La séance est ouverte à neuf heures trente.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
M. le président du Sénat a reçu de Mme Marianne Lévy-Rosenwald, présidente du Conseil de surveillance du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le rapport d’activité pour 2008 de ce fonds, établi en application de l’article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des affaires sociales et sera disponible au bureau de la distribution.
(Texte de la commission)
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, relatif à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense (nos 462, 514 et 513).
Je rappelle qu’hier soir nous avons commencé la discussion de l’article 2.
Est approuvé le rapport annexé à la présente loi, qui fixe les orientations relatives à la politique de défense et aux moyens qui lui sont consacrés au cours de la période 2009-2014 et précise les orientations en matière d'équipement des armées à l'horizon 2020.
RAPPORT ANNEXÉ
La loi de programmation militaire 2009-2014 couvre la première étape de la mise en œuvre de la nouvelle stratégie de sécurité nationale définie par le Livre blanc. Elle :
- amorce une réforme profonde des armées, cohérente avec l'évolution de l'environnement international et qui se traduit en particulier par de nouveaux contrats opérationnels ;
- poursuit et adapte la modernisation des forces, avec une priorité marquée à la fonction connaissance et anticipation, à la dissuasion, à la protection des forces terrestres et à l'amélioration de la disponibilité des matériels les plus utilisés en opérations ;
- vise à disposer des ressources humaines nécessaires, en nombre et en compétences ;
- accorde une attention particulière à l'accompagnement des restructurations qui seront mises en œuvre ;
- s'inscrit dans un contexte de maîtrise des finances publiques.
À périmètre constant 2008, une enveloppe de 377 milliards d'euros 2008 est consacrée à la mission Défense sur douze années. 185, 9 milliards d'euros 2008 sont alloués à la loi de programmation militaire 2009-2014. Cette loi de programmation militaire permet ainsi de maintenir la France parmi les premières nations d'Europe dans le domaine de la défense.
1 La politique de défense dans la stratégie de sécurité nationale de la France
1.1 La mondialisation et la nouvelle stratégie de sécurité nationale
La politique de défense de la France doit s'adapter à l'impact croissant de la mondialisation sur la modification des rapports de force internationaux, la transformation des échanges économiques et les accélérations de la circulation de l'information et de la connaissance. Le monde n'est pas nécessairement devenu plus dangereux qu'autrefois mais il est plus instable, plus imprévisible et les évolutions de notre environnement peuvent être brutales.
Quatre zones géographiques joueront un rôle critique pour la sécurité de la France dans les années à venir : l'arc de crise s'étendant de l'Atlantique à l'ouest de l'Afrique jusqu'à l'océan Indien, le continent européen, l'Afrique sub-saharienne et l'Asie, vers laquelle se déplace progressivement le centre de gravité stratégique et où sont identifiés plusieurs risques de conflits majeurs.
Par rapport à la décennie précédente, notre politique de défense devra prendre en compte plusieurs infléchissements :
- la France, son territoire et sa population sont directement exposés à des menaces à caractère militaire ou quasi-militaire, en particulier le terrorisme d'inspiration djihadiste, le développement de missiles balistiques de longue portée par de nouvelles puissances, les conséquences des crises dans les zones d'intérêt stratégique ;
- les moyens de l'information, de l'anticipation et de la prévention des crises n'ont probablement jamais été aussi développés ;
- le risque d'implication de notre pays et des pays européens ou alliés dans une guerre interétatique ne peut cependant être exclu à l'horizon de quinze ans ;
- les sollicitations des armées françaises sur les théâtres extérieurs dans des opérations de stabilisation resteront nombreuses ; elles conduiront à des déploiements dans des environnements exigeants ; ces engagements devront respecter les principes directeurs d'intervention extérieure énoncés dans le Livre blanc et recevoir le soutien de la Nation.
Dans ce contexte, la défense devra assurer la sécurité de la Nation face aux risques d'agression armée, le respect de nos engagements internationaux en matière de défense, la contribution de la France au maintien de la paix et de la sécurité internationales, la participation à la protection de la population sur le territoire, en appui des dispositifs de sécurité intérieure et de sécurité civile, et à l'étranger.
1.2 L'ambition européenne et internationale de la France
L'ambition européenne et internationale est au cœur de la vocation de la France dans le monde. Elle contribue à rendre le système international plus équilibré et plus légitime, et à en renforcer la crédibilité, notamment celle des instruments de la sécurité collective, au premier chef, l'Union européenne, les Nations Unies et l'Alliance atlantique.
1.2.1 L'ambition européenne
La France prend part à la politique européenne de sécurité et de défense commune, conduisant à la définition d'une politique de défense commune de l'Union européenne.
L'Union européenne doit s'affirmer comme un acteur majeur de la gestion des crises et de la sécurité internationale. Elle s'est en ce sens fixé des objectifs concrets pour les prochaines années.
Une capacité d'intervention globale de 60 000 hommes, déployables pendant un an sur un théâtre éloigné, avec les composantes aériennes et maritimes nécessaires, doit être ainsi effectivement développée. L'Union européenne devra être en mesure de conduire simultanément deux à trois opérations de maintien ou de rétablissement de la paix, et plusieurs opérations civiles moins importantes, sur des théâtres différents. Elle devra rechercher la mutualisation de certains moyens européens. Les capacités européennes de planification et de conduite d'opérations, militaires et civiles, monteront en puissance.
L'accent sera mis sur le renforcement de l'industrie de défense européenne. Les objectifs de la programmation contribueront au plan de développement des capacités élaboré par l'Agence européenne de défense (AED) en liaison avec l'état-major de l'Union européenne. Les coopérations recherchées ne seront pas seulement industrielles, mais aussi structurelles et opérationnelles. Des règles communes pour le marché des équipements de défense seront mises en place.
L'Union européenne doit devenir également un acteur efficace de protection contre les risques affectant le territoire de ses États membres et leur population.
La France fera des propositions à ses partenaires afin de développer un esprit de défense européen.
1.2.2 La rénovation de la relation transatlantique
La France s'engage en faveur de la rénovation de l'OTAN, qui ira de pair avec le renforcement de l'Union européenne dans le domaine de la gestion des crises et la recherche d'un meilleur partage des responsabilités entre Américains et Européens au sein de l'Organisation atlantique. L'OTAN et l'Union européenne sont toutes deux nécessaires face aux menaces et aux crises ; elles sont complémentaires. Le renforcement de la politique de sécurité et de défense commune et la rénovation de l'OTAN constituent donc les deux volets d'une même démarche.
Le rapprochement avec la structure de commandement de l'OTAN s'effectue dans le respect des principes suivants : indépendance complète de nos forces nucléaires ; liberté d'appréciation des autorités françaises, impliquant absence d'automaticité dans nos engagements militaires et maintien des moyens de l'autonomie stratégique, notamment par l'accroissement de nos capacités de renseignement ; enfin, liberté permanente de décision, qui suppose qu'aucune force française ne soit placée en permanence, en temps de paix, sous le commandement de l'OTAN.
1.2.3 Le multilatéralisme demeure un principe fondateur
Le multilatéralisme est au cœur de la politique de la France. La France soutient l'action des Nations unies. Membre permanent du Conseil de sécurité, elle estime essentiel de rénover et de renforcer les institutions internationales. Elle s'engage à ce titre en faveur d'une réforme du Conseil de sécurité permettant d'élargir celui-ci aux puissances qui ont la capacité et la volonté de contribuer à la paix et à la sécurité internationales. Elle apporte son soutien aux organisations régionales de sécurité.
1.3 Les cinq grandes fonctions stratégiques
La stratégie de sécurité nationale s'articule autour de cinq fonctions stratégiques : connaissance et anticipation, prévention, dissuasion, protection et intervention. La combinaison de ces différentes fonctions doit pouvoir évoluer en s'adaptant aux modifications de l'environnement stratégique.
La connaissance et l'anticipation sont une priorité. Elles garantissent notre autonomie de décision et permettent à la France de conserver l'initiative stratégique.
La dissuasion nucléaire demeure un fondement essentiel de la stratégie nationale. Elle est la garantie ultime de la sécurité et de l'indépendance de la France. Elle a pour fonction d'empêcher une agression d'origine étatique contre les intérêts vitaux du pays, d'où qu'elle vienne et quelle qu'en soit la forme.
La protection de la population et du territoire est au cœur de notre stratégie en raison du développement de nouvelles vulnérabilités. Elle doit prendre en compte l'évolution des menaces, notamment terroristes.
Nos capacités de prévention des conflits et d'intervention seront concentrées sur les zones où les risques impliquant les intérêts stratégiques de la France et de l'Europe sont les plus élevés. L'axe géographique prioritaire va de l'Atlantique au Golfe arabo-persique et à l'océan Indien.
1.4 Objectifs et contrats opérationnels
La politique de défense et de sécurité se décline pour chaque fonction stratégique en objectifs et en contrats opérationnels. Ceux-ci orientent l'organisation et dimensionnent les capacités que les armées doivent pouvoir mettre en œuvre.
Il s'agit :
- pour la fonction connaissance et anticipation, d'assurer la connaissance des risques, des menaces et des ruptures potentielles de tous types et d'anticiper les crises en renforçant en particulier les capteurs spatiaux et en développant une capacité de détection des tirs de missiles balistiques et d'alerte ;
- pour la fonction dissuasion, d'assurer la posture fixée par le Président de la République avec au moins un sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) à la mer en permanence, des moyens de sûreté assurant la liberté d'action des SNLE, une capacité de frappe aérienne nucléaire disponible en permanence et des moyens d'accompagnement et de soutien de la composante aéroportée ;
- pour la fonction prévention, de disposer de forces prépositionnées articulées à terme en deux points d'appui sur les façades occidentale et orientale de l'Afrique et pouvant intervenir dans la bande sahélienne, d'une présence renforcée (avec au moins une base) dans le Golfe arabo-persique et d'une capacité de projection régionale dans certains DOM-COM (Antilles-Guyane, La Réunion, Nouvelle-Calédonie) ;
- pour la fonction protection, de contribuer à la protection de la population sur le territoire national et à la résilience de la Nation, face aux risques et aux menaces de toute nature, en particulier terroristes, en :
- renforçant la sécurité des installations d'importance vitale, des mouvements sur le territoire et de l'accès à celui-ci (jusqu'à 10 000 hommes des forces terrestres) ;
- renforçant en métropole le dispositif de défense aérienne et de sauvegarde maritime ;
- soutenant le dispositif de sécurité intérieure et de sécurité civile, notamment avec des capacités spécifiques (transports, santé, aide au déploiement, NRBC...) ;
- pour la fonction intervention, de contribuer à la sécurité internationale en participant à des opérations de stabilisation et de maintien de la paix et d'être en mesure de faire face à un conflit majeur à l'extérieur du territoire dans un cadre multinational. Les armées doivent ainsi être capables de projeter (jusqu'à 7 000 à 8 000 kilomètres) :
- en six mois, une force terrestre pouvant aller jusqu'à 30 000 hommes pour une durée d'un an, suivie d'une action de stabilisation ;
- une force aérienne de combat de 70 avions ;
- une force navale ou aéronavale de combat de 2 à 3 groupes d'intervention.
Les armées doivent en outre tenir prête en permanence et sous bref préavis une capacité de réaction pouvant être engagée dans un cadre national ou multinational et constituée d'unités d'intervention terrestre (5 000 hommes), aérienne et maritime et des forces de présence et de souveraineté.
2 La programmation militaire 2009-2014
La présente loi de programmation militaire décline en objectifs de programmation et pour la période 2009-2014 les priorités définies par le Livre blanc. Elle donne un éclairage pour les années suivantes.
2.1 La priorité donnée à la nouvelle fonction connaissance et anticipation
La fonction connaissance et anticipation donne aussi bien aux responsables politiques qu'aux chefs militaires et aux responsables de la sécurité intérieure et de la sécurité civile les éléments de prévision, d'appréciation de situation et d'éclairage de l'action, les outils d'aide à la décision et de commandement et les moyens de contrôle de l'action ; elle contribue à l'autonomie nationale stratégique.
La fonction couvre cinq domaines : le renseignement, la connaissance des zones d'opérations potentielles, l'action diplomatique, l'analyse prospective, la maîtrise de l'information.
L'espace fera l'objet d'un effort spécifique. Les ressources allouées à ce domaine seront progressivement doublées en moyenne annuelle d'ici 2020. Il sera par ailleurs créé un commandement interarmées de l'espace sous l'autorité du chef d'état-major des armées.
Le réseau internet étant devenu crucial pour la sécurité de la France, les moyens techniques de l'État dans ce domaine seront renforcés et, corrélativement, le nombre de spécialistes sera accru.
2.1.1 Le renseignement
2.1.1.1 Ressources humaines
La priorité accordée aux ressources humaines se traduira par un renforcement des effectifs, de l'ordre de 700 personnes. L'effort de recrutement concernera les domaines de la lutte anti-terroriste, de la contre-prolifération, de la lutte contre la criminalité organisée, du contre-espionnage et de la lutte contre l'ingérence économique.
La gestion sera harmonisée et davantage croisée entre services et entre ministères, notamment dans les domaines du recrutement et de la formation. Les parcours de carrière offriront plus de possibilités de mobilité entre les services.
Des filières de formation commune seront créées ; la future académie du renseignement y contribuera.
2.1.1.2 Équipements
Le renseignement s'appuie sur un ensemble cohérent d'équipements depuis le niveau stratégique (satellite d'observation MUSIS et d'écoute CERES...), jusqu'au niveau des théâtres d'opération (nacelles ROEM aéroportées, drone longue endurance SDM) et au niveau tactique (drones tactiques SDT/SDAM, nacelles RECO NG, systèmes de guerre électronique...).
L'exploitation des grands équipements fera l'objet d'une mise en commun systématique entre les services de renseignement.
Observation spatiale
Les satellites d'observation sont les seuls systèmes à offrir une capacité non intrusive d'observation régulière en tout point du globe.
La France dispose actuellement des satellites Hélios 2 (imagerie optique et infrarouge) et d'un accord d'échange d'images avec l'Allemagne (système d'imagerie radar SAR Lupe) depuis début 2008. Ces moyens seront complétés et améliorés dans le domaine de l'optique visible par le système Pléiades (satellites optiques à usage dual) à partir de 2010 et par un accord d'échange d'images avec l'Italie (système d'imagerie radar Cosmo Skymed) à partir de 2009.
Le projet européen MUSIS renouvellera ces capacités, en coopération avec l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la Belgique et la Grèce. Il fédérera les futurs projets nationaux en un programme international commun. Cette organisation autorise une coopération opérationnelle et stratégique plus intégrée. Trois satellites optiques permettant d'atteindre les plus hautes résolutions seront lancés par la France entre 2015 et 2018. Des satellites radars devraient être lancés par nos partenaires.
Écoute
Les systèmes spatiaux d'écoute électromagnétique contribuent à la détection, l'évaluation et le suivi des menaces et à la connaissance des théâtres d'intérêt stratégique ou opérationnel. Ils permettent d'orienter d'autres capteurs et d'élaborer des contre-mesures électroniques.
Le démonstrateur Essaim, mis en orbite en décembre 2004, fonctionnera jusqu'en 2009. Les résultats technologiques et opérationnels obtenus ont confirmé l'intérêt d'un deuxième démonstrateur, Elisa, qui offrira aussi une capacité préopérationnelle (mise en orbite début 2010 pour une expérimentation d'au moins trois ans).
Le système opérationnel Ceres (segment satellitaire et segment sol) bénéficiera de l'ensemble de ces avancées technologiques. En préparation depuis 2007 et ouvert à la coopération européenne, il sera mis en service opérationnel en 2016.
Observation et écoute embarquées, drones
Les capteurs aéroportés embarqués sur drones et aéronefs, les capteurs navals et les moyens au sol destinés en particulier à la surveillance et à l'analyse des zones d'engagement des forces terrestres seront modernisés.
Les systèmes drones feront l'objet d'un effort qui portera à la fois sur le segment « moyenne altitude longue endurance » et sur le segment tactique, pour des missions d'observation, de reconnaissance et de surveillance électronique, voire d'appui au sol.
Le système intérimaire de drone moyenne altitude longue endurance (SIDM) est entré en service en 2008. La composante de minidrone (DRAC) pour l'appui des unités de combat, qui doit comprendre une centaine de systèmes d'ici 2010, est en cours de livraison.
L'expérience acquise permettra de mieux cerner les options qui se présentent, tant pour les performances (capteurs, endurance, armement éventuel) que pour les coopérations (industrielles et opérationnelles). La stratégie d'acquisition à venir combinera les acquisitions de matériels existants adaptés aux opérations en cours, les locations de services et le développement de moyens tactiques et de théâtre, le cas échéant en coopération européenne.
Des ressources sont prévues pour les locations de services et les achats de matériels existants dans un premier temps, les développements dans un second temps. Elles seront réparties au plus tard en 2010, en fonction de l'affinement des analyses opérationnelles et techniques.
Les moyens aéroportés s'articuleront également autour des nacelles de reconnaissance et de guerre électronique sur avions de combat et sur avions gros porteurs A400M et Atlantique 2.
Les pods de guidage laser et autres capteurs optroniques aéroportés sont aussi utilisables pour des missions de reconnaissance en temps réel.
2.1.2 La connaissance des zones d'opérations potentielles
La connaissance des zones d'opérations potentielles sera renforcée par l'emploi des moyens de renseignement et par la présence de nos forces navales, aériennes et terrestres dans les zones jugées prioritaires.
Données géophysiques
Les données géophysiques nécessaires aux systèmes d'armes comme aux forces seront fournies par une organisation interarmées (centre de géographie interarmées, centre interarmées de soutien météo-océanographique des forces) et le programme GEODE 4D à l'ensemble des acteurs civils et militaires de la défense et de la sécurité.
Le système européen Galileo apportera une source indépendante de positionnement et de datation. Le programme Omega permettra le double emploi des signaux de Galileo et du système américain GPS. Ils renforceront notre autonomie et notre interopérabilité.
2.1.3 La prospective
Pour évaluer, anticiper et orienter, le champ d'application de la prospective sera élargi (géostratégie, géopolitique, sciences sociales et économiques, recherche scientifique...). La cohérence sera renforcée au sein du ministère de la défense et dans un cadre interministériel.
2.1.4 La maîtrise de l'information
La maîtrise de l'information conditionne notre autonomie stratégique. Elle repose sur des capacités de transmission, sur l'interopérabilité de nos capacités, sur la protection, sur la valorisation et la vérification des informations. Les transmissions opérationnelles satellitaires en sont la capacité la plus structurante.
2.2 La dissuasion, garantie ultime de la sécurité et de l'indépendance de la France
La dissuasion nucléaire a pour objectif d'empêcher tout État de croire qu'il pourrait porter atteinte aux intérêts vitaux de la Nation sans s'exposer à des risques pour lui inacceptables.
La crédibilité de la dissuasion nucléaire repose sur la possibilité pour le chef de l'État de disposer, de façon indépendante, d'une gamme d'options suffisamment large et de moyens adaptés à une grande diversité de situations. Ces moyens disposent de l'environnement nécessaire à leur mise en œuvre autonome et en sûreté.
La modernisation des deux composantes, engagée depuis dix ans, sera poursuivie.
2.2.1 L'adaptation continue au contexte géopolitique et aux menaces potentielles
Les moyens de la dissuasion nucléaire seront régulièrement adaptés à l'évolution des menaces potentielles. Deux composantes différenciées et complémentaires seront maintenues. Ces adaptations se poursuivront dans le respect du principe de stricte suffisance. Le nombre d'armes nucléaires, de missiles et d'avions de la composante aéroportée sera réduit d'un tiers. Après cette réduction, l'arsenal de la France comprendra moins de 300 têtes nucléaires.
2.2.2 Les capacités
2.2.2.1 Composante océanique
La permanence de la composante océanique sera assurée par quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE). Leur invulnérabilité devra être préservée. Ils seront progressivement armés, à partir de 2010, de missiles intercontinentaux M51 équipés de têtes nucléaires TN75. Ces têtes seront remplacées à partir de 2015 par les têtes nucléaires océaniques (TNO) adaptées à de plus longues portées.
Le renouvellement de la flotte des sous-marins de la composante océanique s'achèvera en 2010 avec la livraison du quatrième SNLE NG, « Le Terrible », en version M51. À partir de 2010, les trois premiers SNLE NG seront à leur tour adaptés au M51. Des efforts de modernisation seront entrepris pour assurer la sûreté de la composante océanique. Le renouvellement des SNA et des frégates anti-sous-marines et le maintien des capacités des avions de patrouille maritime constitueront à cet égard une priorité.
2.2.2.2 Composante aéroportée
La composante aéroportée bénéficiera de la mise en service du Rafale et de missiles air-sol moyenne portée améliorés (ASMPA) équipés d'une nouvelle tête nucléaire aéroportée (TNA).
Les Mirage 2000 N K3 et les Rafale porteurs de l'ASMPA rentreront progressivement en service à partir de 2009. Le premier escadron Rafale à capacité nucléaire sera opérationnel en 2010. Le Charles de Gaulle pourra mettre en œuvre l'ASMPA en 2009.
Afin d'assurer l'accompagnement et le soutien de la composante aéroportée, les ravitailleurs en vol en service seront rénovés dans l'attente de l'entrée en service du Multi Role Tanker and Transport (MRTT).
2.2.2.3 Maintien de la crédibilité technique
L'efficacité de la dissuasion repose en particulier sur la crédibilité des armes et le maintien de filières technologiques de haut niveau.
Le maintien de la capacité à fabriquer des armes fiables et sûres reposera sur la poursuite du programme de simulation s'appuyant sur le laser mégajoule (LMJ), les moyens de radiographie des armes et les moyens de calcul intensif numérique.
Les compétences nationales développées dans le domaine des missiles, notamment balistiques, et des sous-marins nucléaires seront préservées.
2.2.2.4 Capacités de transmissions
Les transmissions nucléaires permanentes, sûres et résistantes seront adaptées pour apporter la souplesse nécessaire à la stratégie de dissuasion.
2.3 Le recentrage de la prévention
La fonction prévention a pour objet, en agissant en amont, d'éviter l'apparition ou l'aggravation des crises. Elle fait appel à un ensemble de capacités diplomatiques, économiques, militaires et juridiques.
2.3.1 Vers un recentrage du dispositif prépositionné
Nos capacités de prévention des conflits et d'intervention reposent en particulier sur un dispositif de forces prépositionnées ou prédéployées dans les espaces internationaux. Ce dispositif sera concentré sur les zones d'intérêt prioritaire.
En Afrique, il sera réorganisé autour de deux pôles, un sur chaque façade, atlantique et orientale, tout en préservant une capacité de prévention dans la zone sahélienne. L'objectif est de privilégier une relation de partenariat visant à renforcer la sécurité et à développer les capacités africaines de maintien de la paix dans une perspective régionale et européenne.
Dans le Golfe arabo-persique, les points d'appui français seront renforcés, en particulier aux Émirats arabes unis.
Des moyens importants seront affectés en Guyane, en particulier au bénéfice du centre spatial guyanais et de la lutte contre les activités illicites.
2.3.2 Les accords de défense
La liste des accords de défense a été rendue publique. Le Parlement sera désormais informé de la conclusion et des orientations de ces accords.
Les conventions ou les clauses relatives aux possibilités d'intervention de la France dans des missions de maintien de l'ordre, figurant dans certains accords bilatéraux, seront abrogées.
2.3.3 La lutte contre les trafics
La lutte contre les trafics doit permettre de neutraliser les réseaux avant qu'ils n'opèrent dans l'espace européen.
L'action de l'État dans la zone caraïbe, à l'ouest de l'Afrique, en Méditerranée et dans l'océan Indien, s'appuiera sur des capacités de surveillance et d'intervention dans les espaces terrestre, aérien et maritime, en particulier en haute mer. La coordination européenne sera renforcée.
2.3.4 La lutte contre la prolifération et la maîtrise des armements
En matière de lutte contre la prolifération, la prévention repose sur le renforcement du régime international de maîtrise des armements, le contrôle des exportations, l'entrave et le renseignement. Sur le plan militaire, elle se traduit par des mesures de surveillance et de protection et par le renforcement du contrôle des accords de désarmement.
L'acquisition d'une capacité de détection et d'alerte avancée contribuera à la lutte contre la menace balistique.
De plus, l'accent sera mis sur la capacité à détruire, en sécurité, des installations biologiques, chimiques et nucléaires illicites, ainsi que sur les moyens de défense et de protection, notamment biologiques.
2.4 La protection au cœur de la stratégie de la France
L'objectif de la fonction protection dans les années à venir est d'assurer une mission permanente de protection de la population et du territoire, de renforcer la résilience de la société et des institutions et d'améliorer les moyens de gestion de crise et de réaction rapide des pouvoirs publics. À cette fin, sont fixés des contrats opérationnels et des objectifs pour les armées et pour le dispositif de sécurité intérieure et de sécurité civile. La coopération européenne dans ce domaine sera renforcée.
2.4.1 Capacités de protection et d'intervention sur le territoire national
Les capacités de réaction rapide des pouvoirs publics en cas de crise majeure sur le territoire national seront développées. Les efforts porteront sur le renforcement des moyens de gestion interministérielle des crises, sur le rapprochement des structures de planification et de conduite des opérations de sécurité intérieure et de sécurité civile et sur l'accroissement de la coopération civilo-militaire dans les zones de défense et de sécurité.
2.4.1.1 Le contrat opérationnel de protection
Pour contribuer à la réponse à des crises majeures, les armées mettront en œuvre une force terrestre pouvant, si nécessaire, monter jusqu'à 10 000 hommes en quelques jours.
Ces moyens permettront de contribuer en priorité à la sécurité des points d'importance vitale, à la liberté des voies de communication ainsi qu'au contrôle de l'accès du territoire.
De plus, il pourra être fait appel à des capacités militaires spécifiques dans les domaines de l'aéromobilité, de l'aérotransport, du génie, de la santé, du NRBC, des liaisons et du soutien logistique.
Parallèlement, les armées devront pouvoir assurer un renforcement de la posture permanente de sûreté aérienne (jusqu'à 6 patrouilles opérationnelles, et 4 patrouilles opérationnelles spécialisées dans la lutte contre les aéronefs lents) et renforcer la posture permanente de sûreté maritime en déployant 1 frégate, 2 chasseurs de mines et 1 avion de patrouille maritime sur chacune des trois façades maritimes.
2.4.1.2 Réseaux de transmission d'infrastructure
Les réseaux de transmission d'infrastructure sur le territoire national seront adaptés pour renforcer leur capacité de résistance, en cas de crises, et pour améliorer l'interopérabilité des moyens civils et militaires. L'opération SOCRATE NG rationalisera et fédérera à partir de 2012 l'ensemble des réseaux. Un mode d'acquisition et de gestion des réseaux en partenariat public-privé sera recherché.
2.4.2 Capacités de contrôle et de surveillance des espaces nationaux et de leurs approches
2.4.2.1 Sauvegarde maritime
La sauvegarde maritime participe à la fonction protection et aux missions d'action de l'État en mer. Elle s'appuie sur un ensemble de moyens armés par la marine et par la gendarmerie maritime.
Huit bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers (BSAH) remplaceront à partir de 2014 la flotte actuelle, leur caractère dual permettant d'envisager un contrat de partenariat avec l'État.
SPATIONAV, qui fédère et redistribue les informations des senseurs, est en cours de déploiement sur l'ensemble des façades maritimes métropolitaines ainsi qu'aux Antilles-Guyane. La version suivante, mise en service à partir de 2011, intégrera de nouveaux capteurs et sera interconnectable avec les systèmes équivalents européens.
La plupart des moyens de surveillance et d'intervention maritime devant être retirés du service dans les années à venir, la capacité sera maintenue grâce à la conversion en patrouilleurs hauturiers des 9 avisos A69 à partir de 2009 et à la conversion en avions de surveillance maritime de 4 Atlantique 2 et des 4 Falcon 50 retirés de la flotte à usage gouvernemental.
À plus longue échéance, de nouveaux patrouilleurs hauturiers seront livrés à partir de 2017. Le renouvellement des capacités aériennes de surveillance et d'intervention maritime est prévu à partir de 2018.
2.4.2.2 Sûreté aérienne
L'effort portera dans les années à venir sur l'amélioration des capacités de surveillance. La surveillance du ciel et des approches du territoire repose sur un ensemble de radars, de centres de conduite et un centre de commandement développé et entretenu par le programme SCCOA (système de commandement et de conduite des opérations aériennes). Ce système concourt aussi à l'entraînement et à l'engagement des forces aériennes, à la sécurité des usagers civils et militaires de l'espace aérien et au service public. Le programme SCCOA amènera les centres français de détection et de contrôle au standard OTAN d'ici 2014 et engagera le renouvellement des radars, prioritairement les radars haute et moyenne altitude.
Le dispositif permanent de sûreté permet la détection, l'identification et l'interception par des avions de combat ou des hélicoptères de tout aéronef. Des accords établis avec nos voisins européens prévoient la continuité de ces actions en dehors de l'espace aérien français.
Les avions de détection et de commandement aéroportés de l'armée de l'air et de la marine seront modernisés.
2.4.2.3 Surveillance de l'espace extra-atmosphérique
La France, et plus généralement l'Europe, ont besoin d'une meilleure sécurité en orbite pour leurs satellites civils et militaires et d'une surveillance de la militarisation de l'espace.
La France constituera à cette fin, d'ici 2014, une capacité opérationnelle nationale à partir du radar GRAVES. Celle-ci sera améliorée dans un cadre européen par :
- la recherche d'un couplage avec le système allemand de trajectographie TIRA sur la base de la coopération lancée en 2007 ;
- le programme SSA (space situational awareness : surveillance et trajectographie des objets et débris en orbite ; météorologie spatiale ; identification des satellites) proposé par l'Agence spatiale européenne.
2.4.3 Capacités permettant de répondre à l'évolution des risques
2.4.3.1 Détection et alerte avancée
Face aux menaces balistiques potentielles, la capacité de détection et d'alerte avancée permettra de surveiller les essais conduits par les États, de renforcer la dissuasion par une meilleure connaissance des agresseurs potentiels et d'alerter les populations.
Ces systèmes font appel, d'une part à des moyens de surveillance spatiaux géostationnaires infrarouge, d'autre part à des radars terrestres à très longue portée pouvant détecter et trajectographier les missiles.
Les études amont et l'exploitation des informations collectées par les deux microsatellites SPIRALE (système préparatoire infrarouge pour l'alerte) lancés en 2009 seront accélérées pour permettre le lancement au plus tard en 2012 de la conception et de la réalisation des radars et satellites. L'entrée en service opérationnel de radars de très longue portée interviendra autour de 2015, celle du premier satellite opérationnel d'ici 2019.
Compte tenu de son intérêt stratégique pour l'Europe, une coopération européenne est recherchée sur le programme de détection et d'alerte avancée.
2.4.3.2 Sécurité de l'information
La menace informatique est désormais une préoccupation majeure. La défense informatique combinera protection des systèmes, surveillance, réaction rapide et action offensive de rétorsion. La protection des réseaux sera coordonnée par une agence de la sécurité des systèmes d'information placée sous la tutelle du futur secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN).
Le ministère de la défense renforcera ses moyens et son organisation et développera des outils de veille, d'alerte et de réponse aux agressions informatiques.
2.4.3.3 Protection NRBC
Les capacités de protection NRBC des armées et du service de santé (SSA) sont également conçues pour contribuer à la protection des populations. Dans ce domaine, la recherche d'une meilleure interopérabilité entre les moyens des ministères de l'intérieur et de la défense est une priorité.
La modernisation des unités NRBC sera achevée en 2010. Ainsi, le régiment NRBC de Fontevraud disposera de 1 000 spécialistes, capables notamment d'armer 12 équipes de reconnaissance et d'évaluation et 6 détachements de liaison au profit des états-majors de zone de défense.
Les capacités de détection et d'analyse des menaces biologiques seront renforcées avec le programme DETECBIO (détection et identification des agents biologiques) : 3 équipements seront livrés en 2012 et 2013 et 6 ultérieurement, permettant de détecter plus d'agents avec des techniques encore plus fiables.
Un système intégré NRBC coordonnera l'ensemble des moyens NRBC du ministère de la défense à partir de 2015.
La coordination civilo-militaire sera renforcée par :
- la création d'un comité stratégique interministériel de défense NRBC, qui veillera à coordonner les efforts de recherche, à garantir une identification partagée des menaces et des risques, et à développer les entraînements et les exercices en commun ;
- la création d'un centre national de formation et d'entraînement NRBC civil et militaire commun aux ministères de l'intérieur et de la défense ;
- le renforcement de l'interopérabilité entre unités de protection NRBC civiles et militaires.
2.4.4 Réorganisation du dispositif de souveraineté dans les DOM-COM
Les moyens militaires dans les DOM-COM seront redéployés et leur niveau redéfini en fonction de leurs missions de souveraineté et de leur contribution à la lutte contre cinq risques majeurs : les catastrophes naturelles, les atteintes à la sécurité du centre spatial guyanais, le narcotrafic, les flux migratoires illégaux, le pillage des ressources naturelles. Certaines des missions de service public que remplissaient les armées seront donc progressivement confiées à la gendarmerie nationale et à la sécurité civile qui se doteront des équipements correspondants.
Ce dispositif sera organisé par théâtres : Antilles-Guyane, zone sud de l'océan Indien, Pacifique. Au total, les effectifs militaires diminueront en moyenne de 40 % d'ici 2011.
2.5 L'intervention sur un spectre large d'opérations
L'engagement de moyens militaires et civils pour faire cesser une atteinte majeure à la sécurité nationale, ou pour remplir nos engagements internationaux en cas de guerre ou de crise internationale revêtira des formes très diverses depuis les opérations spéciales jusqu'à des opérations majeures. L'intervention des armées aura donc souvent comme corollaire un renforcement de la protection sur le territoire national. En toutes circonstances, une capacité d'action d'urgence devra être préservée. L'implication de la France dans une guerre entre États ne peut être exclue compte tenu des caractéristiques de l'environnement international.
Le plus souvent, les opérations auront également une dimension civile. Le Gouvernement présentera, dans les six mois suivant l'adoption de la présente loi, un rapport sur les voies à suivre pour moderniser la coopération civilo-militaire (CIMIC) afin de permettre aux forces armées de mieux s'intégrer dans leur environnement. La plupart de ces opérations auront lieu dans un cadre multinational.
Les interventions des forces armées à l'étranger feront l'objet d'un examen régulier en conseil de défense et de sécurité nationale pour examiner, en fonction de l'évolution de la situation internationale, leurs perspectives politique et diplomatique, leur efficacité militaire et leurs coûts.
L'effort d'équipement des armées s'articulera en deux phases : 2009-2014, correspondant à la présente loi, puis 2015-2020.
2.5.1 Première phase (2009-2014)
Durant la première phase (2009-2014), l'accent sera mis sur la remise à niveau des moyens de combat, en particulier des moyens terrestres.
2.5.1.1 La modernisation de l'outil de combat aéroterrestre et la protection des forces terrestres
Les efforts porteront en priorité sur la protection des forces, la numérisation de l'espace opérationnel, le rétablissement de la capacité aéromobile et l'acquisition de capacités de frappe de précision dans la profondeur.
L'opération d'ensemble Scorpion vise à renouveler l'ensemble des moyens du combat de contact terrestre comme un tout cohérent et évolutif, capable de s'adapter aux changements du contexte stratégique. L'objectif est d'équiper environ 3 brigades pour 2014 et d'engager la modernisation de 5 autres brigades.
Une attention particulière sera apportée aux programmes de cohérence opérationnelle attachés à cette capacité. Ils comprennent notamment les moyens de simulation pour la formation ou l'entraînement opérationnel, les capteurs optroniques terrestres, les munitions de tous types et les maîtrises techniques des équipements.
Protection des forces terrestres
Elle fait l'objet d'une importante priorité, à la fois par l'acquisition de capacités nouvelles (VBCI, Félin, PPT) et par le renforcement du matériel en service (acquisitions de brouilleurs et de surprotections des véhicules déployés). Pour l'accompagnement de convois, une quinzaine de véhicules très fortement protégés sera acquise en 2009 et 2010.
Des systèmes intégrés de protection et d'alerte des unités terrestres en stationnement (Spectre) seront livrés durant la période couverte par la loi de programmation militaire.
Par ailleurs, pour répondre à la menace des engins explosifs improvisés, une opération d'armement Carape a été lancée pour coordonner les achats d'urgence ou le développement de brouilleurs, de surprotection des véhicules, de leurres, d'engins d'ouverture d'itinéraire et de moyens de renforcement de la protection des camps.
Le soutien Santé du combattant sera maintenu à haut niveau. L'ensemble des processus de soutien santé sera numérisé et intégré dans les systèmes d'information et de commandement, dans le cadre du programme ISSAN (info structure santé).
Poursuite de la numérisation de l'espace de bataille (NEB)
La mise en réseau des systèmes d'armes et des combattants est un facteur de supériorité opérationnelle. Elle permet l'accélération du rythme des opérations. 5 brigades seront numérisées en 2014. La numérisation complète des forces terrestres sera achevée en 2020. Elle intégrera des capacités de guerre électronique au contact (détection, localisation, éventuellement brouillage), de surveillance et d'acquisition du champ de bataille dans la zone d'engagement des troupes au sol.
Infanterie et composante blindée
L'infanterie est la fonction opérationnelle la plus sollicitée par les opérations actuelles. Elle permet un contrôle direct et durable du milieu terrestre au sein des populations et dans les zones urbaines. Les équipements individuels du combattant (Félin), des véhicules protégés (véhicule blindé de combat d'infanterie - VBCI), permettant l'accès aux terrains difficiles (véhicule haute mobilité - VHM) et de transport protégé (véhicule blindé multirôle - VBMR) apporteront un niveau de protection et de fiabilité amélioré. 90 % des VBCI et 90 % des Félin seront livrés d'ici la fin de la programmation. Le remplacement des VAB (Véhicule de l'avant blindé) par 2 300 VBMR interviendra à partir de 2015.
La composante blindée permet d'emporter la décision dans les opérations d'entrée en premier. Elle constitue également un élément dissuasif et d'appui dans les crises. La rénovation progressive du char Leclerc interviendra à compter de 2015. L'engin blindé de reconnaissance de combat (EBRC), successeur de l'AMX 10 RCR, sera livré (292 chars) à partir de 2018.
Combat aéromobile
L'engagement des forces au contact nécessite le maintien d'une mobilité tactique assurée conjointement par les hélicoptères de manœuvre et les hélicoptères d'attaque (Gazelle Viviane, Tigre).
Les Gazelle, qui assurent actuellement l'ensemble des missions de combat aéromobile, seront progressivement remplacés par 80 Tigre à partir de 2008.
Appui (artillerie et génie)
L'artillerie sera en mesure de frapper dans la profondeur avec une portée et une précision améliorées, tout en limitant le risque de dommage collatéral.
Le canon CAESAR apportera une souplesse d'emploi et une portée accrues (40 kilomètres). 69 systèmes seront livrés d'ici 2011.
La transformation du lance-roquettes multiple (LRM) en lance-roquettes unitaire (LRU) fournira une capacité d'appui adaptée aux engagements actuels (capacité tout temps, précise et réactive jusqu'à 70 kilomètres). 26 lanceurs seront rénovés de 2010 à 2014.
La capacité d'appui à l'engagement des forces et d'aide au déploiement sera maintenue avec la revalorisation de l'Engin blindé du génie (EBG).
Surveillance et protection antiaérienne
La protection des forces engagées sera assurée par des missiles à très courte portée Mistral, dont la rénovation à mi-vie sera engagée, et par des missiles sol air moyenne portée (SAMP/T) dont la livraison sera accélérée.
Transport terrestre et transport logistique terrestre
Le porteur polyvalent terrestre (PPT) permet le ravitaillement des forces et l'évacuation des véhicules endommagés avec un meilleur niveau de protection des équipages. Environ 500 PPT seront livrés d'ici 2014.
Le petit véhicule protégé (PVP) permettra des déplacements en tout terrain protégés des tirs aux armes légères et des IED. La cible de PVP est de 1 500 dont près de 1 000 livrés d'ici 2011. Les livraisons seront achevées en 2014.
2.5.1.2 La résorption du déficit capacitaire en transport aérien stratégique et tactique
Le déficit capacitaire actuel sera progressivement comblé grâce au remplacement des aéronefs de transport tactiques C 160 Transall par des A 400M, et des avions ravitailleurs C 135 par des avions multi-rôle de ravitaillement en vol et de transport (MRTT).
Les cadences d'acquisition seront fixées d'ici 2010 et présentées au Parlement. Un partenariat public-privé est envisagé pour les MRTT.
Le recours à des procédures d'affrètement (accord cadre SALIS) contribuera à combler d'ici là une partie de cette lacune.
2.5.1.3 La résorption du déficit capacitaire en aéromobilité intrathéâtre
Le NH90 en version terrestre (tactical transport helicopter) constitue l'élément essentiel du renouvellement de la composante de transport aéromobile. 23 NH90-TTH seront livrés entre 2011 et 2014, la cible de 133 demeurant inchangée. En parallèle, 24 Cougar seront rénovés pour prolonger leur durée de vie. Dans le cadre du plan de relance, l'acquisition de 5 hélicoptères de manœuvre EC 725 permettra de compléter la flotte des 14 hélicoptères CARACAL en service.
2.5.1.4 La modernisation progressive de l'aviation de combat
Constituée aujourd'hui encore d'avions de différents types, pour les plus anciens spécialisés dans des missions particulières, l'aviation de combat évoluera vers un parc unique plus homogène d'avions modernes et polyvalents (Rafale et Mirage 2000). Les capacités de pénétration et de frappe en soutien des forces terrestres seront privilégiées.
De l'ordre de 50 Rafale seront livrés. Les cibles et cadences d'acquisition révisées seront fixées en 2010. Des Mirage 2000D multirôles remplaceront les avions spécialisés à partir de 2014. Enfin, les nouveaux pods d'acquisition et de désignation laser seront livrés en 2014.
2.5.1.5 La modernisation de la capacité de maîtrise du milieu sous-marin
Sous-marins nucléaires d'attaque
Les sous-marins nucléaires d'attaque (SNA) apportent une contribution essentielle à la sûreté de la force océanique stratégique (FOST) et à la protection du groupe aéronaval. Ils participent également aux opérations spéciales, aux frappes dans la profondeur et à la maîtrise de l'espace aéro-maritime.
Le programme des 6 SNA Barracuda fait l'objet d'une priorité dans la période de programmation pour une première livraison en 2017. Ce programme permettra le remplacement des Rubis. Les Barracuda mettront en œuvre la torpille lourde, le missile de croisière naval et un moyen de mise en œuvre de nageurs de combat.
Frégates européennes multimissions
Les frégates européennes multimissions (FREMM) remplaceront les frégates de premier rang actuellement en service. Deux exemplaires seront livrés en 2012 et 2014.
Le programme de 11 FREMM permettra d'atteindre le format de 18 frégates de premier rang en 2023 (2Horizon, 11 FREMM, 5 La Fayette). Les FREMM embarqueront le missile de croisière naval (MdCN) à partir de 2013, le missile antinavires Exocet MM 40 B3, la torpille anti-sous-marine MU90, l'hélicoptère de combat anti-sous-marin NFH 90 et le missile de défense aérienne et anti-missiles Aster.
Hélicoptères de lutte anti-sous-marine
Le NFH90 (NATO Frigate Helicopter) version combat remplacera le Lynx sur les frégates de nouvelle génération Horizon et FREMM à raison d'un hélicoptère par frégate. Le NFH90 participera aussi aux missions de sauvetage en mer dans sa version soutien.
2.5.1.6 Adaptation de la capacité amphibie
La protection des bâtiments amphibies sera améliorée. La flotte de bâtiments de projection et de commandement (BPC) et des transports de chalands de débarquement (TCD) sera modernisée par la livraison d'engins de débarquement amphibies (EDA) destinés à renouveler la batellerie. Dans le cadre du plan de relance, un troisième BPC sera commandé dès 2009 et la livraison des EDA sera accélérée. En outre, des véhicules amphibies seront livrés dans le cadre du programme de véhicules de haute mobilité (VHM) dont les premières livraisons interviendront en 2011.
Un contrat de partenariat avec l'État portera sur la mise à disposition d'une capacité de transport maritime composée de 3 navires rouliers (Ro-Ro) à partir de 2008 puis de 5 navires à partir de 2013.
2.5.1.7 Mise à niveau des stocks de munitions et sûreté d'approvisionnement
L'approvisionnement en munitions sera adapté aux besoins des opérations et, le cas échéant, à ceux de montée en puissance face à un conflit majeur. Ceci concerne l'ensemble des munitions, y compris celles de petit calibre.
Munitions de frappe de précision
Les capacités de frappe de précision seront privilégiées, soit pour des actions dans la profondeur, soit pour l'appui des forces au contact.
Le missile de croisière naval (MdCN) sera livré à partir de 2013 avec un objectif de 60 unités sur la durée de la programmation, et une cible totale de 200 missiles.
La version métrique de l'armement air-sol modulaire (AASM), capable de traiter avec une grande précision des objectifs, de jour comme de nuit et à distance de sécurité, sera opérationnelle en 2009. 1 540 kits décamétriques et métriques seront livrés d'ici 2014 et 2350 d'ici 2017.
La capacité de frappe par tout temps sera également améliorée à très court terme par la mise en service de munitions de précision à guidage dual (laser et GPS).
Les munitions sol-sol comprendront des roquettes à guidage terminal (500 livrées d'ici 2012 pour les lance-roquettes unitaires) et des obus d'artillerie de précision.
Missiles terrestres
La capacité en missiles à moyenne portée MILAN sera maintenue au-delà de 2011 par un appoint en postes de tir et, en tant que de besoin, en missiles. Le renouvellement sera achevé en 2018.
Armement antinavires
La famille Exocet restera à moyen terme l'armement missile antinavires, les missiles bénéficiant d'une rénovation.
Armement anti-sous-marins
Les torpilles sont l'unique armement contre les sous-marins. 300 torpilles légères MU 90 auront été livrées d'ici 2011 sur frégates, hélicoptères de combat et avions de patrouille maritime.
Armement de défense sol-air des forces
La composante défense anti-aérienne très basse altitude, indispensable pour assurer la protection d'une force ou pour renforcer la défense de points particuliers, continuera d'être assurée par le système d'armes Mistral ; 1 500 missiles rénovés seront livrés entre 2012 et 2016. En parallèle, le programme relatif à la famille de missiles sol-air futurs (FSAF) sera poursuivi. Près de 200 missiles seront livrés d'ici 2014.
2.5.1.8 Moyens de commandement
La France continuera de développer sa capacité à tenir le rôle de « nation cadre » dans une coalition. À cette fin, plusieurs programmes concernant les systèmes d'information et de commandement seront poursuivis.
En 2015, le système d'information des armées (SIA) sera opérationnel à tous les niveaux de la chaîne de commandement interarmées. La capacité de commandement et de conduite des opérations aéronavales sera améliorée par le programme SIC 21 déployé en 2010. Le programme SICF (système d'information de commandement des forces) renforcera l'interopérabilité avec les forces de l'OTAN.
Les transmissions par satellites couvriront principalement les zones d'intérêt stratégique définies par le Livre blanc. Elles reposeront sur deux segments : le système durci Syracuse pour les transmissions essentielles, dont le renouvellement aura lieu vers 2018 ; un segment dual à très haut débit à partir de 2013, notamment pour les drones et les zones non couvertes par Syracuse.
Le mode d'acquisition et de gestion des transmissions par satellite fera l'objet d'un appel d'offre en vue d'un partenariat public-privé.
2.5.1.9 Lutte informatique offensive
L'adaptation de notre défense à la lutte dans le cyberespace nécessite en premier lieu de fixer une doctrine et une organisation, d'identifier et de former les personnels dédiés à cette capacité, de les organiser, de mener des expérimentations techniques et de développer des outils spécifiques, dans le respect du droit. Cette capacité dont les premières bases seront posées dès l'été 2009, constituera l'une des clés de la supériorité opérationnelle.
2.5.2 Seconde phase (2015-2020)
Durant la seconde phase (2015-2020), l'accent sera porté principalement sur les opérations aéromaritimes et aériennes.
2.5.2.1 Accélération du renouvellement de la flotte de surface
Permanence du groupe aéronaval (GAN)
La décision concernant le deuxième porte-avions sera prise en 2011/2012. Des études d'architecture, en particulier sur la propulsion, se poursuivront d'ici là.
En parallèle, l'initiative d'interopérabilité aéronavale européenne (IIAE) vise à accroître la capacité d'action de l'Europe dans ce domaine.
Frégates
Le programme frégates européennes multi-missions (FREMM) sera poursuivi, les livraisons s'échelonnant jusqu'en 2022. Les deux frégates antiaériennes de type Cassard seront remplacées vers 2020 par 2 des 11 FREMM dont le système d'armes sera adapté à la mission de défense aérienne et anti-missiles de zone au profit d'un groupe naval.
Guerre des mines
Le système de lutte anti-mines futur (SLAMF) reposera sur des drones de surface et sous-marins, et sur des bâtiments bases. Ce projet fait l'objet d'une recherche de coopération au sein de l'Agence européenne de défense (AED). La livraison d'une première capacité est prévue vers 2018.
Capacité amphibie et de projection maritime interthéâtres
À l'horizon 2020, le quatrième bâtiment de projection et de commandement (BPC) sera livré en remplacement du dernier transport de chalands de débarquement (TCD) entré en service dans les années 1990.
Flotte logistique
La flotte logistique doit pouvoir soutenir simultanément un groupe aéronaval et un groupe amphibie ou une force d'action navale sur deux théâtres d'opérations distincts. Un parc de quatre pétroliers ravitailleurs demeure nécessaire pour le soutien en carburants, vivres, munitions de ces groupes et pour le ravitaillement d'une opération aéroterrestre. Quatre navires seront livrés entre 2017 et 2020.
Missiles antinavires
Un missile antinavires léger pour hélicoptère destiné au combat en zone littorale et au combat asymétrique sera acquis à l'horizon 2018.
Armement des sous-marins
Les SNA et les SNLE seront équipés de la nouvelle torpille lourde à partir de 2015.
2.5.2.2 Accélération de la modernisation de l'aviation
L'accélération de la modernisation de l'outil aérien portera prioritairement sur les capacités des avions de combat.
Aviation et drones de combat
La transition vers une flotte plus homogène d'avions polyvalents se poursuivra jusqu'en 2020 avec la poursuite des livraisons de Rafale et de Mirage 2000D multirôles. Le missile Meteor entrera en service sur Rafale et l'amélioration des capacités de frappe en soutien des forces terrestres se poursuivra.
L'insertion de drones de combat dans les forces est envisagée au-delà de 2020.
Aviation de patrouille maritime
22 avions de patrouille maritime Atlantique 2 seront rénovés. 4 avions verront leur utilisation limitée aux missions de surveillance.
2.5.2.3 La poursuite de la modernisation des forces terrestres
5 brigades bénéficieront du renouvellement de leurs moyens de combat à partir de 2015.
Numérisation de l'espace de bataille
L'effort portera sur la mise en réseau des unités de contact et de leurs appuis. La numérisation complète des forces terrestres sera achevée en 2020 et s'intégrera dans un système interarmées.
Combat de contact
Le véhicule blindé multirôle (VBMR) et l'engin blindé de reconnaissance de combat (EBRC) seront livrés. Le programme de rénovation du char Leclerc sera achevé.
Un missile de combat de moyenne/longue portée apportera une capacité accrue contre les engins blindés et les chars, permettant le tir au-delà de la vue directe. Il équipera en particulier l'EBRC et le Tigre.
Appuis
Les 64 derniers CAESAR seront livrés.
À partir de 2017, les capacités du génie seront modernisées avec le lancement d'un engin d'appui au combat dont les premières livraisons auront lieu en 2020.
Logistique
La modernisation du soutien logistique des forces projetées se poursuivra. La cible totale de 1 800 porteurs polyvalents terrestres (PPT) sera atteinte en 2019.
3 850 véhicules légers tactiques polyvalents protégés (VLTP) seront livrés entre 2015 et 2018, la cible totale étant de 5 500.
Combat aéromobile
À l'horizon 2020, l'ensemble des Tigre HAP et HAD aura été livré, tandis que la composante aérotransport aura été rénovée (Cougar) ou partiellement remplacée (70 % des NH90 livrés).
L'ensemble de la flotte d'hélicoptères légers ou moyens sera progressivement remplacé à partir de 2015. Un programme global centré sur un hélicoptère (ou une famille d'hélicoptères) de la classe de 4 tonnes portera sur la livraison de 188 unités à partir de 2018.
La rénovation des appareils les plus anciens permettra d'assurer la continuité du service jusqu'à cette échéance.
2.5.2.4 Renforcement des capacités de frappe de précision dans la profondeur
Missiles de croisière
Les missiles de croisière SCALP déjà livrés aux forces seront maintenus en service sur Mirage 2000 multirôle et Rafale. 400 d'entre eux seront rénovés à partir de 2015 et livrés entre 2018 et 2021.
200 missiles de croisière navals (MdCN) seront disponibles en 2017. Une première capacité de MdCN sera opérationnelle sur les sous-marins Barracuda dès l'entrée en service de ceux-ci.
2.6 Tableau de synthèse
Le tableau qui suit présente les livraisons prévues durant la période couverte par LPM et la cible finale des principaux équipements.
Pour certains programmes majeurs, les cibles et les cadences de livraisons seront précisées ou réexaminées d'ici 2010. Elles feront alors l'objet d'une présentation spécifique devant le Parlement.
ND : non déterminé dans le Livre blanc
(1) Cibles et cadences de livraisons à préciser d'ici 2010.
(2) Équipements livrés sur la période 2015/2020 faisant l'objet de commandes durant la période couverte par la LPM 2009-2014.
3 La transformation de la défense
La transformation de la défense engagée dans la présente programmation permettra d'adapter les formats aux nouveaux contrats opérationnels, d'ajuster la préparation des forces à ces nouveaux contrats, de valoriser les hommes et les femmes qui servent dans la défense et de restructurer l'organisation, en particulier en rationalisant l'administration et les soutiens, et en concentrant son implantation territoriale.
Les marges de manœuvre budgétaires qui seront dégagées par ces restructurations seront intégralement réinvesties au profit de la condition du personnel, des équipements et de la préparation des forces.
3.1 La mise en place des nouveaux contrats et des nouveaux formats
3.1.1 La réduction des effectifs
L'effectif global des armées passera de 271 000 civils et militaires en 2008 à 225 000 en 2014-2015 (131 000 personnes pour l'armée de terre, 44 000 pour la marine, 50 000 pour l'armée de l'air). Le plafond d'emploi de la mission Défense atteindra sa nouvelle cible de 269 000 en 2016.
La réduction des effectifs de 54 000 postes sur la mission défense, hors externalisations, portera principalement sur l'administration et le soutien des forces (à hauteur de 75 %).
3.1.2 Les nouveaux formats des armées
La composante terrestre constituera une force opérationnelle de 88 000 personnes organisée en :
- 8 brigades interarmes disposant de l'ordre de 250 chars lourds de bataille de type Leclerc, d'environ 650 véhicules blindés de combat de type VBCI, 80 hélicoptères de combat, 130 hélicoptères de manœuvre et de l'ordre de 25 000 équipements individuels du combattant de type Félin,
- 3 brigades spécialisées et la brigade des forces spéciales,
- moyens d'appui correspondants.
La composante maritime mettra en œuvre notamment :
- 4 sous-marins nucléaires lanceurs d'engins,
- 6 sous-marins nucléaires d'attaque,
- 1 porte-avions et son groupe aérien,
- 18 frégates de premier rang,
- 4 bâtiments de projection et de commandement.
La composante aérienne mettra en œuvre :
- 300 avions de combat modernes, Rafale et Mirage 2000 polyvalents, incluant ceux de l'aéronautique navale,
- les systèmes de détection et de contrôle avancé de type Awacs,
- une flotte d'avions de ravitaillement et de transport comprenant de l'ordre de 14 appareils de type MRTT et environ 70 avions de transport.
3.2 L'activité et la préparation opérationnelle
L'activité et l'entraînement des forces revêtiront un caractère prioritaire. Facteurs de motivation pour les hommes et de cohésion pour les unités, ils seront maintenus à un haut niveau.
La préparation opérationnelle sera différenciée. Elle garantira pour l'ensemble des composantes le socle adéquat d'entraînement. Ce socle sera complété par unité d'une préparation spécifique en fonction de la prochaine mission.
Les objectifs annuels d'activité sont bâtis pour répondre aux contrats opérationnels et comprennent des normes de qualification nationales et de certification de l'OTAN.
Les objectifs d'activité
Terre
Nombre annuel de jours de préparation et d'activité opérationnelles par homme pour les unités opérationnelles
Nombre annuel d'heures de vol (HdV)
En Md€ 2008
L F I
Total
Équipements
Représentant 15, 4 Md€ en 2008, les crédits d'équipements s'élèveront en moyenne à 17 Md€2008 sur la période 2009-2014.
Les crédits d'équipement couvrent les crédits consacrés aux opérations d'armement, à la dissuasion, à l'entretien programmé des matériels et du personnel, à l'infrastructure et aux études de défense.
51, 15 Md€2008 sont consacrés aux opérations d'armement qui regroupent les programmes, opérations d'armement et acquisitions classiques organisés comme suit :
- les programmes à effets majeurs (PEM), au nombre d'environ 200, structurent les capacités ;
- directement liés aux précédents, les programmes d'environnement et les équipements d'accompagnement complètent la cohérence capacitaire et organique des forces.
La dissuasion comprend l'ensemble des crédits d'investissement, d'étude, d'infrastructure et de MCO. Ses besoins sont couverts à hauteur de 20, 2 Md€2008 cumulés de 2009 à 2014.
Les crédits consacrés à l'entretien programmé des équipements et du personnel sont portés à un niveau moyen annuel de 2, 9 Md€2008 sur les six années de la LPM, soit un total de 17, 2 Md€2008, pour poursuivre le rétablissement de la disponibilité technique dans un contexte de maintien en service des matériels anciens.
L'infrastructure regroupe l'ensemble de l'activité liée à la politique immobilière dans le domaine du fonctionnement et de l'investissement, y compris les crédits nécessaires à la mise en œuvre des restructurations. 8 Md€2008 y seront consacrés de 2009 à 2014.
Les crédits des études de défense hors dissuasion regroupent les études amont contractualisées avec l'industrie, les études prospectives, stratégiques et technico-opérationnelles, ainsi que les subventions aux écoles et organismes sous tutelle. Ces crédits sont portés à 5, 4 Md€ au total sur la période 2009-2014.
6.2 La sécurisation des crédits d'activité et d'entraînement des forces
Les crédits de fonctionnement et d'activité des armées financent le niveau global d'activité et d'entraînement correspondant aux contrats opérationnels du Livre blanc.
Ces crédits s'élèvent en moyenne annuelle à 1, 87 Md€2008 sur la période 2009-2014.
Le montant des crédits programmés pour les carburants opérationnels s'élève à 385 M€2008 en 2009.
En cas de hausse du coût constaté des carburants opérationnels, le budget du ministère de la défense fera l'objet de mesures de gestion et, si la hausse est durable, des crédits supplémentaires seront ouverts en construction budgétaire, pour couvrir les volumes nécessaires à la préparation opérationnelle des forces.
6.3 Le financement des opérations extérieures
Un double objectif sera poursuivi afin d'éviter que le financement des opérations extérieures ne pèse sur la réalisation de la programmation des investissements :
- une maîtrise du coût des opérations extérieures, qui sera mis en regard de leur intérêt politique ;
- un niveau de budgétisation suffisant, assorti d'une meilleure identification des surcoûts.
À cet effet, le montant de la provision au titre des surcoûts des opérations extérieures, porté à 510 M€ en 2009, sera augmenté de 60 M€ en 2010 puis de 60 M€ en 2011.
En gestion, les surcoûts nets non couverts par la provision (surcoûts hors titre 5 nets des remboursements des organisations internationales) seront financés par prélèvement sur la réserve de précaution interministérielle.
7 Les suites du Livre blanc et le suivi de la loi
7.1 Le conseil de défense et de sécurité nationale et la réforme de l'ordonnance de 1959
La présente loi tire les conséquences de l'adoption d'une stratégie de sécurité nationale.
Elle institue notamment, sous l'égide du chef de l'État, un conseil de défense et de sécurité nationale qui comprend le Premier ministre et les principaux ministres intéressés aux questions de défense et de sécurité nationale. Dans ce conseil seront prises les principales décisions dans ces domaines, conformément aux attributions constitutionnelles du Président de la République. Le Premier ministre qui dirige l'action du Gouvernement dans le domaine de la sécurité nationale sera étroitement associé à la préparation des travaux du conseil et au suivi des décisions prises. Il suppléera le cas échéant le Président de la République conformément à l'article 21 de la Constitution.
Le dispositif retenu prévoit en outre des formations restreintes et spécialisées du conseil. Il instaure en particulier le conseil national du renseignement. Celui-ci sera assisté d'un coordonnateur national placé à la présidence de la République.
Le secrétariat du conseil de défense et de sécurité nationale, dans ses différentes formations, sera assuré par le futur secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN).
La loi procède également à une première refonte des dispositions du code de la défense issues de l'ordonnance du 7 janvier 1959, en particulier en ce qui concerne les compétences des principaux ministres responsables des politiques concourant à la sécurité nationale présentées en fonction de leurs contributions respectives à la stratégie globale.
La réforme de l'ordonnance du 7 janvier 1959 sera ensuite poursuivie. La modernisation du cadre juridique des activités de renseignement sera également entreprise par des dispositions relatives à la protection des personnels des services et à celle de leurs sources.
7.2 Un meilleur suivi de l'exécution du Livre blanc et de la loi
Sera institué un processus de suivi des orientations du Livre blanc incluant notamment chaque année un point au conseil de défense et de sécurité nationale, une évaluation présentée aux commissions compétentes du Parlement et un séminaire de stratégie générale.
Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement un rapport sur l'exécution de la présente loi, exposant notamment les efforts accomplis en matière de recherche amont.
Il joindra à ce rapport une présentation des grandes orientations de la politique industrielle de défense en insistant sur l'état de la coopération européenne en la matière.
7.3 Une révision tous les quatre ans
La présente loi sera révisée au bout de quatre ans, pour tenir compte en particulier de l'évolution du contexte stratégique, de la réalisation effective du plan d'équipement, de la mise en œuvre des réductions d'emplois et des mesures de restructuration. Cette révision conduira à une nouvelle loi de programmation qui couvrira la période 2013-2018.
Un point d'étape d'ensemble de la programmation sera réalisé en 2010 à l'occasion de l'élaboration du prochain budget triennal.
Je suis tout d’abord saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 48 est présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° 129 est présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le troisième alinéa du rapport annexé, supprimer les mots :
à la dissuasion,
L’amendement n° 48 n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Michelle Demessine, pour présenter l'amendement n° 129.
Dans le rapport annexé, l’arme nucléaire figure parmi les priorités qui seraient nécessaires à l’adaptation et à la modernisation de nos forces.
De là découle la part très importante affectée chaque année à l’armement nucléaire dans le budget.
Nous admettons tout à fait qu’il faille assurer le niveau de crédibilité de notre système de dissuasion avec les techniques de simulation.
Cependant votre politique dans ce domaine va au-delà et ne respecte pas le principe de stricte suffisance, qui est l’un des fondements de notre doctrine.
Monsieur le secrétaire d'État, vous ne vous contentez pas de moderniser nos armements nucléaires. Mais, comme vos prédécesseurs, vous continuez à les développer.
C’est ainsi que, pour 2009, les crédits destinés à la dissuasion représentent 23 % des crédits d’équipement de nos forces et progressent fortement en raison de la conclusion de plusieurs contrats qui résultent de décisions prises dans les années antérieures.
C’est pourquoi nous restons opposés à la construction d’un quatrième sous-marin nucléaire lance-engins et aux missiles M51 qui l’équiperont en 2010.
Sur le fond, nous pensons que la dissuasion nucléaire n’est plus, dans les conditions de 2009, la clef de voûte de notre sécurité et que les armes nucléaires ne sont plus adaptées aux menaces du monde d’aujourd’hui.
Notre politique de dissuasion nucléaire, outre notre volonté d’autonomie de décision, qui, elle, reste valable, reposait essentiellement sur l’existence d’un ennemi potentiel clairement identifié. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, et les menaces sont diffuses et multiformes.
Les armes nucléaires sont, par exemple, inefficaces pour lutter contre le terrorisme et contre les États qui le suscitent.
Pour cet ensemble de raisons, notre amendement tend à ne pas compter l’armement nucléaire parmi les priorités à retenir dans ce projet de loi de programmation.
La commission est, bien entendu, défavorable à cet amendement.
Elle considère à une large majorité que la dissuasion demeure une garantie fondamentale de notre sécurité dans un monde où subsistent des arsenaux considérables et où certains pays cherchent à se doter de capacités balistiques et d’armes de destruction massive.
Cela n’a pas empêché la France de faire des pas très importants en matière de désarmement nucléaire.
Je pense à l’abandon de la composante sol-sol et à la réduction très significative du nombre d’armes, avec tout dernièrement encore la diminution d’un tiers du format des forces aériennes stratégiques.
Je pense également à l’arrêt irréversible des essais et de la production de matière fissile militaire, comme ont pu le constater de nombreux observateurs étrangers, puisque nous sommes le seul pays à avoir réalisé la transparence sur le démantèlement de nos installations.
Le maintien de la dissuasion à un niveau de stricte suffisance n’exclut pas une politique active sur la scène internationale pour renforcer les régimes de désarmement et de non-prolifération. Les propositions émises par l’Union européenne sous présidence française en sont l’illustration.
La commission considère donc que la dissuasion a toujours sa place dans notre politique de défense.
La dissuasion est un élément essentiel de notre politique de défense.
Cet amendement est contraire à toute notre politique et le Gouvernement ne peut qu’en demander le rejet.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 49, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Compléter le quatrième alinéa du rapport annexé, par les mots :
, et des moyens permettant de leur prodiguer un entraînement adapté aux enjeux actuels
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 50, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le cinquième alinéa du rapport annexé par les mots :
, ainsi qu’à la remise en état des sites militaires anciennement utilisés
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer le sixième alinéa du rapport annexé.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du 1.1 du rapport annexé :
La nouvelle géographie de la puissance et des crises
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 15 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Après les mots :
s'adapter à
rédiger comme suit la fin de la première phrase du premier alinéa du 1.1 du rapport annexé :
la nouvelle géographie de la puissance, à la montée des grands pays émergents et à la multipolarité du monde.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 16 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du 1.1 du rapport annexé, remplacer les mots :
l'arc de crise s'étendant de l'Atlantique à l'ouest de l'Afrique jusqu'à l'océan Indien, le continent européen, l'Afrique sub-saharienne
par les mots :
le continent européen, l'Afrique, l'arc de crise s'étendant de l'Atlantique à l'ouest de l'Afrique jusqu'à l'océan Indien,
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Charasse, est ainsi libellé :
I. - Dans le quatrième alinéa du 1.1 du rapport annexé, après le mot :
exposés
insérer les mots :
aux conséquences des crises dans les zones d'intérêt stratégique et
II. - En conséquence, dans le même alinéa, après le mot :
djihadiste
remplacer le signe de ponctuation :
par le mot :
et
et supprimer les mots :
les conséquences des crises dans les zones d'intérêt stratégique
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 52, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. - Dans le quatrième alinéa du 1.1 du rapport annexé, supprimer les mots :
d’inspiration djihadiste.
II. - Compléter le même alinéa par les mots :
, la mise en cause de la sécurité d’approvisionnement en eau, en énergie, en alimentation et en matières premières
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 18 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Dans le septième alinéa du 1.1 du rapport annexé, après le mot :
stabilisation
insérer les mots :
sous l'égide de l'Organisation des Nations unies
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 128, présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après le premier membre de phrase du septième alinéa du 1.1 du rapport annexé, insérer un membre de phrase ainsi rédigé :
elles se feront prioritairement dans un cadre multinational et autorisé par les Nations unies ;
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Le rapport annexé, dans sa partie traitant de la mondialisation et de la nouvelle stratégie de sécurité nationale, manque de précision sur le cadre dans lequel doivent s’effectuer nos interventions militaires à l’étranger.
Certes, il fait référence à certains grands principes directeurs énoncés dans le Livre blanc, dont celui d’une « définition de l’engagement dans l’espace et le temps, avec une évaluation précise du coût ».
Cependant, ces principes sont surtout de nature technique et n’invitent pas à se poser la question de la légitimité des interventions.
Pour éviter la dérive qui consisterait à transformer nos troupes en corps expéditionnaire engagé dans des combats illégitimes et incertains, le cadre de l’intervention doit être précis et clair.
Notre conception du règlement de conflits par l’envoi de troupes à l’étranger est strictement celle du maintien ou du rétablissement de la paix, de l’interposition entre belligérants et, bien entendu, en cas d’urgence, de la protection de nos ressortissants.
Ces interventions militaires ne peuvent donc être légitimes à nos yeux que quand elles procèdent d’un mandat donné par la seule institution internationale qui privilégie le multilatéralisme ainsi que la recherche de solutions politiques et pacifiques, je veux parler de l’ONU.
Nous sommes évidemment conscients des insuffisances et parfois de l’inefficacité de cette grande institution. C’est une raison de plus pour poursuivre nos efforts de modification du fonctionnement et de la composition du Conseil de sécurité afin qu’il reflète le monde tel qu’il est aujourd’hui.
Cette conception explique que nous soyons, en revanche, totalement opposés à une participation des troupes françaises à des opérations menées dans le cadre de l’OTAN qui découlent, comme en Afghanistan, d’un alignement pur et simple sur les intérêts de l’administration américaine.
D’une manière générale, nous ne sommes pas favorables à des opérations militaires que la France mènerait de son propre chef, sans mandat international. Pour nous, le mandat de l’ONU doit être la règle et toute autre opération ou présence doit être l’exception.
Cet amendement vise à ce que le rapport annexé fasse clairement référence à un mandat du Conseil de sécurité de l’ONU pour l’envoi de troupes françaises à l’étranger.
Sur le fond, on ne peut qu’être d’accord avec l’idée que les Nations unies doivent être le principe directeur en ce qui concerne nos interventions.
Pour autant, la rédaction proposée n’est pas satisfaisante.
Les décisions du Conseil de sécurité de l’ONU ne sont pas les seules sources de la légalité internationale. Nous pouvons être amenés à intervenir dans le cadre du droit de légitime défense, consacré par l’article 51 de la Charte des Nations unies, ou dans le cadre des engagements souscrits au titre de nos accords de défense ou de nos alliances, qu’il s’agisse de l’OTAN ou de l’Union européenne.
La commission émet donc un avis défavorable.
Madame Demessine, cet amendement est inutile. Dans tous les cas de figure, la France ne peut intervenir aux fins de mise en œuvre d’opérations de stabilisation sans l’aval du Conseil de sécurité des Nations unies, seule instance habilitée à décider de telles opérations.
C’est la raison pour laquelle je demande le rejet de cet amendement.
Je soutiens l’amendement de Mme Michelle Demessine, qui rejoint l’amendement n° 18 rectifié, dont je suis l’un des signataires.
L’expérience montre, monsieur le secrétaire d'État, contrairement à ce que vous venez d’affirmer, que la France a pu intervenir dans un cadre non autorisé par les Nations unies.
Je citerai l’exemple des bombardements de la Yougoslavie en 1999, qui n’étaient pas autorisés par les Nations unies. Notre intervention s’était clairement située en dehors de la légalité internationale même si, ensuite, les Nations unies ont été amenées à prendre des résolutions.
On peut toujours dire, comme M. le rapporteur, qu’il y a plusieurs sources du droit international, mais elles ne sont pas toutes de même niveau. Le fait que nous soyons entraînés dans une alliance pour des opérations qui ne sont pas autorisées par les Nations unies pose un problème.
L'amendement n'est pas adopté.
L’amendement n° 53, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans l’avant-dernier alinéa du 1.1 du rapport annexé, supprimer les mots :
et recevoir le soutien de la nation.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Cet amendement a pour objet d’attirer votre attention, mes chers collègues, sur le caractère ambigu du segment de phrase « et recevoir le soutien de la nation ».
Malgré la révision constitutionnelle de 2008, la nation est peu consultée sur les opérations extérieures, qui restent le domaine réservé du Président de la République, en vertu d’un véritable tabou résultant de la pratique institutionnelle de la Ve République. Depuis la dernière révision constitutionnelle, l’article 35 de la Constitution limite le rôle du Parlement, dans les domaines de la défense et des affaires étrangères, à une information « au plus tard trois jours après le début de l’intervention » et, éventuellement, à « un débat qui n’est suivi d’aucun vote ». Lorsque l’intervention dure plus de quatre mois, le Parlement autorise par un vote le maintien des forces.
Ces dernières années, les opérations extérieures se sont multipliées : elles sont plus complexes, plus longues, plus coûteuses que par le passé ; elles résultent de décisions d’une grande importance et sont menées au nom de la France ; elles engagent la vie des hommes et des femmes qui servent dans nos forces armées. C’est donc au nom de la France, avec l’adhésion des représentants du peuple que la décision d’engager nos troupes doit être prise.
Je tiens à souligner le caractère ambigu de ce segment de phrase puisqu’il n’évoque pas explicitement la validation par le Parlement, mais se limite à une formulation plus vague, qui pourrait laisser à penser qu’une simple adhésion de l’opinion pourrait être recherchée, sans plus de précision.
La représentation nationale est la voix de la nation ! Elle est amenée à se prononcer sur les opérations extérieures. Par conséquent, la rédaction de cet amendement n’est pas adaptée à la situation et la commission a émis un avis défavorable.
Dans tous les discours de l’opposition que nous avons entendus hier soir, l’action du Président de la République a été stigmatisée, sous prétexte qu’il s’occuperait de tout. Je rappelle que le Président de la République, en vertu de la Constitution, est le chef des armées : il est donc tout à fait naturel qu’il s’implique pleinement dans les missions des armées !
Madame le sénateur, permettez-moi d’exprimer l’étonnement que m’inspire votre amendement. La suppression que vous proposez sous-entend que la politique de défense n’aurait pas besoin du soutien de la nation ! L’adhésion de la nation est pourtant une condition de l’efficacité de la stratégie de sécurité nationale, comme le rappelle le paragraphe 5 du rapport annexé au présent projet de loi de programmation militaire.
En ce qui concerne les opérations extérieures, le rôle du Parlement a été renforcé, puisqu’il est désormais informé des interventions de nos forces armées à l’étranger, comme l’a si bien dit M. le rapporteur, et qu’il se prononce par un vote sur leur prolongation. Il n’est donc pas vain, vous l’aurez tous compris, de faire mention du soutien de la nation. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 93, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le septième alinéa du 1.1 du rapport annexé par une phrase ainsi rédigée :
Ces engagements devront respecter la Charte de l’Organisation des Nations unies.
La parole est à M. André Vantomme.
Cet amendement précise que les opérations militaires conduites par l’armée française, seule ou en coalition, sur des théâtres extérieurs doivent se dérouler dans un cadre autorisé par les Nations unies, c’est-à-dire respecter les principes de la Charte de l’Organisation des Nations unies. Il confirme une politique, répare un oubli et conforte le rôle et la place des Nations unies dans l’organisation de la sécurité internationale.
Concrètement, ce rappel peut aussi tenir lieu de message adressé à toutes les nations du monde, qui seraient tentées, un jour ou l’autre, de faire cavalier seul : il ne faut pas se laisser entraîner dans des aventures militaires. En la matière, le respect de la charte de l’Organisation des Nations unies est un point cardinal qui mérite de figurer dans le rapport annexé.
Je me suis déjà expliqué sur ce sujet. L’avis de la commission est défavorable.
Nous avons déjà évoqué ce sujet lors de la discussion de l’amendement n° 128. Le Gouvernement n’a pas changé de position et émet un avis défavorable.
Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.
L’amendement n° 51, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le 1.1 du rapport annexé par un alinéa ainsi rédigé :
Les institutions d’une gouvernance mondiale peinant à se mettre en place pour répondre aux défis relatifs à ce nouveau contexte, la France doit prendre en conséquence les initiatives permettant d’encourager le développement des fonctions de médiation et de prévention au sein de l’Union européenne.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Le texte du rapport annexé au projet de loi, par ailleurs largement discuté, élargit le concept de sécurité nationale, dans la mesure où celle-ci ne se résume plus au seul effort de défense. Cette extension est difficile à admettre si elle conduit à renforcer de manière unilatérale les pouvoirs du Président de la République en la matière ; elle est juste si l’on considère que, parallèlement à l’effort de défense, des efforts dans les domaines de l’intelligence économique, de la mise en sécurité des approvisionnements énergétiques ou en matières premières doivent être déployés pour assurer la sécurité nationale. Il en va de même pour les efforts tendant à la prévention des conflits.
Comme le note le texte du rapport annexé au projet de loi, au début du paragraphe 1.1, le monde est aujourd’hui « plus instable, plus imprévisible, et les évolutions de notre environnement peuvent être brutales ». Les pays sont désormais interconnectés, les destins de leurs peuples sont intimement liés. Dans ce monde où les distances sont réduites à peu de chose par les technologies de l’information et de la communication et par le développement des moyens de transport, l’interpénétration des économies et des cultures à la surface du globe et la propagation systémique des crises sont devenues des réalités. Ainsi, l’émergence d’une crise financière aux États-Unis provoque un raz de marée mondial, qui plonge les États dans la situation économique et sociale que nous connaissons aujourd’hui. L’apparition d’un virus informatique dans un pays fait craindre à l’ensemble de la planète une contamination inévitable. Ces craintes sont encore plus justifiées dans le cas de la propagation des virus réels, comme celui de la grippe A. Les tensions ou les conflits dans une région donnée ont des conséquences mondiales, jusqu’au sein de nos collectivités.
Il apparaît donc essentiel qu’une gouvernance mondiale soit mise en place afin d’anticiper ces crises ou, le cas échéant, de les circonscrire lorsqu’elles surviennent. C’est pourquoi cet amendement tend à compléter un paragraphe du rapport annexé consacré aux différentes dimensions de la sécurité, en précisant que, « les institutions d’une gouvernance mondiale peinant à se mettre en place pour répondre aux défis relatifs à ce nouveau contexte », notre pays devra prendre les initiatives qui conviennent, dans un cadre européen, pour encourager le développement des fonctions de médiation et de prévention.
Le rôle majeur de l’Union européenne est souligné dans une autre partie du rapport annexé. La commission a du mal à identifier en quoi consisteraient les « fonctions de médiation et de prévention des conflits » qui, d’après l’amendement, seraient développées au sein de l’Union européenne. Elle a émis un avis défavorable.
La loi de programmation militaire n’a pas vocation à définir les instances de la gouvernance mondiale. Cet amendement est totalement extérieur à notre débat ; il recueille donc un avis défavorable du Gouvernement.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 19 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
À la fin de la seconde phrase du premier alinéa du 1.2 du rapport annexé, remplacer les mots :
l’Union européenne, les Nations unies et l’Alliance atlantique
par les mots :
les Nations unies ainsi que les obligations qui découlent de notre appartenance à l’Union européenne et à l’Alliance atlantique
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Cet amendement n’est pas de caractère purement rédactionnel, car il tend à distinguer les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies des obligations qui découlent, pour notre pays, de son appartenance à l’Union européenne et à l’Alliance atlantique.
Comme je l’ai rappelé tout à l’heure, ces deux ordres de préoccupations peuvent entrer en conflit. J’observe d’ailleurs que M. le secrétaire d’État ne m’a pas répondu lorsque j’ai évoqué les bombardements de la Yougoslavie en 1999, qui n’avaient fait l’objet d’aucune autorisation du Conseil de sécurité des Nations unies. Chacun sait que nous avons été entraînés dans cette affaire par la pression de Mme Madeleine Albright, qui voulait justifier l’existence de l’organisation militaire intégrée de l’OTAN, près de dix ans après la chute du Mur de Berlin.
Cet amendement vise donc à distinguer les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies, bases du droit international, des obligations découlant de nos alliances, qui s’imposent à nous dès lors qu’elles sont conformes au droit international.
La rédaction de cet alinéa du rapport annexé que M. Jean-Pierre Chevènement propose de modifier résulte des travaux de l’Assemblée nationale. Le Gouvernement souhaiterait s’y tenir. C’est pourquoi il émet un avis défavorable.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 95, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du 1.2.1 du rapport annexé par les mots :
destinée à protéger et défendre les populations et les territoires de l’Union européenne.
La parole est à M. Daniel Reiner.
Cet amendement porte sur la définition d’une politique de défense commune de l’Union européenne et mérite un rappel historique.
On se souvient de l’échec de la Communauté européenne de défense, la CED, en 1954, puis des tentatives d’affirmation de l’Union de l’Europe occidentale, l’UEO, au début des années 1980. Au sortir de l’affrontement Est-Ouest, la signature du traité de Maastricht a remis le dossier sur la table. Entre le sommet franco-britannique de Saint-Malo, en décembre 1998, et le Conseil européen de Laeken, trois ans plus tard, l’« Europe de la défense » progresse.
La défense et la sécurité extérieure relèvent toujours de la compétence des États. Or, les crises des années 1990 ont montré que les États membres de l’Union européenne ne peuvent plus mener individuellement une politique crédible en la matière.
À la suite du sommet franco britannique de Saint-Malo, en décembre 1998, l’Union européenne s’est dotée, en juin 1999, d’une « politique européenne de sécurité et de défense ». Le paragraphe 2 de l’article 42 du traité sur l’Union européenne, dans sa rédaction résultant du traité de Lisbonne, stipule que « la politique de sécurité et de défense commune inclut la définition progressive d’une politique de défense commune de l’Union européenne ». Il n’est donc pas choquant que la représentation nationale précise et définisse la portée et l’objet géostratégique de ses ambitions en termes de politique de défense commune.
Nous savons que M. le ministre de la défense a rappelé, devant l’Assemblée nationale, que la France ne pouvait pas concevoir seule l’Europe de la défense. Le groupe socialiste en prend acte, mais rien n’empêche le Parlement d’avoir l’ambition d’exprimer ce qu’il entend par « défense commune » en précisant, notamment, ses contours, car certaines évidences s’imposent mieux si on les explicite.
Nous souhaitons ainsi réparer un oubli et définir le principal objet de la défense européenne commune : apporter protection et sécurité aux États membres et à leurs populations. L’objectif n’est donc pas l’expansion.
Certes, l’Union européenne doit s’affirmer comme un acteur majeur de la gestion des crises et de la sécurité internationale, mais elle doit commencer par apporter protection et sécurité aux Européens. Tel est le sens de cet amendement.
M. le ministre de la défense a très bien dit, devant l’Assemblée nationale, qu’il n’appartenait pas à la France seule de définir la politique européenne de sécurité et de défense. L’amendement de nos collègues se résume à un vœu pieux, il est donc inopérant. Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
Il est évident que la politique de l’Union européenne vise à protéger et à défendre les populations et les territoires de l’Union européenne. Au surplus, monsieur le sénateur, l’alinéa du rapport annexé que vous souhaitez modifier …
… reprend les dispositions du traité sur l’Union européenne. J’estime donc que cet amendement est sans objet et j’émets un avis défavorable.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote sur l’amendement n° 95.
Ce débat prend une allure curieuse. On pourrait avoir l’impression qu’il est unilatéral, puisque seul le côté gauche de l’hémicycle développe des arguments et des propositions ! Malgré tout, un minimum de bonne foi semble requis de la part du président de notre commission des affaires étrangères et de M. le secrétaire d’État.
Vous venez de nous expliquer, monsieur le secrétaire d’État, qu’il n’appartenait pas à la France de dicter sa conduite à l’Union européenne et qu’il n’était donc pas souhaitable de laisser penser qu’elle lui donne des instructions. C’est vrai, sauf que l’ensemble du paragraphe 1.2.1 du rapport annexé donne des consignes à l’Union européenne !
Ce chapitre ne traite pas de l’ambition de la France pour l’Europe et en Europe, mais présente une liste d’indications : « L’Union européenne doit s’affirmer […] » ; « une capacité d’intervention […] doit être […] développée » ; « l’Union européenne devra être en mesure […] » ; etc.
En outre, vous avez accepté à l’Assemblée nationale un amendement qui insiste sur le fait que « la France fera des propositions à ses partenaires afin de développer un esprit de défense européen ». Dans l’amendement n° 51, qui a été rejeté ce matin, j’ai bien veillé à utiliser la même formulation. Il s’agissait de faire en sorte que notre pays prenne des initiatives, et non qu’il donne des instructions.
Par conséquent, je ne vois pas bien la solidité de l’argumentaire qui consiste à invoquer l’irrecevabilité de cet amendement n°95, au motif qu’il serait trop autoritaire au regard de l’Union européenne, alors que tout le paragraphe 1.2.1 du rapport annexé est rédigé dans le même esprit.
Madame le sénateur, dans un débat, même si des divergences peuvent apparaître, toutes les positions sont respectables. Par conséquent, je m’oppose à ce que vous fassiez des remarques sur la bonne ou la mauvaise foi du Gouvernement, comme vous venez de le faire.
Nous n’avons pas, et vous le savez très bien, la même vision de la défense nationale. Chacun défend ses positions sur la base de ses convictions. Ce n’est pas une histoire de bonne ou de mauvaise foi !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 54, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Au début du troisième alinéa du 1.2.1 du rapport annexé, ajouter les mots :
Conformément à la décision du Conseil européen d'Helsinki,
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Cet amendement vise à préciser l’origine de l’affirmation, assez forte, selon laquelle une capacité d’intervention globale de 60 000 hommes doit être développée par l’Union européenne.
En décembre 1998, lors du sommet franco-britannique de Saint-Malo, le Président de la République française Jacques Chirac et le Premier ministre britannique Tony Blair ont décidé que l’Union européenne devait disposer d’une « capacité autonome d’action, appuyée sur des forces militaires crédibles ».
Cette position a été confirmée par le Conseil européen d’Helsinki de décembre 1999, qui a instauré « l’objectif global », visant à permettre à l’Union européenne de déployer jusqu’à 60 000 hommes, dans un délai de soixante jours et pendant au moins un an.
Il s’agit donc ici de souligner que le chiffre de 60 000 hommes est parfaitement fondé. Il a été solidement travaillé et validé par nos partenaires européens, à l’occasion de l’étape importante du Conseil européen d’Helsinki.
Cet amendement est lacunaire. Il se réfère au Conseil européen d’Helsinki, mais oublie toutes les rencontres qui sont intervenues ultérieurement. Il faudrait notamment citer le Conseil européen de Bruxelles du mois de décembre dernier, à l’occasion duquel l’Union européenne s’est fixé un niveau d’ambition très élevé et précis dans toute une gamme de domaines.
La commission émet donc un avis défavorable.
Nous pensons avec bonne foi qu’il n’est pas nécessaire d’être exhaustif et de viser tous les Conseils européens successifs. Notre avis est défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 97, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa du 1.2.1 du rapport annexé par une phrase ainsi rédigée :
La France propose la création d'une cellule de planification et de commandement européenne autonome.
La parole est à M. Didier Boulaud.
Les dispositions du traité de Lisbonne, notamment les clauses de solidarité et d’assistance mutuelle et la coopération structurée, permettront-elles à la politique européenne de sécurité et de défense, la PESD, de franchir un nouveau cap et à l’Union européenne de renforcer ses capacités de défense et de gestion des crises ? Cela nous paraît bien sûr souhaitable !
Nous l’avons déjà affirmé, la rédaction d’un livre blanc européen en matière de défense et de sécurité aurait permis de mieux articuler tous les enjeux. En revanche, dans le contexte actuel, l’élaboration d’un livre blanc franco-français marque, à nos yeux, une occasion manquée.
Nous confirmons bien entendu la nécessité d’étudier la mutualisation de certains moyens opérationnels. Mais il nous faut surtout travailler à la montée en puissance des capacités européennes de planification et de conduite d’opérations.
Les problèmes que rencontre la défense européenne sont ceux auxquels l’Europe est elle-même confrontée : le manque d’identité européenne induit un manque de volonté quant à une politique extérieure commune et, en conséquence, l’absence de financement pour une défense commune.
Ceux qui ont la volonté de construire l’Europe de la défense n’ont pas assez de moyens et ceux qui auraient les moyens de le faire n’ont pas la volonté de la construire. La France doit contribuer à briser ce cercle vicieux ! Cette situation doit évoluer !
Nous réaffirmons que la défense européenne se construira uniquement au sein de l’Union européenne, et non à l’extérieur, que ce soit dans le cadre particulier de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord, l’OTAN, ou ailleurs.
La réintégration de la France dans le commandement intégré de l’OTAN ne doit pas signifier l’abandon d’une politique de sécurité et de défense au sein de l’Union européenne, politique devant être dotée de moyens susceptibles de lui garantir l’autonomie de décision et, le cas échéant, l’autonomie d’action.
La France doit proposer, encore et toujours, la création d’un état-major, d’une cellule de planification et de commandement européenne autonome.
Tel est le sens de cet amendement.
Lorsque le Président de la République a garanti que notre réintégration dans le trente-neuvième comité de l’OTAN serait liée à la mise en œuvre d’une politique européenne de sécurité et de défense et à la mise en place d’un nouveau concept stratégique de l’Alliance, il a tout simplement oublié que les Britanniques se refusent obstinément à instaurer ce commandement opérationnel, laissant ainsi la politique européenne de sécurité et de défense dans l’impasse.
C’est la preuve que la réintégration totale dans l’OTAN était largement anticipée et reposait en définitive sur la seule volonté du Président de la République de s’aligner sur les positions américaines, qui étaient à l’époque, je le rappelle, celles de M. Bush.
Je voudrais vous faire remarquer, monsieur Boulaud, que, si nous devions attendre le ralliement des Britanniques à nos thèses pour élaborer un livre blanc européen sur la défense et la sécurité, ce qui d’ailleurs demanderait le concours de vingt-sept nations, nous attendrions certainement très longtemps.
Votre propos est donc en contradiction avec les buts que vous cherchez à atteindre. Vous jugez nécessaire d’élaborer un livre blanc européen et, dans le même temps, vous nous expliquez que les Britanniques ne veulent absolument pas d’une politique européenne de sécurité et de défense. Comment faire alors ?
Le problème qui se pose à nous concerne, non pas tant la création d’une cellule de planification et de conduite d’opérations, qui existe déjà au sein de l’état-major européen, mais plutôt son renforcement.
C’est pourquoi le rapport annexé a repris les termes proposés au cours de la présidence française de l’Union européenne et agréés par le Conseil européen du 12 décembre 2008. Au cours de ce conseil, une définition très précise du nombre, de la nature et du volume des opérations que l’Union européenne devra être en mesure de planifier et de conduire simultanément a été adoptée.
La rédaction du rapport annexé nous semble satisfaisante, puisque celui-ci indique que « les capacités européennes de planification et de conduite d’opérations, militaires et civiles, monteront en puissance », en se référant au niveau d’ambition de l’Union européenne.
Finalement nous sommes d’accord et l’amendement est satisfait par le texte actuel. Je vous propose donc, monsieur Boulaud, de le retirer, faute de quoi je serai obligé de donner un avis défavorable.
Comme vient de l’expliquer M. le rapporteur, l’alinéa que cet amendement n° 97 propose de modifier se conclut par la phrase suivante : « Les capacités européennes de planification et de conduite d’opérations, militaires et civiles, monteront en puissance ». Je propose que nous nous en tenions à cette formulation.
La France prendra les initiatives nécessaires pour atteindre cet objectif. Mais, comme vous le savez fort bien – ce sujet a été longuement débattu en commission –, il faut convaincre tous nos partenaires.
C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
Puisque certains de nos collègues nous reprochent de ne pas évoquer les problèmes de fond, je voudrais indiquer à M. Boulaud que j’ai trouvé choquante son intervention sur la politique du Président de la République.
Tous ceux qui sont au fait depuis un certain nombre d’années des discussions existant au sein d’une Union européenne progressivement élargie savent parfaitement que la création d’une unité européenne de planification, tel que le propose M. Boulaud, serait récusée par une grande partie de nos partenaires. Je pense à certains partenaires qui voulaient intégrer l’OTAN et ont accepté d’entrer dans l’Union européenne, notamment certains pays baltes, la Pologne ou encore la Roumanie.
L’amendement que vous présentez, monsieur Boulaud, démolit la politique conduite avec l’accord de la majorité, qui consiste à la fois à réintégrer la cellule de commandement de l’OTAN, en laissant bien sûr de côté les opérations nucléaires, et à trouver des mécanismes qui permettent de mettre en place des forces européennes.
Le texte actuel nous convient parfaitement et cet amendement nous semble provoquant. C’est pourquoi nous ne le voterons pas.
Applaudissements sur quelques travées de l ’ UMP.
Je voudrais remercier notre collègue Jean-Pierre Fourcade de son intervention, car c’est le premier débat sérieux que nous avons sur un article depuis hier.
Nous avons déploré la volonté du Gouvernement d’organiser à la va-vite cette discussion de fond et, enfin, un sénateur de la majorité est disposé à parler de ce fameux projet de loi de programmation militaire et des conséquences qu’il pourrait avoir. C’est la première fois ! Pour le reste, on nous oppose un vote conforme et un débat caricatural ! Je tenais donc, avant de répondre, à vous adresser mes remerciements, mon cher collègue.
Protestations sur les travées de l ’ UMP.
Bien évidemment, monsieur Fourcade, je ne partage pas votre point de vue.
Ce n’est pas moi qui ai promis aux Français de mettre en place la politique européenne de sécurité et de défense, comme condition à notre réintégration dans le trente-neuvième comité de l’OTAN. C’est le Président de la République !
Si on connaissait, par avance, le résultat des négociations qui auraient pu être menées avec les Britanniques ou avec d’autres, il ne fallait pas s’engager. Pourtant, le Président de la République s’est engagé très fermement, en faisant du déploiement de cette politique une condition sine qua non à notre retour dans ce trente-neuvième comité. Je ne l’invente pas ! C’est bien lui qui en fait une condition de base !
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, que je maintiens.
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. On ne peut pas reprocher au Gouvernement de vouloir faire passer ce projet de loi à la va-vite, comme M. Boulaud vient de le faire.
M. Didier Boulaud s’exclame.
Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, ces amendements ont été largement débattus en commission. Vous avez eu tout le temps que vous souhaitiez pour en discuter et vous revenez aujourd’hui, à l’occasion de leur examen dans l’hémicycle, avec les mêmes arguments.
On ne peut pas nous reprocher un examen à la va-vite : c’est vous qui faites de l’obstruction !
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Je vous remercie à mon tour, monsieur Boulaud, de me donner l’occasion de vider une querelle sur l’existence ou la non-existence d’une politique européenne de sécurité et de défense.
Depuis le début des débats, vous n’arrêtez pas de nous expliquer que cette politique n’existe pas et que, par conséquent, nous avons conclu un marché de dupes en intégrant l’OTAN. On nous avait promis une politique européenne de sécurité et de défense toute faite et nous aurions manqué à nos engagements en acceptant le statu quo.
Prétendre qu’il n’existe pas même l’embryon d’une politique européenne de sécurité et de défense est totalement inexact ! Au cours des dernières années, des progrès importants ont été réalisés.
Il existe un très grand nombre de programmes européens en matière d’armement. L’Agence européenne de défense s’est vue conférer une responsabilité dans le domaine de l’aéromobilité, c'est-à-dire les hélicoptères, afin d’établir un plan de transport pour l’Union européenne. C’est également le cas dans le domaine satellitaire, avec le programme MUSIS. Cette agence se développe donc de manière parfaitement convenable.
En outre, monsieur Boulaud, vous n’avez pas écouté ce qu’a dit hier votre collègue M. Boutant sur les actions menées par l’Union européenne en matière de lutte contre la piraterie maritime. Ainsi qu’il nous l’a très clairement expliqué en commission, il existe une force d’intervention européenne, sous commandement d’un amiral britannique, qui a obtenu des résultats non négligeables dans la lutte contre la piraterie maritime. M. Boutant a légitimement rendu hommage hier à cette action à laquelle il a pu participer sur un navire de la marine française.
Par conséquent, prétendre que rien n’est fait en matière de politique européenne de sécurité et de défense, c’est pousser le trait un peu loin !
Je vous signale aussi que vingt et une opérations extérieures ont été menées, et la dernière au Tchad avec l’EUFOR a été reconnue par tous comme étant efficace.
Par ailleurs, j’ai pu constater, lors de réunions avec les présidents des commissions de défense de l’Union européenne, qu’un certain nombre de pays qui, au départ, étaient assez réfractaires à l’idée d’une politique européenne de sécurité et de défense ont rejoint les Français sur la nécessité d’en établir une. Je pense à la Pologne, qui a participé de manière très efficace à l’EUFOR, ainsi qu’à l’Irlande, pays neutre, qui n’appartient pas à l’OTAN, mais qui a joué un rôle déterminant dans l’EUFOR puisque cette force a été commandée par un général de division irlandais.
Enfin, monsieur Boulaud, ce sont les Russes qui légitiment l’existence de cette politique européenne de sécurité et de défense : très récemment, lors de conversations entre le chef d’état-major de l’armée de l’air et son homologue russe, les Russes ont marqué leur satisfaction d’avoir participé au Tchad à l’opération EUFOR en soulignant qu’ils avaient été très heureux d’apporter leur coopération à une opération européenne de stabilisation de crise et qu’ils ne l’auraient pas fait si cette action avait été menée par l’OTAN.
Voilà bien la démonstration que cette politique existe.
Qu’il faille faire davantage, nous en convenons. Mais je me réjouis de constater que l’initiative du Président de la République porte ses fruits. J’espère d’ailleurs fortement que d’autres initiatives seront prises dans ce domaine. Il est capital pour l’Europe qu’un pôle européen de sécurité et de défense, au sein même de l’OTAN, puisque pratiquement la majorité des pays de l’Union européenne appartient à l’OTAN, puisse faire contrepoids à la puissance du groupe anglo-américano-canadien au sein de l’Alliance atlantique. De grâce, ne dites pas que rien n’a été fait, car c’est contraire à la vérité !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Exclamations sur les travées de l ’ UMP.
M. le rapporteur vient de rappeler un point important sur lequel nous sommes tous d’accord : il est capital que l’Europe se dote d’une politique étrangère de sécurité et de défense.
Monsieur le rapporteur, vous nous avez reproché tout à l’heure d’avoir dressé la liste des Conseils européens qui avaient contribué à sa mise en place.
De ne pas les avoir listés exhaustivement, ce qui n’est pas la même chose !
Vous avez cédé à la tentation d’énumérer les opérations qui témoignent de son existence effective. Aucun de nous n’a prétendu qu’il n’existait pas de politique européenne de sécurité et de défense.
En revanche, nous disons depuis longtemps qu’un des signes les plus concrets, les plus opérationnels de sa crédibilité est la mise en place d’une cellule de planification et de commandement européenne autonome. Il nous avait semblé que c’était une position soutenue avec force par le Président de la République et qu’il en avait fait l’un des objectifs majeurs de sa présidence de l’Union européenne.
Nous souhaitons donc simplement faire inscrire dans la loi que la création de cette cellule de planification et de commandement reste un objectif essentiel pour notre pays en Europe.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Charasse, est ainsi libellé :
Compléter la deuxième phrase du quatrième alinéa du 1.2.1 du rapport annexé par les mots :
qu'il faudra doter des moyens d'action propres à le rendre opérationnel
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Nous devons clairement marquer notre volonté d’avancer dans ce domaine. Atalante, EULEX, EUFOR, tout cela est méritoire, mais ne suffit pas à manifester l’existence d’une politique européenne de sécurité et de défense.
Je propose donc de doter l’état-major européen « des moyens d’action propres à le rendre opérationnel », car rien ne nous interdit de manifester cette volonté.
Quant aux opérations qu’a évoquées M. Josselin de Rohan, je lui ferai remarquer qu’en 1900 une coalition européenne dirigée par le maréchal allemand Von Waldersee prenait Pékin et saccageait le Palais d’été. Nous ne voulons pas revenir à ces excès coupables, condamnables ! Nous voulons quand même que l’Europe, pour se défendre, se protéger, comme le disait l’un de nos collègues tout à l’heure, dispose d’un état-major tant soit peu consistant, ce qui n’est pas le cas, vous le savez bien.
Par cet amendement, nous marquons une intention et vous devriez l’accepter.
Je voudrais rendre hommage aux convictions européennes de mon ami Jean-Pierre Chevènement. Je les connais et, pour cette raison, j’aurais aimé être favorable à son amendement.
J’ajoute que je me souviens très bien de l’épisode auquel il a fait allusion, l’expédition lancée lors la guerre des Boxers, car mon grand-père y a participé. Il est revenu de Pékin avec quelques souvenirs.
Ah ! sur plusieurs travées de l ’ UMP.
Comme les arguments que vous utilisez sont ceux de Mme Voynet, je ne puis - une fois n’est pas coutume - être favorable à cette coalition ni à votre amendement, cher ami, et je le regrette.
Tout d’abord, monsieur Chevènement, je vous remercie d’enrichir le débat par des rappels historiques, qui, en l’occurrence, nous ramènent à la guerre des Boxers en 1900.
Je ne vous étonnerai en vous disant que je partage l’objectif visé à travers l’amendement que vous proposez. Toutefois, son application n’est pas possible, car il faudrait avoir au préalable, je l’ai déjà dit, convaincu la totalité de nos partenaires européens. Vous savez mieux que quiconque combien cela est parfois difficile, monsieur Chevènement.
C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet amendement.
Je soutiens cet amendement qui rejoint le nôtre.
Le débat qui vient de s’engager est faussé. Vous nous reprochez de dire que la politique européenne de sécurité et de défense n’existe pas. Or nous n’avons jamais prétendu cela ! Nous disons simplement que multiplier les opérations ne suffit pas à faire une politique, qu’il faut les conduire de manière autonome sans être des sous-traitants, en faisant, par exemple, ce que l’OTAN ne voudrait pas faire.
C’est pourquoi nous avons besoin de moyens opérationnels, d’une cellule de planification et de commandement autonome. Voilà ce que nous avons dit.
Jean-Pierre Chevènement était aux commandes au moment où la première brigade franco-allemande a été créée, ce qui était l’amorce, en quelque sorte, d’une mise en commun des moyens en matière de défense européenne. Preuve est faite qu’il a des sentiments européens et que nous avons quand même légèrement progressé depuis.
Donc, ne faussons pas le débat ! Nous n’avons jamais dit qu’il n’existait pas de politique européenne de sécurité et de défense. Nous disons simplement qu’avec ce texte nous avons l’occasion de faire mieux et que cela procède d’un débat.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 55, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter l'avant dernier alinéa du 1.2.1 du rapport annexé, par les mots :
, et prendre en conséquence des initiatives pour développer ses capacités de médiation et d’intervention pacifique.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Au préalable, je voudrais revenir sur les phrases qui viennent d’être prononcées par M. de Rohan et qui me concernaient de façon plus que subliminale.
Nous sommes tous égaux, mais certains ici sont plus égaux que les autres, puisque, si j’en crois les propos de M. de Rohan, un amendement présenté par son ami Jean-Pierre Chevènement ne serait pas acceptable parce que j’aurais pu en partager la philosophie.
Voilà qui va quand même relativement loin ! Je ne sais pas si vous avez maîtrisé vos propos, mais c’est assez inquiétant. J’espère que le compte rendu rendra fidèlement compte de cet échange et ne procèdera pas à une réécriture émolliente.
J’en viens à l’amendement n° 55.
Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit tout à l’heure que vous ne voyiez pas très bien ce que recouvraient les fonctions de médiation et de prévention. Vous avez certainement fait de la peine à Gisèle Gautier et à d’autres sénateurs qui contribuent aux travaux de la Coordination internationale pour la décennie de la culture de non-violence et de paix, initiative de l’ONU, qui est soutenue par des sénateurs de tous les groupes de cette assemblée.
Nous devons nous garder, dans certaines instances, de plaider pour la paix et la prévention des conflits et, dans d’autres, de dire que nous ne voyons pas exactement à quoi ces concepts renvoient.
Cet amendement a pour objet de préciser que notre pays prendra des initiatives pour développer les capacités de médiation et d’intervention pacifique, car le rôle d’une politique de sécurité et de défense, au niveau tant national qu’européen, est autant de prévenir les conflits susceptibles de se déclarer que de les circonscrire une fois qu’ils ont éclaté et que l’on en est à déplorer des affrontements sanglants.
Pour ce faire, il est primordial de favoriser l’émergence d’une culture de la paix fondée sur les principes de liberté, de justice, de démocratie, de tolérance et de solidarité ainsi que sur les droits de la personne humaine.
Il convient donc de développer toutes les opportunités de négociation et de dialogue entre les peuples et leurs représentants, en s’appuyant sur les possibilités offertes par l’Organisation des Nations unies et ses différentes institutions.
La France pourra même militer auprès de l’ONU pour que soit créée une agence spécialisée dans la médiation et la prévention. Les ONG font un travail essentiel, en particulier sur le terrain, mais il est sans doute insuffisant. C’est pourquoi, pour atteindre ces objectifs ambitieux, pour protéger la paix, il me paraît indispensable d’amplifier, de relayer et d’institutionnaliser leurs actions.
Je tiens à rassurer Mme Voynet. Comme l’a dit notre collègue Michel Charasse, les comptes rendus dans cette maison ne sont absolument pas émollients. Nous disposons d’un compte rendu intégral qui retranscrit très fidèlement nos propos.
J’assume totalement les propos que j’ai tenus tout à l’heure. J’ai innocemment fait remarquer qu’il y avait une convergence, madame Voynet, entre votre amendement et celui de M. Chevènement et que ces convergences étaient rares. C’est tout ce que j’ai dit.
Cela étant, je suis défavorable à votre amendement pour des raisons qui ont été exposées précédemment.
Dans le projet de loi de programmation militaire est largement évoquée la fonction stratégique de la prévention. Cet amendement étant satisfait, le Gouvernement y est donc défavorable.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote sur l'amendement n° 55.
Monsieur le rapporteur, je n’avais pas compris que c’était M. Chevènement que vous souhaitiez taquiner. J’avoue que c’est en effet tentant.
Si M. Chevènement et moi sommes d’accord, c’est que vraiment l’enjeu est d’importance. Cela arrive suffisamment rarement pour que le Gouvernement et la commission dressent l’oreille et portent une attention particulière à une telle proposition.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 130, présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du premier alinéa du 1.2.2. du rapport annexé :
La rénovation des concepts stratégiques de l'OTAN ne peut se concevoir que dans la perspective de l'élaboration d'une politique européenne de sécurité de défense.
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Depuis la dissolution du Pacte de Varsovie, l’OTAN tente d’élaborer de nouveaux concepts stratégiques pour s’adapter aux réalités du monde actuel. En effet, elle peut légitimement s’interroger sur l’utilité de maintenir une alliance défensive, alors que le seul adversaire qu’elle avait identifié n’existe plus.
Cependant, force est de constater que ces concepts stratégiques développés en vue de répondre aux nouveaux risques et menaces de notre époque sont en tous points conformes à la conception américaine du monde.
L’objectif des États-Unis reste de transformer l’OTAN en une « alliance globale » tous azimuts, élargissant progressivement son périmètre et sa zone d’intervention et se substituant à l’ONU lorsque celle-ci est défaillante.
Washington conserve une influence déterminante dans la réflexion sur les nouveaux concepts stratégiques. Selon moi, le fait d’avoir obtenu la nomination d’un officier général français au commandement dit de la « transformation » à Norfolk n’y change pas grand-chose.
Constituée autour d’un bloc occidental dans lequel les États-Unis continueront de régner en maîtres, l’OTAN apparaîtra toujours, aux yeux de nombreux pays et de nombreux peuples, comme le bras armé de l’interventionnisme hégémonique des Américains.
Parallèlement, l’élaboration d’une véritable politique européenne de sécurité et de défense peine à progresser, quoi qu’en dise M. de Rohan. Nous persistons à penser – et nous ne sommes pas seuls dans ce cas, tant s’en faut – que la présidence française de l’Union européenne n’a pas tenu ses promesses. Aucun progrès décisif n’a été obtenu sur les questions fondamentales que sont la création d’un état-major permanent de planification des opérations ou d’une agence européenne d’armement dotée d’une réelle autorité.
Pour notre part, nous sommes favorables à une organisation européenne de sécurité collective émancipée de l’OTAN, dont elle ne doit pas être un sous-traitant. Cette organisation devrait avoir pour vocation la prévention des crises, en se fondant sur la résolution multilatérale et politique des conflits et le respect du droit international et des résolutions de l’ONU.
C’est la raison pour laquelle nous souhaitons voir explicitement inscrit dans le chapitre du rapport annexé consacré aux relations transatlantiques que la rénovation de l’OTAN ne peut pas ne pas tenir compte de la nécessité d’une politique européenne de sécurité et de défense.
L'amendement n° 21 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
I. - Dans la première phrase du premier alinéa du 1.2.2 du rapport annexé, remplacer les mots :
ira de pair avec
par le mot :
implique
II. - Dans la deuxième phrase du même alinéa, remplacer les mots :
elles sont
par les mots :
elles doivent être
III. - Rédiger comme suit la dernière phrase du même alinéa :
Le renforcement de la politique de sécurité et de défense commune est la condition de rénovation de l'OTAN.
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Voilà près de cinquante ans, le président Kennedy disait déjà que l’Alliance atlantique devait reposer sur deux piliers.
La rénovation de l’Alliance atlantique « implique », selon nous, la constitution d’une défense européenne. Nous indiquons en outre que l’une et l’autre « doivent être » complémentaires, car cela ne va pas de soi, et que « le renforcement de la politique de sécurité et de défense commune est la condition de rénovation de l’OTAN ».
La démarche solide et réaliste qui sous-tend cet amendement nous avait d’ailleurs été « vendue » par le Président de la République, …
… mais n’a pas été mise en pratique. Mme Demessine ayant présenté une rédaction modérée et de bon sens, peut-être meilleure que la mienne, je retire mon amendement au bénéfice du sien.
L'amendement n° 21 rectifié est retiré.
L'amendement n° 56, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. - À la première phrase du premier alinéa du 1.2.2 du rapport annexé, remplacer les mots :
qui ira de pair avec
par le mot :
impliquant
II. - Rédiger comme suit la deuxième phrase du même alinéa :
L’OTAN et l’Union Européenne, complémentaires, sont toutes deux nécessaires face aux menaces et aux crises.
III. - Rédiger comme suit la dernière phrase du même alinéa :
Le renforcement de la politique de sécurité et de défense commune est la condition de la rénovation de l’OTAN.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Approuver le rapport annexé à l’article 2 revient à valider la stratégie développée dans le Livre blanc.
Il me paraît hasardeux de considérer que la « rénovation de la relation transatlantique », telle qu’évoquée dans le 1.2.2 de ce rapport et donc dans le Livre blanc, serait propice à l’établissement d’une relation équilibrée entre la politique européenne de sécurité et de défense et l’OTAN, d’une part, et entre l’OTAN et les pays non membres de cette instance née à la fin de la Seconde Guerre mondiale et dont la raison d’être était la guerre froide, d’autre part.
Un concept stratégique n’est en effet pertinent que s’il est adapté aux situations à venir – changement climatique, tensions sur les ressources énergétiques, multipolarité du monde, émergence d’un terrorisme radical à foyers multiples – et ne s’inspire pas seulement des crispations du passé.
L’argument selon lequel le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN favoriserait l’émergence d’une véritable défense européenne est de courte vue. Les freins à l’avènement de celle-ci n’étaient pas liés à la position originale de la France dans l’OTAN. En réalité, nos partenaires européens n’ont jusqu’à présent pas réellement souhaité s’engager sur cette voie parce qu’ils ont le sentiment que l’OTAN leur offre une protection suffisante et que certains d’entre eux y voient une menace pour la relation privilégiée qu’ils entendent entretenir avec les États-Unis.
Par ailleurs, il est malheureusement à craindre que le choix du retour au sein du commandement intégré ne constitue une entrave à la prévention des conflits et à l’affirmation d’une préférence pour les efforts diplomatiques multilatéraux par rapport aux réponses militaires d’un seul acteur, fût-il un acteur collectif, regroupant un ensemble de pays qui, à l’échelle du monde, se ressemblent tout de même beaucoup.
De ce fait, la France doit continuer à militer pour le développement d’une défense européenne, propre à répondre aux défis de demain et à offrir des solutions variées, loin des oppositions qui ne peuvent qu’alimenter la crainte d’un choc des civilisations.
Cet amendement vise par conséquent à inscrire la défense européenne comme le moyen incontournable d’établir des relations transatlantiques, et plus largement mondiales, coordonnées et apaisées.
Dans un souci de clarification, je me rallie à la position de M. Chevènement, au risque que certains y voient des fraternités tout à fait suspectes
Rires sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste
Cet amendement tend à faire du renforcement de la PESD une condition de la rénovation de l’OTAN.
Certes, un tel renforcement des capacités européennes en matière de défense ne peut, à mon sens, qu’être bénéfique. Quelques signes en ce sens ont d’ailleurs déjà été envoyés, même si certains d’entre vous, mes chers collègues, considèrent qu’ils sont insuffisants : je pense notamment à la révision des postes de commandement, qui a donné une plus grande place, à des niveaux de responsabilité importants, aux Européens, et en premier lieu aux Français, le commandement de l’Allied Command Transformation, l’ACT, ayant ainsi été confié au général Abrial.
Bien entendu, ce rééquilibrage ne sera possible que si les Européens se montrent plus volontaires en matière d’effort de défense.
L’expérience nous a appris que la PESD et l’OTAN sont complémentaires. J’espère que, à l’avenir, la PESD sera la plus consistante et la plus importante possible, mais il est certain, en tout cas, qu’elle ne verra jamais le jour si elle apparaît comme une politique de substitution ou même antagoniste par rapport à l’OTAN. En effet, nous ne convaincrons jamais nos partenaires de troquer l’une contre l’autre.
Madame Demessine, depuis 1949 – cela fait soixante ans ! –, le Parti communiste nous chante la même chanson : « US go home » !
Je vous reconnais le mérite de la constance, ce qui vous distingue de M. Chevènement, qui, en tant que ministre de la défense, a participé à un très grand nombre de conseils de l’OTAN et a par conséquent accepté cette organisation, même s’il souhaite qu’elle soit rénovée.
Il ne s’agit pas de réduire la question de la relation transatlantique à la seule PESD. D’autres volets très importants doivent être examinés : la révision des concepts stratégiques de l’OTAN, l’allégement des structures, demandé par la France, les États-Unis et le Royaume-Uni, la clarification des missions ou la refonte de la planification de défense.
L’amendement n° 130 ne prend pas en compte ces nécessités. Par conséquent, la commission y est défavorable.
Madame Demessine, je vous sais objective.
Par conséquent, lorsque vous affirmez que la présidence française de l’Union européenne n’a pas été un succès, …
… vos propos dépassent certainement votre pensée ! En effet, tous les États membres ont souligné l’engagement et la détermination du Président de la République au cours de cette période, ainsi que l’implication du Gouvernement, notamment du ministre de la défense, sur des sujets importants et essentiels. Je ne peux donc pas vous laisser dire que la présidence française de l’Union européenne n’a pas atteint ses objectifs.
M. le rapporteur l’a déjà indiqué, un officier général français, actuellement chef d’état-major de l’armée de l’air, va occuper une fonction ô combien stratégique au sein de l’OTAN.
Renforcer la PESD et renforcer l’OTAN sont les deux volets d’une même démarche. Le Gouvernement n’entend pas revenir sur ce point. L’Union européenne et l’OTAN ont chacune leurs spécificités, leurs objectifs et leur dynamique propres, mais elles sont toutes deux nécessaires à la sécurité et à l’action de la France sur la scène internationale.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 130.
Je voudrais rappeler à M. de Rohan que, à l’époque qu’il a évoquée, le ministre français de la défense ne siégeait pas au Conseil des ministres de la défense de l’OTAN. C’est seulement au début des années quatre-vingt-dix que François Mitterrand a mis fin à cette politique d’abstention. Par la suite, le chef d’état-major des armées a été envoyé au comité militaire.
Cela ne m’a pas empêché d’avoir de bonnes relations avec mes homologues américains – notamment M. Carlucci, qui m’avait invité à Washington – et d’étudier avec eux le perfectionnement des accords qui unissaient la France à l’OTAN. J’ai également essayé de convaincre M. Cheney, avec qui j’ai eu un entretien sur ce thème le 23 octobre 1990, qu’il ne fallait pas briser l’échine de l’Irak, au risque d’ouvrir la voie au fondamentalisme et à la domination de l’Iran sur la région. Je ne le connaissais pas encore à l’époque, et je pouvais espérer que ces arguments de bon sens finiraient par le convaincre. Je regrette que tel n’ait pas été le cas, mais, entre alliés, les rapports doivent être marqués du sceau de l’amitié et de la franchise.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 96, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa du 1.2.2 du rapport annexé, insérer une phrase ainsi rédigée :
Toutefois, la politique européenne de sécurité et de défense commune est autonome.
La parole est à M. Jacques Berthou.
L’Union européenne n’est pas de même nature que l’OTAN. Il est donc nécessaire d’affirmer l’autonomie de la PESD.
La nouvelle politique inspirée par le Président de la République nous place à la remorque de l’Alliance atlantique. Or le renforcement de l’Union européenne dans le domaine de la gestion des crises et de la sécurité ne doit pas être tributaire de la « rénovation » de l’OTAN.
Cet amendement vise à préserver une politique européenne de défense spécifique. Celle de la France a toujours été originale et volontariste, ce qui a permis à la défense européenne de commencer à grandir.
L’Union européenne, contrairement à l’OTAN, n’est pas une alliance militaire. Or le texte qui nous est présenté confond les deux entités. La PESD est une politique de l’Union européenne, alors que l’OTAN est une organisation militaire. Nous devons conforter la PESD afin qu’elle puisse disposer de moyens autonomes, faute de quoi elle ne sera qu’un appendice de l’Alliance atlantique.
Il ne s’agit pas de rejeter la recherche d’une complémentarité entre la PESD et l’OTAN. Cependant, il n’est pas choquant de tenir compte des différences objectives qui distinguent les États-Unis, directeurs politiques de l’Alliance atlantique, de l’Europe, qu’il s’agisse de la géographie, des intérêts stratégiques ou du rapport à l’usage de la force et au respect du droit international.
La politique européenne de sécurité et de défense commune doit être autonome pour exister.
L’autonomie de l’Union européenne résulte des traités et est attestée par la plupart des opérations militaires ou civiles qu’elle a menées. Le rapport annexé mentionne d’ailleurs notre ambition de faire de l’Union européenne un acteur majeur de la gestion des crises et de la sécurité internationale.
L’ajout qu’il est proposé d’insérer dans le texte au travers de cet amendement ne paraît pas nécessaire. L’Union européenne et l’OTAN sont bien entendu autonomes, mais le fait que vingt et un pays soient membres de l’une et de l’autre impose qu’il existe une compatibilité entre les deux organisations.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Comme l’a fort bien dit M. le rapporteur, il va de soi que la politique européenne de sécurité et de défense commune est autonome ; sinon, comment pourrait-elle être complémentaire de l’OTAN ?
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Monsieur le secrétaire d’État, ce débat doit être l’occasion d’un échange approfondi.
L’amendement déposé par le groupe socialiste est de bon sens. En effet, croyez-vous que les États-Unis souhaitent véritablement une politique européenne de sécurité et de défense autonome ? Dans leur excellent livre L’Amérique face au monde, paru à la fin de 2008, MM. Brzezinski et Scowcroft appellent de leurs vœux un meilleur partage du fardeau entre les États-Unis et l’Europe, …
… mais ils ne souhaitent pas l’avènement d’une défense européenne autonome…
… qui pourrait faire de l’ombre à leur pays. Cela est dit très clairement.
Nous devons donc nous entendre sur les mots. L’adjectif « complémentaire » prêtant à confusion, il faut nettement indiquer que nous visons un partage des responsabilités. Voilà ce que signifie l’expression « politique autonome ».
Il faut en effet préciser les choses. Les États-Unis et la France considèrent que, au sein de l’Union européenne comme au sein de l’OTAN, un certain nombre de pays n’assument pas leurs responsabilités en matière de défense, estimant que le parapluie américain suffit et qu’ils n’ont aucunement à inscrire dans leur budget des dépenses militaires. Nous ne pouvons donc que faire nôtre ce souhait des Américains d’un meilleur partage du fardeau.
Cela étant, une autre question est de savoir si les États-Unis accepteraient ou non une politique européenne de sécurité et de défense. À Bucarest, M. Bush s’était prononcé favorablement sur ce point, position confirmée par l’administration américaine actuelle.
Si l’Europe entend se doter d’une politique européenne de sécurité et de défense, ce ne sont donc pas les États-Unis qui s’y opposeront, car ils savent que leurs alliés veulent que cette politique soit complémentaire de celle de l’OTAN, …
… mais les Vingt-Sept sont pusillanimes.
Je ne vois donc pas où est la difficulté. La véritable question est plutôt de savoir si l’Europe veut vraiment une politique européenne de sécurité et de défense. En tout cas, tel est le souhait de la France, et je crois qu’il n’y a pas d’ambiguïté sur ce point.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 22 rectifié est présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.
L'amendement n° 57 est présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Dans le second alinéa du 1.2.2 du rapport annexé, remplacer les mots :
s'effectue
par les mots :
ne peut s'effectuer que
II. - Dans le même alinéa, après les mots :
principes suivants :
insérer les mots :
autonomie de nos concepts doctrinaux ;
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié.
Dans le rapport annexé, il est indiqué que le rapprochement avec la structure de commandement de l’OTAN s’effectue dans le respect des principes suivants : indépendance complète de nos forces nucléaires, absence d’automaticité dans nos engagements militaires, accroissement de nos capacités de renseignement, liberté permanente de décision. Je souhaite simplement ajouter à cette liste l’autonomie de nos concepts doctrinaux. N’oublions pas, en effet, que la pensée précède l’action !
Ainsi, nous avons refusé de participer à l’invasion de l’Irak, que ce soit au sein de la coalition des pays volontaires ou dans le cadre de l’OTAN, en procurant un certain nombre de facilités matérielles aux forces d’invasion, parce que nous pensions qu’il n’existait pas d’armes de destruction massive dans ce pays et que l’on n’exporte pas la démocratie par la force des baïonnettes ou des missiles. Bref, sur ces sujets, nous avions une doctrine autonome.
Mon amendement vise simplement à préciser que nous devons préserver l’indépendance de notre pensée ; tout le reste en découle.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour présenter l'amendement n° 57.
Dans le prolongement de mes amendements précédents, qui avaient pour objet de préciser que la politique étrangère et de sécurité européenne était complémentaire de l’OTAN, mais autonome dans ses fondements, il s’agit d’insister sur le fait que l’autonomie de nos concepts doctrinaux doit être à chaque instant réaffirmée.
L’autonomie de nos concepts doctrinaux ne paraît pas remise en cause dès lors que les principes de liberté d’appréciation et de décision de la France, ainsi que d’autonomie stratégique, ont été clairement posés.
Nous n’avons jamais été contraints de participer à la moindre opération de l’OTAN ; lorsque nous nous sommes engagés, ce fut de notre propre autorité et en toute indépendance.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Ainsi que le souligne le Livre blanc, l’engagement de la France dans l’OTAN n’altère pas notre autonomie, puisque sont sauvegardées l’indépendance de nos forces nucléaires, la liberté d’appréciation de nos autorités et, surtout, la liberté de décision d’engagement de nos forces.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 58, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Au début du 1.2.3 du rapport annexé, ajouter deux alinéas ainsi rédigés :
La France prendra des initiatives permettant de relancer un processus coordonné de réduction du nombre de têtes nucléaires et de démantèlement des arsenaux nucléaires. Elle participera activement aux efforts de réduction et de maîtrise des armements dans l’optique d’un désarmement général et complet.
La France veillera notamment à l’universalisation du traité de non prolifération et à celle du traité international d’interdiction des essais nucléaires. Elle soumettra, à la conférence d’examen du Traité de non prolifération de 2010 et lors des réunions préparatoires, des propositions pour renforcer le régime de non-prolifération.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Par cet amendement, nous souhaitons souligner la nécessité, pour notre pays, de prendre des initiatives permettant de relancer le processus de réduction du nombre de têtes nucléaires et de démantèlement des arsenaux, ainsi que de veiller à l’universalisation du traité de non-prolifération et du traité d’interdiction des essais nucléaires.
On m’objectera que la France a déjà pris sa part dans ce chantier, mais je pense que nous pouvons et que nous devons aller plus loin. Les réalités géopolitiques et les menaces qui pèsent aujourd’hui sur les États démocratiques ne sont plus celles qui prévalaient à l’époque de l’élaboration de la stratégie de dissuasion militaire nucléaire de la France.
Dans la perspective de la conférence d’examen du traité de non-prolifération de 2010, et comme l’a préconisé le président des États-Unis lors de son allocution du 5 avril 2009 à Prague, le désarmement général et complet reste l’objectif ultime fixé par l’article VI du traité de non-prolifération des armes nucléaires. Il doit désormais être envisagé de façon plus concrète.
Le traité de non-prolifération est, depuis 1969, le seul régime juridique international de lutte contre la prolifération des armes nucléaires. Signé par 188 pays, il engage les puissances nucléaires à désarmer. Tel est l’objet de son article VI, dont je rappelle les termes : « Chacune des Parties au Traité s’engage à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement nucléaire, et sur un traité de désarmement général et complet sous contrôle international strict et efficace. »
Cet article est ouvertement bafoué par la France, qui poursuit la modernisation de ses armes nucléaires et encourage ainsi directement les autres pays à se doter de capacités militaires nucléaires. Pour mobiliser la communauté internationale autour de la question de la prolifération de ces armes et pour amener les pays soupçonnés aujourd’hui d’ambitionner d’en produire à renoncer à cet objectif, il faut d’abord que nous montrions notre volonté d’aboutir à une dénucléarisation. Seule une réduction de notre propre arsenal, couplée au développement de la coopération internationale, peut permettre de progresser dans cette voie.
Cet amendement est en grande partie satisfait par l’adoption par l’Union européenne, sous présidence française, d’un plan de désarmement à l’initiative duquel se trouve le Président de la République. Ce plan a été adressé au secrétaire général des Nations unies et a été largement diffusé dans toutes les enceintes concernées par le désarmement, en vue notamment de la conférence d’examen du traité de non-prolifération de 2010.
J’ajoute que le plan européen est plus complet que le dispositif de cet amendement, puisqu’il met notamment l’accent sur l’importance d’un futur traité d’interdiction de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires, dont la négociation va s’engager au sein de la Conférence du désarmement.
En revanche, la référence à un processus coordonné de diminution du nombre de têtes nucléaires paraît contestable. L’accentuation de la réduction des arsenaux des États-Unis et de la Russie, qui possèdent 95 % du stock mondial de têtes nucléaires, est un préalable nécessaire. En effet, engager des discussions multilatérales associant les autres puissances nucléaires, dont les arsenaux sont sans commune mesure avec ceux des États-Unis et de la Russie, n’aurait pas de sens.
Madame Voynet, je vous renvoie aux propos extrêmement pertinents qui ont été tenus hier sur ce sujet par M. Chevènement. La commission vous invite à retirer votre amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Il n’aura pas échappé à Mme Voynet que la France présente un bilan exemplaire, unique au monde, en matière de désarmement nucléaire.
La France a été le premier État, avec le Royaume-Uni, à signer et à ratifier le traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Elle est le premier État à avoir décidé la fermeture et le démantèlement de ses installations de production de matières fissiles à des fins explosives. Elle est le seul État à avoir démantelé ses missiles nucléaires sol-sol. La France est le seul État a avoir diminué volontairement d’un tiers le nombre de ses sous-marins nucléaires lanceurs d’engins. En outre, dans un discours prononcé à Cherbourg le 21 mars 2008, le Président de la République a annoncé, pour la composante aéroportée, la réduction d’un tiers du nombre d’armes nucléaires, de missiles et d’avions.
Vous voyez donc que la France est exemplaire sur ce sujet. Nous sommes défavorables à cet amendement, que nous pensons inutile.
M. le secrétaire d’État a rappelé les efforts qui ont été jusqu’ici déployés par notre pays pour donner le bon exemple en matière de dénucléarisation et souligné à juste titre qu’ils renforcent singulièrement la crédibilité de la France en la matière.
Cependant, alors que le texte qui nous est proposé est parfois redondant et insiste sur des points qu’il est permis de considérer comme secondaires, je ne vois pas pourquoi nous renoncerions à y inscrire de façon explicite que nous poursuivrons ces efforts, par l’insertion de deux alinéas à la rédaction parfaitement raisonnable et conçus pour pouvoir être adoptés par l’ensemble des membres de la Haute Assemblée.
Je maintiens donc cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 23 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit la première phrase du 1.2.3 du rapport annexé :
La France, membre permanent du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies, entend agir pour faire respecter les principes du droit international, dont le premier est l'autodétermination des peuples et pour soutenir les résolutions de l'Organisation des Nations unies.
II. - Au début de la troisième phrase, supprimer les mots :
Membre permanent du Conseil de sécurité,
III. - Dans la quatrième phrase, remplacer les mots :
s'engage à ce titre en faveur d'
par le mot :
soutient
IV. - Compléter la même phrase par les mots :
sans nuire à son bon fonctionnement qui implique un plafonnement du nombre de ses membres
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Cet amendement vise à rappeler d’emblée, et non au détour d’une phrase, que la France est membre permanent du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies et qu’à ce titre elle agit pour « faire respecter les principes du droit international, dont le premier est l’autodétermination des peuples, et pour soutenir les résolutions de l’Organisation des Nations unies ». Cette formulation me paraît préférable à celle du rapport annexé, selon laquelle « le multilatéralisme est au cœur de la politique de la France ». Le multilatéralisme est une méthode, ce n’est pas une politique ; en revanche, le soutien au droit international en est une.
Par ailleurs, nous suggérons que l’élargissement du Conseil de sécurité « aux puissances qui ont la capacité et la volonté de contribuer à la paix et à la sécurité internationales » s’opère « sans nuire à son bon fonctionnement qui implique un plafonnement du nombre de ses membres ». Le Conseil de sécurité compte actuellement quinze membres. Au-delà de vingt membres, son fonctionnement deviendra difficile ; avec vingt-cinq membres, il sera ingouvernable. C’est pourquoi il est délicat de faire droit à toutes les demandes. L’Allemagne désire en faire partie, soit, mais l’Italie aussi, ce qui pose problème car d’autres pays ne souhaitent pas son entrée au Conseil de sécurité. Nous soutenons la candidature du Brésil, mais le Mexique et l’Argentine demandent également à être admis. Deux pays africains figureraient dans la liste des membres permanents, mais lesquels ? La Chine ne veut pas du Japon, ni de l’Inde, semble-t-il. Cette question est très compliquée. Par conséquent, je pense qu’il faut balancer notre soutien tous azimuts par une considération de bon sens : pour que l’ONU fonctionne, il faut limiter le nombre de membres permanents du Conseil de sécurité, dont l’effectif global ne saurait être supérieur à vingt.
Le sous-amendement n° 137, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Après les mots :
Organisation des Nations unies
rédiger comme suit la fin du second alinéa du I de l'amendement n° 23 :
se conforme aux règles du droit public international. Elle n'entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête et n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple. Sous réserve de réciprocité, elle consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix.
Ce sous-amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 23 rectifié ?
Le Gouvernement est lui aussi défavorable à cet amendement.
Monsieur Chevènement, quels que soient ses défauts et ses difficultés, la voie du multilatéralisme paraît non seulement la plus légitime, mais aussi la plus prometteuse. La France continuera de privilégier son renforcement. Le multilatéralisme constitue un principe fondateur, sur lequel il ne nous paraît pas opportun de revenir.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 59, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du 1.3 du rapport annexé :
La dissuasion a pour fonction d’empêcher une agression d’origine étatique contre les intérêts vitaux de la nation, d’où qu’elle vienne et quelle qu’en soit la forme. Longtemps fondée sur l’accumulation d’armes de destruction massive, notamment nucléaires, elle pose des problèmes insurmontables dans un monde multipolaire, notamment en termes de prolifération. Sa fonction et ses modalités doivent être profondément revues, afin de prévenir les conflits avant qu’ils n’éclatent, au niveau de l’Union Européenne et des Nations unies.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Cet amendement concerne la dissuasion nucléaire, qui est affichée dans le rapport annexé comme l’une des cinq grandes fonctions stratégiques de la politique de défense française.
Je considère pour ma part que si la stratégie de dissuasion militaire de la France pouvait s’expliquer, sinon se justifier, dans le contexte de la guerre froide, aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, face à un ennemi potentiel bien identifié, les réalités géopolitiques et les menaces qui pèsent aujourd’hui sur les États démocratiques – le terrorisme, les atteintes à la sécurité et à l’approvisionnement énergétiques ou aux équipements informatiques, par exemple – ne sont plus celles qui prévalaient à l’époque de l’élaboration de cette stratégie.
Dans ce contexte renouvelé, la dissuasion nucléaire s’avère inefficace et présente un certain nombre de graves inconvénients, au premier chef la prolifération, qui constitue un problème pratiquement insurmontable.
En outre, le coût élevé de production et d’entretien de l’arme nucléaire compromet le développement des forces d’interposition et de maintien de la paix, ainsi que la contribution française à l’Europe de la défense.
Le terme « dissuasion » renvoie, selon un usage galvaudé, à une dissuasion strictement nucléaire. Pourtant, ce mot, issu du substantif latin dissuasio – action de dissuader, de détourner –, lui-même dérivé du verbe dissuadere, qui signifie déconseiller, dissuader, détourner de l’exécution d’un dessein ou d’une résolution prise
Exclamations sur les travées de l ’ UMP
On peut d’ailleurs faire remonter la conceptualisation de la notion de dissuasion aux débuts de la criminologie moderne, née des travaux des philosophes Cesare Beccaria et, surtout, Jeremy Bentham. Ce dernier, cherchant à définir une doctrine sociale de « l’utilitarisme », fut notamment conduit à proposer, à la suite de sa réflexion sur le système pénal, le terme de determent, désignant la punition comme moyen de décourager le crime et resté d’un usage courant dans la langue anglaise jusque dans les années cinquante.
Cet amendement vise donc à supprimer un terme qui est utilisé ici selon une acception particulièrement restrictive.
L'amendement n° 127, présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le troisième alinéa du 1.3 du rapport annexé :
La dissuasion a pour fonction d'empêcher une agression d'origine stratégique contre les intérêts vitaux du pays. Dans le monde multipolaire qui est le nôtre, la prolifération nucléaire ne permet pas de prévoir l'origine d'une agression. Il est impératif de changer notre doctrine d'emploi de l'arme nucléaire et de ne l'utiliser qu'après avoir épuisé, dans les instances internationales, toutes les possibilités de prévention d'un conflit.
La parole est à Mme Michelle Demessine.
Toutes les dimensions de la dissuasion nucléaire, qui est l’une des cinq grandes fonctions stratégiques définies par le Livre blanc, ne sont pas suffisamment prises en compte dans le premier chapitre du rapport annexé : est simplement évoquée, d’une manière très générale, sa fonction première d’empêcher une agression d’origine étatique contre nos intérêts vitaux. Ceux-ci mériteraient d’ailleurs d’être précisés. Considérez-vous par exemple, monsieur le secrétaire d’État, que la sécurité de nos approvisionnements énergétiques en fasse partie ? Apporter cette précision me semble important, alors que la récente signature de nouveaux accords de défense avec l’émirat d’Abou Dhabi pourrait le cas échéant nous amener à recourir à la dissuasion nucléaire, si d’aventure l’Iran s’avisait d’entraver la circulation maritime dans le golfe arabo-persique.
Je pense que cette définition trop générale de la dissuasion ne tient pas compte des réalités du monde d’aujourd’hui. En effet, notre doctrine de la dissuasion nucléaire, laquelle consiste à faire comprendre à l’ennemi que les risques encourus sont supérieurs aux avantages escomptés, a été élaborée à une époque où le monde était bipolaire et où l’agresseur potentiel était clairement identifié. Les réalités ont changé : la prolifération nucléaire ne permettant plus de prévoir l’origine d’une agression et les risques d’agression étant devenus multiformes, il faut adapter notre doctrine d’emploi de l’arme nucléaire.
Il serait donc souhaitable d’inscrire dans le premier chapitre du rapport annexé que la France considère désormais que l’arme nucléaire ne peut être utilisée « qu’après avoir épuisé, dans les instances internationales, toutes les possibilités de prévention d’un conflit ».
Nous sommes pour la dissuasion, les auteurs de ces amendements sont contre : avis défavorable sur les deux amendements.
Ces amendements sont contraires à toute notre politique de défense et ne peuvent donc que recevoir un avis défavorable.
De plus, il appartient au rapport annexé à la loi de programmation militaire de modifier la doctrine de la dissuasion nucléaire, qui relève du Président de la République.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote sur l’amendement n° 59.
L’argumentation est courte : Mmes Voynet et Demessine sont hostiles à la dissuasion nucléaire, leurs amendements reçoivent un avis défavorable !
J’ai pourtant laissé volontairement de côté les arguments éthiques et moraux qui, aux yeux de bien des citoyens, suffisent à disqualifier le recours à l’arme nucléaire, pour m’en tenir à des arguments compatibles avec votre propre concept, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d’État, d’une arme ultime qui n’a pas vocation à être utilisée.
Je pose sérieusement la question suivante, à laquelle vous ne répondez pas : cette arme coûteuse, qui prolifère, nous protège-t-elle en quoi que ce soit des risques d’aujourd’hui, au nombre desquels figurent, outre l’agression d’un État contre un autre, le terrorisme, les atteintes à la sécurité des approvisionnements énergétiques, les menaces économiques ou informatiques, qui pèsent sur l’ensemble de nos sociétés ? Dans cette perspective, est-il justifié de dépenser des sommes aussi considérables pour une arme qui engendre d’autres risques encore, notamment ceux de prolifération ou de mésusage liés à la circulation et à la vente des cerveaux capables de doter d’autres États ou des groupes terroristes de l’arme nucléaire ? Je constate que vous fuyez la discussion, mais j’attends une réponse à ces questions.
On me qualifie d’utopiste, du côté droit de l’hémicycle, comme s’il s’agissait d’une insulte !
Je m’honore d’être une utopiste, monsieur Trucy ! Qui aurait dit, voilà vingt ou trente ans, que les rapports de force dans le monde deviendraient ce qu’ils sont aujourd'hui se serait fait traiter d’utopiste ! Pourtant, les moyens consacrés à la dissuasion nucléaire ont bel et bien été fortement réduits. Est-il si dangereux, si difficile pour vous de vous interroger sur l’efficacité de cette arme, aussi discutable que celle de la ligne Maginot en son temps ? Ce n’est tout de même pas un scandale de poser de telles questions quand on considère le nombre de milliards qui sont consacrés chaque année à la dissuasion nucléaire !
M. Hubert Falco, secrétaire d'État. Madame Voynet, ce n’est tout de même pas non plus un scandale que de ne pas être d’accord avec vous !
Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.
Je vous en prie, mes chers collègues, faisons en sorte que le débat se déroule de façon calme et sereine, …
… afin que chacun puisse s’exprimer, en laissant au président le soin de conduire la discussion.
Je mets aux voix l'amendement n° 59.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Charasse, est ainsi libellé :
À la fin de la seconde phrase du dernier alinéa du 1.3 du rapport annexé, remplacer les mots :
de l'Atlantique au golfe arabo-persique à l'océan Indien
par les mots :
du continent européen à l'Afrique, à l'arc de crise s'étendant de l'Atlantique à l'ouest de l'Afrique jusqu'à l'océan Indien, et à l'Asie
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Il s’agit de définir les zones géographiques prioritaires du point de vue de nos intérêts en matière de sécurité. Selon nous, cette liste doit commencer avec le continent européen et se poursuivre avec l’Afrique, où vivent de nombreux francophones. Viennent ensuite l’arc de crise s’étendant de l’Atlantique à l’ouest de l’Afrique, jusqu’à l’océan indien, et enfin l’Asie, zone de contradictions majeures, vers laquelle le centre de gravité de la planète se déplace.
La logique suivie en matière de sécurité doit être inspirée par l’intérêt national. Il convient donc de s’intéresser d’abord à l’Europe, puis à l’Afrique, au Proche-Orient, au Moyen-Orient et, enfin, à l’Asie lointaine, dont nous souhaitons qu’elle puisse résoudre ses problèmes pacifiquement. En tout cas, il importe que la France ne soit pas engagée dans des conflits qui la dépassent, comme c’est malheureusement le cas aujourd'hui.
Cet ordre de priorité est différent de celui qui a été retenu dans le Livre blanc, qui, je le rappelle, n’a jusqu’à présent fait l’objet d’aucun vote. En votant sur le projet de loi de programmation militaire, nous allons donc également nous prononcer sur le Livre blanc, qui, comme l’a dit M. Morin, est notre « feuille de route ».
Défavorable. L’arc de crise décrit dans le Livre blanc recoupe bien la localisation de la plupart des conflits actuels.
Je partage l’avis de M. le rapporteur. J’émets donc un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 60, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
I. - Dans l'intitulé du 1.4 du rapport annexé, supprimer les mots :
et contrats
II. – Dans la première phrase du premier alinéa du 1.4 du rapport annexé, supprimer les mots :
et en contrats
La parole est à Mme Dominique Voynet.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 61, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer le quatrième alinéa du 1.4 du rapport annexé.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Compte tenu de la richesse des arguments que m’oppose le Gouvernement à propos de la dissuasion nucléaire, je ne rouvrirai pas le débat, me bornant à relever que le quatrième alinéa du 1.4 du rapport annexé énumère les moyens de la dissuasion nucléaire : sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, moyens de sûreté assurant la liberté d’action de ceux-ci, capacité de frappe aérienne nucléaire, etc.
Alors que l’utilisation de ces équipements est plus qu’improbable, leur conception et leur entretien coûtent extrêmement cher. Cet amendement s’inscrit donc dans la logique générale de nos propositions et la conforte.
Je profiterai de cette occasion pour évoquer un amendement que vous n’aurez pas le plaisir de lire, mes chers collègues, puisqu’il a été déclaré irrecevable par la commission des finances au titre de l’article 40 de la Constitution.
Cet amendement ne visait pourtant pas à réduire les moyens affectés à la dissuasion ; il tendait à les affecter au démantèlement et à la restauration des sites, ainsi qu’au recyclage des matières pouvant être recyclées. Invoquer contre lui l’article 40 donne à penser que la mise en œuvre de ce dispositif aurait pu entraîner des dépenses supplémentaires pour l’État, or il n’en était rien.
En choisissant de ne pas réduire les moyens affectés à la dissuasion, j’entendais insister sur le coût extravagant du démantèlement des armes anciennes, qui ne me paraît pas suffisamment pris en compte aujourd'hui. Nous aurons l’occasion d’y revenir ultérieurement au cours de l’examen du texte, lorsqu’il s’agira de penser le « retour à l’herbe » de certaines installations nucléaires, dont le poids repose largement sur la collectivité.
Nous avons déjà insisté sur l’importance de la dissuasion dans notre politique de défense, dont elle représente – je le rappelle une fois de plus à Mme Voynet – l’axe le plus fort. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 61.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 25 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa du 1.4 du rapport annexé, remplacer les mots :
en deux
par les mots :
plusieurs
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Le cinquième alinéa du 1.4 du rapport annexé prévoit, en matière de prévention, que nous ne disposions plus à terme que de deux points d’appui sur les façades occidentale et orientale de l’Afrique.
Sur la façade orientale de l’Afrique, il est clair que le point d’appui sera Djibouti, mais quel sera-t-il sur la façade occidentale ? S’agira-t-il de Dakar ? De Port-Gentil ? D’Abidjan ? Je ne parle pas du Tchad ni de la République centrafricaine, puisque nous n’y avons pas de base permanente.
Nous sommes engagés dans un certain nombre d’opérations depuis longtemps, mais ne conserver qu’un seul point d’appui sur la façade occidentale ne nous mettrait pas en situation, à mon avis, d’assumer nos responsabilités à l’égard des jeunes États de cette vaste région de l’Afrique centrale, dont les richesses excitent la convoitise d’autres puissances, que je ne nommerai pas, alors que leur construction est encore loin d’être achevée. Or, sans sécurité, il n’y a ni développement ni démocratie. Le maintien d’une base permanente en Afrique centrale me paraît relever du simple bon sens.
La commission estime que la rationalisation de nos forces prépositionnées est indispensable. Dans cette logique, concentrer ces forces dans deux bases permanentes en Afrique paraît raisonnable, d’autant que nous créons une base aux Émirats arabes unis, dans une zone dont la France ne peut se désintéresser. Pour l’heure, l’extrême dispersion de nos implantations hors métropole crée des contraintes difficiles à gérer en termes de répartition des matériels et de soutien.
Je rappelle à M. Chevènement que nous avons passé des accords de défense avec les pays africains. Si l’un d’entre eux se trouvait menacé, nous y enverrions des forces, comme nous l’avons fait au Tchad avec l’opération Épervier, afin d’éviter que l’indépendance de ce pays ne soit mise en danger par des attaques venues du Nord ou de l’Est.
L’un des axes majeurs de notre politique consiste à développer, avec l’appui de l’Union européenne, les capacités africaines de maintien de la paix, dans le cadre de l’Union africaine et des organisations sous-régionales. Il ne faudrait pas nous exposer au reproche de néo-colonialisme, qui nous est déjà trop souvent adressé.
En cas de besoin, nous pourrions intervenir dans ces pays et créer des bases nouvelles, mais deux bases permanentes suffisent.
Le Gouvernement fait sienne l’argumentation de la commission et émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du dixième alinéa du 1.4 du rapport annexé, après les mots :
sécurité internationale
insérer les mots :
dans le cadre des résolutions du conseil de sécurité des Nations Unies
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Cet amendement vise à préciser que les opérations de stabilisation de l’armée française doivent s’inscrire dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies ou dans celui de la légitime défense défini à l’article 51 de la Charte des Nations unies.
Défavorable. Nous avons déjà longuement explicité nos positions respectives.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 62, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
À la fin de l'avant-dernier alinéa du 2.1.1.2 du rapport annexé, supprimer les mots :
A 400M et Atlantique 2
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Il est indéniable que l’A 400M revêt une importance cruciale à l’échelon européen, pour des raisons économiques, de stratégie industrielle, mais également de politique de défense. Sept nations, 180 appareils à livrer pour un coût unitaire de 145 millions d’euros : c’est considérable.
Si le programme de l’avion de transport A 400M mérite une attention particulière, c’est en raison non seulement des répercussions potentielles de son retard sur la capacité opérationnelle des forces armées européennes en général, et françaises en particulier, mais aussi des difficultés qu’il peut engendrer pour les champions industriels de l’Europe de la défense que sont la société EADS et sa filiale Airbus.
Les difficultés techniques rencontrées au cours de la construction de l’avion A 400M ont entraîné un retard estimé à quatre ans pour la première livraison. Ce retard pourrait, dans le pire des cas, conduire à l’abandon pur et simple du programme ; le P-DG d’EADS a récemment souligné que ce risque est réel.
Le sauvetage du programme coûterait entre 7 milliards et 8 milliards d’euros aux contribuables des pays concernés, selon les chiffres qui circulent dans les milieux aéronautiques. Pour les Français, la facture pourrait se situer entre 2 milliards et 2, 5 milliards d’euros supplémentaires.
Les ministres de la défense des sept pays partenaires du programme A 400M n’ont abouti qu’à un compromis a minima sur l’avenir de l’avion, le 22 juin dernier à Séville, et se sont accordés un mois de réflexion supplémentaire : rien qui laisse présager un avenir radieux pour ce projet !
Mon amendement a pour objet d’exprimer une préoccupation. Il ne constitue pas, bien sûr, une quelconque marque de défiance à l’égard d’un programme d’avion de transport qui me paraît tout à fait indispensable.
Tel qu’il est rédigé, cet amendement donnera des arguments à ceux qui souhaitent se retirer du programme. La commission souhaite très fortement, au contraire, que celui-ci puisse être mené à son terme, en raison de l’importance qu’il représente pour notre industrie aéronautique et pour l’indépendance de notre pays.
Nous sommes donc totalement défavorables à cet amendement. En outre, il n’y a aucune raison de supprimer la référence aux avions gros porteurs Altantique 2.
Afin de la rassurer, j’indique à Mme Voynet que M. le ministre de la défense réunira ses homologues des pays partenaires le 24 juillet prochain en vue de préparer un avenir plus radieux à un programme ô combien important.
Le retard de calendrier du programme de l’A 400M n’exclut pas une première livraison avant 2014. Nous y travaillons.
M. Jacques Gautier. Le point a été fait hier après-midi, lors de la discussion générale, sur l’A 400M. Tout laisse à penser que l’engagement de M. le ministre de la défense et celui des États concernés, ainsi que le moratoire en cours, permettront que les premières livraisons, attendues avec impatience par nos armées, puissent intervenir dès 2013, comme annoncé. Il serait donc totalement fou d’y renoncer, d’autant que le « trou capacitaire » pose problème et qu’il nous faudra investir pour le boucher.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après le 2.1.2 du rapport annexé, insérer un 2.1.2 bis ainsi rédigé :
2.1.2 bis L'action diplomatique
Le renseignement doit nourrir les actions de prévention des conflits qui incombent à la diplomatie.
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
La diplomatie a un rôle particulier à jouer en matière de prévention des conflits, ce que l’on a parfois oublié par le passé. Les actions en la matière lui incombent « notamment », comme a souhaité le préciser M. Charasse au travers d’un sous-amendement. Je reprends volontiers à mon compte cette formulation et rectifie mon amendement en conséquence.
Cela m’est l’occasion de rappeler à M. de Rohan que le fait de disposer de forces prépositionnées participe d’une stratégie de prévention des conflits, tandis que les opérations pouvant être menées en vertu d’accords de défense qu’il a évoquées ne sont décidées qu’en réaction à des tentatives de déstabilisation.
En tout état de cause, le rôle de la diplomatie en matière de prévention des conflits doit être mis en exergue, y compris dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 27 rectifié bis, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, et ainsi libellé :
Après le 2.1.2 du rapport annexé, insérer un 2.1.2 bis ainsi rédigé :
2.1.2 bis L'action diplomatique
Les actions de prévention des conflits incombent notamment à la diplomatie qui dispose pour ce faire des éléments rassemblés par les services de renseignement.
Le sous-amendement n° 134, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa de l'amendement n° 27 :
Les actions de prévention des conflits incombent notamment à la diplomatie qui dispose pour ce faire des éléments rassemblés par les services de renseignement.
Ce sous-amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 27 rectifié bis ?
La fonction « connaissance et anticipation » fournit aux responsables les outils d’aide à la décision nécessaires, y compris dans le domaine diplomatique.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 63, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer le 2.2 du rapport annexé.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Tout le chapitre 2.2 du rapport annexé confond dissuasion et dissuasion nucléaire ! Comme je l’ai déjà souligné tout à l’heure, une définition beaucoup trop bornée – au sens de « limitée par des bornes », il ne s’agit pas d’une insulte ! – du terme « dissuasion » a été retenue. Je propose donc la suppression du chapitre 2.2 du rapport annexé.
L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Compléter la dernière phrase du 2.2.1 du rapport annexé par les mots :
dont, hors situation de crise, seulement une centaine sont opérationnelles
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
En l’occurrence, c’est le cas.
Dans un monde où les menaces sont nombreuses, où la surprise est toujours possible et où la géographie des puissances entre en jeu d’une manière nouvelle, sans doute en conséquence de la mondialisation libérale, il est important, me semble-t-il, de préserver les marges d’indépendance de la France. Cela suppose de maintenir une dissuasion crédible, calibrée à un niveau de stricte suffisance.
Je ne vois pas pourquoi nous inscririons dans le texte que notre arsenal doit comporter moins de 300 têtes nucléaires. Ce chiffre sera immédiatement comparé au nombre de têtes opérationnellement déployées figurant dans les accords de Moscou, les accords START – Strategic Arms Reduction Treaty – et les accords SALT – Strategic Arms Limitation Talks.
Je rappelle que les récents arrangements conclus entre M. Obama et M. Medvedev évoquent le passage d’une fourchette comprise entre 1 700 et 2 200 têtes nucléaires à une fourchette comprise entre 1 500 et 1 650 têtes. Je fais observer à Mme Voynet que la réduction est modeste ! En ajoutant les stocks stratégiques et les armes tactiques aux têtes nucléaires opérationnellement déployées, les chiffres seraient beaucoup plus importants. Comparons donc ce qui est comparable !
Je m’exprime dans l’intérêt de la France : mentionnons 300 têtes nucléaires, à comparer avec les 10 000 têtes dont disposent les États-Unis ou la Russie, ou alors une centaine de têtes opérationnellement déployées, à comparer aux 1 500 à 1 650 dont sont dotés ces deux pays. Cela me paraît souhaitable. Monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, je sais que mon amendement sera balayé, mais je crois qu’il pourrait tout de même alimenter votre réflexion.
Mme Voynet nous chante toujours la même chanson, et l’insuccès ne la rebute manifestement pas ! Quoi qu’il en soit, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 63.
Au travers de l’amendement n° 28 rectifié, M. Chevènement soulève une question tout à fait pertinente. En effet, dans le débat international sur le désarmement nucléaire, des chiffres relatifs au volume des arsenaux sont aujourd'hui avancés sans que soient précisées les réalités qu’ils recouvrent.
Lorsque le Président de la République a indiqué que notre arsenal comprendrait moins de 300 têtes nucléaires, il parlait bien de la totalité de notre stock. Les chiffres avancés par les États-Unis et la Russie concernent, quant à eux, les têtes opérationnellement déployées, à l’exclusion des têtes en réserve prêtes à être déployées ou des têtes en attente de démantèlement. Il y a donc une grande ambiguïté, qui tend à grossir artificiellement le volume de notre arsenal, comme l’a parfaitement souligné M. Chevènement.
Pour autant, je ne suis pas certain que nous puissions mentionner dans le texte un nombre de têtes déployées. Il me paraît délicat de modifier par voie d’amendement le discours public de la France sur sa posture de dissuasion.
Mon cher collègue, je reconnais très volontiers que votre question est pertinente et je ne « balaye » pas du tout votre argumentation, qui peut effectivement alimenter notre réflexion. Toutefois, la rédaction de cet amendement m’amène à émettre un avis défavorable, même si, sur le fond, nous avons la même analyse.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 63. Je ne me lasserai pas de rappeler à Mme Voynet l’importance de la dissuasion dans la politique de défense française !
En ce qui concerne l’amendement n° 28 rectifié, je ne pense pas qu’il convienne d’inscrire une telle précision dans la loi. À mon sens, la phrase qui figure dans le rapport annexé se suffit à elle-même.
La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote sur l’amendement n° 63.
La majorité ne peut demeurer silencieuse devant l’amendement de Mme Voynet, qui vise à supprimer un pan entier de notre système de défense.
Comme le savent ceux d’entre nous qui ont participé à une session de l’assemblée générale de l’ONU ou assisté à une réunion du Conseil de sécurité, c’est bien l’existence de notre force de dissuasion nucléaire qui justifie notre statut de membre permanent de ce dernier !
Dans ces conditions, il me paraît très grave de proposer, comme le fait Mme Voynet, de supprimer la totalité du chapitre consacré à la dissuasion nucléaire. C’est pourquoi nous voterons résolument contre l’amendement n° 63.
Par ailleurs, si l’amendement de M. Chevènement s’explique, je pense, à l’instar de M. le rapporteur, qu’il n’est pas opportun de mentionner de tels chiffres dans un projet de loi de programmation destiné à s’appliquer pendant un certain nombre d’années.
Pour avoir participé à une session de l’assemblée générale de l’ONU et pris part à une réunion de l’Union de l’Europe occidentale, l’UEO, je ne puis que confirmer les propos de notre collègue Jean-Pierre Fourcade : le rôle fondamental de la France au sein de l’ONU est lié à sa puissance nucléaire. Mme Voynet devrait peut-être faire le voyage de New York pour prendre conscience de l’importance de la stratégie de dissuasion pour notre pays.
Par conséquent, le groupe de l’Union centriste s’associe à l’argumentation qui vient d’être développée par M. Fourcade au nom du groupe de l’UMP.
M. Fourcade semble s’insurger contre le fait que je présente des amendements destinés à interpeller et à faire réfléchir. Je fais simplement mon travail !
À vrai dire, je n’espérais pas vous convaincre, monsieur Fourcade. Je tiens néanmoins à exprimer mon désaccord avec votre raisonnement. À mon sens, ce qui fonde l’influence de la France, c’est l’histoire
M. Yves Pozzo di Borgo fait un geste de dénégation
… c’est aussi l’autorité d’un pays qui a toujours mis l’accent sur le respect des droits humains et des valeurs fondamentales héritées de la Révolution française, avec lesquels il n’a jamais transigé.
Pour ma part, je trouve tout à fait étrange cet argument selon lequel ce serait l’existence de la dissuasion qui justifierait notre statut de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Personne ne nourrit l’idée folle d’attribuer un tel statut au Pakistan ou à d’autres pays dotés de l’arme nucléaire !
L’Inde, c’est 1, 2 milliard d’habitants ! Ce n’est pas parce qu’il dispose de l’arme nucléaire que l’on envisage d’attribuer à ce pays un poste de membre permanent !
Reprenons la liste des pays qui ont fini par se doter de l’arme nucléaire, avec ou sans autorisation, parce que vous n’avez jamais osé affronter courageusement la question des risques de prolifération ni su sortir de l’ornière le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires : envisagez-vous de doter ces pays, qui ont joué avec le feu pendant tant d’années, d’un statut de membre permanent du Conseil de sécurité ? Bien sûr que non !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 29 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Dans le dernier alinéa du 2.2.2.2. du rapport annexé, remplacer les mots :
Multi Role Tanker and Transport (MRTT)
par les mots :
ravitailleur transporteur polyvalent (RTP en français, MRTT en anglais)
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
M. Jean-Pierre Chevènement. Le ministre de la défense, M. Hervé Morin, s’est exprimé hier en des termes qui étaient pour moi incompréhensibles : il a évoqué une loi de programmation bottom-up, puis a employé une expression se terminant par « down », mais dont le début m’a échappé…
Sourires
Cette invasion de la langue anglo-américaine dans nos débats me paraît fâcheuse.
Pourquoi mentionner dans le rapport annexé le multi role tanker and transport, ou MRTT, plutôt que, tout simplement, le ravitailleur transporteur polyvalent, ou RTP ?
Au demeurant, je constate que les auteurs du rapport annexé ont utilisé des termes français pour désigner les matériels terrestres. Ainsi, ils font référence au porteur polyvalent terrestre, le PPT, ou à l’engin blindé de reconnaissance de combat, l’EBRC… Ce n’est pas parce qu’on prend les airs qu’il faut se mettre à parler anglais !
Applaudissements
M. Chevènement sait comme moi que, depuis des temps immémoriaux, un nombre considérable de termes anglais sont utilisés dans l’armée, notamment dans l’armée de l’air.
J’admets volontiers qu’il serait bon de les franciser, mais, pour l’heure, il conviendrait à mon sens de maintenir le sigle MRTT, qui désigne une catégorie générique d’appareils bien identifiée, en espérant qu’une appellation différente pourra être trouvée pour cet avion européen d’ici à son admission au service.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement, bien que je partage la préoccupation de son auteur devant l’envahissement du franglais.
Je fais la guerre à mes services à propos de l’abus de termes anglais, mais l’appellation MRTT est universellement consacrée et connue de tous. C'est pourquoi le ministre de la défense l’a employée.
En attendant de trouver un terme bien de chez nous, je propose de maintenir cette appellation. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Comme M. de Rohan, qui est breton tandis que je suis corse, je salue le combat de M. Chevènement pour la francophonie et la défense du français.
M. Josselin de Rohan, rapporteur. Et pour la défense de la France en français !
Sourires
L'amendement n° 30 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du 2.3.1 du rapport annexé, remplacer les mots :
autour de deux pôles, un sur chaque façade, atlantique et orientale
par les mots :
sur plusieurs pôles
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Il s’agit toujours de savoir si nous conserverons un ou, comme je le propose, plusieurs pôles sur la façade occidentale de l’Afrique, où seraient prépositionnées des forces. Cette présence est un facteur de stabilité, ainsi qu’un élément de prévention en vue de l’affermissement de la démocratie et de jeunes États, notamment en Afrique centrale.
La commission a émis un avis défavorable. Nous nous sommes déjà expliqués sur ce point.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 132, présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du 2.3.2 du rapport annexé :
La liste des accords de défense a été rendue publique. Le Parlement sera désormais informé de la conclusion et des orientations de ces accords. Le texte de tous les accords de défense sera communiqué aux commissions parlementaires permanentes en charge de la défense et des affaires étrangères.
La parole est à Mme Michelle Demessine.
La révision constitutionnelle de 2008 a été incomplète pour ce qui concerne le contrôle du Parlement sur l’activité du Gouvernement en matière de défense. Elle s’est en fait limitée à prévoir une information du Parlement sur les interventions militaires à l’étranger, suivie d’un vote du Parlement sur l’opportunité de leur prolongation.
Cependant, nos opérations extérieures futures pourraient aussi résulter de l’application d’accords de défense ou de coopération militaire avec des pays tiers. Il est donc essentiel que le Parlement soit informé du contenu de ces accords pour qu’il puisse se prononcer en toute connaissance de cause. Malheureusement, nous n’en sommes pas encore là.
Dans son discours du Cap, le Président de la République s’était engagé à remettre à plat et à publier tous nos accords de défense, en particulier ceux qui ont été signés avec les pays d’Afrique. Cela représente un progrès au regard de l’opacité qui régnait auparavant. Depuis quelque temps, en effet, la liste des accords de défense est rendue publique. Ainsi, ceux qui ont été récemment passés avec le Togo, le Cameroun ou les Émirats arabes unis ont été publiés au Journal officiel.
Toutefois, la publication de la liste des accords est une chose, l’information du Parlement sur leur contenu en est une autre.
Par respect pour la démocratie et pour la représentation nationale, qui peut être amenée à se prononcer sur des cas précis d’intervention, il est nécessaire de fournir une information complète et précise au Parlement. Cela permettrait d’éviter les soupçons ou les procès d’intention quant à un engagement nucléaire automatique, tels ceux qui se sont récemment fait jour à propos du nouvel accord nous liant à Abou Dhabi. Il faudrait bien sûr garantir un certain niveau de confidentialité afin d’assurer la sécurité de notre pays ou la stabilité de nos relations internationales. Cette information sur le contenu des accords de défense – il conviendra d’en préciser la nature et la forme, et de décider si elle sera transmise à l’ensemble des membres des commissions des affaires étrangères et de la défense ou simplement aux bureaux de celles-ci – devra être aussi complète que possible.
En attendant que nous puissions légiférer sur cette question, notre amendement vise à ce qu’il soit inscrit dans le rapport annexé à la loi de programmation militaire que les commissions parlementaires compétentes des deux assemblées doivent avoir connaissance du contenu intégral des accords de défense.
L'amendement n° 85, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du 2.3.2 du rapport annexé par une phrase ainsi rédigée :
Le texte de tous les accords de défense sera communiqué aux commissions parlementaires permanentes en charge de la défense et des affaires étrangères.
La parole est à M. André Vantomme.
Dans le cadre des différentes réformes destinées, paraît-il, à renforcer les pouvoirs du Parlement qu’il a mises en œuvre, le Président de la République a affirmé publiquement que la représentation nationale devait être informée des dispositions qui lient la France à des pays tiers, notamment dans le domaine de la défense et du maintien de l’ordre. Il s’est engagé à ce que ces informations ne soient plus soumises au secret et soient communiquées.
Le prenant au mot, nous souhaitons, au travers de cet amendement, accroître l’information réelle du Parlement sur les accords de défense et de sécurité, afin qu’il puisse exercer un véritable contrôle.
Le ministre de la défense a lui-même déclaré, lors de l’examen du texte en commission à l’Assemblée nationale, les mardi 7 et mercredi 8 avril derniers, que « des discussions portant sur l’ensemble des accords [étaient] en cours », et il s’est engagé à informer le Parlement de leurs conclusions, le moment venu. « S’il fallait mettre en œuvre un accord de défense, a-t-il ajouté, il appartiendrait en effet au Gouvernement d’indiquer à la commission de la défense le contenu de cet accord ou d’en révéler la clause secrète. »
Nous approuvons cette intention. Cependant, la rédaction actuelle du projet loi, aux termes de laquelle « le Parlement sera désormais informé de la conclusion et des orientations de ces accords » n’est pas suffisamment complète et demeure ambiguë : une simple information n’est pas suffisante. Il ne peut s’agir seulement d’une liste d’accords à venir, et la représentation nationale ne peut plus tolérer que les journalistes soient mieux informés qu’elle en la matière. Nous souhaitons avoir connaissance du texte des accords, et non pas seulement de leurs orientations.
Par ailleurs, nous approuvons la deuxième partie du texte présenté, qui prévoit que « les conventions ou les clauses relatives aux possibilités d'intervention de la France dans des missions de maintien de l'ordre, figurant dans certains accords bilatéraux, seront abrogées ». Je dirai même qu’il était temps de procéder à une telle abrogation !
Qu’il me soit permis de rappeler l’exemple récent d’une implantation militaire française permanente inaugurée à Abou Dhabi. Ce complexe abritant 400 hommes regroupe une base navale, une base aérienne et un camp d’entraînement. La création de cette structure répond à une demande exprimée par les autorités émiraties dès l’arrivée de M. Sarkozy à l’Élysée. Un premier accord de défense avait été signé en 1995. Toutefois, le nouvel accord signé le 26 mai 2009 pousse encore plus loin l’engagement de notre pays envers les Émirats arabes unis : selon Le Figaro du 15 juin, ses clauses secrètes imposent à la France de défendre les sept Émirats arabes unis par « tous les moyens militaires dont elle dispose », c’est-à-dire également l’arme nucléaire. Cette clause, qui placerait ainsi les Émirats arabes unis sous la protection du parapluie nucléaire français, serait, affirme Le Figaro, plus contraignante que l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord, qui prévoit que les membres de l’OTAN se portent assistance en cas d’attaque contre l’un d’entre eux.
Cet accord est d’une portée incalculable pour la sécurité de la France. Avouez qu’il n’est pas raisonnable, et encore moins admissible, que, dans cette affaire, la représentation nationale soit tenue informée grâce à la presse !
La liste des accords de défense a été rendue publique. Il s’agit, là encore, d’une innovation qui mérite d’être soulignée. Aucun gouvernement, quelle que soit sa couleur politique, n’avait jusqu’à présent publié cette liste. Par ailleurs, le principe de l’information du Parlement sur la conclusion et sur les orientations de ces accords est désormais posé.
Les auteurs des deux amendements proposent de retenir une procédure uniforme de transmission de tous les accords aux commissions compétentes, quels que soient leur nature et leur contenu.
Le Gouvernement a d’ores et déjà indiqué que certains de ces accords feraient l’objet d’une procédure d’approbation parlementaire classique, dans le cadre de l’article 53 de la Constitution. D’autres cependant ne relèveront pas de ce cas de figure. Il faut également tenir compte de la nécessaire latitude dont doit disposer l’exécutif en matière diplomatique, compte tenu de la sensibilité des enjeux.
Je souhaiterais que M. le secrétaire d’État nous expose son point de vue sur la question de la publicité des accords de défense et nous indique sous quelle forme le Gouvernement envisage d’assurer l’information du Parlement prévue dans le projet de loi. Je me prononcerai après avoir entendu ces explications.
La Constitution définit la répartition des pouvoirs en matière de conventions internationales et d’accords de défense. Très classiquement, l’exécutif négocie les traités et le législateur peut être amené à autoriser leur ratification, conformément aux dispositions des articles 52 et 53 de la Constitution.
Le rapport annexé au projet de loi de programmation militaire, dans son article 2.3.2, précise que « la liste des accords de défense a été rendue publique » et que « le Parlement sera désormais informé de la conclusion et des orientations de ces accords ». Cette rédaction, issue des travaux de l’Assemblée nationale, représente à mes yeux un bon équilibre, car elle garantit au Parlement une information en matière d’accords de défense tout en laissant à l’exécutif l’initiative et la maîtrise de la négociation en matière internationale.
Le Parlement aura par ailleurs accès au texte même des accords dans le cadre de la procédure de ratification par voie législative, qui sera privilégiée et qui est d’ores et déjà envisagée pour la ratification des accords récemment signés avec le Togo, le Cameroun et les Émirats arabes unis.
Le Gouvernement est défavorable aux deux amendements.
Compte tenu des explications fort claires que vient d’apporter M. le secrétaire d’État, je demande le retrait de ces deux amendements. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.
Par précaution, je maintiens l’amendement n° 132, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 64, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après le 2.3.2 du rapport annexé, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
2.3.2 bis La lutte contre la corruption
La France apportera sa contribution à la mise en place d’une gouvernance mondiale à même de prévenir les conflits, de lutter contre le blanchiment d’argent, le transfert de technologies dangereuses et la vente illégale d’armes.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
La corruption peut être le fait des gouvernements, des entreprises ou même des habitants d’un pays. Dans tous les cas, elle fausse les processus de prise de décision et de régulation des relations sociales, de financement et de mise en œuvre des politiques publiques. En ce sens, et particulièrement lorsqu’elle vise à détourner des fonds publics au profit d’intérêts privés, elle affecte profondément les initiatives qui seraient pourtant susceptibles de favoriser le développement.
En présence de corruption, on observe que les ressources sont confisquées par un petit nombre, que l’inégalité des revenus s’accroît et que la capacité du Gouvernement à agir pour le bien des citoyens se réduit, spécialement lorsqu’il s’agit de répondre aux besoins des plus pauvres. Les analyses de la Banque mondiale l’attestent : on constate notamment une corrélation manifeste entre l’indice de perception de la corruption et l’indice de développement humain, qui est particulièrement faible dans les pays où ce fléau sévit le plus. La corruption engendre et nourrit donc la pauvreté. On sait par ailleurs combien l’extrême précarité, le dénuement exacerbent les tensions et les conflits, à quel point le désespoir est à l’origine, souvent, de la violence.
Devant cette axiomatique implacable, il apparaît fondamental de s’attaquer de front à la corruption qui gangrène la démocratie de nombreux pays, affame les citoyens et engendre des tueries insupportables. La France doit par conséquent inscrire cet objectif dans sa politique de prévention des conflits.
La corruption, c’est très mal, mais c’est un sujet étranger à notre débat. L’avis est donc défavorable.
La lutte contre la corruption et la prévention de celle-ci sont bien sûr des objectifs majeurs pour le Gouvernement. Toutefois, la définition des modalités de la gouvernance mondiale dans ce domaine n’entre absolument pas dans le champ du projet de loi de programmation militaire. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Il est parfaitement exact que cet amendement peut sembler ne pas être à sa place dans l’examen d’un texte qui traite, pour l’essentiel, de la défense, mais il se trouve que la lutte contre les trafics fait l’objet du paragraphe 2.3.3. Or ce thème n’est pas moins étranger à l’objet du projet de loi que celui de la lutte contre la corruption. Les trafics, la corruption, c’est effectivement très mal, monsieur le rapporteur, et leur répression va de pair.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 31 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Avant le premier alinéa du 2.3.4. du rapport annexé, ajouter un alinéa ainsi rédigé :
La France participera activement aux efforts de réduction et de maîtrise des armements dans l'optique d'un désarmement général et complet. Elle veillera notamment à l'universalisation du traité de non prolifération et à celle du traité international d'interdiction des essais nucléaires. Elle s'engagera ainsi résolument dans la négociation d'un nouveau traité interdisant la production de matières fissiles à usage militaire. Il convient de marquer les objectifs définis par la France et l'Union européenne en matière de désarmement.
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Cet amendement tend à rappeler les axes essentiels de la stratégie de la France et de l’Union européenne en matière de désarmement, ainsi que l’objectif ultime inscrit à l’article 6 du traité de non-prolifération nucléaire, à savoir un désarmement général et complet, et pas seulement le désarmement nucléaire.
L’amendement vise à préciser que la France participera activement aux efforts de réduction et de maîtrise des armements dans l’optique d’un désarmement général et complet. Elle veillera notamment à l’universalisation du traité de non-prolifération et à celle du traité international d’interdiction des essais nucléaires.
Le président Obama a annoncé l’intention des États-Unis de ratifier le traité de non-prolifération, ce que le Congrès américain s’était refusé à faire jusqu’à présent. Cependant, cette proposition devra recueillir soixante-sept voix au Sénat, et il n’est pas certain que ce chiffre puisse être facilement atteint. Ensuite, il restera à obtenir la ratification du traité par la Chine…
Enfin, la France s’attachera à la négociation, à la signature et à la ratification d’un traité international d’interdiction des essais nucléaires. Celle-ci empêchera la modernisation des têtes nucléaires, tandis que l’interdiction de la production de matières fissiles à usage militaire bloquera le développement quantitatif des arsenaux.
Les positions prises par le Président de la République en tant que président de l’Union européenne, rappelées dans une lettre au secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, ne se limitent pas à cela, mais il me semble important de marquer clairement dans ce texte les grandes lignes de notre action, sur un sujet dont nous ne devons pas paraître nous désintéresser à l’heure où il va mobiliser très largement l’attention de l’opinion publique.
Le sous-amendement n° 135, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Au début du second alinéa de l'amendement n° 31, ajouter les mots :
Dans le respect de ses grands intérêts et sans compromettre sa sécurité et son indépendance,
Ce sous-amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 131, présenté par Mme Demessine, MM. Hue, Billout et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du 2.3.4 du rapport annexé, insérer un alinéa ainsi rédigé :
La France se conformera pleinement à l'objectif fixé par l'article 6 du Traité de non-prolifération nucléaire de désarmement général et complet. Elle prendra des initiatives pour relancer le processus engagé qu'elle soumettra à la prochaine conférence de réexamen du TNP. Elle agira tout particulièrement pour aboutir à mettre en place un régime international efficace de lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, de leurs vecteurs et des matériels connexes.
La parole est à Mme Michelle Demessine.
La politique de développement des armes nucléaires du Gouvernement, qui ne se borne pas à leur modernisation dans le respect du principe de stricte suffisance, est contradictoire avec la volonté affichée dans le rapport annexé de lutter contre la principale forme de prolifération, celle des armes nucléaires.
La politique menée en la matière incite en réalité à la course aux armements. Prévenir la prolifération, comme le prévoit le rapport annexé, par le renforcement du régime international de maîtrise des armements, le contrôle des exportations et le renseignement, est nécessaire, mais pas suffisant, car la prévention seule, non accompagnée d’initiatives diplomatiques fortes, est peu efficace.
Certes, il n’est pas avéré que la réduction des arsenaux des puissances nucléaires reconnues par le traité de non-prolifération ait à elle seule valeur d’exemple.
En effet, bien que les stocks américains et russes aient été réduits des trois quarts environ au cours des vingt dernières années, l’incidence de cette évolution sur la volonté de pays comme la Corée du Nord, l’Inde, le Pakistan ou Israël de se doter d’arsenaux nucléaires a été faible. Il n’en demeure pas moins que la voie des discussions multilatérales reste la seule possible.
Puisque nous prétendons affirmer notre volonté de promouvoir le désarmement, il faut multiplier les actes concrets, comme la réduction d’un tiers de notre composante nucléaire aérienne ou le démantèlement de nos usines de production de matières fissiles de Marcoule et de Pierrelatte. Notre pays doit agir pour rendre un jour accessible l’objectif fixé à l’article 6 du TNP, à savoir un désarmement général et complet.
Afin de nous mettre au diapason des engagements pris récemment par les présidents russe et américain, nous devons faire d’ambitieuses propositions pour relancer le processus de désarment lors de la prochaine conférence d’examen du TNP. Il faut absolument parvenir à mettre un jour en place un régime international de lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, de leurs vecteurs et des matériels connexes qui soit efficace.
Notre amendement vise à inscrire clairement ces principes dans le rapport annexé.
Nous avons déjà évoqué le plan que l’Union européenne a proposé en matière de désarmement et de non-prolifération. Il constitue pour les mois à venir, notamment en vue de la conférence d’examen du TNP, le cadre de référence de la politique française.
C’est pourquoi ces amendements, qui visent chacun à apporter des nuances à la rédaction du texte, ne nous apparaissent pas indispensables. La commission émet un avis défavorable.
L’effort de maîtrise des armements nucléaires est retracé au paragraphe 2.2 du rapport annexé, qui n’appelle pas de précisions supplémentaires. Le Gouvernement adopte ici la même position que sur un amendement similaire présenté par Mme Voynet.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 32 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase du 2.4.1.2 du rapport annexé.
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Cet amendement concerne les partenariats public-privé.
Monsieur le secrétaire d’État, d’une manière générale, la politique industrielle de défense doit rester sous le contrôle de la puissance publique. Certes, il y a déjà eu beaucoup d’entorses à ce principe, mais on ne doit pas, dans un texte de loi, préjuger de dispositions pratiques susceptibles de nuire, en l’occurrence, à la sécurité de nos transmissions. Les systèmes de transmissions militaires devraient rester l’apanage de la puissance publique.
Cet amendement est le premier d’une série qui vise à supprimer du texte toute référence aux possibilités de partenariat public-privé.
La commission estime que cette formule ne doit pas être écartée a priori. Elle mérite d’être étudiée non pas de manière systématique, mais au cas par cas, lorsqu’elle peut présenter un réel avantage par rapport aux modes d’action traditionnels.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement beaucoup trop général.
Dans un contexte de maîtrise de la dépense publique, la recherche de financements innovants, associant des partenaires privés, constitue vraiment une des voies permettant de rendre la commande publique plus efficace, notamment pour des opérations d’envergure.
De tels partenariats sont entourés de garanties, aux termes desquelles il est clair que la puissance publique garde la maîtrise des opérations menées. Cela vaut pour les réseaux de transmissions et pour les infrastructures. La défense est, à cet égard, un champ d’application pertinent de ces partenariats.
Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 33 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Compléter le quatrième alinéa du 2.4.3.1 du rapport annexé par les mots :
indépendamment du programme de défense antimissiles américain
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Il est indiqué, dans le rapport annexé, que la mise en œuvre d’une coopération européenne sera recherchée pour le programme de détection de missiles ennemis et d’alerte avancée.
Je propose de préciser que cette coopération devra être menée « indépendamment du programme de défense antimissiles américain », car nous devons conserver la maîtrise d’un tel système. En effet, les délais de réaction étant de l’ordre de vingt minutes, nous savons très bien que se conformer au programme de défense antimissiles américain reviendrait à se mettre entièrement à la merci des décisions qui seront prises par le président des États-Unis. M. le secrétaire d’État l’a indiqué tout à l’heure, il s’agit d’une affaire très complexe, et l’on ne peut s’aligner sur le programme américain sans savoir quelles conséquences cela emporte.
Je souhaite donc que l’on inscrive clairement dans le texte que ces systèmes de détection et d’alerte avancée resteront sous contrôle européen et français.
Si la France a décidé d’investir dans le développement d’une capacité de détection et d’alerte avancée, c’est bien pour disposer d’une autonomie d’appréciation et ne pas dépendre exclusivement de renseignements fournis par un autre pays. C’est la justification même de ce programme, pour lequel une coopération avec d’autres pays européens sera recherchée.
S’agissant de la défense antimissiles, spécifiquement visée par l’amendement, le débat sera certainement appelé à se poursuivre et à se développer dans les mois et les années à venir. Nous ignorons aujourd’hui quelles suites seront données au projet d’implantation d’éléments du système américain en Europe, de même que nous ignorons si des développements interviendront au sein de l’OTAN ou si la Russie, comme elle l’avait demandé à une certaine époque, sera un jour associée à une défense antimissiles couvrant tout le continent européen.
Il me semble donc aujourd’hui tout à fait prématuré de préconiser ou d’exclure tel ou tel schéma. Le texte, tel qu’il est rédigé, me paraît parfaitement clair, puisqu’il vise à doter la France d’une capacité autonome, quoi qu’il arrive, le cas échéant par le biais d’une coopération européenne. Il ne s’agit en aucun cas d’abdiquer notre autonomie.
La commission émet donc un avis défavorable.
L’acquisition de capacités de détection et d’alerte avancée repose bien sûr sur des moyens indépendants élaborés avec nos partenaires européens. Il nous semble donc inutile d’insérer dans le texte la précision présentée par M. Chevènement.
Je partage l’avis de la commission et du Gouvernement, mais je voudrais revenir sur l’intervention que j’ai faite hier sur ce sujet au nom du groupe de l’Union centriste, afin d’obtenir une réponse à la question que j’avais posée à cette occasion.
Pourquoi le projet Spirale, conçu par des ingénieurs français, n’a-t-il pas été intégré dans le projet de loi de programmation militaire ? Actuellement, lorsqu’un missile est lancé, la France et l’Europe sont aveugles et dépendent complètement des États-Unis en matière d’alerte.
Des essais ont déjà été conduits. Le projet Spirale, dont la mise en œuvre s’étalerait jusqu’en 2016, coûterait à la France, selon mes informations, 700 millions d’euros. Il s’agit d’un dispositif important, dont la réalisation doterait l’Europe des lunettes dont elle ne dispose pas actuellement.
Les études d’amont et l’exploitation des informations collectées par les deux microsatellites Spirale lancés en 2009 seront accélérées pour permettre que la conception et la réalisation des radars et des satellites puissent être engagées au plus tard en 2012.
L’entrée en service opérationnel de radars de très longue portée interviendra aux environs de 2015, celle du premier satellite opérationnel d’ici à 2019.
Je voudrais compléter l’information donnée par M. le secrétaire d’État : le programme Spirale est mentionné dans le rapport de la commission.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 65, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du 2.4.4 du rapport annexé, remplacer les mots :
les flux migratoires illégaux
par les mots :
la piraterie maritime
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Aux termes du premier alinéa du 2. 4. 4 du rapport annexé, « les moyens militaires dans les DOM-COM seront redéployés et leur niveau redéfini en fonction de leurs missions de souveraineté et de leur contribution à la lutte contre cinq risques majeurs : les catastrophes naturelles, les atteintes à la sécurité du centre spatial guyanais, le narcotrafic, les flux migratoires illégaux, le pillage des ressources naturelles ».
Si l’on peut élever au rang de risques majeurs les catastrophes naturelles ou le narcotrafic, il en va tout autrement des flux migratoires illégaux. En effet, les clandestins ne menacent pas nos côtes.
M. le secrétaire d’État s’exclame.
Nous ne sommes pas naïfs : l’extrême hétérogénéité qui caractérise l’immigration clandestine rend impossibles les jugements tranchés et trop rapides, fondés exclusivement sur la dimension humanitaire du phénomène ou, à l’inverse, sur sa seule dimension criminelle.
La mise en place de politiques concertées avec les pays d’origine des immigrants clandestins est bien entendu nécessaire. Le moyen le plus efficace de combattre les migrations illégales est d’en traiter les causes premières dans ces pays, en augmentant, par exemple, l’aide au développement.
Au contraire, il ne fait aucun doute que la piraterie maritime représente un risque majeur. La sûreté maritime recouvre des enjeux importants, aux frontières de la défense et de la sécurité. À l’heure où plus de 90 % du commerce mondial transite par la mer, qui constitue en outre une formidable réserve de ressources, l’économie mondiale est étroitement liée à la maîtrise du milieu marin et sous-marin. C’est un enjeu stratégique essentiel, souvent sous-évalué en France.
Face à cette menace, la France doit favoriser la mise en place, à l’échelon international, de moyens propres à empêcher que de nouveaux enlèvements ou prises d’otages ne se produisent.
C’est pourquoi je propose de substituer, dans la liste des risques majeurs énumérés par le texte, la piraterie maritime aux flux migratoires illégaux, qui appellent un tout autre traitement.
Madame Voynet, lutter contre les flux migratoires illégaux, c’est lutter contre les trafiquants et les négriers qui extorquent à des malheureux des sommes extraordinaires et exposent leur vie sur les océans !
C’est donc un devoir, pour nos forces armées, que de s’opposer à ce genre de trafic.
Puisque vous aimez beaucoup la morale, madame Voynet, vous devriez approuver cette lutte !
Par ailleurs, je vous ferai également remarquer que peuvent se dissimuler, parmi les immigrants illégaux, des personnes susceptibles de porter ultérieurement atteinte à la sécurité nationale.
Madame Voynet, en tant que maire, j’ai malheureusement eu à accueillir de ces malheureux…
Vous n’êtes pas la seule à parler de solidarité ! Cette valeur n’est ni de droite ni de gauche, elle est propre à la démocratie ; nous pouvons donc la partager.
Il est vraiment de notre devoir de lutter contre les flux migratoires illégaux, qui constituent un risque majeur pour la stabilité de nos départements et de nos collectivités d’outre-mer. On ne saurait passer ce phénomène sous silence.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Mme Dominique Voynet. On est en train de tout confondre !Monsieur le rapporteur, l’irritation que vous éprouvez à mon encontre nuit décidément à la clarté de votre jugement !
Exclamations amusées sur les travées de l ’ UMP.
… de même que la piraterie maritime, mais tel n’est pas le cas de la détresse des êtres humains, qui met en jeu la responsabilité morale de la France !
Si vous vous sentez agressé lorsque je vous fais remarquer que nous devons, d’une part, accueillir les personnes victimes de la traite des êtres humains, et, d’autre part, lutter sérieusement contre les risques majeurs, mais qu’il ne faut pas tout confondre, le débat est-il encore possible entre nous ?
Madame Voynet, je vis depuis quarante ans à l’étranger et je connais bien ces problèmes d’immigration clandestine, que celle-ci trouve sa source en Europe de l’Est ou dans les pays de la rive sud de la Méditerranée.
La commission des affaires européennes m’a confié plusieurs missions sur ce sujet. Je me suis ainsi rendu la semaine dernière à Calais avec votre collègue Alima Boumediene-Thiery. Les passeurs font payer de 5 000 euros à 15 000 euros à de pauvres âmes pour les conduire en Angleterre. §Quand les migrants clandestins ne peuvent leur procurer cette somme, ils s’en prennent à eux au Royaume-Uni ou à leurs familles restées au pays. Il existe donc des mafias, et il s’agit bien là d’une criminalité organisée.
Et ce ne serait pas là un risque majeur ?
Demandez à Mme Boumediene-Thiery de vous raconter son séjour dans ce que l’on appelle à Calais la « jungle ».
Elle vous parlera des gangs organisés !
Les Britanniques nous ont demandé d’agir pour lutter contre ce trafic, car ils craignent l’entrée sur leur territoire de terroristes potentiels. Déjà, à l’époque de la guerre froide, des espions se mêlaient aux personnes qui passaient frauduleusement les frontières. Des risques existent bel et bien, voilà pourquoi je voterai sans hésitation contre cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 98, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du 2.4.4 du rapport annexé par une phrase ainsi rédigée :
Cette diminution des effectifs devra faire l'objet d'une étude d'impact préalable soulignant les avantages et les inconvénients de la mesure proposée.
La parole est à M. Bernard Piras.
Dans sa recherche d’économies tous azimuts, le Gouvernement se trouve assez souvent placé en contradiction avec lui-même.
Il en est ainsi pour la réorganisation du dispositif de souveraineté dans les départements et collectivités d’outre-mer. Les missions sur place sont devenues plus nombreuses et l’on insiste sur la nécessité de renforcer la lutte contre les trafics. Il est donc envisagé de mettre en place une capacité de projection régionale dans certains départements et collectivités d’outre-mer, tels que les Antilles-Guyane, la Réunion ou la Nouvelle-Calédonie. Or, parallèlement, on nous annonce que les effectifs militaires diminueront en moyenne de 40 % d’ici à 2011 !
Notre demande, simple et empreinte de bon sens, devrait recueillir l’approbation de tous les membres de cette assemblée, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent : nous souhaitons que la diminution des effectifs militaires annoncée fasse l’objet d’une étude d’impact préalable mettant en évidence ses avantages et ses inconvénients.
Prévoir une étude d’impact préalable avant la diminution des effectifs militaires dans les départements et collectivités d’outre-mer ne nous a pas paru indispensable, car en règle générale toutes les mesures d’organisation que prend le ministre de la défense font l’objet d’études préalables approfondies, en particulier quand elles concernent les effectifs.
En conséquence, la commission est défavorable à cet amendement.
Le retrait des forces armées ne se fera qu’après transfert des missions de service public à d’autres administrations. En outre, je rappelle que les moyens du service militaire adapté seront renforcés.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement estime que cet amendement est inutile.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 34 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer le dernier alinéa du 2.5.1.8 du rapport annexé.
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
J’ai défendu un amendement similaire tout à l'heure.
Je tiens à marquer mes réticences, ma reluctance, comme dirait M. Morin
Sourires
Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable sur cet amendement.
Monsieur Chevènement, je tiens à vous faire remarquer que les Britanniques recourent depuis longtemps déjà à de tels partenariats.
M. Jean-Pierre Chevènement. Ils n’agissent pas toujours à bon escient ! Ils ont aussi brûlé Jeanne d’Arc !
Sourires
Vous avez rappelé l’histoire, permettez-moi de me référer à ce qui se fait de bien près de chez nous !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 66, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Compléter la première phrase du deuxième alinéa du 2.5.2.1 du rapport annexé par les mots :
, en concertation avec nos partenaires européens, dans le cadre de la politique européenne de sécurité et de défense
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Je voudrais tout d’abord indiquer à M. del Picchia que je me suis moi aussi rendue à Calais pour rencontrer ces malheureux qui vivent dans ce que l’on appelle la « jungle ». Il faut avoir beaucoup d’imagination pour voir dans ces personnes des terroristes potentiels !
Il s’agit, pour l’essentiel, de très jeunes gens attirés par le Royaume-Uni parce que des membres de leur famille ou des proches y vivent. Des associations leur fournissent des repas chauds et mettent parfois des douches à leur disposition. Des adolescents ont perdu la vie en voulant s’accrocher aux essieux des camions ou des trains qui franchissent la Manche.
Pour ma part, j’estime que le risque terroriste est plus le fait de réseaux puissamment organisés, disposant de moyens financiers relativement importants. Il est probable que, entre la France et la Grande-Bretagne, les terroristes circulent plus souvent en costume-cravate, munis de papiers et de titres de transport valides, que dans les conditions de précarité absolue que connaissent les malheureux de la « jungle » de Calais.
J’en viens maintenant à l’amendement n° 66, voulu comme un acte de foi dans la stabilité future de la politique européenne de sécurité et de défense.
Il me semble paradoxal de parler d’un second porte-avions sans mener une concertation avec les autres États membres de l’Union impliqués dans la défense européenne. L’objectif central de la politique commune est de renforcer la capacité de l’Union européenne à agir hors de ses frontières par le développement de ses capacités civiles et militaires en matière de prévention des conflits internationaux et de gestion des crises.
Au fil du temps, les capacités militaires doivent pouvoir être mises en commun entre les États membres. D’autres projets importants font déjà l’objet d’une coopération européenne : pourquoi n’en irait-il pas de même pour le second porte-avions ?
La France étudie systématiquement les possibilités de coopération européenne avant le lancement de tout programme d’armement. S’agissant du second porte-avions, des études communes avec les Britanniques ont déjà été menées.
L’exposé des motifs de l’amendement évoque la mise en commun des équipements existants, or c’est précisément ce qui a été fait sous présidence française de l’Union européenne avec l’initiative d’interopérabilité aéronavale européenne, l’IIAE.
Pour autant, seuls deux pays européens disposent de porte-avions ; si la France renonçait à construire un second porte-avions, je ne crois pas que l’Europe le ferait à sa place.
Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
La France se concertera bien entendu avec ses partenaires européens sur la question du second porte-avions. Toutes les possibilités de coopération seront explorées et les études qui avaient été menées avec nos amis britanniques seront reprises.
Par conséquent, l’amendement de Mme Voynet est inutile et le Gouvernement émet un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 35 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Supprimer le premier alinéa du 3.1.1 du rapport annexé.
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Il ne convient pas d’arrêter un chiffre précis concernant l’effectif global des armées à l’horizon de 2014, car nous ne savons pas ce qui peut se passer d’ici là. Mieux vaut donc laisser une certaine incertitude sur ce point.
L’un des objets essentiels d’un tel texte est de programmer les effectifs, afin qu’ils ne soient pas tributaires d’arbitrages budgétaires annuels.
Qui plus est, la programmation des effectifs est ici essentielle, puisqu’elle doit permettre un redéploiement des ressources au profit de l’équipement.
Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.
Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement. La réduction des effectifs fait partie intégrante de la loi de programmation militaire.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 36 rectifié, présenté par MM. Chevènement, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall, Charasse et Vendasi, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du 3.1.2 du rapport annexé, remplacer les mots :
de 88 000 personnes
par les mots :
d'au moins 88 000 personnes
La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.
Il s’agit d’un amendement à la marge.
Le rapport annexé précise que la composante terrestre constituera une force opérationnelle de 88 000 personnes à l’horizon de 2014, mais, dans le contexte économique actuel, nous pouvons mesurer toutes les difficultés liées aux reconversions. Ainsi, ne pas remplacer un fonctionnaire partant à la retraite sur deux risque de poser des problèmes.
Par conséquent, je suggère d’introduire un peu de souplesse dans des prévisions quelque peu mécaniques, en prévoyant plutôt, en l’occurrence, que l’armée de terre constituera une force « d’au moins 88 000 personnes ».
Il est prévu que la composante opérationnelle compte 88 000 hommes. L’amendement n° 36 rectifié vise à aller au-delà de ce chiffre, mais cela supposerait une augmentation de l’effectif global de l’armée de terre, fixé à 131 000 hommes. Nous sommes opposés à un tel accroissement, c’est pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.
L’effectif de la composante opérationnelle a été fixé à 88 000 personnels. Ce chiffre résulte d’une analyse capacitaire cohérente avec nos objectifs et nos moyens et n’a pas à être réévalué.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 67, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer le sixième alinéa du 3.1.2 du rapport annexé.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps l’amendement n° 68.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 68, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, et ainsi libellé :
Supprimer le septième alinéa du 3.1.2 du rapport annexé.
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Si la France a dû renoncer aux essais nucléaires réels, elle n’en continue pas moins de développer et de moderniser activement son armement nucléaire. C’est donc une pérennisation des armes nucléaires pour une très longue période qui est organisée.
Les alinéas visés du rapport annexé à l’article 2 sont relatifs à la panoplie de l’arsenal maritime nucléaire, notamment les sous-marins nucléaires. J’ai déjà indiqué tout à l’heure pourquoi je trouvais déraisonnable de poursuivre dans cette voie de la dissuasion nucléaire.
Le projet Barracuda est le plus important programme naval français de l’histoire. Son budget prévisionnel de 7, 87 milliards d’euros est supérieur à celui du projet des dix-sept frégates multimissions ou à celui des deux porte-avions. Seul le coût du programme des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins du type du Triomphant est nettement plus élevé.
Certes, au-delà du rappel de l’importance des sommes en jeu, nous ne partageons pas la même analyse sur l’utilité même de la dissuasion.
Cela étant, aux coûts de conception et de construction des matériels s’ajoute celui, supérieur à 650 millions d’euros, du chantier d’adaptation au M 51 de la base des SNLE, à l’Île-Longue. La modernisation de la force océanique stratégique, qui assure l’essentiel de la dissuasion nucléaire française, aura donc coûté un peu plus de 24 milliards d’euros. Même si la dépense est répartie sur une durée relativement longue, d’environ deux décennies, cela représente tout de même plus de 1 milliard d’euros d’équipements chaque année.
La commission est défavorable à ces amendements, qui constituent une remise en cause de la dissuasion nucléaire.
Avis défavorable également.
Je fais remarquer à Mme Voynet que l’arsenal maritime fait partie de notre dispositif de dissuasion, dont nous avons déjà souligné l’importance dans la politique de défense.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 69, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Compléter l'avant-dernier alinéa du 3.4.1. du rapport annexé par les mots :
, ainsi que l’acquisition de compétences linguistiques, historiques et culturelles
La parole est à Mme Dominique Voynet.
La mobilité inhérente au métier de militaire de carrière représente un atout indéniable en termes de ressources humaines.
L’acquisition de compétences linguistiques, historiques et culturelles revêt une grande importance. Lors des auditions auxquelles nous avons procédé en commission, l’accent a été très souvent mis sur l’intérêt capital d’une compréhension intime de la culture des pays dans lesquels nos troupes interviennent.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 70, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Au début du dernier alinéa du 3.4.1 du rapport annexé, supprimer les mots :
Pour répondre à ces objectifs de valorisation,
La parole est à Mme Dominique Voynet.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 99, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le dernier alinéa du 3.4.3 du rapport annexé par une phrase ainsi rédigée :
L'État veille à ce que les moyens consacrés à l'accompagnement social des réductions d'emploi évoluent de manière équilibrée et adaptée.
La parole est à M. Bernard Piras.
La mise en œuvre d’une politique des ressources humaines adaptée est une condition sine qua non du bon accomplissement de la profonde réforme de la défense en cours, qui implique des sacrifices pour les personnels civils et militaires. L’État a la responsabilité de mettre en place des incitations financières adéquates.
Il nous semble important que figure, au sein de toute la littérature du rapport annexé, des messages clairs à l’adresse des personnels de la défense.
L’alinéa 3.5.2 du rapport annexé comporte déjà les indications utiles à cet égard. Il précise en effet que le plan d’accompagnement des restructurations s’appliquera au moins jusqu’en 2014 et sera doté de 123 millions d’euros en 2009, de 146 millions d’euros en 2010 et de 149 millions d’euros en 2011.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 71, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Compléter l'intitulé du 3.4.3.1 du rapport annexé par les mots :
, représentant la diversité de la population
La parole est à Mme Dominique Voynet.
L’armée française a longtemps fonctionné comme un creuset républicain dans lequel se fondaient toutes les classes sociales. Les Français issus de l’immigration comptaient sur elle pour effacer les préjugés sociaux et culturels dont ils étaient l’objet. La France n’a jamais hésité à faire appel à ceux qui venaient d’Afrique ou d’ailleurs défendre le territoire hexagonal, souvent au prix de leur vie.
Le recrutement des jeunes militaires doit donc demeurer diversifié, afin que l’armée, qui accueille désormais des femmes, soit à l’image de la population française d’aujourd’hui. Elle est censée porter les valeurs de la République et doit donc refléter cette diversité dont nous sommes fiers.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 73, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du 3.4.3.1 du rapport annexé, après le mot :
élevé
insérer les mots :
et diversifié
et après le mot :
garantir
insérer les mots :
le respect des valeurs humaines et républicaines,
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Le débat n’est pas facile dans cet hémicycle, dans la mesure où l’on n’y est guère respectueux de la diversité des opinions. J’ai bien compris que j’étais minoritaire sur la dissuasion nucléaire, mais qu’importe !
M. Cambon juge ridicule un amendement…
… visant à insister sur la nécessité d’assurer la diversité des recrutements, qui représente un atout essentiel pour la crédibilité de l’armée aux yeux des jeunes.
Monsieur Cambon, l’histoire jugera qui de nous deux est le plus ridicule en l’occurrence. Quoi qu’il en soit, je voudrais que vous renonciez à ce genre d’épithètes tout à fait dégradantes. Le fait que vous n’ouvriez la bouche, pour la première fois de la matinée, que pour insulter un collègue n’est pas du meilleur aloi !
Cela étant dit, les arguments que j’ai employés pour défendre l’amendement précédent valent pour l’amendement n° 73.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Je veux préciser à Mme Voynet que notre armée est vraiment à l’image de la population française et qu’elle porte en elle toutes les valeurs de la République.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 100, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le 3.4.3.2 du rapport annexé par un alinéa ainsi rédigé :
Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement un rapport sur la reconversion des personnels de la défense.
La parole est à M. Michel Boutant.
Le ministère de la défense s’apprête à connaître une réduction très importante de son personnel, puisque 54 000 emplois vont être supprimés.
Dans cette perspective, il convient de veiller à la bonne marche, région par région, du processus de reconversion des personnels de la défense. Le Parlement doit être informé du déroulement de ce processus, qui conditionne les économies escomptées par le ministère.
Le texte prévoit déjà le dépôt d’un rapport annuel sur l’exécution de la loi de programmation militaire. Par conséquent, il ne paraît pas nécessaire de multiplier les rapports particuliers.
Je précise à notre collègue Michel Boutant, qui est nouveau dans cette assemblée, que le nombre des rapports demandés par les parlementaires est égal à celui des vœux pieux qu’ils émettent ! Depuis plus de vingt-six ans que je siège dans cet hémicycle, j’ai vu maintes demandes de ce type être acceptées pour rester ensuite lettre morte !
Monsieur Boutant, le deuxième alinéa du 7.2 du rapport annexé prévoit que le Gouvernement présentera chaque année au Parlement un rapport sur l’exécution de la loi de programmation militaire. L’amendement est donc inutile.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 101, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du 3.5.1 du rapport annexé, remplacer les mots :
d'environ 90 bases
par les mots :
d'un certain nombre de bases
La parole est à M. Didier Boulaud.
Il est vrai, monsieur de Rohan, que le nombre des rapports demandés par les parlementaires est significatif. Je vous rappelle cependant que certaines lois de programmation militaire, notamment la précédente, ont explicitement prévu la remise de rapports. Nous n’avions rien demandé : le Gouvernement lui-même l’avait proposé, même s’il n’a malheureusement jamais respecté son engagement. Les parlementaires seraient peut-être moins enclins à demander des rapports si le Gouvernement remettait effectivement ceux qu’il a promis !
Avec l’amendement n° 101, nous avons simplement anticipé largement l’information, puisque le ministre de la défense a lui-même déclaré, voilà quelques jours, que le nombre de bases de défense serait probablement réduit de quatre-vingt-dix à soixante-dix. De surcroît, en répondant hier aux différents orateurs au terme de la discussion générale, il semble même avoir indiqué que le chiffre final serait .encore inférieur.
Nous proposons donc de lui simplifier la vie en mettant le texte qu’il nous soumet en concordance avec ses propos !
L’adoption de cet amendement aurait pour conséquence de supprimer tout ordre de grandeur, ce qui nous semble inopportun.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Pour avoir suivi sur le terrain les restructurations menées dans le secteur de la défense, je dirai que le nombre de bases de défense sera probablement inférieur à quatre-vingt-dix.
Cela nous a été confirmé à la fois par M. le rapporteur et par M. le secrétaire d’État : il y aura moins de quatre-vingt-dix bases de défense. M. le ministre de la défense nous a même affirmé hier que leur nombre serait proche de soixante-dix, voire inférieur. Dans ces conditions, pourquoi s’entêter à inscrire ce chiffre de quatre-vingt-dix dans le texte, alors que l’on sait que ce seuil ne sera pas atteint ? À l’évidence, comme nous l’avons dit et répété hier, ce projet de loi relatif à la programmation militaire est d’ores et déjà caduc.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 102, présenté par MM. Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Voynet, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le 3.5.3 du rapport annexé, par un alinéa ainsi rédigé :
Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement un rapport sur le dispositif d'accompagnement territorial, exposant notamment les efforts accomplis en matière de contrats de redynamisation de sites de défense et de plans locaux de redynamisation.
La parole est à M. Daniel Reiner.
M. le rapporteur parlait à l’instant des vœux pieux des parlementaires : je vais m’inscrire dans ce climat de piété en suggérant que le Gouvernement présente chaque année au Parlement un rapport sur la mise en œuvre du dispositif d’accompagnement territorial, exposant notamment les efforts accomplis en matière de contrats de redynamisation.
Le rapport annexé prévoit que les territoires les plus touchés par les mesures de restructuration bénéficieront d’aides financières directes et de mesures fiscales. Il est également question de contrats de redynamisation de site de défense, les CRSD, à destination des communes ou des zones d’emploi les plus fragiles. Ainsi, les communes touchées par un nombre significatif de départs bénéficieront de plans locaux de redynamisation.
La mobilisation de sommes importantes, de l’ordre de 320 millions d’euros, dont 20 millions d’euros pour l’outre-mer, est envisagée pour la période 2009-2015.
À notre sens, l’impact de cette action sur les territoires doit être attentivement et régulièrement évalué. Je parle en connaissance de cause, puisque des plans de ce type se sont multipliés en Lorraine, sans toujours donner les résultats attendus…
Notre vœu pieux est d’être informés convenablement par le Gouvernement de l’application de ces mesures. Elles partent d’un bon sentiment, mais encore faut-il pouvoir mesurer leur efficacité.
L’application de chaque loi de programmation militaire a donné lieu à la remise d’un rapport. On ne peut donc pas dire que ce point ait été escamoté, bien au contraire.
En tout état de cause, la commission est défavorable à cet amendement. Le dépôt d’un rapport supplémentaire n’apporterait strictement rien.
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer explicitement que le rapport sur l’exécution de la loi relative à la programmation militaire comportera bien un volet sur la réorganisation territoriale ?
J’ai eu l’occasion de le dire au cours de la matinée, et je vous confirme que tel sera bien le cas, monsieur Reiner.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 75, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery, MM. Desessard, Muller, Boulaud, Carrère, Vantomme, Badinter, Berthou, Besson, Boutant, Reiner et Guérini, Mmes Cerisier-ben Guiga, Durrieu, Tasca et Klès, MM. Madrelle, Mauroy, Mazuir, Mermaz, Piras, Auban, Godefroy, Cazeau et les membres du groupe Socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Compléter le deuxième alinéa du 3.5.4 du rapport annexé par une phrase ainsi rédigée :
Dans le respect du droit commun, les sites affectés seront dépollués par le ministère de la défense, ou la vente sera amputée du prix de la dépollution.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Cet amendement ayant le même objet que ceux que j’ai déposés sur l’article 9, j’aurai donc le loisir de développer davantage mon propos lorsque celui-ci viendra en discussion.
Le deuxième alinéa du 3.5.4 du rapport annexé comporte une lacune évidente. Comment ne pas évoquer les nombreux exemples de sites militaires cédés par l’État ou restés en attente d’un repreneur pour lesquels l’État s’est défaussé de sa responsabilité environnementale et sanitaire ? À l’heure où le Gouvernement clame haut et fort ses ambitions dans ce domaine dans le cadre des travaux du Grenelle de l’environnement, il serait temps de concrétiser les grands discours par des actions déterminées et efficaces.
Prenons le seul cas du fort d’Aubervilliers, cédé par l’État en 1973 à l’Agence foncière et technique de la région parisienne, l’AFTRP. Les travaux d’assainissement radiologique n’ont débuté qu’en 1999, à un rythme tellement lent que j’ai posé en décembre 2005 une question écrite sur la dépollution de ce site à M. Perben, ministre compétent à l’époque. Il m’avait alors été confirmé que les déchets de contamination présents sur le site seraient totalement enlevés à la fin du mois de novembre 2006. Cependant, il a fallu attendre encore trois ans avant que le chantier ne soit achevé.
Les derniers fûts radioactifs ont été retirés voilà seulement moins d’un an, alors que, aux alentours du fort d’Aubervilliers, l’émotion est très forte, à la suite de la constatation, confirmée par la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales de la Seine-Saint-Denis, d’un grand nombre de cancers de nature différente : vingt-quatre pathologies cancéreuses ou thyroïdiennes ont été recensées parmi le personnel d’une école voisine, ainsi que trois cas de cancer infantile ces dernières années.
Il est reconnu que ce site a hébergé des activités de recherche sur les radionucléides. Le fort fait l’objet d’une surveillance par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire depuis 1994. Ce sont les élus locaux, placés en première ligne, qui ont dû interpeller sans trêve l’État pour obtenir une dépollution superficielle du site.
Il n’est pas déraisonnable de penser, à l’instar des élus de la ville, que ce site, sur lequel d’importantes activités ont été déployées par le passé – confection de bombes, laboratoire d’essences –, présente encore de nombreux polluants qui n’ont pas été cantonnés dans ces fûts collectés sur le tard.
Lorsque l’État fuit ses responsabilités environnementales, il en découle des conséquences dramatiques pour la salubrité et la santé publiques. Personne ne peut le nier, il s’agit d’un chantier de longue haleine. Ces sites sont très nombreux, et les moyens dévolus à leur traitement très limités. L’État devrait pour le moins affirmer sa volonté d’engager une politique de restauration de leur qualité environnementale et sanitaire. Quand un site est mis en vente, il doit être soit dépollué par le ministère de la défense, soit vendu à un prix qui permettra à l’acquéreur de financer cette dépollution.
Je l’ai dit, nous serons amenés à discuter plus profondément de ce point au moment de l’examen de l’article 9.
Nous aurons un débat spécifique sur la question de la dépollution des sites lors de l’examen de l’article 9 : peut-être aurions-nous pu faire l’économie de la discussion de cet amendement…
Il nous semble inutile de préciser que les coûts de dépollution seront défalqués du prix de la vente, puisque tel est bien entendu le cas lorsque l’acquéreur prend à sa charge les éventuels travaux de dépollution. L’avis de la commission est donc défavorable.
Je connais fort bien ce dossier pour avoir, dans mes fonctions antérieures, été chargé d’accompagner la restructuration de la défense.
Je puis assurer que, sur cette question, le ministère de la défense a été exemplaire. Conformément au vœu du Président de la République, nous cédons pour un euro symbolique les sites libérés, après dépollution. Par conséquent, le reproche que vous nous adressez de faire supporter le poids de celle-ci aux élus locaux ne se justifie plus, madame la sénatrice.
Les collectivités territoriales reçoivent parfois ainsi des sites magnifiques pour un euro symbolique. Je pense par exemple à celui qui se situe en plein cœur d’Arras.
M. Didier Boulaud. Ils ont bien de la chance ! Pour ma part, j’ai dû payer, il y a de cela dix ans. Vous me remboursez ?
Sourires
Étant moi-même maire d’une ville à vocation militaire, je connais bien le problème.
Pour avoir exercé des fonctions gouvernementales, vous connaissez, madame la sénatrice, le poids de Bercy et des impératifs comptables : la démarche n’a pas été facile à mettre en œuvre, mais, grâce à la volonté du Président de la République et du ministre de la défense, nous avons fait en sorte que les élus locaux ne soient pas doublement pénalisés, par le départ d’un régiment et par la vente du site militaire. Celui-ci est cédé en priorité aux collectivités territoriales pour un euro symbolique, après dépollution.
Certains dossiers ont effectivement relevé de mes responsabilités par le passé. Je puis vous dire que si l’État a la volonté d’être exemplaire, il l’est rarement, faute d’avoir effectué, pour nombre de sites, un diagnostic environnemental, pour des raisons que chacun comprend. Il faudra donc beaucoup de temps et d’argent pour assumer ce lourd héritage. En disant cela, je ne cherche nullement à vous agresser, monsieur le secrétaire d’État.
Il est effectivement avantageux pour les élus locaux d’acquérir certains de ces sites pour un euro symbolique, à condition que ces derniers ne soient pas pollués. À l’inverse, quand ils le sont, le coût de la dépollution excède souvent leur valeur patrimoniale et foncière. C’est notamment le cas pour le fort d’Aubervilliers et, plus généralement, pour les sites qui ont été occupés à une époque où l’on était totalement inconscient des conséquences sanitaires de certaines pratiques, notamment en matière nucléaire.
Vous avez tort de prendre ces observations pour des critiques, monsieur le secrétaire d’État. À l’heure du Grenelle de l’environnement, je voudrais simplement que nous soyons conscients de cette dimension, afin de préparer un avenir qui soit plus responsable que le passé ne l’a été.
L'amendement n'est pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.