La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Nathalie Delattre.
La séance est reprise.
Mes chers collègues, vous allez malgré vous devoir inaugurer ce soir ma première présidence de séance. Je vous remercie par avance de votre indulgence.
Applaudissements.
Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 de notre règlement. Il concerne la proposition de contrepartie aux aides publiques que nous avions formulée dans le cadre des débats sur les déficits de la sécurité sociale.
L’entreprise Bridgestone, établie à Béthune, dans le Pas-de-Calais, a touché des fonds publics et a bénéficié du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). La direction du groupe, située au Japon, refuse aujourd’hui de reprendre le site et laisse tomber les 863 salariés de l’entreprise, alors que les habitants du Pas-de-Calais vivent déjà une situation bien compliquée. On sait qu’un emploi industriel représente trois à quatre emplois perdus, sans compter la détresse des familles.
Cependant, tout espoir n’est pas perdu : quatre groupes industriels, situés le premier en Turquie, le deuxième en Chine, et les deux deniers en Inde, ont fait des propositions pour reprendre le site, car ils souhaitent asseoir leur position en Europe dans le secteur du pneumatique.
Nous demandons à l’État de prendre complètement la main sur ce dossier. J’ai formulé cette demande auprès de la ministre déléguée, chargée de l’industrie, qui est venue ce matin rencontrer les élus du territoire. Nous comptons sur l’État pour garantir le sérieux des propositions de reprise, pour continuer la prospection et pour contraindre Bridgestone à accepter la cession du site pour un euro symbolique.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
Dans la discussion des articles, nous sommes parvenus, au sein de l’article 16, à l’examen de l’amendement n° 483 rectifié ter.
TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2021
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Chapitre III
Créer la nouvelle branche Autonomie
L’amendement n° 483 rectifié ter, présenté par Mme Lubin, M. Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mme Féret, M. Marie, Mme Poumirol, MM. Bourgi, Montaugé, Tissot, Cozic, Redon-Sarrazy, Temal et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly, est ainsi libellé :
Alinéa 28
Compléter cet alinéa par les mots :
, comprenant notamment les rénovations des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes publics définis au I de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles, le développement d’accueils de jour au sein de ceux-ci, la création de résidences autonomie comme définies au III de l’article L. 313-12 du même code ainsi que de structures de répit au sens du 7° du I de l’article L. 312-1 dudit code, sur l’ensemble du territoire
La parole est à Mme Monique Lubin.
Selon une enquête menée par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), en 2015, la construction ou dernière rénovation des bâtiments des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) dataient de plus de vingt-cinq ans dans 23 % des cas. De plus, les éléments de confort différaient entre les établissements publics et privés : si les Ehpad privés offraient quasiment exclusivement des chambres individuelles avec sanitaires privatifs, 11 % des places en Ehpad étaient en chambre partagée et 25 % n’avaient pas de douche privative.
Par conséquent, cet amendement vise à faciliter la rénovation de ces structures en allouant des financements à cette mission, que nous souhaiterions voir attribuer à la CNSA.
Cet amendement tend à prévoir que, dans la mesure où la CNSA finance les établissements médico-sociaux, elle a aussi pour rôle de contribuer à leur rénovation, à la création d’accueils de jour, de résidences autonomie et de structures de répit.
Cependant, la CNSA contribue déjà à de telles actions, via les plans d’aide à l’investissement.
De plus, la réécriture de l’article 16 à l’occasion de ce PLFSS vise surtout à clarifier le code de l’action sociale et des familles pour permettre à la CNSA d’exercer sa mission de gestionnaire de la branche.
Par conséquent, et bien qu’elle soit sensible aux difficultés qui sont mentionnées, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Cet amendement est satisfait. En effet, l’alinéa 29 prévoit d’ores et déjà le financement par la CNSA des aides à l’investissement, pour l’ensemble des établissements et services médico-sociaux.
Par ailleurs, la rénovation des Ehpad reste une priorité pour le Gouvernement, qui a prévu à cet effet une enveloppe de 2, 1 milliards d’euros sur cinq ans, dans le Ségur de la santé.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.
L’amendement n° 483 rectifié ter est retiré.
L’amendement n° 153, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 35, seconde phrase
Après les mots :
elle peut contribuer
insérer les mots :
au financement d’actions contractualisées avec les conseils départementaux et les métropoles pour la transformation inclusive de l’offre médico-sociale ou d’autres formes d’habitat dans leurs domaines de compétence, ainsi qu’
La parole est à M. le rapporteur.
L’article 16 reprend les dispositions actuelles donnant à la CNSA la compétence de contribuer au financement de l’habitat inclusif. Ce financement prend aujourd’hui la forme du forfait pour l’habitat inclusif, attribué à la personne morale chargée d’assurer le projet de vie sociale et partagée.
La CNSA doit également pouvoir accompagner les initiatives des conseils départementaux et des métropoles dans leurs responsabilités de transformation de l’offre médico-sociale ou d’autres formes d’habitat pour les personnes vulnérables. Elle doit même pouvoir évoluer vers le pilotage d’une politique de l’habitat en leur faveur, comme le suggère le rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom, publié au mois de juin dernier.
Monsieur le rapporteur, vous demandez d’étendre les dépenses d’intervention de la CNSA au financement des initiatives déployées par les conseils départementaux et les métropoles en faveur de l’habitat inclusif. Je rejoins votre souhait de poursuive le développement de cette nouvelle forme d’habitat, qui a initié un profond changement de perspective. Désormais, la lutte contre l’isolement, la pluralité de l’offre et, surtout, le maintien du lien social sont des outils à part entière de la prévention de la perte d’autonomie.
De nombreux porteurs de projets et acteurs institutionnels sont prêts. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.
De façon complémentaire, l’amendement gouvernemental n° 601, sur lequel la commission des affaires sociales a émis un avis favorable, vise à déployer dès le 1er janvier le dispositif proposé dans le rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 154, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 65
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Au deuxième alinéa de l’article L. 233-2, les mots : « mentionné au 2° de l’article L. 14-10-10 » sont remplacés par les mots : « correspondant aux autres actions de prévention mentionnées aux 1°, 4° et 6° de l’article L. 233-1 » ;
…° Au troisième alinéa du III de l’article L. 313-12, les mots : « et dans la limite des crédits correspondants attribués en application de l’article L. 14-10-10 » sont supprimés ;
…° L’article L. 521-2, le 1° de l’article L. 531-1, l’article L. 581-10 et le X de l’article L. 541-4 sont abrogés.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement vise à modifier certaines dispositions du code de l’action sociale et des familles pour les mettre en cohérence avec la nouvelle codification mise en place à l’article 16 du PLFSS.
Je rappelle qu’une disposition habilitant le Gouvernement à prendre une ordonnance a précisément été prévue à cet effet. Elle a vocation à basculer les dispositions relatives à la CNSA du code de l’action sociale et des familles vers le code de la sécurité sociale. La codification sera réalisée à droit constant.
Cette ordonnance permettra aussi de regrouper l’ensemble des dispositions relatives aux caisses nationales du régime général de la sécurité sociale au sein d’un même code, à savoir le code de la sécurité sociale.
Les dispositions du code de l’action sociale et des familles concernées par cette codification seront modifiées en cohérence.
Par conséquent, monsieur le rapporteur, si vous en êtes d’accord, je vous proposerai de retirer cet amendement, qui me semble satisfait, puisque les actions de coordination entre le code de la sécurité sociale et le code de l’action sociale et des familles sont prévues par le recours à ordonnance.
La commission a décidé de proposer de supprimer les recours aux ordonnances. Par cohérence, je maintiens cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 130 rectifié ter est présenté par Mme Guidez, M. Le Nay, Mmes de La Provôté et Canayer, M. Bonhomme, Mme Bonfanti-Dossat, M. Louault, Mme Billon, MM. Decool et Cigolotti, Mmes Férat et Sollogoub, MM. S. Demilly et Henno, Mmes Micouleau, Thomas, F. Gerbaud, L. Darcos, Dindar et Gatel, MM. Guerriau, Détraigne, Milon, Kern et Menonville, Mme V. Boyer, MM. Bonne, Pellevat, Gremillet et Rapin, Mme Jacquemet, MM. Delcros, Duffourg et Poadja et Mme Di Folco.
L’amendement n° 1014 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 72, première phrase
Remplacer le taux :
par le taux :
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 130 rectifié ter.
Cet amendement vise à financer la branche autonomie de la sécurité sociale en rehaussant la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA). Le doublement de cette contribution permettra d’abonder la branche de près de 3 milliards d’euros. En conséquence, davantage d’actions en faveur de l’autonomie des personnes âgées ou handicapées prévues par cette cinquième branche pourront être financées.
La branche autonomie, créée à l’été 2020, ne bénéficie pas de financement pérenne, mais d’un simple redéploiement de crédit. Le rapport Libault a mis en avant le fait que 10 milliards d’euros annuels seraient nécessaires pour financer correctement la dépendance et la perte d’autonomie.
Cet amendement vise donc à pérenniser les financements de la branche autonomie de la sécurité sociale en remplaçant, de manière strictement proportionnelle, une partie de la fraction de CSG allouée au financement des recettes de la CNSA.
À ce jour, la CSA est due dans le cadre de la « journée de solidarité », journée supplémentaire de travail non rémunérée pour les salariés. Elle rapporte près de 3 milliards d’euros annuels. En 2020, la journée de solidarité devrait permettre de collecter 2, 948 milliards d’euros au profit de la CNSA. Le doublement de la CSA de 0, 3 % à 0, 6 % permettra ainsi d’obtenir des financements directs pour la cinquième branche.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 1014.
Depuis la création de la CNSA, les contributions reposent majoritairement sur les retraités, via la CSG et la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie. Nous dénonçons cet état de fait à chaque PLFSS, car il est inacceptable que la solidarité intergénérationnelle ne soit pas mobilisée s’agissant de l’autonomie.
Cette année, l’article 16 du texte introduit de la nouveauté en créant la cinquième branche. Il n’en reste pas moins que ce sont toujours les retraités qui contribuent à l’autonomie, à hauteur de 90 %.
Cette situation n’est digne ni des ambitions affichées dans le rapport Libault ni de celles du Gouvernement.
Le groupe CRCE propose depuis des années qu’une contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie prise sur les revenus des actionnaires et de la finance soit mise en place. Une telle mesure contribuerait à faire de l’autonomie un enjeu de société. Le principe des quatre branches de la sécurité sociale est : à chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins. Il semblerait que la cinquième branche, à peine créée, dérogerait déjà à cet impératif.
Augmenter le taux de prélèvement de 0, 3 % à 0, 6 % serait une mesure de justice et d’équité.
Relever le taux de la CSA aurait pour effet d’augmenter la contribution des employeurs, ce qui se traduira automatiquement par une augmentation du coût du travail. Est-ce la bonne direction ? On peut se poser la question.
Les employeurs ne sont pas favorables à l’idée de participer à cette nouvelle branche. Une conférence des financeurs est prévue. Nous aurons bientôt à examiner la loi Grand âge et autonomie. Mieux vaut donc attendre d’avoir débattu entre nous et avec les partenaires sociaux avant de prendre des décisions en matière de financement.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 130 rectifié ter et 1014.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 718 rectifié est présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 918 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 78
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
« Section …
« Contribution sur les successions et les donations
« Art. L. 137 - … . – Il est créé une contribution dont la mission est de financer une partie des besoins de dépense en autonomie.
« Cette contribution est dénommée contribution sur les successions et les donations et son taux est fixé, dès le premier euro, à 1 % sur l’actif net taxable. Les modalités de recouvrement sont réalisées dans les conditions déterminées par l’article 750 ter du code général des impôts.
« La contribution sur les successions et les donations est affectée à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie telle que mentionnée à l’article L. 14-10-1 du code de l’action sociale et des familles. » ;
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 718 rectifié.
Je pense connaître le sort qui sera réservé à cet amendement ; M. le rapporteur général évoquera probablement la conférence des financeurs !
Cependant, cet amendement tend à mettre en place une contribution de 1 % sur les successions et les donations.
Nous n’avons de cesse de le répéter depuis le début de l’examen de l’article 16 : même si la création de la cinquième branche est une étape historique, son financement n’est pas satisfaisant.
L’amendement vient compléter la rubrique des solutions de ressources propres, en prévoyant une contribution qui a l’avantage de ne pas taxer les actifs, pour financer des prestations sociales qui concernent majoritairement des personnes âgées. Cela pourrait rapporter près de 3 milliards d’euros à la branche et contribuer ainsi, en partie seulement, à répondre aux besoins.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 918 rectifié.
On nous dit qu’il faut attendre la conférence des financeurs pour arbitrer parmi les propositions du rapport Libault.
Cependant, vous vous êtes engagés à ouvrir les travaux du Laroque de l’autonomie, et vous avez promis une loi Grand âge et autonomie sans prévoir de ressource en 2021. Les conclusions n’ont pas pu être incluses dans le Ségur de la santé, ce qui est très dommageable. Comme d’habitude, le social et le médico-social doivent attendre. Espérons que ces conclusions arriveront en 2021 et qu’elles induiront un coût.
Cet amendement prévoit de financer le surcroît de dépenses de 2021 par une contribution assise sur les droits de succession et de donation.
Le Ségur de la santé a prévu une enveloppe de 2, 1 milliards d’euros pour financer les Ehpad, qu’il s’agisse de la revalorisation des salaires, de l’achat d’équipements ou de l’amélioration du taux d’encadrement. C’est la raison pour laquelle vous avez demandé que des amendements soient retirés, considérant qu’ils étaient satisfaits.
Pour autant, cette enveloppe ne pourra pas servir à financer les mesures que préconiseront les conclusions des travaux du Laroque, ni celles de la loi Grand âge et autonomie. Il faut donc annoncer cartes sur table qu’en 2021 il n’y aura aucun financement de plus que ceux qui ont déjà été donnés aux établissements médico-sociaux. Le secteur devra s’en contenter, ainsi que des 150 millions d’euros qui lui ont été alloués.
Voilà pourquoi il est essentiel de trouver des ressources supplémentaires pour 2021.
Nous pourrions passer toute la soirée à annoncer de nouvelles mesures de financement. Le champ est ouvert. Je pourrais d’ailleurs vous réciter le rapport Vachey.
Cependant, le moment est-il bien choisi pour tout « mettre à plat » alors que la conférence des financeurs n’a pas encore eu lieu ? En effet, tout le monde n’est pas forcément d’accord avec toutes les mesures préconisées dans ce rapport. Nous ne pouvons pas procéder en sélectionnant en fonction des préférences de chacun.
Je reste profondément convaincu que nous arriverons à définir un périmètre beaucoup plus ambitieux que celui qui est aujourd’hui proposé ; il se limite à faire le constat de ce qui existe. Il faut forcément de l’ambition pour créer une cinquième branche. J’attends d’avoir l’avis du Gouvernement sur ce point. Quoi qu’il en soit, la loi Grand âge et autonomie ne s’inscrira évidemment pas dans le même périmètre que ce que nous votons ce soir.
Si l’on a créé la cinquième branche, c’est pour aller jusqu’au bout. Voilà des années qu’on y pense ! Même sous la présidence de M. Giscard d’Estaing, on parlait déjà de cinquième branche ou de cinquième risque. Les gouvernements se sont succédé, de droite comme de gauche, et ont laissé l’idée en plan. Aujourd’hui, je salue celui qui a eu le courage de commencer ; nous continuerons.
Pour autant, la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements.
Je tiens à remercier M. le rapporteur général de ses propos, et à vous confirmer toute l’ambition du Gouvernement. Je ne peux que me réjouir et être optimiste, tout comme Mme Doineau tout à l’heure, sur le fait que nous initions tous ensemble un chantier qui a été longtemps repoussé, mais qui n’en est pas moins nécessaire.
L’ambition du Gouvernement est bien là. Les investissements que nous faisons en témoignent. Madame Poncet Monge, le Ségur consacre 1, 5 milliard d’euros par an à la revalorisation des salaires dans les Ehpad, auxquels s’ajoutent 2, 5 milliards d’euros sur cinq ans pour les investissements nécessaires.
Toutefois, pour les raisons que j’ai pu exposer, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Cela a été rappelé, c’est dans le cadre d’un texte relatif à la dette sociale, prévoyant notamment de reprendre une partie de la dette des hôpitaux, qu’on nous a proposé au mois de juillet dernier, au détour d’un amendement, la création de la cinquième branche. Le Gouvernement a aussitôt précisé qu’il s’agissait d’une coquille vide qu’il faudrait remplir, et qu’il ferait le nécessaire pour cela.
Voilà qu’au cours de l’examen du PLFSS, cet article extrêmement intéressant nous offre l’occasion de réfléchir à la manière dont nous pourrions remplir la coquille. Nous vous faisons des propositions, mais dès qu’il s’agit de prévoir des solutions financières, vous repoussez toutes nos solutions, qu’elles soient acceptables ou pas, en nous disant d’attendre la conférence des financeurs. Pourquoi donc soumettre ce texte à notre examen si nous n’avons rien le droit de dire ?
Applaudissements sur des travées des groupes SER et CRCE.
Le chapitre III crée la nouvelle branche autonomie. Nous sommes en plein examen du texte, et les propositions quant au financement de cette branche sont nombreuses. Il s’agissait en effet initialement d’une coquille vide, que nous devions remplir. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons des sources de financement. Vous les rejetez systématiquement au motif qu’il faudra attendre la conférence des financeurs.
Je suis sans doute un peu novice au Sénat, mais j’avais cru comprendre que c’était lors de l’examen du budget que nous pouvions faire des propositions de recettes ou de dépenses. Les nombreux renvois que vous faites à la conférence des financeurs signifient-ils que nous devons envisager l’examen d’un PLFSS rectificatif, assez rapidement, pendant l’année 2021, où nous pourrions enfin aborder la question du financement de la branche autonomie ?
Je mets aux voix les amendements identiques n° 718 rectifié et 918 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 717 rectifié, présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 78
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 137 - … . – Il est institué une contribution de solidarité de la finance pour l’autonomie au taux de 1 % assise sur les revenus distribués au sens des articles 109 et 120 du code général des impôts. » ;
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Simplement, au mois d’octobre dernier, la commission des affaires sociales auditionnait Mme la ministre Brigitte Bourguignon en salle Monory. Celle-ci nous a affirmé que ce PLFSS, débattu au Parlement, ne signerait nullement la fin des travaux sur cette branche, qu’il s’agisse de son périmètre ou de son financement.
Cet amendement vise à créer une contribution de 1 % assise sur les revenus des capitaux mobiliers pour financer la cinquième branche. Son rendement attendu serait de 1, 5 milliard d’euros.
Puisque la prise en charge digne des personnes âgées et des personnes handicapées le nécessite, nous demandons au Gouvernement de renoncer à sa doctrine : refuser d’opérer des prélèvements supplémentaires tout en plafonnant l’imposition des plus aisés avec la flat tax.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons que précédemment.
Peut-être a-t-on mis la charrue avant les bœufs. C’est possible. Quoi qu’il en soit, il me semble préférable, en termes de méthode, d’organiser une conférence des financeurs et d’en revenir au rapport Vachey pour aboutir à un bouquet de propositions dont nous pourrons débattre et dont certaines pourront peut-être faire l’objet d’un avis favorable de la part du Gouvernement.
Je ne suis pas d’accord quand j’entends dire que nous avons pris les choses à l’envers. En créant la cinquième branche, nous posons d’abord les fondations, sur lesquelles nous allons, ensemble, construire les différents étages d’une maison solide et qui tiendra longtemps.
Monsieur Milon, le texte n’est pas totalement dénué de sens, puisque, d’une part, un certain nombre de vos amendements ont été adoptés, notamment sur le périmètre des missions de la CNSA, et, d’autre part, ce texte consacre 2, 5 milliards d’euros au financement de cette branche. Ce n’est pas tous les jours, ni même tous les ans – même si, moi aussi, je suis assez novice, madame la présidente – que l’on est en mesure de proposer ce type de dispositif.
Vous avez raison, madame Meunier, le périmètre et le financement de cette branche prennent corps au cours des débats, mais cela ne s’arrêtera pas là. Au travers de la conférence de financement et du projet de loi sur l’autonomie, nous aurons l’occasion, avec l’ensemble des acteurs, de poursuivre ces discussions et d’enrichir la cinquième branche, qui, à mesure que le temps passe, est de moins en moins une coquille vide.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
J’ai l’impression qu’on est hors sol, là ! On n’est pas en train de faire un exercice sur la façon de construire, dans l’absolu, hors du réel, une cinquième branche ! Dans le réel, il y a besoin d’argent pour la dépendance, pour le fonctionnement des Ehpad et pour l’ensemble des politiques à mener dans ce domaine ! Par conséquent, le renvoi permanent à la conférence des financeurs est une mesure dilatoire. Rien n’empêcherait de voter des recettes et de continuer le chemin pour améliorer le dispositif, même si – cela a été dit précédemment – on a complètement inversé la donne.
Vous êtes très content des montants que vous annoncez, mais cela ne permettra pas de créer les postes nécessaires. Que cela améliore les rémunérations, c’est très bien, mais les problèmes dans les Ehpad ne font que s’accroître, …
… sans parler des autres éléments de la politique de l’autonomie.
La réalité, c’est que le Gouvernement – et peut-être aussi nos collègues de la majorité sénatoriale – est arcbouté sur l’idée de n’augmenter aucun impôt. Je ne sais donc pas par quel miracle, par quelle opération du Saint-Esprit, on trouvera des ressources abondantes pour répondre aux besoins de la dépendance, car, quand on cherche des recettes, en général, excusez-moi, ça s’appelle l’impôt…
Vous ne voulez pas faire ce choix ; vous préférez laisser en l’état un service dysfonctionnant, qui pose de graves problèmes, pour des raisons idéologiques. C’est ça, la réalité ! Basta !
Le réel, c’est 183 euros par mois en plus pour le personnel de tous les Ehpad ; le réel, c’est 400 millions d’euros d’investissement ; le réel, c’est 300 millions d’euros destinés à augmenter le taux d’encadrement ; le réel, c’est 200 millions d’euros consacrés à l’aide à domicile !
Vous pouvez dire que tout cela est hors sol, madame la sénatrice, mais ces chiffres sont très concrets et auront un impact pour la vie des salariés et des résidents. Vous ne pouvez pas le nier, ce sont des faits !
M. Bernard Bonne. J’en viens à me demander si l’on n’aurait pas dû voter la suppression de l’article…
Sourires approbat eurs sur les travées des groupes SER et CRCE.
Quant aux 200 millions d’euros affectés à l’aide à domicile, je l’ai dit précédemment, cela ne répond pas non plus aux difficultés que l’on aura, demain, pour maintenir les personnes à leur domicile.
C’est donc vraiment une coquille vide, répétons-le, et chaque proposition d’affecter un peu d’argent à la nouvelle cinquième branche est refusée. Vous avez demandé un rapport – le rapport Vachey –, mais on n’en utilise absolument pas les conclusions.
Je commence donc à regretter un peu de ne pas avoir voté la suppression de l’article…
Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et SER.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 155, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 80
Avant les mots :
la Caisse
insérer le mot :
de
La parole est à M. le rapporteur général.
L ’ amendement est adopté.
Je suis saisie de sept amendements identiques.
L’amendement n° 131 rectifié quater est présenté par Mme Guidez, M. Le Nay, Mmes de La Provôté, Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Louault et Moga, Mme Billon, MM. Decool, Delahaye et Cigolotti, Mmes Férat et Sollogoub, MM. S. Demilly et Henno, Mmes Micouleau, Puissat, L. Darcos, Dindar et Gatel, MM. Guerriau, Détraigne, Milon, Kern, Menonville et Pellevat, Mmes C. Fournier et Jacquemet et MM. Gremillet, H. Leroy, Poadja et Duffourg.
L’amendement n° 458 rectifié quater est présenté par Mmes Lassarade et Deseyne, M. B. Fournier, Mmes Deromedi et Dumas, MM. Panunzi, Brisson et D. Laurent, Mme Raimond-Pavero, MM. Mandelli et Savary, Mmes Lherbier, Garriaud-Maylam et Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et Cuypers.
L’amendement n° 477 rectifié ter est présenté par Mme Lubin, MM. Tissot et Antiste, Mmes Van Heghe, Lepage et Jasmin, MM. Jeansannetas et Kerrouche, Mme Préville, M. Vaugrenard, Mme Féret, MM. Marie, Montaugé et Bourgi, Mme Poumirol, MM. Cozic, Redon-Sarrazy et Dagbert, Mme Monier et M. P. Joly.
L’amendement n° 640 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° 674 rectifié bis est présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier, Frassa, Bascher et Daubresse, Mme Joseph, MM. Anglars et Bouchet, Mme F. Gerbaud, M. Houpert, Mmes Drexler et Thomas et MM. Segouin, Genet, Charon et Bouloux.
L’amendement n° 919 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 1030 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces sept amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 90 et 91
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour présenter l’amendement n° 131 rectifié quater.
Il s’agit d’un sujet sensible.
Aux termes de l’article 5 de la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie gère la cinquième branche de la sécurité sociale consacrée au financement de la politique de soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Plus précisément, cet article prévoit que la CNSA gère un nombre limité d’enveloppes, sans recettes affectées, correspondant à de grandes catégories de dépenses. Celles-ci recouvrent la totalité des dépenses actuellement dans le périmètre de la CNSA, dont l’OGD, l’objectif global de dépenses, et les concours versés aux départements au titre de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH), mais également l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH).
L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est une prestation en espèces de la branche famille destinée à « toute personne qui assume la charge d’un enfant handicapé […], si l’incapacité permanente de l’enfant est au moins égale à un taux déterminé.
« Un complément d’allocation est accordé pour l’enfant atteint d’un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours fréquent à l’aide d’une tierce personne. Son montant varie suivant l’importance des dépenses supplémentaires engagées ou la permanence de l’aide nécessaire. »
Afin de faire évoluer cette prestation, l’IGAS a été chargée d’une mission relative à la compensation pour les enfants en situation de handicap, dont l’objectif premier était d’aboutir à une « évolution de l’AEEH et de la PCH Enfant et de leur articulation ». Le rapport de cette mission, remis par Daniel Lenoir en juin 2019, identifiait les problématiques et proposait des scénarios, qui n’ont pas fait l’objet de concertations à ce stade.
Le rapport de Laurent Vachey préconise le transfert de l’AEEH à la branche autonomie, ce que traduit cet article, qui acte ce transfert et le motive, dans le dossier de presse, par le fait que cela « permettra de simplifier les démarches des familles en poursuivant le rapprochement entre cette allocation et la prestation de compensation du handicap ».
Or l’AEEH constitue une allocation familiale correspondant à une situation de la famille, au même titre que l’allocation de soutien familial permet de prendre en compte le fait d’être un parent isolé ou que l’allocation de rentrée scolaire permet de tenir compte du fait d’avoir un enfant scolarisé. Certains éléments des compléments de l’AEEH relèvent néanmoins de besoins de compensation – aides humaines ou techniques, frais spécifiques ou autres –, quand d’autres permettent à un parent de réduire ou de cesser son activité professionnelle afin de s’occuper de l’enfant ou d’avoir recours à l’embauche d’une tierce personne rémunérée. Certains éléments pourraient donc être transférés dans la branche autonomie pour créer une véritable PCH Enfant. Néanmoins, cela ne pourrait se faire qu’après les concertations attendues depuis la remise de rapport de l’IGAS.
C’est pourquoi cet amendement vise à supprimer les alinéas organisant ce transfert, afin de repousser cette décision au terme des concertations qui décideront d’intégrer l’AEEH, en tout ou partie, au travers de l’ordonnance prévue par le III de l’article visé. Cette suppression doit s’accompagner de l’engagement du Gouvernement à entamer des concertations sur le sujet.
La parole est à Mme Florence Lassarade, pour présenter l’amendement n° 458 rectifié quater.
Je me contenterai de résumer ce qu’a déjà indiqué ma collègue, qui a largement détaillé le sujet.
L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé est une prestation familiale, comme il en existe d’autres. D’autres éléments composant l’AEEH relèvent de besoins de compensation, qui pourraient être transférés dans la branche autonomie, afin de créer une véritable prestation de compensation Enfant.
Il s’agit donc de susciter une réflexion, d’engager une concertation avec les associations, qui a commencé mais qui doit s’approfondir, pour transférer cette AEEH, ou non, au sein de la branche autonomie.
La parole est à Mme Monique Lubin, pour présenter l’amendement n° 477 rectifié ter.
L’amendement n° 640 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 674 rectifié bis.
Cet amendement vise à supprimer la reprise, par la nouvelle branche autonomie, de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, ce qui rejoint la position des associations familiales et des associations intervenant dans le champ du handicap.
L’évolution dont on parle nécessite une concertation préalable avec les familles et les associations intervenant dans le champ du handicap, qui n’a pas eu lieu pour l’instant. En effet, la compensation des charges et la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle sont deux objectifs majeurs de la politique familiale.
L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé vise à compenser les dépenses liées à une situation de handicap d’un enfant et les pertes de salaires subies par les parents, qui sont bien souvent dans l’obligation de réduire leur activité professionnelle. J’aurai donc deux questions : pourquoi écarter ces parents d’une politique familiale globale ? Cette mesure ne risque-t-elle pas de dissocier handicap et dimension familiale ?
Si l’on suivait cette logique jusqu’au bout, ce serait l’ensemble des dépenses liées au handicap et intégrées dans le champ des prestations familiales qui devrait alors être pris en charge par la branche autonomie. Ce serait ainsi le cas d’autres prestations familiales, comme le complément de libre choix du mode de garde, majoré pour les parents d’enfants en situation de handicap, ou encore le bonus inclusion handicap pour l’équipement d’accueil d’un jeune enfant.
Pour conclure, je veux rappeler que maintenir cette allocation dans le périmètre des prestations familiales garantirait aux familles une équité de traitement sur l’ensemble du territoire, contrairement à ce qui est parfois reproché aux MDPH.
J’insiste en outre sur la nécessité d’une concertation avec les familles de personnes handicapées. En 2021, il devra y avoir des concertations pour vérifier et pour justifier l’intérêt et la pertinence d’un transfert total ou partiel de cette allocation vers la branche autonomie.
Il faut donc supprimer les alinéas 90 et 91 de cet article, afin de se laisser le temps de la réflexion.
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 919.
Je souhaite juste préciser que, par lettre en date du 15 décembre 2018, la ministre des solidarités et de la santé et la secrétaire d’État auprès du Premier ministre chargée des personnes handicapées avaient chargé l’IGAS d’une mission relative à la compensation pour les enfants en situation de handicap, dont l’objectif premier était d’aboutir à une « évolution de l’AEEH et de la PCH Enfant et de leur articulation ».
Le rapport remis en juin 2019, établi par Daniel Lenoir, inspecteur général des affaires sociales, a identifié les problématiques, mais n’a pas trouvé de solution. Avant de prendre, de manière précipitée, toute décision structurante, l’AEEH et ses compléments ainsi que leur articulation avec la PCH doivent faire, selon nous, l’objet de concertation et de travaux préalables en 2021, afin de vérifier et de justifier de la pertinence d’un transfert partiel ou total vers la branche autonomie.
En d’autres termes, il est urgent d’attendre. Nous demandons un peu de patience avant de prendre une telle décision de transfert, qui nous semble, ainsi qu’aux acteurs du handicap, tout à fait prématurée.
La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 1030.
J’essaierai d’être brève, parce que nos collègues ont déjà développé un certain nombre d’arguments.
Il y a, dans l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, un volet pouvant être considéré comme correspondant à une prestation de compensation du handicap, mais il y a aussi une part très importante qui relève de la politique familiale.
Il nous semble également tout à fait prématuré de décider de transférer l’AEEH vers la branche autonomie. Cela mérite un approfondissement de l’ensemble des sujets et – d’autres l’ont dit, et c’est très juste – une concertation avec les familles concernées.
Au début de l’analyse de ce texte, je me suis posé beaucoup de questions, je dois l’avouer, sur la pertinence de ce transfert. Or j’ai eu l’occasion, en tant que rapporteur, d’entendre en audition les associations, notamment celles du monde du handicap, et celles-ci ont émis, d’une façon à peu près générale, au début de mes consultations, un avis favorable ou neutre sur cette évolution. Pourquoi ? Parce que leur motivation première était avant tout la coordination entre la PCH et l’AEEH, dans une période où le chantier concernant la PCH était engagé, avec une vraie volonté d’accélérer.
Par ailleurs, quand le rapport Vachey, qui comportait un certain nombre de préconisations, a été présenté, tout le monde a regretté l’absence de mesures issues de ce rapport. Or nous avons là une décision qui est issue de ce rapport et qui est motivée par la coordination de deux dispositifs.
Enfin, il y a une semaine ou dix jours, certaines associations ont commencé à émettre un avis différent sur ce rapprochement, parce qu’elles pensaient pouvoir négocier, de façon plus générale, un certain nombre de concertations et accélérer les discussions autour de la PCH.
Ainsi, sur le fondement des analyses et des rapports, et en considérant l’avis global des associations émis dans la durée et non la veille de la lecture du PLFSS, la commission a émis – même si l’on peut entendre les arguments des uns et des autres – un avis défavorable sur ces amendements de suppression, de façon à accélérer les choses sur la question de la prise en charge du handicap et en ayant en tête l’intérêt de l’enfant dans sa globalité.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d’avoir séquencé les différents avis des uns et des autres ; c’est bien ce qu’il s’est passé, en effet.
Ces amendements visent à supprimer l’intégration de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé au sein du périmètre de la branche autonomie. Cette allocation, parce qu’elle s’adresse aux familles dont l’un des enfants est handicapé, se trouve naturellement, dans l’esprit de beaucoup, à la frontière entre la branche famille et la branche autonomie. La prestation de compensation du handicap, elle, est bien une prestation de compensation par nature, donc elle est attachée à la branche autonomie.
Dès lors, pour nous donner les moyens d’articuler ces deux prestations, déjà liées, d’ailleurs, par un droit d’option, très complexe pour les familles, nous les avons rapprochées au sein de la cinquième branche. Je dis bien « rapprochées » et non pas « fondues », car les logiques de prestation familiale et de compensation du handicap ont une nature différente, et les acteurs sont particulièrement attachés à cette distinction.
Je veux vous rassurer, mesdames, messieurs les sénateurs, ainsi que les associations, l’allocation de base de l’AEEH conserve ses mécanismes et ses critères d’attribution ; elle est bien instruite par les MDPH, de même que ses compléments et que la PCH. Le rôle des CAF dans le versement de l’AEEH ne sera pas modifié. Le fonctionnement et les attributions de cette allocation ne sont nullement remis en question par son rattachement à la cinquième branche. D’ailleurs, dans le cadre du comité prévu par la loi du 20 mars dernier et que j’installerai début décembre, je continuerai de mener les réflexions et d’apporter les adaptations nécessaires au droit à la compensation et, surtout, au droit d’option, afin de répondre aux besoins spécifiques des enfants.
Ainsi, cette disposition représente bien un vecteur potentiel de simplification. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
Nous nous connaissons bien, madame la secrétaire d’État, nous discutons assez souvent du handicap, et, sur le fondement de vos explications et de celles de M. Mouiller, je retire mon amendement.
Toutefois, j’espère qu’il y aura un peu plus de discussions sur cette question, car nous avons eu des retours en ce sens tant des parents que des associations. D’ailleurs, si j’ai bien compris ce que vous avez dit, monsieur le rapporteur, il y a eu des changements à ce propos.
Un certain nombre de personnes nous ont contactés, et je pense qu’il s’agissait peut-être aussi d’une question de symbole. Certaines familles avaient l’impression – c’est comme ça que je l’ai compris – que, quelque part, on enlevait l’enfant de la famille parce qu’il était handicapé ; voyez-vous ce que je veux dire ? Il fera partie non plus de la branche famille mais de la branche autonomie. Elles avaient donc le sentiment, que je peux comprendre, qu’on les excluait de cette branche, alors même qu’il s’agit de leur enfant.
J’avais aussi ce sentiment, et je voulais le partager avec vous. J’espère donc qu’il y aura des discussions à ce sujet.
L’amendement n° 458 rectifié quater est retiré.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour explication de vote.
Au regard des explications données, je retire mon amendement, mais j’aimerais que l’on ait des garanties sur la non-exclusion des enfants handicapés de la branche famille.
L’amendement n° 674 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 477 rectifié ter, 919 et 1030.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 156, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 92 à 96
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement vise à supprimer des alinéas qui habilitent le Gouvernement à légiférer par ordonnances afin de mettre le code de l’action sociale et des familles en cohérence avec le code de la sécurité sociale.
Une telle habilitation est d’autant moins nécessaire que le Gouvernement nous annonce l’examen imminent d’une grande réforme de la prise en charge de la perte d’autonomie. Il paraît donc naturel à la commission d’attendre de pouvoir traiter ce sujet directement dans la loi.
L’avis est défavorable.
Il s’agit, au travers de ces ordonnances, de tirer les conséquences très techniques de ce dont nous sommes en train de débattre. On ne peut pas mettre sur le même plan, monsieur le rapporteur général, ces dispositions et les dispositions de fond qui seront effectivement débattues en 2021, dans le cadre du projet de loi Grand âge et autonomie.
Nous avons besoin de légiférer par ordonnances pour mettre en conformité les deux codes. Il s’agit de dispositions extrêmement techniques, et les ordonnances nous semblent être le véhicule approprié.
Je vais voter l’amendement du rapporteur général, parce que je le trouve cohérent. Excusez-moi, monsieur le secrétaire d’État, mais l’attitude du Gouvernement me paraît – le mot est peut-être un peu fort – un peu méprisante à l’égard du Parlement.
Depuis tout à l’heure – c’était particulièrement criant avec l’AEEH –, vous répondez à toutes nos propositions que ce n’est pas le moment, qu’il y aura une grande réflexion et une grande loi et que nous allons travailler tous ensemble pour la construire. Mais, en même temps, vous nous dites : « on va construire cette grande loi, mais sous la forme d’ordonnances, donc taisez-vous ! »
Cela commence à être insupportable. Je voterai donc l’amendement de M. le rapporteur général avec beaucoup de joie.
Au bout du compte, je me demande, comme Bernard Bonne, ce que fait cet article 16 dans le PLFSS. Pourquoi nous faites-vous voter un article sur l’autonomie qu’on devra revoter par la suite, dans le cadre d’une grande loi, que, d’ailleurs, on ne votera pas, puisque vous procéderez par ordonnances ?
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.
Je vais ajouter un argument à ce que vient de dire M. Milon.
L’actuel gouvernement, tout le monde l’aura constaté, est le recordman, toutes catégories confondues, des ordonnances, sous prétexte que ça va plus vite et que ça permet de mieux légiférer.
Prenons un sujet comparable : le logement. Rappelez-vous l’histoire d’Action Logement, mes chers collègues : une ordonnance a été prise et mise en œuvre, mais jamais on ne l’a fait ratifier par le Parlement, et ça va faire trois ans qu’elle s’applique ! On voit donc, avec ce précédent, qu’on peut totalement shunter le Parlement.
Ils se sentent tellement géniaux avec leurs ordonnances que, lorsqu’ils se rendent compte, deux ans après, que ça ne va pas et qu’il faut refaire une réforme, que proposent-ils ? De procéder par ordonnances ! Génial !
Aussi, je vous le dis tout net : sur des sujets aussi importants que ceux-là, on peut essayer de nous faire le coup selon lequel c’est une affaire technique, neutre et sans importance, mais nous ne sommes pas dupes ! Ainsi, au-delà de l’argumentaire déjà très pertinent de M. Milon, nous ne pouvons pas voter une habilitation à légiférer par ordonnances.
Monsieur le secrétaire d’État, vous parlez d’un grand projet de loi, que tout le monde attend et qui doit répondre à une grosse préoccupation sociétale, mais, dès son annonce, vous multipliez les déceptions : du Parlement, des associations – on l’a vu avec les amendements précédents sur l’AEEH – et, demain, des départements, quand ils comprendront qu’ils sont juste bons à payer et qu’ils sont dépouillés de leurs prérogatives.
Vous vous y prenez mal. Il y a sans doute des choses à faire, mais elles ne peuvent être réalisées que dans la concertation, et la concertation doit se faire dans les territoires !
Les collectifs associatifs ont, à juste titre, une puissance extraordinaire, notamment dans le domaine du handicap ; cela a été bien dit par ma collègue. Ce sont des gens particulièrement affectifs, nous n’avons pas le droit de les décevoir ; on ne peut pas être dans l’affichage et leur faire des promesses qui ne seront pas tenues. C’est avec eux qu’il faut relancer la discussion.
Ce soir, vous entendez un signal d’alerte, madame la secrétaire d’État. Le Gouvernement aurait tout intérêt à en tenir largement compte.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
J’entends bien vos propos, monsieur le secrétaire d’État. Vous dites qu’il faut des ordonnances, tout de suite, pour mettre en conformité les deux codes. Soit ! Mais, à l’alinéa 92 de l’article 16, il est précisé que « le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, » un certain nombre de mesures. Or j’espère bien que, d’ici à douze mois, le Parlement aura adopté la loi sur le grand âge et l’autonomie. Il n’y a donc pas besoin d’ordonnances ; nous voterons la loi directement.
Faites un peu confiance au Parlement, il sait travailler rapidement, pour peu que le Gouvernement le saisisse. Il est trop facile de dire que l’on prendra des ordonnances. En outre, cela a été rappelé, elles sont parfois longues à venir, et, trois ans plus tard, on attend toujours la loi de ratification.
On ne fait pas suffisamment confiance au Parlement, et je le regrette. Nous avons accepté d’adopter la création de la cinquième branche, parce que nous nous sommes dit qu’il y avait là une chance inespérée d’accélérer le cours de l’histoire. En effet, cela faisait des années que l’on nous parlait de cette branche et qu’on ne la faisait pas. Vous avez décidé de la créer, avec l’aide de l’Assemblée nationale ; bravo ! Mais, maintenant, il faut aller au bout. Nous attendons donc non des ordonnances, mais une loi, qui ne soit pas renvoyée aux calendes grecques, mais que l’on examine au début de l’année prochaine. En tout cas, c’est ce que nous espérons.
Certains ont indiqué qu’ils s’étonnaient qu’on discute de cet article 16.
À l’occasion du vote du transfert de la dette sociale à la Cades, j’ai voté pour la création de la cinquième branche de la sécurité sociale ; j’ai même eu cette expression : « on ne va pas faire la fine bouche. »
On discute maintenant de l’article 16 du PLFSS. Or, quand il y a des propositions sur la gouvernance, on nous répond qu’il faut attendre le projet de loi sur l’autonomie ; quand il y a des propositions sur les financements – une proposition de financement émanant de parlementaires ne relève d’ailleurs pas de la démagogie –, on nous dit qu’il est trop tôt, qu’il faut attendre la conférence de financement ; quand on aborde la question du périmètre, on nous indique que ce n’est pas possible. Maintenant, on nous explique qu’on ne doit pas restreindre le champ des ordonnances…
Monsieur le secrétaire d’État, malgré tout le respect que je vous porte, permettez-moi de m’interroger sur la marge de manœuvre dont vous disposez quand vous venez devant le Parlement. Elle est, au fond, extrêmement faible, et c’est tout le problème de nos débats.
Je comprends bien qu’il faille cadrer les débats, mais un peu de liberté et de dialogue tout de même ! Sincèrement, nous en venons à douter de l’utilité de nos débats si tout est décidé par avance.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Je vais répéter ce que j’ai déjà dit.
J’ai évoqué la difficulté que nous posait l’article 16. Cependant, nous allons le voter. En revanche, nous voterons aussi très fortement le présent amendement, parce qu’il est inconcevable que l’on nous traite de cette façon. Nous n’avons pas eu la possibilité de discuter directement avec le ministre Olivier Véran des propositions qui nous sont faites dans le cadre de cet article 16 sur la cinquième branche. Il n’y a aucune possibilité de négocier.
Comment voulez-vous que nous acceptions aujourd’hui que le Gouvernement nous présente une ordonnance dans les mois qui viennent, compte tenu de toutes les propositions que nous aurions pu faire nous-mêmes ? Pensez-vous vraiment que le Sénat n’aura pas la capacité de formuler des propositions sur la cinquième branche lors de l’examen du projet de loi Grand âge ?
Je pense que nous ne pouvons pas continuer ainsi à travailler sur une cinquième branche complètement vide, sur laquelle vous ne nous donnez, aujourd’hui, aucune possibilité de faire des propositions et sur laquelle vous ne nous en donnerez peut-être pas davantage demain.
Monsieur le sénateur, pensez-vous vraiment que c’est cela que prévoit l’article ? Comme Mme Lienemann, vous me donnez l’impression d’avoir lu l’alinéa 92 de l’article 16, mais pas le 93 : il s’agit d’habiliter le Gouvernement à « codifier, à droit constant, dans le code de la sécurité sociale les dispositions relatives à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie prévues au code de l’action sociale et des familles ».
Monsieur le rapporteur général, il s’agit là de mesures de légistique, visant simplement à ce que certaines dispositions du code de l’action sociale et des familles passent dans le code de la sécurité sociale. Si cela vous fait plaisir, nous pourrons, lors de l’examen du projet de loi Grand âge et autonomie, qui traitera de sujets cruciaux et que nous appelons tous de nos vœux, passer une grande partie de notre temps à débattre de dispositions tendant à transférer tel article ou tel alinéa du code de l’action sociale et des familles dans le code de la sécurité sociale…
Quoi qu’il en soit, la comparaison que vous avez faite, madame Lienemann avec Action Logement est totalement hors de propos. Relisez l’alinéa 93 : il s’agit juste de tirer les conséquences, à droit constant, du transfert d’un code à l’autre.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il ne s’agit pas d’habiliter le Gouvernement à faire figurer dans des ordonnances toutes les propositions que vous avez faites ici et sur lesquelles, d’ailleurs, vous votez souverainement. Vous reprochez au Gouvernement de refuser vos propositions, mais le Sénat est souverain lorsqu’il vote, comme le Gouvernement est souverain dans les avis qu’il émet sur les amendements. Je ne voudrais pas qu’il y ait de mauvaises interprétations, quelle qu’en soit la sincérité, à ce sujet.
Relisez bien les alinéas 92 et 93. Nous avons besoin, dans le cadre strict que je viens de vous exposer, de ces mesures de pure légistique. Si vous voulez que nous en débattions de nouveau lors de l’examen du projet de loi Grand âge et autonomie, soit !
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 157, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 96
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 722-8 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« 5° La branche autonomie. » ;
2° L’article L. 722-27 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« 4° La branche autonomie. »
La parole est à M. le rapporteur général.
La création de la cinquième branche dans le régime général de la sécurité sociale n’a pas trouvé son pendant au sein du code rural et de la pêche maritime.
Cet amendement tend à confirmer le rôle de partenaire de la CNSA et d’acteur de la mise en œuvre de la cinquième branche sur les territoires que joue le réseau des caisses de MSA. Une convention avec la CNSA précisera le cadre de ce partenariat.
L’avis est défavorable.
La nouvelle branche que vous avez créée doit couvrir l’ensemble de la population, dont les salariés et les non-salariés agricoles. La CNSA, chargée de la gestion de la branche autonomie depuis la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie, a ainsi vocation à agir comme aujourd’hui pour l’ensemble des personnes âgées et des personnes handicapées, qui sont toutes rattachées au régime général pour la couverture de ce risque.
L’amendement que vous nous proposez, monsieur le rapporteur général, aboutirait, nous semble-t-il, à remettre en cause la visée universaliste de la nouvelle branche. Il aurait ainsi pour effet de complexifier par avance le pilotage de la politique en matière d’autonomie.
La solution que nous proposons n’empêche nullement la MSA de continuer à exercer un rôle dans le cadre de ses attributions et sans concurrence avec celles de la CNSA.
Je suis stupéfait de la position du Gouvernement. Même dans le projet de loi de réforme des retraites, il était proposé que la MSA reste une caisse de retraite, malgré l’universalité du dispositif. Pourquoi de telles dispositions figurent-elles dans certains textes de loi et pas dans d’autres ?
La MSA est un guichet unique dans les territoires pour les prestations qu’elle réalise. Nous prônions des guichets uniques, organisés de façon locale. C’était l’occasion de maintenir un système universel, décliné au niveau de caisses d’antériorité différente et tenant compte de la territorialité.
En plus des départements, des associations et des parlementaires, c’est le monde agricole que vous allez vous mettre à dos… Félicitations, monsieur le secrétaire d’État !
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 798 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Meunier, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Afin de satisfaire aux exigences du paritarisme régissant les modes de gouvernance de la sécurité sociale, dans les deux mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement prévoit les modalités de mise en place d’une concertation par décret, afin de définir les modalités d’un paritarisme de représentation et de gestion au sein de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
La parole est à Mme Monique Lubin.
La gestion paritaire apporte une contribution significative à la cohésion sociale et au progrès social, en même temps qu’elle est un pilier de la démocratie française.
Comme le rapport de la mission d’information sur le paritarisme de l’Assemblée nationale, dont le rapporteur était le député Jean-Marc Germain, l’a rappelé en 2016, « le paritarisme résiste aussi à toute approche simplificatrice du modèle social français. Alors que la France est parfois hâtivement dépeinte comme le lieu du conflit social permanent et d’une étatisation excessive – quand ce n’est pas prédatrice –, il s’avère que notre pays a confié près d’un quart de sa protection sociale, 150 milliards d’euros, aux représentants des salariés et des employeurs parce qu’ils semblaient les mieux à même de s’occuper de certains sujets touchant à la vie de tous les jours, pour le salarié et sa famille : les retraites complémentaires, le chômage, la prévoyance, la santé au travail, la formation professionnelle, le logement ou l’insertion des personnes handicapées sont aujourd’hui l’affaire des partenaires sociaux au moins autant que de l’État ».
Le rapport précise également que, « partout où les partenaires sociaux se sont vu confier ou se sont saisis de véritables responsabilités, cette confiance dans des corps intermédiaires pourtant très critiqués s’est traduite par une gestion consensuelle et sérieuse des cotisations des salariés et des employeurs ».
La création d’une cinquième branche de la sécurité sociale ne peut, de fait, se concevoir sans la mise en place d’une organisation paritaire, sauf à retomber dans une logique jacobine centralisatrice sur cet enjeu majeur pour la société française, ce qui serait le meilleur moyen de fragiliser encore davantage notre modèle social. La société française souffre d’un légitime sentiment de dépossession de son pouvoir de décision et de sa souveraineté sur les questions qui la concernent au premier chef. Nous n’avons pas les moyens de continuer à la fracturer en minorant le rôle des partenaires sociaux dans la gestion de la cinquième branche de la sécurité sociale qu’est destinée à devenir la branche autonomie ni à faire l’économie de la négociation collective sur les enjeux majeurs de notre temps.
La construction de la cinquième branche nécessite un travail de concertation sérieux et de longue haleine, concentré sur le paritarisme, d’autant plus que « le fait que des représentants des salariés et des employeurs, comptés en nombre égal, se réunissent pour créer de la norme, pour l’interpréter et pour gérer les institutions et les droits qui en sont issus est un procédé aussi simple à comprendre que difficile à mettre en œuvre ».
La loi doit prévoir les modalités de la mise en place du paritarisme au sein de la branche autonomie de la sécurité sociale. Tel est l’objet du présent amendement.
Nous souscrivons à l’importance de la mise en place d’une organisation paritaire. C’est un point essentiel. Néanmoins, la commission a émis un avis défavorable, compte tenu à la fois de la rédaction de l’amendement, du délai de deux mois qu’il prévoit, mais également de l’importante question de la coordination avec l’organisation de la CNSA, qui nous pose clairement une difficulté de méthode.
Notre avis défavorable se fonde sur ces éléments, mais je répète qu’il était essentiel que le paritarisme soit évoqué. Je salue cette initiative.
Je vous remercie, madame la sénatrice, de célébrer le modèle français de protection sociale, qui, historiquement, comme vous l’avez évoqué, s’est construit de façon spécifique, en conférant une place majoritaire aux partenaires sociaux. Pour autant, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.
Vous n’êtes pas sans savoir comment fonctionne la CNSA aujourd’hui. Dès lors que siègent au conseil d’administration de la CNSA les associations et les conseils départementaux, pour le plus grand plaisir de M. le sénateur Savary, on ne peut pas parler de jacobinisme ! Par ailleurs, vous savez probablement que les partenaires sociaux siègent d’ores et déjà au conseil d’administration de la CNSA, même si, je le concède, ce n’est pas de façon majoritaire.
L’équilibre ayant présidé à la constitution et à la création de la CNSA, qui associe l’ensemble des parties prenantes à cette politique de l’autonomie, nous semble un bon équilibre. Des débats auront peut-être lieu à son sujet lors de l’examen du prochain projet de loi Grand âge et autonomie, mais nous ne souhaitons pas y toucher à ce stade.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l’article.
Je vais vous faire une proposition de financement, monsieur le secrétaire d’État.
En France, 7 436 établissements d’hébergement accueillent à peu près 605 000 personnes âgées dépendantes. Il se trouve qu’un certain nombre de ces établissements pratiquent la fraude et l’évasion fiscales de façon absolument remarquable. Ainsi, le groupe DomusVi, qui a pour partenaires la Caisse des dépôts ainsi qu’un fonds émirati appelé Mubadala, a réalisé une évasion fiscale d’à peu près 1 800 milliards d’euros ces dernières années, avec des ramifications au Luxembourg, à Jersey et dans d’autres pays.
Lancez donc une inspection conjointe de l’IGAS et de l’IGS sur la gestion des Ehpad, surtout quand ils bénéficient de financements publics, ce qui est évidemment le cas partout, de façon à mettre un terme aux évasions fiscales et aux montages financiers. L’argent que vous récupérerez de la fraude fiscale servira à payer la cinquième branche, que l’on a manifestement du mal à financer.
Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.
La parole est à Mme Nadège Havet, pour explication de vote sur l’article.
Certains se disent déçus. D’autres évoquent une coquille vide. Nous ne sommes pas d’accord.
Face à ces sentiments exprimés tout au long des débats sur l’article 16, je veux simplement souligner une chose : le PLFSS donne des moyens à cette nouvelle branche, afin qu’elle puisse justement ne pas rester cette coquille vide tant critiquée.
Les débats continuent d’enrichir la cinquième branche. Les échanges en première lecture à l’Assemblée nationale l’ont démontré. La CNSA aura désormais, par exemple, la mission de contribuer à l’amélioration des conditions de travail des personnes exerçant les métiers participant à l’accompagnement et au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes atteintes de handicap et à la valorisation de ces derniers. Voilà des évolutions concrètes !
Ces évolutions, mes chers collègues, sont possibles, parce que cette nouvelle branche est créée. Elle existe aujourd’hui, parce que le Gouvernement a transformé des discussions passées en une réalité. Elle saura devenir essentielle à notre pays. Depuis combien d’années l’espérions-nous ? Combien de discussions n’avaient-elles pas été suivies de réalisations ? Le PLFSS propose de passer enfin à l’action.
Aujourd’hui, nous voulons insister sur cette amélioration ainsi que sur les engagements du Gouvernement. Si, pour agir, nous attendons que toutes les mains se lèvent, nous attendrons longtemps !
Avec ce PLFSS, la cinquième branche se dessine. Les missions de la CNSA sont essentielles pour répondre aux besoins de tant de citoyens. Nous saluons cet article, que nous voterons. Il représente l’action, il marque une amélioration pour de nombreux citoyens et, surtout, engage l’avenir. Nous nous en félicitons.
Le vote de cet article est, pour nous, un exercice difficile. Les interventions des uns des autres vous le montrent, monsieur le secrétaire d’État. Je pense notamment à l’intervention de Bernard Bonne, qui s’est fortement interrogé sur la pertinence de cet article.
Comme nous l’avons évoqué tout au long du débat, pendant la discussion générale et, déjà, l’année dernière, lorsque l’on a créé cette cinquième branche, il y a véritablement un problème de méthode, puisqu’a été défini un cadre dépourvu de contenu. Nous ne connaissions que les intentions. Tout a été renvoyé au rapport Vachey.
Nous attendions un certain nombre de propositions à l’issue de ce rapport. Nous voyons qu’une seule mesure a été reprise et que les sujets qui restent sur la table n’ont ni véritable contour ni réelle orientation financière. Nous pouvions entendre que le dossier ne pouvait pas forcément être clos, mais nous aurions apprécié de disposer au moins d’une orientation et de pistes de travail, assorties d’un calendrier, pour pouvoir mesurer les évolutions. Or, aujourd’hui, on nous demande de voter un certain nombre de décisions dans le cadre du PLFSS.
Nous entendons vos propositions financières, mais nous rappelons que, dans les 2, 5 milliards d’euros de moyens supplémentaires, 1, 9 milliard d’euros sont dédiés principalement au rattrapage sur les primes. On en reste donc essentiellement aujourd’hui au transfert à la branche autonomie de moyens financiers existants. Ainsi, l’AEEH a été transféré de la branche famille à la branche autonomie. On modifie également les règles de financement en faisant appel à la CSG, avec une incidence directe sur l’assurance maladie, mais, globalement, aucune ambition concrète n’est donnée à la politique menée, en dehors du titre et des bonnes intentions. Nous restons donc aujourd’hui sur notre faim, avec beaucoup d’interrogations.
En supprimant le principe du recours à l’ordonnance, nous avons voulu vous montrer que le Parlement souhaitait débattre. Nous allons être conduits, à l’article additionnel après l’article 16, à voter une conférence des financeurs. Il en a beaucoup été question durant le débat, mais il faut savoir que c’est le Sénat qui en est à l’initiative. Ce n’est pas du tout le Gouvernement !
Le Gouvernement nous assure simplement que les travaux avanceront. Le projet de loi Autonomie va arriver sans calendrier précis, dans un contexte que l’on sait extrêmement compliqué. Nous pouvons donc avoir beaucoup de doutes sur les échéances à venir.
C’est parce que le Parlement est responsable que nous avons voulu vous dire, ce soir, que, premièrement, nous souhaitons participer à la rédaction pleine et entière de la loi et que nous refusons les ordonnances et que, deuxièmement, le débat sur les moyens financiers que nous n’avons pas eu ce soir et qui pose des difficultés pour un certain nombre de parlementaires puisse avoir lieu selon un calendrier que nous voulons fixer. C’est la responsabilité du Sénat.
Cela étant, le groupe majoritaire vous suivra sur cet acte, mais vous devez entendre cette demande formelle : nous souhaitons être impliqués, parce qu’une réforme de cette ampleur doit recueillir une forme de consensus généralisé. Ce soir, vous ne l’avez pas !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Félicitons-nous que les choses avancent enfin – je ne reviendrai pas sur les épisodes passés –, alors que notre société est plus que jamais confrontée au défi du grand âge et de l’autonomie !
Le Gouvernement a privilégié une méthode, qui ne recueille pas le consensus. Il s’agit de créer une cinquième branche, puis de la nourrir à l’occasion des débats : on commence à préciser les missions de la CNSA, à apporter des financements.
Monsieur le rapporteur, 1, 9 milliard d’euros de primes pour les personnels, ce n’est pas rien !
De fait, le Ségur fait partie de la méthode, tout comme le Laroque, qui va aussi venir enrichir le contenu de la cinquième branche. Suivra le projet de loi Grand âge et autonomie.
Réjouissons-nous que les choses avancent ! Ne ratons pas ensemble le moment historique de faire enfin avancer ce sujet dans notre pays ! À cet égard, je ne peux pas imaginer que le Sénat puisse, ce soir, supprimer l’article 16, qui, j’y insiste, constitue une avancée majeure très attendue par l’ensemble de nos concitoyens.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.
Plusieurs de nos collègues, de différentes sensibilités politiques, s’insurgent, à juste titre, comme nous l’avons fait dès le départ en demandant la suppression de l’article 16, contre le fait que la cinquième branche n’est pas financée, que l’on ne connaît rien de sa gouvernance et que le Gouvernement cherche à nous « rassurer » en nous disant qu’il compte légiférer par ordonnance, réduisant le rôle du Parlement à son minimum. Je suis assez admirative que ceux-là même finissent par voter, promettant qu’ils seront très attentifs…
Cette branche devait être financée par l’impôt. Elle va finalement être financée par des déplacements d’argent d’une branche à une autre. Telle est la réalité !
Depuis le début de l’examen du PLFSS, nous disons que la sécurité sociale supporte déjà des charges qui ne lui incombent pas, même si, avec la covid, le Gouvernement a pallié les exonérations qu’il avait décidées. Il n’empêche que de telles recettes ne fonctionnent toujours pas.
Nous avons un peu l’impression d’une course en avant. Pour notre groupe, le rôle démocratique des parlementaires que nous sommes est totalement nié, pour ne pas dire piétiné. Ceux qui pensent que nous pourrons peut-être décider lors de l’examen de la loi Grand Âge sont très naïfs. À moins qu’ils ne soient pas franchement en désaccord avec ce que propose le Gouvernement…
Au groupe CRCE, nous sommes logiques. Depuis le départ, nous avons dénoncé les choses. Nous avons donné des pistes de financement. Chaque fois, on nous répond que ce n’est pas le moment, que ce n’est pas le bon tempo… Nous voterons contre l’article 16.
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote sur l’article.
Il est vrai que, dans cet hémicycle, les votes ne coïncident pas toujours avec les discours.
Nous pourrions reprendre à notre compte les réserves que vient d’exprimer Laurence Cohen. Nous l’avons d’ailleurs déjà fait au travers de nos amendements. Néanmoins, le groupe socialiste votera l’article 16. Au mois de juillet, nous avions déjà acté la création de la cinquième branche de la sécurité sociale. Pour nous, celle-ci est très importante, même si je répète que le compte n’y est pas : c’est insuffisant et insatisfaisant. Je pense toutefois que la politique de la chaise vide est pire que tout.
Les parlementaires du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ont des propositions à formuler. Pour l’instant, elles ne sont pas entendues, mais nous continuerons à les soutenir, pour aller vers la création de la branche autonomie.
La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote sur l’article.
Personnellement, je voterai l’article 16 sans aucune difficulté, surtout maintenant que l’amendement de M. le rapporteur général a été adopté.
Cela étant, je veux vous poser une question, monsieur le secrétaire d’État, les yeux dans les yeux §La création de la cinquième branche n’a aucun intérêt si elle n’est pas suivie de ce texte, avec tout ce qu’il comporte ! Je voudrais que vous me répondiez sincèrement.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote sur l’article.
Je dois dire que je suis très étonnée par votre vote, mes chers collègues. S’il faut laisser un message à l’opinion en faveur de la création de la cinquième branche, je le dis : j’y suis favorable, et je l’ai toujours été. Je fais d’ailleurs remarquer que nous avons déjà voté ce dispositif précédemment. Le texte d’aujourd’hui ne change donc rien.
Vous nous dites que c’est une coquille vide. M. Bonne, à juste titre, pose la question de la date à laquelle nous sera présenté le projet de loi Grand Âge. Franchement, croyez-vous que nous le verrons en 2021 ? Pour ma part, je crois que l’article 16 de ce PLFSS vise à créer un effet d’annonce pour se dispenser de voter les dépenses en 2021, autrement dit avant la prochaine élection présidentielle. §On nous expliquera alors que le covid coûte très cher, que le déficit est déjà à son maximum, que l’on ne peut pas aller plus loin et que le sujet est renvoyé après la prochaine présidentielle.
Vous pouvez faire semblant de ne pas le voir, mais sachez que les Français ne sont pas dupes. Ils attendent du sonnant et du trébuchant, du concret, de l’opérationnel. Ils attendent une vision globale de l’avenir pour notre vieillesse. Cette question est source d’angoisse pour la société française, qui sait que c’est l’un des grands défis qu’elle devra relever.
On ne règle rien sur le fond. On ne règle rien stratégiquement. On ne règle rien financièrement. On croit qu’un effet d’annonce suffira à convaincre l’opinion, alors que vous n’êtes vous-mêmes pas convaincus.
Un peu de vérité dans vos votes, mes chers collègues ! Je demande à chacun de réfléchir en conscience. Sur un tel sujet, on ne peut pas faire semblant !
La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote sur l’article.
J’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous reprécisiez les chiffres, que je n’ai pas tous notés. Au reste, comme je l’ai dit, je ne dispose peut-être pas de l’intelligence suffisante pour tout comprendre dans les détails.
Vous avez dit que la CNSA serait dotée de 2, 5 milliards d’euros. Or, grâce à la journée de solidarité, la CNSA disposait déjà de ce montant avant la création de la cinquième branche.
Vous nous avez également dit, sauf erreur de ma part, que les revalorisations salariales consécutives au Ségur s’élevaient à 1, 7 milliard ou 1, 9 milliard d’euros. Or ces sommes auraient été mises sur la table même si la cinquième branche n’avait pas existé.
Restent 200 millions d’euros pour l’aide à domicile, ce qui est une bonne chose, et 400 millions d’euros pour les investissements. Par conséquent, l’incidence financière de la création de la cinquième branche ne s’élève, pour l’instant, qu’à 600 millions d’euros. Le reste existait déjà ou était en passe d’être créé du fait du Ségur.
J’aimerais obtenir quelques précisions sur le sujet.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote sur l’article.
Nous demandons un engagement sur le projet de loi Grand âge et autonomie. Nous demandons également un engagement rapide sur les travaux du Laroque, qui, comme je le dis depuis un moment, auraient dû avoir lieu en même temps que le Ségur.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires est favorable à la création de la cinquième branche, mais je serai très intéressée par un débat sur sa pertinence. Nous demandons aussi que sa gestion soit paritaire, alors que le paritarisme a reçu de nombreux coups de boutoir ces dernières années.
Je vous invite à écouter le conseil de la CNSA.
La CNSA fait partie de ceux qui soutiennent la création de la cinquième branche et qui s’en réjouissent, mais elle déplore le peu d’ambition en matière de financement. Selon elle, le Ségur du médico-social a créé une concurrence fâcheuse avec d’autres acteurs et professionnels du « prendre soin », notamment de l’aide à domicile, même si les 150 millions d’euros ont permis de rattraper un peu les choses – on parle de 200 millions, mais, au 1er avril, il s’agit bien de 150 millions…
J’aimerais donc savoir quand seront mises en œuvre les recommandations du Laroque et comment elles seront financées, puisque rien n’est prévu en dehors du Ségur de la santé.
Madame la sénatrice, le Gouvernement ne triche pas. Je vous ai déjà opposé des arguments très réels, très concrets, voilà quelques instants. Je vais faire de même en précisant les points que M. Milon n’a pas eu le temps de noter, même si j’en doute un peu…
Cette branche représente en tout 31 milliards d’euros, dont 2, 5 milliards d’euros de mesures nouvelles dans ce PLFSS, parmi lesquels 1, 5 milliard d’euros de revalorisations.
Monsieur Milon, je ne comprends pas votre raisonnement : auriez-vous souhaité que le Ségur n’intègre pas ces mesures pour les personnels des Ehpad ? Réjouissons-nous du contraire : 400 millions d’euros d’investissement, 300 millions d’euros pour l’amélioration des taux d’encadrement et 200 millions d’euros pour tout ce qui a trait à l’aide à domicile et quelques mesures en direction des personnes handicapées qu’évoquera Sophie Cluzel dans quelques instants.
Monsieur Bonne, dans la constante lignée des propos du Président de la République et du Premier ministre, le projet de loi Grand âge et autonomie sera bien présenté en 2021. Si je ne vous le dis pas « les yeux dans les yeux », c’est que cette expression n’a pas porté chance au dernier qui l’a employée.
Sourires.
Je voudrais apporter quelques précisions, en soulignant l’extension de la prestation de compensation du handicap, dotée de 200 millions d’euros, à la parentalité dès le 1er janvier 2021. C’est une grande avancée, attendue par les parents et par les personnes en situation de handicap depuis des années.
Nous accélérons le déploiement des solutions d’accueil et d’accompagnement adaptées pour plus de 100 millions d’euros. Nous soutenons les MDPH, avec 25 millions d’euros supplémentaires. Je pense aussi à la consolidation de la stratégie nationale pour l’autisme avec le déploiement du forfait des 7-12 ans et à la poursuite du plan de prévention des départs en Belgique. Nous disposons également de 20 millions d’euros pour déployer l’habitat inclusif, dont nous débattrons dans quelques instants.
Oui, la cinquième branche a des traductions concrètes pour améliorer le quotidien des personnes handicapées ! Cette cinquième branche est une grande avancée, et nous allons pouvoir capitaliser sur des réponses communes personnes âgées-personnes handicapées sur le bien vivre chez soi afin de leur permettre d’opérer un véritable choix de vie.
La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote sur l’article.
Je partage de nombreuses critiques et réserves émises par mes collègues de l’opposition. Ce qui nous est présenté est insatisfaisant. Je ne vais pas tout reprendre, sauf à épuiser mon temps de parole…
Il s’agit d’un choix premier de la vie politique : à qui confier la gestion de ce risque ? Nous connaissons tous l’alternative : soit c’est à la sécurité sociale, et nous pouvons discuter de tout – mes collègues ont présenté des amendements sur le financement et sur la gestion paritaire de cette nouvelle branche, mais le Gouvernement a fermé toutes les portes pour le moment ; soit c’est au secteur privé, ce dont rêvent beaucoup.
Et nous ne nous résolvons pas à prendre un tel risque !
Nous approuverons, avec toutes les réserves que mes collègues ont portées, cet article 16, car il est temps de passer à la définition des financements, des contenus et du mode de gestion de ce qui se doit d’être un progrès social, à savoir la gestion par la sécurité sociale du risque autonomie.
La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour explication de vote sur l’article.
Je participe pour la première fois au débat sur le PLFSS. Je ne suis pas un grand spécialiste du sujet, mais j’ai beaucoup entendu parler de la création de la cinquième branche. Je vais voter pour, mais j’ai l’impression d’être piégé.
Le Gouvernement nous propose la création d’une branche autonomie, qui n’a justement aucune autonomie financière pour le moment. Je suis donc assez mal à l’aise : cela fait tellement longtemps que l’on entend parler de cette branche que l’on peut difficilement, en tant que responsable politique, voter contre. Notre groupe votera cet article.
Je suis un jeune sénateur, et j’ai pris le temps d’écouter les uns et les autres. Je fais le choix de vous faire confiance, monsieur le secrétaire d’État. J’espère qu’il y aura du contenu et que nous pourrons discuter des financements dans un futur projet de loi, dès le début de l’année prochaine.
La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l’article.
C’est cette approche très particulière qui induit ces divergences d’état d’esprit, d’arguments, alors que nous voulons tous répondre à la même finalité : faire mieux encore pour l’autonomie des personnes âgées et handicapées. Le malaise ressenti sur toutes les travées montre bien que le Gouvernement n’a pas choisi une approche consensuelle, à même de rassembler le plus largement possible.
Forts de toutes ces critiques, nous pourrions refuser de vous accorder notre confiance, monsieur le secrétaire d’État. Ce n’est pas notre façon de faire : maintenant que nous avons mis le pied dans la porte, nous espérons que vous allez tenir compte de nos demandes, et nous continuerons de discuter. Mais, prenez garde, vous avez une responsabilité : vous avez pris des engagements qu’il faudra tenir devant le Parlement et devant les Français.
Tout cela paraît compliqué, mal engagé. Nous ne sommes pas là pour empêcher un progrès social, mais pour le favoriser. Or la question des financements est particulièrement difficile. L’imposition étant plus élevée en France que dans les autres pays européens, envisager des financements privés ne me semble pas rédhibitoire. §Pourquoi pas ? Mettons au moins la question sur la table et comparons les avantages des financements privés et des financements publics. Il faudra bien s’inscrire dans la complémentarité pour mettre en œuvre une politique ambitieuse.
Tout doit être mis sur la table : raison pour laquelle nous voterons cet article 16.
La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote sur l’article.
Notre choix de voter cette cinquième branche reflétait à la fois notre éthique de conviction et notre éthique de responsabilité.
Notre état d’esprit est aujourd’hui un peu différent : nous allons bien voter l’article 16, car je ne crois évidemment pas qu’il faille jeter le bébé avec l’eau du bain, mais nous le faisons davantage par éthique de responsabilité que par éthique de conviction.
La dernière fois, nous doutions déjà de la méthode ; cette fois, nous doutons du fond. Comment imaginez-vous cette cinquième branche ? Est-ce vraiment autre chose qu’un effet d’annonce ? Nous vous faisons encore confiance en votant l’article 16, mais notre état d’esprit est totalement différent de celui qui prévalait lors du vote du transfert de la dette à la Cades.
Vous évoquiez la pose des fondations de la cinquième branche, monsieur le secrétaire d’État. Il nous semble qu’il reste encore beaucoup de sable et que le sol est un peu meuble… Nous voterons donc cet article 16 au nom de l’éthique de responsabilité, avec l’ombre d’un doute sur l’avenir, la pérennité et les engagements que vous avez pris.
La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote sur l’article.
M. Martin Lévrier . Ce débat me rappelle indirectement celui de la grande réforme de l’apprentissage, voilà deux ans et demi. J’entendais alors sur toutes les travées le même genre de discours que ce soir : on ne peut vous faire confiance, vous allez déshabiller les régions, nous courons à la catastrophe, l’éducation nationale n’aura plus la main…
Exclamations sur les travées du groupe CRCE
Aujourd’hui, on a ouvert la voie. L’article 16 est lancé, vous voulez tous le voter, ce dont je suis très fier. Bien sûr, il y a énormément à faire, mais c’est notre boulot, et je me réjouis de tout le travail que nous allons accomplir ensemble ! J’y crois et j’ai confiance.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote sur l’article.
Je rejoins les propos qu’ont tenus mes collègues Marie-Noëlle Lienemann et Laurence Cohen. Nous, nous ne voterons pas cet article 16. Comme souvent, on entend des cris de-ci de-là, mais tout le monde va finalement voter ! C’est toujours le même constat : tout le monde hurle, crie et lève ses bras au ciel, mais quand il faut voter, tout le monde lève la main !
Cela étant dit, un rappel s’impose : aujourd’hui, l’autonomie et le handicap sont déjà pris en charge par la sécurité sociale. Or personne ne le dit. À écouter nos débats, on a l’impression que la cinquième branche va régler le problème et prendre en charge le financement de l’autonomie et du handicap.
Vous avez tous souligné que cette cinquième branche était une coquille vide sans financement ni gouvernance. Vous avez tous dit qu’il aurait fallu discuter du projet de loi Grand âge et autonomie avant ce PLFSS. Finalement, vous vous apprêtez tous à voter et à faire confiance au Gouvernement. Quant à nous, nous n’avons pas confiance, et nous ne voterons pas l’article 16.
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote sur l’article.
Mme Pascale Gruny . Je remercie M. Lévrier de ses propos, car, justement, les comptes n’y sont pas en matière d’apprentissage. Dans les régions, dans les CFA, dans les écoles, dans les lycées, dans les branches professionnelles, dans les entreprises, il manque de l’argent pour la formation professionnelle. Merci, monsieur Lévrier, de nous confirmer qu’on ne peut faire confiance à ce gouvernement !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Éliane Assassi applaudit également.
En ce qui concerne la dépendance, l’autonomie, le grand âge, j’en ai vu passer, moi qui suis une vieille parlementaire. §Le vrai sujet, c’est toujours celui de l’argent, du financement. Vous êtes plus malins que les autres : vous faites des tours de passe-passe et faites passer l’argent par un tuyau, puis par un autre. Mais, au final, c’est toujours pareil.
Vous n’entendez pas la colère du peuple. Ici, monsieur le secrétaire d’État, nous représentons les grands électeurs et, derrière eux, la population. Les Français en ont assez de vos mensonges perpétuels. Aujourd’hui – je ne dirai pas « les yeux dans les yeux » –, nous attendons quelque chose, car la situation est très grave.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.
Je mets aux voix l’article 16, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 18 :
Le Sénat a adopté.
L’amendement n° 158, présenté par M. Mouiller, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie réunit une conférence des financeurs de la politique de soutien à l’autonomie qui remet au Parlement, avant le 1er avril 2021, des propositions relatives aux financements nouveaux que requiert l’organisation, par la branche autonomie et les collectivités territoriales, d’une prise en charge des personnes en perte d’autonomie privilégiant le maintien à domicile.
La parole est à M. le rapporteur.
Lors de l’examen de l’article 16, nous avons évoqué la méthode du Gouvernement et nos inquiétudes en matière de financement.
Monsieur le secrétaire d’État, nous avons bien entendu votre annonce concernant un projet de loi Grand âge et autonomie en 2021, mais le Sénat souhaite marquer de son empreinte ce rendez-vous sur le débat financier. Cet amendement vise donc à réunir une conférence des financeurs de la politique de soutien à l’autonomie, sous l’égide de la CNSA, pour faire des propositions relatives aux financements nouveaux que requiert l’organisation par la branche autonomie et les collectivités territoriales d’une prise en charge des personnes en perte d’autonomie privilégiant le maintien à domicile.
La promesse d’une grande réforme de la dépendance à fêter son deuxième anniversaire récemment, puisque la constatation Grand âge et autonomie a été lancée le 1er octobre 2018. Depuis, des travaux utiles ont été publiés, mais peu de mesures concrètes ont été décidées, en particulier sur la délicate question du financement d’une meilleure prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées, c’est-à-dire d’un virage domiciliaire. Cet amendement vise à catalyser la prise de décision ou, au moins, à maintenir le sujet à l’agenda politique.
Le rapport Vachey, cité à plusieurs reprises ce soir, vous a été remis en septembre. Il met à plat les différentes pistes de financement et a fait l’objet d’une large concertation de l’ensemble des parties prenantes.
Il nous semble que le temps n’est plus aux rapports, mais à l’analyse des débats que nous aurons dans le cadre du projet de loi Grand âge et autonomie. Pour autant, si vous pensez indispensable de disposer d’un rapport supplémentaire, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16.
Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 724 rectifié est présenté par Mmes Meunier et Lubin, MM. Jomier et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Le Houerou, Poumirol et Rossignol, MM. Antiste, Bouad et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Durain et Gillé, Mme Harribey, M. P. Joly, Mme G. Jourda, M. Leconte, Mme Lepage, MM. Lozach, Lurel, Marie et Mérillou, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme S. Robert, MM. Sueur, Temal et Tissot, Mmes Préville, Briquet et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 922 est présenté par Mme Poncet Monge, M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement une étude d’impact sur la mise en œuvre d’une prestation universelle de compensation à l’autonomie.
La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 724 rectifié.
Au début de l’examen de l’article 16, j’ai souligné la nécessité que cette cinquième branche réponde à la demande d’universalité qu’exigent les personnes en perte d’autonomie. Tout doit être mis en œuvre pour faire converger les politiques de l’âge et du handicap. Cette branche devra s’y atteler, et la future loi est d’ores et déjà sertie de promesses.
Nous le déplorons en ce moment, selon que le handicap survient avant ou après 60 ans, les personnes ont accès soit à la prestation compensatoire du handicap, soit à l’allocation personnalisée d’autonomie versée aux personnes âgées dépendantes. Ces deux prestations sont d’une nature et d’un montant différents.
Le secteur associatif du handicap estime que le chantier de la cinquième branche doit permettre d’abroger définitivement « la barrière d’âge des 60 ans » et rappelle qu’il est temps de réduire le morcellement des dispositifs et de sortir de la logique de catégorisation des publics. Nous proposons donc de mesurer, par une étude d’impact, les hypothèses concrètes de la mise en œuvre de cette cinquième branche, en préalable à l’examen de la future loi Grand âge et autonomie.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 922.
À côté des acteurs du handicap, les personnes âgées réclament également le dispositif prévu par cet amendement tant les différences sont importantes entre APA et PCH.
Rompre avec cette barrière d’âge participerait du changement de regard sur le vieillissement et la dépendance – mot à bannir – qui surviendrait après 60 ans. La dépendance serait comme un sous-produit de la compensation d’une situation de handicap en raison de l’âge. L’abolition de cette barrière me semble essentielle.
L’amendement n° 903 rectifié, présenté par MM. Corbisez, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement une étude d’impacts sur la mise en œuvre d’une prestation universelle de compensation à l’autonomie.
La parole est à M. Stéphane Artano.
M. Philippe Mouiller, rapporteur. Ces amendements abordent des points fondamentaux pour les personnes âgées et les personnes handicapées. Je vous invite à lire un certain nombre de rapports sur ces sujets, dont un très intéressant sur l’évolution de la prestation compensatoire, rédigé par votre serviteur…
Sourires.
Toutefois, nous n’en sommes plus à l’heure des rapports : nous sommes dans l’urgence. Il faut maintenant entrer dans la partie opérationnelle de la loi. Je pense, madame la présidente de la commission, que nous pourrions travailler sur ces sujets très rapidement de façon à pouvoir alimenter le débat lorsque nous examinerons le projet de loi Grand âge et autonomie.
Si je suis défavorable à ces trois amendements en ce qu’ils demandent un nouveau rapport, il s’agit de sujets fondamentaux. Au-delà des financements, l’enjeu le plus important est d’envisager une prise en charge globale des personnes dépendantes.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
J’ajoute que nous travaillons à l’amélioration de la prestation compensatoire du handicap, dont je rappelle qu’elle s’étendra, à compter du 1er janvier, aux besoins relatifs à la parentalité.
Les personnes en situation de handicap sont très attachées à la PCH, très individualisée et très différente selon qu’il s’agit d’une personne âgée ou d’un enfant en devenir d’autonomie.
Nous ouvrons aussi plus largement les droits à compensation aux personnes les plus âgées avec l’ouverture du droit à la PCH au-delà de 75 ans pour les personnes répondant aux critères d’éligibilité de la PCH avant 60 ans.
L’heure est en effet davantage aux travaux d’amélioration de la PCH qu’aux rapports, raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements.
Je voudrais juste répondre au vice-président de la commission des affaires sociales, M. Mouiller, et lui dire que ce sujet pourra bien évidemment être abordé. Le bureau de la commission doit justement se réunir prochainement pour fixer nos travaux du premier semestre de 2021.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 903 rectifié est retiré.
L’amendement n° 601, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 281-2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 281-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 281 -2 -1. Le règlement mentionné à l’article L. 121-3 peut prévoir que les habitants d’un habitat inclusif auquel n’est pas attribué le forfait mentionné à l’article L. 281-2 bénéficient d’une aide à la vie partagée leur permettant de financer le projet de vie sociale et partagée, versée directement à la personne morale chargée d’assurer le projet de vie sociale et partagée.
« Le bénéfice de l’aide est subordonné à la signature, au titre des logements concernés, d’une convention entre le département et cette personne morale.
« Un accord pour l’habitat inclusif, passé entre le département et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, fixe les conditions, portant notamment sur le montant de l’aide et ses conditions d’attribution, qui ouvrent droit au versement par la caisse, au titre du 4° de l’article L. 14-10-5, d’un concours pour le financement des dépenses départementales d’aide à la vie partagée.
« Cet accord peut prévoir d’autres engagements en matière de développement de l’habitat inclusif ou de politiques venant à son soutien. À ce titre, il peut être également signé par le représentant de l’État dans le département ou le directeur général de l’agence régionale de santé.
« À titre transitoire, l’accord prévoit que, pour tout ou partie des conventions mentionnées au deuxième alinéa qui sont signées avant le 31 décembre 2022, le concours mentionné au troisième alinéa garantit, pour la durée de la convention, la couverture des dépenses d’aide à la vie partagée à un taux, fixé par l’accord, d’au moins 80 % de la dépense du département. »
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Cet amendement vise à accélérer le développement de l’habitat inclusif dans nos territoires pour sortir du dilemme vécu par les personnes lorsque la vie « chez soi comme avant » n’est plus possible et que la vie collective en établissement n’est ni souhaitée ni nécessaire.
Le récent rapport de Denis Piveteau et Jacques Wolfrom montre que l’essor de ces formules de plus en plus plébiscitées appelle un financement plus fluide de la fonction d’animation du lieu de vie. Il propose ainsi d’instaurer une aide à la vie partagée, octroyée à tout habitant d’un habitat inclusif dont le bailleur ou l’association gestionnaire a passé pour cet habitat une convention avec le département.
Cet amendement vise à permettre la mise en œuvre de cette aide à la vie partagée dans le règlement départemental d’action sociale en assurant une couverture partagée de son coût entre le département, signataire de la convention, et la CNSA.
Pour donner une impulsion forte, la CNSA garantira la couverture de tout ou partie des conventions signées par les départements avant fin 2022 à un taux d’au moins 80 %. Le montant prévisionnel atteindra 20 millions d’euros dès 2022, ce qui correspond au financement d’environ 500 projets de cinq à dix logements sur l’ensemble du territoire.
La création de cette aide à la vie partagée permettra de mener sur vingt-quatre mois un véritable test in vivo, nouvelle étape vers le déploiement d’une offre de logements réellement adaptés au projet d’autonomie des personnes. C’est là une grande avancée de cette cinquième branche.
Cet amendement vise à autoriser les règlements départementaux d’aide sociale à prévoir une aide à la vie partagée à l’attention des habitants d’une formule d’habitat inclusif dont le financement serait coassuré par la CNSA à hauteur de 80 % pour des conventions signées avant fin 2022.
Ce mécanisme serait une première application concrète d’une proposition du rapport Piveteau-Wolfrom. Pour avoir débattu de ces questions, notamment lors de l’examen de la loi ÉLAN, nous attendions cette aide de vie commune. La commission a donc émis un avis très favorable sur cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16.
L’amendement n° 970, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la quatrième phrase du premier alinéa du 1 de l’article 231 du code général des impôts, après le mot : « communaux, » sont insérés les mots : « des établissements publics de santé et des établissements publics d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ».
II. – Le I s’applique à la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2020.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Cet amendement vise à exonérer les établissements publics de santé et les Ehpad publics de la taxe sur les salaires, comme cela se fait déjà pour l’État et les collectivités territoriales. Alors que les personnels hospitaliers réclament de nouveaux moyens financiers et humains d’ampleur, cette mesure permettrait de déployer 5 milliards d’euros dans l’activité hospitalière dès 2020.
Certains nous opposeront que, si les hôpitaux et les Ehpad publics paient une taxe sur les salaires, c’est parce qu’ils ne sont pas astreints à payer la TVA. Mais je peux vous citer des établissements publics qui ne sont pas astreints à payer la TVA et qui sont exonérés de la taxe sur les salaires. Je pense notamment aux collectivités locales et à leurs régies, aux centres d’action sociale, aux centres de formation des personnels communaux, aux établissements d’enseignement supérieur. Finalement, seuls les hôpitaux et les Ehpad publics ne sont pas concernés !
Un autre argument est invoqué pour contrer notre amendement, à savoir la mise en concurrence avec les établissements privés. Il ne tient pas davantage, sachant que ces derniers bénéficient déjà de l’exonération de la taxe sur les salaires, par le biais du CITS. On peut donc considérer qu’il existe actuellement une situation déloyale à l’encontre des hôpitaux et des Ehpad publics.
Sur le fond, l’importance du service public de santé ne justifie-t-il pas, à vos yeux, une situation fiscale plus favorable des hôpitaux et des Ehpad publics ?
Enfin, s’agissant des conséquences du manque à gagner, à hauteur de 5 milliards d’euros, pour la sécurité sociale, il est étonnant de constater que ce débat a lieu en réponse à notre proposition, alors qu’il n’a jamais eu lieu lors de la création du CICE, du CITS, du CIR et autres exonérations de cotisations. Selon le principe de la loi Veil – faut-il le rappeler ici ? –, l’État doit compenser intégralement les pertes de recettes en cas d’exonération de cotisations sociales. Si on supprime une taxe de l’État, c’est à lui de trouver les ressources ailleurs pour financer les exonérations de cotisations sociales. Il l’a d’ailleurs fait dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de Covid.
Mes chers collègues, ne serait-il pas souhaitable d’abandonner la taxe sur les salaires pour donner un peu d’oxygène à l’hôpital, qui en a bien besoin ?
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui pèse lourd : 5 milliards d’euros !
Nous ne sommes pas favorables au mécanisme proposé, même si la question du financement des établissements publics constitue un vrai sujet. Nous en avons souvent débattu avec M. Milon : la sécurité sociale doit-elle financer les murs et les investissements des établissements publics ? La situation doit être comparée avec d’autres secteurs, en particulier celui de l’éducation nationale. C’est un sujet global sur lequel nous devrons faire des propositions.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 570, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant l’impact sur les finances sociales d’un transfert de charges depuis le forfait hébergement vers les deux autres forfaits socialisés en vue de diminuer le reste à charge. Ce rapport évalue en outre les effets directs anticipés de ce transfert en ce qui concerne l’évolution des recettes et des dépenses de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Je m’étonne que cet amendement n’ait pas été jugé irrecevable…
Le financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées se fait via trois sections budgétaires : le panier « hébergement », le panier « dépendance » et le panier « soins ».
Dans le cadre des réflexions qui se font jour concernant la prise en charge du grand âge, il convient de lutter contre les restes à charge astronomiques des résidents des Ehpad. Comme l’observe le rapport de mars 2018 des députées Iborra et Fiat, une telle évolution nécessite de transférer certains postes, aujourd’hui financés par le résident, de la section « hébergement » vers les sections qui bénéficient des financements publics.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à prévoir un rapport supplémentaire.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
I. – L’article L. 138-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « à L. 162-16-5 » sont remplacés par les mots : «, L. 162-16-4-1, L. 162-16-5 » ;
b) À la seconde phrase, les mots : « prévue à l’article L. 5121-12 du code de la santé publique ou pris en charge en application de l’article L. 162-16-5-2 » sont remplacés par les mots : « ou d’un cadre de prescription compassionnelle mentionnés aux articles L. 5121-12 et L. 5121-12-1 du code de la santé publique et de la prise en charge associée mentionnée aux articles L. 162-16-5-1 et L. 162-16-5-2 » ;
2° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est supprimée ;
b) Au début de la seconde phrase, les mots : « À défaut, » sont supprimés ;
c) À la même seconde phrase, le taux : « 80 % » est remplacé par le taux : « 95 % » ;
3° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au deuxième alinéa, pour une entreprise redevable de la contribution qui a accepté, par convention conclue avec le Comité économique des produits de santé au titre des articles L. 162-16-4, L. 162-16-4-1, L. 162-16-5 ou L. 162-16-6, une baisse du prix net d’une ou plusieurs spécialités qu’elle exploite, prenant effet au cours de l’année au titre de laquelle la contribution est due, le taux mentionné au même deuxième alinéa peut être fixé entre 80 % et 95 %. Le taux mentionné à la première phrase du présent alinéa applicable à chaque entreprise est déterminé selon un barème fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en fonction du montant des économies réalisées par l’assurance maladie du fait de la baisse du prix net de ces spécialités pour l’année au titre de laquelle la contribution est due ainsi que du chiffre d’affaires de l’entreprise calculé selon les modalités définies à l’article L. 138-11.
« Le prix net mentionné au troisième alinéa du présent article est calculé en défalquant les remises mentionnées aux articles L. 162-17-5, L. 162-18 et L. 162-22-7-1 du prix de vente au public mentionné aux articles L. 162-16-4 et L. 162-16-4-1, minoré des marges prévues par la décision mentionnée à l’article L. 162-38 et des taxes en vigueur, du prix de cession au public mentionné à l’article L. 162-16-5 ou du tarif de responsabilité mentionné à l’article L. 162-16-6. »
II. – Pour l’année 2021, le montant M mentionné à l’article L. 138-10 du code de la sécurité sociale est fixé à 23, 99 milliards d’euros.
III. – Pour l’année 2021, le montant Z mentionné à l’article L. 138-19-8 du code de la sécurité sociale est fixé à 2, 09 milliards d’euros.
À l’occasion de la discussion de cet article, je souhaite rappeler que, depuis des années, notre groupe politique demande le rétablissement d’une politique publique de production et de distribution des médicaments en France et en Europe. Nous constatons que, si nous étions peu nombreux au départ, la multiplication des pénuries de médicaments et la crise sanitaire de la covid-19 ont convaincu de nombreuses associations, des professionnels de santé et des citoyennes et citoyens que l’État devait reprendre la main.
L’État ne peut plus rester sans rien faire et dépendre des stratégies des laboratoires, qui ont délocalisé la production de médicaments vers les pays d’Asie. Je pense également aux comportements de certains grossistes-répartiteurs, qui préfèrent vendre leurs stocks de médicaments aux pays les plus offrants, ainsi qu’aux tensions sur les approvisionnements, volontairement créées par les laboratoires pour faire augmenter les prix.
Les autorités publiques sont sommées d’agir pour garantir un service essentiel, à savoir l’accès universel aux soins de santé et aux médicaments. Pour rappel, en 2019, ce sont plus de 1 200 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur qui ont été concernés par des tensions ou une rupture d’approvisionnement, contre 800 en 2018.
L’obligation pour les industriels de constituer un stock de sécurité votée l’an dernier était un premier pas – je reviendrai sur les lacunes du dispositif, en particulier sur le décret du ministre de la santé limitant à deux mois la couverture des besoins en médicaments. À nos yeux, il est temps d’aller plus loin. C’est ce que nous proposerons au mois de décembre, lorsque nous examinerons notre proposition de loi portant création d’un pôle public du médicament et des produits médicaux.
Sachant que le contexte sanitaire doit nous amener à réfléchir dans les mois à venir sur le choix du mode de production du futur vaccin contre la covid-19, nous proposerons, dans le cadre de ce débat, une production publique du vaccin permettant de garantir le respect des meilleures conditions de sécurité et de transparence, ainsi qu’un tarif ne créant pas une dépense excessive pour la sécurité sociale. En réalité, nous voulons que ce vaccin soit accessible à toutes et tous sur l’ensemble de la planète, qu’il soit gratuit et, pour ce qui concerne la France, qu’il soit remboursé à 100 % par la sécurité sociale.
Nous entamons l’examen d’une série d’articles consacrés, comme chaque année, à la fiscalité du médicament et des dispositifs médicaux, au travers d’un mécanisme désormais bien connu des spécialistes : la clause de sauvegarde.
La commission des affaires sociales a débattu de plusieurs amendements portant sur quatre thèmes distincts, que les aléas de la discussion nous feront tour à tour aborder, mais qu’il convient de ne pas confondre.
Premièrement : la clause de sauvegarde des médicaments. Il s’agit d’un mécanisme fiscal qui vise à juguler en dernier recours les dépenses d’assurance maladie en matière de médicaments et qui soulève depuis plusieurs années les contestations des acteurs pharmaceutiques.
Deuxièmement : la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux. Créée l’année dernière, cette clause aboutit à des résultats décevants, comme l’affirme elle-même la Cour des comptes dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale. Toutefois, la commission propose de la redessiner sur le modèle de celle qui est appliquée aux médicaments.
Troisièmement : la fixation du prix des médicaments. Un amendement de nos collègues René-Paul Savary et Bruno Retailleau visera à prendre en compte les évolutions industrielles en matière de médicaments dans l’Union européenne.
Enfin, quatrièmement : la fiscalité de la répartition pharmaceutique. C’est un sujet qui ne peut plus être différé, eu égard à son urgence.
Tels sont, mes chers collègues, les points dont nous aurons à débattre dans le cadre d’un certain nombre d’amendements.
L’amendement n° 216 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi et Dumas, M. Dallier, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Remplacer le nombre :
par le nombre :
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
Les dispositions de l’article 17 s’inscrivent pleinement dans la stratégie gouvernementale de rationalisation des dépenses de santé. Le Gouvernement a donc aménagé la clause de sauvegarde, en minorant le taux d’abattement dont les laboratoires bénéficiaient jusqu’à présent, le faisant passer de 20 % à 5 %.
Il est normal que les entreprises pharmaceutiques soient mises à contribution et s’impliquent dans la politique de baisse des prix des produits de santé menée par le CEPS. C’est pourquoi le Gouvernement leur offre la possibilité de s’acquitter de leur contribution par le biais d’une baisse du prix de leurs médicaments, avec cette fois-ci une fenêtre d’abattement plus importante. Il n’en reste pas moins que la minoration de l’abattement de base à 5 % est grandement préjudiciable, non seulement pour les petites structures avec des moyens moins importants, mais également pour l’attractivité de notre territoire s’agissant des investissements et des expérimentations cliniques dont tant de patients atteints de pathologies rares et lourdes ont besoin.
À défaut de trouver de meilleures solutions, il convient que ce nouveau mécanisme de pression à la baisse des prix soit incitatif pour les entreprises. Il doit être plus intéressant pour les laboratoires de répercuter leur contribution sur leurs prix, ce qui fera baisser le niveau de l’Ondam (objectif national de dépenses d’assurance maladie), plutôt que de s’acquitter de cette contribution l’année fiscale suivante. Aussi, afin de garantir l’attractivité de cet aménagement de la clause de sauvegarde, le présent amendement vise à ramener le taux d’abattement minimum à 10 %, dans le cadre de la politique de baisse des prix des médicaments.
Avec le droit en vigueur, les entreprises dont il est ici question peuvent être exonérées de la clause si elles affichent pour l’ensemble du chiffre d’affaires un taux de conventionnement avec le Comité économique des produits de santé supérieur à 80 %. L’article élève ce taux à 95 %, ce qui revient, comme vous le dites, ma chère collègue, en vision miroir, à baisser le taux d’abattement à 5 %. En contrepartie, il aménage un régime d’exonération individuelle pour toute entreprise ayant consenti à une baisse de son prix net de référence.
Une telle individualisation de la négociation, bien qu’elle ait suscité la perplexité, puis les doutes, du secteur présente au moins, selon moi, l’intérêt de tenter l’expérience. C’est pourquoi l’économie générale de l’article 17 a été jugée satisfaisante par la commission, qui a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Pour des raisons similaires, le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.
Nous avons déjà perdu notre place de leader européen en matière de recherche. Nous risquons désormais d’être à la traîne des autres pays. En effet, il n’y aura plus aucune attractivité pour les laboratoires qui s’occupent de la recherche et de l’amélioration de la santé de nos patients.
Les procédés actuels nécessitent énormément de recherches. Selon moi, le nivellement par le bas n’est pas la bonne solution.
J’entends ce que dit Mme Delmont-Koropoulis. Nous avons évoqué le sujet rapidement au moment de l’examen des amendements en commission.
Lorsque nous avons rédigé, avec Véronique Guillotin et Yves Daudigny, un rapport sur l’accès précoce à l’innovation, nous avons bien vu quels étaient les freins pour les entreprises.
Qu’il y ait une régulation des prix et des négociations serrées entre les laboratoires et le CEPS, c’est normal. Nous devons maîtriser les prix, notamment par rapport à leur impact sur les comptes sociaux. Néanmoins, cet article introduit une modification importante du dispositif.
Mme Delmont-Koropoulis propose quelque chose d’intermédiaire entre ce qui existait avant et ce qui est prévu par le texte. Sa proposition me semble équilibrée. Pour ma part, je serais plutôt favorable à cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 217 rectifié, présenté par Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi, Lassarade et Dumas, M. Dallier, Mme Gruny, MM. Savary, Lefèvre et Charon, Mmes Bonfanti-Dossat et Berthet, MM. Bascher, H. Leroy, E. Blanc et Piednoir et Mme Lavarde, est ainsi libellé :
Alinéa 10, seconde phrase
Remplacer les mots :
arrêté des ministres chargés de la santé et
par les mots :
l’accord-cadre mentionné au premier alinéa de l’article L. 162-17-4 du code
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.
La politique de négociation conventionnelle sur les prix entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques repose sur la confiance et la responsabilité de chaque partie. Chacune d’elle sait que le coût de l’innovation est justement évalué et qu’il permettra un accès équitable de chacun aux produits de santé. C’est d’ailleurs sur ce fondement que près de 95 % des laboratoires ont conventionné avec le CEPS.
La relation contractuelle entre le CEPS et les entreprises pharmaceutiques a permis à la France d’être leader en matière de production de médicaments en Europe et d’être un important créateur d’emplois industriels, ce qui risque de ne plus être le cas désormais.
Il est essentiel que la politique conventionnelle soit protégée et promue par le législateur. Les garanties apportées par cette méthode sont importantes pour que chaque patient puisse avoir accès à des stratégies thérapeutiques de qualité et, pour ceux qui le nécessitent, ciblées. C’est la raison pour laquelle cet amendement vise à confier la fixation du barème mesurant le taux d’avancement de la contribution due au titre de la clause de sauvegarde à un accord-cadre négocié entre le CEPS et les syndicats des entreprises pharmaceutiques plutôt qu’à un arrêté ministériel.
J’aurais bien aimé que le Gouvernement argumente.
Sur ce genre d’amendement, prenons garde ! En effet, à l’heure actuelle, avec l’épidémie de covid, la pression sur les médicaments, ainsi que sur les vaccins, est forte. Il est absolument nécessaire de ne pas céder au lobby pharmaceutique.
Sanofi est en train de licencier à tour de bras dans des sites orientés vers la recherche que je connais bien, puisqu’ils sont implantés dans le Val-de-Marne, tout en versant des dividendes à ses actionnaires, au détriment de la recherche pour le bien-être des patientes et des patients et de l’approvisionnement en médicaments.
Comme le rappelait voilà quelques jours l’association UFC-Que Choisir, les pénuries explosent : plus de 1 200 médicaments étaient concernés en 2019, et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé prévoit le double pour 2020, notamment du fait de la crise sanitaire.
Au-delà des ruptures, c’est la durée d’attente qui est inquiétante. En 2017, les usagers ont dû attendre en moyenne quatorze semaines avant de constater un retour à la normale de l’approvisionnement de leurs médicaments. Les vaccins sont les plus touchés : ils sont en moyenne indisponibles pendant 179 jours, soit près de six mois. En 2020, la durée médiane des ruptures d’approvisionnement en officine a été de huit mois. Ici, au Sénat, nous avons fait des rapports extrêmement intéressants sur la pénurie des médicaments, accompagnés de recommandations bien plus drastiques que ce que nous avons voté dans le cadre de l’amendement précédent et ce que nous nous apprêtons à voter.
J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur ce point : veillons à la mise en œuvre d’une maîtrise publique. La possibilité, pour le Gouvernement, d’intervenir constitue une arme. Je suis donc défavorable, avec l’ensemble de mon groupe, à cet amendement.
Ce que vous nous proposez, ma chère collègue, c’est une dérégulation : on retire à l’État sa capacité d’arbitrage. Je ne pense pas que l’État soit bête au point de tordre le cou des industries du médicament, en ne tenant absolument pas compte de leurs arguments. Il s’agit de trouver le juste équilibre entre l’intérêt général et la production et l’innovation sur notre territoire. Considérer que l’État n’a plus rien à voir dans cette affaire, c’est quand même très dangereux en cette période.
On peut certes réfléchir sur l’avenir de la stratégie industrielle du médicament en France. Il y a certainement des choses à faire. On peut débattre de la durée entre la fin de la recherche et la mise en vente du produit.
La réalité, c’est l’existence d’aides en faveur de la recherche et l’innovation. Le crédit d’impôt recherche est particulièrement utilisé par l’industrie du médicament. Cela l’empêche-t-elle de délocaliser ? Malgré le CICE et le crédit d’impôt recherche, elle délocalise non pas simplement la production dans des pays à bas coût, mais aussi ses laboratoires de recherche et développement. Il n’y en a jamais assez ! Il faut encore remettre de l’argent et de la dérégulation et les laisser gérer les prix, tout ça payé par la sécurité sociale, qui est ensuite déficitaire !
C’est tout de même le rôle de l’État d’être l’arbitre, en dernier ressort, entre l’industrie et l’intérêt général. Je ne comprends pas que, dans la période actuelle, pleine d’incertitudes, notamment pour ce qui concerne la manière dont les marchés régulent l’approvisionnement des médicaments et l’implantation de la production, vous proposiez d’abandonner cette régulation.
Pour notre part, nous sommes favorables à un pôle public du médicament, et nous aurons un débat sur ce sujet.
La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.
C’est toujours le même discours…
Avec cet amendement, il s’agit simplement de négociations conventionnelles entre le CEPS – s’il n’a pas de lien avec le Gouvernement, je me demande qui peut en avoir… – et les syndicats des entreprises pharmaceutiques.
J’ai donné l’avis de la commission, qui est un avis favorable.
Personnellement, j’entends bien ce que dit Mme Lienemann. Le contenu de l’accord-cadre, qui n’a d’ailleurs qu’une existence facultative, est de normer le plus légèrement possible les négociations entre l’industriel et le CEPS au moment de la définition des remises. Il ne me paraît pas souhaitable d’y faire figurer un élément susceptible d’infléchir a posteriori le montant de ces dernières.
Il convient de remettre les choses en place. Chacun son rôle ! Est-ce à l’accord-cadre de définir ce qui relève de l’impôt ? Car les exonérations relèvent effectivement de l’État et, donc, du Gouvernement.
Pour autant, je m’en remets à la commission, n’ayant pas la science infuse. Dans la mesure où il s’agit d’un sujet délicat et compliqué, j’écoute les uns et les autres. Toutefois, à un moment donné, il faut bien trancher. Ce qui existe aujourd’hui me paraît de qualité. On peut toujours l’amender, si vous le voulez, mais faites attention à ne pas modifier les responsabilités.
Je réitère l’avis défavorable du Gouvernement.
Le texte proposé dans l’article dont nous discutons prévoit que le taux d’abattement sera fixé par un barème déterminé par voie d’arrêté. Celui-ci permettra seulement de cadrer dans les grandes largeurs, par des fourchettes, ce taux d’abattement, qui doit rester, cela nous semble important, fixé par la loi. Il donnera de la clarté et de la prévisibilité, conformément aux attentes des entreprises.
Pour autant, une souplesse dans la modulation des taux d’abattement sera conservée, pour chaque entreprise pharmaceutique concernée par le déclenchement de la clause de sauvegarde. Ainsi, ces taux seront bien fixés au travers de négociations conventionnelles entre les syndicats représentatifs des entreprises du médicament et le Comité économique des produits de santé.
Comme le dit M. le rapporteur général, chacun son rôle. L’équilibre actuel, qui nous semble le bon, ne doit pas être modifié.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Savary et Bascher, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Boré, Bouchet, Brisson, Calvet, Cardoux, Chaize, Charon et Cuypers, Mmes L. Darcos et Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mmes Di Folco, Estrosi Sassone et Férat, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme Goy-Chavent, M. Gremillet, Mmes Gruny et Lavarde, MM. Le Gleut, Lefèvre, H. Leroy et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Muller-Bronn et MM. Paccaud, Pellevat, Piednoir, Pointereau, Rapin, Sautarel, Savin, Sido, Sol, Tabarot et Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le III de l’article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport inclut un état des lieux de l’industrie du médicament et des produits de santé en France, indiquant notamment le nombre d’emplois créés et supprimés dans l’année, ainsi que les éventuelles ouvertures et fermetures de sites industrie. »
La parole est à M. René-Paul Savary.
Le CEPS doit inclure, dans son rapport d’activité, des éléments supplémentaires.
Nous avons entendu le plaidoyer de Mme Lienemann, qui n’a pas tort. Si les laboratoires pharmaceutiques se sont éloignés de la France, c’est parce que les discussions n’aboutissaient pas, ce qui nuisait à la rentabilité économique. On allait voir ailleurs, où on était mieux rémunéré.
Il nous paraît donc important que le CEPS, qui fixe le prix des médicaments, la clause de sauvegarde et les remises, prenne en compte les efforts des entreprises qui ont leur siège social en France et qui créent des emplois. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que figurent au sein de son rapport annuel d’activité un certain nombre d’explications concernant ses décisions. Ces dernières doivent tenir compte du nombre d’emplois créés ou supprimés dans l’année, ainsi que des éventuelles ouvertures et fermetures de sites industriels. Dans le cadre de la crise sanitaire actuelle, il paraît logique que ces éléments soient pris en considération.
L’avis de la commission est plutôt favorable, mais je demande, une fois n’est pas coutume, l’avis du Gouvernement sur cet amendement, qui vise à préciser le contenu du rapport remis chaque année au Parlement par le Comité économique des produits de santé en demandant qu’y soient inclus des éléments relatifs à la politique industrielle du médicament. L’enjeu est de taille – René-Paul Savary vient de le rappeler – s’agissant de la localisation, des fermetures et des ouvertures de sites industriels.
Il serait intéressant de savoir, monsieur le secrétaire d’État – j’espère que vous pourrez nous donner des éclaircissements –, si le CEPS est ou non le bon véhicule. Il est en tout cas important, dans la phase actuelle, de pouvoir disposer d’un état des lieux sur l’avenir de l’industrie pharmaceutique.
Le CEPS ne nous semble pas le bon véhicule pour aborder ce sujet crucial, qui est une priorité du Gouvernement. Cette instance, vous le savez, a pour mission, fixée par la loi, de déterminer les prix des médicaments et les tarifs des dispositifs médicaux à usage individuel pris en charge par l’assurance maladie. Il nous semble donc que les éléments supplémentaires que vous souhaitez voir figurer dans son rapport dépassent largement la mission qui lui a été confiée.
Si je dis « largement », c’est parce que ce sujet crucial doit faire l’objet d’une approche globale qui va bien au-delà des seules compétences et du seul champ d’intervention du CEPS. Cette question relève davantage des compétences du ministre de l’économie, qui, au nom du Gouvernement, a d’ores et déjà pu faire adopter un certain nombre de mesures, depuis le début du quinquennat, pour favoriser l’implantation des entreprises en France.
L’implantation des entreprises en France ne dépend pas que du niveau auquel est fixé le prix des médicaments ; il ne faudrait pas qu’un tel amalgame s’instaure : elle dépend de beaucoup d’autres facteurs, des financements offerts aux projets de recherche, par exemple, des mesures prises en soutien aux essais cliniques, du crédit d’impôt recherche ou encore des questions de main-d’œuvre et des taxes applicables aux entreprises, autant de champs sur lesquels le Gouvernement est intervenu, depuis le début de ce quinquennat, pour soutenir les industries en France.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Si j’ai bien compris, monsieur le secrétaire d’État, vous nous dites que le Comité économique des produits de santé ne peut pas fournir à notre intention les éléments que nous cherchons à recueillir. En conséquence, il ne s’agit pas du bon véhicule. Mais il faut nous dire quel est le bon véhicule ! Si c’est Bercy, dont acte ! Mais nous aimerions que Bercy nous communique ces éléments.
Jusqu’à présent, nous n’avons pas le sentiment que tout soit clair et net. C’est pourtant très important. Les interrogations sont nombreuses, aujourd’hui, sur les pénuries de médicaments notamment, sans parler des autres dispositifs médicaux. Nous souhaiterions donc savoir où trouver ces informations, si vous en disposez.
Merci, monsieur le rapporteur général, de rester fidèle à votre engagement et de continuer à soutenir cet amendement.
J’entends bien, monsieur le secrétaire d’État : le CEPS n’est certainement pas le bon véhicule. Mais j’ai l’impression que, ce soir, vous recourez à cet argument sur beaucoup d’amendements…
Que nous disent les laboratoires quand nous les rencontrons ? Catherine Deroche le sait tout aussi bien que moi, puisque, travaillant activement, nous avons notamment organisé, avec Corinne Imbert, avec d’autres, un certain nombre d’auditions de biotechs, grandes et petites, et essayé de promouvoir des dispositifs comme celui de l’utilisation testimoniale – vous voyez que nous essayons.
Or que nous disent ces sociétés ? Qu’en France elles rencontrent des difficultés, du point de vue de la recherche notamment. Ailleurs, des milliards sont mis sur la table pour la recherche ; en France, le compte n’y est pas. Souvent, quand une société française trouve une molécule, les essais cliniques sont devenus d’une complexité telle qu’elle les fait faire dans d’autres pays. Si on ajoute à ce tableau l’intervention très serrée du CEPS, dont la vision est strictement économique – on peut le comprendre, il est payé pour ça : faire des économies pour la sécurité sociale –, le résultat auquel on parvient est que ces entreprises vont s’installer ailleurs.
Il s’agit souvent de multinationales ; même lorsque le siège est en France, le dirigeant français finit par se dire, après qu’il est allé frapper à la porte d’autres pays où il voit que les choses se passent différemment : « En France, c’est trop compliqué ? Alors, délocalisons ! » Et la tarification fixée par le CEPS entre en ligne de compte dans les critères utilisés par ces entreprises pour décider si elles restent ou non en France. L’arbitrage dépasse en effet largement le cadre français, et même le cadre européen : il est mondial.
Il faut donc aller plus loin, et trouver le bon véhicule. Je souhaite malgré tout que cet article soit amendé afin que la discussion puisse avoir lieu en commission mixte paritaire et qu’on nous dise quelles perspectives on peut avoir pour l’avenir s’agissant de faire cesser ce départ d’entreprises vers d’autres pays.
Vous pouvez tout à fait adopter cet amendement et demander au CEPS d’inclure dans son rapport tous ces éléments, mais, sans vouloir parler pour lui, il ne sera tout simplement pas en mesure de vous faire un état des lieux exhaustif de l’impact de la politique du médicament, car il n’en aura qu’une vision parcellaire.
Ce dont nous parlons relève bien du prix, mais pas uniquement : il y va également – vous l’avez dit vous-même –, plus globalement, de la politique de recherche que nous menons. Certains éléments concernent le CEPS, d’autres concernent le ministère que je représente aujourd’hui, celui des solidarités et de la santé, d’autres encore le ministère de l’économie et des finances – un certain nombre de dispositions, d’ailleurs, se trouvent plutôt dans le projet de loi de finances que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette politique se trouve donc en différents endroits.
Je me garderai bien de donner des conseils à la Haute Assemblée, mais elle dispose, me semble-t-il, d’un certain nombre d’instruments, d’outils, d’évaluation des politiques publiques menées par le Gouvernement. La commission des affaires sociales peut ainsi déclencher des missions d’information pour avoir un regard sur cette question, qui est importante et qui constitue, je l’ai dit, une priorité du Gouvernement.
Je dis simplement, en tout cas, que le CEPS ne sera pas en mesure de vous donner l’ensemble des informations dont vous souhaitez disposer, car ce sujet dépasse très largement son seul champ de compétences, c’est-à-dire la question du prix des médicaments.
Notre collègue Savary pose une question tout à fait importante. Le bon vecteur est-il celui qu’il propose ? Ce n’est pas certain. Néanmoins, autant je suis critique sur toute une série de régulations et sur le rôle de l’État en général, autant je pense que nous devons réfléchir, dans ce pays, à des stratégies de filière pour le médicament. Bien sûr, dans certains cas, seul est en cause l’appât du gain – on connaît ça… –, mais il existe aussi des blocages, qu’il faut analyser – certains ont été cités.
J’espère que le haut-commissaire au plan, M. Bayrou, va s’attaquer à des débats comme celui-ci : comment planifier la filière du médicament en France ? Comment lui donner tous les moyens de se développer, de ne pas délocaliser, et même de relocaliser ? Il y a là des sujets majeurs.
Il est vrai néanmoins que, parmi d’autres critères, celui des conditions de la recherche notamment, il y a le critère du prix. Or je ne suis pas sûre que l’obsession du moindre coût du médicament, indifféremment produit en France ou ailleurs, donne toujours le bon résultat. Là où il s’agit de construire des systèmes d’évaluation et de fixation des taux de remboursement et des prix, il me semble qu’avec un peu d’ingéniosité, sans tomber dans le protectionnisme étroit, on pourrait quand même, du point de vue des remboursements, favoriser un juste prix pour ce qui est produit en France et être plus exigeant pour ce qui ne l’est pas. Or, paradoxalement, c’est plutôt l’inverse qui se passe : comme on nous dit que les autres pays ne veulent pas nous vendre à moins de nous vendre cher, nous acceptons de payer cher à l’importation et nous serrons le kiki aux entreprises françaises.
C’est un travail assez pointu qui doit être entrepris ; il nécessite des outils publics de précision, au plus près des entreprises partenaires.
Je ne crois pas que l’adoption de l’amendement de M. Savary puisse régler tous ces problèmes ; je le prends comme un amendement d’alerte. Il faut, collectivement, le Gouvernement, le haut-commissaire au plan, l’ensemble de celles et de ceux qui espèrent maintenir et développer une filière du médicament dans ce pays, se mettre autour de la table pour trouver une solution avec les partenaires sociaux. Je note d’ailleurs que, dans la structure proposée, les partenaires sociaux sont quasi absents : les salariés, ça n’existe pas… C’est déjà une carence ! En tout cas, l’enjeu est extrêmement important et urgent.
Je soutiendrai cet amendement. Si une évaluation dans le cadre du rapport du CEPS ne réglera pas tout, celui-ci n’étant pas forcément en mesure de tout prendre en compte, ce sera déjà, néanmoins, un premier pas, qu’il est important de faire. Cessons de nous contenter de dire que nous ne voulons plus voir nos industries pharmaceutiques délocalisées, et donnons des signaux !
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 17 est adopté.
Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 607 rectifié ter, présenté par Mmes Monier, Blatrix Contat, Jasmin, Préville et Conway-Mouret et MM. Tissot, Redon-Sarrazy et Stanzione, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au a de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1, 75 % » est remplacé par le taux : « 1 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
L’initiative de cet amendement proposé par Mme Monier revient à la chambre syndicale de la répartition pharmaceutique. Dans le cadre de la situation d’urgence, les grossistes-répartiteurs proposent, en attendant la refonte de leur marge et de leur fiscalité, de réduire le taux de la contribution due par chaque entreprise du secteur à 1 % du chiffre d’affaires. La somme dégagée serait de 40 millions d’euros pour ce secteur, qui représente 12 000 emplois en France.
Les six amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 276 rectifié quater est présenté par M. Milon, Mmes Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa, Calvet, Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Sol, Rapin, Piednoir, Pointereau et Houpert, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard et Babary.
L’amendement n° 411 rectifié est présenté par M. Henno, Mmes Guidez, Doineau, Sollogoub et Jacquemet, MM. Duffourg, Le Nay et Cazabonne, Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union Centriste.
L’amendement n° 633 est présenté par M. Bonhomme.
L’amendement n° 675 rectifié quater est présenté par Mme V. Boyer, MM. Boré, Le Rudulier et Frassa, Mme Micouleau, M. Daubresse, Mmes Procaccia et Joseph, MM. Pemezec, B. Fournier et Bouchet, Mmes F. Gerbaud, Drexler et Thomas et MM. Cuypers et Genet.
L’amendement n° 853 rectifié ter est présenté par Mme Berthet, M. Bonneau, Mmes Lassarade et Gruny, MM. Savary et Belin, Mmes Imbert et Chauvin, MM. Saury, Chasseing et Decool, Mme Di Folco et M. Bouloux.
L’amendement n° 878 rectifié quinquies est présenté par Mme Guillotin, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux et Menonville, Mme Mélot et MM. Lagourgue, A. Marc, Wattebled et Malhuret.
Ces six amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au a de l’article L. 138-2 du code de la sécurité sociale, le taux : « 1, 75 % » est remplacé par le taux : « 1, 4 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon, pour présenter l’amendement n° 276 rectifié quater.
La parole est à M. Olivier Henno, pour présenter l’amendement n° 411 rectifié.
L’amendement n° 633 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 675 rectifié quater.
La crise sanitaire de la covid-19 est venue percuter très fortement l’organisation de notre système de soins, avec une intensité et une violence inédites. La chaîne d’approvisionnement en médicaments, dont les entreprises de la répartition pharmaceutique, bien qu’ignorées du grand public, sont pourtant la cheville ouvrière, a été en première ligne et mise à très rude épreuve.
Dans ce contexte exceptionnel, le secteur de la répartition a fait preuve d’une mobilisation sans précédent pour répondre à l’ensemble des demandes des pouvoirs publics dans la gestion de la crise sanitaire, en assurant notamment, avec les pharmaciens, la distribution de plus de 600 millions de masques chirurgicaux et FFP2.
Outre ces missions supplémentaires assurées tout au long de la crise, les entreprises de la répartition pharmaceutique jouent au quotidien un rôle crucial dans la chaîne du médicament en assurant l’approvisionnement des 21 000 pharmacies françaises, sur l’ensemble du territoire. Leurs missions font l’objet d’obligations de service public encadrées par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé : elles doivent disposer d’un stock de médicaments correspondant à au moins quinze jours de consommation habituelle, livrer l’ensemble des pharmacies d’officine dans un délai de vingt-quatre heures maximum après chaque commande et disposer d’au moins neuf médicaments sur dix commercialisés en France.
Si je rappelle tous ces éléments, c’est parce qu’aujourd’hui cette profession est pénalisée par une taxe qui est devenue antiéconomique et confiscatoire. Son poids est de 185 millions d’euros, à rapprocher du montant des pertes annuelles du secteur : 23 millions d’euros en 2017, 46 millions d’euros en 2018, 65 millions d’euros en 2019 – les pertes de 2020 devraient être elles aussi significatives, alors que plusieurs entreprises ont déjà dû mettre en place des plans de sauvegarde de l’emploi.
Depuis plusieurs années maintenant, les professionnels de la répartition alertent sur la situation économique de leur secteur, qui s’aggrave chaque année et en est aujourd’hui à un point très critique. Ils accumulent les pertes en raison d’une rémunération réglementée qui ne correspond plus aux coûts que le secteur doit supporter, à quoi s’ajoute, comme je le disais, un modèle fiscal antiéconomique et confiscatoire.
Pourtant, des discussions existent avec les pouvoirs publics depuis l’automne 2018 ; elles ont notamment permis de définir de nouvelles règles de rémunération, mais elles ne corrigent que très partiellement ces déséquilibres et laissent le secteur dans une situation de précarité.
Ces derniers jours, les pouvoirs publics sont de nouveau confrontés à la difficulté de devoir assurer en urgence la distribution de produits tels que les tests antigéniques de dépistage du covid-19 et les stocks de vaccin antigrippal, qui manquent un petit peu partout.
Nous proposons donc de diminuer le taux de la taxe à laquelle sont assujettis les grossistes-répartiteurs.
La parole est à Mme Martine Berthet, pour présenter l’amendement n° 853 rectifié ter.
Je veux juste rappeler combien il est important de soutenir le secteur de la répartition pharmaceutique ; ce soutien permet le maintien des pharmacies rurales et de ce maillage si important dans un contexte de désertification médicale.
La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 878 rectifié quinquies.
Il s’agit du taux de la taxe sur le chiffre d’affaires des grossistes-répartiteurs. Je rappelle qu’en 2018 ce chiffre d’affaires était à peu près de 17 milliards d’euros ; il se traduisait pour la profession par un excédent brut d’exploitation de 200 millions d’euros.
Les grossistes-répartiteurs estiment aujourd’hui qu’un allégement du taux de cette fiscalité sur leur chiffre d’affaires à 1, 4 % représenterait un signal encourageant. La commission a donc émis un avis favorable sur les amendements qui visent à instaurer un tel taux et un avis défavorable sur celui de Mme Monier, qui tend à fixer ce taux à 1 %.
Je demande le retrait de l’ensemble de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Il y a deux aspects à envisager concernant ce secteur : les mesures d’urgence qu’il convient de prendre et les difficultés plus structurelles, dont le Gouvernement a totalement conscience.
Rappelons, vous l’avez fait, le rôle qu’ont joué les grossistes-répartiteurs dans le cadre de la crise sanitaire que nous traversons. Ils ont apporté leur contribution sur des missions exceptionnelles, comme la sénatrice Valérie Boyer, dont je salue l’arrivée au Sénat, le rappelait : la livraison des masques ou encore de certains médicaments aux officines, afin d’éviter les déplacements de patients.
Ces missions ont donné lieu à des prises en charge spécifiques. Les missions relatives aux masques ont engendré, pour les grossistes-répartiteurs, des frais importants, que nous avons décidé de couvrir par une augmentation des indemnités : l’indemnité versée pour la distribution de chaque boîte de cinquante masques passe à 1, 75 euro et une indemnité de 15 000 euros par semaine est prévue pour leurs missions de livraison de médicaments entre hôpitaux et officines.
Afin de compenser leur baisse d’activité alors qu’ils subissent des coûts fixes, une mesure d’urgence de 30 millions d’euros a en outre été décidée, via une revalorisation des marges, dans l’arrêté publié le mois dernier. Cette revalorisation s’appliquera dès le dernier trimestre de 2020. Ce montant a d’ores et déjà été pérennisé pour les années suivantes. Il y a là, typiquement, à la fois une mesure d’urgence, destinée à compenser les pertes de chiffres d’affaires alors que les coûts fixes, eux, n’ont pas disparu, et, d’ores et déjà, une mesure structurelle destinée à faire face aux difficultés structurelles du secteur.
Nous n’ignorons pas ces difficultés structurelles ; nous apportons des réponses pour y remédier. Outre ces 30 millions d’euros annuels, qui sont donc pérennisés, nous étudions différentes pistes pour rendre la marge de ces acteurs moins sensible à l’évolution du prix des médicaments, notamment par la mise en place d’une rémunération par forfait pour certaines missions importantes. La baisse de contribution qu’un certain nombre d’entre vous proposent viendrait percuter ces travaux plus globaux et, par ailleurs, affecterait les ressources de l’assurance maladie sans forcément constituer une solution pérenne aux difficultés du secteur, puisqu’une telle baisse bénéficierait tant à la vente directe qu’aux grossistes-répartiteurs.
Sachez enfin que nous rencontrerons la semaine prochaine, comme nous nous y étions engagés, la chambre syndicale de la répartition pharmaceutique, afin de continuer à travailler sur ces mesures structurelles de soutien au secteur.
Voilà le cadre global, mesures d’urgence et mesures structurelles, que le Gouvernement met en place.
Si j’ai bien compris ce que vous venez de dire, monsieur le secrétaire d’État, vous entendez nos propositions, mais vous déciderez la semaine prochaine, en dehors du Parlement, avec les grossistes-répartiteurs, de faire quelque chose qui échappe à la décision que nous allons prendre aujourd’hui. La décision ne va donc pas se faire au Parlement ; elle va se faire ailleurs.
Cela signifie que nous sommes obligés de rouvrir la longue discussion que nous avons eue tout à l’heure sur le rôle du Parlement. Vous nous dites que vous entendez les efforts qui ont été faits par les grossistes-répartiteurs, que vous entendez ce que nous proposons, mais que vous allez plutôt discuter avec la profession, la semaine prochaine, et que, peut-être, si nous sommes gentils, vous nous tiendrez au courant ! À quoi cela sert-il, dans ces conditions, que nous proposions des amendements sur lesquels nous avons travaillé ?
Je ne suis pas du tout d’accord avec cette façon de travailler ; sur toutes les travées de cet hémicycle, mes collègues sont intervenus pour dire que ces méthodes de travail devaient cesser. Il faut respecter le Parlement !
Ce n’est pas ce que j’ai dit, madame la sénatrice. J’ai dit, d’une part, que le Gouvernement a d’ores et déjà pris un certain nombre de mesures – merci de le rappeler – et, d’autre part, que des discussions et des réflexions sont déjà cours avec les personnes concernées. Je dis juste, donc, qu’il y a peut-être d’autres solutions possibles que celles proposées par les sénateurs, qui d’ailleurs n’imposent pas de passer par la loi, car tout ne passe pas forcément par la loi, et qui peuvent être émises ou partagées par les premiers concernés, ou naître de discussions avec eux. Je n’ai rien dit de plus, et ce dans le plus grand respect de la représentation nationale.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 276 rectifié quater, 411 rectifié, 675 rectifié quater, 853 rectifié ter et 878 rectifié quinquies.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
L’amendement n° 287 rectifié quinquies, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, MM. Sautarel, Piednoir et Savary, Mme Delmont-Koropoulis et MM. Regnard et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les deux premiers alinéas de l’article L. 138-19-10 du code de la sécurité sociale, sont ainsi rédigés :
« Le montant total de la contribution est calculé comme suit :
Montant remboursé par l’assurance maladie pour l’ensemble des entreprises redevables (MR)
Taux de la contribution (exprimé en % de la part du montant remboursé)
Montant remboursé par l’assurance maladie supérieur à Z et inférieur ou égal à Z multiplié par 1, 01
Montant remboursé par l’assurance maladie supérieur à Z multiplié par 1, 01 et inférieur ou égal à Z multiplié par 1, 02
Montant remboursé par l’assurance maladie supérieur à Z multiplié par 1, 02
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon.
Monsieur le secrétaire d’État, mes remarques ne sont nullement tournées contre vous. Je vous tiens en grande estime et amitié. Cependant, je regrette profondément que, dans toutes ces discussions qui ont trait à la santé, nous n’ayons pas en face de nous, à vos côtés, le ministre de la santé.
J’en viens à mon amendement.
L’article 17 précise le montant du taux Z pour 2021 concernant la clause de sauvegarde sur la liste en sus des dispositifs médicaux. Toutefois, le dispositif mis en place à l’occasion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ne prévoit pas de mécanisme permettant une graduation du taux de contribution en fonction de plusieurs seuils de dépassement du taux Z, adaptée au tissu économique du secteur du dispositif médical, constitué en majorité de PME, TPE et ETI.
Le présent amendement vise à intégrer ce point en instaurant une progressivité de la contribution pour la clause de sauvegarde relative aux dispositifs médicaux de la liste en sus.
La commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur l’amendement de M. Milon visant à instaurer un barème progressif.
L’argument d’un parallélisme avec la clause de sauvegarde des médicaments, souligné dans l’exposé des motifs, est certes séduisant, mais nous fait oublier que, contrairement aux médicaments, la dynamique de dépenses des dispositifs médicaux est beaucoup plus importante et nettement supérieure au barème de l’Ondam. La Cour des comptes, dans son récent rapport, a souligné l’importance de ce sujet et nous a conviés à la plus grande vigilance. Ce dispositif, selon elle, est incomplet, faiblement efficace, mais présente le mérite de réguler les dépenses des hôpitaux.
Pour toutes ces raisons, et tout en tenant compte des réserves de la Cour des comptes, je le répète, nous émettons un avis favorable.
Monsieur le sénateur Milon, je vais essayer d’être aussi clair et convaincant que M. le ministre des solidarités et de la santé.
Cet amendement vise à intégrer une progressivité dans le déclenchement de la clause de sauvegarde sur les dispositifs médicaux. Cette mesure avait fait l’objet, déjà l’année dernière – vous l’avez évoqué de manière incidente –, de nombreux débats. Le Gouvernement avait émis un avis défavorable, et cet amendement avait été rejeté. Par souci peut-être de constance, l’avis du Gouvernement sera également défavorable cette année, pour des raisons de fond que je me permets d’exposer à nouveau.
Vous faites une analogie avec le médicament. Les principes et objectifs sont évidemment les mêmes. Dispositifs médicaux et médicaments diffèrent cependant sur des points majeurs.
Tout d’abord, la clause sur les dispositifs médicaux porte sur des montants remboursés et non sur le chiffre d’affaires. Ensuite, elle vise un champ restreint, à savoir les dispositifs médicaux onéreux de la liste en sus seulement, contrairement aux médicaments, dont la clause porte sur une base très large. Le ministre avait lui-même renoncé à l’extension du périmètre de la clause, notamment pour préserver le secteur. Enfin, la clause sur les dispositifs médicaux fixe un taux de déclenchement à 3 %, tandis qu’il s’élève à 0, 5 % pour le médicament. La comparaison nous semble rencontrer sa limite. Il est par ailleurs peu probable que la clause ne se déclenche en 2020.
Pour autant, je partage avec vous la volonté d’engager avec le secteur des dispositifs médicaux des échanges un peu plus structurés que ceux que nous avions, encore aujourd’hui même, de façon un peu informelle mais bien réelle. Il s’agirait d’examiner dans quelle mesure nous pourrions proposer des évolutions. Aujourd’hui, le Gouvernement et les acteurs n’ont pas trouvé de consensus. Nous proposons donc d’engager des discussions plus structurées pour évoquer la question de la régulation des dispositifs médicaux.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 351 rectifié ter, présenté par MM. Savary, Retailleau et Bascher, Mmes Berthet et Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Boré, Bouchet, Brisson, Calvet, Cardoux, Chaize, Charon et Cuypers, Mmes L. Darcos, Delmont-Koropoulis et Deromedi, MM. Détraigne et Duplomb, Mme Estrosi Sassone, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genet, Mme Goy-Chavent, M. Gremillet, Mme Gruny, MM. D. Laurent, Le Gleut, Le Rudulier, Lefèvre, H. Leroy et Longuet, Mme Malet, M. Mandelli, Mme M. Mercier, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Piednoir et Pointereau, Mmes Procaccia et Puissat et MM. Rapin, Regnard, Reichardt, Saury, Sautarel, Savin, Sido et Sol, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « La fixation de ce prix tient compte également de considérations de politique industrielle, tels les investissements pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production dans l’Union européenne, au Royaume-Uni et en Suisse, les étapes de fabrication des médicaments ou des dispositifs médicaux, dans des sites de production situés dans l’Union européenne, au Royaume-Uni et en Suisse pour les médicaments ou produits de dispositifs médicaux libérés en France et les exportations. »
La parole est à M. René-Paul Savary.
Je reviens à la charge avec le CEPS, non plus sur les emplois, mais plutôt pour prendre en considération les politiques industrielles menées par les entreprises. Il s’agit d’élargir le cadre de nos réflexions et de prendre en compte les implantations autour de nous, en Europe et au-delà, puisqu’il nous faut aussi y intégrer le Royaume-Uni et la Suisse, qui ne font pas partie de l’Union européenne.
Nous sommes passés, en dix ans, de la première à la quatrième place des producteurs européens de médicaments. Mme Lienemann l’a bien dit. À force de contracter les prix et de ne pas prendre en compte l’ensemble de la filière économique, les médicaments sont fabriqués ailleurs et nous les rachetons à un prix plus élevé. Quel est le bilan ? Nous sommes perdants. À vouloir trop contracter les prix, nous perdons, et le coût en est plus élevé pour la sécurité sociale.
Je souhaite que la fixation de ce prix tienne compte de considérations de politique industrielle, telles que les investissements pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production, dans l’Union européenne, le Royaume-Uni et en Suisse, ainsi que les étapes de fabrication des médicaments ou des dispositifs médicaux – il nous faut prévoir dès maintenant les élargissements à venir – dans des sites de production voisins.
L’amendement n° 261 rectifié quinquies, présenté par M. Milon, Mmes V. Boyer, Deromedi et Dumas, MM. Grand, Burgoa et Calvet, Mme Berthet, MM. Brisson, Charon, Dallier et de Legge, Mme Garriaud-Maylam, MM. D. Laurent, H. Leroy et Mandelli, Mme Richer, M. Sautarel, Mme L. Darcos, MM. J.B. Blanc et Bonne, Mmes Puissat et Malet, MM. Sol, Rapin, Piednoir, Savary, Pointereau et Houpert, Mmes Di Folco et Delmont-Koropoulis et MM. Gremillet, Regnard, Babary et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du I de l’article L. 162-16-4 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « La fixation de ce prix tient compte également de considérations de politique industrielle, tels les investissements pour le maintien, la modernisation et le développement de l’outil de production dans l’Union européenne, les étapes de fabrication des médicaments dans des sites de production situés dans l’Union européenne pour les médicaments libérés en France et les exportations. »
La parole est à M. Alain Milon.
Mon amendement est sensiblement le même que celui de M. Savary, mais il se limite à l’Union européenne, tandis que celui de M. Savary inclut le Royaume-Uni et la Suisse. Je retire donc mon amendement au profit du sien.
L’amendement n° 261 rectifié quinquies est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 351 rectifié ter ?
Nous sommes contre l’idée qui consiste à consacrer de nouveaux critères de fixation des prix pour les produits de santé. Vous le savez, monsieur le sénateur, la tarification des produits de santé repose sur la valeur thérapeutique et l’apport clinique pour les patients.
Instaurer le schéma que vous proposez risquerait de nous conduire à des surcoûts indus pour l’assurance maladie, dans la mesure où la fixation des prix reposerait sur des déclarations des entreprises qui ne pourraient faire l’objet de contre-expertises. Les laboratoires seraient incités à déclarer dans notre système, pour le seul maintien de leur implantation, des investissements de plus en plus élevés. Il faudrait ne pas payer cher un médicament inutile, au seul motif que le laboratoire qui le produit aurait investi dans l’Union européenne.
À l’inverse, la localisation de production en France peut aider à la sécurisation des approvisionnements, ce qui est, comme nous le voyons au cours de cette crise, un enjeu majeur.
Votre amendement fait cependant un lien direct entre fixation du prix et implantation des entreprises en France. Une fois encore, la question de l’implantation des entreprises en France dépend de beaucoup d’autres leviers qu’actionne le Gouvernement : le financement des projets de recherche, le soutien des essais cliniques, le crédit d’impôt recherche, etc. L’enjeu des implantations nationales et de leur impact pour la sécurisation des approvisionnements sera travaillé dans l’accord-cadre en cours de négociation avec l’industrie.
Le Gouvernement, pour toutes ces raisons, émet un avis défavorable.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
Mes chers collègues, nous avons examiné 145 amendements au cours de la journée ; il en reste 406.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 13 novembre 2020 :
À neuf heures trente-cinq, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2021 (texte n° 101, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le vendredi 13 novembre 2020, à zéro heure trente-cinq.
La liste des candidats désignés par la commission des affaires sociales pour faire partie de l ’ éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a été publiée conformément à l ’ article 8 quater du règlement.
Aucune opposition ne s ’ étant manifestée dans le délai d ’ une heure prévu par l ’ article 8 quater du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire sont :
Titulaires : Mme Catherine Deroche, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Corinne Imbert, MM. René-Paul Savary, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin et M. Martin Lévrier ;
Suppléants : M. Philippe Mouiller, Mmes Pascale Gruny, Chantal Deseyne, Élisabeth Doineau, Corinne Féret, Véronique Guillotin et Laurence Cohen.