La commission a procédé, sur le rapport de M. René Garrec, à l'examen en seconde lecture des amendements au projet de loi n° 422 (2006-2007), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en première lecture, portant création d'une délégation parlementaire au renseignement.
A l'article unique (création d'une délégation parlementaire au renseignement), la commission a examiné les amendements n°s 1, 2, 3 et 4 présentés par MM. Jean-Claude Peyronnet, Didier Boulaud, Pierre-Yves Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés tendant à :
porter de quatre à cinq le nombre respectif de députés et sénateurs membres de la délégation ;
préciser que la délégation recueille les informations utiles à l'accomplissement de sa mission ;
permettre l'audition par la délégation d'agents des services de renseignement en dehors de la présence de leurs directeurs ;
autoriser la délégation à connaître d'activités opérationnelles passées.
La commission a donné un avis défavorable sur ces quatre amendements rappelant que tous avaient été soit rejetés, soit repoussés lors de la première lecture au Sénat. M. Jean-Jacques Hyest, président, a invoqué la règle dite de « l'entonnoir » entre la première et la seconde lecture. Il a toutefois précisé qu'il serait répondu sur le fond à ces amendements lors de leur examen en séance publique.
Après l'article unique, la commission a examiné l'amendement n° 5 présenté par MM. Jean-Claude Peyronnet, Didier Boulaud, Pierre-Yves Collombat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés tendant à insérer un article additionnel prévoyant la transmission à la délégation du rapport de la commission de vérifications des fonds spéciaux. Pour les mêmes raisons, la commission a donné un avis défavorable.
La commission a procédé à l'audition de M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement sur le projet de loi n° 461 (2006-2007) relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a souligné que le projet de loi relatif à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile, préparé dès l'installation du gouvernement, était passé de 18 à 47 articles à l'Assemblée nationale, alors que la volonté du gouvernement n'avait pas été de présenter un texte de grande ampleur.
Il a indiqué que le projet de loi s'inscrivait dans le cadre de la volonté, qui avait également présidé à la création d'un ministère de l'immigration et de l'intégration, d'appliquer les engagements du président de la République tendant à instaurer une véritable politique de maîtrise des flux migratoires afin d'assurer une meilleure intégration des immigrés. Il a rappelé que cette politique reposait sur le choix d'une immigration choisie et concertée qui était tout le contraire d'une immigration zéro qui, comme le montrait l'exemple des Etats-Unis, n'était si souhaitable ni praticable.
Il a insisté sur le fait que l'immigration choisie s'opposait à l'immigration subie tant par les nationaux que par les étrangers en situation régulière ou les clandestins, ces derniers étant les premières victimes des réseaux d'immigration irrégulière.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a expliqué qu'une réelle politique de maîtrise des flux était nécessaire, car :
- le système d'intégration des immigrés en France a globalement échoué, comme le montre le fait que 60 % de la population étrangère se concentrent dans trois des vingt-deux régions françaises, et que le taux de chômage des immigrés atteint 20 à 22 % de la population active alors que celui des nationaux est de l'ordre de 8 %, ce taux étant même de 24 % pour les immigrés ayant suivi des études supérieures, contre 6 % pour les nationaux placés dans cette même situation ;
- la situation de la France est très différente de celles d'autres Etats, puisqu'elle dispose d'un des taux de fécondité les plus élevés d'Europe, notre pays n'ayant donc pas besoin de soutenir sa démographie par des flux extérieurs, à l'inverse d'autres pays ;
- la capacité d'accueil de la France est limitée, le déficit actuel de logements ne permettant pas, en particulier, l'hébergement des nouveaux arrivants ;
- les politiques de régularisation massives qui ont pu être pratiquées antérieurement, même si elles pouvaient apparaître légitimes en théorie, ont été en pratique un échec, induisant des effets d'appel d'air. Le ministre a souligné que certains responsables politiques de pays ayant appliqué de telles politiques, comme le sénateur italien D'Amato, y étaient désormais opposés. Il a constaté que, du fait de la régularisation intervenue en 1997, la demande d'asile en France avait explosé et que, malgré le quadruplement des places en centres d'accueil des demandeurs d'asile depuis 2002, 45 millions d'euros devaient être trouvés chaque année pour loger certains demandeurs dans des hôtels ;
- les Etats d'origine des immigrés souhaitaient eux-mêmes voir une nouvelle politique de régulation des flux se développer afin que leurs élites ne quittent pas en masse leur pays ;
- la France, contrairement à d'autres pays européens, tels l'Espagne et le Portugal, a une grande tradition d'immigration et a accueilli jusqu'à 400.000 immigrants par an sur son territoire, ce qui en fait, en valeur absolue, l'Etat ayant la population étrangère la plus importante des Etats européens.
Le ministre a souligné que le projet de loi entendait rééquilibrer l'immigration familiale et l'immigration de travail, relevant que sur 165.000 titres de séjour délivrés en 2005, 92.000 l'avaient été pour motif familial et 11.000 pour des motifs professionnels, précisant que la mission qui lui avait été confiée par le président de la République était de parvenir à un rééquilibrage dans les cinq ans.
Détaillant les principales mesures du projet de loi, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué qu'était prévue l'obligation pour les demandeurs d'un titre de séjour de se soumettre à un test de langue dans leur pays d'origine. Il a précisé que ce test, qui serait en pratique d'une durée de 15 minutes, conduirait, si le demandeur n'a pas un niveau satisfaisant, à l'obligation de suivre une formation de 80 à 180 heures dont l'assiduité serait un élément déterminant.
Il a insisté sur l'importance de disposer d'un niveau de langue suffisant, car il s'agit du vecteur essentiel d'intégration de l'étranger dans la société française. Il a relevé que, selon une enquête d'opinion, 74 % des personnes sondées approuvaient cette initiative. Il a ajouté que ce test et cette formation seraient financés par une augmentation générale des droits de timbre perçus sur les titres de séjours et les visas. Il a souligné qu'un tel test avait déjà été institué aux Pays-Bas.
Le ministre a souligné que le projet de loi prévoyait d'adapter les ressources nécessaires à l'obtention d'un regroupement familial, soulignant qu'une telle mesure avait déjà été adoptée par l'Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas et l'Italie. Il a souligné que cette disposition se justifiait par la nécessité d'assurer que la famille du demandeur au regroupement familial puisse avoir les moyens financiers de vivre dans des conditions satisfaisantes. Il a mis en exergue que si la version initiale du projet de loi prévoyait un plancher de ressources pouvant aller jusqu'à 1,2 SMIC, l'Assemblée nationale avait souhaité que ce plancher soit porté à 1,33 SMIC pour les familles de six personnes ou plus.
Il a indiqué que le projet de loi instaurait un contrat d'accueil et d'intégration pour la famille, destiné à mieux assurer l'intégration des enfants. Il a précisé que cette formation, assurée par l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), porterait sur les obligations attachées à l'autorité parentale, les obligations scolaires, la protection de l'enfance ainsi que les comportements réprimés tels que le mariage forcé, l'excision ou la polygamie. Il a souligné que le non-respect de ce contrat entraînerait la mise en place d'un accompagnement social, voire de manière progressive de la saisine du juge des enfants et la mise sous tutelle des allocations familiales.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a exposé que le second objet du projet de loi était de conforter la procédure d'examen des demandeurs d'asile. Soulignant qu'il était également chargé de l'asile, il a indiqué qu'il tenait à ce que la tradition d'accueil des réfugiés politiques en France soit respectée, insistant sur l'indépendance entre la régulation des flux migratoires et l'accueil des réfugiés.
Il a rappelé qu'en 2005, la France avait reçu 31.000 demandes d'asile, ce qui la plaçait au premier rang des Etats européens, alors que l'Allemagne et le Royaume-Uni n'avaient examiné respectivement que 21.000 et 28.000 demandes. Il a précisé que 124.000 personnes bénéficiaient en France du statut de réfugié.
Abordant les modifications apportées par l'Assemblée nationale, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a souligné que les députés avaient décidé à l'unanimité :
- l'institution d'une carte de résident permanent, d'une durée illimitée, à destination des étrangers séjournant en France depuis longtemps ;
- la généralisation, pour tout primo-arrivant signataire d'un contrat d'accueil et d'intégration, d'un bilan de compétences professionnelles personnalisé ;
- la régularisation, à titre exceptionnel, dans le cadre de l'admission exceptionnelle au séjour, d'immigrés sans papiers travaillant dans des domaines d'activité économiquement sous tension.
Le ministre a indiqué que l'Assemblée nationale avait également instauré un livret épargne codéveloppement, qui complétait le compte épargne codéveloppement prévu en 2006 à l'initiative du Sénat. Il a précisé que ce livret, ouvert à l'ensemble des étrangers résidant régulièrement en France, bénéficierait tant aux étrangers imposables qu'aux étrangers non imposables à l'impôt sur le revenu.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a souligné que l'Assemblée nationale, à l'initiative de deux députés désignés par leur assemblée pour siéger à la Commission nationale de l'informatique et des libertés, avait prévu la conduite, sous le contrôle de cette commission, d'études sur la mesure de la diversité des origines des personnes, de la discrimination et de l'intégration. Il a insisté sur la nécessité de pouvoir mesurer les discriminations fondées sur l'origine afin de mieux lutter contre elles.
Il a indiqué que les députés avaient abaissé d'un mois à 15 jours le délai de recours devant la Commission de recours des réfugiés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Il a relevé que cette mesure avait pour effet d'aligner le droit français sur celui de l'ensemble des Etats européens, le gouvernement s'en étant néanmoins remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
S'agissant du dispositif introduit par M. Thierry Mariani, permettant de recourir à un test ADN afin de prouver le lien de filiation dans le cadre d'une procédure de regroupement familial, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué que cette mesure ne figurait pas dans le texte initial du gouvernement, mais s'appuyait sur un état de fait incontestable : l'absence d'état civil fiable dans de nombreux pays.
Il a rappelé que le récent rapport d'information de M. Adrien Gouteyron au nom de la commission des finances du Sénat avait mis en exergue le fait que 30 à 80 % des actes vérifiés dans des pays tels que le Sénégal, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo, le Congo-Brazzaville, le Togo, Madagascar et les Comores étaient des faux, le rapport d'information de MM. Jean-René Lecerf et Charles Guené sur la nouvelle génération de documents d'identité et la fraude documentaire ayant également souligné, en 2005, cet état de fait. Il a indiqué que l'Etat et plusieurs collectivités territoriales aidaient déjà financièrement certains Etats d'émigration pour moderniser et renforcer l'efficacité de leur état-civil.
Il a exposé que le gouvernement avait souhaité encadrer le dispositif en précisant que le recours au test ADN ne pouvait qu'être une démarche volontaire de la part du demandeur et qu'à l'instar de ce que prévoit la législation suédoise, le coût de ce test serait remboursé si le visa est délivré. Il a ajouté qu'une « clause de rendez-vous » avait été prévue en 2010 pour que le Parlement puisse à nouveau débattre de cette mesure et que les conditions de mise en oeuvre de ce dispositif seraient évaluées par une commission composée de parlementaires, de magistrats et de personnalités qualifiées.
Il a précisé que, dans le cadre d'un regroupement familial concernant un enfant adopté, la procédure classique s'appliquerait, se fondant sur les actes d'état civil du pays d'origine.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué qu'au delà du projet de loi, deux questions devaient être soulevées qui devraient conduire, le cas échéant, à une révision de la Constitution :
- la possibilité de définir des plafonds chiffrés d'immigration à caractère normatif, soulignant que selon des sondages, 64 % des électeurs de Mme Ségolène Royal et 80 % des électeurs de M. Nicolas Sarkozy se montraient favorables à ce type de mesure ;
- la redéfinition de la compétence juridictionnelle en matière d'entrée, de séjour et d'éloignement des étrangers, actuellement répartie entre le juge administratif et le juge judiciaire.
s'est tout d'abord interrogé sur les évolutions de la commission de recours des réfugiés, en particulier quant à son autonomie budgétaire et administrative, mettant en exergue l'importance de cette instance au sein de la politique par la France en matière d'asile.
Il s'est ensuite félicité de la création d'un recours suspensif pour les demandeurs d'asile à la frontière, soulignant que l'Assemblée nationale avait amélioré le dispositif initial du projet de loi en adoptant une procédure inspirée de celle applicable aux arrêtés de reconduite à la frontière.
Il a enfin souhaité des précisions sur l'évaluation des tests accomplis par les primo-arrivants dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration, relevant les résultats encourageants dudit contrat après sa visite à l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM).
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a expliqué, d'une part, qu'afin de clarifier le rôle de la commission de recours des réfugiés, le projet de loi prévoyait d'en modifier le nom, en devenant la « Cour nationale du droit d'asile » et, d'autre part, qu'elle disposerait désormais d'une autonomie budgétaire.
S'agissant de l'instauration d'un recours suspensif contre les décisions de refus d'entrée au titre de l'asile, il a réaffirmé que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale avait obtenu l'aval du gouvernement et qu'il était pleinement conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme.
Insistant sur les difficultés d'obtenir des statistiques récentes sur le regroupement familial, M. Jean-Jacques Hyest, président, a souhaité savoir combien de personnes étaient concernées par ce mode d'acquisition d'un titre de séjour et quelle était sa répartition entre les conjoints et les enfants.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a confirmé qu'il était actuellement difficile d'obtenir des chiffres fiables en la matière, indiquant qu'environ 92.000 premiers titres de séjour auraient été délivrés en 2005, au titre de l'immigration familiale dans son ensemble à des ressortissants de pays tiers à l'Union européenne ; au titre du seul regroupement familial, environ 8.600 enfants en 2006 auraient été admis au séjour en France selon l'ANAEM. Il a expliqué que l'établissement des statistiques en matière d'immigration et d'asile serait désormais de la responsabilité du secrétaire général du ministère.
s'est tout d'abord interrogée sur le caractère urgent du projet de loi alors que toutes les mesures d'application de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration ne sont pas encore parues.
Rejoignant le constat du ministre sur l'échec de la politique d'intégration de la France, elle a constaté que le projet de loi ne prévoyait pour autant aucune évolution en la matière.
S'agissant de la maîtrise des flux migratoires, elle a ensuite souhaité savoir quelle était la politique des visas envisagée par le projet de loi.
Elle a également estimé contradictoire que le gouvernement souhaite lutter contre le « pillage », bien réel, des élites de certains pays tout en conservant la délivrance de la carte de séjour « compétences et talents ».
Elle s'est enfin demandé comment s'effectuait l'évaluation des connaissances des valeurs républicaines des primo-arrivants, cette appréciation lui paraissant très subjective.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, lui a indiqué que tous les décrets d'application de la loi du 24 juillet 2006 étaient parus, à l'exception d'un seul, relatif aux étrangers stagiaires.
Il a souligné que l'adoption du projet de loi aurait des conséquences sur la politique des visas puisque le bénéfice du regroupement familial serait, à l'avenir, refusé aux étrangers n'ayant pas suivi la formation linguistique et civique de deux mois prévue par le projet de loi.
Il a exposé que la carte de séjour portant la mention « compétence et talents », instituée par la loi du 24 juillet 2006 et accordée pour une durée de trois ans renouvelable une fois seulement, contribuerait non pas au pillage des élites des pays d'émigration mais à l'enrichissement de leur expérience professionnelle. Relevant que les professionnels de santé béninois étaient plus nombreux en France qu'au Bénin, il a souligné la nécessité d'aider les immigrés qualifiés à rentrer dans leur pays d'origine en soutenant les micro-projets.
a déclaré que la mise en place de quotas d'immigration ne le choquerait pas, compte tenu notamment de l'expérience canadienne en la matière.
Il a exprimé le souhait qu'une solution puisse être trouvée dès l'examen du projet de loi en première lecture par le Sénat pour unifier le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers, actuellement partagé entre les juridictions judiciaires et administratives.
Enfin, il a souligné que l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, permettant à un étranger candidat au regroupement familial de solliciter son identification par ses empreintes génétiques afin d'apporter un élément de preuve d'une filiation déclarée avec au moins l'un de ses deux parents, était contestable en raison, moins de l'atteinte somme toute minime à l'intégrité du corps humain, que du risque de remise en cause de la paix des familles. Après avoir rappelé qu'à la différence de la maternité, la paternité était généralement établie, selon l'adage pater is est, sur le fondement d'une simple présomption, il a observé que bien des hommes élevaient leurs enfants en croyant à tort être leur père biologique. Aussi, jugeant désastreuses les conséquences potentielles de cette analyse des empreintes génétiques sur la vie privée des candidats au regroupement familial, M. Pierre Fauchon s'est-il demandé si la mesure proposée n'était pas disproportionnée au regard du faible nombre d'enfants étrangers admis chaque année sur le territoire national.
Abondant en ce sens, M. Patrice Gélard a ajouté que la législation nationale de maints pays d'émigration interdisait le recours à l'analyse des empreintes génétiques. Le dispositif retenu par l'Assemblée nationale lui a donc semblé de nature à susciter d'insolubles conflits de loi. Il s'est de surcroît interrogé sur sa conformité à la Constitution du 4 octobre 1958, en rappelant que les analyses des empreintes génétiques ne pouvaient actuellement être réalisées, en France, que dans le cadre d'une procédure judiciaire, donc sous le contrôle d'un juge.
Souscrivant aux propos des deux orateurs précédents, M. Henri de Richemont a estimé en outre que la liberté de choix du candidat au regroupement familial serait inexistante si les modalités d'application du dispositif proposé par l'Assemblée nationale consistaient à ce qu'il soit informé par l'autorité diplomatique ou consulaire française qu'en l'absence de recours à une analyse de ses empreintes génétiques pour prouver son lien de filiation, sa demande de visa serait refusée. Par ailleurs, il s'est interrogé sur le sort réservé aux familles recomposées.
a dénoncé les conséquences désastreuses du recours à une analyse des empreintes génétiques pour les enfants qui découvriraient à cette occasion avoir été élevés par un homme qu'ils croyaient à tort être leur père biologique. Rappelant que « science sans conscience n'est que ruine de l'âme », il a estimé qu'il s'agissait là d'une bien mauvaise utilisation de la science.
a rappelé que l'analyse des empreintes génétiques, dans la mesure où elle constituait une atteinte au principe du respect du corps humain posé à l'article 16 du code civil, n'avait jusqu'à présent été introduite et admise que dans le cadre d'actions judiciaires aux fins d'établissement ou en contestation d'une filiation. Observant que la cellule familiale n'avait pas la même structure par exemple dans les pays africains qu'en France, il a souligné la nécessité de respecter les traditions de ces pays. Enfin, il a estimé que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale était soit inutilement coûteux soit dangereux, et risquait en tout état de cause de porter préjudice à l'image de la France dans les pays d'émigration.
s'est elle aussi interrogée sur le sort réservé aux familles recomposées dans le dispositif proposé par l'Assemblée nationale.
a ajouté que ce dispositif contribuerait à aggraver les dysfonctionnements des services consulaires français. Il a déploré les conditions d'accueil et les obligations parfois aberrantes imposées aux étrangers souhaitant obtenir un visa ou un titre de séjour, tant dans les consulats français, particulièrement en Russie, qu'à la préfecture de police de Paris.
En réponse à ces interventions, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a tout d'abord observé que le contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers représentait 40 % de l'augmentation de l'ensemble du contentieux devant les tribunaux administratifs en 2006. Il a indiqué que ce constat avait conduit le vice-président du Conseil d'Etat à s'interroger sur l'opportunité de créer des juridictions administratives spécialisées. L'unification du contentieux de l'entrée, du séjour et de l'éloignement des étrangers pouvant nécessiter une révision préalable de la Constitution, il a annoncé la création prochaine d'une commission de réflexion composée de parlementaires, de représentants des deux ordres de juridiction, de spécialistes du droit constitutionnel et d'experts des questions d'immigration.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a ensuite estimé que le recours à l'analyse des empreintes génétiques pour établir la filiation d'un candidat au regroupement familial pouvait s'avérer utile mais devait être encadré. A cet égard, il a suggéré de prévoir un avis du Comité consultatif national d'éthique sur le projet de décret d'application du dispositif proposé par l'Assemblée nationale.
Il a rappelé que ce dispositif s'inspirait de ceux retenus par douze pays membres de l'Union européenne.
a fait valoir que ces pays n'étaient pas confrontés aux mêmes flux migratoires que la France.
S'il a observé que le recours à l'analyse des empreintes génétiques était effectivement jusqu'à présent placé sous le contrôle du juge, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a estimé qu'il ne s'agissait pas là d'un principe constitutionnel.
Constatant que le manque de fiabilité de l'état civil pénalisait les ressortissants de certains Etats désireux de se rendre en France au titre du regroupement familial, il a souligné que l'analyse de leurs empreintes génétiques leur permettrait, à l'avenir, de faire rapidement la preuve de leur filiation pour obtenir un visa et un titre de séjour.
Il a observé qu'en mai 2007, le Haut comité pour les réfugiés, tout en rappelant que le regroupement familial constituait un droit pour les étrangers ayant migré, avait pris acte du développement inéluctable du recours à l'analyse des empreintes génétiques pour la mise en oeuvre de ce droit.
Enfin, convenant de la nécessité d'améliorer l'accueil des étrangers dans les consulats et dans les préfectures, M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a indiqué que l'attention des préfets avait été attirée sur ce point.
a souligné que le taux élevé de chômage de la population immigrée signait l'échec de la politique économique du Gouvernement, plus que la faillite de sa politique d'immigration. Il s'est interrogé sur l'opportunité de dispenser aux étrangers qui souhaitent venir en France une formation sur la langue française et les valeurs républicaines. Il s'est demandé si ce stage serait assorti d'une évaluation. Il a souhaité savoir pour quelle raison le projet de loi proposait de supprimer la possibilité -introduite au Sénat sur la proposition du regretté Jacques Pelletier dans la loi du 24 juillet 2006- pour un conjoint de ressortissant français de solliciter et d'obtenir en France un visa de long séjour. Il a jugé mesquin d'obliger ce demandeur à retourner dans son pays d'origine pour adresser sa demande de visa au consulat.
Après s'être félicité du renforcement de l'autonomie statutaire et budgétaire de la commission de recours des réfugiés, M. Jean-René Lecerf s'est inquiété de l'impact de cette réforme sur l'activité du conseil d'administration de l'OFPRA qui s'intéresse actuellement au fonctionnement tant de l'OFPRA que de la commission de recours des réfugiés. Il a craint que cette structure -qui fait l'honneur de notre démocratie- ne puisse plus traiter de la politique en matière d'asile.
Abordant la question de la définition d'un référentiel national de typologies ethno-raciales, M. Jean-René Lecerf a rappelé que lors de l'examen en première lecture de la loi relative à l'égalité des chances du 31 mars 2006, le Sénat -sur la proposition de la commission des lois- avait proposé un dispositif alternatif à celui de l'Assemblée nationale afin de permettre aux autorités publiques et aux personnes morales de droit privé d'utiliser un cadre de référence pour mesurer en leur sein la diversité des origines.
Ce cadre de référence aurait été établi conjointement par la HALDE, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et l'Institut national d'études démographiques (INED). Il aurait comporté une typologie des groupes de personnes susceptibles d'être discriminées à raison de leurs origines raciales ou ethniques. L'utilisation de ce dispositif pour le traitement de données à caractère personnel se serait accompagnée d'une procédure d'anonymisation reconnue certifiée conforme par la CNIL.
a fait valoir que la proposition du Sénat, plus opérationnelle, lui semblait meilleure que celle des députés, plus complexe.
En écho aux interrogations de son collègue Pierre-Yves Collombat, M. Jean-Pierre Sueur s'est déclaré surpris de ce que le projet de loi revienne sur l'avancée introduite par le Sénat en 2006 en faveur des conjoints de ressortissants français. Il a jugé la solution retenue par le Gouvernement très contraignante dans la mesure où elle conduirait ces derniers à retourner dans leur pays d'origine pour obtenir un visa de long séjour. Il a appelé l'attention du ministre sur la situation des mauritaniens en situation irrégulière sur le territoire français confrontés à l'impossibilité de retourner dans leur pays d'origine, ce dernier refusant de les accueillir sur son territoire.
Tout en estimant normal que le Gouvernement adresse des instructions aux préfets pour l'application de sa politique, M. Jean-Pierre Sueur a cependant jugé choquant la récente convocation par le ministre de l'immigration d'une vingtaine de préfets n'ayant pas atteint un certain quota de reconduites à la frontière. Il a dénoncé plus particulièrement la publicité donnée à cet évènement.
s'est également élevée contre la récente convocation des préfets par le ministre de l'immigration. S'il lui a semblé justifié que le Gouvernement demande aux préfets d'appliquer la loi, elle a jugé préoccupant de leur assigner des objectifs chiffrés pour y parvenir.
a exprimé la même réticence que ses collègues à l'égard de l'utilisation des empreintes génétiques pour établir l'existence d'une filiation, invitant le ministre à tenir compte des réserves précédemment formulées. Cette procédure ne lui a pas paru de nature à assurer un traitement digne des êtres humains.
a demandé au ministre de lui fournir un récapitulatif de l'évolution des entrées des étrangers sur le territoire français depuis 1974 ainsi qu'une estimation du nombre d'enfants étrangers présents en France au titre du regroupement familial. Elle a en effet estimé que seules les statistiques, à condition d'être fiables, permettaient d'avoir une idée du volume des flux migratoires. Elle s'est par ailleurs demandé quelle serait la réaction de la France si elle se voyait appliquer des mesures analogues à celles prévues par le projet de loi (maîtrise de la langue du pays d'accueil, utilisation des empreintes génétiques pour établir la filiation) par les pays accueillant ses ressortissants.
a estimé que l'utilisation de tests ADN pouvait apporter une réponse pragmatique pour prouver l'existence d'une filiation, faisant valoir que cette procédure fiable permettrait peut-être même aux consulats d'accorder plus facilement des visas.
ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, a fait valoir que la possibilité pour les conjoints de Français d'obtenir un visa de long séjour en France introduite en 2006 s'était révélée complexe à appliquer. Il a justifié la suppression de cette mesure par le souci d'assurer le respect du principe selon lequel l'obtention d'un visa de tourisme ne saurait constituer un droit à s'établir durablement sur le territoire national. Il a jugé nécessaire de mieux distinguer la procédure applicable aux demandes de visa de tourisme et celle applicable aux demandes de visa de long séjour, afin notamment de lutter contre les mariages de complaisance susceptibles de favoriser l'immigration clandestine. En outre, il a souligné la lourdeur de la procédure instituée en 2006 qui obligeait les préfets -qui n'étaient pas en mesure de traiter les demandes de visa- à recourir aux services consulaires.
Le ministre a enfin précisé que ceux des nouveaux conjoints de Français qui sont titulaires d'une carte de séjour temporaire, comme étudiant ou visiteur par exemple, pourraient changer de statut sans avoir à solliciter un visa de long séjour. L'étranger en situation irrégulière qui épouse en toute bonne foi un ressortissant français et se trouve dans l'impossibilité évidente de faire l'aller et retour avec son pays d'origine pour y solliciter un visa de long séjour pourrait en effet solliciter une admission exceptionnelle au séjour.
Il a précisé que le projet de loi n'interdisait pas au conseil d'administration de l'OFPRA d'examiner le fonctionnement et l'activité de la commission de recours des réfugiés, ajoutant que le projet de loi ne proposait pas d'en modifier la composition.
a souhaité que le ministre confirme cette analyse en séance publique lors de l'examen du texte.
S'agissant de la conduite d'études sur la diversité des origines des personnes, le ministre a insisté sur le rôle-clef de la Commission nationale informatique et libertés.
Il a ensuite souligné les efforts actuels pour conclure avec chacun des pays sources de l'immigration des accords bilatéraux traitant de tous les aspects de la politique d'immigration, l'objectif étant d'associer ces pays à notre politique de maîtrise des flux. Il a indiqué qu'un accord avait déjà été conclu et que plusieurs accords étaient en cours de négociation, notamment avec le Congo-Brazzaville et le Bénin.
Répondant à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Jean-Pierre Sueur, le ministre a déclaré que la publicité faite autour de la réunion de vingt préfets n'avait pas été programmée. Il a précisé que cette réunion visait à mieux comprendre les situations locales et à remobiliser les services de l'Etat dans la lutte contre l'immigration irrégulière, mais en aucun cas à pointer du doigt certains préfets.
Enfin, il a rappelé que la lutte contre l'immigration irrégulière passait également par la répression des employeurs de clandestins. A cet égard, il a mis en exergue que depuis le 1er juillet dernier les employeurs avaient l'obligation de s'assurer auprès de la préfecture de l'authenticité des autorisations de travail de leurs employés étrangers et qu'ils ne pouvaient donc plus échapper à leur responsabilité en déclarant avoir cru de bonne foi que leurs employés étaient en règle.