MM. Didier Guillaume et Philippe Leroy sont désignés rapporteurs sur le projet de loi n° AN 1548 (XIVe lég.) d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission).
Le projet de loi comporte deux articles sur la formation et l'enseignement agricole et la commission des affaires culturelles donnera un avis sur ces articles. Je souhaite que les rapporteurs associent à leurs travaux les groupes d'études concernés par les sujets abordés dans le projet de loi.
Notre collègue Jean-Jacques Mirassou, président du groupe d'études chasse et pêche, propose d'analyser l'impact économique de la chasse sur le monde rural. Cette proposition a reçu un avis favorable du bureau de la commission qui s'est réuni ce matin.
Un rapport d'information sur l'impact économique dans les territoires de la pratique de la chasse est confié à M. Jean-Jacques Mirassou.
Une réunion sur le thème du marché européen de l'énergie se tiendra le 17 décembre prochain en présence de M. Oettinger, commissaire européen à l'énergie. M. Roland Courteau y assistera en qualité de président du groupe d'études énergie.
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finances pour 2014.
EXAMEN DU RAPPORT
Au-delà des crédits budgétaires de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et de ceux du compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural » (CASDAR), la politique agricole s'appuie sur plusieurs leviers : le levier communautaire avec la politique agricole commune (PAC) et le levier fiscal. Je les évoquerai brièvement avant d'aborder le projet de loi d'avenir de l'agriculture, les sujets de la sécurité sanitaire et de l'agroalimentaire.
Après deux ans de négociations, les européens sont parvenus à un accord sur la réforme de la PAC pour la période 2014-2020. Le budget 2014 tire d'ores et déjà les conséquences des choix européens, même s'il s'agit d'une année de transition.
La PAC apporte l'essentiel des soutiens publics à l'agriculture en France : ses aides et subventions représentent plus de 9 milliards d'euros annuels à comparer aux 3 milliards d'euros de crédits budgétaires nationaux. Malgré l'âpreté des négociations entre européens, l'enveloppe de la PAC est moins touchée que nous ne le redoutions, avec une réduction de l'ordre de 12 % en euros constants pour le premier pilier et 18 % pour le deuxième pilier, soit une quasi-stabilité en euros courants pour 2014-2020 par rapport à 2007-2013.
La France est privilégiée avec un financement européen de 9,1 milliards par an en moyenne sur la période. Les pertes sur le premier pilier sont presque intégralement compensées sur le deuxième. Là où l'enveloppe PAC baisse pour l'Italie de 4,5 %, pour l'Espagne de 3,8 %, pour l'Allemagne de 8 %, elle diminue pour la France de 1,7 % en valeur réelle. Ce résultat est à mettre au crédit de la pugnacité du Président de la République qui a refusé de sacrifier l'agriculture française.
Les négociations sur la PAC ont également permis d'aboutir à un compromis avec trois mesures fortes : verdissement du premier pilier, convergence, bonus d'aide aux jeunes agriculteurs.
La future PAC offre d'importantes marges de manoeuvres aux États membres. Le premier pilier devient adaptable : il sera possible de distribuer des aides couplées jusqu'à 15 % de l'enveloppe nationale ou encore de majorer les droits à paiement de base pour les premiers hectares.
Lors du sommet de l'élevage de Cournon, début octobre, le Président de la République a annoncé les arbitrages dans la mise en oeuvre nationale de la PAC. La France a choisi de privilégier l'élevage et les filières animales. Le maintien des aides couplées au secteur animal, la création de dispositifs pour le lait et l'engraissement, la revalorisation de 15 % de l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN), la majoration de prime sur les 52 premiers hectares financée par un prélèvement de 20 % de l'enveloppe du premier pilier, permettront le transfert d'1 milliard d'euros d'aides du végétal vers les productions animales, qui procurent des revenus plus faibles aux exploitants. En avril dernier lors du vote de la résolution sur la PAC, le Sénat avait souhaité favoriser l'élevage. Il a été entendu.
Les choix budgétaires de 2014 s'inscrivent dans un contexte très contraint. Certaines dispositions fiscales favorables aux agriculteurs sont remises en cause et les crédits du ministère connaissent une nouvelle baisse. Pour autant, le budget agricole assure la poursuite des objectifs traditionnels : aide à l'installation des jeunes agriculteurs, soutien à l'investissement dans les filières, haut niveau de sécurité sanitaire ...
La loi de programmation des finances publiques 2013-2015 prévoit une baisse des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ». La diminution amorcée dans le précédent projet de loi de finances se poursuit en 2014 : les autorisations d'engagement (AE) sont réduites de 9,2 % soit 300 millions, pour s'établir à 3 milliards d'euros et les crédits de paiements (CP) de 4,5 %, soit 150 millions, pour atteindre 3,31 milliards d'euros.
L'essentiel de l'ajustement budgétaire est concentré sur le programme 154 qui porte les dispositifs d'intervention économique dans le secteur agricole, en réduction de 18 % en AE et de près de 9 % en CP.
La réduction est plus apparente que réelle car elle s'accompagne d'une modification de la clef de financement des différents dispositifs entre crédits nationaux et crédits européens, l'augmentation de ces derniers compensant la baisse des premiers. Si la prime à la vache allaitante sort du budget de l'État, générant une économie de 165 millions d'euros en AE et 99 millions d'euros en CP, elle est remplacée par une aide couplée financée par des crédits européens ; de même, la baisse de 69 millions d'euros de la ligne budgétaire finançant l'ICHN masque une amélioration du niveau de soutien grâce à une augmentation du taux de cofinancement communautaire. Enfin, la diminution des crédits destinés à la dotation jeunes agriculteurs (DJA) ne traduit pas un affaiblissement de la politique de soutien à l'installation car la DJA sera cofinancée à 80 % et non plus à 50 % par le Fonds européen de développement agricole et rural (FEADER) tandis que les droits à paiement de base prévue pour les jeunes agriculteurs dans le cadre du premier pilier de la PAC seront majorés.
Les crédits d'intervention en faveur des filières dans les DOM sont maintenus, de même que les crédits de FranceAgrimer qui s'établissent à un peu moins de 100 millions d'euros, ce qui constitue un minimum incompressible, grâce à un abondement exceptionnel de 10 millions d'euros en provenance des surplus de recettes du CASDAR.
Gérard César évoquera les mesures budgétaires en faveur de la forêt du programme 149, dont les AE progressent de 10,3 % et les CP de 7,3 %. La nouvelle ambition pour la forêt et le bois se traduit par la création d'un fonds stratégique et des crédits en hausse.
Le programme 206 consacré à la sécurité sanitaire s'établit est stable, avec 505 millions d'euros de crédits, contre 511 l'année dernière.
Enfin, le programme 215 qui contient les crédits de personnel du ministère de l'agriculture et de ses services déconcentrés accuse une baisse de moins d'1 % en AE et CP. Une pause est en effet nécessaire dans les restructurations.
La plupart des actions de 2013 sont reprises et financées. L'enseignement agricole connaît une progression de son enveloppe de 1,5 % avec la création de 150 postes dans l'enseignement technique agricole et de 30 postes d'auxiliaires de vie scolaire individuels (AVSi) destinés à aider les élèves handicapés.
Nous discuterons bientôt du projet de loi d'avenir de l'agriculture. Il poursuit l'objectif ambitieux de concilier performance économique et excellence environnementale. Dans cette perspective, le budget 2014 augmente les crédits des mesures agroenvironnementales (MAE) et consacre des sommes considérables aux mesures d'amélioration de la compétitivité des exploitations.
Les crédits des MAE passent de 43 à 57 millions d'euros en CP ; le budget propose également une augmentation d'un million d'euros du Fonds avenir bio en cohérence avec la démarche « produisons autrement » promue par le ministère de l'agriculture.
La compétitivité de l'agriculture française constitue une véritable préoccupation pour l'État. L'effort consenti est conséquent puisqu'il s'élève au total à 1,3 milliards d'euros.
Les crédits compensant auprès de la MSA les exonérations de cotisations sociales pour l'emploi de travailleurs occasionnels représentent 473 millions d'euros, soit presque un tiers du budget total du programme 154. Le coût de cette mesure appelle une évaluation précise de ses effets sur l'emploi dans les secteurs exposés à une forte concurrence, étant observé que l'instauration d'un salaire minimum en Allemagne améliorera sans doute les conditions de concurrence sur les produits agricoles et agroalimentaires en Europe. Parallèlement, le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) devrait bénéficier au secteur agricole et agroalimentaire à hauteur de 800 millions d'euros en 2014.
Le budget 2014 fait du maintien d'un haut niveau de sécurité sanitaire un objectif absolu. La crise de la viande de cheval a révélé la nécessité de renforcer la traçabilité et les contrôles. Ainsi, à périmètre constant, et contrairement à ce qui était prévu par la loi de programmation des finances publiques, le programme n° 206 n'enregistre pas de réduction d'effectifs. En contrepartie, les crédits d'intervention baissent. Il est vrai que le fonds de mutualisation monte en puissance et que les autorités sanitaires font le pari d'une bonne maîtrise des menaces sanitaires. Toutefois, la vigilance est de mise : la tuberculose bovine s'est installée dans plusieurs départements et nous avons été alertés sur le risque de résurgence de la fièvre catarrhale ovine en Corse et dans deux autres départements.
Les moyens des plans sectoriels financés par le programme 206 sont reconduits : 3,2 millions d'euros pour le plan Ecophyto, 1,3 millions d'euros pour le plan de développement durable de l'apiculture et 2 millions d'euros pour le plan Ecoantibio. En matière alimentaire et phytosanitaire, le budget 2014 est comparable au budget 2013.
La situation du secteur agroalimentaire doit nous interpeller. Les industries agroalimentaires emploient 417 000 personnes dans 13 500 entreprises, contribuent à 11 % de la valeur ajoutée de l'industrie en France et génèrent un excédent commercial de plus de 11 milliards d'euros.
Or, cette activité est soumise à rude concurrence, notamment de la part de certains de nos partenaires européens. Les performances de l'industrie agroalimentaire française s'émoussent ce qui menace des pans entiers de l'activité agricole, dont la transformation constitue le débouché naturel.
Cette question revêt une importance particulière dans le secteur de la viande où nous assistons à des défaillances d'entreprises : Gad en production porcine, Doux et Tilly-Sabco en production avicole. Les plans d'avenir des filières porc et volaille d'avril 2013, le contrat de la filière alimentaire signé le 19 juin 2013 ou l'appui technique à l'exportation à travers la plateforme Expadon constituent des initiatives intéressantes. Il convient aussi de soutenir le développement de la recherche appliquée et de l'innovation à travers des dispositifs spécifiques comme les crédits du CASDAR et le crédit impôt recherche (CIR).
Le secteur agroalimentaire est fortement dépendant des transports. Le report de la mise en oeuvre de l'écotaxe poids lourds est de ce point de vue une bonne nouvelle. Plus généralement, l'ensemble des décisions fiscales doivent être évaluées à l'aune de leur effet sur l'industrie agroalimentaire, fondamentale au maillage économique de nos territoires.
Pour conclure, je propose à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission : « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et à ceux des crédits du CASDAR.
Je ne reviendrai pas sur les équilibres généraux du budget et le contexte dans lequel s'inscrit le projet de loi de finances pour 2014.
J'aborderai quatre sujets : la forêt, le rôle du CASDAR, les instruments de couverture contre les aléas climatiques et le soutien à l'investissement dans les exploitations agricoles.
La forêt est incontestablement à l'honneur dans le budget agricole 2014 et cela constitue un sujet de satisfaction. Les crédits du programme 149 augmentent de 10,3 % en AE et de 7,3 % en CP pour s'établir respectivement à 321 et 338 millions d'euros.
Mais il faut tempérer notre enthousiasme : les deux tiers de ces crédits, soit 216 millions d'euros, vont à l'Office national des forêts (ONF) dont la situation reste fragile. L'ONF bénéficie de 104,4 millions d'euros de versement compensateur au titre des forêts publiques gérées, d'une contribution complémentaire de 53,4 millions d'euros, de 22,3 millions d'euros au titre des missions d'intérêt général comme les mesures de lutte contre l'incendie (DFCI) ou encore la restauration des terrains de montagne (RTM) et de 7,5 millions d'euros en provenance d'autres programmes du budget général. Enfin, les communes forestières lui versent 30 millions d'euros au titre des frais de garderie de leurs forêts.
L'engagement de l'État aux côtés de l'ONF ne pourra se poursuivre à ce niveau. Il est indispensable que les ressources propres de l'Office, issues essentiellement de la vente de bois, se redressent durablement.
Une part importante des crédits du programme, soit 44 millions d'euros, finance le nettoyage et la replantation de parcelles suite à la tempête Klaus de 2009. Cette ligne est appelée à se réduire progressivement.
L'innovation majeure de la maquette budgétaire 2014 est la création du fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB), dotés de 25,5 millions d'euros de crédits budgétaires, près de 15 ans après la fin du Fonds forestier national. Cette création a été saluée avec vigueur et espérance par le club Bois et Forêt du Parlement, réuni hier soir. Elle doit porter une politique ambitieuse visant à faire de nos 16 millions d'hectares de forêts un atout économique dans un contexte de croissance de la demande de bois et de sous-exploitation du potentiel forestier français.
L'efficacité d'une telle politique nécessite l'ajustement de quelques mesures du projet de loi de finances. Ainsi, le PLF prévoit de supprimer les 3,7 millions d'euros alloués aux plans pluriannuels régionaux de développement forestier (PPRDF) créés par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche de 2010 pour les attribuer au FSFB. A l'inverse, il est essentiel que les actions soutenues par le FSFB s'appuient sur les PPRDF dont l'élaboration a demandé beaucoup de travail.
Le FSFB doit bénéficier de ressources supplémentaires à hauteur des besoins que les professionnels de la forêt estiment à environ 150 millions d'euros par an. La création par la loi d'avenir sur l'agriculture d'une taxe de défrichement dont le rendement attendu s'élève à 18 millions d'euros par an sera insuffisante. Il a été envisagé d'affecter au FSFB une fraction de la taxation du contenu carbone des produits énergétiques taxés au titre des taxes intérieures de consommation. Cette piste mérite d'être explorée.
Il n'y aura pas de FSFB ambitieux sans budget substantiel et pas de politique forestière sans moyens. Le projet de loi de finances amorce une dynamique qui doit maintenant se matérialiser.
Le sort du CASDAR constitue un sujet d'étonnement à plusieurs titres. Sa dotation est calculée en fonction des encaissements réels du produit de la taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises agricoles. L'an dernier, l'estimation des recettes du CASDAR était excessivement basse. Or, en 2013, le surplus a réintégré le budget général.
Pour 2014, le gouvernement demande au CASDAR d'assurer ses interventions traditionnelles : financement du programme national de développement agricole et rural (PNDAR) 2014-2020, des instituts techniques agricoles, des chambres d'agriculture, des organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR), des appels à projet agroécologiques.
Mais il prévoit en outre de lui transférer la charge de 10,8 millions d'euros correspondant aux mesures de soutien à l'innovation dans les filières mises en oeuvre par FranceAgrimer, étant observé que le projet de loi de finances pour 2011 lui avait déjà transféré la prise en charge des dépenses de génétique animale et d'amélioration variétale, à hauteur de 10 millions d'euros.
Il convient de ne pas multiplier les missions nouvelles à financer sur les crédits du CASDAR, faute de quoi les programmes de recherche pourraient en pâtir.
J'en viens aux instruments de couverture du risque aléa climatique. La couverture assurantielle a progressé dans les grandes cultures, où elle atteint désormais 40 %, et en viticulture mais elle n'est pas généralisée. Les cultures fruitières et le maraîchage restent à l'écart du mouvement. L'État a réduit son soutien à l'assurance-récolte, passé de 25 millions d'euros en 2013 à 19 millions d'euros en 2014. Les professionnels craignent son désengagement et une baisse de la prise en charge des primes d'assurance souscrites par les agriculteurs sous le seuil de 65 %. J'appelle à la plus grande vigilance sur cette question car il ne serait pas acceptable que la dynamique d'assurance soit cassée dans des secteurs où le fonds de calamités agricoles ne peut plus intervenir.
Le dispositif de la déduction pour aléa (DPA) représente une dépense fiscale modeste, de l'ordre de 7 millions d'euros par an. La DPA peut constituer un véritable outil d'assurance individuelle de premier niveau à condition d'être plus attractive. Une modification du taux d'actualisation des sommes placées en cas de réintégration pour non utilisation ainsi que le plafond du dispositif méritent d'être revus. Renée Nicoux et moi-même proposons un amendement en ce sens.
Le chantier de la gestion des risques est en tout état de cause loin d'être clos. Les compagnies d'assurance souhaitent une garantie de l'État pour la réassurance. Bercy s'y est opposé. C'est un sujet important qu'il nous faudra examiner.
J'aborde enfin le sujet des aides à la modernisation des exploitations agricoles. Alors que l'innovation et l'investissement sont fondamentaux pour atteindre l'excellence environnementale et économique, le budget pour 2014 est peu ambitieux.
Après avoir subi une baisse d'un quart entre 2012 et 2013, les enveloppes dédiées à la modernisation des exploitations (plan de modernisation des bâtiments d'élevage, plan de performance énergétique et plan végétal pour l'environnement, plan spécifique à la Corse et aux DOM) diminuent encore pour s'établir à 30,2 millions d'euros. Cette diminution ne sera pas totalement couverte par l'augmentation du taux de cofinancement communautaire.
De même, l'enveloppe des prêts bonifiés aux coopératives d'utilisation de matériel agricole en commun est réduite de 3 % à 2,5 millions d'euros, soit un niveau très inférieur aux besoins estimés. Cette situation est d'autant plus regrettable que l'investissement en commun est vertueux du point de vue économique et favorise l'installation est jeunes agriculteurs.
Le Président de la République a annoncé à Cournon la création d'un fonds d'investissement et de modernisation doté de 200 millions d'euros destiné à l'élevage. L'État y mettra-t-il des crédits supplémentaires ou les crédits du PMBE y seront-ils dédiés ?
L'enveloppe du deuxième pilier de la PAC est fortement mise à contribution par des taux de cofinancement plus importants sur l'ICHN ou encore sur la DJA. Disposera-t-on encore de crédits pour financer un plan de modernisation des exploitations ?
Le budget 2014 ne change pas fondamentalement la donne : les agriculteurs devront d'abord et avant tout compter sur eux-mêmes pour moderniser leur outil de production.
À titre personnel, je ne voterais par les crédits de la mission : « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », mais en tant que rapporteur, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural ».
La conclusion des deux rapporteurs pourrait être : heureusement que l'Europe est là pour compenser la baisse du budget national !
Je suis favorable à la majoration de prime pour les 52 premiers hectares mais il conviendrait pour être juste de tenir compte du nombre d'exploitants réels. La plupart du temps, l'épouse d'un exploitant appartenant à un groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) n'est pas associée du GAEC alors même qu'elle y travaille. Une seule prime sera versée au groupement, là où deux primes seraient versées dans un GAEC total bénéficiant du principe de transparence, une prime au titre des 52 premiers hectares puis une autre au titre des 52 suivants. Cela traduit une absence de reconnaissance inacceptable envers les femmes d'exploitants qui sont déjà pénalisées en matière de retraite.
Madame la rapporteure a évoqué le verdissement de la PAC ; il convient d'être attentif à sa mise en oeuvre. La complexité des dispositifs de MAE décourage les agriculteurs d'y avoir recours. Les représentants de la fédération nationale ovine nous ont expliqué que les critères d'attribution retenus défavorisent les exploitants qui ont beaucoup de landes et de grands espaces.
Je regrette que les crédits alloués aux questions sanitaires diminuent alors que certaines maladies animales comme la tuberculose bovine progressent. Il conviendrait d'attirer l'attention du ministre sur le fait que des crédits supplémentaires pourraient être nécessaires en cours d'année en cas de crise sanitaire.
J'en viens aux questions agroalimentaires. Avec quelques députés, nous avons déjeuné ce matin avec des représentants de Mac Donald's. Aujourd'hui, l'entreprise recherche des fournisseurs étrangers car les entreprises françaises ne sont plus compétitives. La situation bretonne doit nous alerter.
Il y avait autrefois une politique de plantations de forêts. Ce n'est plus le cas. Lors de la réunion hier soir du club Bois et Forêt, il a été souligné que nous allons manquer de bois. Il nous faut créer des pistes forestières et construire des routes en montagne pour cultiver et extraire le bois. Y a-t-il des crédits suffisants pour ces dessertes forestières qui sont indispensables?
Enfin, les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA ) peuvent-elles bénéficier du CICE ?
Gérard Bailly souligne l'importance des crédits européens pour compenser la baisse du budget agricole national. Cette remarque est pour le moins étonnante ! Tout à l'heure en séance publique, je rapportais sur la contribution française au budget de l'Union européenne. La France est le 2ème contributeur de l'Union européenne mais seulement le 3ème bénéficiaire des fonds européens. L'écart s'élève - excusez du peu - à 7 milliards d'euros. Dès lors, il est bien naturel qu'à l'issue de la bataille menée avec succès par le président de la République et le ministre de l'agriculture pour maintenir le niveau des crédits européens versés à la France au titre de la PAC, nous utilisions ces crédits pour satisfaire les besoins de l'agriculture française.
Dans le contexte budgétaire actuel, c'est de la bonne politique et votre intervention critique me paraît déplacée. D'autant que l'évolution dans la répartition des aides est positive et renforce l'équité entre les exploitations. Nous avions d'ailleurs voté ici unanimement au printemps dernier le texte de la proposition de résolution européenne sur l'avenir de la PAC visant à orienter ces aides vers l'élevage. Alors, il faut savoir ce que l'on veut !
Le budget actuel ne marque aucune rupture. Nous sommes sur une évolution qui tient compte des difficultés des éleveurs, notamment des bassins laitiers. Ces difficultés ne font à mon sens que commencer. La fin des quotas en 2015 n'a pas été véritablement anticipée par les professionnels. Leur situation pourrait être comparable à celle des volaillers bretons qui ont passivement attendu la fin des restitutions sans y croire et sont aujourd'hui en faillite.
Je salue l'attention portée à la forêt, longtemps négligée. Le fonds forestier national a été supprimé en 2000 et on n'a pas reboisé après la tempête de 1999. La Chine nous achète des grumes et nous importons des produits finis. Le déficit de la filière bois s'élève à 7 milliards d'euros, alors que nous avons le troisième domaine forestier d'Europe ! Je salue l'effort entrepris en faveur de la forêt et me réjouis que l'avenir de cette filière constitue une priorité du ministre du Redressement productif.
Les mêmes regrettent que nous dépensions trop et en même temps réclament une hausse des dépenses. Ce n'est pas possible ! Le budget de l'agriculture a la chance de voir ses crédits préservés, grâce à la PAC. Le temps n'est plus où le budget de l'agriculture était une affaire strictement nationale : depuis une quinzaine d'années, il dépend des recettes nationales et européennes.
La prime aux 52 premiers hectares marque un choix fondamental. Nous la souhaitions depuis longtemps : redistribuer les aides est une mesure de justice. Quant à l'assurance récolte, ne critiquons pas les technocrates de Bercy, ils ne font qu'appliquer les décisions politiques. À nous de faire preuve de volonté et de persévérer même si tout n'est pas possible aujourd'hui.
Nous pouvons voter très majoritairement un budget qui permet à notre agriculture de se moderniser et qui offre des perspectives à nos agriculteurs.
Ce budget n'est en équilibre et acceptable que grâce à l'apport des fonds européens...
mais la répartition des crédits de la PAC sera difficile. Je suis partisan de la prime des 52 premiers hectares. Toutefois les mesures de verdissement m'inquiètent : dans certaines régions les opérations d'assolement tournent à la catastrophe. Les crédits du deuxième pilier risquent d'être affectés au développement durable plus qu'à l'agriculture elle-même. En outre les agriculteurs qui ne sont pas assurés subissent la double peine en cas de catastrophe naturelle : non seulement ils ne sont pas indemnisés par une assurance, mais en outre ils ne sont pas éligibles au fonds de garantie des calamités agricoles, alimenté par un prélèvement sur les polices d'assurance.
La situation de l'agro-alimentaire est critique en Bretagne ; à cet égard les responsabilités sont partagées. Toutefois il faut veiller à répartir les aides sur tout le territoire afin de ne pas fausser la concurrence.
Je suis favorable à la prime aux 52 premiers hectares. Mais les producteurs de lait sont insuffisamment aidés dans le cadre de la nouvelle PAC. Beaucoup abandonnent. Leur métier est particulièrement difficile : il exige une présence constante, et même les robots laitiers ont besoin de surveillance. Si nous n'y prenons garde, bientôt nous importerons du lait. Une étude montre que, dans ce secteur, plus les agriculteurs travaillent, plus leur revenu diminue.
Je suis satisfait du rééquilibrage des aides entre éleveurs et céréaliers. Ces derniers sont restés bien muets quand les premiers se sont plaints de la baisse de leur revenu provoqué par la hausse du prix des céréales. La prime des 52 hectares est bienvenue et constitue le signe d'une réorientation politique. Il y a quelques mois nous étions pessimistes sur le résultat des négociations sur la PAC. Finalement nous constatons que les résultats sont bons. C'est une bonne nouvelle pour tous les agriculteurs ; d'ailleurs ceux qui ont manifesté n'ont pas le soutien de leur centrale syndicale. Certains gagnent 13 000 euros par an, tandis que d'autres gagnent plus de 90 000 : un rééquilibrage était nécessaire.
L'enjeu est de sauvegarder la compétitivité de notre agriculture. Nous devons y veiller à travers ce budget, mais aussi à travers nos autres politiques concernant les normes, le niveau des charges, etc. Produire c'est bien, mais encore faut-il pouvoir transformer. Avec la suppression des quotas laitiers en 2015, notre agriculture laitière devra évoluer pour faire face à la concurrence de nos voisins européens ; la ferme des mille vaches en est une illustration. Mais les esprits ne semblent pas encore mûrs.
Je me réjouis que, pour la première fois, un ministre s'attaque à la question de l'apiculture, secteur sinistré. Je salue la mise en place d'un comité stratégique qui réunit les céréaliers et les apiculteurs, ainsi que tous les acteurs concernés. J'espère que nous redresserons cette filière essentielle pour l'agriculture dans son ensemble, la biodiversité et les productions végétales.
Jean-Jacques Lasserre a eu raison de dire que ce budget était acceptable. Il faut aussi souligner que notre ministre a obtenu un très bon compromis à Bruxelles. La coalition en Allemagne a décidé qu'un salaire minimum serait bientôt instauré : la concurrence déloyale des travailleurs de l'Est qui y travaillent pour quelques euros de l'heure cessera et le coût de la main d'oeuvre sera harmonisé en Europe. Il appartiendra à notre agriculture de privilégier la qualité et de monter en gamme.
Cette comparaison sans fin entre les céréaliers et les éleveurs est malsaine. Tant que les montants des primes PAC versées aux céréaliers ne seront pas ajustés en fonction des cours mondiaux, il y aura un problème.
Ce budget n'est pas mauvais ; le ministre a bien défendu nos intérêts. La forêt bénéficie de crédits. Nous ne voterons pas contre. Mais je crains que l'embellie ne soit que provisoire : l'équilibre n'est obtenu que grâce aux crédits européens et la situation de l'agro-alimentaire n'est pas réglée. Notre agriculture est tributaire des fluctuations des marchés et peine à s'adapter. L'agro-alimentaire rencontre les mêmes difficultés de compétitivité que l'industrie. Les primes agricoles ne suffiront pas. Il faut rétablir la compétitivité de notre pays. Il est illusoire de penser résoudre un problème de nature industrielle, comme en Bretagne, par des mesures agricoles. Je me réjouis de ce budget vu les circonstances, mais rien n'est réglé sur le fond. Notre position sera l'abstention positive.
Bruno Sido m'a demandé d'attirer l'attention sur un point : tous les producteurs céréaliers n'ont pas les rendements des grandes exploitations du bassin parisien ; en Haute-Marne les rendements sont de 50 quintaux à l'hectare et non 90. Mais la baisse des aides sera uniforme, ce qui risque de mettre en péril ces exploitations. En effet, Madame la rapporteure, heureusement que le budget européen existe, sinon nous aurions dû réaliser des arbitrages. Toutefois nous aurions pu faire plus pour les jeunes agriculteurs. Mes collègues sont optimistes. Je garderai le compte rendu de cette réunion et vous le montrerai quand les difficultés surgiront.
En effet, les rendements varient du simple au double et 52 hectares ne donnent pas la même valeur de production selon les régions. C'est un problème épineux.
Jean-Jacques Lasserre, dans notre proposition de résolution du printemps dernier nous nous étions prononcés en faveur d'aides contra-cycliques : les aides sont inutiles quand les cours sont élevés. Malheureusement le cadre de la PAC fixé pour les sept prochaines années ne le prévoit pas.
L'agro-alimentaire souffre, ce n'est pas nouveau. Comme nous l'avons montré dans le cadre de la mission commune d'information sur la filière viande, la France a perdu en compétitivité et en production depuis dix ans ; la crise des abattoirs en Bretagne en découle. De même, le rapport de la mission commune d'information sur la désindustrialisation des territoires du Sénat a fait état d'une perte de 800 000 emplois industriels en dix ans. La filière agro-industrielle a besoin d'investissements pour se moderniser et de mesures d'harmonisation sociale au niveau européen. Mais sans vouloir être désagréable, qui a gouverné la France depuis dix ans ?
Daniel Dubois, la ferme des mille vaches reproduit le modèle allemand : la PAC subventionne en réalité la production d'énergie obtenue grâce à la méthanisation, à tel point que la production laitière devient secondaire. Cette utilisation de la PAC est contestable ! La grande coalition au pouvoir en Allemagne envisage d'instaurer un salaire minimum. Les travailleurs de l'Est qui travaillent dans ce pays seront-ils concernés ? Quid de la directive services ?
Chacun reconnaît que ce budget est satisfaisant, compte tenu du contexte. Les crédits de la PAC sont certes mis à contribution, mais la PAC n'est-elle pas financée en partie par la France ? Tous les objectifs du ministère ont été maintenus, comme les dispositifs d'aides.
Le système des aides à l'hectare était injuste et pernicieux car il avantageait les exploitations les plus rentables; nos voisins européens l'ont déjà réformé. Nous avons perdu beaucoup de temps ; même avec la surprime pour les 52 premiers hectares un déséquilibre perdurera au détriment des zones les plus défavorisées, les zones d'élevage, car il faudra du temps pour modifier les références. Les manifestations de la semaine dernière étaient indécentes : un céréalier qui gagnait plus de 50 000 euros se plaignait que son revenu allait diminuer, quand tant d'autres agriculteurs gagnent moins de 10 000 euros. Il s'érigeait ainsi contre toute redistribution entre exploitants. C'est malvenu.
Nous devrons être vigilants lors de l'application des mesures agro-environnementales : les zones d'intérêt écologique ne doivent pas concerner les surfaces d'intérêt écologiques ; il faudra également prendre en compte le taux de chargement à l'hectare sur les landes pour ne pas défavoriser davantage les éleveurs. Enfin, pour faire face à la concurrence, les exploitations devraient privilégier la qualité plus que la quantité. N'est-ce pas l'image de la France à l'étranger ? Ce budget est un bon budget vu les circonstances. Il préserve l'essentiel.
Nous proposerons un amendement relevant le seuil de la dotation pour aléas (DPA).
Le CICE s'applique sur l'impôt sur les sociétés ; les coopératives n'en sont pas redevables. Notre ministre négocie avec Bruxelles pour qu'elles puissent bénéficier du dispositif selon des modalités particulières
Didier Guillaume, la difficulté concernant l'assurance récolte, c'est la réassurance car les compagnies d'assurance veulent une garantie de l'État, ce que Bercy a jusque-là refusé. Le gouvernement réfléchit à la possibilité d'autoriser les régions ou les départements dans les zones viticoles ou maraîchères à apporter leur garantie. Le dossier est ouvert. La contribution exceptionnelle de l'Europe permet de s'assurer contre l'aléa climatique. Nous évoquerons à nouveau ce sujet lors de l'examen de la loi d'avenir sur l'agriculture.
Nous avions déjà abordé la question des coopératives lors de l'examen de la loi sur l'économie sociale et solidaire. Elles bénéficient d'un statut dérogatoire : elles ne peuvent avoir le beurre et l'argent du beurre ! Attention à ne pas encourir les foudres de Bruxelles en sollicitant un nouvel avantage fiscal.
Effectivement, il faut être prudent. Lorsque j'étais députée européenne, le statut des coopératives était sur la sellette.
Je soutiens la position de notre rapporteure. Les agriculteurs sont inquiets. Certes, un rééquilibrage est nécessaire, mais comment sera mise en oeuvre la prime des 52 premiers hectares ? Il faut régler ces détails pour transformer l'essai.
La commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission «Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».
EXAMEN DES AMENDEMENTS
L'amendement n° 1 relève de 27 000 à 35 000 euros le plafond de la DPA par an. De plus il prévoit que le taux d'actualisation, appliqué lors du remboursement, est le taux d'intérêt légal, et non plus le taux d'intérêt de retard qui représente 33,6 % pour une période de sept ans.
La DPA pourrait servir de cadre à une assurance sur le long terme. Mais la fiscalisation est dissuasive : en l'absence d'aléas pendant sept ans, les agriculteurs doivent aujourd'hui réintégrer la dotation dans leur revenu imposable avec une pénalité de 33,6 %, ce qui est excessif.
L'amendement n° 1 est adopté.
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits « Énergie » du projet de loi de finances pour 2014.
EXAMEN DU RAPPORT
Au sein de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », le programme 174 regroupe les crédits dédiés à l'énergie. La même mission comporte cette année trois nouveaux programmes budgétaires, consacrés à la mise en oeuvre du nouveau Programme d'investissements d'avenir (PIA2) engagé en juillet dernier par le Gouvernement. Ces trois programmes sont liés aux politiques de l'énergie puisqu'ils concernent l'innovation pour la transition écologique et énergétique, les projets industriels pour cette même transition et enfin la ville et le territoire durables.
Si on ajoute le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités territoriales pour l'électrification rurale », créé l'an dernier en remplacement de l'ancien FACÉ et dont les moyens sont maintenus à hauteur de 377 millions d'euros, on voit que l'architecture budgétaire des crédits liés à l'énergie s'est complexifiée.
S'agissant du programme 174 qui constitue le coeur de la saisine de notre commission, je soulignerai, ce qui n'est pas négligeable en ces temps où tant de budgets sont à la baisse, le maintien de ses ambitions. Les chiffres bruts affichent certes une baisse de 13,1 %, mais c'est en raison de la diminution structurelle des sommes nécessaires pour financer les prestations versées aux anciens mineurs. De plus, les crédits avaient été abondés de manière exceptionnelle, l'an dernier, parce que la trésorerie de l'Agence de services et de paiement avait été mise en difficulté par un déficit du « bonus écologique » attribué aux acquéreurs d'automobiles émettant peu de gaz à effet de serre.
Outre la gestion des droits des anciens mineurs, une autre action importante de ce programme est l'action « Lutte contre le changement climatique », dotée de 35 millions d'euros, qui finance surtout la politique d'amélioration de la qualité de l'air dont les moyens sont stabilisés. Le Gouvernement a mis en oeuvre, au mois de février dernier, un plan d'urgence pour la qualité de l'air. Il est essentiel de poursuivre l'effort car une étude européenne a estimé en 2005 que les particules PM10 seraient responsables de la mort de 42 000 personnes par an en France. Notre pays est menacé de sanctions au niveau européen concernant le non-respect des valeurs limites de ces particules ainsi que pour la concentration en dioxyde d'azote.
Enfin, ce programme contient aussi une action intitulée « Politique de l'énergie » dotée de 6,2 millions d'euros, dont les deux tiers consistent en une subvention à l'Agence nationale de gestion des déchets radioactifs (ANDRA) pour la réalisation de l'inventaire triennal des déchets radioactifs.
D'une manière générale, ce budget est donc un budget d'attente en attendant la future loi sur la transition énergétique, qui devra fixer des objectifs de long terme pour la production, mais aussi pour la consommation d'énergie, afin de favoriser la sobriété énergétique, de limiter les émissions de gaz à effet de serre et d'accroître l'autonomie énergétique au niveau national et local.
Le présent projet de loi de finances comporte déjà des mesures fortes.
La première est l'un des articles phares de ce budget : la contribution climat-énergie qui introduit une composante « carbone » dans la fiscalité des produits énergétiques.
Il ne s'agit pas d'une taxe nouvelle, mais d'un accroissement des taxes intérieures de consommation qui touchent différents produits énergétiques. Cet accroissement est proportionné à l'effet de ces produits sur l'effet de serre, en prenant comme base un prix de la tonne de carbone de 7 euros en 2014, 14,5 euros en 2015 et 22 euros en 2016.
Le produit de cette contribution pourrait être de 2,41 milliards d'euros en 2015 et 4,05 milliards en 2016. Il faut mettre en face de ce produit le financement du crédit d'impôt en faveur de la compétitivité et de l'emploi (CICE) ainsi que les différentes mesures présentées dans ce budget à destination des ménages : par exemple l'application du taux réduit de réduit de TVA aux travaux de rénovation énergétique des logements.
Le projet de loi de finances réforme également la fiscalité des biocarburants, comme l'avait annoncé le Premier ministre à la conférence environnementale : la défiscalisation de taxe intérieure de consommation (TIC) dont bénéficient les biocarburants est supprimée, tandis qu'est pérennisée la réduction de taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) qui concerne l'incorporation dans les carburants de biocarburants.
Dans le même temps, le barème du bonus et du malus applicables aux automobiles à raison de leurs émissions de CO2 est révisé afin de rétablir l'équilibre de ce mécanisme, qui paraît bien difficile à trouver d'une année à l'autre.
Le projet de loi de finances pour 2014 réforme également - une fois de plus - les deux principaux mécanismes fiscaux consacrés à la rénovation thermique des logements.
D'une part le crédit d'impôt développement durable ou CIDD se voit recentré sur les « bouquets de travaux ». Le resserrement du dispositif, entamé depuis plusieurs années, se confirme.
Le nouveau CIDD a le mérite de la simplicité. Les dix taux actuels sont remplacés par deux taux différents : 15 % si la dépense est réalisée pour une action seule ou 25 % si elle fait partie d'un « bouquet » de travaux, le taux de 15 % étant réservé aux ménages modestes De plus, l'installation de moyens de production électrique qui bénéficient d'autres dispositifs de soutien, tels que les équipements de production d'énergie solaire, ne donneront plus accès au CIDD.
Il faut espérer que cette simplification permettra au CIDD de trouver une stabilité qui lui a manqué par le passé : les professionnels ne peuvent se lancer dans une activité sans une visibilité à l'horizon de plusieurs années. Un dispositif fiscal qui change en permanence n'est plus compris par les particuliers et perd son caractère incitatif.
S'agissant de l'éco-prêt à taux zéro, l'entreprise qui réalise les travaux devra justifier de qualifications particulières. C'est une bonne mesure qui garantira la qualité et l'efficacité des travaux.
Ces dispositions doivent s'apprécier dans le contexte de la nouvelle politique de soutien à la rénovation thermique des logements.
Le Gouvernement a enclenché un plan de rénovation énergétique ambitieux dont l'objectif est de rénover 500 000 logements par an d'ici à 2017. Un service public de proximité au service de la rénovation thermique est mis en place et un décret du 17 septembre dernier a défini une prime exceptionnelle de 1 350 euros, afin de permettre à des ménages sous conditions de ressources de réaliser des rénovations lourdes.
De même, l'article 7 ter du projet de loi de finance, introduit par les députés, prévoit la perception de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au taux réduit, pour les travaux d'amélioration de la qualité énergétique des locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans. La dépense fiscale est estimée à 500 millions d'euros par an.
Rappelons également que, suite à la loi du 15 avril 2013 et au récent décret du 15 novembre, l'extension du bénéfice des tarifs sociaux à 4 millions de ménages fragiles devient une réalité, ainsi que l'interdiction de la coupure de la fourniture d'énergie.
À cet égard je voudrais plaider pour la proposition de « chèque énergie », car les tarifs sociaux comportent des biais. En particulier ils ne visent pas les personnes qui se chauffent au fioul, parmi lesquelles on trouve bien des ménages fragiles qui n'ont pas accès à d'autres moyens de chauffage.
Enfin, j'ai souhaité aborder dans mon rapport certains points qui seront, à n'en pas douter, centraux dans le prochain projet de loi sur la transition énergétique.
Une incertitude concerne l'avenir des mécanismes actuels de soutien aux énergies renouvelables et tout particulièrement des tarifs d'achat de l'électricité renouvelable, même si le ministre a exclu leur disparition immédiate.
Le mécanisme d'obligation d'achat a permis le lancement de filières telles que l'éolien ou le photovoltaïque, grâce à sa simplicité : le tarif étant garanti sur une période de 15 ou 20 ans, il est facile de calculer la rentabilité du projet, même pour une petite installation.
Les appels d'offres permettent certes de mieux maîtriser les volumes produits et d'éviter les dérives qu'ont parfois connues des tarifs d'achat mal maîtrisés ; mais on peut se demander s'ils seront suffisants pour atteindre les objectifs. Le premier semestre 2013 a connu une baisse de 73 % des installations photovoltaïques par rapport au premier semestre 2012.
Dans le domaine de la production de chaleur, le fonds chaleur géré par l'Ademe présente de nombreuses qualités : le récent rapport de la Cour des comptes sur les énergies renouvelables fait état de l'efficacité de cet outil, qui permet d'accroître la production d'énergie au moyen de sources renouvelables avec un coût public très limité. Le fonds chaleur est préservé cette année avec des crédits de 220 millions d'euros, mais ce n'est pas suffisant : il faudrait le doubler pour se rapprocher des objectifs du Grenelle de l'environnement.
Je voudrais conclure sur les technologies et enjeux d'avenir.
En premier lieu, nous voyons apparaître une nouvelle filière, les énergies marines, pour laquelle la France est bien placée à un double titre : elle dispose naturellement de côtes propices, notamment pour la production d'énergie hydrolienne. Et sur le plan industriel, nous avons de grandes entreprises capables de produire des turbines et de donner à notre pays un avantage compétitif sur un secteur qui présentera des opportunités à l'export. Un premier appel d'offres a été lancé le 1er octobre dernier dans le cadre des « investissements d'avenir ».
La production d'énergie renouvelable devra également, à long terme, s'appuyer sur une capacité de stockage de l'énergie. Il faut soutenir la recherche et développement et la mise en place d'outils de démonstration afin d'identifier les technologies d'avenir : stations de pompage, hydrogène, batteries.
Enfin, je voudrais attirer votre attention sur la question de l'autoconsommation de l'électricité : il y a quelques années encore, seul un militant des énergies renouvelables pouvait avoir envie de consommer lui-même l'électricité qu'il produisait, car il est plus rentable de la vendre au tarif d'achat. Les choses vont changer avec la baisse du prix des équipements et la hausse du prix de l'électricité : certains projets, par exemple des toitures photovoltaïques sur des centres commerciaux, seront rentables en consommant sur place l'électricité produite.
Les défis sont considérables : le marché de l'électricité risque d'en être transformé, et avec lui non seulement les fournisseurs d'électricité, mais aussi et surtout les opérateurs de réseau : en effet, les auto-consommateurs ne seront que partiellement soumis à la taxe qui finance les travaux sur le réseau alors qu'ils continueront à l'utiliser de temps en temps. Il faudra donc, dans le cadre de la loi sur la transition énergétique, réfléchir à un modèle juridique et économique de l'auto-consommation.
Je vous propose en conclusion de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », concernant le programme 174 « Énergie, climat et après-mines ».
Je m'étonne que l'on ait mis aussi longtemps à proposer un bouquet fiscal complet d'optimisation thermique pour la rénovation de l'habitat ; le dispositif, jusqu'alors, défavorisait les foyers modestes ayant des « passoires thermiques » ! Je suis également surpris qu'il n'existe pas d'obligation d'équiper les constructions neuves de chauffe-eau solaires dans les régions où cela est adapté ...
J'ai été marqué par le « Grenelle de l'environnement », dont j'ai été rapporteur au nom de la commission. L'examen de la loi « Grenelle I », qui a fixé les grandes orientations en la matière, s'est bien passé. Celui de la loi « Grenelle II », qui prévoyait les mesures opérationnelles, a été plus difficile. L'ensemble, néanmoins, s'est avéré assez consensuel. Je comprends bien les difficultés économiques et financières des gouvernements qui se sont succédé, mais j'ai l'impression que l'on recule en ce domaine, et je le regrette.
Ainsi, le taux d'incorporation des biocarburants est réduit. Or, une filière s'est construite et stabilisée. 80 % du colza récolté en France sert désormais à produire de l'éthanol. Une baisse de moitié de ce taux, de 10 à 5 %, entraînerait une chute des cours du colza, donc des revenus des agriculteurs et, in fine, des recettes fiscales pour l'État.
Par ailleurs, il est nécessaire de réaliser plusieurs opérations de rénovation thermique pour bénéficier d'un taux maximum de réduction fiscale, ce que tout le monde ne peut pas faire.
S'agissant de l'écotaxe, il vaudrait mieux parler de taxe sur la relocalisation, me semble-t-il. Il aurait fallu expliquer aux agriculteurs bretons qu'elle a pour objectif de relocaliser la transformation de leurs productions en Bretagne. Le ministre en charge de l'environnement a été très discret sur ce dossier, c'est dommage.
Je salue l'effort consenti par le Gouvernement sur le programme « Habiter mieux », en termes de fixation du plafond et de niveau de la subvention. Mais je regrette qu'il ait imposé ce taux de 25 %. Certains départements vont plus loin, à l'exemple de la Somme, qui le porte à 39 %. Cela ne leur permet pas pour autant d'atteindre les objectifs quantitatifs de rénovation, car tout le monde ne peut pas financer pour 15 000 euros de travaux.
Je souhaiterais obtenir davantage d'explications du rapporteur sur l'essor de l'autoconsommation d'électricité et l'extinction potentielle du dispositif de soutien aux énergies renouvelables, qu'il a évoqués dans sa présentation.
Je félicite le rapporteur pour son rapport, à la fois clair et précis.
Je tiens à rappeler que le « Grenelle de l'environnement » était la transcription d'une directive européenne visant, d'ici 2020, à faire passer la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique européen à 20 %, à réduire les émissions de CO2 des pays de l'Union de 20 % et à accroître l'efficacité énergétique de 20 %. C'était un texte appréciable, mais il s'agit désormais de le mettre en oeuvre. À cet égard, les mesures envisagées pour inciter à la sobriété et l'efficacité énergétique me semblent intéressantes et adaptées aux foyers les plus modestes.
En matière d'énergies renouvelables, il nous faut jouer sur toutes les sources, dès lors qu'elles sont adaptées à leurs milieux. Pour ma part, je suis favorable à la biomasse forestière, qui alimente les réseaux de chaleur : la matière première est présente en grande quantité et devrait être davantage exploitée. L'hydraulique n'est pas non plus suffisamment utilisé ; qu'en est-il du renouvellement des concessions ?
Le 10 décembre, je rapporterai devant la commission des affaires européennes la directive européenne « biocarburants », dont l'objectif de 10 % d'utilisation de ce type d'énergie dans les transports s'étend en réalité à toutes les sources d'énergies renouvelables. La proposition de la Commission européenne de réduire à 5% leur taux d'incorporation s'explique par les conflits d'usage qu'ils provoquent. En Europe, les terres en jachère ont été majoritairement sollicitées. Leur défiscalisation ayant été annoncée de longue date, il n'y a pas eu de surprise et les investissements pourront donc être amortis. Dans les pays tiers, des changements d'affectation des sols indirects sont provoqués par les biocarburants, qu'il s'agisse du bioéthanol au Brésil ou des palmiers à huile en Indonésie, avec les conséquences néfastes que l'on connaît en termes de changement climatique et d'accès aux denrées alimentaires. Le Parlement européen a proposé un taux d'incorporation de 6 %, et la France de 7 %, pour ne pas pénaliser la filière « biocarburants » dans notre pays. Il faut aujourd'hui que la deuxième génération de biocarburants - issus de source ligno-cellulosique - parvienne à un stade industriel, et que l'on développe la troisième génération - qui utilise les algues.
Il n'y a pas de conflit d'usage, et d'ailleurs, il n'y a plus de jachère. Je me félicite des 7 % de taux d'incorporation défendus par la France. Je rappelle en outre, s'agissant des centrales hydrauliques, que ce n'est qu'après avoir été amorti qu'un outil industriel commence à rapporter des bénéfices.
Je regrette qu'on ne puisse pas accompagner les particuliers ne réalisant que des opérations limitées de rénovation thermique ...
Mais si ! Le rapporteur a expliqué que le mécanisme du CIDD était resserré autour de deux taux : 15 % si la dépense est réalisée pour une action seule, pour des ménages modestes, ou 25 % si elle fait partie d'un « bouquet » de travaux !
Va-t-on soutenir davantage les projets visant à accompagner la transition énergétique ? J'ai le sentiment qu'ils sont moins aidés aujourd'hui qu'il y a trois ou quatre ans ...
J'entends parler des difficultés que peuvent avoir des propriétaires modestes à rénover leur logement ; est-il envisageable que des tiers investisseurs tels que les établissements publics de coopération intercommunale et les conseils généraux ou régionaux, appuyés par la Banque publique d'investissement, leur proposent des prêts étalés sur plusieurs années ?
J'insiste sur le fait que ce budget est un budget de consolidation, dans l'attente du projet de loi sur la transition énergétique, qui devrait être examiné et adopté d'ici la fin de l'année prochaine.
La rénovation thermique connaît une réelle dynamique, si l'on en juge par les appels reçus par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) : 15 000 sur l'ensemble de l'année 2012, contre 9 000 chaque semaine en 2013 ! Le plan de rénovation énergétique mis en place par le Gouvernement y concourt, avec l'implantation de points de contact locaux, l'octroi d'aides aux ménages précaires ou la professionnalisation de la filière. Des primes de respectivement 1 350 et 3 000 euros sont prévues pour les ménages aux revenus moyens et modestes. Et le taux de TVA de 5,5 % sur les travaux de rénovation énergétique représente un coût global pour l'Etat de 500 millions d'euros, pour un volume de 10 milliards d'euros de travaux, ce qui n'est pas rien !
L'autoconsommation se développe fortement en Allemagne du fait de la hausse du prix de l'électricité. En France, des supermarchés pourraient y avoir recours bientôt pour consommer pendant la journée l'électricité produite en même temps sur leurs toits. Il va nous falloir réfléchir au cadre juridique et économique devant y présider : en effet, les auto-consommateurs ne participent que partiellement à l'entretien des réseaux, alors qu'ils les utilisent de temps en temps.
Les incitations au développement des énergies renouvelables ont permis d'amorcer le système. Mais celui-ci a atteint sa vitesse de croisière, connaît un rapprochement progressif des prix de marché et de rachat de l'électricité, et a donné lieu à quelques excès. D'où des interrogations sur l'opportunité de maintenir une contribution au service public de l'électricité (CSPE) en hausse, ou bien de revoir l'ensemble du dispositif. En 2014, je rappelle que la CSPE représentera plus de 6 milliards d'euros, auxquels s'ajouteront 2 milliards d'euros de dette vis-à-vis d'EDF.
60 % exactement, le reste finançant les tarifs sociaux, la cogénération et les zones non interconnectées.
Faut-il aller davantage vers les appels d'offre ou le tarif d'achat ? L'un comme l'autre présentent des inconvénients. Le ministre a dit récemment réfléchir à l'extinction des tarifs d'achat d'électricité, sans mentionner d'horizon précis ; cela se fera de façon progressive.
En matière d'hydroélectricité, nous avons signé une proposition de loi visant à porter la durée des concessions à 99 ans. La commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a envisagé plusieurs hypothèses : la remise en concurrence en favorisant la création de lots unifiés sur une même vallée avec une date d'échéance unique, la désignation par la loi d'un opérateur unique sur l'ensemble du parc, l'exploitation des concessions par un établissement public et enfin le passage du régime de la concession à celui de l'autorisation sur le modèle des réseaux de gaz et d'électricité, autant d'évolutions présentant chacune des avantages et des inconvénients. La solution la plus simple et la plus rapide reste encore d'adopter notre proposition de loi !
Dont il n'est pas sûr toutefois qu'elle soit accueillie favorablement par Bruxelles ...
Le retard de développement des énergies renouvelables est avéré : au rythme actuel, nous n'atteindrons pas les objectifs « trois fois vingt » de la directive européenne. Mais j'ai confiance dans les avancées que portera le projet de loi sur la transition énergétique. Le nouveau Programme d'investissements d'avenir (PIA 2), le PIA 2, comporte des financements pour les projets innovants dans le développement durable, le logement et les transports ; il est « dans les tuyaux ». Enfin, s'agissant du tiers investisseur, des réflexions seraient en cours sur ce sujet.
La commission émet un avis favorable aux crédits relatifs à l'énergie au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
La commission examine le rapport pour avis sur les crédits « Pêche et aquaculture » du projet de loi de finances pour 2014.
EXAMEN DU RAPPORT
C'est la deuxième fois que nous examinons de manière séparée les crédits de la pêche et de l'aquaculture. Ceux-ci sont regroupés au sein d'une action dédiée au sein du programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
Les crédits budgétaires n'échappent pas au mouvement de réduction de moyens que l'on observe sur beaucoup de missions du budget général. Déjà modestes en 2013, les crédits de la pêche le sont encore plus en 2014 : avec 49,5 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP) contre 52 millions d'euros l'année dernière, la baisse est de 4,7 %. Par rapport aux 60,4 millions d'euros de crédits de paiement de 2012, le mouvement de contraction des crédits est donc très prononcé.
Ces crédits se décomposent en trois blocs :
- Un premier bloc correspond au financement des actions régaliennes, pour un peu plus de 17 millions d'euros. Ces actions sont celles concernant le contrôle des pêches, la collecte des données ou encore l'appui technique aux organisations internationales ou au fonctionnement des comités consultatifs régionaux. À ces 17 millions d'euros s'ajoutent des contreparties communautaires versées par le Fonds européen de la pêche (FEP), qui sera remplacé prochainement par le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP). Les moyens de l'État pour le contrôle des pêches ou encore pour améliorer l'état des connaissances scientifiques augmentent de 3 millions d'euros environ par rapport à l'année dernière.
- Un deuxième bloc correspond à la participation de l'État à la caisse chômage intempérie des marins-pêcheurs, qui s'élève, comme en 2013, à 6,8 millions d'euros. Cette caisse est alimentée par une même somme provenant des marins eux-mêmes.
- Un troisième et dernier bloc est constitué par les actions de soutien économique aux opérateurs de la filière pêche, essentiellement les pêcheurs eux-mêmes. C'est ce bloc qui se contracte. Il ne représente plus que 25 millions d'euros en 2014, contre 31 millions en 2013. Cette réduction de voilure s'observe sur de nombreux dispositifs : ainsi les plans de sortie de flotte et arrêts temporaires d'activité ne représenteraient plus que 3,31 millions d'euros de crédits en 2014 contre 7 millions d'euros en 2013. De même, l'enveloppe des contrats bleus, mutualisée avec celle consacrée à l'équipement des ports de pêche ou aux projets innovants passe de10 à 6 millions d'euros et risque de disparaître, en fonction des arbitrages qui seront rendus sur le FEAMP. Les projets locaux cofinancés par les régions dans le cadre des contrats de plan État Région (CPER) sont maintenus au même niveau qu'en 2013. L'incertitude sur les types de mesure qui pourront être prises en charge dans le cadre du FEAMP entraîne mécaniquement une baisse de l'enveloppe des crédits nationaux destinés au soutien économique aux pêcheurs.
Le budget 2014 s'analyse plus comme un budget de transition, destiné à solder les opérations prévues au FEP, avant de démarrer réellement l'exécution du FEAMP en 2015. Le bleu budgétaire indique d'ailleurs qu'à peine 5 millions d'euros pourront être engagés sur le FEAMP l'année prochaine et il est probable que le programme opérationnel du fonds ne soit pas validé par la Commission européenne avant la toute fin 2014.
La politique commune de la pêche (PCP) et les conditions techniques d'exploitation de la mer sont particulièrement difficiles et font de la pêche maritime un secteur fragile. La première fragilité de la pêche maritime tient à sa dépendance au carburant. Malgré une détaxation du gazole destiné à l'avitaillement des navires de pêche, il faut environ 50 000 litres de gazole par navire, soit une charge de 35 à 40 000 euros par an. La technique du chalut est gourmande en énergie et les navires sont vétustes et pas optimisés du point de vue de leur consommation énergétique.
Une autre fragilité tient à l'exposition à la concurrence internationale : le marché des produits de la mer est un marché mondialisé et l'on retrouve sur les étals des poissonniers des produits du monde entier, d'autant plus que la France n'est pas autosuffisante : nous consommons 2,2 millions de tonnes de poissons alors que nous n'en pêchons que 700 000 tonnes. Les prix sont cependant bien orientés depuis quelques années. La démarche de valorisation de la pêche française à travers le « pavillon France » promu par France filière pêche est une réussite mais se heurte au manque de volumes pour répondre à la demande.
En outre, la pêche française fait face à la concurrence d'une pêche illégale dont les produits peuvent se retrouver dans nos assiettes. Il est indispensable d'intensifier la lutte contre la pêche illégale tant en mer, par des contrôles, en particulier au large des côtes ultramarines, comme en Guyane, que sur terre, en permettant aux agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) de contrôler la provenance des chargements.
La flotte de pêche française continue son reflux. Après les sorties de flotte massives jusqu'au milieu des années 2000, le mouvement s'est ralenti. Mais il est remplacé par un phénomène plus insidieux et inquiétant : l'acquisition auprès de pêcheurs en fin de carrière de leurs navires et des quotas qui s'y attachent par des armateurs étrangers, qui gonflent ainsi leurs droits à produire au détriment de la pêche française et les exploitent ailleurs avec d'autres navires, plus modernes. J'ai été alerté sur ce point lors des auditions.
La PCP va continuer à imposer des contraintes lourdes aux pêcheurs, du fait de l'intégration croissante des préoccupations environnementales. La volonté d'atteindre le rendement maximum durable (RMD) le plus rapidement possible n'est pas contestable car il en va de l'avenir de la ressource. Au demeurant, la situation a plutôt tendance à s'améliorer, ce qui montre que l'actuelle PCP n'est pas aussi inefficace que ses détracteurs le disent. Selon la commission européenne elle-même, près de deux tiers des stocks sont au RMD en 2013, contre 28 % en 2010 et 6 % en 2007. Mais localement, des restrictions sont inévitables : les quotas de sole en Manche-Est et dans le Golfe de Gascogne ou encore d'Églefin, devront être réduits en 2014.
L'obligation de débarquer toutes les captures avec une tolérance de rejets de 5 % en 2019 va aussi peser sur les équilibres économiques de la pêche. Enfin, des menaces pèsent sur certaines formes de pêche. La pêche au chalut est contestée au nom des dommages environnementaux qu'elle génère sur les fonds marins. La pêche de grands fonds est également contestée et une proposition de règlement d'interdiction de cette pratique a été déposée au niveau européen, où elle est actuellement en discussion.
J'en termine en évoquant les conditions de travail dans la filière pêche et le renouvellement des générations. Bien que pouvant gagner correctement sa vie, jusqu'à 3 000 euro par part, le marin-pêcheur travaille dans des conditions difficiles et risquées. Le travail en criées ou dans le mareyage, à terre, est également éprouvant.
Il est donc essentiel de mener une modernisation des équipements à bord comme à terre qui permettent d'améliorer la sécurité et le confort des pêcheurs. De ce point de vue, la mise en place des CPER devra prendre en compte cette dimension sociale des investissements. De même, le FEAMP devrait soutenir les investissements dans les navires, pas seulement pour mieux gérer la ressource, permettre le stockage de toutes les captures du fait de l'interdiction des rejets ou encore aider les patrons de pêche payer des instruments plus sélectifs.
Le FEAMP doit pouvoir être utilisé également pour construire des navires de moins de 12 mètres plus performants du point de vue économique car moins gourmands en carburant, mais aussi plus confortables et plus sûrs. Je salue de ce point les avancées dans les discussions européennes, même si rien n'est acquis.
Un des enjeux essentiels pour la pêche demain est d'assurer le renouvellement des générations. Là aussi, le FEAMP doit pouvoir être mise à contribution pour aider à l'acquisition de navires par les jeunes. L'absence de perspectives sur les quotas disponibles constitue un frein à l'investissement dans un bateau neuf. Mais il n'est pas le seul. Un bateau de 25 mètres avec son train de pêche coûte plus de 4 millions d'euros. Or, un armement peut difficilement travailler avec un seul navire. Il faut donc inventer les moyens de financer de tels investissements, particulièrement lourds, et pour lesquels un financement bancaire traditionnel n'est pas disponible.
L'année 2014 est une année de transition pour la pêche dans l'attente de la mise en application pleine et entière de la nouvelle politique commune de la pêche et de son instrument financier, le FEAMP. Les réductions de crédits nationaux s'expliquent principalement par ce contexte. J'émets donc un avis de sagesse à l'adoption des crédits relatifs à la pêche figurant au sein de la mission « Écologie, développement et aménagements durables ».
Les ports de pêche sont aussi en même temps des éléments d'attractivité touristique très puissants. Or les crédits connaissent une baisse drastique. Comme l'avait signalé une proposition de résolution votée à l'unanimité par le Sénat, l'Europe met du temps à s'accorder sur le FEAMP et l'année 2014 apparaît presque comme une année blanche. Si dans le même temps les crédits nationaux reculent, quelles en seront les conséquences ?
S'agissant de la politique commune de la pêche, on a échappé aux concessions de pêche transférables, qui revenaient à une privatisation de la ressource. Or j'ai constaté les mêmes contournements que ceux signalés par Gérard Le Cam : des marins vendent des bateaux anciens auxquels sont attachés les quotas. Or si cette pratique se généralise, quelle ressource restera accessible aux jeunes que l'on veut installer ? Il faudrait trouver une autre manière de gérer les quotas, sans doute de manière plus mutualisée pour leur en réserver une part. Sinon ce sera la mort de la pêche en France à moyen terme.
Il est vrai que la pêche est une activité essentielle à la vie du littoral. La diversification des activités pourra au demeurant être soutenue par le FEAMP.
L'année 2014 est une année de transition, mais pas une année perdue : les crédits de l'État venant en contrepartie du FEP pour soutenir les interventions économiques envers la pêche s'élèveront à 10,94 millions d'euros et les contreparties nationales aux engagements sur le FEAMP sont prévues à hauteur de 5 millions d'euros.
S'agissant du contournement de l'interdiction des concessions de pêche transférables, il faut bien définir le cadre juridique des droits à produire et préserver une gestion collective des quotas, sinon on ira comme vous le dites vers une extinction des droits de pêche en France. Cette inquiétude est ressortie des auditions que j'ai menées.
La commission émet un avis favorable aux crédits relatifs à l'énergie ainsi qu'aux crédits relatifs à la pêche et l'aquaculture au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».