Séance en hémicycle du 2 novembre 2010 à 9h30

Résumé de la séance

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  • l’emploi

La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Raymond Couderc, auteur de la question n° 1023, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, voilà un an et demi, j’avais posé une question écrite au ministre chargé du budget sur l’application du décret n° 2008-851 du 26 août 2008 relatif aux conditions d’application et de répartition de la taxe annuelle sur les installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent situées dans les eaux intérieures ou la mer territoriale. N’ayant pas reçu de réponse, je me permets d’interroger de nouveau le Gouvernement.

En effet, ce décret mérite d’être précisé sur au moins deux points.

Le premier point concerne le mode de calcul de la part communale de la taxe spéciale sur les éoliennes en mer.

Le calcul de la répartition de la première moitié du produit de la taxe dépend de la population totale des communes littorales. Selon le code des impôts, le « chiffre de la population pris en compte est celui de la population totale mentionnée à l’article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales et majoré, le cas échéant, de la population résultant conformément aux dispositions des articles R. 2151-4 à R. 2151-7 du même code d’opérations de recensements complémentaires et d’attribution de population fictive ».

Mais le calcul de la fiscalité applicable aux communes littorales est généralement basé sur la dotation globale de fonctionnement. Qu’en est-il dans ce cas ? En somme, quel est le bon mode de calcul de la population à prendre en compte dans le cadre de cette répartition ? Le mode légal ? Le mode basé sur la dotation globale de fonctionnement, avec ou sans double compte ? Ou encore le mode touristique ?

Second point, un mode de calcul de la taxe privilégiant fortement le nombre d’habitants par rapport à la distance à la côte du projet éolien introduit une distorsion préjudiciable au développement de ces projets. En effet, les recettes fiscales peuvent être dopées au-delà du raisonnable pour certaines communes dont le centre-ville est éloigné du projet et n’en ressent que très peu les effets, pour peu que la population soit suffisamment importante par rapport à des communes moins peuplées mais bien plus concernées.

C’est par exemple le cas pour un projet d’éoliennes en mer qui est actuellement en cours entre les départements de l’Hérault et de l’Aude. Les centres-villes d’Agde et de Narbonne ont une population importante, mais sont éloignés de la côte ; les installations seront visibles seulement depuis le Cap d’Agde et Narbonne Plage, qui ont de la population saisonnière. Or les deux villes capteront l’essentiel de la taxe, car leurs stations se trouvent dans les douze milles nautiques, au détriment de communes uniquement littorales, comme Vias, Portiragnes, Sérignan ou Valras-Plage. Concrètement, et selon des simulations utilisant la population légale des derniers recensements, Narbonne toucherait ainsi deux fois et demie plus de taxe que Sérignan ou Valras-Plage, alors qu’elle subira plus faiblement les effets du projet !

Aussi, madame la secrétaire d’État, pourriez-vous préciser à la représentation nationale le mode de répartition de cette taxe sur les éoliennes en mer, afin notamment de mettre fin aux distorsions fiscales pouvant résulter du type de population prise en compte dans le projet ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur

Monsieur le sénateur, votre question m’offre l’occasion de faire un point d’ensemble sur la fiscalité relative aux éoliennes, c'est-à-dire aux « installations de production d’électricité utilisant l’énergie mécanique du vent situées dans les eaux intérieures ou la mer territoriale ».

En effet, un certain nombre de modifications législatives sont intervenues depuis que vous avez posé votre question écrite – je pense notamment à la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche –, et je suis désolée que vous n’ayez pas reçu de réponse.

Vous le savez, la taxe que vous évoquez est due par l’exploitant des éoliennes et assise sur le nombre de mégawatts installés dans chaque unité de production au 1er janvier de l’année d’imposition.

Le produit de cette taxe est affecté au fonds national de compensation de l’énergie éolienne en mer, à l’exception des prélèvements effectués au profit de l’État au titre des frais d’assiette, de recouvrement, ainsi que de dégrèvement et non-valeurs que celui-ci prend à sa charge.

Comme je l’indiquais, la répartition des ressources du fonds en question a été modifiée par la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche.

Avant l’adoption de cette loi, une première moitié du fonds était répartie par le préfet du département dans lequel est installé le point de raccordement au réseau public de distribution ou de transport d’électricité des éoliennes en mer entre les communes littorales d’où elles sont visibles, en tenant compte de la distance qui les sépare de l’un des points du territoire des communes concernées et de la population de ces dernières.

La répartition s’effectue désormais – c’est l’une des modifications introduites par la loi – directement au profit des communes littorales.

La seconde moitié des ressources prélevées était répartie par le conseil général du département dans lequel est installé le point de raccordement de l’éolienne au réseau public de distribution ou de transport d’électricité, dans le cadre d’un fonds départemental pour les activités maritimes de pêche et de plaisance.

Désormais, cette seconde moitié est répartie de la manière suivante : 35 % des ressources sont affectées au comité national de l’organisation professionnelle des pêches maritimes et des élevages marins pour le financement de projets concourant à l’exploitation durable des ressources halieutiques et 15 % des ressources sont affectées, à l’échelle de la façade maritime, au financement de projets concourant au développement durable des autres activités maritimes.

Je vous précise que la loi adoptée en 2010 n’a pas modifié les critères de répartition. C’est donc le décret du 26 août 2008, que vous avez évoqué, qui fixent les conditions de cette répartition. Il est prévu que les communes bénéficiaires du fonds sont les « communes littorales définies à l’article L. 321-2 du code de l’environnement et dont, dans un rayon de 12 milles marins autour d’une unité de production, celle-ci est visible d’au moins un des points de leur territoire. »

La répartition du produit entre les communes concernées résulte de l’application d’un taux moyen, calculé à partir de deux taux tenant respectivement compte de la population et de la distance à l’éolienne.

Le chiffre de la population pris en compte est bien celui de la population totale, d’après le dernier recensement effectué par l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE. C’est d’ailleurs la population qui est habituellement retenue en matière fiscale ; il n’y a pas de spécificité en la matière.

En tout état de cause, ni la législation, modifiée par la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche, ni le décret de 2008 ne font de distinction entre les communes depuis lesquelles les éoliennes maritimes sont visibles et les communes littorales. Les conditions sont cumulatives, le fonds ayant uniquement pour objet de compenser les gênes visuelles ou économiques subies par une collectivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Couderc

Il y a effectivement un problème d’acceptabilité de telles installations par les populations des communes littorales.

Si la majorité des habitants de villes comme Agde ou Narbonne, que j’ai mentionnées tout à l’heure, sont en centre-ville – seule une infime partie de la population réside sur la côte –, certaines communes sont, en revanche, entièrement littorales. Et il risque d’y avoir des difficultés si ces dernières estiment que la répartition retenue les pénalise au profit de communes plus peuplées mais dont les habitants ne vivent pas directement en bord de mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Ronan Kerdraon, auteur de la question n° 990, transmise à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question porte sur l’avenir des missions locales pour l’emploi des jeunes. Celles-ci sont – faut-il le rappeler ? – des pivots dans l’accompagnement d’un public dont le taux de chômage est particulièrement élevé, atteignant 23, 7 %, comme cela a été souligné pendant le débat sur les retraites.

Ces structures œuvrent chaque jour pour permettre une meilleure insertion professionnelle, donc une meilleure insertion sociale. De fait, elles sont indispensables.

Madame la secrétaire d’État, votre collègue Laurent Wauquiez a annoncé très récemment que les financements pour 2011, hors plan de relance, seraient reconduits. Comment le croire alors que les grandes orientations du projet de loi de finances pour 2011 indiquent le contraire ?

Certes, le plan de relance a apporté 51 millions d’euros de crédits supplémentaires à ces structures. Mais il s’agissait d’un palliatif, nombre d’entre elles fonctionnant déjà en conciliant une forte charge de travail et un effectif réduit.

Le document d’orientation sur le budget pluriannuel de l’État sur la période 2011-2013 et le projet de loi de finances pour 2011 ont suscité de nombreuses craintes, que votre collègue n’a pas su lever. Il ne suffit pas de flatter ; encore faut-il apporter des garanties sur le long terme !

Or, dans le même temps, Pôle emploi va mal.

Des agents en contrats précaires voient leur CDD renouvelé parfois jusqu’à sept fois, pour être ensuite remerciés ! Dans mon département, à Loudéac, une personne se trouve dans cette situation. Et vous annoncez dans le même temps la suppression de 800 postes par an dès 2011. Je vous passe les témoignages très cruels des demandeurs d’emploi injustement radiés.

Pour faire face à cette situation, plutôt que de continuer à soutenir les structures de proximité, qui doivent déjà combler les carences de Pôle emploi et dont l’action est ciblée sur une tranche de population en grande difficulté, vous décidez de réduire la participation de l’État dans leurs budgets !

Les moyens supplémentaires accordés dans le cadre du plan de relance n’ont pas suffi à faire progresser l’insertion professionnelle de ces jeunes. Jean-Patrick Gille, député d’Indre-et-Loire et président de l’Union nationale des missions locales, a bien résumé les choses : « on se doutait que ces crédits ne seraient pas pérennisés, mais on s’attendait à ce qu’ils soient retirés progressivement ».

Non seulement vous supprimez ces crédits brutalement, mais, pis, vous décidez de sacrifier plus généralement une grande partie des dispositifs d’aide à l’emploi indispensables. Belle équation ! De moins en moins de personnels, de moins en moins d’outils, pour un service public de l’emploi plus efficace ? C’est le monde à l’envers !

Les contrats d’accompagnement formation seront supprimés à la fin de 2012. Il n’est plus possible aujourd’hui d’engager un jeune en contrat d’initiative emploi par le biais d’un « CIE jeunes », et les collectivités territoriales, parce qu’elles sont étranglées, n’adhéreront plus aux contrats d’accompagnement dans l’emploi passerelle, les « CAE passerelle ».

Conclusion, vous êtes en train de sonner le glas des contrats aidés.

Comment cela se traduira-t-il sur les missions locales ?

Je prendrai le cas de la mission locale de Saint-Brieuc, dont je suis le président. Elle a connu en trois ans 40 % d’augmentation de la fréquentation de jeunes demandeurs d’emploi. En 2009, la structure s’occupait de 3 000 dossiers ; aujourd’hui, elle en gère 3 800. Pourtant le nombre de conseillers n’a pas augmenté. La mission sera peut-être même obligée de licencier dans l’année qui vient.

Un conseiller gère en moyenne 150 jeunes. Il s’agit souvent d’un public peu qualifié et en réelle demande d’accompagnement, ce qui représente deux ou trois rendez-vous par semaine. C’est intenable.

Par ailleurs, vous réduisez le champ d’action des acteurs des missions locales. C’est incompréhensible.

Quels objectifs assignez-vous aux missions locales ? Faire mieux avec toujours moins ?

Le bon fonctionnement de ces structures est entravé faute d’une volonté politique réelle de garantir la pérennité du service public de l’emploi.

Quel sera le devenir de ces missions locales qui font leurs preuves au quotidien dans l’accompagnement des jeunes demandeurs d’emploi ?

Madame la secrétaire d'État, quelles garanties le Gouvernement compte-t-il apporter pour prévenir les risques de licenciement et garantir le bon fonctionnement du service public de l’emploi ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur

Monsieur Kerdraon, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Laurent Wauquiez, qui ne peut être présent dans cet hémicycle ce matin et m’a chargée de vous répondre.

Vous rappelez avec raison le rôle majeur que jouent les missions locales pour accompagner les jeunes dans l’accès à l’emploi, en particulier dans le contexte de crise que nous avons connu.

Je peux vous assurer que le soutien de l’État en faveur de ces missions locales ne faiblira pas. Laurent Wauquiez l’a confirmé lors de la dernière journée nationale des missions locales qui s’est tenue à Bercy le 30 septembre dernier et a signé un protocole avec l’ensemble des associations d’élus – l’Association des maires de France, l’Assemblée des départements de France, l’Association des régions de France –, cofinanceuses avec l’État des missions locales.

Dans le cadre de ce protocole, l’État s’engage à maintenir dans le projet de loi de finances pour 2011 les financements de la mission « Emploi » en direction des missions locales. Néanmoins, ce maintien des crédits doit, à l’évidence, être une incitation à rechercher la performance maximale de chaque mission locale au profit des jeunes accompagnés.

Le renforcement continu par l’État des moyens des missions locales, à travers l’ouverture de la prescription des contrats aidés, une cotraitance rénovée en 2010 avec Pôle emploi, ainsi que le choix de poursuivre au-delà des cinq ans initialement prévus le programme CIVIS, ou contrat d’insertion dans la vie sociale, témoigne de la reconnaissance par le Gouvernement du rôle de « pivot » – vous l’avez très justement évoqué – des missions locales.

Dans ce cadre, le renforcement temporaire effectué par le plan de relance, en 2010, constituait une réponse à la crise exceptionnelle traversée par le pays.

Lors des dix réunions interrégionales avec les présidents et directeurs des missions locales qui ont été organisées par l’Union nationale des missions locales, l’UNML, et le Conseil national des missions locales, le CNML, avec la participation des services du ministère de l’emploi entre avril et juin 2010 pour accompagner le déploiement de cet effort exceptionnel lié à la crise, l’accent a été mis sur le caractère non reconductible des crédits du plan de relance. C’est d’ailleurs le cas de l’ensemble des crédits de la mission « Plan de relance de l’économie ».

Le maintien de moyens pérennes aux missions locales met ces dernières en situation de tenir toute leur place au sein du service public de l’emploi, ainsi que vient de le souligner un récent rapport de l’Inspection générale des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Kerdraon

Madame la secrétaire d'État, je ne suis pas forcément convaincu par la réponse que vous venez de m’apporter.

L’insertion est une réelle chance pour ceux qui n’en ont pas. Or le Gouvernement prend le prétexte d’une prétendue reprise pour supprimer les postes d’insertion.

Chez moi, en Bretagne, ce sont 800 postes qui sont ainsi concernés. Le risque est grand de compliquer le parcours déjà difficile de l’insertion. Nous assistons donc à un véritable désengagement de l’État.

Certes, le Gouvernement a signé un protocole. Laurent Wauquiez, je le sais, a beaucoup complimenté les missions locales et a tenté de les rassurer. Il leur a affirmé qu’elles n’étaient ni des satellites ni des succursales, mais qu’elles se situaient au cœur de la bataille pour l’emploi, qu’elles constituaient la colonne vertébrale de la politique en faveur de l’emploi. Je partage tout à fait cette analyse, mais je souhaiterais qu’elle fasse l’objet d’une traduction concrète.

J’éprouve donc encore quelques inquiétudes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 1025, adressée à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question est malheureusement une nouvelle illustration du désengagement de l’État dans un secteur que l’on pensait épargné, l’emploi, à l’heure où notre pays traverse une très grave crise économique et sociale.

Des associations et des collectivités locales embauchant des personnes en « contrat aidé » ont en effet appris, par une circulaire en date du 8 juillet 2010, que l’État allait faire passer de 90 % à 80 % sa participation à l’emploi de ces personnes dans le secteur non marchand au cours du second semestre de 2010, le Gouvernement incitant à la limitation des heures de travail proposées.

On pourrait comprendre cette décision dans une situation d’euphorie économique et de bons résultats en matière de lutte pour le plein-emploi. Mais le chômage est en augmentation de 3, 9 % en un an et concerne plus de 10 % de la population active. Ce n’est pas que ce que j’appelle de bons résultats !

Cette mesure ressemble à une double peine pour nos concitoyens.

C’est une peine économique et sociale puisque ces contrats aidés sont de vrais garde-fous contre la précarité et constituent des marchepieds appréciables vers l’emploi durable.

Mais c’est une double peine parce que les associations et les collectivités locales qui emploient ces personnes le font au service de la collectivité et accomplissent des missions de service public. Je pense, notamment, aux nombreuses communes en milieu rural qui n’auront pas les moyens de conserver ces personnels. Je pense aussi aux quartiers en difficulté où des associations et des maisons de quartier ne pourront plus employer ces personnes dans la même proportion.

Le désengagement de l’État à hauteur de 10 % menace directement la qualité de ces missions, met en danger ces contrats et, surtout, ne permet plus de nouvelles embauches.

Madame la secrétaire d'État, je pose une question simple : le Gouvernement cessera-t-il de passer aux associations et aux collectivités locales le « mistigri » de la lutte contre la précarité et révisera-t-il son intention de se désengager ?

J’ai entendu votre réponse précédente. La crise n’est pas finie. Les banques ont été sauvées, les grandes entreprises ont été aidées, mais la situation économique et sociale est on ne peut plus grave. Un plan de relance doit être mis en œuvre pour les populations de notre pays, notamment dans les bassins d’emploi qui souffrent terriblement de cette grave crise économique et sociale.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur

Monsieur le sénateur, Laurent Wauquiez vous prie de bien vouloir excuser son absence et m’a chargée de vous transmettre sa réponse.

En 2010, l’État a recouru de façon très massive à l’outil que représentent les contrats aidés pour permettre à des personnes éloignées de l’emploi de remettre le pied à l’étrier et faire en sorte qu’elles ne décrochent pas sur la longue durée.

La loi de finances pour 2010 prévoyait 360 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi, les CAE, et 50 000 contrats d’initiative emploi, les CIE. Le plan « Rebond pour l’emploi » a abondé ces enveloppes. Au total, sur l’année 2010, ce sont 400 000 CAE et 120 000 CIE qui seront conclus, soit le niveau le plus élevé depuis dix ans.

Les plafonds de prise en charge par l’État du coût de ces contrats sont fixés à 95 % pour les CAE et à 30 % pour les CIE. La loi de finances pour 2011 prévoit pour les ateliers et chantiers d’insertion un taux pouvant aller jusqu’à 105 %. Il revient aux préfets de région de déterminer par arrêté les montants d’aide en fonction des publics prioritaires et non par type d’employeurs.

Il semble à cet égard important de souligner que les contrats aidés ne sont pas des aides pour financer des postes correspondant à des emplois pérennes chez certains employeurs. Il s’agit de leviers pour favoriser l’insertion professionnelle de leurs bénéficiaires.

En ce qui concerne la fin de l’année 2010, dans certaines régions, un volume élevé de prescriptions depuis le début de l’année a entraîné une surconsommation des crédits, ce qui a conduit au dernier trimestre à ralentir ou à reporter des prescriptions. Je vous confirme toutefois que les engagements de l’État en 2010 seront totalement respectés. C’est ce que Christine Lagarde et Laurent Wauquiez ont indiqué aux préfets lors d’une réunion de travail la semaine dernière. La priorité sera donnée aux renouvellements des contrats « prioritaires », c'est-à-dire aux assistants de vie scolaire et aux ateliers et chantiers d’insertion.

Cela étant, il faut aussi être clair. Nous devons faire preuve d’un esprit de responsabilité dans un contexte qui exige de chacun d’entre nous un effort pour rétablir l’équilibre des finances publiques, et ce alors que les perspectives sur le marché de l’emploi s’améliorent : les volumes de contrats aidés en 2011 devront s’ajuster. Le budget de 2011 prévoit ainsi 340 000 contrats aidés dans le secteur non marchand et 50 000 contrats aidés dans le secteur marchand. Ce sont des niveaux qui, vous en conviendrez, restent très élevés.

Notre objectif est ainsi de piloter de façon pragmatique et souple cet outil indispensable que sont les contrats aidés, en tenant compte néanmoins de l’effort budgétaire nécessaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Mme la secrétaire d'État, votre réponse appelle de ma part une réaction. Quand le chômage baissera durablement, on pourra envisager la baisse que vous annoncez des contrats aidés.

Selon les derniers chiffres, notre pays compte 28 000 demandeurs d’emploi supplémentaires. C’est une augmentation de la précarité sans précédent. Nous traversons la crise la plus grave depuis 1929.

L’aide à l’économie a été assurée de façon massive ; l’aide à la population, notamment en direction des personnes précaires, des personnes privées de travail, des jeunes parfois qualifiés et n’ayant pas encore trouvé d’emploi durable, doit être non pas seulement maintenue, mais également augmentée.

Nos concitoyens attendent en effet la partie sociale du plan de relance, et elle tarde à venir. Dans une situation aussi grave que la nôtre, il ne faut absolument pas négliger la question déterminante de l’emploi. Nous sortons d’un débat sur les retraites. Nous savons parfaitement que 100 000 personnes cotisant auprès des différentes caisses de retraite pour la protection sociale, cela représente 1, 5 milliard d’euros.

En se désengageant du secteur de l’emploi, le Gouvernement aggrave les déficits sociaux et le déficit des retraites. C’est pourquoi toute notre attention, aujourd'hui, doit être portée sur la question de l’emploi. Le désengagement de l’État dans ce secteur est dommageable. Le Gouvernement doit revoir sa copie.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 1039, adressée à M. le ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Ma question porte sur l’accord du 17 octobre 2000 sur l’application de l’article 65 de la convention sur la délivrance de brevets européens, plus communément appelé « accord de Londres », qui traite de la traduction des brevets européens.

Après de longues années de combat, cet accord, dont la France a eu l’initiative, est entré en vigueur en 2008. Il a pour principale caractéristique de réduire très sensiblement les coûts liés à la traduction des brevets européens.

Le texte fondateur dans ce domaine – la convention sur la délivrance de brevets européens du 5 octobre 1973, dite « convention de Munich » – prévoyait qu’un brevet puisse être traduit dans chacune des langues des vingt-sept États membres de l’Union européenne.

Cette disposition constitue en fait une sorte d’impôt sur l’innovation que l’Europe s’impose à elle-même. Si l’on considère, mes chers collègues, qu’une traduction coûte de 2 000 euros à 3 000 euros et si l’on multiplie ce coût par le nombre de pays désignés, c’est-à-dire sept ou huit, c’est bien un impôt sur l’innovation avoisinant 20 000 euros que nous nous appliquons à nous-mêmes. Nous nous mettons ainsi en position de faiblesse, en termes de compétitivité, par rapport aux États-Unis, au Japon ou encore à la Corée.

L’accord de Londres vise donc à ne permettre le dépôt et la traduction des brevets que dans une des trois langues officielles de l’Office européen des brevets, c'est-à-dire le français, l’anglais ou l’allemand.

Cet accord étant en vigueur depuis maintenant deux ans et demi, je souhaite interroger le Gouvernement sur sa mise en œuvre. Combien de pays l’ont ratifié ? Quel bilan le Gouvernement tire-t-il de son application ? Quels sont les effets mesurés, s’agissant de la réduction de coûts pour les déposants français et européens ?

Enfin, questions subsidiaires relatives aux préoccupations exprimées quant à l’emploi des traducteurs de brevets, quelles mesures le Gouvernement a-t-il pris par rapport à ces professionnels et comment ce dossier progresse-t-il ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur

Vous avez raison, monsieur Yung, de souligner l’importance de cet accord de Londres en matière de réduction des coûts et de facilitation de l’activité d’innovation dans les entreprises. Il y a là, nous le savons bien, une clé de la préservation de la compétitivité européenne et française.

Après plus de deux ans d’application de ce dispositif, le ministre chargé de l’industrie a engagé une évaluation complète des économies réalisées et des bénéfices retirés de l’accord. Cette étude est en cours de finalisation et, bien évidemment, mesdames, messieurs les sénateurs, elle vous sera communiquée.

Les premières analyses des résultats de l’enquête menée auprès des entreprises confirment d’ores et déjà que l’accès aux brevets est moins coûteux et donc plus attractif. Selon les États désignés, les nouvelles règles de traduction permettent de réaliser une économie de 25 % à 30 % des coûts. Les entreprises, pour la plupart, utilisent cette dernière pour élargir la couverture géographique de leurs brevets, en demandant une protection dans un plus grand nombre de pays qu’auparavant. Cette évolution est évidemment très positive, puisqu’elle permet une valorisation plus large, sur un marché potentiel plus important, des innovations.

S’agissant des pays signataires, de toute évidence, plus leur nombre augmentera, plus l’effet sera important et bénéfique. À ce jour, quinze États sont parties à l’accord de Londres, le dernier à y avoir adhéré étant la Lituanie, qui l’applique depuis le 1er mai 2009. La prochaine entrée en vigueur de l’accord aura lieu en Hongrie, à la date du 1er janvier 2011.

Parallèlement, comme vous le savez, monsieur le Yung, les instances européennes travaillent à la création du brevet de l’Union européenne, qui sera un titre unique de protection, valable dans l’ensemble des pays européens

Mme Catherine Tasca acquiesce.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur

D’importants progrès sont en cours de réalisation sur cette question, notamment grâce aux propositions du commissaire européen chargé du marché intérieur et des services, Michel Barnier.

Je réponds enfin à votre dernière série de questions. Vous les avez qualifiées de « subsidiaires », mais, comme le prouve d’ailleurs le fait même que vous les ayez posées, elles ont toute leur importance.

S’agissant donc de l’activité des traducteurs de brevets, deux catégories de mesures ont été mises en place : des mesures de formation et de reconversion, d’une part, et des mesures d’accompagnement sociales et fiscales, d’autre part.

Sur le premier point, plusieurs sessions de formation spécifiques ont été organisées par l’Institut européen entreprise et propriété intellectuelle, ou IEEPI.

Des crédits ont également été engagés pour encourager la traduction des normes en français, activité extrêmement importante pour laquelle les traducteurs de brevets disposent de compétences adaptées. L’Association française de normalisation, l’AFNOR, a lancé un appel d’offres pour sélectionner les traducteurs intéressés par ce type de missions et, grâce à ces contrats passés avec l’AFNOR, plusieurs traducteurs de brevets ont pu renouveler leurs activités.

Sur le second point – les mesures d’accompagnement sociales et fiscales –, la situation des traducteurs de brevets est examinée au cas par cas par les URSSAF, les trésoreries et les centres des impôts dont ils relèvent. Les traducteurs peuvent se rapprocher de ces différents services. Des solutions spécifiques à chaque cas particulier ont été recherchées avec les personnes concernées, afin d’assurer, pour elles aussi, la mise en œuvre la plus efficace de l’accord de Londres.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je souhaiterais faire deux commentaires.

Je vois que quinze pays ont signé l’accord de Londres. Ceux qui ne sont pas signataires de ce dernier vont se trouver progressivement isolés : ils ne seront pas désignés dans la mesure où leur désignation impliquerait une dépense de 2 000 à 3 000 euros supplémentaires. Ils seront donc rapidement conduits à ratifier l’accord.

Par ailleurs, je pense que nous ne sommes pas loin d’aboutir à un accord sur les deux points importants qui sont en cours de discussion : le brevet de l’Union européenne – l’ancien brevet communautaire – et l’accord juridictionnel sur la mise en place d’un tribunal compétent en matière de brevets. De longues discussions ont été menées et les deux dernières présidences du Conseil de l’Union européenne ont été très actives.

Néanmoins, un blocage essentiel demeure sur le problème de la langue, celui de l’Espagne.

Sachant que nous sommes réellement très proches d’un accord, il me semble que la France devrait manifester plus d’énergie sur cette question et faire pression sur le gouvernement espagnol. Elle agit, d’après moi, avec une certaine timidité, alors même qu’elle a été à l’initiative de l’accord de Londres, qu’elle joue et pourra jouer un rôle central sur ces sujets, notamment dans le système juridictionnel.

Tel est le message que je souhaitais transmettre : la France devrait faire savoir à l’Espagne toute l’importance d’une convergence dans ces domaines.

D’ailleurs, pourquoi ne pas envisager des coopérations renforcées, c’est-à-dire des coopérations excluant les pays non signataires ? Après tout, l’accord de Londres, sans entrer dans le système communautaire, est une bonne illustration de cette mécanique…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de M. le secrétaire d’État à la justice, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix heures cinq, est reprise à dix heures quinze.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Michel Magras, auteur de la question n° 1018, adressée à Mme la ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

Monsieur le secrétaire d'État, dans les domaines de compétence délimités par l’article L.O. 6214-3 du code général des collectivités territoriales, la collectivité de Saint-Barthélemy est habilitée à fixer les règles applicables sur l’ensemble de son territoire. Elle peut donc décider de remplacer les règles en vigueur en métropole par abrogation d’un code ou d’une loi intervenant dans ces domaines.

Parallèlement, l’article L.O. 6214-5 du même code permet à la collectivité de participer, sous le contrôle de l’État, à l’exercice de la compétence en matière de droit pénal en vue de la répression des infractions aux règles qu’elle a fixées.

Pour mémoire, la procédure établie à cet effet par l’article L.O. 6251-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que les actes fixant les sanctions pénales sont d’abord transmis au ministre de l’outre-mer qui les transmet à son tour au ministre de la justice. Les actes doivent ensuite faire l’objet d’un décret d’approbation totale, partielle ou d’un refus d’approbation avant leur ratification par le Parlement pour qu’ils puissent entrer en vigueur.

Mais alors que la loi organique laisse un délai de deux mois après transmission au Gouvernement pour la promulgation du décret, ce délai est en réalité largement dépassé.

L’acte fixant les sanctions pénales en matière d’urbanisme a été promulgué par le décret n° 2009-1645 du 23 décembre 2009 et est en cours de ratification. Il n’est donc pas en vigueur.

S’agissant des sanctions pénales des codes des contributions locales et de l’environnement, les décrets sont toujours en attente.

Or la non-applicabilité de ces dispositions pose aujourd’hui des difficultés d’ordre pratique.

En l’occurrence, dès lors que le code national a été abrogé par la collectivité afin d’y substituer un code local, il convient de savoir quelle règle s’applique dans le silence du code local.

Je vous serais donc reconnaissant, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir me préciser quelles sont les règles pénales applicables dans cette situation et, au-delà, s’il convient de considérer que, même en cas d’abrogation du code national, les sanctions pénales continuent d’être applicables à Saint-Barthélemy.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice

Monsieur Magras, votre question, très concrète, est tout à fait pertinente.

Saint-Barthélemy, collectivité d’outre-mer autonome, dispose en effet aujourd'hui de compétences plus étendues que celles qui sont dévolues aux départements et aux régions, notamment en matière d’urbanisme.

La collectivité de Saint-Barthélemy peut donc « participer, sous le contrôle de l’État, à l’exercice des compétences qui relèvent de la compétence de l’État en matière de droit pénal », en adoptant « des actes dans le domaine du droit pénal aux seules fins mentionnées à l’article L.O. 6214-5 ».

Ces actes doivent être approuvés par les autorités de l’État qui peuvent les refuser pour des motifs de légalité comme d’opportunité.

Conformément à l’article 74 de la Constitution, les sanctions pénales définies par le législateur national continuent dès lors à s’appliquer sur le territoire de la collectivité lorsque les actes pris localement ne sont pas encore entrés en vigueur. C’est la situation que, précisément, vous avez décrite à l’instant.

Si, toutefois, les incriminations nationales spécifiques en matière d’urbanisme s’avèrent en pratique inapplicables localement – c’est le cas de figure que vous évoquiez – en raison de l’abrogation du code national, il appartient aux autorités locales de faire application des infractions de droit commun les plus adaptées aux faits de l’espèce, l’infraction de mise en danger d’autrui notamment.

Nous sommes donc là dans une démarche d’interprétation des textes, qu’il convient d’adapter à la réalité en se référant aux éléments de droit existant. C’est au fond la méthode que vous suggériez dans votre question qui devra s’appliquer. Telle est la réponse que je peux vous apporter, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

M. Michel Magras. Monsieur le secrétaire d'État, j’ai bien compris que, dans l’attente de l’applicabilité des sanctions locales, les sanctions nationales restent applicables sur l’ensemble du territoire, à condition, bien entendu, qu’elles correspondent aux mêmes infractions.

M. le secrétaire d’État acquiesce.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Magras

On peut toutefois regretter que la procédure, qui est particulièrement bien encadrée par la loi puisqu’elle fixe les limites à ne pas dépasser, donne lieu à un processus relativement long, susceptible de retarder l’entrée en vigueur des règles que nous fixons.

Cela étant, je vous remercie particulièrement de la clarté de votre réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Virginie Klès, auteur de la question n° 988, adressée à M. le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Monsieur le président, mes chers collègues, j’ai souhaité poser cette question orale pour rappeler à M. Woerth les termes de la question écrite n° 08863, adressée le 28 mai 2009 à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sous le titre « Mise en œuvre des contrats d’autonomie », qui n’a toujours pas obtenu de réponse.

Monsieur Bockel, je vous remercie donc d’être venu y répondre.

En effet, dans le contexte actuel de chômage très élevé des jeunes, les résultats et les coûts de la mise en place de ces contrats d’autonomie posent problème aux acteurs de la politique de l’emploi. D’ici à 2011, le Gouvernement visait l’embauche de 45 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans et issus de zones urbaines sensibles ou vivant dans des territoires couverts par un contrat urbain de cohésion sociale.

L’encadrement et le suivi de ces jeunes inscrits dans ce système ont été confiés à des opérateurs privés, lesquels ont parfois rencontré des difficultés et ont eu recours à des partenariats avec les missions locales et Pôle emploi. D’ailleurs, le dispositif de délégation au secteur privé avait suscité des interrogations en 2008, ainsi que le coût prévu de ces mesures, notamment par comparaison avec les CIVIS, les contrats d’insertion dans la vie sociale, qui, eux, étaient uniquement confiés aux missions locales.

Le ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique a annoncé en avril 2010 qu’après des débuts difficiles 26 486 contrats d’autonomie étaient signés et que 4 247 jeunes bénéficiaient désormais d’un emploi stable, d’une formation qualifiante ou possédaient leur propre entreprise, c'est-à-dire une sortie positive.

Un vrai bilan s’impose aujourd'hui. Il est légitime que la représentation nationale soit informée du taux réel de réalisation du dispositif et des sorties positives ou non, du succès ou des échecs des méthodes employées par les prestataires désignés, du rôle réel des missions locales et de leur plus-value dans le système, y compris quand elles ont été seules à répondre et seules à mettre en œuvre le dispositif. Il est également légitime que nous soyons informés du montant des sommes engagées et, surtout, du nombre de participants insérés durablement dans l’emploi, ainsi que des critères utilisés pour mesurer qualitativement et quantitativement ces sorties.

En conséquence, je renouvelle ma demande tendant à ce que M. le ministre du travail nous précise ses intentions à ce sujet, ainsi que la nature des informations dont il dispose quant à l’évaluation de ce dispositif.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice

Madame la sénatrice, je vais en effet vous répondre au nom du ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence ce matin. Je le fais d’autant plus volontiers que le sujet dont traite votre question me tient également à cœur en tant qu’élu local.

À la mi-septembre 2010, 36 940 contrats d’autonomie avaient été signés depuis le lancement de ce programme en septembre 2008. Votre première question en 2009 était donc intervenue à mi-chemin. Nous avons aujourd'hui une meilleure visibilité. Ces contrats représentent 82 % des 45 000 contrats que le Gouvernement s’était fixés comme objectif à l’horizon 2011. Nous pouvons considérer que cet objectif sera atteint, ce qui est une bonne nouvelle.

En effet, cela signifie que les difficultés de démarrage qu’ont pu rencontrer quelques-uns des trente-cinq départements concernés par ce dispositif ont été surmontées : aujourd’hui, le contrat d’autonomie est reconnu comme un outil complémentaire – et non pas concurrent – de l’action du service public de l’emploi, et il profite aux jeunes les plus éloignés du marché du travail, conformément à l’objectif au départ.

Ainsi, ce dispositif, qui concerne près de 7 500 jeunes, a permis à 63 % d’entre eux d’accéder à un emploi et à 35 % d’entre eux de suivre une formation qualifiante. C’est rassurant et encourageant pour les presque 14 000 contrats qui sont encore aujourd’hui au début du dispositif et qui doivent se poursuivre.

Parmi les jeunes qui suivent la totalité du parcours, 50 % retrouvent un emploi, accèdent à une formation qualifiante ou créent une entreprise. C’est un résultat d’autant plus encourageant qu’un jeune sur deux en contrat d’autonomie n’a aucune qualification au départ. Ce résultat justifie l’engagement important de l’État dans ce dispositif, pour un montant total dépensé à ce jour d’un peu plus de 61 millions d’euros.

Au-delà de ces chiffres, je tiens à vous rassurer sur deux points.

Tout d’abord, sur ce dispositif comme sur l’ensemble des politiques conduites en ce domaine, le Gouvernement est très attaché à l’évaluation des résultats. La direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle, la DGEFP, a mis en place un système d’information qui est alimenté directement par les opérateurs ; il permet de disposer chaque semaine de toutes les données relatives aux entrées et sorties du dispositif.

Sur le plan plus « qualitatif », une première évaluation a été conduite par la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, en lien avec les directions concernées, sur la base d’études monographiques.

Cette première évaluation montre que ce dispositif est très apprécié des jeunes, qui soulignent l’intensité de l’accompagnement et la disponibilité des opérateurs. Nous avons sans doute à progresser sur la prospection des emplois ou le partenariat avec les acteurs économiques, mais les choses s’améliorent, comme l’illustre le fait que le taux de sortie positive est en augmentation depuis 2009.

Des enquêtes complémentaires sont en cours, dont les premiers résultats devraient être connus à la fin de l’année. Au vu de ceux-ci, et avant la fin du dispositif prévu au premier quadrimestre 2011, nous rediscuterons avec le secrétaire d’État chargé de l’emploi, Laurent Wauquiez, des suites de ce dispositif. L’accompagnement des jeunes les plus éloignés du marché du travail vers l’emploi demeure l’une des priorités du Gouvernement, que nous partageons tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie des chiffres que vous nous avez communiqués. Néanmoins, ils ne répondent pas à mes questions sur le plan qualitatif par rapport aux objectifs annoncés.

On nous dit que les jeunes les plus éloignés de l’emploi ont un taux de sortie positive du dispositif. Mais sur quels critères se fonde-t-on ? Quel a été le rôle réel des missions locales dans les cas où elles ont accompagné les partenaires privés ayant obtenu les marchés ? Ont-elles reçu des crédits de la part de ces partenaires privés ? J’aimerais savoir quelle part d’argent a été directement donnée aux jeunes et quelle part est restée dans les cabinets privés qui avaient obtenu ce marché.

Il me manque encore, vous le voyez, beaucoup d’informations pour avoir une réelle évaluation du dispositif. Je continue à me demander pourquoi ce dernier a été créé sans que lui soient délégués un certain nombre de crédits pour le financer dans son ensemble puisque, manifestement, l’argent existe.

Donc, redonnez des crédits aux missions locales pour les remettre au cœur du dispositif en tant que prescripteurs, car elles sont les mieux à même de repérer les jeunes les plus en difficulté et de les orienter non pas vers ce seul dispositif mais vers celui dont ils ont besoin !

Pour moi, les jeunes les plus éloignés de l’emploi ne peuvent pas être accompagnés uniquement par des partenaires privés. Même si ces derniers ont la connaissance des entreprises, l’accompagnement doit être beaucoup plus poussé. Il existe aujourd'hui de nombreux dispositifs, tels que les cadets de la République ou l’école de la deuxième chance, qui mériteraient de recevoir beaucoup plus de crédits, surtout lorsque l’on voit tout l’argent accordé au privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Claude Biwer, en remplacement de M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 1014, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Madame la secrétaire d'État, je souhaite, à la demande de mon collègue Yves Détraigne, appeler votre attention sur les retards pris dans l’application du principe dit de « responsabilité élargie des producteurs » à la filière de traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux, DASRI, des patients en auto-traitement.

Cette responsabilité, je le rappelle, repose sur un décret qui a été publié le 22 octobre dernier, décret familièrement appelé « boîtes jaunes », qui prévoit notamment que la mise sur le marché de médicaments à l’origine de DASRI doit être accompagnée de la fourniture gratuite de boîtes vides tant aux pharmacies chargées de les distribuer qu’aux patients en auto-traitement.

Elle repose également sur un décret, toujours en attente de publication, qui impose la collecte des boîtes pleines en pharmacie et le financement de la collecte et de l’élimination par les metteurs sur marché, via un éco-organisme qui n’a toujours pas vu le jour.

Plus de huit mois après la date d’application légale du dispositif et alors que l’article 30 de la loi de finances de 2009 prévoyait la mise en œuvre, à partir du 1er janvier 2010, de dispositifs de collecte de proximité des DASRI en privilégiant, faute de dispositifs locaux, le retour des DASRI en pharmacies, la filière n’est toujours pas en place.

Je souligne que près de 10 % des déchets d’activités de soins à risques infectieux sont encore mélangés aux déchets ménagers banals malgré la promulgation, en juillet dernier, de la loi du 12 juillet 2010, dite Grenelle II, portant engagement national pour l’environnement, qui contraint désormais les pharmacies, laboratoires d’analyse et établissements de soins à collecter gratuitement ces déchets. L’Hexagone compte donc à ce jour 4 000 à 5 000 centres de collecte, alors qu’il en faudrait 10 000 pour couvrir les besoins.

Considérant que près de 2 millions de patients en auto-traitement attendent une solution adaptée, qu’il y va de la responsabilité de l’État d’œuvrer rapidement en ce sens et que la mise en œuvre de ces décrets présente un caractère particulièrement urgent au vu des accidents qui continuent de se produire dans les centres de tri, je vous demande de bien vouloir me préciser sous quel délai sera désormais mise en place une filière sécurisée pour l’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux.

Debut de section - Permalien
Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports

Monsieur le sénateur, vous attirez l’attention de la ministre de la santé et des sports, que je représente aujourd'hui, sur la question du traitement des déchets d’activités de soins à risques infectieux.

L’article de la loi de finances pour 2009 auquel vous faites allusion posait un problème important. En effet, il ne différenciait pas les DASRI coupant ou piquant, qui peuvent poser des problèmes de contamination, des DASRI ni coupant ni tranchant, comme les compresses, qui peuvent être éliminés par la voie des déchets ménagers. Si leur collecte devait également être confiée aux pharmaciens, des problèmes insurmontables de stockage et d’hygiène se poseraient alors.

C’est pourquoi l’article 187 de la loi Grenelle II prévoit de restreindre aux DASRI perforants les déchets devant entrer dans cette filière d’élimination.

Le décret d’application prévu par cet article est en cours de rédaction. Quant au décret concernant la mise à disposition de conteneurs pour les patients en auto-traitement, il a été publié au Journal officiel du 24 octobre 2010.

Il indique que les patients en auto-traitement générant des DASRI piquant ou coupant recevront de leur pharmacien un collecteur de déchets d’un volume correspondant à celui des produits délivrés.

Ces conteneurs seront fournis gratuitement aux pharmaciens par les fabricants de médicaments et de dispositifs médicaux piquant ou tranchant. Ce décret entrera en vigueur le 1er novembre 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Biwer

Je suis très satisfait de la réponse apportée par Mme la secrétaire d'État. Je regrette toutefois que le décret n’entre en vigueur que le 1er novembre 2011, ce qui est tout de même une date un peu lointaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Catherine Tasca, auteur de la question n° 1019, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Madame la secrétaire d'État, la confirmation de la fermeture de l’unité de cardiologie interventionnelle du centre hospitalier de Mantes-la-Jolie suscite une forte incompréhension au sein de la population de ce bassin de vie.

Cette incompréhension est partagée par les élus locaux et les professionnels de santé qui ont rapidement constitué un comité Cœur Hôpital Mantes, dont je salue la délégation conduite par Patrick Lefoulon, premier adjoint au maire de Mantes-la-Ville.

L’hôpital public de Mantes s’était vu autorisé en 2008 par l’Agence régionale de l’hospitalisation, l’ARH, à se doter d’une salle de coronarographie. Cette autorisation a été prise sur la base de plusieurs études portant sur la nécessité pour ce bassin de vie et les départements limitrophes de disposer d’un tel équipement. L’implantation de ce matériel performant pour un coût de 1, 2 million d’euros s’est accompagnée du recrutement de deux médecins et de la formation des personnels nécessaires. Une équipe a été mise en place pour assurer le service vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Moins de six mois après l’ouverture de cette unité, l’Agence régionale de la santé, l’ARS, en décrète la fermeture. Cette décision reste incompréhensible à plus d’un titre.

Tout d’abord, cette fermeture constitue un véritable gâchis humain et financier au vu des moyens investis tant au niveau du personnel que du budget alloué à la rénovation du service.

Mais, surtout, elle repose sur une application rigide de l’arrêté du 14 avril 2009 : elle part du constat comptable d’un nombre d’actes inférieur au seuil fixé par le décret, ce qui apparaît pourtant assez normal pour un service opérationnel depuis seulement six mois.

Or, on observe sur cette même période une augmentation ininterrompue des actes réalisés. Ainsi, les examens pris globalement ont crû de 29 %, les coronarographies de 14 % et les dilatations coronaires en urgence de 304 %, ce qui devait assurer à cette unité d’atteindre, au plus tard au premier semestre de 2011, l’objectif des 350 actes.

Enfin, nous avons appris mercredi dernier la fermeture de l’unité de soins intensifs cardiologiques. L’ARS avait pourtant assuré que la fermeture de l’unité de cardiologie interventionnelle ne remettait pas en cause l’unité de soins intensifs cardiologiques.

On nous affirme que cette fermeture est temporaire, mais il est manifeste que c’est l’ensemble du service de cardiologie de l’hôpital public de Mantes-la-Jolie qui est aujourd’hui menacé.

Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement entend-il demander à l’ARS de revenir sur cette fermeture et de proroger l’ouverture du service de cardiologie interventionnelle pour une période de dix-huit mois, seule décision à même de permettre une évaluation objective de la pertinence de cette offre de soins ?

Le Mantois, pauvre en structures de santé publique, est un bassin de vie qui regroupe des populations souvent défavorisées, mais qui connaît une réelle expansion démographique et pour lequel les élus travaillent à dessiner de nouvelles perspectives de développement.

Votre réponse nous éclairera sur la volonté réelle du Gouvernement de soutenir ou non le développement de ce bassin de vie, trop longtemps laissé pour compte.

Debut de section - Permalien
Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports

Madame la sénatrice, vous interrogez la ministre de la santé et des sports sur le devenir du service de cardiologie interventionnelle du centre hospitalier de Mantes-la-Jolie.

De nouveaux décrets définissant les conditions techniques de fonctionnement conditionnent désormais l’autorisation d’activité de cardiologie interventionnelle à un seuil minimal d’activité fixé à 350 actes de cardiologie interventionnelle par an. L’Agence régionale d’hospitalisation d’Île-de-France a logiquement intégré cette condition dans son nouveau schéma régional d’organisation sanitaire portant sur l’activité de cardiologie. Les établissements souhaitant assurer une activité de cardiologie interventionnelle ont été invités à déposer, au cours de l’été 2010, un dossier de demande d’autorisation.

Pour sa part, le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie avait développé, depuis 2007, une activité dans ce domaine, sans obtenir l’accord préalable de l’ARH d’Île-de-France. Il a, de ce fait, pris la décision de ne pas déposer de dossier de demande d’autorisation auprès de l’Agence régionale de santé d’Île-de-France. L’établissement, conscient de ne pas être à même d’atteindre le seuil fixé, a renoncé à ce projet. Cette activité a certes progressé entre 2007 et 2009, mais sans atteindre le seuil requis : 86 actes d’angioplastie coronarienne en 2007, 83 en 2008 et 136 en 2009. L’activité se situe par conséquent en dessous du seuil réglementaire et, au regard des conditions d’implantation, l’ARS d’Île-de-France n’aurait pu autoriser cette activité.

Elle l’aurait d’autant moins autorisée que le département des Yvelines comprend quatre centres pratiquant l’activité de cardiologie interventionnelle, qui garantissent une prise en charge en urgence des patients de façon satisfaisante : deux centres publics – Versailles et Poissy-Saint-Germain-en-Laye – et deux centres privés – Evecquemont et Parly 2.

La sécurité des soins est donc assurée pour les habitants du territoire de Mantes-la-Jolie, et nous n’avons de problèmes ni d’aménagement du territoire ni d’accessibilité à une offre de soins publique.

Une coopération active peut, d’ailleurs, être engagée par le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie avec le centre d’Evecquemont, situé à vingt-sept kilomètres. Elle permettrait aux praticiens du centre hospitalier qui le souhaitent de poursuivre une activité de cardiologie interventionnelle.

Cette action, outre qu’elle renforcera les liens entre les structures au bénéfice des patients, sera de nature à maintenir l’attractivité du centre hospitalier pour le recrutement de nouveaux cardiologues. Roselyne Bachelot a demandé à l’ARS d’Île-de-France de solliciter le centre d’Evecquemont pour connaître ses projets dans ce domaine et l’inciter à mettre en place une telle coopération.

Le centre hospitalier de Mantes-la-Jolie a donc logiquement cessé son activité de cardiologie interventionnelle en juillet 2010, sans qu’il en résulte de manquement à la continuité des soins, et poursuit ses activités d’hospitalisation complète et de soins intensifs en cardiologie.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Madame la secrétaire d’État, votre réponse ne nous rassure pas et, de surcroît, vous n’apportez aucun élément d’explication. Nul ne peut croire que la création d’un service de cette importance à l’hôpital de Mantes-la-Jolie s’est faite sans autorisation : il est bien évident que le service avait obtenu le feu vert de l’Agence. Nous avons donc véritablement la démonstration de l’impéritie de la gestion du secteur public de la santé.

Les règles ont changé. Nous demandons au Gouvernement de suspendre la décision de fermeture et de donner une chance réelle à l’établissement de respecter le contrat, c'est-à-dire d’atteindre le nombre d’actes requis. L’établissement était prêt à le faire. Claude Évin, le directeur de l’ARS, a d’ailleurs lui-même reconnu que le nombre d’actes était en progression constante.

Vous devez savoir que la carte de santé du département des Yvelines est très pauvre en structures publiques. L’hôpital de Mantes-la-Jolie a été inauguré en grande pompe par le président Chirac il n’y a pas si longtemps. Il dessert une population particulière, nombreuse, en expansion, et souvent très défavorisée. La décision qui a été prise et la réponse que vous venez de me faire démontrent que l’État et l’Agence ont choisi de favoriser le développement des structures privées.

Vous nous renvoyez sur l’hôpital d’Evecquemont, structure privée, qui couvre d'ailleurs un territoire beaucoup moins bien desservi que celui de Mantes-la-Jolie. Il est clair que le Gouvernement n’a pas comme objectif d’étendre le secteur public de santé. Il en va d’ailleurs de même à Trappes, où un hôpital privé assure le service aux habitants.

Nous ne sommes donc absolument pas satisfaits de l’option qui semble être la vôtre dans ce domaine. Toute confirmation de la fermeture de l’unité de cardiologie interventionnelle équivaudrait pour le département des Yvelines à creuser un peu plus les inégalités d’accès aux soins et la fracture territoriale.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Gilbert Barbier, auteur de la question n° 1022, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Monsieur le président, mes chers collègues, le projet Rhin-Rhône, né dans les années quatre-vingt-dix, avait pour vocation de réaliser une desserte ferroviaire verticale allant de l’Alsace à Barcelone, ce qui aurait permis de réaliser le premier TGV ne reliant pas Paris.

Le 11 décembre 2011, la branche Est du TGV Rhin-Rhône sera mise en service. Les deux autres branches, Est et Sud, ont toujours figuré au projet et devaient, notamment pour la branche Sud, avancer concomitamment ou dans la foulée de la branche Est. On m’a toujours assuré que la branche Sud ne serait, en aucun cas, remise en cause. Or, depuis quelque temps, il n’est plus possible de parler de cette branche sans entendre : « Si elle se fait... ».

Certes, il y a eu les études préalables, l’enquête publique avec des propositions de tracés, notamment pour la partie nord, dans le département du Jura, pour lequel j’ai toujours pensé que le tracé longeant l’autoroute A 39 n’était pas la bonne option.

Pourtant, Réseau ferré de France vient seulement de remettre sa copie au préfet de région coordinateur, alors qu’il aurait dû le faire au début de l’année. Par ailleurs, il semble que des études socio-économiques complémentaires aient été commandées. Doit-on y voir un enterrement de la branche Sud ? Beaucoup le murmurent et les opposants se frottent déjà les mains.

Il faut dire que ni l’Union européenne, ni l’État, ni RFF, ni les collectivités n’ont encore chiffré leur participation financière à ce projet. Pis, tout en se disant favorable à celui-ci, la présidente de la région Franche-Comté a laissé entendre qu’elle n’envisageait pas de le financer, arguant des difficultés financières de la région.

Il semble aussi que la branche Sud ne figure plus parmi les axes prioritaires du schéma européen des infrastructures de transport.

Je peux comprendre que les estimations portant sur la rentabilité d’une telle ligne – 1 000 à 1 100 voyageurs par jour – ne soient guère enthousiasmantes pour d’éventuels financeurs. En tant qu’élu jurassien, il est donc de mon devoir d’insister : sans cette branche, sans oublier les gares, il n’y aura plus de TGV à long terme dans le Jura !

Les Jurassiens comme les élus des communes concernées par les différents tracés sont dans l’attente. Ils aimeraient rester optimistes, mais ils sont légitimement inquiets devant les rumeurs qui, elles, circulent à grande vitesse.

Dans ce dossier, il est temps de trancher, d’autant que des sommes importantes ont déjà été englouties dans des études. Si cette branche est jugée non rentable, si personne n’envisage de la financer, qu’on le dise franchement au lieu d’ordonner des études complémentaires.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous, sans utiliser la langue de bois, apporter une réponse à tous ceux qui soutiennent le projet de branche Sud ?

Debut de section - Permalien
Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports

Monsieur le sénateur, vous avez souhaité appeler l’attention du secrétaire d’État chargé des transports sur l’état d’avancement du projet de branche Sud du TGV Rhin-Rhône.

Comme vous le savez, la branche Sud de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône doit relier la branche Est entre Dijon et Mulhouse, qui est en cours de construction depuis 2006 et sera mise en service à la fin de 2011, à l’agglomération lyonnaise. Ce projet vise à réduire les temps de parcours vers la vallée du Rhône et l’ensemble de l’arc méditerranéen ; il vise également à permettre la circulation d’un plus grand nombre de trains de fret sur l’axe nord-sud.

Dans le cadre des études préliminaires de la branche Sud, Réseau ferré de France, maître d’ouvrage de l’opération, a étudié différents fuseaux de passage. Une consultation formelle de l’ensemble des acteurs concernés, et donc des élus, a été menée jusqu’au 31 décembre 2009. Le préfet de région Franche-Comté, préfet coordonnateur du projet, remettra à Jean-Louis Borloo le bilan de cette consultation et son avis dans les toutes prochaines semaines.

Comme vous le soulignez, cette consultation a donné lieu à de nombreuses contributions et à de multiples prises de position de la part de tous les acteurs concernés. Il en sera fait une analyse approfondie dès que les conclusions du préfet de région auront été transmises. Le Gouvernement sera donc en mesure de décider des suites à donner à l’étude de ce projet après avoir pris connaissance des conclusions des études préliminaires, des résultats de cette consultation et du rapport du préfet.

Je souhaite également vous préciser que ce projet est inscrit au programme des 2 000 kilomètres de lignes ferroviaires nouvelles à grande vitesse, à lancer d’ici à 2020, figurant dans la loi Grenelle I. Ce projet est d’ailleurs inscrit dans l’avant-projet du schéma national des infrastructures de transport publié au mois de juillet.

Vous le savez, le schéma sera soumis au Parlement dans le cadre d’un débat sans vote, qui doit intervenir, au sein de votre assemblée, d’ici à la fin de l’année. Vous aurez alors l’occasion de rappeler l’attachement que vous portez à ce projet.

Je vous confirme également que, comme la branche Est, la branche Sud de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône fait bien partie de l’axe prioritaire n° 24 du réseau transeuropéen de transport, qui relie notamment Lyon aux ports de Rotterdam et d’Anvers via Bâle.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de cette réponse. Cependant, j’entends ce discours depuis des mois sans que le dossier avance.

Ainsi, le point de savoir si la branche Sud sera ou non une ligne mixte fret et voyageurs n’a toujours pas été tranché. Or créer une ligne mixte ou une ligne à grande vitesse est totalement différent.

En outre, vous m’indiquez que ce projet fait toujours partie de l’axe prioritaire du réseau transeuropéen de transport. Or, quand on se renseigne directement auprès de Bruxelles, il semble en avoir disparu.

Nous aurons l’occasion de soulever à nouveau ce problème lors du débat que vous avez évoqué, qui devrait avoir lieu d’ici à la fin de l’année. En attendant, je ne peux me satisfaire de cette réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, auteur de la question n° 920, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la fiscalité des vins de liqueur est toujours prohibitive. Le Floc de Gascogne, comme le Pineau des Charentes, fait partie de cette catégorie taxée à 1, 63 euro la bouteille, alors que les deux autres catégories, les vins doux naturels et les vins aromatisés industriels, qui ont des caractéristiques similaires, sont respectivement taxés à 40 centimes et à 3 centimes la bouteille.

Quand les vins aromatisés industriels comme le Martini augmentent de 1 centime, le Floc de Gascogne augmente de 63 centimes, ce qui crée une distorsion de concurrence considérable et génère de l’injustice. Cette disparité de taxation entre des vins apéritifs qui ont tous un degré d’alcool compris entre quinze et dix-sept degrés est, je le répète, totalement injuste, et donc inacceptable.

Le produit de cette taxe rapporte 3 millions d’euros à l’État. Certes, dans une période où les recettes sont maigres, le moindre euro compte. Mais, dans un avenir très proche, ces recettes disparaîtront avec les producteurs de Floc.

Dans une région où l’esca fait des ravages, où les revenus des viticulteurs, comme ceux de l’ensemble de la population agricole, sont en forte chute, où les contraintes environnementales sont lourdes et les rendements bas, une fiscalité à un tel niveau stérilisera l’économie. Pour alerter l’État et l’opinion sur leurs difficultés, les producteurs de Floc et de Pineau, rejoints par ceux du Macvin du Jura, ont été conduits à décider, ce qui est grave, une grève fiscale.

Représentants, eux aussi, de la viticulture française, les producteurs de vins de liqueur n’acceptent pas la taxation démesurée et discriminatoire de leurs produits, discrimination dont ils attendent toujours la justification.

En décembre 2002, Alain Lambert, alors ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, avait mis en place un plan quinquennal de soutien en faveur des vins de liqueur AOC. Le Gouvernement compte-t-il reconduire ce plan ? Envisage-t-il de prendre d’autres mesures ?

Madame la secrétaire d’État, essayez donc de justifier cette fiscalité discriminatoire. Je sais que vous ne pourrez y parvenir. En conséquence, quand le Gouvernement remédiera-t-il à cette injustice en taxant de la même façon des produits similaires ?

Debut de section - Permalien
Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports

Monsieur le sénateur, la fiscalité applicable au Floc de Gascogne relève en effet de l’application de la section IV relative aux produits intermédiaires de la directive du 19 octobre 1992 concernant l’harmonisation des structures des droits d’accises sur l’alcool et les boissons alcooliques.

Ces produits comprennent, d’une part, les boissons fermentées ne résultant pas entièrement d’une fermentation et ayant un titre alcoométrique volumique excédant 5, 5 % par volume pour les boissons non mousseuses, comme par exemple le Floc de Gascogne ou le Pineau des Charentes, et 8, 5 % par volume pour les boissons mousseuses et, d’autre part, les boissons fermentées résultant entièrement d’une fermentation, dont le titre alcoométrique volumique est supérieur ou égal à 15 % et inférieur à 22 %.

Certains produits industriels dont l’alcool résulte entièrement d’une fermentation, et dont le titre alcoométrique volumique ne dépasse pas 15 % par volume, bénéficient d’une fiscalité inférieure applicable aux boissons fiscalement assimilées au vin. Ces produits, considérés communément comme des apéritifs et fabriqués traditionnellement à base de vin aromatisé muté à l’alcool, ont adapté leur processus de fabrication pour bénéficier d’une fiscalité réduite.

Conscientes des conséquences préjudiciables qui peuvent naître de cette différence de taxation entre des produits similaires pour le consommateur, les autorités françaises ont évoqué cette question lors du Comité des accises de l’Union européenne de janvier 2010. Dans ce cadre, tous les nouveaux processus de fabrication des boissons font actuellement l’objet de travaux issus d’une étude communautaire.

Toutefois, les vins de liqueur et ces produits industriels étant des catégories distinctes, il ne sera pas possible d’amener le tarif applicable aux produits intermédiaires à un niveau comparable à celui des vins. En effet, le taux minimum communautaire applicable aux produits intermédiaires reste fixé à un niveau beaucoup plus élevé que celui applicable aux vins. Conscient des problèmes des vins de liqueur AOC, le Gouvernement a engagé une réflexion sur la fiscalité applicable aux vins de liqueur.

Il est à noter cependant que toute modification brutale de la structure de taxation nationale risquerait de provoquer des déséquilibres préjudiciables à l’ensemble du secteur des boissons alcooliques.

S’agissant de l’indexation annuelle des droits d’accises sur les prix à la consommation qui s’applique à tous les produits alcooliques, elle ne fait que compenser l’érosion monétaire des taxes qui n’évoluent pas avec la valeur des produits.

Dans ces conditions, et compte tenu de leur impact, les évolutions de fiscalité sur ces produits ne peuvent intervenir sans une concertation interministérielle associant, d’une part, le ministère de l’agriculture et, d’autre part, le ministère de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Madame la secrétaire d’État, je comprends la distinction que vous opérez entre les vins de liqueur et les autres boissons alcooliques. Reste que vous ne justifiez pas leur différence de taxation, qui est prohibitive et totalement injuste. D’ailleurs, aucun membre du Gouvernement n’est parvenu à justifier cette disparité.

Cependant, je constate que vous laissez la porte ouverte en indiquant que le Gouvernement réfléchit à une façon de réparer cette injustice. Il est vrai que, en France, comme souvent, on se contente de procéder à des aménagements quand on constate qu’une situation est anormale. En l’occurrence, il vaudrait mieux repartir de zéro et voir comment on peut taxer de la même façon des produits similaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 1003, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis la rentrée scolaire, de très nombreux rapports sur l’éducation ont été publiés dans notre pays. Leurs conclusions sont extrêmement alarmantes.

La gravité de tels constats exigerait des réponses fortes, capables de mettre un terme à ces échecs et de redonner au service public de l’éducation nationale un rôle prioritaire. On en est malheureusement très loin avec la réforme de la formation des enseignants, qui risque d’avoir des conséquences particulièrement néfastes sur l’ensemble du système éducatif.

La loi Fillon du 23 avril 2005, qualifiée de loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école, précisait le rôle des IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres. Faisant alterner des périodes de formation théorique et de formation pratique, les cours dispensés par les IUFM donnaient satisfaction. Dès lors, pourquoi avoir imposé une telle réforme souvent qualifiée d’« aberrante » par les professionnels eux-mêmes ?

Les lauréats des concours de 2009 – avant cette réforme, donc – ont accompli une année de formation en alternance, alors que les lauréats des concours de 2010 sont passés directement des connaissances théoriques universitaires à une classe. Vous serez d’accord, monsieur le ministre, pour dire que le tout jeune enseignant que l’on plonge ainsi brutalement dans une classe doit être doté de solides qualités et équilibré psychologiquement pour réussir à se faire respecter.

Pourquoi avoir pris le risque d’accroître les difficultés des enseignants débutants, qui doivent assurer un service d’enseignement aussi lourd que celui des enseignants chevronnés ?

Pour passer les épreuves orales et écrites d’un master 2 effectué en deux ans ou plus, les étudiants devront faire face à un programme d’études ambitieux, avec de très nombreuses heures de cours, sans bénéficier d’une formation pédagogique digne de ce nom. Loin de les préparer au terrain, cette « universitarisation » subite et précipitée de la formation constitue une prise de risque dangereuse pour l’étudiant qui aura à participer à une course d’obstacles particulièrement difficile. En outre, cette « universitarisation » renforcera et amplifiera les inégalités sociales en raison de temps d’études de plus en plus longs, de coûts de plus en plus lourds, sans oublier une sélection de plus en plus sévère, voire cruelle.

Monsieur le ministre, permettez-moi de souligner le caractère paradoxal de telles mesures au moment où l’on assiste à la multiplication de dispositifs d’admission préférentielle destinés à aider les élèves les plus défavorisés. Hélas, ces dispositifs ne sont que cosmétiques, largement insuffisants pour ne pas dire inopérants !

Les étudiants qui se retrouvent dans ce parcours de mastérisation mi-universitaire, mi-professionnel ne bénéficient plus de véritable formation en alternance. Ils doivent se contenter de « compagnonnage » et de « stages en responsabilité ». On peut donc s’interroger sur les modalités de formation et de rémunération de ces « compagnons ». Selon quels critères les professeurs expérimentés seront-ils appelés à exercer ce tutorat sur les étudiants ? Aucun contenu précis ni aucune définition n’ont été apportés à cette formation.

Monsieur le ministre, vous en conviendrez, cette réforme a été décidée dans la plus grande confusion. Les textes d’application restent vagues, très flous et obscurs en ce qui concerne les orientations. Chaque académie va être libre d’interpréter les textes : on peut alors craindre que la mise en concurrence des universités, déjà effective par endroits, n’accentue les inégalités entre les rectorats, les départements et les régions. Une telle réforme peut engendrer de très bons étudiants, futurs précaires de l’éducation nationale, et non pas de bons enseignants. Enseigner est un métier, un métier qui s’apprend.

Lourde à mettre en œuvre, contraire à l’égalité républicaine, une telle réforme remet en cause la continuité du service public. Force est de constater que l’éducation nationale n’échappe pas elle non plus à cette idéologie de l’ultralibéralisme qui réduit les services publics et supprime les fonctionnaires. La politique d’éducation nationale est loin d’être à la hauteur des ambitions affichées.

Comme le remarque fort justement l’écrivain, réalisateur mais aussi professeur Philippe Claudel, « quand une société n’est plus capable de reconnaître le rôle civilisateur de l’éducation, de comprendre que cette fonction est essentielle et qu’elle doit s’exercer dans des conditions satisfaisantes, elle marche sur la tête. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Madrelle, je vous rappelle que le temps de parole dont dispose l’auteur de la question est de trois minutes.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Madrelle, le recrutement et la formation des enseignants sont des enjeux essentiels pour la performance de notre système éducatif. C’est ce qui nous a poussés à prolonger d’une année la formation de ceux-ci. Une telle mesure traduit la haute ambition que nous avons pour l’école ; nous avons ainsi aligné la durée de formation de nos enseignants sur celle de la plupart des pays développés.

Cette évolution se traduit d’abord par une exigence disciplinaire – il s’agit de recruter les meilleurs dans leur matière – mais aussi par une capacité d’adaptation à l’évolution des connaissances.

Je le dis clairement, l’excellence académique et la transmission des savoirs ne sont pas contradictoires. Le nouveau concours que nous avons instauré reflète d’ailleurs cette complémentarité : les épreuves écrites attestent de la maîtrise des savoirs à enseigner, tandis que les épreuves orales d’admission valorisent la capacité à concevoir et à développer une séquence d’enseignement.

Cependant, comme vous l’avez indiqué, l’apprentissage du métier d’enseignant passe d’abord par la pratique. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mettre en place des séquences à la fois d’observation et de mise en situation pendant les études.

Dorénavant, en première année de master, les étudiants qui se préparent au concours effectueront 108 heures de stage d’observation et de pratique accompagnée. Lors de leur deuxième année de master, c’est-à-dire en cinquième année d’études, ils pourront même exercer la totalité des missions confiées à un enseignant à l’occasion de stages de mise en situation de 108 heures également. De plus, ils seront encadrés par des professeurs expérimentés tout au long de leur formation.

Une fois le concours obtenu, les professeurs stagiaires effectuent dorénavant des stages de formation au sein de leur académie d’accueil. C’est une nouveauté mise en place à la rentrée dernière. Ils sont ensuite accompagnés et encadrés par un professeur expérimenté dans le cadre d’un tutorat. S’effectuant sur la base du volontariat, ce tutorat est valorisé puisque chaque enseignant-tuteur perçoit une rémunération. Dans le premier degré, l’accompagnement est d’ailleurs très actif puisque ces tuteurs sont présents dans les classes, en doublon avec les professeurs stagiaires, jusqu’aux vacances d’automne.

En outre, tout au long de l’année scolaire, les professeurs stagiaires bénéficient d’une formation complémentaire sur mesure dont les heures peuvent être réparties au cours de la semaine ou groupées par séquence de formation au cours de l’année.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, nous avons pris toutes les dispositions pour relever le niveau de formation de nos enseignants, afin qu’il y ait une complémentarité entre le savoir disciplinaire et la pédagogie.

L’année 2010-2011 constitue une année transitoire, vous le savez, puisque les élèves qui ont été reçus au concours ont commencé leurs études sous l’ancien système. Nous ferons un premier bilan au cours du mois de novembre et, si cela était nécessaire, nous pourrions apporter des améliorations au dispositif pour la rentrée prochaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Madrelle

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais vous ne pouvez pas m’empêcher de penser qu’une telle réforme contient à terme la disparition des IUFM et des concours. L’État recrutera alors des enseignants vacataires et non plus par la voie du concours. Certes, le coût sera moins élevé, mais cet objectif d’économie à court terme et cette pure vision comptable constituent un renoncement à investir, ce qui sera encore plus coûteux à long terme. Cela montre que l’éducation nationale n’est plus une priorité dans notre pays.

C’est la raison pour laquelle, cette réforme, si mal préparée, fait l’unanimité contre elle. L’art d’enseigner ne s’improvise pas. C’est un métier exigeant et extrêmement éprouvant.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Gélita Hoarau, auteur de la question n° 1036, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gélita Hoarau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées reconnaît le droit à tout enfant porteur de handicap d’être inscrit dans l’école la plus proche de son domicile. Cette loi permet l’application d’une éducation adaptée aux besoins et aux attentes de l’enfant et crée le projet personnalisé de scolarisation, dont la meilleure mise en œuvre, tout au long du parcours de formation, est assurée par l’enseignant référent.

Cet enseignant est un pivot de la scolarisation des enfants porteurs de handicap. Il est l’interlocuteur privilégié des familles, de la maison départementale des personnes handicapées, des établissements scolaires et médico-sociaux et des autres partenaires.

Or, selon les chiffres de l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l’UNAPEI, en 2008, on dénombrait 1 391 enseignants référents pour 265 000 enfants et adolescents porteurs de handicap.

Parallèlement, la demande de scolarisation des enfants est aussi forte que justifiée. Ainsi, 30 % des demandes de la maison départementale des personnes handicapées de la Réunion concernent des enfants handicapés.

Ce manque de moyens humains pourrait être pallié, notamment par certains réajustements réglementaires. Créée par l’arrêté du 17 août 2006, la catégorie des enseignants référents ne peut prétendre bénéficier de la nouvelle bonification indiciaire, dite NBI, fixée par le décret du 6 décembre 1991, c’est-à-dire antérieurement à sa création.

Monsieur le ministre, une mise à jour du texte de référence de la NBI en faveur des enseignants référents ne serait-elle pas envisageable ? Cette actualisation réglementaire permettrait d’éviter une désaffection de cette fonction de la part des enseignants spécialisés, partenaires incontournables d’une politique efficace de suivi des enfants porteurs de handicap.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre de l’éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Madame le sénateur Hoarau, vous attirez mon attention sur la situation des enseignants référents de la scolarité des élèves handicapés.

Vous avez rappelé à juste titre que ces personnels jouent un rôle très important auprès des familles d’enfants handicapés, des maisons départementales des personnes handicapées et des établissements. Ils sont en quelque sorte la cheville ouvrière de la politique volontariste de scolarisation des élèves handicapés menée par le Gouvernement depuis 2005.

Permettez-moi de rappeler que nous avons enregistré des progrès considérables dans ce domaine. Le nombre d’élèves handicapés scolarisés a augmenté de plus de 40% depuis 2005. Nous sommes sur le point d’atteindre notre objectif de 2 000 unités localisées pour l’inclusion scolaire, les anciennes unités pédagogiques d’intégration. Je rappelle aussi que plus de 13 000 enseignants spécialisés contribuent à la scolarisation des élèves handicapés.

Pour accompagner cette mobilisation, le ministère déploie des moyens importants. Dans le projet de budget de l’éducation nationale pour l’année 2011 qui va vous être soumis, les crédits à destination des élèves handicapés seront en augmentation de plus de 13 %. Dans le cadre de cet effort budgétaire sans précédent, les enseignants référents de la scolarité des élèves handicapés jouent un rôle capital, en favorisant la cohérence de la mise en œuvre du projet personnalisé de scolarisation et en assurant un contact permanent entre les élèves et leur famille, ainsi qu’entre les équipes enseignantes et les équipes soignantes.

Afin de tenir compte de l’importance de cette fonction, nous avons décidé d’accroître le nombre de ces personnels : de 1 214 durant l’année scolaire 2007-2008, ils sont passés à 1 478 à la rentrée 2010.

Comme vous l’avez indiqué, madame le sénateur, les fonctions de ces enseignants référents ne sont pas au nombre de celles qui donnent lieu à l’attribution d’une nouvelle bonification indiciaire. En effet, ces personnels n’étant pas titulaires d’une classe fixe, que ce soit une classe d’intégration scolaire ou une classe de perfectionnement, ils ne peuvent être éligibles aux mêmes indemnités que les professeurs ayant des élèves à temps complet.

C’est la raison pour laquelle nous avons voulu reconnaître la spécificité du travail et l’engagement de ces enseignants référents. À cette fin, nous avons créé une indemnité spécifique, instituée par le décret du 24 août 2010 applicable dès le 1er septembre dernier, qui s’élève à 929 euros par an.

Pour les enseignants référents du premier degré, titulaires d’un diplôme professionnel spécialisé pour la scolarisation des élèves en situation de handicap, cette indemnité est cumulable soit avec l’indemnité de fonctions particulières, d’un montant de 834 euros, soit avec une bonification indiciaire de 15 points prévue par le décret du 26 janvier 1983 pour les instituteurs.

Vous le voyez donc, madame le sénateur, nous reconnaissons l’engagement de ces personnels, car ils constituent un maillon indispensable dans la chaîne de scolarisation des élèves handicapés. C’est la raison pour laquelle nous avons mis en place cette mesure d’indemnité spécifique.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Gérard Bailly, auteur de la question n° 788, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le bien-être animal.

J’interviens en tant que président du groupe d’études de l’élevage du Sénat. Ayant participé au Sénat au groupe de travail « Animal et société » dans le cadre des projets de loi Grenelle I et II, j’ai pu mesurer l’attention portée au bien-être animal dans les élevages et les transports.

Il y a quelques mois, l’Union européenne envoyait une brochure à tous les éleveurs de l’Union, intitulée « PAC et bien-être des animaux : des normes élevées dans l’UE ». Ce critère de bien-être est entré dans la plupart des exploitations et on ne peut qu’y souscrire.

La brochure indique que « ces normes de bien-être peuvent conférer un avantage concurrentiel dans la mesure où les consommateurs européens sont prêts à payer davantage pour la viande, le lait ou les œufs produits dans des conditions respectueuses du bien-être, à condition qu’ils soient effectivement commercialisés comme des produits de première qualité. »

Hélas, dans la conjoncture actuelle, les éleveurs n’ont pas perçu dans les prix le moindre retour de leurs efforts. J’aimerais savoir ce que vous comptez faire pour valoriser les efforts réalisés dans ce domaine par la profession.

Par ailleurs, de nombreuses lois européennes en matière de bien-être sont déjà en vigueur afin que les animaux ne subissent pas de douleurs ni de souffrances, principalement au niveau de l’abattage. Conformément à la définition du protocole sur la protection et le bien-être des animaux annexé au traité CE en 1999, ces règles reflètent les cinq libertés largement reconnues comme définissant l’idéal du bien-être animal : être à l’abri de la faim et de la soif, ne pas souffrir de contrainte physique, avoir la liberté d’exprimer des comportements normaux, être à l’abri de la peur et de l’angoisse, ne pas être sujet à la douleur, aux blessures et aux maladies.

Sans parler des sommes importantes engagées dans le budget de l’État ni des préjudices subis par les éleveurs et les bergers, j’aimerais comprendre comment, face à ces textes, on peut tolérer que, du fait de la réintroduction des prédateurs – loups, ours, lynx –, des milliers d’agneaux soient blessés. Pas moins de 3133 ont été mutilés ou déchiquetés dans des conditions exécrables, sans parler d’autres animaux comme les bovins ou le jeune gibier qui sont aussi attaqués.

Est-ce que l’Europe et le gouvernement français vont accepter encore longtemps la réintroduction des prédateurs et ne pas intervenir pour en limiter les effectifs ? L’actualité montre tous les jours les dégâts qu’ils causent et le profond découragement des éleveurs qui en résulte, notamment dans les élevages ovins.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. Jean-Louis Borloo.

La France s’est engagée à protéger les grands prédateurs que sont l’ours, le loup et le lynx, tant à l’échelon international, dans le cadre de la convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe, qu’à l’échelon communautaire, en application de la directive du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

Dans le droit national, ces dispositions sont transcrites dans le code de l’environnement et par l’arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection.

Des dérogations au statut de protection peuvent être accordées, notamment pour prévenir des dommages importants à l’élevage – vous y avez fait référence, monsieur le sénateur –, à condition toutefois qu’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien de l’espèce dans un état de conservation favorable.

De ce fait, des mesures générales de limitation des effectifs ne peuvent être envisagées, bien que des opérations de destruction puissent être autorisées pour répondre ponctuellement aux problèmes qui se posent.

Le plan d’action national sur le loup 2008-2012 prévoit ainsi la mise en œuvre d’une gestion différenciée de cette espèce en fonction de critères liés notamment aux caractéristiques des systèmes d’élevage concernés. L’arrêté du 3 juin 2009 fixe les conditions et les limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup.

Concernant l’application des règles du bien-être animal aux animaux d’élevage exposés à la prédation, l’annexe de la directive européenne du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages précise que « les animaux non gardés dans des bâtiments sont, dans la mesure où cela est nécessaire et possible, protégés contre les intempéries, les prédateurs et les risques pour leur santé ».

À ce titre, il convient de souligner que, en conformité avec la réglementation européenne et nationale sur le bien-être animal, le Gouvernement finance depuis 2004, tant dans les Pyrénées que dans les Alpes, un ensemble de mesures pour assurer la défense des troupeaux contre la prédation. Le financement de ces mesures – gardiennage, chiens de protection, mise en place de clôtures et de parcs – destinées à garantir le bien-être et la sécurité des animaux d’élevage fait l’objet d’un cofinancement à l’échelon européen. Il représente de loin la partie la plus importante du budget consacré par l’État à la conservation des grands prédateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bailly

C’est maintenant au porte-parole du Gouvernement que je vais m’adresser, monsieur le ministre, afin que vous fassiez part à vos collègues des difficultés de compréhension des éleveurs.

D’un côté, on leur demande de faire des efforts considérables dans leurs exploitations en faveur du bien-être de leurs animaux. De l’autre, on laisse ces animaux se faire dévorer dans les alpages en autorisant un trop grand nombre de prédateurs, notamment des loups et des ours, voire en les réintroduisant comme c’est le cas avec le lynx. Les éleveurs ne le comprennent pas.

J’avais posé une question sur ce sujet voilà environ deux ans et on m’avait déjà répondu que le nombre de prédateurs serait limité. Il faut savoir que, en 2009, il y a eu dans l’arc alpin 992 attaques, contre 810 en 2008. Alors qu’on compte aujourd'hui 200 loups dans l’arc alpin et que ceux-ci s’étendent, le nombre d’attaques ne cesse de progresser. Mon département a ainsi subi sa première attaque de loup il y a près d’un an. L’élevage attaqué comptait 240 ovins : 40 brebis ou agneaux ont été tués. Aujourd'hui, l’éleveur a quitté la profession, après avoir vendu son troupeau.

Je rappelle que nous avons rédigé, en 2008, avec mon collègue François Fortassin, un rapport sur le devenir de l’élevage ovin. Nous sommes globalement passés de 11 millions de têtes d’ovins à 8 millions, soit une perte de 3 millions. Or la présence ovine est indispensable dans les alpages dans le cadre de notre politique environnementale. Si nous ne diminuons pas le nombre de prédateurs, nous savons aujourd'hui quels dégâts ils provoqueront dans les années à venir.

Je tiens donc une nouvelle fois à attirer l’attention du Gouvernement sur cette question : certes, il faut des loups, des ours, des lynx – nous sommes d’accord sur ce point –, mais leur nombre doit être limité. À cet égard, je rappelle que les loups ne sont plus une espèce protégée. Il conviendrait donc de limiter leur nombre.

J’ai reçu des articles parus dans la presse dans lesquels on évoque d’éventuelles fermetures de sentiers de randonnée. On a vu un loup aux portes de Gap, un autre a été tué à l’entrée de Grenoble. Cette prolifération va poser de réels problèmes, monsieur le ministre.

Le Gouvernement doit donc prendre conscience de la nécessité de limiter le nombre de prédateurs. Peut-être la France pourrait-elle, à l’instar de nos amis suisses, dénoncer la convention de Berne afin que cette question puisse être rediscutée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Bailly, je salue la passion qui vous anime. D’autres prédateurs, telles les buses, devraient également être régulés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Michel Houel, auteur de la question n° 1027, adressée à M. le ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Vous le savez, monsieur le ministre, la région Île-de-France, du fait de son statut de région capitale, occupe une place à part dans le paysage régional français.

Ainsi, le SDRIF, le schéma directeur de la région Île-de-France, est le document de planification destiné à bâtir l’avenir de la région dans les vingt prochaines années. Il est donc le document de référence pour la mise en œuvre des projets dans les communes et les départements franciliens. Or, bien qu’il ait été adopté par le conseil régional le 25 septembre dernier, après trois années de travail, il n’est toujours pas en application.

Indépendamment de ce que nous pouvons en penser, monsieur le ministre, le SDRIF va-t-il pouvoir s’appliquer et à quelle échéance, sachant que de nombreuses communes attendent son entrée en vigueur pour lancer leurs projets ? Comment va-t-il pouvoir s’articuler avec le projet du Grand Paris qui prévoit, à court terme, une réforme de l’urbanisme afin de libérer l’offre foncière ?

Les maires franciliens attendent des réponses à ces questions primordiales, car elles conditionnent le lancement de nombreux travaux, lesquels, d’ailleurs, participeront à la relance de l’économie.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Monsieur le sénateur, le SDRIF est en effet un document essentiel, puisque tous les autres documents d’urbanisme doivent être compatibles avec lui. Le SDRIF actuel, qui date de 1994, est largement obsolète.

La région a lancé la révision du SDRIF en 2004. À la fin de l’année 2008, elle a adopté un nouveau projet. Le Gouvernement lui a fait part depuis d’un certain nombre d’observations. Il souhaitait que, s’agissant de la région capitale, ce schéma soit porteur de plus d’ambition. Ces réserves ont fait l’objet de nombreuses discussions entre l’État et la région et abouti à la conclusion d’un protocole le 13 juillet 2009 prévoyant, d’une part, la transmission au Conseil d’État d’un SDRIF complété dudit protocole, d’autre part, la mise en révision immédiate du projet porté par le conseil régional. Pour des motifs qui lui sont propres, l’exécutif régional n’a pas souhaité soumettre à son assemblée délibérante ce protocole, le rendant immédiatement caduc.

Il a donc fallu attendre la promulgation de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris pour arriver à un nouvel accord sur la transmission du SDRIF au Conseil d’État et sur sa mise en révision immédiate après son approbation afin que soient pris en compte les objectifs fixés par le législateur.

Le Conseil d’État a ainsi été saisi le 8 juin 2010 du projet de décret approuvant le SDRIF. De nombreuses réunions de travail associant le rapporteur du texte au Conseil d’État, les services de la région et ceux de l’État ont eu lieu. Au terme de cet examen, le Conseil d’État, réuni en assemblée générale, a examiné le texte le 28 octobre dernier.

À ce jour, le Gouvernement ne dispose pas encore de l’avis du Conseil d’État. Il est vrai que, d’après les premiers éléments dont nous disposons, cet avis serait plutôt négatif. Le Conseil d’État a jugé tout d’abord que la procédure d’élaboration du SDRIF avait fait l’objet de plusieurs irrégularités, ensuite que le projet comportait des mesures qui n’entraient pas dans le cadre des compétences confiées par la loi à la région, enfin qu’un certain nombre de textes, notamment les deux lois dites « Grenelle », ainsi que la loi relative au Grand Paris, n’avaient pas été correctement prises en compte dans le SDRIF.

Aujourd'hui, nous attendons l’avis formel du Conseil d’État. Lorsque le Gouvernement l’aura, il l’étudiera dans le détail avant de prendre quelque décision que ce soit. J’ai d’ores et déjà indiqué au président du conseil régional, M. Jean-Paul Huchon, que l’État était prêt à examiner avec lui les conséquences à tirer de cet avis concernant le SDRIF de 1994 et à étudier les solutions pouvant être mises en œuvre le plus rapidement possible afin de donner à la région Île-de-France le cadre nécessaire aux ambitions qui sont les siennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Houel

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

La question que je viens de vous poser est d’actualité : j’ai appris en lisant la presse aujourd'hui que le Conseil d’État, comme vous venez de me l’indiquer, émettrait un avis plutôt négatif sur le SDRIF, qu’il jugerait incompatible avec le Grand Paris et avec le Grenelle de l’environnement.

Même si je comprends ces arguments, il n’en demeure pas moins que, en tant que maire, je suis lié dans ma commune au schéma directeur si je souhaite modifier le plan local d’urbanisme. À titre indicatif, si le SDRIF était applicable, ma commune pourrait immédiatement engager 3 millions d’euros de travaux. Au moins un tiers des 514 communes que compte mon département sont également dans cette situation : elles attendent le schéma directeur pour pouvoir transformer leur plan d’occupation des sols ou leur plan local d’urbanisme et les rendre compatibles avec le SDRIF. Nous faisons donc face, monsieur le ministre, à un problème d’actualité et à un problème économique importants.

Ne pourrait-on pas sortir une version simplifiée du schéma directeur, quitte à la mettre immédiatement en révision afin de prendre en compte la loi relative au Grand Paris et les lois Grenelle I et II ? Le SDRIF, vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, date de 1994. Il est complètement caduc, car la situation a considérablement évolué depuis lors, et il nous bloque. Il faut donc absolument accélérer l’entrée en application d’un nouveau schéma directeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Yannick Botrel, en remplacement de Mme Jacqueline Alquier, auteur de la question n° 1013, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Monsieur le ministre, de nos jours, les agriculteurs aussi ont droit à des vacances bien méritées. Ce qui paraissait impensable il y a quelques années est devenu réalité parce qu’ils peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt pour financer leur remplacement, lorsque celui-ci est indispensable, pendant leur absence de l’exploitation.

Ainsi, en 2009, 20 000 agriculteurs, principalement des éleveurs puisque, par nature, cette activité exige une présence journalière sur l’exploitation, ont pu prendre quelques jours de congé. Il ne s’agit pas là, monsieur le ministre, et c’est le moins que l’on puisse dire, d’une niche fiscale.

Il s'agit d’une mesure de justice sociale qui est extrêmement symbolique. Elle permet de rapprocher les conditions de vie des agriculteurs de celles des autres catégories de la population française. Surtout, grâce à elle, les familles des éleveurs peuvent élargir leur horizon. Les exploitants sont enfin en mesure de planifier des voyages, de partir chez des amis, de visiter en famille des lieux culturels, de vivre des moments de détente hors de leur lieu de travail.

Un médecin ou un pharmacien qui se fait remplacer trouve, dans les recettes supplémentaires suscitées par cet intérim, les moyens de rémunérer son remplaçant. Les agriculteurs, eux, doivent nourrir et soigner leurs bêtes tous les jours. S’il leur faut être là, cette présence n’entraîne aucune recette supplémentaire. Dès lors, est-il scandaleux que la solidarité nationale joue son rôle ?

Quels arguments d’ordre européen peuvent être invoqués alors que l’on voit mal comment cette mesure, dont le coût global ne dépasse pas 10 millions d’euros par an, pourrait affecter les échanges entre les États membres de l’Union européenne ou fausser la concurrence ?

En outre, alors que ce dispositif coûte, je le répète, 10 millions d’euros par an, soit quatre centièmes de ce que rapporte chaque année l’impôt sur la fortune – cette imposition que le Gouvernement veut supprimer, semble-t-il – croyez-vous vraiment que cette aide soit excessive et injustifiée pour nos agriculteurs ?

Monsieur le ministre, les agriculteurs ne comprennent pas que ce crédit d’impôt ne figure pas dans le projet de loi de finances pour 2011 et qu’il puisse être supprimé à l’avenir. C’est vraiment un très mauvais signal envoyé au monde agricole. Une telle décision paraît d’autant plus inconcevable que les agriculteurs, vous le savez bien, vivent une période très difficile.

C’est aussi mettre en péril les services de remplacement concernés. Cette mesure représente 5 000 heures de remplacement dans le seul département du Tarn et, à l'échelle nationale, 160 000 heures, soit 30 % de l’activité des services de remplacement. En termes d’emplois, elle concerne 800 équivalents temps plein dans le domaine agricole, ce qui, là encore, dans la période que nous traversons, est loin d’être négligeable.

Dans une précédente réponse écrite sur ce dispositif, M. Le Maire avait annoncé à mon collègue Yves Chastan qu’une mission d’évaluation de ce dispositif avait été confiée par ses soins au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux. Les conclusions de ce travail devaient être disponibles courant septembre.

Toutefois, Mme Alquier n’en a pas trouvé trace. Que prévoit ce rapport ? Que proposez-vous ? Nous pensons toujours que ce dispositif doit être au minimum conservé, et même renforcé pour que plus d’éleveurs puissent en profiter.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, je vous demanderai tout d’abord de bien vouloir excuser M. Bruno Le Maire, qui est malheureusement retenu ailleurs. Je m’efforcerai de le remplacer, comme vous le faites pour Mme Alquier, et aussi bien que vous !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre

Vous l’avez interrogé sur le crédit d’impôt remplacement pour congés.

Il est inutile de mêler cette question à celle d’autres impôts : je vais vous expliquer le plus clairement possible ce qu’il en est.

Premièrement, ce crédit a été institué par la loi d’orientation agricole du 5 janvier 2006. Le coût annuel de cette mesure pour l’État est évalué à 10 millions d’euros. Nous sommes tout à fait d'accord sur ce point.

Deuxièmement, nous sommes tous d'accord également, me semble-t-il, pour considérer que l’exercice de la profession agricole comporte des contraintes fortes de présence sur l’exploitation, plus particulièrement pour les productions animales, où le coût du remplacement de l’exploitant, s’il n’est pas compensé, est le plus souvent regardé comme dissuasif.

Il est vrai également – le Gouvernement en est bien d'accord – que les agriculteurs ont le droit, eux aussi, de prendre du repos.

Le crédit d’impôt remplacement permet d’offrir une prise en charge partielle des absences pour congés en complément des dispositifs qui existent par ailleurs. Reconduite annuellement depuis 2006, cette mesure a permis d’obtenir des résultats appréciables et elle est plébiscitée par les exploitants.

Toutefois, ce dispositif a pu susciter des interrogations de la part de certains parlementaires, s’agissant notamment d’un crédit d’impôt s’ajoutant à une fiscalité particulière.

C’est dans ce contexte que, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010, un amendement, adopté par le Sénat, a visé à proroger ce dispositif d’une année, c'est-à-dire jusqu’au 31 décembre 2010. Par ailleurs, le ministre a précisé que « cette année de prorogation sera[it] mise à profit pour analyser les enjeux du dispositif dont la reconduction est envisagée, conformément à l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques du 9 février 2009 pour les années 2009 à 2012 ».

C'est la raison pour laquelle une mission d’évaluation de ce dispositif a été confiée au Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux. Sur la base de ces travaux, et comme Bruno Le Maire l’a déjà annoncé, le Gouvernement est favorable à la prorogation de cette mesure.

Monsieur le sénateur, n’ayez pas d’inquiétude : le Gouvernement, je le redis clairement, est favorable à la prorogation de ce dispositif.

Afin de respecter les règles européennes applicables en la matière, le bénéfice de ce crédit d’impôt remplacement sera désormais placé sous les dispositions du règlement de minimis. Sa reconduite constitue pour le Gouvernement une mesure de justice à l’égard de nos exploitants, qu’il est légitime d’aider à bénéficier de jours de congés.

Il avait été envisagé initialement de faire figurer cette disposition dans la loi de finances rectificative pour 2010. Toutefois, au regard des fortes attentes exprimées par les parlementaires et par les exploitants, le Gouvernement n’est pas hostile à ce que cette prolongation soit actée dès l’examen de la loi de finances pour 2011, c’est-à-dire quelques jours plus tôt.

Toutefois, que ce soit dans un texte ou dans l’autre, le Gouvernement fera en sorte que cette mesure de crédit d’impôt remplacement soit effectivement prorogée.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse très complète et très circonstanciée.

La préoccupation qui a été exprimée par plusieurs d’entre nous, en particulier par Mme Alquier et M. Chastan, semble partagée au-delà des travées du groupe socialiste.

D’après les éléments que vous avez pu nous fournir, cette mesure sera prorogée, à juste titre d'ailleurs, pour un coût qui ne sera pas très élevé pour la collectivité. Cette réponse me satisfait, et j’imagine qu’elle conviendra également à mes collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Alain Fauconnier, auteur de la question n° 1016, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Monsieur le ministre, ma question porte sur l’inquiétude causée par la réapparition du spectre des farines animales dans l’agriculture française et, plus particulièrement, dans l’élevage. Ces farines animales n’étaient plus qu’un lointain souvenir ; elles refont surface, tout à coup, sans crier gare.

En effet, selon les informations dont je dispose, il semblerait que la Commission européenne, au mois de juillet dernier, ait clairement envisagé de soumettre au Parlement européen, dans les prochains mois, la réintroduction des farines animales à destination des non-ruminants, c'est-à-dire les porcs, les volailles et les poissons d’aquaculture. Ce serait revenir sur l’interdiction, formulée en juillet 1994, de nourrir les bovins, les ovins et les caprins avec des farines de viande et d’os de mammifères.

Comme on l’imagine sans peine, cette nouvelle, certes assortie d’un certain nombre de précautions scientifiques, a provoqué une réelle émotion un peu partout et de sérieuses interrogations chez tous ceux qui n’ont pas oublié la crise des années quatre-vingt-dix, avec ses chiffres terribles : 190 000 cas d’encéphalopathie spongiforme bovine, des milliers de troupeaux sacrifiés, plus de 200 victimes humaines de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.

Ce traumatisme collectif marqua autant les producteurs que les consommateurs. Certes, ce régime ne s’adresse pas aux mêmes animaux que dans le passé, mais tout de même : qui nous assure que les porcs, les volailles et les poissons ingéreront sans risque ces produits ? Les experts ? On sait combien ils peuvent se tromper, parfois sur une grande échelle !

Ce projet vise, nous dit-on, à permettre à l’Union européenne de diminuer sa dépendance en protéines vis-à-vis de l’extérieur, en particulier en ce qui concerne l’importation de soja, de réduire les effets négatifs de l’interdiction des farines sur les plans économiques et environnementaux et, enfin, d’accroître la compétitivité de l’élevage et de l’industrie de la viande.

Je veux bien, pour ma part, comprendre ces raisons et accepter le principe de mise en place d’un « plan protéines » ambitieux, auquel, à titre d’exemple, la région Midi-Pyrénées, dont je suis l’élu, travaille sérieusement sous l’impulsion du conseil régional. Pour autant, faut-il soigner le mal par le mal ?

Dans une période marquée par la baisse régulière de la consommation de viande, une telle mesure ne pourrait, à mon avis, que semer le doute et aggraver la situation des éleveurs. Ceux-ci se demandent avec effroi si l’application d’une telle mesure ne sera pas la boîte de Pandore d’une nouvelle catastrophe épidémiologique.

Les consommateurs, déjà échaudés par les expériences passées, ont besoin de signes positifs qui les rassurent. Cette inquiétude, je la partage d’autant plus que je reste persuadé que deux solutions s’offrent à l’Europe.

La première est la remise en cause des accords de Blair House, signés en 1992, par lesquels l’Europe a accepté de limiter son soutien aux cultures de protéine végétale et s’est engagée à importer du soja américain sans droit de douane. Avec une meilleure utilisation du colza et une reconversion de seulement 7 % des surfaces de céréales, il serait possible de réduire les importations de protéines animales de 41 %.

La seconde solution réside dans la qualité des filières. Elle seule pourra assurer l’avenir de l’élevage : les cogitations de tous les docteurs Folamour, elles, ne pourront à la longue que conduire au désastre !

Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je serais particulièrement heureux de connaître la position du Gouvernement sur une application du principe de précaution qui intéresse au plus haut point nos compatriotes, les producteurs comme les consommateurs. J’y insiste : ce matin, toute la filière de l’élevage est à votre écoute.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Monsieur le sénateur, je vous prie également de bien vouloir excuser Bruno Le Maire, qui est retenu ailleurs. Vous l’avez interrogé sur la position du Gouvernement quant à une éventuelle réintroduction des farines animales dans l’alimentation des animaux de rente.

Le 16 juillet dernier, la Commission européenne a adopté une feuille de route faisant état d’un nouveau programme d’actions pour les cinq années à venir en matière de lutte contre les encéphalopathies spongiformes transmissibles, ou EST. Parmi les mesures envisagées figure le réexamen de certains aspects de l’interdiction totale de l’usage des protéines animales transformées dans l’alimentation des animaux producteurs de denrées alimentaires.

Pourraient ainsi être revues certaines des dispositions qui interdisent, à ce jour, le recours à des protéines animales transformées dans l’alimentation des animaux non ruminants, tels que les porcins, les volailles ou les poissons. Cette révision n’irait cependant pas jusqu’à remettre en cause le principe fondamental du non-recyclage des protéines au sein de la même espèce, ou règle du « non-cannibalisme », ni celui selon lequel est interdit l’emploi de protéines animales transformées issues de mammifères dans l’alimentation des ruminants.

La ré-autorisation des protéines animales transformées dans l’alimentation des espèces autres que les ruminants soulève de légitimes questions d’ordre sanitaire, économique ou éthique.

C’est la raison pour laquelle, avant même l’examen des modifications que pourrait proposer la Commission européenne, Bruno Le Maire a décidé, en juillet dernier, de saisir l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. L’avis de cet organisme n’a pas encore été rendu à ce jour.

L’Autorité européenne de sécurité des aliments, quant à elle, devrait se prononcer, d’ici à la fin de l’année 2010, sur les risques liés à la présence de petites quantités résiduelles de protéines animales dans les aliments pour animaux.

Par ailleurs, le Conseil national de l’alimentation s’est également saisi du sujet : il s’est proposé d’étudier l’acceptabilité sociétale de la réintroduction de farines animales dans l’alimentation de certaines espèces dont les produits sont destinés à la consommation humaine. Un avis définitif est attendu pour la fin du mois de juin 2011.

Enfin, les techniques d’analyse permettant de déterminer l’espèce animale dont sont issues les protéines transformées devront avoir été validées préalablement à l’examen de toute proposition de modification réglementaire. La validation de ces techniques par la Commission et les États membres pourrait intervenir à l’automne de cette année.

C’est à la lumière de ces éléments et des avis attendus que le Gouvernement examinera les propositions de modification de la réglementation communautaire visant à assouplir l’interdiction d’emploi des protéines animales transformées en alimentation animale.

Monsieur le sénateur, aucune décision n’est prise. Nous attendons d’avoir tous les avis avant de prendre quelque mesure que ce soit, et nous avons d'ailleurs pleinement conscience de tous les problèmes qui se posent.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fauconnier

Monsieur le ministre, je prends acte des précautions que vous venez d’énumérer.

Je fais bien entendu confiance au ministère de l’agriculture, qui a entrepris cette démarche. Toutefois, je le rappelle, nous avons connu la crise de l’ESB et nous savons combien elle a été dure : en quelques jours, la consommation de viande s’est effondrée de façon absolument apocalyptique dans nos régions, même pour les productions sous signe officiel de qualité.

Je ne suis pas certain que les consommateurs fassent aujourd'hui la différence entre ruminants et non-ruminants : ils mélangent sans doute les porcs, les bovins, etc. Par conséquent, dès l’instant où surgira le spectre des farines animales, je crains que la baisse de la consommation de viande, qui est actuellement comprise entre 4 % et 5 % chaque année, ne s’accentue encore davantage. Ce serait dramatique.

Je le répète : l’une des propositions fortes émises par l’ensemble de la profession, c’est la mise en place d’un grand « plan protéines ». Il faut absolument que notre pays engage un projet ambitieux afin de permettre à la filière d’acquérir une autonomie en matière de protéines végétales. Ce serait une réponse à la décision de la Communauté européenne. J’attends un signe fort en direction des agriculteurs pour les encourager à s’orienter vers ces productions qui leur garantira cette indépendance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 1024, adressée à M. le ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le ministre, ma question porte sur le projet de déclaration d’utilité publique d’une zone d’aménagement concerté dite « Carmes Madeleine », à Orléans.

La mise en œuvre de ce projet se traduirait par la démolition et la destruction d’immeubles du xviie siècle et de caves du xiiie siècle qui ont fait l’objet d’une demande de protection au titre des monuments historiques. Alors que la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites a rendu un avis favorable, le dossier a disparu de l’ordre du jour de la commission pour des raisons inexpliquées.

Je rappelle que ce secteur est classé au patrimoine mondial défini par l’UNESCO. Par ailleurs, les immeubles concernés sont situés au sein d’une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, une ZPPAUP, dont le règlement interdit toute destruction d’îlots entiers. Cette destruction est en outre inutile, puisqu’il s’agit, dans le cas d’espèce, de permettre dans la rue des Carmes le passage de voitures en plus de la seconde ligne de tramway. Or cette rue peut tout à fait devenir piétonnière, un plan de circulation étant alors défini en conséquence pour les voitures, comme cela a été fait dans de nombreuses villes.

Cette solution présenterait le grand avantage de permettre au tramway de circuler en site propre, ce qui constitue l’une des conditions de son efficacité. Autre atout non négligeable, elle serait strictement conforme aux lois en vigueur concernant à la fois le transport public, l’environnement et la préservation du patrimoine.

Ce projet de zone d’aménagement concerté donne lieu à une enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique du programme par le préfet. Je m’étonne que, dans ces conditions, M. le ministre de la culture et de la communication ait pu donner au préfet du Loiret, préfet de la région Centre, des instructions ou lui faire part de préconisations quant à la déclaration d’utilité publique sur laquelle il revient à ce dernier de statuer, par un courrier en date du 24 août dernier dont l’existence et le contenu ont été rendus publics par ses services, alors même que l’enquête publique n’avait pas encore commencé.

Cette situation est de nature à porter atteinte aux compétences attribuées en propre au préfet et aux conditions d’objectivité et de neutralité dans lesquelles l’enquête publique doit se dérouler. On imagine mal en effet que, sur des sujets aussi sensibles, et sur tout sujet d’ailleurs, le ministre puisse donner au préfet des instructions sur une position en préalable à l’enquête publique, c’est-à-dire en considérant comme nulles et non avenues les observations faites au cours de celle-ci ainsi que les conclusions des commissaires enquêteurs, alors qu’il revient précisément au représentant de l’État de statuer au vu de ces observations et de ces conclusions.

Par conséquent, monsieur le ministre, je vous demande quelles dispositions le Gouvernement compte prendre, tant sur le fond que sur la forme, eu égard à l’ensemble des faits que je viens de rappeler et qui sont à l’évidence préjudiciables au regard de l’application des lois en vigueur et contraires à des principes de notre droit.

Debut de section - Permalien
Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, qui ne peut être présent ce matin.

La conciliation d’une volonté affirmée de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine et d’une politique ambitieuse d’aménagement du cadre de vie de nos concitoyens n’est pas sans soulever parfois, sur le terrain, des difficultés d’ajustement. La Haute Assemblée le sait bien, elle qui a joué un rôle décisif dans le débat qui s’est ouvert au moment de la discussion de la loi portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle II », lorsque le rôle de l’architecte des Bâtiments de France a été remis en cause.

En soutenant, au sein de la commission présidée par M. Tuot, l’émergence du compromis qui a permis le maintien d’un rôle actif de l’architecte des Bâtiments de France dans l’examen des projets de construction et d’aménagement, le Sénat a jeté les bases d’une approche renouvelée des situations. Il a ainsi fait en sorte que la politique du patrimoine portée par le ministère de la culture et de la communication sorte renforcée d’un dialogue avec d’autres politiques, par exemple celle du développement durable, pour mieux faire apparaître et servir l’intérêt général.

Dans ce dialogue entre des objectifs parfois contradictoires, le ministre de la culture et de la communication veille au maintien d’un équilibre, pour que l’arbitrage ne se fasse pas toujours au détriment de la sauvegarde du patrimoine. Ainsi, sur la question des démolitions, qui est toujours délicate en milieu urbain et à laquelle je vous sais particulièrement attentif, monsieur le sénateur, il invite toujours les maîtres d’ouvrage à essayer d’éviter ou de limiter au maximum ces décisions, car ce n’est pas nécessairement en infligeant au bâti ancien des blessures que l’on réparera le mieux celles de la société. Le cadre de vie de demain peut prendre un meilleur essor en s’appuyant sur l’héritage du passé, plutôt qu’en créant un vide qui détruit les repères et bafoue les mémoires.

Monsieur le sénateur, c’est à l’aune de ces principes qu’il faut juger l’intervention du ministre de la culture et de la communication dans l’affaire sur laquelle vous intervenez. Que s’est-il passé, en effet ? Frédéric Mitterrand a été consulté par le préfet de la région Centre, préfet du Loiret, sur l’engagement d’une enquête préalable à la déclaration d’utilité publique d’une ZAC située au cœur de la ville historique d’Orléans : ses services avaient indiqué que la réalisation de cette ZAC comportait un projet de démolition d’un certain nombre de maisons anciennes situées le long de la rue des Carmes, ce qui était susceptible de faire échec à la légalité du projet.

Que faire dans un tel contexte ? Fallait-il considérer que l’obstacle était de nature à bloquer l’engagement de l’enquête ? M. le ministre ne l’a pas pensé, dès lors que cette enquête était seule susceptible de faire apparaître complètement l’intérêt général du projet, de permettre sa maturation et, en fin de course, de prendre un parti définitif, le cas échéant en le modifiant. Dans un dialogue constructif avec M. Serge Grouard, député-maire d’Orléans, un certain nombre de garanties ont été obtenues sur des opérations patrimoniales que la réalisation de la ZAC permettrait d’accomplir. M. le député-maire a bien voulu s’engager à la réalisation anticipée d’un certain nombre de ces opérations.

Dans ces conditions, le ministère de la culture et de la communication devait laisser la procédure d’enquête se dérouler. C’est pourquoi le ministre a donné instruction à M. le préfet de région de l’engager. Il va de soi que cette décision ne préjugeait en rien de l’utilité publique du projet de ZAC, laquelle suppose au demeurant la prise en compte de nombreux critères qui dépassent la compétence du ministère de la culture et de la communication, que le ministre a seul engagé par sa décision. Il souhaite que, si celle-ci est établie au terme de l’enquête, il apparaisse alors que, loin de se traduire par un recul, voire un abandon patrimonial, la ZAC de Carmes Madeleine offrira au riche patrimoine de la ville une occasion nouvelle de mise en valeur.

Enfin, monsieur le sénateur, Frédéric Mitterrand souhaite s’associer à l’hommage implicite que vous semblez avoir rendu à travers vos propos aux agents du ministère de la culture et de la communication qui, dans les directions régionales des affaires culturelles et les services départementaux de l’architecture et du patrimoine, accomplissent avec désintéressement et clairvoyance un travail difficile, situé à la charnière d’intérêts parfois divergents, comme cette affaire nous le montre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

La ZAC de Carmes Madeleine constitue la première application des conclusions de la commission Tuot. Il est très important de voir comment celles-ci seront mises en œuvre, car des pressions peuvent être exercées auprès de l’État pour que des intérêts autres que la protection du patrimoine soient pris en considération. Or, à cet égard, le ministre de la culture et de la communication est, depuis André Malraux, le garant de la politique de défense du patrimoine. Il lui revient donc de s’assurer que l’indépendance et les prérogatives des architectes des Bâtiments de France seront bien préservées. Vous l’avez souligné, monsieur le ministre, il s’agit d’un sujet auquel le Sénat est très attaché.

J’observe cependant que le ministre de la culture et de la communication ne m’a pas répondu sur plusieurs points.

Alors que la délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites a voulu engager une procédure de protection, comment se fait-il que celle-ci n’ait jamais été portée à l’attention de la commission elle-même ?

Aucune information ne m’a non plus été fournie sur le patrimoine mondial. Or huit associations nationales de défense du patrimoine ont indiqué leur grande attention à cette question.

J’aurais également souhaité obtenir des éclaircissements sur la déclaration d’utilité publique. Il s’agit pourtant d’une question fondamentale : est-il d’utilité publique de démolir dix-huit immeubles, dont certains sont historiques, pour permettre aux voitures de circuler, en plus du tramway, d’autant qu’il est très facile de procéder autrement, notamment en faisant passer le tramway dans une rue piétonne et en déviant les voitures sur d’autres voies ? Les exemples sont nombreux.

Enfin, les quelques garanties qui ont été présentées à la municipalité d’Orléans portent pour l’essentiel sur des bâtiments dont l’intérêt patrimonial n’est nullement contesté, mais qui se trouvent hors du périmètre concerné.

Je conclurai en évoquant un point qui me réjouit, car, vous le savez, il faut toujours être positif, monsieur le ministre. §Le ministre de la culture et de la communication a apporté des précisions utiles, car il y avait pour le moins une ambiguïté dans les lettres qu’il a adressées. Il a affirmé avoir ordonné au préfet de mettre en œuvre la procédure de déclaration d’utilité publique. Entre nous, vous savez qu’il n’est nullement besoin d’une quelconque intervention pour mettre en œuvre une telle procédure : dès lors qu’elle est demandée, elle est de droit. Vous avez confirmé, monsieur le ministre, que, sur ce dossier, il n’avait donné aucune instruction au préfet. Celui-ci prendra donc sa décision en toute indépendance, au regard des résultats de l’enquête publique et du rapport du commissaire enquêteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à midi, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.