Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission procède à l'audition de MM. André Laignel, président du comité des finances locales, et Serge Morvan, directeur général des collectivités locales, sur l'évolution des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales.
La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017, adoptée en décembre dernier, prévoit une stabilisation de l'enveloppe normée en valeur, en 2013, avant une diminution de son montant d'au moins 750 millions d'euros en 2014 et en 2015, soit une baisse de 1,5 milliard d'euros en deux ans.
Le 12 février dernier, lors du Comité des finances locales (CFL), le Gouvernement a annoncé le doublement de cette baisse. Cet effort supplémentaire se chiffrerait à 750 millions d'euros en 2014 et 2015, soit un total de 1,5 milliard d'euros qui s'ajoute donc à la précédente baisse.
Je rappelle que la loi de programmation prévoit également que « les collectivités territoriales contribuent à l'effort de redressement des finances publiques selon des modalités à l'élaboration desquelles elles sont associées ».
Dans ce contexte, le rôle du CFL, au sein duquel notre commission des finances est représentée par nos collègues Gérard Miquel et Charles Guené, sera important.
Il a mis en place un groupe de travail consacré aux dotations, à la répartition des efforts d'économie entre collectivités, et à la péréquation. Les travaux sont en cours mais les conclusions doivent être rendues avant la fin du mois de juin afin de pouvoir s'intégrer de façon cohérente dans le processus d'élaboration du projet de loi de finances.
La commission des finances du Sénat souhaite s'impliquer dans ce débat et connaître les pistes qui pourraient être suivies, dans la continuité de nos précédents travaux.
Il est utile que nous vous entendions sur la façon dont vous envisagez cette baisse des dotations et sa répercussion pour chaque niveau de collectivités, qui doit faire face, vous le savez, à des difficultés différentes.
C'est pourquoi, nous renouons avec la tradition des auditions conjointes du président du CFL et du directeur général des collectivités locales ; la commission des finances avait organisé de telles auditions en 2011 pour participer aux réflexions menées alors sur la péréquation, thème éternel, toujours perfectible...
Je voudrais apporter quelques compléments sur notre principal sujet d'interrogation de cet après-midi. Jusqu'à présent, nous étions habitués à des dotations au moins stables, sinon en hausse. Dans le contexte que le président a rappelé, il convient, dès à présent, de définir les modalités d'application de la baisse annoncée des dotations.
Le Sénat, et particulièrement sa commission des finances, ont l'ambition d'apporter une contribution utile au débat. Nous l'avons fait sur le dossier de la révision des valeurs locatives et le Gouvernement nous a suivis. S'agissant de la péréquation, un certain nombre d'ajustements ont été adoptés par le Parlement à l'initiative de Pierre Jarlier, de Jean Germain, de Charles Guené et de plusieurs de nos collègues qui connaissent parfaitement bien tous ces sujets. Il y a, dans notre enceinte, une accumulation de connaissances qui peut être précieuse pour répondre aux différentes questions auxquelles nous devons faire face.
Nous savons que les dotations de l'Etat représentent 40 % des ressources des régions, ce qui les rend particulièrement vulnérables à toute diminution. Quant aux départements, la Cour des comptes a récemment souligné la fragilité de leurs finances, du fait notamment du financement des allocations de solidarité. S'agissant de l'échelon communal, dont certains estiment qu'il devrait porter à lui seul cet effort budgétaire, n'oublions pas qu'il assure 50 % de l'investissement public civil.
Il me semble donc que, vu l'ampleur de la baisse annoncée, il n'est pas réaliste de faire peser l'effort sur un seul niveau de collectivités.
Comment procéder ? On pourrait retenir le critère du poids respectif de chaque niveau de collectivités dans la dotation globale de fonctionnement (DGF). Vous nous direz comment vous comptez aborder cette première question.
Si on accepte une répartition de l'effort entre tous les niveaux de collectivités, il me semble que deux possibilités s'offrent à nous.
L'application d'un rabot uniforme, c'est-à-dire une réduction dans les mêmes proportions pour tous, au sein de chaque niveau de collectivités, me semble à proscrire. Cette solution, simple, voire simpliste, ne prend pas en considération les inégalités et les spécificités de nos territoires.
Je serai dès lors plutôt favorable à un rabot différencié, plus sélectif, qui permettrait d'envisager une répartition de l'effort en fonction des « capacités contributives » de chaque collectivité. La prise en compte de critères de richesse et de charges permettrait ainsi de ne pas remettre en cause l'objectif de péréquation.
Il ne me semble pas que l'on puisse, d'un côté, être favorable à la péréquation et, de l'autre, ne pas l'appliquer « à rebours » lorsqu'il s'agit de réduire les allocations aux collectivités.
Pour prendre en compte les richesses des collectivités tout en étant prêts pour le projet de loi de finances pour 2014, ne pourrait-on pas s'appuyer sur des critères à la fois récents, « objectifs » et équitables ? Les critères utilisés pour le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), ne pourraient-ils pas être utilisés comme paramètre pour évaluer les ponctions qui seraient appliquées aux différentes collectivités ?
Une autre question mérite d'être posée : faut-il ou non se limiter stricto sensu à la seule enveloppe normée ? Il faudra, je crois, chercher à faire des économies également du côté des dotations de compensation et de garantie, parce qu'on ne peut pas figer ainsi des montants et créer des sortes de rentes qui ne seraient jamais remises en cause.
Au-delà de ces questions, nous devons nous interroger, plus largement, sur la structure même des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales. Je suis convaincu qu'il faut repenser l'architecture de la DGF elle-même. A partir du moment où il y a une mise sous tension de l'ensemble des concours financiers et bien sûr de la DGF, qui en est la composante principale, ne faut-il la revisiter ?
Il faut tendre, assez rapidement, à une refondation des paramètres de la DGF, car ils sont aujourd'hui incompréhensibles. Nous avons de plus en plus de mal à expliquer les différences de montant de DGF par habitant entre les collectivités : ceux-ci varient parfois du simple au double ! Il y a, au-delà de la DGF, des éléments vieillis ou obsolètes, comme, par exemple, la dotation « instituteurs », alors que les professeurs des écoles ont remplacé les instituteurs voilà plus de vingt ans. C'est dire à quel point cette dotation commence à être datée sinon dans sa légitimité, du moins dans sa formulation.
Aussi, il est indispensable que nous nous orientions, à moyen terme, vers une réforme globale. Vous nous direz sans doute si cette refonte de la DGF est envisagée et les principes qui pourraient la guider.
Le coeur de notre audition porte sur les dotations, mais je voudrais d'abord remettre les choses en perspective.
Le Premier ministre a annoncé, au cours de la dernière Conférence nationale des finances locales, six chantiers, qui ont été confiés au CFL qui doit « rendre une copie » à la mi-juin. Comme vous l'indiquiez, cette échéance a été fixée afin d'être en cohérence avec la préparation du projet de loi de finances. Ces six chantiers sont :
- la répartition de la baisse des dotations entre niveaux de collectivités et à l'intérieur de chaque niveau ;
- l'évolution des dépenses contraintes, c'est-à-dire des charges nouvelles qui s'imposent aux collectivités ;
- l'amélioration du panier fiscal des régions qui doivent retrouver des ressources plus évolutives et élargir leur capacité d'autonomie fiscale ou financière ;
- la péréquation, ce chantier permanent et multiple ;
- l'amélioration de l'accès au crédit, même si beaucoup de choses ont déjà été faites ;
- l'évolution de la contractualisation entre l'Etat et les collectivités territoriales.
La charge de travail qui nous a été confiée et l'échéance retenue nous contraignent à une certaine modestie.
Je vais commencer par répondre au dernier point qui a été évoqué, à savoir la refonte de la DGF. C'est un chantier important qui mérite d'être engagé. Mais compte tenu des délais, il ne serait pas raisonnable de le mêler aux travaux que nous devons déjà conduire pour la fin du premier semestre et qui doivent trouver leur traduction dans la loi de finances initiale pour 2014.
Néanmoins, l'idée que ce chantier de clarification, de simplification et de justice doive être ouvert, je la partage, personnellement même si je ne peux pas engager le CFL. C'est une tâche de longue haleine et il sera utile, le moment venu, que nous puissions échanger sur le sujet. Vous me permettrez, pour aujourd'hui, de le laisser de côté.
S'agissant du sujet plus spécifique de la baisse des dotations, vous avez eu raison de souligner qu'il s'agit d'un exercice inconnu. C'est la première fois, en tout cas depuis que la DGF existe, que nous devons prendre en compte une baisse aussi importante des concours financiers de l'Etat.
Cette baisse des dotations s'élève à 1,5 milliard d'euros pour 2014, à l'issue de deux étapes. Je pourrais souhaiter que le Gouvernement revienne sur le doublement de cette baisse, mais, n'étant pas un rêveur, je prends en compte la réalité des choses !
Nous avons à répondre à deux questions : comment répartir cette diminution entre les niveaux de collectivités : régions, départements, bloc communal ? Puis, à l'intérieur de chacun des niveaux, comment la répartition doit-elle s'opérer ?
Une question subsidiaire - ce qui ne veut pas dire qu'elle n'est pas importante - a été posée par le rapporteur général : faut-il, à cette occasion, se livrer à un exercice de péréquation ou bien séparer les deux sujets ?
Le CFL n'a pas encore tranché ce point, dont nous aurons l'occasion de débattre demain, lors de la réunion du groupe de travail qui traite de cette question. En revanche, le Premier ministre a d'ores et déjà annoncé qu'il était exclu qu'un niveau de collectivités ne participe pas à l'effort général.
Quels critères faut-il retenir pour répartir l'effort ? Il y a celui des ressources et celui des dépenses.
Du côté des ressources, il faut faire des choix : on peut retenir le périmètre de la DGF seule, de l'enveloppe normée ou encore celui des compensations d'exonération. Du côté des dépenses, vous savez que c'est beaucoup plus complexe ...
L'association des maires de France (AMF) a fait une simulation - la seule dont je dispose - répartissant la baisse des dotations sur la base des ressources.
A cette aune, le bloc communal supporterait 57 % de l'effort global. Sur les 1,5 milliard d'euros de ponction, les communes et les intercommunalités se verraient privées de près de 860 millions d'euros en 2014. Il s'agit d'un ordre de grandeur et non d'une estimation fiable. Cette simulation est réalisée sur la base des chiffres actuels en ne comptabilisant, comme charges nouvelles, que les évolutions de la démographie et de l'intercommunalité.
Ainsi, la dotation de garantie serait en baisse d'environ 6 % et la dotation de compensation d'environ 11 %. Je vous laisse imaginer, en fonction des situations que vous connaissez, la traduction concrète pour les budgets concernés. En cumul jusqu'en 2015, la baisse de la dotation de compensation serait de 23,7 % et celle de la dotation de garantie de 11,6 %. Je me permets d'insister à nouveau sur le fait qu'il ne s'agit que d'une simulation. C'est néanmoins considérable, d'autant que les proportions seraient sans doute identiques pour les départements et les régions.
Par ailleurs, nous devons mettre en rapport ces chiffres avec le fait que les collectivités feront face à des charges nouvelles. Pour les premiers mois de l'année en cours, la commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) a d'ores et déjà pris acte d'environ 800 millions d'euros de charges nouvelles, qui ne comprennent ni la réforme des rythmes scolaires, ni l'impact de l'augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
Principalement la hausse de la cotisation à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), pour environ 700 millions d'euros. Pour le reste, il s'agit de toute une série de normes qui évoluent.
Le calcul de la CCEN prend uniquement en compte les actes réglementaires. Il ne comprend pas les mesures législatives, ni celles décidées au niveau européen. On estime au total que les charges nouvelles représenteront 1,8 milliard d'euros en 2014, dont 800 millions d'euros au titre de la réforme des rythmes scolaires. L'impact de la hausse de la TVA est très difficile à mesurer. S'agissant de l'investissement, nous espérons un ajustement des taux du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA) ; et s'agissant du fonctionnement, les achats des collectivités étant soumis à différents taux, les projections sont difficiles.
Et encore, ces chiffres ne prennent pas en compte la hausse des dépenses sociales. A ce titre, je voudrais préciser que cette dernière ne concerne pas que les départements, mais également les communes qui gèrent les centres communaux d'action sociale (CCAS). Dans une petite ville ouvrière comme la mienne, en deux ans, j'ai constaté une augmentation de 30 % de ces dépenses, à réglementation constante.
C'est tout à fait exact, mais, curieusement, les départements sont plus audibles que les communes sur cette question.
Bien évidemment, en matière sociale, les départements sont en première ligne. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de le dire, lorsque j'ai remis le rapport 2012 de l'Observatoire des finances locales. Je me permets simplement de souligner que si les départements font face à la hausse des dépenses sociales, ils ne sont pas les seuls : les communes sont également concernées.
Enfin, il faut prendre en compte l'inflation qui rogne, si ce n'est le pouvoir d'achat, du moins le « pouvoir d'action » des collectivités. L'ensemble des dotations représente environ 100 milliards d'euros, c'est donc 1,8 milliard d'euros de perte de « pouvoir d'action » du seul fait de l'inflation.
Au total, toutes ces sommes vont manquer aux collectivités, notamment pour leurs opérations d'investissement. Or, celles-ci représentent 75 % de l'investissement civil en France. Je tiens à préciser que, si cette proportion a augmenté, c'est en raison d'une diminution de l'investissement de l'Etat.
Tout en étant d'accord, pour l'essentiel, avec les observations du président André Laignel, je souhaiterais apporter quelques éléments complémentaires.
La différence entre la première diminution de dotation à hauteur de 750 millions d'euros prévue par la loi de programmation des finances publiques, et déjà votée par le Parlement, et la deuxième baisse de 750 millions d'euros, n'est pas seulement arithmétique. En effet, la loi de programmation des finances publiques prévoit explicitement une diminution de l'enveloppe normée à hauteur de 750 millions d'euros par an en 2014 et en 2015. En revanche, la deuxième baisse pourra s'imputer sur l'ensemble des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales. Cette différence est susceptible d'avoir un impact sur les différentes solutions à l'étude.
Les questions auxquelles nous devons répondre sont multiples. Tout d'abord, quelle sera la répartition de la baisse de DGF entre les différents niveaux de collectivités territoriales ? Les chiffres sont très proches selon que l'on prend en compte la proportion des ressources de la DGF de chaque collectivité, ou celle des dépenses globales. Du côté des recettes, la baisse de la DGF se répartit entre les communes et leurs groupements à hauteur de 57 %, les départements pour 30 % et les régions pour 13 %. Au prorata des dépenses globales, la répartition est la suivante : 56 % pour les communes, 30 % pour les départements et 12 % pour les régions, le total n'atteignant pas 100 % du fait des arrondis. La répartition est donc identique.
Mais doit-on considérer que les ressources et les dépenses sont toutes équivalentes, ou que les dépenses d'allocations, dites de solidarité nationale, doivent être exclues des calculs ?
Par ailleurs, doit-on prendre en compte le montant (ou stock) des dépenses globales, ou opérer une répartition selon l'évolution des dépenses de collectivités territoriales, ou encore retenir un critère mixte ? Comme l'observait le président André Laignel, une répartition selon le stock des dépenses globales, aboutit à une baisse de 840 à 870 millions d'euros de la DGF des communes et intercommunalités. Mais si l'on procède en prenant en compte l'évolution des dépenses, ce montant peut atteindre 1,1 milliard d'euros. Plusieurs scénarios seront ainsi présentés par mes services lors de la réunion, demain, du groupe de travail du CFL, ce qui donnera sans doute lieu à des débats intéressants.
Au sein du bloc des communes et des intercommunalités, doit-on considérer que les communes percevant la dotation de solidarité urbaine (DSU) cible et la dotation de solidarité rurale (DSR) cible doivent être totalement ou partiellement exonérées de la diminution des dotations, ou y contribuer de manière proportionnelle ? Doit-on faire appel aux critères du revenu par habitant, de l'effort fiscal et du potentiel financier, alors que le mode de calcul actuel du potentiel financier des départements est contesté ?
Un groupe de travail de l'Assemblée des départements de France (ADF) travaille à une modification éventuelle des critères qui déterminent le potentiel financier des départements en vue de soumettre des propositions au CFL et au Gouvernement. En tout état de cause, c'est lors de la réunion du groupe de travail prévue le 25 avril 2013 que sera abordée la question de la répartition de l'effort entre les collectivités territoriales de même niveau.
Par ailleurs, doit-on chercher à diminuer de 1,5 milliard d'euros la DGF globalement, ce qui inclut la dotation de base, les dotations de péréquation, ou des parties de la DGF - le complément garantie et la dotation de compensation de la suppression de la part salaires ? Car les chiffres restent les mêmes : par exemple, il faut répartir au sein du bloc communal une baisse de 860 millions d'euros, qui peut être ponctionnée soit sur les 23,8 milliards d'euros de la DGF, soit sur le seul complément de garantie, et les pourcentages sont alors, bien entendu, différents.
En outre, en dehors de la DGF, se pose la question des autres dotations, comme la dotation spéciale instituteurs (DSI) que vous avez citée et qui est constituée de deux parties : la compensation d'un logement mis à disposition par les communes et une indemnité pour les instituteurs non logés, étant entendu que la DSI est en extinction progressive.
Au sein de l'enveloppe normée, le cas particulier des variables d'ajustement, comme la dotation de compensation unifiée de taxe professionnelle, représente un enjeu chiffré à 1 milliard d'euros. Faire porter l'effort sur les variables d'ajustement soulèverait donc des difficultés particulières.
Une réforme de la dotation elle-même ferait débat. Quand la DGF a été créée en 1993, un principe de base avait été retenu pour surmonter les difficultés de répartition : la cristallisation des différentes parts de compensation de la péréquation qui existaient à l'époque. C'est pourquoi, la DSU, créée en 1991, et la DSR ont évolué séparément au sein d'une DGF qui était alors indexée sur la hausse des prix et la moitié de la croissance du produit intérieur brut (PIB). Faut-il revenir en arrière, et intégrer de la péréquation dès la dotation forfaitaire ? Il s'agit d'une piste de réflexion, qui n'est aujourd'hui qu'à l'état d'ébauche. Il me semble impossible de pouvoir faire aboutir ces chantiers à l'horizon du projet de loi de finances pour 2014, mais ce serait envisageable pour 2015.
S'agissant du poids des dépenses dites contraintes, un tiers des dépenses provenant de normes nouvelles est lié aux dépenses de personnel des collectivités locales ; il peut s'agir de la revalorisation du point d'indice, qui n'est certes pas d'actualité, ou des réformes du salaire minimum. Nos estimations de la hausse des dépenses imputables aux normes sont un peu différentes de celles de l'AMF. Pour 2013, nous les avons évaluées à 800 millions d'euros. Pour 2014, on doit prendre en compte des économies prévisibles de l'ordre de 200 millions d'euros, et le solde de dépenses liées aux normes nouvelles atteindrait donc près de 600 millions d'euros.
La parole est à Jean Germain, rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Si l'énoncé politique des mesures proposées est assez simple, les explications techniques apparaissent plus alambiquées. Nous ne savons pas quels sont les critères qui seront retenus. Pourtant, ces facteurs, sur lesquels les collectivités territoriales n'ont pas de prise, devront être intégrés dans la préparation des budgets locaux à la veille des élections municipales de mars 2014.
Sur la réforme de la DGF, le président du CFL a déclaré que le chantier de cette année était déjà important, alors que le directeur général des collectivités locales ne m'a pas semblé tenir tout à fait le même discours...
Si, et je tiens à préciser à nouveau le calendrier : une réforme de la DGF n'aura pas lieu avant 2015.
Il me semble nécessaire de réfléchir à de nouvelles ressources en-dehors des dotations de l'Etat aux collectivités locales. Indépendamment du contexte actuel de rigueur budgétaire, il est nécessaire de préserver les capacités d'investissement des collectivités en évitant de procéder à des hausses d'impôts locaux. Pour disposer de ressources nouvelles non fiscales, la production et la vente d'énergie sont une piste à explorer : si les gains ne sont pas immédiats, à terme, une collectivité locale produisant elle-même son énergie peut réaliser des économies chiffrables en millions d'euros.
S'agissant des départements, l'an dernier, après avoir réalisé des simulations et reçu les représentants de l'ADF, la commission des finances du Sénat avait décidé de réserver sa position concernant le potentiel financier des départements. Il est difficile de retenir des critères indiscutables pour définir la richesse ou la pauvreté d'un département, mais il faudra trouver un moyen de moduler l'effort des collectivités.
A cet égard, je suis très attaché à la prise en compte de l'effort fiscal : celui-ci est en effet une mesure de l'effort des citoyens. En 2013, nous avons remonté le niveau minimum à atteindre dans le cadre des mécanismes de péréquation de à 0,5 à 0,75. Nous pensons, Pierre Jarlier et moi-même, que ce critère devrait au moins approcher 1 pour 2014.
Il faut effectivement faire preuve d'imagination pour envisager des recettes nouvelles ne correspondant pas à des dotations et n'étant pas de nature fiscale. Les questions d'énergie offrent des perspectives inexplorées. Il y a aussi lieu de s'interroger sur les modulations de certains impôts aujourd'hui régis par des taux fixes nationaux, au regard de la diminution des marges de manoeuvre dont disposent les collectivités locales.
La parole est à Pierre Jarlier, l'autre rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Nous avons été quelque peu frustrés de l'absence de débat au Sénat sur la seconde partie du projet de loi de finances pour 2013.
Malgré le nécessaire redressement des finances publiques, beaucoup s'interrogent sur les limites d'une politique d'austérité. Dans ce contexte, est-il souhaitable d'opérer une ponction à hauteur de 1,5 milliard d'euros en 2014 sur les ressources des collectivités territoriales ? A-t-on mesuré les effets de ces mesures sur les investissements locaux ?
Je m'interroge aussi sur l'impact à l'intérieur de la DGF de la baisse de 1,5 milliard d'euros, avec des incidences extrêmement fortes sur la dotation de garantie et sur la dotation de compensation, ce qui posera de graves problèmes car ces dotations ne pèsent pas de la même façon pour toutes les collectivités. Certaines communes ayant une DGF élevée ne sont pas forcément riches. Comment la ponction de 1,5 milliard d'euros pourra-t-elle être opérée de façon équitable ? Ce débat est indissociable du renforcement de la péréquation verticale.
Même si nous n'engageons pas de réforme immédiate de la DGF, celle-ci sera nécessaire pour rendre cette baisse plus péréquatrice : il existe des solutions, comme resserrer l'écart de la dotation par habitant, articulée au coefficient logarithmique, ou augmenter la part de la dotation superficiaire, qui est extrêmement faible, alors qu'elle prend en compte les charges territoriales. Il est indispensable de renforcer la péréquation interne à la DGF en même temps qu'elle diminue dans sa globalité.
Par ailleurs, il est nécessaire de rechercher des ressources nouvelles et pérennes pour les collectivités : nous y travaillons au sein du groupe de travail du CFL.
S'agissant des départements, où en est-on de l'attribution de la deuxième part du fonds d'urgence qui est très attendue par les départements ruraux qui ont été fortement pénalisés par la première répartition du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Pourriez-vous nous donner une répartition, département par département, de l'impact du nouveau potentiel financier, de la diminution des bases liée à la baisse des transactions puisque nous disposons à présent des nouvelles bases de 2013, ainsi que sur les effets du fameux amendement dévastateur pour la péréquation, avec des modifications de critères apportées en dernière minute et dont nous n'avons pas eu la possibilité de débattre au Sénat ?
Enfin, sommes-nous disposés ou non à modifier les critères déterminant le potentiel financier des départements ? En effet, à l'aune de ce critère, certains départements de la région Ile-de-France pourraient être considérés comme pauvres. En tout état de cause, il est nécessaire d'adopter un nouveau mode de calcul pour avoir une évaluation de la richesse des départements fondée sur des critères objectifs.
En l'espèce, il n'existe plus, dans le monde des collectivités territoriales, aucun riche.
Et tout le monde doit faire un effort mais il faut se demander dans quelles conditions cette répartition doit se faire.
S'agissant des surcoûts normatifs, Nicolas Sarkozy nous avait promis le gel des normes. Le Gouvernement actuel semble sensible à la limitation du poids des normes, mais vous avez évoqué tout à l'heure le chiffre de 800 millions d'euros de charges supplémentaires pour les collectivités générées par ces seules normes. Je pose la question : quand arrête-t-on le massacre ?
Or, on constate que les cotisations sociales pour les élus vont alourdir les charges pesant sur les collectivités, alors que personne n'avait besoin de rien ! Il nous faut donc faire face à la fois à ces charges supplémentaires et à une baisse des dotations.
Ensuite, quelle répartition de l'effort voulons-nous ? Il faut que cette question soit examinée à la lumière des dépenses obligatoires. La dotation d'intercommunalité, cette dotation qui est essentiellement une dotation « carotte », incitative, et à laquelle ne correspond aucune charge, n'est pas de même nature que des dotations - insuffisantes - liées à des dépenses rendues obligatoires dans le cadre de la décentralisation. Ce sont deux types de ressources qui ne doivent pas être comparées. Donc voici ma proposition : l'intercommunalité bénéficie d'une dotation annuelle de 3 milliards d'euros pour financer de l'idéologie...
C'est très bien, il faut toujours faire les économies chez les autres ! C'est le meilleur des principes.
Monsieur le président, laissez-moi aller au bout de mon propos parce que vous ne pouvez pas le contredire.
Aujourd'hui, les intercommunalités touchent une indemnité « carotte », qui n'est pas liée à un transfert de charges. D'ailleurs, on va bien le voir, les nouvelles intercommunalités qui se créent dans le cadre du prochain projet de loi sur la décentralisation, n'ont aucune dépense supplémentaire, mais elles vont recevoir une dotation. Celle-ci ne correspond à aucune charge, c'est une récompense ! Alors que nous, départements, quand l'Etat nous dit que le revenu de solidarité active (RSA) est à notre charge, il ne s'agit pas d'une dépense « carotte » mais d'une dépense obligatoire et non compensée.
On entend ce discours depuis toujours, répété sur tous les bancs, sur tous les tons, et d'ailleurs en général plus par l'opposition que par la majorité, mais de toute façon, quand ce ne sont pas les uns, ce sont les autres, et c'est toujours la même chose !
Je vous remercie monsieur le président de me contredire dans mon exposé. Je suis le seul depuis vingt ans à tenir ici un raisonnement de chef d'entreprise : si on s'associe, c'est pour faire des économies et cela ne doit pas coûter davantage en fonctionnement. Les gouvernements, depuis toujours, ont utilisé la « carotte » en disant : « si vous vous associez, je vous donne de l'argent en plus pour fonctionner ». Je vous mets au défi de me contredire !
Or nous avons là 3 milliards d'euros de dépenses de fonctionnement de confort. Voici mes observations et mes propositions et j'espère qu'elles seront au procès-verbal, et notre échange également, monsieur le président, de telle sorte que nos héritiers s'en souviennent.
Par ailleurs, puisqu'on cherche à diminuer les dotations, on devrait créer les conditions d'une diminution de la dépense. J'avais proposé au Gouvernement précédent de modifier les mécanismes prévus dans le cadre de la passation des marchés. Vous avez souligné tout à l'heure l'importance des investissements des collectivités. Or, ceux-ci coûtent 20 % plus chers que lorsqu'ils sont faits par le secteur privé ! Pourquoi ? Parce que nous n'arrivons pas à faire comprendre que nous n'avons pas le droit d'utiliser des mécanismes de maîtrise de la dépense, car l'Etat a considéré que, s'agissant de l'attribution des marchés publics, les collectivités territoriales n'étaient pas des personnes responsables. En même temps que la baisse des dotations, c'est-à-dire des recettes des collectivités, on pourrait chercher à maîtriser les dépenses, et mettre en oeuvre des méthodes d'appel au marché qui permettent de rejoindre le prix de marché. Cela représente des dépenses d'un montant énorme, et je peux vous donner des exemples.
Ne touchez pas, Monsieur Morvan, aux variables d'ajustement, qui ont été le résultat de la parole de l'Etat car sinon, demain, vous aurez un problème puisque seul Philippe Marini pourra demander à bénéficier des dépôts de l'agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA).
Pour cela, il faut que la nature géologique des sols s'y prête, et dans les vallées, ce n'est pas possible !
Dans les extrapolations que l'on est en train faire, a-t-on évalué l'incidence de la modification des catégories d'établissements publics intercommunaux (EPCI) à fiscalité propre prévue par le projet de loi sur les métropoles ? Je pense en particulier aux fusions de communautés d'agglomération et de communautés de communes, à la création des métropoles, et aux dispositions relatives à la région parisienne qui va s'organiser en EPCI à fiscalité propre. Généralement, ces changements seront faits à un bon niveau, c'est-à-dire avec les valeurs de points les plus élevées, ce qui provoquera une augmentation des dotations d'intercommunalité.
Tout cela va se faire dans un même groupe, celui de l'intercommunalité : ne va-t-on pas faire face à un problème de financement des autres intercommunalités ? Les intercommunalités créées recevront des dotations de 40 euros par habitant alors que beaucoup d'autres ne touchent que 23 euros par habitant. A-t-on mesuré les effets de ces modifications structurelles ?
Nous devons nous placer dans le cadre d'un temps long, comme l'a indiqué Philippe Adnot en évoquant nos héritiers. Nous avons une terrible responsabilité. Nous n'avons jamais eu le courage de procéder à certaines réformes importantes. Or, la troisième étape de la décentralisation n'a rien à voir avec les deux précédentes, en raison du contexte dans lequel elle se situe. Notre commission des finances doit bien prendre conscience qu'il n'y a plus de cloison étanche entre la fiscalité de l'Etat, celle des collectivités territoriales, et les ressources des organismes sociaux.
D'autre part, nous avons mis en place, pendant des années, de nombreuses exonérations ; aussi, l'Etat est-il devenu le premier financeur des collectivités territoriales. Donc, dans une situation telle que celle que nous connaissons aujourd'hui, il est normal que le Gouvernement, quel qu'il soit, s'intéresse au budget qui finance les collectivités territoriales, qui est l'un des plus importants au sein du budget de l'Etat.
Je pense que dans un pays comme le nôtre, il ne peut pas y avoir de développement, de croissance, de solidarité et de cohésion si les collectivités territoriales ne sont pas actives. Je reconnais que ce principe ne fait pas l'unanimité. Il est donc important que les collectivités assument leurs pouvoirs. Ainsi, par exemple, il n'est pas normal que l'Etat finance nos agences d'urbanisme, nos agences de développement : il faut que les collectivités assument leurs responsabilités. De même, l'Etat ne doit pas financer la formation continue de la fonction publique territoriale, ce qui n'interdit pas les liens et solidarités entre l'Etat, les organismes sociaux et les collectivités.
Enfin, arrêtons de nous gargariser avec l'autonomie ! D'autant que, même parmi nous, certains confondent autonomie financière et autonomie fiscale...
C'est un péché courant.
Je suis très heureux que le Premier ministre ait anticipé la mise en place du Haut conseil des territoires, et vous avez rappelé, monsieur le président du CFL, les six chantiers annoncés à cette occasion. Je suis également très heureux que, suite à votre insistance, monsieur le rapporteur général, nous nous soyons engagés dans un processus de revalorisation des valeurs locatives. J'espère, monsieur le président de la commission des finances, que nous ne baisserons pas pavillon devant l'administration de Bercy, car le jour où, dans nos communes, les associations de consommateurs publieront le montant des taxes d'habitation, des taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties, nous aurons la révolution.
Enfin, régulièrement, les présidents de départements demandent une rallonge au Gouvernement : cela ne pourra pas continuer. Je plaide, même si je suis minoritaire, pour le respect d'un engagement qui proposait la fusion de l'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée (CSG). Vous n'y échapperez pas ! C'est comme pour l'impôt sur le revenu, il a fallu attendre juillet 1914, à quelques jours du déclenchement de la première guerre mondiale, pour que le Sénat, enfin sage, vote ce projet qui s'était perdu dans les limbes depuis très longtemps !
Concernant l'intercommunalité, Philippe Adnot, quand on développe les compétences des EPCI, en règle générale, on étend le service rendu, ainsi par exemple pour la collecte et le traitement des ordures ménagères, pour lesquels on est alors obligé de faire des dépenses supplémentaires. Mais je suis d'accord avec vous concernant les marchés d'appels d'offre et de maîtrise d'ouvrage : les collectivités ont, dans ce domaine, des efforts à faire. Les départements devraient donc avoir une mission de conseil et d'expertise auprès de communes et d'intercommunalités qui n'ont pas les moyens requis. Je pense en particulier, monsieur le président, aux négociations de délégations de service public que les collectivités sont susceptibles de passer avec de grandes entreprises nationales publiques. Je suis convaincu que, dans ce domaine, des avancées peuvent être faites.
S'agissant des normes, ma religion est faite : vous pourrez faire tous les rapports possibles sur les normes, cela n'aboutira pas car il faut prendre chaque norme, l'une après l'autre, et savoir qui en a décidé. Les normes peuvent aussi avoir un effet positif, de croissance, de modernisation ; ne les mettons pas toutes dans le même panier.
Je constate que nous traitons de ce sujet depuis 30 ans. Nous devons faire preuve aujourd'hui de responsabilité, et j'attends beaucoup du prochain projet de loi de finances. Mais le calendrier est-il pertinent, alors que des élections sont prévues en mars 2014 ?
Si nous ne résolvons pas ces questions, mes chers collègues, ce n'est pas la peine de parler de fiscalité locale, et nous aurons un système généralisé de dotations, ce qui n'est d'ailleurs pas anti-démocratique.
A la différence d'Edmond Hervé, je n'attends pas grand chose du projet de loi de finances pour 2014 concernant les dotations.
Ma question est liée à celle de Joël Bourdin. Y aura-t-il toujours, malgré la baisse des dotations, une prime au regroupement des intercommunalités ?
De plus, quels seront les montants de DGF par habitant à l'intérieur du bloc communal, entre les métropoles de demain, les communautés d'agglomération, les communautés de communes et les communes, en distinguant communes urbaines et communes rurales ?
Enfin, le projet de loi de décentralisation présenté ce matin en conseil des ministres a été découpé en trois projets, ce que le président de la commission des lois, Jean-Pierre Sueur a dit regretter. Vu le calendrier prévu, je me demande comment il est possible d'anticiper les baisses de dotations pour les différents blocs tant qu'on ne sait pas quelles seront les compétences de chacun d'entre eux ! Une dernière question : les travaux du CFL se limiteront-ils au projet de loi de finances pour 2014 ou s'intéresseront-ils aux années suivantes ?
En réponse à Jean Germain et s'agissant des critères sur lesquels fonder la baisse des dotations : quand on parle de la répartition des dotations, à la hausse comme à la baisse, la question est toujours celle des critères. Il faut savoir si on doit mêler baisse des dotations et péréquation ou si on traite ces deux sujets séparément. Le CFL est convaincu que la péréquation est une question essentielle. Je suis personnellement persuadé que nous rencontrerons de très grandes difficultés si nous voulons péréquer la baisse. Il faut un système le plus simple possible pour répartir la baisse des dotations, ce qui n'empêche pas, par ailleurs, d'améliorer les mécanismes de péréquation pour prendre en compte les éventuels impacts qu'aurait une application uniforme de la baisse des dotations. Vouloir mêler les deux opérations, c'est risquer, en raison d'une trop grande complexité, de ne jamais parvenir à un consensus ; or, le CFL fonctionne par consensus.
Sur la prise en compte de l'effort fiscal, j'avais plaidé l'année dernière pour que le curseur soit fixé à 1 pour qu'aucune collectivité ne puisse « tendre la sébile » si elle ne fait pas l'effort de lever autant d'impôts que la moyenne de la catégorie à laquelle elle appartient. J'ai le sentiment que le Premier ministre et le Gouvernement sont favorables à une telle évolution, et donc une telle disposition devrait figurer dans le projet de loi de finances initiale. Si ce n'est pas le cas, je serais favorable à ce que des amendements allant dans ce sens soient déposés.
S'agissant de la prise en compte du revenu par habitant : aujourd'hui, ce critère est pris en compte à hauteur de 20 % dans certains mécanismes de péréquation et en particulier dans le FPIC. Nous disposons, depuis hier, des chiffres du FPIC, et je pense qu'il sera intéressant de regarder quelles ont été les évolutions pour mesurer l'impact de la prise en compte de ce critère. Intuitivement, je pense qu'attribuer un poids de seulement 20 % à ce critère est peut-être un peu faible au regard des enjeux. Cette question doit être examinée et éventuellement éclairée par des simulations, pour savoir s'il faut améliorer le dispositif.
J'ai peu évoqué la question des départements dans la mesure où elle fait l'objet d'un groupe de travail spécifique, dont les propositions seront versées à la réflexion du CFL. Aujourd'hui, tous les arbitrages ne sont pas rendus.
En ce qui concerne les ressources nouvelles, je peux citer l'exemple de ma communauté de communes : la création de la première société d'économie mixte (SEM) dédiée aux énergies renouvelables permet de financer l'ensemble des dépenses favorisant l'économie d'énergie pour les années à venir, et probablement la mise en place prochaine d'un réseau de chaleur. Cet exemple, adapté à un territoire précis, n'est certes pas généralisable mais correspond à une solution nouvelle en dehors du champ des impôts et des dotations.
En réponse à Pierre Jarlier, qui s'interrogeait sur la possibilité d'une diminution du montant de la baisse des dotations, j'ai déclaré publiquement que cette baisse de la DGF représentait des dangers pour l'investissement. Je suis personnellement convaincu qu'un recul important des dotations qui perdurerait, malgré une hausse des charges, mettrait en péril les investissements locaux aujourd'hui très largement réalisés par les communes et leurs groupements. On observe en effet une hausse des investissements l'année précédant une élection, et une chute ensuite, qui risque d'être d'autant plus marquée qu'elle aura dû intégrer l'impact de la baisse de la DGF.
Intégrez-vous les subventions des départements dans les dépenses des communes ?
Oui, et celles-ci diminuent.
Dans mon département, les subventions aux communes s'élèvent à 14 millions d'euros par an.
Les remarques que j'ai formulées portent sur l'ensemble des dépenses d'investissement, quel que soit leur mode de financement.
Il s'agit de sujets éternels, où toute vérité est relative selon le point de vue adopté. Certes, les départements subventionnent les communes. Mais les communes ne contribuent-elles pas, sans que cela s'accompagne d'un pouvoir de décision, au financement des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) ?
En ce qui concerne la richesse et la pauvreté relatives des différents niveaux de collectivités, les champs de débat sont infinis.
Des données indiscutables figurent dans les comptes administratifs des collectivités locales.
En ce qui concerne les normes, comme Edmond Hervé l'a évoqué, il faut s'inscrire dans le temps long. Or, il y a urgence budgétaire à diminuer les dotations, malgré la prégnance des charges nouvelles. Le débat sur la simplification des normes est si ancien qu'il suscite un certain scepticisme, et même si nous parvenions à le trancher, sa mise en oeuvre ne produirait d'effets qu'à long terme.
La révision des valeurs cadastrales est un sujet tout aussi essentiel mais nécessitant du temps pour aboutir, et qui soulève la question de la justice fiscale entre les contribuables, mais elle n'aura pas forcément pour effet d'augmenter les ressources des collectivités locales.
Sur le sujet lourd que constituent les dotations des EPCI, nous n'aurons pas nécessairement de solution dès 2014. Pour les métropoles et les évolutions du fait urbain, comme pour l'accession des communes de la petite couronne parisienne à l'intercommunalité, les travaux prendront du temps et n'aboutiront sans doute qu'en 2016. Il s'agit d'une vraie préoccupation, d'autant plus que l'on observe des écarts de dotation moyenne entre les communes et leurs groupements à compétences similaires. Cette question devra être de nouveau abordée.
S'agissant de la prime au regroupement intercommunal, son évolution a été limitée à 5 % dans la loi de finances initiale pour 2013.
Lorsque l'on s'interroge sur la pertinence du montant de 1,5 milliard d'euros, il peut être rappelé qu'il représente 0,625 % des budgets locaux.
Concernant la deuxième partie du fonds d'urgence, les départements qui souhaitaient bénéficier de subventions exceptionnelles devaient déposer leurs dossiers en préfecture avant le 31 mars. Les préfectures avaient jusqu'au 8 avril pour les transmettre à la DGCL. 38 départements, représentant toutes les régions de France, comme la Seine-Saint-Denis, le Val-d'Oise et la Seine-Maritime, ont déposé des demandes. L'instruction est en cours avec l'appui du ministère de l'intérieur qui proposera une méthodologie d'analyse des critères pour définir quels départements seront éligibles. Deux critères sont inscrits dans la loi : l'évolution des dépenses sociales et l'existence de difficultés budgétaires spécifiques. Mais la surface financière du département sera bien évidemment aussi prise en compte. Comme pour l'effort fiscal, il est logique de considérer la capacité du département à assumer ces charges nouvelles. L'instruction devrait prendre un mois pour s'achever mi-mai et la notification des crédits correspondants est prévue en juin.
S'agissant de l'impact du nouveau potentiel financier sur les départements, celui-ci a déjà été utilisé l'an dernier dans le calcul des dotations et très peu d'écarts ont été observés avec l'ancien mode de calcul. Pour l'essentiel, il n'y a pas eu de modification de la hiérarchie des départements, mais plutôt un resserrement des moyennes par habitant.
Je regrette également que les débats sur les DMTO n'aient pas pu avoir lieu au Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013. Concernant les contributions, il n'y a eu aucune modification dans la loi de finances des critères préexistants, parmi lesquels ne figure pas le potentiel financier. La différence entre les données 2012 et 2013 reflète l'évolution du marché immobilier : les DMTO ont fortement baissé, à hauteur de 650 millions d'euros. Le fonds de péréquation des DMTO est doté de 239 millions d'euros cette année, contre 580 millions d'euros l'an passé, traduisant la baisse des produits et non un changement des critères d'éligibilité au fonds.
Le Gouvernement est prêt à accepter, sur le principe, une modification des critères de potentiel financier, mais une discussion sera évidemment à engager dans le cadre de la préparation et de l'examen du projet de loi de finances.
J'en viens à la question de Philippe Adnot sur des dépenses obligatoires des départements. Nous en avons déjà parlé lorsque nous avons abordé les divers scénarios de répartition de l'effort qui pourront être proposés. Il en va de même pour les variables d'ajustement.
La question a été posée de savoir si l'on a évalué le coût du projet de loi sur les métropoles et l'impact de la création des métropoles sur la DGF. Oui, nous l'avons fait. Au 1er janvier 2015 - les métropoles ne seront pas créées avant cette date compte tenu des délais nécessaires à leur mise en place - le coût serait de 36 millions d'euros. C'est beaucoup et peu à la fois - si l'on compare ce chiffre aux 1,5 milliard d'euros évoqué précédemment.
En fait, la plupart des métropoles sont déjà des communautés urbaines, le montant de la dotation par habitant sera donc exactement le même. Il y aura un impact financier uniquement dans le cas où des communautés d'agglomération deviendront des métropoles.
Le cas particulier de Marseille pourrait se révéler plus coûteux. Le projet de loi, à ce jour, prévoit la fusion des six EPCI en un seul. Ces six EPCI sont des communautés d'agglomération, des syndicats d'agglomération nouvelle et une communauté urbaine. De ce fait, si l'on prend comme valeur de base la dotation par habitant de la communauté urbaine, le coût sera alors d'environ 35 millions d'euros sur l'ensemble de la DGF.
Paris et la région Île-de-France n'engendrent aucun coût supplémentaire avant le 1er janvier 2016. En effet, il faut d'abord constituer les commissions départementales de coopération intercommunale et la commission régionale de coopération intercommunale. En un mot, il faut d'abord que l'intercommunalité soit achevée en Île-de-France. On pourrait faire le calcul, mais il ne s'inscrit pas dans la même temporalité que les cas évoqués précédemment.
S'agissant de savoir si l'on va maintenir la « prime à la fusion », je rappelle qu'elle a déjà été largement encadrée par la loi de finances pour 2013, qui permet de bénéficier d'un « bonus » de 5 %. Aujourd'hui, il n'est pas prévu de revenir sur cette disposition. Ceci étant dit, l'essentiel du regroupement intercommunal est achevé. Il n'existe plus aujourd'hui que 53 communes isolées, en dehors de l'Île-de-France. Je précise d'ailleurs que l'augmentation de la population intercommunale augmente la DGF intercommunale. S'agissant des fusions, la plupart des opérations sont déjà engagées et, par conséquent, le coût en 2014 ne sera pas supérieur à celui de 2013. Il n'y a donc pas de raison que nous revenions sur cette disposition, sauf si le Parlement le décide.
Enfin, faut-il associer péréquation et baisse des dotations ? C'est évidemment très difficile car il s'agirait de mener deux opérations complexes en même temps. De surcroît, la péréquation pourrait s'opérer sur des critères nouveaux. Néanmoins, si l'on voulait mener à bien cette double opération, il faudrait prendre en compte deux éléments :
- la péréquation verticale : dans le cadre du fonctionnement de l'enveloppe normée, l'augmentation de la DSU - ou de la DSR - en 2014 par rapport à 2013 va forcément s'imputer sur l'enveloppe normée de 50 milliards d'euros ;
- l'évolution des fonds de péréquation, dits horizontaux, dont le FPIC, abondé aujourd'hui à hauteur de 360 millions d'euros. La loi prévoit que ce montant soit porté à hauteur de 570 millions d'euros en 2014. Par conséquent, si l'on ne touche pas à la péréquation verticale, faudra-t-il renforcer la péréquation horizontale ? Et, en cas de réponse par l'affirmative, dans quelle mesure ? Je n'ai pas de réponses à ce stade. Les arbitrages n'ont pas été rendus et je ne peux guère plus m'avancer.
Merci infiniment. Compte tenu de la multiplicité des sujets évoqués, je crois que nous serons appelés à nous revoir souvent.