Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui nos trois plus grands énergéticiens pour échanger sur la grave crise énergétique que nous traversons actuellement. C'est une première au Parlement. Je remercie pour leur présence Mme Catherine MacGregor, directrice générale d'Engie, M. Patrick Pouyanné, président-directeur général (PDG) de TotalÉnergies et M. Marc Benayoun, directeur exécutif du groupe EDF, en charge du pôle clients, services et territoires.
Vous avez récemment publié une tribune intitulée « Le prix de l'énergie menace notre cohésion », dans laquelle vous rappelez votre engagement à préparer au mieux l'approvisionnement en énergie pour l'hiver prochain. Cela passe par une diversification des approvisionnements, un remplissage des stockages, des importations de gaz naturel liquéfié (GNL) et une remise en fonction d'installations. Vous appelez aussi nos concitoyens à agir, plaidant pour un « grand programme d'efficacité énergétique » et une « chasse au gaspillage national », comme lors du choc pétrolier des années 1970. Vous souhaitez aussi le renforcement de la solidarité européenne. Vous rappelez enfin votre engagement en faveur de la neutralité carbone.
Nous souscrivons à l'ensemble de ces préconisations. Dès le 24 février dernier, jour du début de la guerre russe en Ukraine, nous avons adopté à l'unanimité un rapport sur la sécurité d'approvisionnement. Quelques jours plus tard, nous avons proposé cinq mesures d'urgence pour sortir de la dépendance au gaz russe, parmi lesquelles la révision du principe du coût marginal et l'accélération des projets de biogaz en attente. Le 15 mars dernier, à l'occasion de la présidence française de l'Union européenne (PFUE), nous avons adopté, avec des parlementaires issus des 27 États membres, des conclusions en faveur d'une sortie de la dépendance aux importations russes d'hydrocarbures mais aussi de métaux critiques. Enfin, le 30 mars dernier, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) nous a présenté ses préconisations pour faire face à la crise en matière de gaz et de pétrole. Nous sommes ainsi très attentifs à ces questions et agissons pour proposer des recommandations. C'est la responsabilité des pouvoirs publics, mais aussi la vôtre, de faire en sorte que les Français puissent se chauffer, se déplacer et travailler cet hiver, dans des conditions acceptables par tous.
Dans ce contexte, je souhaiterais vous poser plusieurs questions.
Tout d'abord, quel est précisément l'impact de la guerre russe en Ukraine sur votre activité ? La presse parle parfois d'un nouveau choc pétrolier ou d'une économie de guerre. Partagez-vous cette analyse ?
Ensuite, sommes-nous prêts, sur le plan de l'offre, pour l'hiver prochain et les suivants ? Le Gouvernement a récemment dévoilé un projet de loi portant mesures d'urgance pour la protection du pouvoir d'achat, dont un volet est consacré à la souveraineté énergétique. Celui-ci vous semble-t-il suffisant ? À l'inverse, doit-on faire davantage et développer de nouveaux projets, renouvelables, à court terme, voire nucléaires, à plus long terme ?
J'ai évidemment des questions sur votre appel à une mobilisation citoyenne. L'AIE a appelé, devant nous, à réduire le niveau du chauffage des logements d'un degré ou la vitesse de circulation des véhicules de 10 kilomètres par heure : ces pistes sont-elles prometteuses ? Quels secteurs, équipements ou pratiques nécessitent de faire l'objet d'une attention spécifique ?
J'en viens à la question la plus difficile, au moins à court terme : comment concilier la sécurité d'approvisionnement et la neutralité carbone ? Lorsque l'on voit que Gouvernement souhaite revenir sur l'arrêt des quatre centrales à charbon, alors qu'il a mené à bien celui des deux réacteurs nucléaires de la centrale de Fessenheim, n'avons-nous pas beaucoup à apprendre de ce sujet ? Ne faut-il pas anticiper davantage ? Quelles sont vos préconisations pour la loi quinquennale sur l'énergie et la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) ?
Enfin, dans quelle voie doit s'engager le marché européen de l'énergie ? Il y a une question financière. Comment financer les investissements prévus par le plan RepowerEU dans les infrastructures électriques, gazières et pétrolières et qui s'élèvent à plusieurs dizaines de milliards d'euros ? Une taxe sur les énergéticiens, très débattue dans la presse, vous semble-t-elle utile pour y contribuer ? Il y a également une question programmatique. Comment atteindre les objectifs fixés par le paquet Ajustement à l'objectif 55, que la Commission européenne propose encore de relever dans le contexte de la guerre ?
Les systèmes énergétiques français et européen, largement interconnectés, sont aujourd'hui sous tension : nous rencontrons des difficultés d'approvisionnement en gaz, non seulement en raison de la guerre en Ukraine, mais aussi pour des motifs techniques, tels que la panne d'un terminal de liquéfaction aux États-Unis ou des problèmes de livraison en Norvège.
Le parc électrique souffre de la sécheresse et des problèmes de disponibilité du parc nucléaire. Cet été, la France importe de l'électricité, ce qui n'était pas le cas l'année dernière, et la part de l'électricité produite à partir du gaz est également relativement importante. Le cumul de ces deux phénomènes représente 15 % de l'électricité consommée actuellement dans notre pays, d'où la flambée des prix de l'énergie.
En tant qu'énergéticiens, notre responsabilité est grande. Avec la tribune, nous voulions sensibiliser les Français sur cette question et lancer le débat sur les mesures à prendre collectivement. La réponse à cette crise de l'offre, qui mobilise tous nos efforts, passe aussi par une réduction de la demande : il s'agit dès maintenant d'économiser l'énergie, notamment l'électricité. Cela renforcera nos capacités en gaz pour l'hiver.
Nous multiplions les actions pour agir sur l'offre. Depuis le début de la guerre en Ukraine, nous sécurisons nos approvisionnements en les diversifiant. Nous nouons de nouveaux contrats avec d'autres fournisseurs et remplissons nos stockages - à hauteur de 70 %, un taux plus élevé que d'habitude. L'installation d'une unité flottante de stockage est également prévue ; Engie veillera à ce que les connexions soient en service le moment venu.
À moyen terme, nous souhaitons accélérer la transition énergétique, qui constitue non seulement une réponse à l'urgence climatique, mais aussi aux problèmes de souveraineté énergétique : les énergies renouvelables sont produites localement. Certes, les défis sont nombreux et les pas de recul sont possibles à court terme, mais nous devons accélérer la transition énergétique. Afin de disposer d'un système résilient, la France doit prévoir un mix énergétique équilibré, avec la coexistence de plusieurs technologies, telle que l'énergie éolienne, l'énergie solaire, le gaz, le nucléaire, l'hydroélectricité et le biométhane. Nous devons apaiser les tensions entourant ces sujets, notamment en ce qui concerne l'implantation d'éoliennes ; quand l'énergie éolienne est mobilisée, de manière correcte et responsable, c'est avant tout de l'énergie produite en France et en Europe. Engie a des objectifs importants en matière d'énergies renouvelables, électriques comme gazières. Je salue l'examen par le Parlement du projet de loi d'accélération de la transition énergétique.
J'en viens au sujet de la demande. Nous devons favoriser l'idée de sobriété énergétique auprès de nos clients. En tant qu'industriels, nous sommes exemplaires : notre entreprise développe de nombreuses politiques internes d'efficacité énergétique, notamment en matière de gestion du parc immobilier. La climatisation ne se déclenche qu'au-delà de 26 degrés dans nos bureaux. Chaque petit geste compte.
Nous avons fait évoluer nos offres à destination des particuliers. Le pilotage est essentiel, en électricité comme en gaz, car il permet aux clients de réguler leur consommation le plus finement possible ; les économies peuvent s'élever jusqu'à 15 %.
Nous accompagnons nos clients professionnels via les réseaux locaux d'énergie, la production d'énergie sur site et la performance et la gestion de l'énergie. Nous essayons de les aider à décarboner leur consommation.
Dans notre tribune, nous avons évoqué des gestes simples. La consommation pour la production d'eau chaude sanitaire représente 15 % de la consommation totale de gaz dans le secteur résidentiel : baisser la température de la chaudière de quelques degrés est source d'économies importantes. Nous mènerons également des campagnes de communication à destination de nos clients, du type « un degré de chauffage en moins l'hiver » ou « un degré de climatisation en moins l'été ».
Notre entreprise, historiquement tournée vers le pétrole, a diversifié ses activités : TotalÉnergies est le deuxième acteur mondial dans le secteur du GNL et le groupe produit de l'électricité à partir du gaz et des énergies renouvelables.
L'énergie repose sur trois piliers : les consommateurs veulent une énergie disponible, abordable et durable. Depuis l'année 2015, le débat portait davantage sur la protection du climat. La crise en Ukraine montre toutefois que ces trois impératifs sont essentiels. Mon expérience m'a appris que le prix était sans doute le plus important d'entre eux, partout dans le monde. Les réactions sont nombreuses lorsque les prix de l'énergie augmentent ; l'inverse est moins vrai. Je rappelle que nous avons connu, ces dernières années, avant 2022, des prix extrêmement bas.
Pour réussir la transition énergétique, la planification est fondamentale : on ne peut pas continuer à agir de manière désordonnée. Le système énergétique actuel - peut-être moins en France il est vrai - est fondé sur des énergies fossiles. Nous devons construire le nouveau système énergétique décarboné : la tâche est prométhéenne. Cela suppose des investissements de plusieurs milliers de milliards de dollars. L'AIE estime qu'il faut passer de 2 000 à 4 000 milliers de dollars les prochaines années. Or nous commettons une erreur en voulant simultanément construire le nouveau système et détruire celui qui nous fait vivre aujourd'hui. La place qu'occupe le système actuel ne diminuera que lorsque la nouvelle offre sera disponible, pas avant. Les énergies renouvelables représentent seulement 15 % du mix énergétique mondial. Le nucléaire et le gaz sont encore essentiels, comme on l'a vu à l'occasion du débat sur la « taxonomie verte européenne ».
Le débat repose principalement sur l'offre. Abandonner les énergies fossiles ne sera possible que si la demande baisse. Or les moyens de transport fonctionnent avec du pétrole. Si l'on investit moins dans le système fossile et que la demande ne diminue pas simultanément, l'ajustement se fait alors par le prix. Certes, la crise actuelle s'explique par la crise en Ukraine, mais aussi par la diminution des investissements dans les énergies fossiles depuis 2015. Ceux-ci s'élèvent à 400 milliards d'euros par an. Cela correspond au niveau identifié par l'AIE dans le scenario « Zéro émission nette ». Or la demande continue d'augmenter, parce que la population augmente, alors que l'offre tend à diminuer. Sans investissements suffisants, nous perdons chaque année 4 % de capacité de production, parce que les puits perdent de la pression. Nous pourrons réduire les investissements seulement lorsque la demande en pétrole s'atténuera. Aujourd'hui, il est trop tôt.
J'en viens à la question de la demande. Je suis ravi de m'être associé à mes collègues dans cette tribune, approuvée par 65 % des Français. Alors que le pouvoir d'achat et l'enjeu climatique sont au centre du débat public, la meilleure énergie est celle que l'on ne consomme pas. Nous devons lancer un mouvement collectif, comme celui que nous avons connu dans les années 1970, et réapprendre plusieurs petits gestes, qui renforcent le pouvoir d'achat ainsi que notre souveraineté énergétique : baisser la température ou la climatisation d'un degré ou utiliser un programme à 30 degrés et à 800 tours par minute pour les machines à laver, couper l'électricité des bureaux après 22 heures par exemple. Le but n'est pas d'embêter les Français mais d'appliquer à nouveau ce que nous avons tous appris plus jeunes. Notre entreprise investira un milliard d'euros pour économiser l'énergie l'année prochaine, car nos raffineries consomment elles-mêmes beaucoup d'énergie. Nous pouvons gagner en pouvoir d'achat, en réduction d'émissions de gaz à effet de serre (GES) et en sécurité d'approvisionnement.
Nos terminaux de GNL, qui représentent 25 % des capacités européennes, sont remplis. Nous disposons de 11 usines de production de GNL, sommes le deuxième acteur du GNL mondial et le premier exportateur de GNL des États-Unis - ces exportations ayant été redirigées vers l'Europe bien évidemment. Une unité flottante de regazéification sera installée en septembre 2023 au Havre si le Parlement vote les mesures contenues dans le projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, afin d'accélérer son implantation : sa capacité de production s'élèvera à 5 milliards de mètres cubes par an. Les investissements nécessaires seront pris en charge par TotalÉnergies. La seconde unité flottante de regazéification serait implantée en Allemagne.
Nous devons accepter l'idée que la Russie cessera un jour ou l'autre ses exportations de gaz vers l'Union européenne (UE). Je pense que nous aurions dû interrompre nous-mêmes les importations pour éviter ce supplice à petit feu.
Les énergies renouvelables sont produites localement et permettent d'assurer notre indépendance énergétique. Je soutiens par ailleurs tout à fait le programme de relance de l'énergie nucléaire; décidé par le Gouvernement. Nous devons nous mobiliser en faveur du biogaz et des énergies renouvelables terrestres, comme l'éolien et le solaire. L'éolien offshore dispose d'un vrai potentiel. Les trois énergéticiens français ont dépensé plus de 2 milliards de dollars, au début de l'année 2021, pour acheter des concessions d'éolien offshore aux États-Unis. Notre concession représente 3 gigawatts (GW) Les procédures d'attribution y sont plus simples qu'en France, puisque l'achat du domaine maritime passe par des enchères. J'aurais toutefois préféré investir en France. Nous avons fait la même chose au Royaume-Uni. Nous devons désormais lancer de telles initiatives dans notre pays, en attribuant ces concessions d'éolien offshore de manière transparente et rapide. Aux industriels de prendre des risques.
Nous devons planifier nos actions en matière d'éolien terrestre. Le territoire représente la limite des énergies renouvelables. Nous nous épuisons avec des procédures. Pourquoi ne pas créer de grands parcs éoliens terrestres dans des zones peu densément peuplées pour éviter le mitage du paysage ? Cela reviendrait à ce que l'on a fait pour les zones industrielles. L'implantation d'une éolienne dure entre trois et quatre ans pour un gain de seulement quelques MW, sans régler aucunement le problème de la transition énergétique. Nous devons planifier l'espace avec les collectivités territoriales et l'État : les acteurs privés ne peuvent se substituer à la puissance publique.
directeur exécutif du groupe EDF, chargé du pôle clients, services et territoires. - Je tiens à excuser l'absence du PDG Jean-Bernard Lévy, qui ne pouvait pas être présent aujourd'hui.
L'actualité nous rappelle la nécessité de basculer vers un monde neutre en carbone : la guerre en Ukraine a montré la dépendance de l'UE aux importations de gaz russe - même si la France est nettement mieux placée que la moyenne européenne. Cela doit nous inviter à réduire notre consommation de gaz. La production nucléaire fait face à des arrêts de tranches prolongés, compte tenu du phénomène de corrosion sous contrainte, d'où des baisses de production en 2022 et 2023, avec des perspectives plus basses que les valeurs moyennes historiques.
Nous devons assurer la sécurité de nos approvisionnements et l'équilibre du système électrique. Je rappelle que l'électricité ne peut pas être stockée. Nous devons à la fois assurer nos livraisons d'électricité cet hiver et être en mesure d'offrir une puissance répondant aux pointes consommation. Le Gouvernement a créé un groupe de travail destiné à suivre l'évolution des événements. En raison de difficultés d'exploitation et d'import, ainsi que des conditions climatiques exceptionnelles, la pénurie est proche. Nous participons à ce groupe de travail pour préparer une éventuelle crise.
EDF s'est engagé depuis longtemps en faveur des usages performants de l'électricité : il faut développer tous les usages de l'électricité, avec le moins d'électricité par usage, selon la formule reprise par plusieurs dirigeants de l'entreprise. Nous n'avons jamais cherché à développer le volume d'électricité consommé chez nos clients mais seulement sa présence, avec des usages performants. Nous assurons une fonction de conseil auprès de nos clients - c'est d'ailleurs une obligation pour les clients disposant du tarif réglementé de vente d'électricité (TRVE). Nous leur proposons les solutions les plus adaptées à leurs besoins. Depuis dix ans, nous avons promu une application, « EDF et moi », indiquant aux particuliers des informations précises sur leur consommation, son coût et leur courbe de charge. Nous pouvons alors proposer à nos clients des écogestes ou des remplacements d'équipement. Les consultations régulières de ces informations permettent des réductions de consommation de 5 % en moyenne - ce taux peut s'élever jusqu'à 12 %. Les petits gestes sont efficaces. Malgré nos campagnes de communication, seuls 6 millions de Français utilisent cette application. Nous espérons que la campagne que lancera le Gouvernement à la rentrée prochaine nous aidera à progresser dans ce domaine.
Nous disposons également d'offres adaptées pour les entreprises, dont l'industrie, ou les collectivités territoriales. La société Dalkia a développé des contrats de performance énergétique : en disposant de la maîtrise des équipements de ses clients, elle s'engage à une réduction de la consommation et de la facture pouvant aller jusqu'à 40 % sur des périodes contractuelles allant de 5 à 10 ans. Cet objectif de réduction est plus souvent fixé entre 15 et 20 %. Si cet objectif de réduction n'est pas atteint, c'est Dalkia qui paye la différence, prenant ainsi un risque financier.
Depuis l'an 2000, la consommation d'électricité finale n'augmente plus en France : elle se maintient à 470 TWh, malgré la croissance économique et démographique et le développement des usages. C'est le signe d'un effort de productivité que nous accompagnons avec nos offres. La consommation moyenne par ménage est passée de 5 600 kilowattheures (KWh) en 2010 à KWh aujourd'hui, soit une diminution significative de 15 %. Or le nombre d'usages par foyers ne cesse d'augmenter.
Notre groupe accomplit lui aussi des efforts de réduction de sa consommation d'énergie. Nous faisons des efforts pour décarboner nos propres usages : nous nous sommes ainsi engagés à électrifier intégralement notre flotte de véhicules, cette part d'électrification étant déjà de 18 %. Ce sont des efforts de longue haleine qui paieront dans la durée.
L'effacement, qui consiste à inciter un client à reporter sa consommation lors d'une journée particulièrement tendue, représente des économies de l'ordre de 4 à GW ; durant les pointes les plus extrêmes, les appels de demande atteignent parfois 90 à 100 GW. Ces techniques doivent être encouragées pour gérer un éventuel manque de puissance cet hiver. Quelque 10 millions de nos clients sur 22 millions au total disposent d'un contrat comportant des heures pleines et des heures creuses. Le Gouvernement nous encourage à relancer l'offre « Tempo » : le client est incité à reporter sa consommation un certain nombre de jours par an.
Nous sommes fiers d'accompagner cette transformation énergétique dans les domaines de l'électricité et du gaz.
Le volet consacré à la souveraineté énergétique du projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat comporte plusieurs dispositions pour obliger les remplissages des stocks, gérer les coupures de gaz, réguler les installations et les méthaniers ou encore consolider l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh). Les contraintes et les indemnités vous semblent-elles proportionnées ? Faut-il remettre à plat le dispositif de l'Arenh ?
Le « bouclier tarifaire » vous satisfait-il ? On sait que les gels tarifaires pénalisent l'ensemble des fournisseurs. Il en va de même pour le groupe EDF avec le relèvement du plafonnement de l'Arenh. Comment évaluez-vous l'impact de ces mesures ? Du point de vue des consommateurs, seuls 22 % de notre consommation nationale sont couverts par les TRVE. Ce taux s'élève à 7 % pour les tarifs réglementés de vente du gaz (TRVG). Quid des clients non éligibles, comme certaines entreprises ou collectivités ? Le « bouclier tarifaire » arrive à expiration en 2023, avec un rattrapage à prévoir sur les consommateurs. Comment anticiper l'avenir ?
Enfin, ne faut-il pas accorder une attention spécifique aux ménages en situation de précarité énergétique ? Plus de 3,5 millions d'entre eux se trouvaient dans cette situation avant la crise actuelle. Faut-il renforcer les actions en leur direction, notamment grâce à MaPrimeRénov' ou aux certificats d'économies d'énergie (C2E) ?
L'entreprise est très hostile à l'Arenh, qui nous a coûté extrêmement cher. Toutefois, ce dispositif n'a pas d'effet immédiat sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui, à savoir l'équilibre entre l'offre et la demande.
Le « bouclier tarifaire » s'est traduit par une nette différence des prix de l'électricité payés en France par rapport à nos voisins européens : l'écart, qui s'élevait auparavant à 25 %, est désormais de 50 %. Ce n'est pas EDF qui fixe les tarifs de l'électricité, mais bien le Gouvernement, sur le fondement d'une proposition de la Commission de régulation de l'énergie (CRE).
Les dispositifs pour aider les clients en situation de précarité énergétique sont nombreux : je pense au chèque énergie ou encore aux C2E, dont ceux pour les clients en situation de précarité ou de grande précarité, qui ont facilité la rénovation des passoires énergétiques. Si cet effort peut être accru, peu de pays en Europe font mieux que la France dans ce domaine. Chez nos voisins européens, le prix de l'électricité est bien souvent le double de celui en France et celui du gaz équivalent ou un peu supérieur. La France est plutôt un pays protégeant bien les clients en situation de précarité énergétique.
Ce sont non pas les concurrents d'EDF qui profitent de l'Arenh, mais bien leurs clients. Comme on s'y est engagé, lorsque nous recevons une tranche d'une cinquantaine d'euros par MWh, nous la transférons dans les tarifs. La vérité, c'est qu'en passant le plafond de l'Arenh de 100 à 120 TWh, le Gouvernement a fait absorber, via cette mise à disposition de 20 TWh, une partie du « bouclier tarifaire », de façon à ce que cela ne soit pas un financement budgétaire. Vu d'EDF, cela pèse sur l'entreprise.
Le « bouclier tarifaire » pèse sur les comptes de mon entreprise. L'activité de raffinage de TotalÉnergies est bénéficiaire, à l'inverse de la distribution de gaz et d'électricité, qui perdent lourdement de l'argent. Il convient de réserver les mesures de soutien aux populations les plus fragiles. Celles disposant d'un certain pouvoir d'achat peuvent et doivent connaître la réalité du prix de l'énergie. Le coût de la transition énergétique sera considérable. Certes, nous devons amortir les chocs les plus importants, mais les consommateurs doivent prendre conscience du prix de l'énergie et s'habituer à ce que l'énergie coûte plus cher durant cette phase de transition. Le prix du gaz ne connaîtra pas une baisse considérable en Europe dans les prochaines années, compte tenu de la persistance de la crise en Ukraine. Le « bouclier tarifaire » était censé être transitoire : force est de constater que nous n'en prenons pas le chemin.
En l'état, le futur projet de loi ne me semble pas comporter de difficultés particulières.
L'Arenh est un outil important pour les fournisseurs alternatifs, qui peuvent proposer à leurs clients des offres à prix modéré. Nous avons besoin de visibilité pour 2023 car nous sommes en train de préparer les futures offres de nos clients.
Cibler le « bouclier tarifaire » en direction des ménages les plus modestes me semble une très bonne idée.
Le fonds de solidarité pour le logement (FSL) est un dispositif très intéressant. Les conseils départementaux peuvent aider directement les consommateurs de manière très ciblée.
La prolongation de la guerre en Ukraine fait craindre de graves difficultés d'approvisionnement. Un professionnel de mon département, la Marne, a constaté une diminution de réapprovisionnement en fioul depuis plusieurs mois, car la clientèle est affectée par des prix dissuasifs et mise sans doute sur une baisse des prix et sur une mesure d'aide semblable à celle créée pour d'autres énergies.
Concernant l'usage du fioul domestique, très utilisé en zones rurales, 3 millions de résidences principales sont en mesure de stocker près de 90 % de leur consommation annuelle. Anticiper le réapprovisionnement dès la rentrée limiterait peut-être la hausse des coûts de ce carburant. J'ai saisi le ministre de l'économie et des finances à ce sujet.
Je souhaite savoir si des stratégies sont envisagées pour anticiper le stockage et garantir la livraison des foyers utilisant ce mode de chauffage.
Je vous remercie pour votre présentation. Je parle au nom de notre collègue Serge Mérillou, présent par visioconférence. M. Marc Benayoun, EDF possède-t-il des prévisions de production pour l'hiver prochain ? Le parc nucléaire fait face à de nombreuses difficultés. Le niveau de production, actuellement de l'ordre de 300 TWh, sera-t-il toujours aussi bas ?
J'en viens à mes questions.
M. Marc Benayoun, il existait un tarif nommé « effacement jours de pointe ». Ce tarif pourrait-il être réactivé ?
Par ailleurs, beaucoup d'économistes estiment que le prix du carbone est trop bas, et que les taux d'actualisation qui président à vos politiques d'investissement devraient être harmonisés pour favoriser la transition énergétique. Quelles sont vos réflexions à ce sujet ?
Dans le contexte de crise que nous traversons, j'estime qu'il est nécessaire de considérer l'énergie comme un bien commun et de l'extraire du marché.
Le Gouvernement a demandé à EDF d'acheter des térawattheures au prix de 350, voire 365 euros sur le marché libre pour les revendre ensuite à ses concurrents au prix de 42 euros. C'est le capitalisme faussé !
Par ailleurs, 12 millions de Français n'ont pas les moyens de se chauffer et 18 millions de personnes n'ont d'autre choix que de prendre leur voiture. Je ne suis pas d'accord pour les culpabiliser.
M. Michel-Édouard Leclerc, qui n'est pas connu pour être un communiste, estime qu'une partie de l'inflation est une anticipation de la spoliation. Quand il y a de l'inflation, certaines entreprises réalisent des méga-profits et les recettes de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de l'État augmentent. Nous devons disposer de données claires sur ce sujet afin d'ouvrir un débat sur ce qu'il convient de faire de cet argent.
En tout état de cause, lorsque les entreprises et l'État empochent 30 ou 40 centimes respectivement de méga-profits et de recettes supplémentaires sur chaque litre d'essence, la remise de 18 centimes consentie aux consommateurs équivaut à une spoliation.
L'expérience des derniers mois, à la croisée de la crise de la Covid-19 et de la guerre en Ukraine, a-t-elle fait évoluer votre regard sur l'organisation du marché européen de l'énergie ? N'est-il pas nécessaire de revoir en profondeur son organisation pour la solidarité à l'échelle européenne que vous appelez de vos voeux puisse s'exercer ?
Quel rôle les énergéticiens peuvent-ils jouer pour promouvoir la sobriété énergétique ?
Les consommateurs de fioul sont malins : ils remplissent leur cuve quand les prix sont bas. Actuellement, ils attendent donc que les prix baissent, mais ils auront bien du fioul.
Nous avons très rapidement décidé d'arrêter les importations de produits pétroliers russes, car nous avons les moyens de les remplacer. Nous assurons les trois quarts de notre approvisionnement de diesel et de fioul domestique par le raffinage. Nous ne dépendons des importations que pour le quart restant, dont la moitié seulement vient de Russie. Au total 12 % de ces importations sont issues de Russie. A partir du 5 février 2023, nous ne pourrons plus recourir.
Concrètement, nous ne renouvelons pas les contrats arrivés à échéance avec la Russie au profit de nouveaux contrats avec le Moyen-Orient. Le Gouvernement est en train de négocier un accord avec les Émirats arabes unis, dont TotalÉnergies serait l'opérateur. En tout état de cause, nous disposerons des volumes suffisants.
Les prix dépendent du marché international. Or celui-ci est en cours de redéploiement, du fait des sanctions que nous avons prises à l'égard de la Russie. Les opérateurs anticipent des difficultés, ce qui fait monter les prix du baril de diesel à des niveaux jamais atteints.
Nous dépendons de ces tarifs, que nous nous contentons de répercuter. Pour autant, depuis le mois de mars, nous consentons une ristourne de 10 centimes par litre dans toutes les stations rurales, et depuis plus récemment, de 12 centimes dans les stations d'autoroute.
S'agissant de nos profits...
Sur le territoire français, après avoir enregistré des pertes sur le raffinage pendant deux ans, nous ferons effectivement des profits sur cette activité.
Ce profit, que vous préférez appeler « méga-profit », donnera lieu à un impôt, que nous paierons.
L'ensemble de nos investissements repose sur un prix du carbone fixé à 100 dollars la tonne. Quant aux taux d'actualisation, ils dépendent des pays, car ils intègrent le risque géopolitique. En revanche, ils sont généralement uniformes sur l'Europe de l'Ouest.
J'ai la conviction que le maintien d'un marché européen nous garantit une résilience précieuse. Il faut parvenir à le faire évoluer tout en préservant l'interconnexion du réseau, et ce, même si les décisions parfois divergentes des États quant à leur mix énergétique rendent difficile de fixer des règles cohérentes. Nous pensons notamment qu'il faut simplifier l'accès de nos clients à des contrats de long terme.
Le prix du carbone a beaucoup évolué. Il convient de s'assurer que ce prix ne devienne pas une arme anticoncurrentielle grâce un mécanisme d'ajustement aux frontières, qui doit protéger la compétitivité de nos industries.
Enfin, nous nous efforçons d'encourager la sobriété énergétique de trois manières : par des campagnes de communication, par des offres proposant du pilotage et récompensant les écogestes, et par des services de conseil en décarbonation à nos clients industriels.
Cette année, la production de notre parc nucléaire sera comprise entre 280 et 300 TWh, soit un niveau très bas. Nous visons pour l'année prochaine une production comprise dans une fourchette de 300 à 330 TWh, et nous espérons qu'elle augmente encore en 2024.
Je précise que le dispositif Remit permet d'anticiper et d'informer tous les acteurs des indisponibilités prévisibles de nos tranches.
Le tarif EJP, qui a été souscrit par 1 million d'utilisateurs, est aujourd'hui en extinction, car il ne comportait pas de disposition relative aux heures pleines et aux heures creuses. De ce fait, les jours « rouges » étaient très pénalisants pour les clients. Nous l'avons donc remplacé par Tempo, qui compte déjà 250 000 clients.
S'agissant de notre politique d'investissements, nous affectons les investissements dans des technologies carbonées d'une prime de risque supérieure.
Par ailleurs, si nous voulons que le prix du carbone soit un signal efficace, il convient que celui-ci soit stable. Il nous faut une politique de tarification du carbone plus durable et robuste.
J'en viens au marché européen de l'énergie. Pour ce qui est de l'électricité, nous avons besoin d'un système de dispatch qui valorise les interconnexions. Cela étant dit, le système est ainsi fait qu'actuellement, le prix du gaz, qui est très élevé, « contamine » le marché de l'électricité. Les instances européennes conviennent que cette situation n'est pas tenable.
Le système électrique repose sur trois types d'actifs : des actifs de base, des actifs de semi-base et des actifs de pointe. Pour que ce système fonctionne, il faut qu'il y ait un équilibre entre le prix de base et le prix de la pointe. Quand le prix du gaz s'envole et le barème de la pointe avec lui, cela ne fonctionne plus. Il faudra donc sans doute réfléchir à des évolutions du marché européen du gaz et de l'électricité. L'Europe le reconnaît.
On a fixé les règles de ce marché en considérant que le gaz russe était du gaz domestique européen. Pour que ce système fonctionne, il faut avoir la maîtrise de sa production, comme c'est le cas des États-Unis. En revanche, lorsque l'on dépend de pays étrangers, comme en Europe, ce système ne fonctionne pas.
Le Japon et la Chine ont résolu cette difficulté en contractant sur 20 ou 25 ans. En contrepartie, ces contrats reposent sur des calculs des prix en fonction de ceux du pétrole avec des planchers et des plafonds, moyennant quoi ils achètent actuellement le baril de GNL à 80 dollars quand on l'achète en Europe à 200 dollars.
L'Europe doit accepter de s'engager à moyen et long termes, mais cela suppose d'avoir de la visibilité en matière de stratégie climatique. Si nous manquons de terminaux de regazéification, c'est aussi parce qu'il y a une volonté politique de sortir du gaz, et que ce type d'investissement s'amortit sur 20 ans.
Notre commission est particulièrement sensible à vos propos. Nous avons d'ailleurs adopté à l'unanimité plusieurs rapports allant le même sens de la souveraineté énergétique.
Vous l'avez dit, le logement est déterminant pour réduire la consommation d'énergie. Pour les logements neufs, que pensez-vous de la règlementation environnementale 2020 (RE2020) ? Est-elle toujours adaptée compte tenu du contexte de crise ?
Pour les logements existants, que pensez-vous du diagnostic de performance énergétique (DPE) ? Sa méthodologie est-elle suffisamment bien calibrée ?
Les dispositifs de soutien public vous paraissent-ils suffisants ? Je rappelle que, s'agissant de MaPrimeRénov', en 2021, seules 126 primes ont été versées à des propriétaires bailleurs et 69 à des copropriétaires, soit respectivement 0,05 et 0,01 % du total des primes versées. Ce n'est pas à la hauteur de la massification attendue. Ne faut-il pas agir d'urgence ?
Enfin, les fraudes aux C2E perdurent-elles ?
Pour décarboner et relocaliser la production d'hydrocarbures, nous pouvons développer le biogaz et les biocarburants. La France dispose d'atouts importants en raison de sa tradition agricole ancienne. Pour autant, l'essor du biogaz est entravé par un objectif de production de 10 %, d'ici à 2030, et les biocarburants par un objectif d'incorporation de 7 %, à la même date.
Nous savons qu'il est possible de faire un peu plus, sans générer de conflits d'usage sur le foncier ou les prix agricoles. Aussi, faut-il revoir ces objectifs ? Nous pouvons le faire dans le cadre de la loi quinquennale sur l'énergie en 2023, pour le biogaz, et de la révision de la directive sur les énergies renouvelables en 2026, pour les biocarburants.
À très court terme, ne peut-on pas débloquer les 1 200 projets de biogaz en attente et favoriser les technologies de conversion et d'approvisionnement en biocarburants ?
J'ai entendu votre appel à la sobriété. Mais comment comprendre que la Commission européenne ait décidé la suppression des moteurs thermiques et le passage au tout électrique à compter de 2035 ?
Je partage votre inquiétude quant à l'hiver prochain et suis ravi de vous entendre parler de sobriété, qui est au fond la lutte contre le gaspillage qui a été organisé pendant un certain temps. Il faut s'employer à une forme de décroissance des consommations.
En matière de rénovation thermique, nous sommes effectivement en dessous de la trajectoire puisqu'il n'y a eu l'année dernière que 2 500 rénovations globales quand nous en attendions 700 000. On ne peut pas demander à ceux qui ont déjà deux pulls d'en mettre un troisième ! Nous pourrions, en revanche, montrer l'exemple au Sénat. Quoi qu'il en soit, que pensez-vous de MaPrimRénov' ?
Je me félicite également de constater que vous soutenez les énergies renouvelables. Nous devons notamment redorer le blason de l'éolien terrestre, qui pâtit d'une contestation organisée.
En revanche, j'estime que le prix de l'énergie doit être convenable, et plutôt que de le baisser, je préconise de le faire varier en fonction des revenus.
Sur le terrain, les entreprises qui ne bénéficient pas des TRVE m'alertent sur les augmentations colossales auxquelles elles devront faire face.
Un groupe, dans les départements de la Loire et de la Haute-Loire, verra sa facture augmenter de 1,7 million d'euros en 2021 à 5,4 millions d'euros, entre 2023 et 2024.
Une société, qui traite les ordures ménagères de tout le département de la Haute-Loire, paiera 750 000 euros, contre 110 000 aujourd'hui.
Une scierie, dans le département de la Haute-Loire, passera de 500 000 euros à 2,7 millions d'euros, de 2021 à 2023.
Qui peut croire que les marges bénéficiaires de ces entreprises puissent absorber des évolutions aussi rapides du prix de l'électricité ?
Par ailleurs, j'ai visité récemment le barrage de Poutès, en Haute-Loire, dont on a rasé le mur pour ne turbiner que de l'eau en constant. Les capacités de production restent bonnes, mais elles ne permettent pas de couvrir les pics. Pour remédier à cette difficulté, la seule possibilité est de faire des barrages hydroélectriques permettant de moduler le turbinage, ce qui n'est plus possible à Poutès, ou de réactiver des centrales thermiques à gaz ou à charbon.
Ma question est simple : quand envisagerons-nous de rouvrir des centrales hydroélectriques ?
Ma seconde question porte sur la méthanisation. Il est urgent de réévaluer le tarif de rachat de l'électricité et du gaz en fonction de l'évolution des prix. Quand le ferons-nous ?
Un soir d'hiver en France, l'énergie fournie par le réseau gazier est supérieure à l'énergie que peut produire la puissance électrique installée. Autrement dit, pour nous passer de gaz, il nous faudrait plus que doubler l'infrastructure électrique existante. Ce n'est pas raisonnable.
Chez Engie, nous avons regretté la RE2020, car nous aurons besoin du gaz pendant très longtemps. La « taxonomie verte européenne » reconnaît d'ailleurs qu'il est une composante importante de la transition énergétique.
Bien sûr, il faut travailler sur le contenu carbone de ce gaz. J'estime que le potentiel de biométhane peut être révisé à la hausse, et que l'on peut avancer assez rapidement sur ce dossier. Il faut accélérer sur les permis et les autorisations de ces projets. La France est en avance et il faut poursuivre en ce sens.
J'ai voulu utiliser MaPrimeRénov' avec mes copropriétaires et je confirme que le dispositif est beaucoup trop compliqué. C'est un bon dispositif, mais il faut le simplifier. Le système administratif actuel induit de la défiance, au nom de la lutte contre la fraude. C'est la même chose pour les bornes de recharge, où l'on dénombre quatre guichets différents...
Les C2E ne sont pas toujours aussi efficaces que ce qu'on voudrait, mais ils sont un outil administratif intelligent, qui permet d'investir 5 milliards d'euros par an, dont 25 % de notre groupe vers les consommateurs. Si l'on devait augmenter les C2E pour gagner en efficacité énergétique, j'ai peur que l'on y parvienne pas. Aujourd'hui, les C2E coûtent 6 centimes dans le prix de l'essence et 5 euros par MWh dans le prix de l'électricité et du gaz. Je pense qu'il vaut mieux aider directement les personnes réalisant des travaux.
Nous avons effectivement besoin d'un potentiel de biogaz plus important, mais il faut être raisonnable : soit les producteurs demandent à l'État de leur garantir un tarif, mais dans ce cas, ils ne bénéficient pas d'une éventuelle hausse des prix, soit ils prennent le risque du marché libre.
Je suis d'accord. Il faut libérer les volumes dans la prochaine PPE, et aussi simplifier les procédures, car c'est une énergie vertueuse qui produit des emplois locaux. Notre groupe a récemment lancé des projets de biogaz en prenant une partie du risque et sans demander la garantie de l'État. Depuis l'acquisition de Fonroche biogaz, nous constatons quotidiennement la complexité des normes dans ce secteur.
S'agissant des véhicules électriques, dès lors que la décision de les généraliser est prise, il faut déployer les bornes de recharge et faire en sorte que les moyens électriques suivent, c'est-à-dire que les réacteurs nucléaires d'EDF soient prêts en 2035.
Il n'y a pas eu de black-out électrique en France depuis 1978. Même si nous sommes dans une situation délicate, il y a de très fortes chances que nous passions l'hiver sans délestage.
Si les stocks de gaz sont normalement remplis, et il semble qu'ils le seront, il faut tout de même que les températures soient de - 4 degrés pendant plusieurs jours consécutifs pour amener le système électrique à des puissances appelées « énormes » et à des risques. L'an passé, nous avons eu une vague de froid de ce type entre Noël et le jour de l'an, à un moment où la consommation était faible, ce qui n'a pas posé problème. Personnellement, je ne crois pas que l'on soit dans une situation catastrophique et que l'on va manquer d'électricité. De plus, nous allons revenir à une production nucléaire normale et le Gouvernement a pris des décisions s'agissant du nouveau nucléaire.
Par ailleurs, le rythme de pénétration des véhicules électriques est faible, si bien qu'ils ne représentent même pas 1 % de la demande électrique cette année. Les prévisions d'appels de puissance sur le système électrique imputables aux véhicules électriques sont de l'ordre de 10 à 15 % de notre production, ce qui est tout à fait soutenable, compte tenu des investissements qui seront réalisés d'ici à 2035 tant dans le nucléaire que dans le renouvelable.
Enfin, le logement est effectivement un domaine très émissif. Il existe pléthore d'aides et de dispositifs qui restent difficiles à lire pour nos concitoyens. Les C2E font l'objet de moins de fraudes, mais certains travaux ne permettent pas de réduire la consommation énergétique, même s'ils améliorent l'habitat.
Mes chers collègues, je propose à ceux qui n'ont pas pu poser leurs questions de les envoyer par écrit. Je vous prie de bien vouloir m'en excuser, mais je m'étais engagée à libérer nos intervenants à 10 heures.
Je remercie vivement nos trois intervenants.
Ce compte rendu a fait l'objet d'une captation vidéo disponible sur le site internet du Sénat.
Nous examinons à présent le rapport de Patrick Chaize sur la proposition de résolution européenne sur le programme d'action numérique de l'Union européenne à l'horizon 2030, déposée par nos collègues Mmes Florence Blatrix-Contat et Catherine Morin-Desailly.
Nous examinons aujourd'hui la proposition de résolution européenne (PPRE) sur le programme numérique de l'Union européenne à l'horizon 2030, déposée par nos collègues Mmes Catherine Morin-Desailly et Florence Blatrix-Contat, toutes deux rapporteures de ce texte pour la commission des affaires européennes.
J'ai déjà eu l'occasion, à plusieurs reprises, d'exprimer mon approbation quant au travail effectué. Je partage ainsi l'appréciation globale des deux rapporteures sur le programme d'action numérique de l'Union européenne, leurs principaux constats, recommandations et appels au Gouvernement et à la Commission européenne.
Il m'a toutefois semblé utile de compléter certains points du texte au regard des récents travaux de notre commission sur la souveraineté numérique, mais aussi des travaux pionniers menés par le Sénat en matière de réduction de l'empreinte environnementale du numérique, de lutte contre l'illectronisme ou encore de cybersécurité.
Le principe du programme d'action numérique de l'Union européenne est simple : il fixe douze objectifs dans quatre domaines afin d'orienter les efforts, les investissements et les politiques publiques des États membres en matière de développement des compétences numériques, des infrastructures numériques, de transformation numérique des entreprises et de numérisation des services publics.
Ce programme d'action s'appuie sur une Déclaration européenne sur les droits et principes numériques, qui constitue le « socle de valeurs » sur lequel les États membres devront s'appuyer afin d'atteindre les objectifs fixés pour la décennie numérique.
Je tiens à saluer la démarche de la Commission européenne, qui est nouvelle et bienvenue à au moins trois égards. Premièrement, car il y a désormais une ferme affirmation politique, au plus haut niveau, de l'objectif de souveraineté numérique, un terme qui était encore trop timidement utilisé jusqu'à récemment. Deuxièmement, car ce programme d'action témoigne d'une approche plus offensive de la part de l'Union européenne, qui se positionne aussi comme un acteur économique et industriel soucieux de sa compétitivité en matière numérique. Enfin, car il s'agit du premier document programmatique, pluriannuel et à vocation stratégique, élaboré par les institutions européennes en matière numérique.
Un tel document complète utilement les grands textes législatifs européens adoptés ou en cours d'adoption sur le numérique, notamment le Digital Markets Act (DMA), le Digital Services Act (DSA), le Data Governance Act et les récentes propositions de réglementation relatives à l'intelligence artificielle et à l'économie des données.
La mise en oeuvre des objectifs fixés repose sur un mécanisme de coopération et de suivi avec les États membres. Ces objectifs s'apparentent à des « obligations de résultat », une « liberté de moyens » étant laissée aux États membres pour les décliner au niveau national et les atteindre. Un équilibre demeure à trouver entre la nécessité pour la Commission européenne de faire confiance aux États membres et de formuler des recommandations pour accompagner leur transition numérique, sans remettre en cause les libres choix politiques de chaque pays. Les négociations se poursuivent à ce sujet.
Si l'adoption d'un tel programme d'action ambitieux est bienvenue, sa mise en oeuvre demeure toutefois incertaine. Alors que la Commission européenne estime que 120 milliards d'euros d'investissements seront nécessaires pour atteindre les objectifs fixés d'ici à 2030, la question du financement n'est pas directement abordée et les incertitudes demeurent quant à la répartition de ces investissements au sein de l'Union européenne.
Si les objectifs sont ambitieux, ils apparaissent parfois difficilement réalisables ou peu pertinents. Par exemple, l'objectif de connectivité vise la couverture, par la 5G, de toutes les zones habitées d'ici à 2030 et l'accès, pour tous les foyers européens, à un réseau en gigabit (1 000Mbit/seconde). Une telle généralisation de la 5G, difficilement atteignable pour l'ensemble des États membres, serait par ailleurs contraire au principe de neutralité technologique, que nous nous devons de défendre. Je vous proposerai donc un amendement visant à remplacer cette disposition par un objectif en matière de qualité de service apportée à la population européenne.
D'autres objectifs fixés sont souhaitables et pertinents, mais manquent de précision. C'est notamment le cas des dispositions relatives aux compétences numériques. La formation de 20 millions de spécialistes des technologies de l'information et de la communication doit bien concerner tous les niveaux de formation, initiale et continue, car la transition numérique nécessite de pourvoir des emplois à tous les niveaux, des plus opérationnels aux plus qualifiés. Un effort supplémentaire et spécifique doit être réalisé pour développer les offres nationales de formation dans les métiers de l'informatique en nuage - cloud - et de la cybersécurité : disposer des compétences adéquates et suffisantes au bon moment est indispensable à la constitution de filières économiques souveraines dans ces deux domaines. Je vous proposerai donc un amendement visant à préciser ces différents points.
Certains objectifs fixés mériteraient aussi d'être ajustés afin de mieux répondre à l'impératif de souveraineté numérique et industrielle qui s'impose à nous. Par exemple, l'objectif de produire, en valeur, 20 % des semi-conducteurs mondiaux doit certes permettre d'assurer la compétitivité économique de cette filière, mais surtout de répondre à nos besoins d'approvisionnement afin de limiter notre dépendance aux chaînes de valeur mondiales et aux pénuries de composants électroniques, pourtant indispensables à la réalisation de notre transition numérique. Je vous proposerai également un amendement sur ce point.
Au-delà du manque de réalisme et de précision de ce programme d'action, il y a surtout, à mes yeux, trois grands absents. Le premier grand absent est la prise en compte de l'empreinte environnementale du numérique, secteur qui contribue, rien qu'en France, à 2 % des émissions de gaz à effet de serre et qui pourrait représenter, à politique publique constante, jusqu'à 7 % de nos émissions d'ici à 2040.
La transition numérique étant aussi une transition énergétique et environnementale, un tel sujet ne peut être ignoré, ni par le Sénat - nous avons mené des travaux pionniers en la matière, avec l'adoption récente de deux lois relatives à la réduction de l'empreinte environnementale du numérique -, ni par le Gouvernement et les institutions européennes, car les enjeux pour la réussite de la transition numérique et notre bien-être collectif sont trop importants. Je vous proposerai donc un amendement sur ce point.
Le deuxième grand absent est l'affirmation de la cybersécurité comme pilier indispensable à la réussite de notre transition numérique. Le programme d'action devrait aussi fixer un objectif supplémentaire en matière de cybersécurité. Rien qu'en France, 43 % des PME ont constaté, en 2020, un incident de cybersécurité, alors que les attaques au rançongiciel ont été multipliées par quatre entre 2020 et 2021. On dit que dans le monde, une attaque au rançongiciel a lieu toutes les onze secondes... La sécurisation des communications des entreprises, mais aussi des citoyens et des administrations, est un élément indispensable à l'atteinte de notre souveraineté numérique. Pour cela, nous devons investir davantage pour structurer une filière européenne de cybersécurité. Je vous proposerai ainsi un amendement sur ce point.
Enfin, le dernier grand absent demeure la lutte contre l'illectronisme et en faveur d'une plus grande inclusion numérique, en particulier lorsqu'il s'agit d'accélérer la numérisation des services publics essentiels. Rien qu'en France, 14 millions de personnes déclarent ne pas maîtriser les outils et technologies numériques et trois personnes sur cinq se disent incapables de réaliser des démarches administratives en ligne. Face à ce constat alarmant, il est impensable que le programme d'action numérique de l'Union ignore ce point, pourtant crucial à la réussite d'une transition numérique inclusive et au bénéfice du plus grand nombre. Je vous proposerai ainsi un amendement sur ce point.
Enfin, mes chers collègues, avant d'entamer l'examen de nos amendements respectifs, je vous invite à prendre du recul par rapport à ce programme d'action numérique de l'Union. Il ne s'agit pas du seul document européen abordant les enjeux numériques : des initiatives législatives majeures ont été adoptées dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne et d'autres textes législatifs sont en cours de discussion, notamment sur l'économie des données et l'intelligence artificielle.
À cet égard, il me semble que deux sujets majeurs, mais devant être traités séparément dans le cadre d'examens législatifs dédiés au niveau européen, sont indispensables pour nous permettre de réussir notre transition numérique, améliorer notre résilience collective et bâtir notre souveraineté numérique.
D'une part, une réforme des réglementations européennes et nationales en matière de commande publique est nécessaire. Outil stratégique de politique économique indispensable à l'émergence d'acteurs innovants y compris dans le secteur numérique, le levier de la commande publique demeure peu utilisé en France, alors qu'il représentait pourtant 111 milliards d'euros en 2020. Il est désormais temps d'avoir un véritable débat sur l'adoption, au niveau européen, d'un Small Business Act, pour soutenir le développement des TPE et PME innovantes, mais aussi sur la nécessité de s'orienter vers un Buy European Act dans des secteurs ciblés, dans un double objectif de compétitivité et de souveraineté.
D'autre part, la localisation des données à caractère personnel des citoyens européens et des données sensibles des entreprises européennes sur le territoire de l'Union européenne constitue une première brique essentielle pour mieux nous protéger des lois extraterritoriales américaines, mais elle n'est pas suffisante. Nous l'avons rappelé la semaine dernière, lors de l'examen du rapport de notre commission sur la souveraineté. Bâtir la souveraineté numérique nécessite quatre briques essentielles : premièrement, la localisation des données sur le territoire de l'Union ; deuxièmement, la localisation des infrastructures d'hébergement et de traitement des données sur le territoire de l'Union ; troisièmement, le développement d'une filière logicielle européenne constituée d'entreprises européennes immatriculées sur le territoire de l'Union ; quatrièmement, le développement des compétences numériques suffisantes et adéquates, générales et spécialisées.
Telle est, mes chers collègues, la feuille de route pour l'examen de cette proposition de résolution européenne.
Je me réjouis que la commission des affaires économiques se soit saisie de cette proposition de résolution.
En tant que coauteures de ladite proposition, Catherine Morin-Desailly et moi-même jugeons important que le Sénat s'exprime à ce sujet. Nous assistons en effet à un changement de paradigme de la part de l'Union européenne, qui avait travaillé, sous la commission Juncker, à construire un marché du numérique et qui vise aujourd'hui à faire de l'Union un offreur de services numériques et un acteur industriel.
Ce texte est effectivement complété utilement par d'autres textes. Les amendements proposés par notre rapporteur détaillent certains points que nous avions soulevés. Pour la première fois, la notion de souveraineté numérique est abordée.
EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE
Article unique
L'amendement COM-7 tend à fixer des indicateurs chiffrés de souveraineté numérique. Ces objectifs seront précisés ultérieurement par la Commission. Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut avis défavorable.
Je n'y crois guère. La question de la souveraineté, qui doit être déclinée dans tous les secteurs de l'économie, appelle la définition d'indicateurs. Or je n'en vois pas l'ombre, quel que soit le domaine concerné.
Le texte comporte déjà douze objectifs chiffrés afin d'atteindre la souveraineté numérique. D'autres indicateurs clés de performance devraient être précisés ultérieurement par la Commission par des actes d'exécution.
Au-delà des objectifs de moyens, ce sont les objectifs de performance qui me paraissent importants. Ils permettent d'évaluer le niveau de souveraineté de l'Union européenne.
L'amendement COM-7 n'est pas adopté.
L'amendement COM-3 tend à inclure des objectifs chiffrés pour évaluer les enjeux démocratiques liés à la transition numérique. Mon avis sera le même : demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
L'amendement COM-3 n'est pas adopté.
Les amendements COM-14 et COM-11 tendent à préciser les dispositions relatives aux compétences numériques. Avis favorable.
Ne pourrait-on pas faire également une référence aux mathématiques ? Il ressort de nos auditions que la question du niveau en mathématiques est absolument essentielle, y compris dans les formations numériques. En outre, la France est particulièrement mal classée dans ce domaine.
Je partage votre préoccupation, mais cette proposition me paraît s'éloigner du texte proprement dit.
Les amendements COM-14 et COM-11 sont adoptés.
Mon amendement COM-15 tend à préciser les dispositions relatives aux infrastructures numériques.
L'amendement COM-15 est adopté.
Mon amendement COM-16 tend à préciser les dispositions relatives à la transformation numérique des entreprises.
L'amendement COM-16 est adopté.
Mon amendement COM-17 tend à préciser des dispositions relatives à la numérisation des services publics.
L'amendement COM-17 est adopté.
Les amendements COM-18 et COM-2 tendent à ajouter des dispositions relatives à l'empreinte environnementale du numérique. L'amendement COM-2 est par ailleurs satisfait par mon amendement, j'invite donc M. Montaugé à le retirer. À défaut, l'avis sera défavorable.
L'amendement COM-2 est retiré. L'amendement COM-18 est adopté.
Mon amendement COM-19 tend à ajouter des dispositions relatives à la cybersécurité.
L'amendement COM-19 est adopté.
Les amendements COM-8 rectifié et COM-9 tendent à ajouter des dispositions relatives aux projets importants d'intérêt européen commun (PIIEC). Je partage, bien entendu, votre vision de la transition numérique comme une transition industrielle. Plusieurs PIIEC concernant la transition numérique de l'Union et des États membres sont déjà en cours de réalisation, notamment celui relatif aux semi-conducteurs et celui relatif à la constitution d'une filière économique souveraine de solutions de cloud. Ces projets sont indispensables et souhaitables pour atteindre la souveraineté numérique.
Toutefois, la politique industrielle et numérique de l'Union ne repose pas seulement sur la mise en oeuvre des PIIEC. Ainsi, le programme d'action numérique créé un nouvel instrument juridique visant aussi à favoriser les projets et investissements multinationaux, à savoir le Consortium pour les infrastructures numériques européennes (EDIC). L'objectif est ainsi de créer un nouveau mode de coopération entre les États membres et les entreprises, spécifiquement pour la transition numérique, et complémentaire des PIIEC, qui ne sont pas spécifiques aux enjeux numériques. Afin d'éviter toute confusion, je vous propose de retirer les amendements COM-8 rectifié et COM-9. À défaut, l'avis sera défavorable.
Les arguments avancés par M. le rapporteur sont pris en compte par le terme « notamment », qui figure dans le texte de l'amendement. Cette formulation n'est pas exclusive. Le développement de l'industrie numérique européenne ne repose évidemment pas sur les seuls PIIEC. Nous souhaitions néanmoins insister sur ces projets, qui ont été réactivés par la Commission européenne au début de la crise de la Covid et qui présentent des perspectives de coopération très intéressantes entre un nombre limité de pays.
Les amendements COM-8 rectifié et COM-9 ne sont pas adoptés.
L'amendement COM-4 tend à introduire des précisions quant à la prise en compte de la fracture numérique dans la stratégie globale de l'Union. Avis favorable.
L'amendement COM-4 est adopté.
L'amendement COM-13 tend à introduire une précision relative à la localisation des données. Sur le fond, je partage les motivations des auteurs de l'amendement. La souveraineté numérique de l'Union européenne ne sera complète que lorsque la localisation des données des entreprises et des citoyens européens se fera sur le territoire européen. Cela permettra, en partie seulement, d'améliorer notre protection collective face aux lois extraterritoriales. Nous devons toutefois rester dans le cadre du texte européen que nous commentons aujourd'hui, à savoir le programme d'action numérique de l'Union européenne à l'horizon 2030, qui n'est pas un texte à caractère législatif. La logique est la suivante : fixer des objectifs chiffrés permettant d'orienter les efforts et les investissements des États membres d'ici à 2030. La localisation des données est un sujet majeur, mais qui ne s'inscrit pas dans ce cadre, car devant faire l'objet d'une législation européenne spécifique. En conséquence, je vous propose de retirer cet amendement. À défaut, l'avis sera défavorable.
Sur ce sujet, les avis sont partagés, parfois même opposés. Il est très difficile de se faire une opinion compte tenu de la technicité de la question. Personnellement, je ne vois comment nous pourrions garantir une souveraineté nationale dans le domaine du numérique si les données ne sont pas hébergées sur le territoire européen, d'autant que les infrastructures d'échange reposent essentiellement sur des câbles sous-marins qui sont privés. Ce point justifie à lui seul la localisation des données sur le territoire européen.
Sur le fond, je vous confirme que nous sommes en parfaite harmonie.
L'amendement COM-13 est retiré.
L'amendement COM-5 rectifié tend à souhaiter un investissement dédié à l'implantation de centres de données et au développement de solutions logicielles européennes. Avis favorable.
L'amendement COM-5 rectifié est adopté.
L'amendement COM-1 tend à préciser des dispositions relatives à la commande publique. Avis favorable.
L'amendement COM-1 est adopté.
Les amendements COM-10 et COM-12 tendent à apporter des précisions relatives aux données. L'alinéa 42 de la proposition de résolution européenne porte sur la nécessité, pour l'Union européenne, de faire du respect du règlement général sur la protection des données (RGPD) une condition ferme de négociation avec les États tiers à l'Union, par exemple dans le cadre de la négociation d'accords commerciaux. Il s'agit donc d'une disposition spécifique qui concerne uniquement le RGPD, règlement européen qui traite des données à caractère personnel des citoyens. Il n'y a donc pas de lien avec les dispositions relatives aux données des entreprises européennes ou avec l'objectif de libre circulation des données au sein du marché intérieur. En conséquence, je vous propose de retirer ces deux amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Cela signifie-t-il qu'un dispositif parallèle au RGPD traiterait à terme des données des entreprises et des personnes morales ?
Au contraire, la disposition ne porte que sur le RGPD et ce dernier ne concerne pas les données liées aux entreprises.
Le sens de l'amendement était bien d'étendre le RGPD aux données stratégiques des personnes morales, entreprises ou associations.
Certes, mais le RGPD étant en vigueur, nous ne pouvons modifier son cadre.
Il est tout de même possible de le faire évoluer. Cette proposition de résolution européenne s'y prête.
En la matière, il est important de bien analyser les conséquences économiques. Il ne faudrait pas que les entreprises françaises ne puissent plus utiliser de solutions américaines.
Nous trouverons toujours nombre d'arguments pour maintenir le statu quo.
C'est un véritable sujet. Il convient cependant de bien l'étudier, par exemple au moyen d'une étude d'impact.
Peut-être les autres textes en cours d'élaboration qu'évoquait notre rapporteur tiendront-ils compte de ces enjeux ?
Ils ont en tout cas davantage vocation à y figurer.
Les amendements COM-10 et COM-12 ne sont pas adoptés.
L'amendement COM-6 rectifié tend à organiser un débat national sur la mise en oeuvre de la décennie numérique. Avis favorable.
L'amendement COM-6 rectifié est adopté.
L'article unique est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
La proposition de résolution est adoptée à l'unanimité.
Les sorts de la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :
Notre commission va se voir déléguer au fond par la commission des affaires sociales plusieurs articles du projet de loi portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat. Il s'agit des articles 6 - relatif aux indices de référence des loyers -, 7 à 9 - volet protection des consommateurs -, 10 à 13 et 17 à 19 - dispositions relatives à l'énergie -, qui relèvent pleinement des compétences de notre commission.
La commission désigne M. Daniel Gremillet rapporteur pour avis du projet de loi n° 19 (A.N., XVIe lég.) portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, sous réserve de sa transmission.
Le calendrier prévoit à ce stade un examen en commission le lundi 25 juillet à quinze heures. La séance publique débuterait le jeudi 28 juillet. Ces hypothèses seront confirmées lors de la prochaine conférence des Présidents, sous réserve de la transmission du texte par l'Assemblée nationale dans les délais.
Enfin, je vous informe que, sur l'initiative conjointe des présidents des commissions des finances, des affaires européennes, des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et des affaires économiques, le Sénat préside et accueille en 2022 la Conférence européenne interparlementaire de l'espace. La séance plénière aura lieu le vendredi 16 septembre et trois tables rondes sont prévues au cours de la journée : la première sur l'autonomie stratégique européenne pour garantir un accès durable à l'espace, la deuxième sur le développement du New Space pour garantir des usages plus durables de l'espace, la troisième traitera de la lutte contre la pollution spatiale.
Je voudrais vous dire l'importance de cette conférence, car les enjeux spatiaux nous concernent très directement. Je vous invite vivement à assister à cette journée, qui sera l'occasion d'échanges fructueux avec des intervenants de grande qualité, mais aussi avec les parlementaires étrangers qui seront massivement présents.
Malheureusement, nous avons dû faire des choix afin de ne retenir que trois thématiques. La question du droit de l'espace, qui est en effet fondamentale, sera traitée au sein du groupe de travail sur l'Espace.
La réunion est close à 10 h 40.