question concerne Universcience, gestionnaire des crédits attribués aux centres de culture scientifique, technique et industrielle depuis 2011, qui prévoit de créer un Conseil national qui sera à la tête d'un réseau de plates-formes territoriales. Certains de ces centres sont inquiets à plusieurs titres. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur la façon dont seront opérés ces regroupements ? Comment les contextes locaux seront-ils pris en compte si les moyens alloués aux centres dépendent de l'application d'une politique nationale ? En outre, comment justifiez-vous la diminution de près de 1 % des crédits alloués à Universcience ?

Enfin, le développement de la recherche sur projet est selon moi nécessaire pour notre pays. Néanmoins, le périmètre des dépenses prises en compte par l'Agence nationale de la recherche est très inférieur au coût complet assumé pas les organismes de recherche. Est-il envisagé de prendre mieux en compte cette réalité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Permettez-moi, Monsieur le Ministre, d'insister sur la question des modes de financement de la culture scientifique sur les territoires. Je donnerai à mes collègues une image qui me tient à coeur : c'est comme si le ministre de la culture donnait tous les budgets du spectacle vivant à l'Odéon, charge à lui de financer sa propre saison culturelle puis de financer les autres théâtres sur le territoire. Il est normal que les centres de culture scientifique technique et industrielle (CCSTI), sur le terrain, soient inquiets.

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Madame la Rapporteure, s'agissant de la prise en compte du budget par le ministère, je commencerai par rappeler les chiffres des augmentations des dotations budgétaires au profit des différentes universités au cours des quatre dernières années... Saint-Etienne : + 28 % ; Limoges : + 36 % ; Paris V : + 35 % ; Lyon II : + 36 % ; Lille II : + 56 % ; Angers : + 50 %.

J'ai pris à dessein non de « petites universités » -expression que je n'apprécie pas- mais des universités ancrées dans leur territoire, qui vont chercher une excellence conforme à celle du territoire qui les soutient et qui peuvent sans aucun problème, pour certaines d'entre elles, se lancer dans une compétition internationale. Saint-Etienne a ainsi la capacité de développer son excellence dans le domaine des coopérations autour de son tissu industriel, Clermont-Ferrand autour de la technologie des volcans, La Rochelle autour de la mer. Ce ne sont peut-être pas les plus grandes mais elles ont une vraie capacité à imposer un niveau d'excellence !

En second lieu, deux plans budgétaires importants ont donné lieu à discussion entre nous, le premier pendant l'été et l'autre qui vient d'être annoncé. Le secteur de la recherche n'a été concerné par ceux-ci ni de près, ni de loin, pas plus que l'enseignement supérieur. Il n'y a pas de signe plus fort de la volonté du Gouvernement de maintenir son investissement dans ces domaines.

J'ai même pris en compte les demandes formulées par les présidents d'université concernant le GVT. Il faut toutefois y prendre garde car il s'agit d'un domaine qui abrite des réalités différentes. Il existe des universités qui ont un GVT positif, leurs dépenses augmentant naturellement ; d'autres ont un GVT négatif, leurs dépenses baissant naturellement, parfois même à l'intérieur de la même université. Je pense à des contraintes qui peuvent être assez fortes pour certains pôles territoriaux au sein de la même université, comme à La Réunion.

Les présidents d'université souhaitent-ils que l'on prenne en compte les plus et les moins ou estiment-ils difficile de placer une université en négatif ? Je peux le comprendre mais si on ne tient pas compte du négatif, il peut être difficile de tenir compte du positif... C'est la première question de bon sens qui est posée.

En second lieu, je suis évidemment prêt à financer les décisions relevant du niveau national mais je demande à toute la collectivité universitaire de se rendre compte qu'il n'existe pas d'autres domaines de l'État où l'on tient compte du GVT de cette manière. Il n'existe aucun autre compartiment du budget public où le GVT fait l'objet de discussions ou reçoit un surcroît de financement...

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Les commissions de transfert de charges sont faites pour cela !

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Pas en matière de GVT... Le GVT ne fait jamais l'objet d'une position de principe destinée à le compenser.

Enfin, la part que je compte financer dans le GVT relève de décisions nationales qui ont touché des universités autonomes, qui disposent donc de moins de marges de manoeuvre. L'autonomie n'est pas un marché de dupes : pour s'assurer que ce ne soit pas le cas, surtout dans cette période de transition, l'objectif est de faire en sorte que des décisions extérieures à la volonté des présidents d'université, prises au niveau national, soient compensées afin de leur apporter toutes garanties.

Au total, nous disposons de 14,5 millions d'euros ; je prendrais dans ce cadre des mesures transitoires tenant compte d'un certain nombre de décisions catégorielles arrêtées par les présidents d'université. Nous disposons de tableaux qui nous permettent d'évaluer la situation de chaque université ; nous allons donc répartir ces moyens supplémentaires qui sont très attendus et qui ont été très difficiles à obtenir.

S'agissant de l'insertion professionnelle, ainsi que vous l'avez relevé, nous disposons d'un premier indicateur. Il est perfectible. Il ne doit pas constituer l'alpha et l'oméga de la question mais il est toujours bon d'avoir un baromètre. Il nous indique une première tendance et nous renseignent sur les insertions professionnelles qui fonctionnent, les meilleures filières, les meilleures universités. Il faudra bien entendu y ajouter un certain nombre de correctifs au fur et à mesure : combien d'élèves en première année ? Qui et combien vont jusqu'au bout du cursus ? Quels sont les parcours et les diversités sociales ?

Pour le reste, il ne faut jamais oublier qu'un diplôme universitaire est la meilleure assurance chômage. Nous avons tous des exceptions autour de nous, des cas d'étudiants qui ont fait un master en psychologique, en STAPS, en sociologie et qui ont des difficultés pour trouver un emploi mais 90 % des diplômés universitaires trouvent un emploi en moins de six mois ! Le coeur de notre problème, ce sont ceux qui décrochent, principale difficulté de notre système éducatif, et ceux qui s'arrêtent avant le diplôme universitaire. C'est là que la bataille de l'ascenseur social doit se mener.

Enfin, s'agissant des conditions de logement, nous atteignons chaque année les objectifs du plan Anciaux et nous les dépassons. Six mille logements nouveaux ont été construits, 54 nouvelles résidences seront ouvertes et nous tiendrons les objectifs de la réhabilitation puisque nous sommes déjà à 42.000 résidences réhabilitées. Des sites comme Aix-en-Provence ou Avignon sont exemplaires de programmes remarquables en la matière.

Cela suffit-il ? Non ! Existe-t-il un effort à faire porter sur le logement privé ? Évidemment ! Faut-il essayer de travailler dans le sens d'un label permettant d'éviter les marchands de sommeil de profiter de la situation dans certaines villes ? J'y suis ouvert... Il faut agir sur tous les leviers. Nous menons actuellement deux expérimentations, l'une à Lille, l'autre à Lyon avec le passeport logement-étudiant. Nous en analysons les premiers résultats. Les conditions d'études sont une bataille constante. Il faut continuer à travailler dans cette direction mais les choses se sont améliorées.

S'agissant des questions de M. Plancade à propos des 9 milliards d'euros, l'objectif a été tenu en matière d'augmentation des moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Quant à l'IFP, qui constitue un très beau fleuron et un remarquable partenariat public-privé, il n'est pas sous mon contrôle mais sous celui du développement durable. Je me permets cependant de préciser que son fonds de roulement substantiel de 52 millions d'euros laisse quelques marges de manoeuvre à l'IFP. Par ailleurs, j'ai également obtenu qu'il ne fasse pas l'objet d'une mise en réserve supplémentaire de crédits, ce qui va le soulager pour réaliser son exercice budgétaire.

S'agissant d'Universcience, je rejoins vos deux remarques. La bataille pour la culture scientifique est en effet essentielle. Je ne veux pas que notre pays sombre dans l'obscurantisme scientifique. Or, ce risque existe ! Dans notre société d'hypermédiatisation, d'hypersensibilité, le principe de précaution pourrait se transformer en principe de régression scientifique. L'expertise scientifique prend du temps. Les scientifiques passent par des phases d'interrogation qui doivent être acceptées par la culture publique.

Il nous faut défendre la place de la science et de la raison dans un pays comme le nôtre. Cela passe par un travail de fond sur la culture scientifique que nous devons réaliser non à Paris mais dans nos territoires, en faisant en sorte que les expositions scientifiques puissent y tourner, en travaillant avec les associations de nos communes qui oeuvrent pour essayer de diffuser la culture scientifique. On doit également développer le travail en réseau afin de permettre que ce que font les uns bénéficie aux autres, dans le cadre de partenariats.

C'est l'objectif que je souhaite fixer ; si l'on veut développer la culture scientifique, il faut le faire en réseau, dans le cadre d'un travail partenarial où les villes, les conseils généraux et régionaux puissent trouver un interlocuteur partenaire au niveau national. Si chacun oeuvre dans son coin, on n'arrivera pas à démultiplier nos efforts.

Nous travaillons à une réforme de l'organisation et de la gouvernance d'Universcience qui permettra une répartition plus territoriale. Je ne suis pas un élu parisien ; je n'ai pas une vision de l'enseignement supérieur et de la recherche concentrée sur Paris. On a besoin d'une présence innervée dans nos territoires.

Enfin, vous m'avez posé une question sur le développement de la recherche sur projet. Vous avez -et je vous en remercie- eu l'honnêteté de reconnaître que celle-ci constituait une stimulation importante. Je crois primordial de garder une part pour les projets blancs qui permettent de soutenir une recherche fondamentale. Je suis conscient du fait qu'il faut, à l'intérieur des recherches par projet, un calcul beaucoup plus intégré dans le cadre de coûts complets. C'est pourquoi nous avons porté de 11 à 20 % les financements complémentaires qui peuvent être reçus chaque année au titre du préciput, dès lors que les projets sont financés en coût complet.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je vous propose de donner la parole aux groupes ; après la réponse du ministre, nous ouvrirons plus largement le débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'optimisme que vous affichez, Monsieur le Ministre...

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Ce n'est pas de l'optimisme mais de la détermination !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Le fait de ne pas se plaindre ne peut constituer une politique ! Nous sommes confrontés à un budget de stagnation, si l'on tient compte de l'évolution de l'inflation et des pensions que nous avons à payer.

Ma première question concerne l'évolution du crédit d'impôt recherche qui continue à monter en puissance, alors même que cette niche fiscale a un coût exorbitant de 5 milliards d'euros en poids global et qu'elle n'a pas fait preuve d'une grande efficacité.

En second lieu, j'ai les mêmes interrogations que Mme Dominique Gillot concernant le crédit de vie étudiante. Comment pensez-vous ventiler le dixième mois de bourse étudiante qui a été promis dans la mesure où le fonds d'aide d'urgence est en stagnation ?

Enfin, ma troisième question porte sur l'emploi contractuel, très fortement développé dans la recherche et l'enseignement supérieur. Un grand nombre de jeunes hommes et de jeunes femmes ne pourront bénéficier de titularisations, étant confrontés à des plans massifs de licenciement avant titularisation. C'est le cas du CEMAGREF (institut de recherche en sciences et technologie pour l'environnement) dans mon département. J'ai ici une étude que je tiens à votre disposition qui souligne l'explosion de l'appel à l'emploi précaire et au licenciement avant titularisation ! Je crois que vous avez d'ailleurs été informé de cette question par l'ensemble des organisations syndicales dès l'été.

Je m'interroge donc sur ces trois points eu égard aux ambitions que vous affichez...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Madame la Présidente, mes chers collègues, j'ai le sentiment, en abordant ce budget, qu'il s'agit sans doute là de la traduction de l'action la plus positive qui ait pu être menée pendant tout ce quinquennat. J'écoute donc avec beaucoup d'intérêt ce que vous rappelez, Monsieur le ministre et je crois que c'est beaucoup plus important que toutes les légitimes critiques de détail qui peuvent être ici ou là évoquées.

Néanmoins, quand on mène une action aussi importante et qu'on fait bouger les choses, on crée inévitablement de nouvelles inégalités. Il existe des universités qui, pour différentes raisons, évoluent plus vite que d'autres, se regroupent alors qu'ailleurs, les choses ne bougent pas : on est plus réticent devant le principe d'autonomie et on perd du temps. Ceci risque de se traduire sur le terrain. Mme la présidente Marie-Christine Blandin ne me démentira pas si je dis que nous avons très récemment été consternés d'apprendre que les universités lilloises ne comptaient pas au nombre des projets IDEX (« initiatives d'excellence ») ; nous prenons ceci pour une très mauvaise nouvelle pour notre région !

Nous n'allons pas nous pencher sur ce cas particulier mais je souhaiterais que vous puissiez nous préciser les critères de gouvernance universitaire ainsi que les critères d'intérêt scientifique utilisés par un jury international. Que peut faire le ministère pour que d'importants pôles universitaires qui ne sont pas actuellement retenus ne soient pas complètement marginalisés ? Je pense que ceci est en effet contraire à l'intérêt national -pour sortir du cadre lillois !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Bailly

Vous vous êtes félicité de l'augmentation du nombre de boursiers mais je ne partage pas votre vision, Monsieur le Ministre. Ma collègue Dominique Gillot vous a interpellé sur la précarité de la vie étudiante. C'est une réalité : d'année en année, de plus en plus d'étudiants sont obligés de travailler pour financer leurs études.

Oui, Monsieur le Ministre, c'est la réalité et ce n'est pas un détail. Je vous demande de prendre ce constat en considération et d'y répondre au-delà des arguments chiffrés et du nombre de logements ! Il s'agit de savoir comment les étudiants doivent vivre. De plus en plus nombreux sont ceux qui sont obligés de travailler pour payer leurs études.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Les groupes se sont exprimés. La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Madame Gonthier-Maurin, je suis d'accord avec vous : l'idée selon laquelle on ne peut faire autrement ne tient pas lieu de politique ! Mais vous serez sans doute d'accord avec moi : un lamento ne tient pas lieu de politique non plus.

Je voudrais revenir sur trois éléments que vous avez soulignés. Le premier concernait l'emploi : il existe un programme de résorption de la précarité dans la fonction publique qui va débuter l'année prochaine. Les critères ont été fixés et négociés avec les organisations syndicales, avec un soutien extrêmement large. Je suis très attentif à la réalité que vous avez soulignée, parfaitement inacceptable : je ne veux pas avoir d'organismes de recherche qui licencient à tout va avant le programme d'intégration ! A l'inverse, je suis très clair : on ne va pas renouveler des personnes dont la mission est arrivée à échéance parce qu'il existe un programme de résorption de la précarité. Si la mission est pérenne, la personne ne doit pas être licenciée ; si la mission est arrivée à sa fin, il est normal que le contrat s'arrête mais je ne veux pas que la donne soit faussée par l'horizon donné par le programme de résorption de l'emploi précaire dans la fonction publique ! Je suis naturellement à votre disposition pour que vous puissiez me faire remonter les cas que vous connaissez.

Pour le reste, je ne vois pas très bien à quels crédits de la vie étudiante vous faites allusion. Je pense que vous faites référence aux fonds d'aide d'urgence où, sur un certain nombre de pôles universitaires, notamment celui d'Antilles-Guyane -auquel je sais le sénateur Jean-Etienne Antoinette très sensible- on peut avoir des difficultés parfois dues à des problématiques très locales, comme le soutien apporté à Haïti, qui ont abouti à puiser en partie sur les crédits des centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) et qui se sont traduits par des difficultés sur les fonds d'aide d'urgence.

Les fonds d'aide d'urgence sont toujours abondés à mi-parcours pour durer toute l'année universitaire. Nous ferons un point d'étape fin 2011 ; cela doit nous permettre de bénéficier des moyens dont on a besoin pour 2011-2012.

Quant au crédit d'impôt recherche, il s'agit d'une très belle réalisation dont nous pouvons tous être fiers. Je ne cherche pas à dire que certaines choses ne sont pas à corriger ou à améliorer. Il y a, dans tout dispositif public, des abus, des éléments à corriger, des points qui peuvent être améliorés mais on doit reconnaître que ce dispositif a permis de tripler l'investissement de recherche et développement en France, de relocaliser des laboratoires de recherche de grands groupes -Microsoft, Glaxo, Google, Michelin- mais aussi de PME locales comme Cook ou Barbier. L'évaluation ne laisse aucune place au doute ; elle a été réalisée récemment et atteste que, sans le crédit d'impôt recherche, notre pays souffre d'un déficit de 20 % par rapport à l'Angleterre et au Royaume-Uni en termes de localisation des activités de recherche ! Avec le crédit d'impôt recherche, le delta de compétitivité est positif de 30% : un euro investi dans le crédit d'impôt recherche nous en ramène 4 à 6 en emplois et en création d'activités !

En outre, contrairement aux idées reçues, ce dispositif est tourné vers les PME. Nous avons aujourd'hui une augmentation du nombre de PME extrêmement importante : en 2009, 80 % des nouveaux déclarants sont des PME. Ce chiffre est en augmentation de 60 %. Dix mille PME bénéficient aujourd'hui du crédit d'impôt recherche. C'est donc un bon outil. Il faudra une clause d'évaluation qui a été fixée en 2013 ; elle nous permettra de voir ce qu'il convient de corriger.

Entre-temps, de grâce, faisons preuve de stabilité ! Bouger de tels dispositifs tous les six mois revient à les tuer. C'est une maladie française ! On pourra faire évoluer les choses mais il faut de la stabilité. Sans elle, en matière de recherche comme d'universités, rien n'est possible !

Monsieur le Président Legendre, permettez-moi d'abord de vous remercier pour l'action que vous avez vous-même initiée ; beaucoup de ce qui a été fait doit d'ailleurs à l'investissement qui a été réalisé, tous groupes confondus, en matière d'universités et de recherche. Le Sénat a toujours été extrêmement actif sur ces sujets. Je puis ici témoigner que votre implication personnelle a souvent pesé dans nos discussions sur l'évolution de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Quels sont les critères d'évaluation des IDEX ? Le jury est en particulier attentif à la capacité à avoir une excellence internationale et une gouvernance efficace.

Quand on affecte à un pôle universitaire une somme qui peut aller de 500 millions à un milliard d'euros, voire plus, on veut s'assurer que des questions d'ego ne risquent pas localement d'aboutir à rendre ces crédits inapplicables. Or, dans un domaine où les intelligences sont brillantes, les querelles de personnes peuvent être tout aussi affûtées. Le jury veille donc à ce qu'il existe une gouvernance irréprochable qui permette de s'assurer que les crédits affectés seront correctement dépensés.

Le pôle de Lille est exemplaire, notamment dans un domaine où la ville a investi avec beaucoup de vertus, celui de la formation continue. Je m'interroge donc sur la question ; je vais m'assurer que Lille est bien traitée dans le cadre des opérations Campus afin de pouvoir compenser. De très beaux résultats ont pourtant été obtenus par Lille -IRT, Equipex, Labex. Lille II a par ailleurs connu une augmentation de plus de 56 % sur les quatre années écoulées. Une question se pose donc à propos de ce pôle...

Pour le reste, la politique universitaire ne se résume pas aux IDEX, comme on le croit trop facilement. Les IDEX représentent 7 milliards d'euros sur plus de 21 milliards d'euros en matière d'investissements d'avenir. Les IDEX ne constituent pas ma politique budgétaire, ni ma politique de campus. Ils ne résument pas non plus ma politique de recherche. Ils en sont une partie mais il existe un avenir sans les IDEX -fort heureusement !

Enfin, Monsieur Dominique Bailly, je ne sous-estime en rien les difficultés de vie étudiante. Je suis issu d'un département où, pour étudier, il faut quitter le domicile familial. Je connais les difficultés d'une famille de la classe moyenne qui doit envoyer ses enfants étudier à Saint-Etienne, Lyon, Montpellier, Clermont-Ferrand, Paris, avec les surcoûts qui peuvent s'y ajouter -dépenses de transport, logement, santé. Dans certaines familles recomposées, les enfants peuvent également être livrés à eux-mêmes, sans soutien familial.

Je rappelle cependant que la France est le pays d'Europe où faire ses études coûte le moins cher ! De ce point de vue, je suis très choqué par certaines propositions, dans le cadre de la campagne présidentielle, où l'on propose de multiplier par trois les frais d'inscription à l'université ! C'est le cas du think tank Terra Nova, qui n'est pas proche de l'actuelle majorité ! On débat actuellement pour savoir si une augmentation des frais d'inscription de 1,5 étranglerait les familles de la classe moyenne : les intellectuels en chambre qui constituent Terra Nova feraient mieux de venir sur le terrain. Ce type de proposition est irresponsable et peut ouvrir la voie à de fortes dérives !

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je n'en doute pas mais on doit s'indigner face à des propos aussi irresponsables ! Quand de tels groupes font ce genre de proposition aux partis dans le cadre de la campagne présidentielle, ils sont irresponsables ! En tant de crise, cela revêt une certaine forme de cynisme ! Je le dis clairement : mon modèle ne consiste pas à « racketter » nos étudiants en augmentant les frais d'inscription !

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Monsieur le Ministre, au cours des quatre dernières années, la réforme a été une véritable réussite et a permis aux universités d'être plus compétitives. La modernisation est indéniable. Bien sur, l'effort doit être poursuivi en matière d'amélioration des conditions d'études. Beaucoup a déjà été fait mais il reste encore à faire.

Je voudrais évoquer ici le décrochage et la mise en place du plan Réussite en licence et de connaître, à mi-parcours, le bilan que l'on peut tirer de ce plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur le Ministre, je voudrais vous interroger sur la circulaire du 31 mai 2011, dite Guéant-Bertrand, relatif à la maîtrise de l'immigration professionnelle et qui touche les étudiants étrangers.

Je sais que vous êtes personnellement attachés à l'attractivité de nos grandes écoles et de notre système éducatif. C'est pourquoi je voudrais connaître votre sentiment à ce sujet. Vous n'êtes pas sans savoir que ces étudiants, une fois rentrés chez eux, sont les meilleurs prescripteurs pour notre économie. La loi de 2006 avait ouvert une porte de manière à leur apporter une expérience de post-formation leur permettant d'entrer dans les grands groupes et à faciliter les relations entre le Nord et le Sud.

J'ai reçu le collectif composé des représentants de ces jeunes étudiants : un polytechnicien, deux centraliens, trois diplômés d'HEC, en tout une dizaine de jeunes brillants, qui ne comprennent pas cette situation. Allons-nous les former pour qu'ils partent ensuite aux États-Unis ou dans le système anglo-saxon ? Il y va de l'attractivité de la francophonie et de nos grandes écoles, de nos valeurs et, au-delà, de notre économie. En termes de coûts-recettes, le rapport est stupide !

Je ne veux pas porter de jugement mais cette politique du chiffre en matière d'immigration me semble en l'espèce signer une défaite de la pensée.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Monsieur le Ministre, sans vouloir faire rebondir la polémique, nous ne sommes pas Terra Nova, pas plus que vous n'êtes, j'imagine, dépositaire des intérêts de l'université Léonard de Vinci. Nous sommes donc sur le même terrain -encore que Terra Nova n'en soit qu'au stade des idées !

Il vaut mieux revenir aux questions de fond pour notre pays et je voulais attirer votre attention sur différents points.

Tout d'abord, préparer l'avenir, c'est pour moi anticiper le remplacement de nombreux enseignants-chercheurs dans les années à venir. La pyramide des âges est inquiétante. Il faut s'assurer de leur renouvellement. La méthode va désormais s'appuyer beaucoup plus que par le passé sur l'autonomie des établissements.

Mon inquiétude vient de l'insuffisance -non en qualité mais sans doute en quantité- de l'encadrement supérieur de nos universités. Pour que des universités autonomes fonctionnent bien, il faut de nombreux cadres supérieurs aguerris. Selon mon expérience, il faut y être attentif. Ceci est-il intégré dans les prévisions budgétaires, de même que le remplacement pluriannuel de ces enseignants-chercheurs ?

Ma deuxième question rejoint en partie celle de notre collègue Jacques Legendre. S'agissant des IDEX, la mission Ricol fait apparaître un certain bonus en faveur du regroupement massif d'universités en un seul établissement. Il faudrait persuader les évaluateurs et les responsables que l'on peut rassembler les moyens sans créer de mastodontes. On peut, par exemple, proposer des fédérations d'universités qui constituent des formes plus souples permettant d'associer dans ces secteurs d'excellence, des universités de plus petite taille. C'est un enjeu assez important. Même si tout ne se résume pas à l'IDEX, une certaine image de marque y est attachée.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Duvernois

De toutes les réformes conduites par le Gouvernement au cours des dernières années, celle de l'université -cela mérite d'être redit- est certainement l'une des plus emblématiques. On y a mis beaucoup d'énergie et beaucoup de moyens.

Cela étant, la dimension nationale que vous avez évoquée doit être complétée par une action internationale. Vous avez la coresponsabilité de l'établissement public Campus France, créé par la loi du 27 juillet 2010 et dont la constitution en établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) évolue en dents de scie -c'est le moins que l'on puisse dire.

C'est probablement un problème de nature administrative mais aussi et avant tout un problème politique désormais : que veulent faire les ministères de l'enseignement supérieur et des affaires étrangères dans la cotutelle de cet établissement public ? Que veut faire le ministère de l'enseignement supérieur en termes d'investissements, de détachement de personnel et de salaires correspondants dans le nouveau Campus France qui doit intégrer le CNOUS, ce qui ne se passe pas sans difficultés, vous le savez ?

J'aimerais d'autre part que vous nous dressiez un état exact de la situation et que vous nous précisiez les investissements auxquels vous êtes prêts pour que la politique d'attractivité de la France en matière d'accueil des étudiants étrangers soit non seulement maintenue mais développée.

Enfin, nous avons perdu notre troisième place mondiale et sommes devancés désormais par les Australiens. Les raisons sont suffisantes pour que nous nous préoccupions de la mise en route de cet établissement public, Campus France, aux côtés de l'Institut français et de France Expertise internationale, les trois EPIC créés par la loi sur l'action extérieure de l'État en juillet 2010 !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Monsieur le Ministre, la clarté de votre propos, votre connaissance parfaite des dossiers, l'enthousiasme et la conviction que vous manifestez nous font entrevoir la lumière que vous évoquiez au bout du tunnel.

J'ai eu la chance, comme certains de mes collègues, de participer durant trois années consécutives aux échanges entre les parlementaires, l'Académie des sciences et les jeunes chercheurs. Cette action, menée par l'Académie, permet aux parlementaires de rencontrer à la fois des académiciens expérimentés et de jeunes chercheurs. J'y ai trouvé beaucoup d'intérêt ; c'est une action à valoriser et à promouvoir.

Au fil de ces rencontres, on recueille beaucoup d'éléments sur le monde de la recherche et sur celui de l'université. Je voudrais y puiser deux exemples. Le premier est celui d'un jeune chercheur qui anime depuis trois ans une équipe de chercheurs en biologie dans le cadre de l'INSERM ; il nous alerte sur le statut de ces jeunes chercheurs, ingénieurs, techniciens, doctorants, en CDD pour la plupart pour une durée de cinq ans maximum, semble-t-il. On dit qu'on pourrait l'abaisser à quatre ans et six mois. Après ce terme, il n'existe plus de possibilité de retrouver un autre CDD dans une autre équipe de recherche publique. Au bout de trois à quatre ans, ces jeunes collaborateurs commencent à perdre le moral. A titre dérogatoire ou exceptionnel, dans des équipes de recherche où le temps compte, où la durée et l'expérience doivent pouvoir s'inscrire dans les résultats, ne pourrait-on avoir des CDD à l'allemande qui durent dix ou douze ans ? C'est là la question d'un jeune chercheur qui anime une équipe de neuf personnes dans un laboratoire du Sud de la France...

Le second témoignage est celui d'un professeur enseignant-chercheur, de surcroît académicien, qui pense -et c'est là que je voudrais recueillir votre avis- qu'une des fragilités de l'université française réside dans son hétérogénéité de cursus et de niveaux. La même université mène à la fois des actions pluridisciplinaires au sens large du terme et vise des formations de niveau moyen jusqu'à l'excellence. Cet enseignant, au terme de sa carrière il est vrai, affirme qu'il s'agit là d'un élément qui aurait pour effet de faire que nos universités ne sont pas extrêmement performantes dans les différents classements, comme celui de Shanghai. Il préconise plus d'homogénéité afin de promouvoir davantage d'excellence.

Ce sont là deux questions qui m'ont été inspirées par les échanges que j'ai eus avec plusieurs personnes...

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Je voudrais vous interroger, Monsieur le Ministre, sur la crainte exprimée lors de la mise en place de cette réforme par les instituts universitaires de technologie qui craignaient de se voir absorber et de disparaître au sein des universités. Avez-vous pu mesurer ce point ?

Par ailleurs, vous avez évoqué la présence innervée des universités sur le territoire. Or, la Bretagne Sud connaît quelques difficultés dues au gel des crédits. Une vingtaine de postes n'est pas pourvue du fait des difficultés et du manque de moyens.

Plusieurs commissaires ont insisté sur les conditions de vie étudiante. Vous avez évoqué les fonds d'urgence. Je crois que les crédits du CNOUS ont également baissé de 5,5 %. Il faudra y prêter beaucoup d'attention car nombre d'étudiants connaissent la précarité.

Les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé constituent vraiment une médecine délaissée, en souffrance. 20 % des étudiants renoncent à des soins faute de moyens. Que pensez-vous pourvoir faire à propos de ces différents points ?

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Tout d'abord, s'agissant du plan Réussir en licence, les initiatives ont foisonné dans toutes les universités et ont toutes été évaluées, ce qui nous permet de mesurer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. A mon sens, trois domaines se dégagent clairement.

En premier lieu, on prépare avec un luxe incroyable la bascule des élèves du primaire vers le collège mais on les jette dans le grand bain de l'université qui représente souvent un choc culturel, psychologique et familial bien plus important, sans aucune préparation ! Les étudiants se retrouvent dans des amphithéâtres de 1 000 personnes avec des problèmes d'isolement psychologique ; ils peuvent être coupés de leur famille ; les méthodes de travail sont très difficiles et tout cela se fait du jour en lendemain ! La solution consiste à préparer cette bascule, à l'accompagner dès le lycée -au moins le premier mois- et à avoir des cours de méthodologie -je pense à ce qui a été fait à l'université de Strasbourg. On réduit alors fortement le taux d'échec.

La seconde initiative concerne les tuteurs. Bordeaux a beaucoup travaillé sur ce sujet ; Clermont-Ferrand également. A terme, c'est la voie vers laquelle on doit évoluer ; elle fonctionne très bien dans un certain nombre de sites universitaires étrangers, notamment en Allemagne. Je crois beaucoup à ce modèle où l'on est capable d'avoir des relations plus personnalisées et des méthodes de travail différentes.

La troisième initiative est relative aux passerelles. Notre modèle repose sur la non-sélection ; cela suppose une orientation beaucoup plus active et de permettre une réorientation. Je ne veux pas qu'un étudiant qui choisit une filière dont il s'aperçoit qu'elle ne lui convient pas gâche une année complète. C'est ensuite très difficile de le remettre dans le système.

Il existe un domaine dans lequel on a très bien réussi, celui de la médecine où les réorientations se font au bout d'un semestre et fonctionnent bien. Elles commencent à se mettre en place, permettent de meilleures orientations et d'utiliser toutes les orientations professionnelles. J'y crois beaucoup.

Madame Khiari, je vous remercie de votre question sur un sujet qui a été pour moi un objet de combat. C'est pour moi une conviction : un étudiant formé en France est un ambassadeur à vie de notre pays. Aujourd'hui, la compétition entre les nations est une compétition entre les talents. La France doit rester -c'était également le sens de l'intervention de M. Duvernois- une grande nation qui accueille les étudiants étrangers et les talents du monde et les forme.

Cette circulaire dite Guéant-Bertrand ne porte pas sur les étudiants étrangers qui ne sont concernés que par un paragraphe d'un document qui définit une politique sans doute plus restrictive en matière d'immigration. Le point traité par la circulaire concerne l'étudiant étranger qui a achevé sa formation et qui demande l'autorisation de travailler dans notre pays. C'est un simple rappel du droit qui s'est cependant traduit par une application incorrecte sur le terrain.

Des préfets, dans le contexte global de la circulaire, en ont déduit qu'on durcissait le droit du travail pour des étudiants étrangers talentueux. Ce sont des cas très isolés. On parle de 300 à 400 personnes -en tout cas moins de 1 000. Nous avons immédiatement corrigé les choses. J'ai reçu les différents responsables. Nous avons tenu ensemble une séance de travail, adopté une méthode de travail. Nous traitons les dossiers les uns après les autres pour pouvoir corriger les cas aberrants que vous avez mentionnés : le polytechnicien indien embauché chez Orange, l'ingénieur ou le commercial d'HEC embauché chez Airbus et auquel on a dit non, ce qui est absurde : dès lors qu'on l'a formé, il faut profiter de la formation qu'il a reçue, d'autant qu'on ne forme pas suffisamment d'ingénieurs. On traite les dossiers en instance le plus vite possible pour les corriger. Nous avons fait passer un message très clair à nos partenaires pour signifier que la France veut accueillir les talents du monde. C'est notre orientation politique.

Monsieur Vincent, vous avez raison : il faut augmenter l'encadrement supérieur. C'est l'un des objectifs de l'autonomie. De plus en plus de présidents d'université s'y emploient, notamment celui de Saint-Etienne, qui est remarquable et qui fait un travail extrêmement intéressant. Il s'agit de quelqu'un pour qui j'ai beaucoup d'estime. Nous allons l'accompagner dans le cadre d'un partenariat sur la faculté de médecine. J'espère que nous arriverons à sortir ce dossier. J'y travaille activement ; il est très important pour moi. C'est là l'exemple d'une université qui a bien compris la nécessité de travailler sur la réallocation de ses moyens.

Pour ce qui est des IDEX, je ne suis pas d'accord avec vous. Il est vrai que certains schémas sont des schémas de fusion. C'est sans doute le cas de celui de Strasbourg. Il y a également des schémas de coopération poussée mais ce ne sont pas des schémas de fusion -en tout cas, pas à ce stade- comme Bordeaux. Il existe enfin des schémas fédératifs très souples, comme Paris Sciences et Lettres (PSL) qui ne constitue pas un schéma de fusion. Ils n'ont aucune intention de fusionner. Ils sont dans un établissement de coopération d'enseignement et de recherche mais non dans une logique de fusion. On a vraiment une palette et un éventail de gouvernance divers. On n'est pas dans un modèle unique.

Cependant les universités incapables de s'entendre -suivez mon regard- qui comportent des conseils d'administration pléthoriques dans lesquels on affiche une unité de façade mais qui, sous l'épreuve du jury, révèlent des béances dans la vision commune, ne tiennent pas la route.

Monsieur Duvernois, Campus France constitue un outil essentiel qui va nous permettre d'avoir une vision commune en matière de prospective et d'accueil. Rien ne sert de faire de la prospective si l'on n'accueille pas derrière et vice-versa. Nous travaillons avec M. Alain Juppé sur ce sujet. La France est une belle nation ; elle a une belle histoire ; elle doit rayonner dans le monde. Ce rayonnement se traduit par l'enseignement supérieur et la recherche, par des coopérations actives avec de nouveaux pays étrangers. Campus France sera notre bras armé.

Nous achevons les négociations. Une personne qui a souvent été innervée par la sagesse sénatoriale se voit chargée de mission en la matière et je suis assez confiant sur une issue qui devrait être positive et rapide.

Monsieur Leleux, permettez-moi de vous remercier : vous faites effectivement partie des sénateurs qui ont suivi ce programme d'échanges porté par l'Académie des sciences. C'est très précieux.

Dans le cadre du programme de titularisation, j'essaie de veiller à ce qu'on ne s'enferme pas dans des bornes contractuelles trop étroites et qui ne permettent pas de prendre en compte les réalités que vous soulevez. C'est une négociation avec la fonction publique.

Pour le reste, pourquoi, en Allemagne, un doctorant peut-il être embauché sans aucun problème dans une entreprise privée ? Pourquoi, en France, considère-t-on qu'un doctorant n'est bon qu'à faire de la recherche fondamentale et est inadapté au monde de l'entreprise ? Pourquoi nos entreprises ont-elles des pratiques aussi réactionnaires et conservatrices ? Je suis très agacé par les pratiques mises en oeuvre dans nos entreprises en matière de ressources humaines ! Pourquoi cette défiance à l'égard de nos étudiants ? Pourquoi croire que seuls les étudiants des grandes écoles sont adaptés à certain postes ? C'est absurde ! Pourquoi penser qu'un étudiant en sciences humaines ne peut ensuite exercer d'autres fonctions ? Il est capable de travailler en équipe, de rédiger. Ce sont des valeurs et des acquis qui peuvent être ensuite transposables dans d'autres domaines. On a en France des pratiques de ressources humaines trop archaïques, trop conservatrices et qui se retournent contre les entreprises ! Je travaille avec l'association des directeurs de ressources humaines pour essayer de faire évoluer les choses.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Notre commission avait porté un amendement de conditionnalité du crédit d'impôt recherche pour que de jeunes doctorants puissent être embauchés. C'est une idée que nous vous livrons. Vous pouvez en faire fruit si vous le souhaitez : cela ferait très plaisir à la commission !

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je vous remercie d'enrichir ma réflexion. Toutefois, en matière d'emploi, on ne fait pas boire un âne qui n'a pas soif ! Il faut que les entreprises intègrent elles-mêmes le fait que c'est dans leur intérêt.

Pour ce qui est du classement de Shanghai, il faut faire bouger celui-ci : trop restreint, il ne prend en compte qu'une partie du spectre. Je trouve gênant que le classement des universités mondiales dépende uniquement d'un classement fait à Shanghai par les Chinois ! Ce n'est pas une mauvaise idée que l'Europe se réveille et établisse son propre classement européen !

Madame Blondin, les instituts universitaires de technologie (IUT) constituent un univers que je connais bien. J'y suis très attaché. Ils ne sont peut-être pas totalement conformes à l'esprit initial dans lequel ils avaient été créés mais ils fonctionnent. Nous n'allons pas casser ce qui fonctionne ! Ils permettent d'actionner l'ascenseur social mieux que d'autres niveaux, aboutissent à une intégration professionnelle très bonne, les partenariats avec les entreprises sont très forts.

Je suis convaincu que les IUT ont à gagner de leur intégration dans les universités mais que les universités ont également intérêt à respecter l'identité propre de nos IUT. Des règles ont été fixées ; elles sont destinées à s'assurer que les budgets propres sont respectés et à avoir une maîtrise de certains aspects de la politique de ressources humaines. Tout cela est très important ; nous n'y sommes pas encore. J'ai rencontré récemment l'Association des directeurs d'IUT. Nous travaillons avec eux pour corriger un certain nombre de dérives et s'assurer de l'existence d'un contrat pluriannuel. Cela fait partie de ces discussions fortes comme celles que l'on peut avoir dans l'enseignement supérieur.

Je reste toutefois confiant : l'université d'Auvergne a mis en place des partenariats de recherche à un très haut niveau d'excellence sur l'imagerie médicale entre un laboratoire de recherche universitaire et un IUT. Cela ne serait jamais arrivé il y a sept ans -et c'est positif ! C'est là ce que je souhaite et non que l'on règle ses comptes.

Enfin, je précise que le fonds d'urgence figure bien dans les crédits des CROUS.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Pouvez-vous encore répondre à quelques questions, Monsieur le Ministre ?

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Je suis à la disposition de la représentation sénatoriale...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

J'ai été très sensible, Monsieur le Ministre, à ce que vous avez dit à propos de la culture scientifique. Cela rejoint des problèmes que l'on a abordés et qui peuvent se regrouper. Nous avons évoqué les étudiants qui sont obligés de travailler. Quelques-uns d'entre nous, ici, l'ont fait pour payer leurs études.

Certains travaux qui sont confiés à des étudiants en lien avec des collectivités territoriales, peuvent les aider. Il faut qu'il y ait davantage de liens entre les universités et les musées scientifiques qui existent en France ou qui se créent. J'en sais quelque chose puisque j'ai en charge le Grand Musée des confluences à Lyon qui doit ouvrir ses portes dans dix-huit mois. On a besoin de 60 médiateurs ; un gardien de musée, aujourd'hui, n'est plus quelqu'un qui reste assis sur sa chaise. Il s'agit de quelqu'un qui explique une exposition. Nous sommes en train de travailler avec l'université, comme on a commencé à le faire également dans un autre domaine muséographique, celui de la culture gallo-romaine.

Il faut qu'il y ait un partenariat avec les collectivités territoriales qui gèrent ces établissements muséographiques. Cela ne résoudra pas le problème du travail des étudiants, je vous l'accorde -mais cela peut les aider.

Une des plus grandes écoles de la scène en France, celle de la rue Blanche, l'école nationale supérieure des arts et techniques du théâtre (ENSATT), est désormais à Lyon. Elle est restée dans votre giron et non dans celui de la culture. Je sais que vous y tenez. Les étudiants qui étaient autrefois à Paris réalisaient des clips télévisés le soir pour gagner un peu d'argent. A Lyon, c'est plus difficile. On a donc essayé de mettre en place des initiations théâtrales avec des collèges dans le cadre du département. Il existe des initiatives pour mettre en lien les collectivités territoriales, les universités et les étudiants qui peuvent effectivement rencontrer des problèmes financiers.

Debut de section - Permalien
Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Merci de cette intervention à propos d'une école qui m'est en effet très chère, pour une raison simple : c'est la seule école, dans le domaine culturel, qui relève directement de mon ministère -et je crois qu'ils ne s'en plaignent pas !

Il convient de mener une réflexion de fond sur cette dispersion des ministères de tutelle. Lorsqu'on est dans l'enseignement supérieur, il faut être rattaché à un ministère clairement identifié. Cette dispersion se fait parfois au détriment des organismes d'enseignement supérieur qui la subissent car ils constituent une variable d'ajustement au sein de leur ministère de tutelle alors que nous avons, nous, une vision d'ensemble.

En second lieu, l'ENSATT et le pôle de Lyon ont travaillé sur une véritable pluridisciplinarité en faisant en sorte que des enseignements très divers puissent profiter de passerelles et de formations croisées. Je trouve cela extrêmement intéressant ; Lyon est sans doute un des sites où la transdisciplinarité a été poussée le plus loin. C'est un des atouts du site de Lyon selon moi !

Pour le reste, je vous rejoins tout à fait : le travail étudiant n'est pas en soi le signe d'une certaine misère. Il peut être négatif pour les étudiants mais il ne l'est pas systématiquement. Ce qui est négatif, c'est l'étudiant de famille modeste, qui n'est pas boursier, juste au-dessus des seuils d'aides, avec une famille qui a un autre enfant qui étudie en même temps et qui se retrouve, pour financer ses études, à devoir faire un temps plein à des horaires incompatibles avec ses études. C'est cela qui est mauvais.

A l'inverse, dans les chiffres que l'on cite, seule une infime partie correspond à ce cas. Pour le reste, il s'agit d'étudiants qui travaillent uniquement pendant l'été, voire durant des périodes de stage intégrées dans leur cursus. Il faut prendre garde à ne pas tout mélanger.

Quand le travail apporte un plus aux études ou qu'il s'agit d'un travail dans le cadre d'une formation professionnalisante, c'est une bonne chose. Travailler durant l'été met du plomb dans la cervelle. Je l'ai fait ; je pense qu'il en va de même pour vous. C'est bien.

Ainsi que vous l'avez dit, il faut rester attentif aux risques de dérives concernant des emplois où l'on trouve des étudiants qui n'arrivent pas à s'en sortir. On enclenche une spirale infernale pour un travail de peu d'intérêt, qui prend tout leur temps et les conduit à l'échec. Je crois que l'on peut tous se retrouver pour reconnaître que c'est là que nous devons concentrer notre action ! Merci à tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Merci, Monsieur le Ministre. Vous n'avez évité aucun sujet. Nous vous en remercions, ainsi que de votre disponibilité.