Séance en hémicycle du 21 mai 2015 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3 et Public Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme Danielle Michel, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Michel

Christian Jacob a réclamé avant-hier la tenue d’un débat à l’Assemblée nationale sur la réforme du collège, en dénonçant « un véritable mépris du Parlement ». Mais qui méprise qui ? Faut-il rappeler que, en 2013, une loi pour la refondation de l’école de la République a été votée, après avoir été largement débattue et amendée ici au Sénat ? Quel mépris de votre part, chers collègues de droite, de tenir pour rien ce travail de qualité !

De fait, la réforme du collège reprend les objectifs fixés par le législateur au travers de la loi pour la refondation de l’école de la République, elle-même fruit d’une longue consultation. Depuis deux ans, le Gouvernement œuvre à une tâche difficile, mais indispensable : rendre l’école à la fois plus juste et plus efficace. La réforme du collège est une nouvelle étape de ce travail.

Il ne se passe plus un jour sans que Nicolas Sarkozy ne demande l’abrogation d’une loi ou d’un décret : après le mariage pour tous, il s’en prend au collège pour tous ! Quel programme… « Mépris du Parlement », disiez-vous ?

Il faut reconnaître que, en matière de suppressions, vous avez acquis, durant dix années au pouvoir, une certaine expérience : suppression de la préscolarisation, suppression de trois heures d’enseignements par semaine en primaire, soit, sur la scolarité d’un enfant, l’équivalent d’une année de classe

Protestations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Michel

… suppression de 80 000 postes dans l’éducation nationale, suppression de la formation pratique des professeurs, …

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Michel

Et vous parlez de nivellement par le bas, de tentative de destruction du génie français… Un peu de retenue serait bienvenue !

Bruno Le Maire a proposé en début de semaine de « sortir de Bourdieu » et de retirer le social du débat sur l’école. Au vu de l’aggravation des inégalités sociales et scolaires dans notre pays, je crois, à l’inverse, qu’il est urgent de s’attaquer aux mécanismes de reproduction sociale, extrêmement puissants dans notre pays. La réforme du collège y contribuera, en promouvant une idée de l’excellence autrement plus ambitieuse que celle qui a prévalu ces dernières années : le droit à l’excellence pour tous, et non pas réservé à quelques-uns !

Madame la ministre, pourriez-vous rappeler les mesures que vous avez annoncées pour atteindre cet objectif ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – MM. Alain Bertrand et Michel Le Scouarnec applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Madame Michel, je vous remercie de votre question

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Nous l’avions affirmé en arrivant aux responsabilités : la France a besoin de redressement dans tous les domaines, en particulier dans celui de l’éducation, …

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … après dix années où la droite au pouvoir a supprimé 80 000 postes dans l’éducation nationale et la formation initiale des enseignants, alors même que le niveau des élèves ne cessait de se dégrader, à l’école primaire comme au collège.

Protestations sur les travées de l’UMP. – Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Nous avons donc entrepris, en 2012, une ambitieuse refondation de l’école, de manière très pragmatique, en suivant la chronologie. Ainsi, nous avons commencé par l’école primaire, en accroissant le nombre de maîtres, en restaurant la préscolarisation des enfants avant l’âge de 3 ans et en améliorant la formation des enseignants. Aujourd’hui, le temps est venu de procéder à la réforme du collège, qui était en effet annoncée par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, que le Parlement a adoptée voilà deux ans.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

grâce à une rénovation des pratiques pédagogiques supposant de laisser une plus grande autonomie aux établissements, pour que les chefs d’établissement et les équipes pédagogiques puissent mieux adapter l’enseignement aux besoins des élèves, qui ne sont pas exactement les mêmes partout. Cela permettra aux équipes pédagogiques de « mettre le paquet » – pardonnez-moi l’expression – sur le français, les mathématiques ou une autre matière, en fonction des lacunes constatées.

Nous prévoyons également de moderniser les apprentissages pour renforcer les compétences de nos élèves. En effet, les jeunes qui entreront sur le marché du travail en 2025 devront mieux maîtriser les langues vivantes étrangères, les outils numériques, mieux s’exprimer à l’oral, apprendre à travailler en groupe, être capables de créativité, pour répondre aux exigences du monde moderne et pouvoir occuper des emplois à haute valeur ajoutée.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Dans cette perspective, je vous remercie de votre soutien !

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE. – M. Michel Le Scouarnec applaudit également.

réforme du collège

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à M. Jean-Marie Bockel, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Madame la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, votre réforme du collège suscite une vite opposition, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

M. Jean-Marie Bockel. … et pour cause : outre son contenu, la méthode employée s’apparente à une provocation. En publiant hier le décret au Journal officiel, sans consultation préalable du Parlement ni concertation avec la communauté éducative, de surcroît au lendemain d’une journée de mobilisation des enseignants, le Gouvernement s’est tout bonnement moqué du processus démocratique dans notre pays !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Certes, madame la ministre, le Parlement a approuvé le principe de votre réforme en adoptant la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, mais cette loi n’avait pas été accompagnée de l’annonce d’un tel décret, comme il est pourtant de règle. Vous comprendrez donc que la majorité de nos collègues aient le sentiment d’avoir été dupés !

Madame la ministre, pourquoi refuser un débat devant le Parlement sur un sujet qui est au cœur des préoccupations de nos concitoyens ? Vous connaissez pourtant le rôle majeur joué par les commissions du Parlement, en particulier par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, dont la présidente, Catherine Morin-Desailly, est très impliquée dans le suivi de ce dossier.

L’école française ne va pas bien. Alors oui, des réformes sont nécessaires, oui, il faut redresser l’école ; mais pas de cette manière !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Pour vous, ce n’est jamais la bonne manière !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

M. Jean-Marie Bockel. Avec cette réforme, madame la ministre, vous tournez le dos à l’excellence républicaine !

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Bockel

Offrir aux élèves une chance de viser l’excellence, ce n’est pas pratiquer l’élitisme, sinon l’élitisme républicain dont parle si bien Jean-Pierre Chevènement, ni légitimer les inégalités, comme vous l’avez récemment prétendu ; c’est, au contraire, donner aux jeunes les moyens de leurs ambitions.

Le sacrifice des classes bilangues et européennes, qui, entre autres résultats, ont permis à l’allemand de rester la troisième langue vivante enseignée en France, l’atteinte portée à l’enseignement du latin et du grec, l’affaiblissement de l’enseignement de l’histoire, l’incompréhensible introduction des enseignements pratiques interdisciplinaires vont aggraver les problèmes que connaissent déjà nos collèges.

Madame la ministre, quelles « garanties », pour reprendre votre expression, comptez-vous introduire dans les textes d’application pour répondre au mécontentement général et aux inquiétudes ? L’acte d’autorité qu’a posé le Gouvernement en publiant en toute hâte, hier, le décret d’application ne rassure pas ceux qui sont inquiets, bien au contraire !

Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC et de l'UMP. – M. Gilbert Barbier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Monsieur Bockel, votre question me donne l’occasion de répondre à plusieurs procès d’intention qui me sont régulièrement faits.

Nul plus que moi n’est attaché à l’excellence, mais l’égalité n’est pas l’ennemie de l’excellence : au contraire, c’est elle qui permettra à chaque enfant de France de pouvoir un jour réussir et progresser en faisant valoir son mérite, son travail et ses efforts.

Ce contre quoi je m’élève résolument, monsieur Bockel, c’est le rétrécissement de l’élite que l’on n’a cessé de constater au cours des dix dernières années. Contesterez-vous que la composition sociale des classes préparatoires et des grandes écoles se réduit ?

MM. Ronan Dantec et Michel Le Scouarnec acquiescent.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Contesterez-vous que seuls 75 % des enfants d’ouvriers, contre 95 % des enfants de cadres, obtiennent le brevet à la fin du collège ?

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Nous entendons nous attaquer à cette réalité des inégalités et du déterminisme social, qui est malheureusement la marque de fabrique du système éducatif français, en faisant en sorte que chaque enfant soit assuré de pouvoir acquérir, jusqu’à l’âge de 16 ans, le socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Aucun enfant ne doit plus sortir du collège sans maîtriser les savoirs fondamentaux en français, en mathématiques et en histoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

C’est à l’école primaire qu’ils doivent être acquis !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Telle est la finalité de notre réforme, qui reprend l’ambition du collège unique, à savoir assurer une formation de même qualité à toute une classe d’âge, …

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

… tout en refusant l’uniformité : nous promouvons une personnalisation de la pédagogie, afin que chaque enfant puisse faire valoir son potentiel et ses talents. Cette personnalisation passe par l’accompagnement individuel des élèves, dont nous avons fait une règle. Ainsi, en sixième, trois heures par semaine seront consacrées aux fondamentaux, pour que les élèves en difficulté puissent rattraper leur retard, et ceux qui sont en avance approfondir leurs connaissances.

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe socialiste

Très bonne mesure !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Aujourd’hui, un collège de 500 élèves ne dispose que de dix heures de dotation globale pour faire travailler les élèves en petits groupes. Grâce à la réforme, il en disposera l’année prochaine de soixante, ce qui créera de meilleures conditions pour la réussite du plus grand nombre. Que l’on m’explique en quoi les élèves qui réussissent déjà en pâtiront !

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Quand le niveau de l’eau s’élève, tous les bateaux montent. Notre réforme sert l’intérêt de tous les élèves, qu’ils soient en difficulté ou qu’ils réussissent !

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

réforme du collège

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Ma question s’adressait à M. le Premier ministre, car elle n’est pas d’ordre technique.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Guillaume

Mme la ministre ne tient pas du tout un discours technique !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Madame le ministre, nous avons écouté vos réponses avec intérêt, mais nous sommes frustrés d’un véritable débat. Tout ce que vous avez dit est intéressant, mais rien n’est certain, et il y a de véritables erreurs.

Ma question porte sur la manière de conduire le changement dans notre pays et sur le respect dû aux partenaires de ce changement.

M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Il se trouve, madame le ministre, que les enfants n’appartiennent pas aux théoriciens de la pédagogie du Conseil supérieur de l’éducation ; ils appartiennent à leur famille et sont confiés aux enseignants, sous la responsabilité des chefs d’établissement !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI -UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Le décret signé par le Premier ministre et publié hier est un texte mal né. Il est le fruit d’un délire qui a d’abord fait rire, tant il était prétentieux, abscons et parfois grotesque ; je n’y reviens pas.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous voulez parler des programmes : ne mélangez pas tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Ensuite, ce décret est parfaitement péremptoire. Le collège unique a été instauré, non sans mal, par mon compatriote lorrain René Haby, qui était de notre famille politique. Seulement, le collège unique doit évoluer et se diversifier, parce que les problèmes ont changé.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Il doit se démocratiser, pour assurer la réussite de tous !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

M. Gérard Longuet. Cette réforme n’était pas inscrite dans la loi du 8 juillet 2013, madame le ministre : elle réclame la tenue d’un véritable débat, parce que c’est bien plus qu’une affaire administrative que l’on pourrait laisser à des pédagogues professionnels qui, depuis quarante ans, n’ont apporté aucune solution à la dégradation de notre enseignement !

Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI -UC. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Dans ce texte mal né, péremptoire, contradictoire avec vos propres intentions, il n’y a rien sur l’apprentissage, rien sur le rôle des collectivités territoriales ! Alors que l’on va demander à celles-ci et à leurs élus de prendre en charge les collèges, les lycées, les écoles primaires et de soutenir l’action pédagogique, vous ne leur faites strictement aucune place ! Votre réforme, vous l’avez bâclée !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Longuet

Je pense profondément que, au lendemain du 11 janvier, nous pouvions attendre que le Gouvernement, sur le terrain de l’enseignement, élève le débat, comme nous l’avons fait sur le terrain de la défense, et fasse confiance à l’ensemble de la représentation nationale. Quelles sont vos intentions en la matière ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI -UC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le sénateur Longuet, il faut bien distinguer entre la réforme du collège, qui porte sur l’organisation du collège et les pratiques pédagogiques, et la réforme des programmes.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

La loi a confié à une instance indépendante, le Conseil supérieur des programmes, le soin de présenter des projets de programmes, qui font aujourd'hui l’objet d’une large consultation auprès des 800 000 enseignants qui auront à les appliquer.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Cette consultation, d’une durée d’un mois, conduira bien entendu à retravailler la formulation des programmes, …

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

… que je serai amenée à valider définitivement au mois de septembre prochain.

Je vous propose donc de laisser ce sujet de côté, après avoir précisé que ces programmes ont vocation à être plus lisibles, plus cohérents, plus progressifs sur le temps de la scolarité, pour permettre aux élèves de mieux réussir et d’acquérir les fondamentaux dont ils ont absolument besoin pour se projeter dans la vie.

Je reviens à la réforme du collège.

Monsieur le sénateur, vous en conviendrez, la meilleure méthode qui soit pour préparer un texte, c’est bien d’en débattre au Parlement. Ainsi, les discussions, à l’Assemblée nationale et au Sénat, sur la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ont duré très exactement cinq mois. Je ne sais si vous y avez assisté…

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Ce texte prévoyait une réforme du collège pour y introduire plus d’autonomie, développer l’interdisciplinarité, afin que les élèves apprennent autrement et s’approprient les savoirs qui leur sont transmis, et enfin mettre en place l’accompagnement personnalisé que j’évoquais à l’instant.

Vous prétendez que, dans cette réforme, aucune place n’est faite aux collectivités locales ou au monde professionnel. C’est faux ! Si vous aviez pris le temps de regarder précisément les textes, vous auriez pu constater, par exemple, que l’un des enseignements pratiques interdisciplinaires que nous créons est consacré au monde professionnel. Il a précisément pour vocation d’apprendre assez tôt au collégien à s’orienter pour trouver sa voie et de permettre aux établissements scolaires, grâce à l’autonomie qui leur est accordée, de nouer des partenariats avec leur environnement, notamment avec les entreprises, pour ouvrir les horizons des élèves.

Vous le voyez, qu’il s’agisse du numérique, de l’éducation artistique et culturelle ou de la découverte du monde professionnel, le nouveau collège est ouvert sur le monde, au bénéfice de la réussite des élèves !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

M. Jean-Claude Requier. Ma question s’adresse non à Mme la ministre de l’éducation nationale, qui aura ainsi un peu de répit

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le ministre, la Méditerranée est actuellement le théâtre d’une tragédie humaine comme elle en a rarement connu dans sa longue histoire. On estime à 1 700 le nombre de migrants qui ont perdu la vie depuis le début de cette année en essayant d’atteindre les côtes européennes. Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut agir et que la réponse ne peut être qu’européenne, c’est-à-dire coordonnée entre tous les pays de l’Union, car le problème ne concerne pas seulement l’Italie, l’Espagne et la Grèce.

La semaine dernière, la Commission européenne a proposé un « plan d’action pour l’immigration et l’asile », dont la mesure essentielle n’est pas passée inaperçue, puisqu’il s’agit d’instaurer des quotas de migrants par pays d’accueil. Mais qu’est-ce donc que cette Europe qui répond à des drames humains par l’institution de quotas ? Est-ce un génial technocrate qui a eu l’idée d’inventer des quotas d’immigrés, comme un autre avant lui, mieux inspiré il est vrai, avait inventé les quotas laitiers ?

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Pour la Commission européenne, la répartition des migrants entre les pays de l’Union pourrait se faire en fonction de leur richesse, de leur population, de leur taux de chômage et du nombre de personnes déjà accueillies. Bien évidemment, les migrants dits « économiques » ne sont pas concernés, puisqu’il s’agit d’une immigration irrégulière et que, en la matière, la règle doit demeurer la reconduite. Reste donc l’asile, sur lequel le Sénat a travaillé ces derniers jours et qui est accordé sur le fondement de critères bien définis : ou bien on répond à ces critères et on bénéficie du statut de réfugiés, ou bien on doit quitter le territoire. On voit donc mal comment l’on pourrait instaurer des quotas !

Le Président de la République a fait savoir que la France était opposée par principe à toute idée de quotas en matière d’immigration.

S’il ne nous est pas possible d’accepter une répartition contraignante des rescapés de la Méditerranée, le Gouvernement s’est dit toutefois « pleinement favorable à ce que ces personnes ayant un besoin manifeste de protection puissent être, de manière temporaire et selon des paramètres à discuter, réparties plus équitablement » entre les États membres.

Monsieur le ministre, ma question est simple : pouvez-vous éclairer le Sénat sur cette notion de « répartition solidaire et équitable » ?

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve

Monsieur le sénateur, vous appelez à la précision sur un sujet qui nécessite effectivement d’être traité avec la plus grande rigueur, eu égard à sa gravité.

Une réponse ne pourra être apportée qu’à travers une action et une mobilisation fortes des États de l’Union européenne.

Les drames humains qui se déroulent en Méditerranée résultent de la mise en place de filières de traite des êtres humains. Leurs organisateurs placent sur des embarcations de plus en plus frêles des migrants de plus en plus vulnérables et de plus en plus nombreux, les condamnant à une mort certaine. Ces filières doivent être démantelées et ceux qui les organisent sévèrement punis par la justice.

Dans cette perspective, la première chose à faire est d’aider les pays de provenance des migrants à contrôler leurs frontières. En effet, 70 % de ceux qui arrivent à Lampedusa transitent par la bande sahélienne et relèvent de l’immigration économique irrégulière. À l’occasion de la réunion des ministres de l’intérieur des pays du G5 du Sahel, j’ai proposé de mettre en place des coopérations entre nos services et les leurs pour assurer ce contrôle.

Par ailleurs, nous devons faire travailler ensemble nos services de justice et de police pour procéder au démantèlement de ces filières. Nous le faisons en France, en lien avec les services britanniques. L’an dernier, ce sont 236 filières supplémentaires de l’immigration irrégulière qui ont été démantelées, dont 30 % de plus à Calais.

Nous avons également le devoir de sauver des vies, dans le respect du droit de la mer. C’est l’un des objectifs assignés à l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, ou Frontex, dont l’action se substitue à l’opération Mare Nostrum.

Les migrants qui relèvent du droit d’asile en Europe doivent être accueillis sur la base des critères de celui-ci et répartis équitablement entre les pays de l’Union européenne. Le concept de quotas n’a pas de sens s’agissant de ceux qui ont vocation à obtenir le statut de réfugié : en instaurer signifierait que, au-delà d’un plafond, l’Europe refuse d’accueillir cette catégorie de migrants, ce qui serait contraire à la tradition de la République et aux valeurs de l’Union européenne.

En outre, ce concept n’a pas davantage de sens s’agissant des migrants qui relèvent de l’immigration irrégulière, car ceux-ci n’ont pas vocation à être accueillis en Europe. Ils doivent être reconduits à la frontière et faire l’objet de politiques de maintien dans leur pays, assorties d’actions de codéveloppement associant les pays de la bande sahélo-saharienne.

Telle est la politique de la France. Elle est claire et a inspiré celle de l’Union européenne.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Ma question, qui concerne la plupart des ministères, eu égard à la gravité du problème de santé publique qui la sous-tend, s'adresse à M. le Premier ministre.

Le drame de l’amiante aura fait, selon la Direction générale de la santé, qui s’appuie sur les travaux de l’Institut national de veille sanitaire, au moins 100 000 morts en 2050.

La commission des affaires sociales du Sénat a créé, en février 2013, un comité de suivi. Après avoir travaillé sur cette question de l’amiante et du désamiantage, il a rendu, en juillet 2014, voilà donc presque un an, ses conclusions.

Les propositions formulées par ce comité ont fait l’objet d’un complet consensus parmi les groupes politiques du Sénat. Nous avons notamment demandé la mise en place d’une structure de coordination interministérielle rattachée au Premier ministre.

Nous alertons régulièrement sur les dangers que représente aujourd’hui l’absence d’une stratégie nationale du désamiantage pilotée par les services du Premier ministre et associant l’ensemble des nombreux ministères concernés. Les médecins nous alertent déjà sur le risque de survenue d’une deuxième épidémie si le désamiantage n’est pas fortement piloté par les pouvoirs publics.

Il est urgent que soient fixées des priorités nationales : amélioration de la réalisation des diagnostics amiante – c’est aujourd’hui un gros point faible –, mise en place de financements pérennes et d’un échéancier, fléchage des crédits vers la recherche-développement sur les thèmes du diagnostic, des techniques du désamiantage et du traitement des déchets, développement d’une formation initiale et continue de tous les acteurs.

Il est possible de créer une filière économique du désamiantage à l’échelle nationale – sans doute pour plusieurs décennies –, qui serait, par ailleurs, pourvoyeuse d’emplois !

L’objectif est non de faire peur, mais d’affronter le problème lucidement, en mettant aussi en place un dispositif d’information du grand public.

Dix mois après la publication du rapport, nous n’avons aucune nouvelle du Gouvernement. Des représentants du comité de suivi ont été reçus fin octobre par le cabinet du Premier ministre, pour présenter ledit rapport. À ce jour, aucune réaction ne nous est parvenue.

On me dit qu’une feuille de route interministérielle serait en cours d’élaboration : qu’en est-il ? Quand pouvons-nous espérer que la stratégie nationale tant demandée par de nombreux acteurs soit enfin mise en œuvre, près de vingt ans après l’interdiction de l’amiante dans notre pays ?

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et sur certaines travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Madame la sénatrice, vous l’avez dit, l’amiante provoque en France, chaque année, la mort de 1 700 personnes, en ne prenant en compte que les seuls cancers liés à l’exercice d’une activité professionnelle. C’est sans doute le plus grand drame de santé publique qu’ait connu notre pays.

Devant la gravité de cette situation, le Gouvernement est déterminé à tout faire pour éviter les expositions à ce polluant cancérigène, interdit dans notre pays depuis 1997 mais encore présent dans certains bâtiments.

Des mesures ont d’ores et déjà été prises pour faciliter l’extraction de l’amiante dans les logements existants. Ainsi, la loi de finances de 2015 a créé un prêt dédié aux travaux de traitement de l’amiante. Ce prêt, qui est délivré par la Caisse des dépôts et consignations, sera mobilisable à hauteur de 2 milliards d'euros. Il permettra vraisemblablement de financer les travaux dans 40 000 logements, avec des taux inférieurs à ceux du livret A.

Les organismes de recherche seront pleinement impliqués dans cet effort de désamiantage, grâce à un plan d’action sur trois ans mis en place par le ministère du logement et qui vise à mobiliser les chercheurs pour sécuriser l’extraction de l’amiante.

Par ailleurs, plusieurs mesures relatives à l’amiante ont été insérées dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé qui sera examiné très prochainement en première lecture par le Sénat.

Ce projet de loi prévoit notamment de renforcer le pouvoir d’intervention des préfets, qui pourront prendre des mesures contraignantes en vue de faire cesser des expositions aux fibres d’amiante. Il permettra également d’assurer une meilleure transmission des informations relatives à l’amiante. À l’avenir, elles devront être communiquées non seulement aux préfets, mais aussi aux ministères chargés de la santé et du logement. Enfin, ce texte renforcera les sanctions encourues par les propriétaires qui refuseraient de répondre aux injonctions en matière de repérage des travaux amiantés.

Cependant, vous avez eu raison de souligner que, au-delà de ces actions sectorielles, nous devons renforcer la coordination interministérielle en matière de lutte contre l’amiante. Les différentes actions que j’ai évoquées montrent bien que plusieurs ministères sont concernés. Dans cette perspective, le ministère de la santé est en train d’établir, en lien étroit avec les ministères chargés du développement durable, du travail et du logement, une feuille de route interministérielle qui viendra très vite coordonner les actions de tous les services compétents.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Cette feuille de route devrait permettre de renforcer l’information du public sur les risques liés à l’amiante et d’aider les particuliers et les professionnels à agir. Je pense notamment aux diagnostiqueurs et aux artisans du secteur du bâtiment et des travaux publics.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour le groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Madame la ministre de l'éducation nationale, le jour même de la grève des enseignants contre la réforme du collège, vous avez signé le décret d’application de celle-ci. C’est un passage en force choquant.

Oui, il faut une réforme du collège. Toutefois, si son objectif est de favoriser la réussite de tous les élèves, de s’attaquer aux mécanismes de l’échec scolaire pour faire refluer les inégalités, celui-ci ne pourra être atteint sans l’engagement et l’adhésion de la communauté éducative.

Cette réforme devrait constituer une rupture nette avec les politiques menées précédemment par la droite, qui, faisant preuve de beaucoup d’opportunisme, prétend aujourd’hui défendre l’école de la République

Exclamations sur les travées de l'UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

On l’a toujours défendue, madame ! On n’a pas attendu !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … qu’elle a saccagée en supprimant des milliers de postes et la formation des enseignants.

Très bien ! sur les travées du groupe CRC. – Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cela étant, la réforme engagée par le Gouvernement appelle des critiques, …

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Seule Mme Gonthier-Maurin a la parole, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

… car elle repose sur une diminution globale des temps d’enseignements communs obligatoires au collège.

Madame la ministre, vous affirmez qu’elle permettra de mieux préparer tous les collégiens à « entrer dans le monde de demain ». Or ce monde, caractérisé par des savoirs plus complexes, nécessite une élévation du niveau des connaissances pour tous, donc plus d’école !

Vous invoquez le recours à l’aide personnalisée, aux enseignements pratiques interdisciplinaires. Pourquoi pas, mais l’interdisciplinarité doit non pas se substituer à l’acquisition de fortes bases disciplinaires par tous, mais s’appuyer sur elle.

De quels outils les enseignants disposeront-ils ? Le chantier de la formation continue est toujours en déshérence et dépourvu de moyens suffisants ! Quant à la formation initiale, alors que l’interdisciplinarité est supposée révolutionner le collège, elle n’a même pas été inscrite dans les missions des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République !

Quant à l’autonomie, c’est avant tout celle des établissements, et non celle des enseignants, qui est renforcée, dans un contexte de baisse des dotations globales horaires et de mise en concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

La crainte des enseignants d’un renforcement des inégalités est donc légitime.

Parce que tous les élèves n’entrent pas au même rythme dans les apprentissages, quand allez-vous accepter, madame la ministre, d’envisager un allongement de la scolarité obligatoire et de véritables prérecrutements des enseignants, outils essentiels de transformation de l’école, permettant sa véritable démocratisation ?

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Madame la sénatrice, je vous sais attachée, autant que je le suis, à la réussite scolaire de tous les enfants de France.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. C’est la raison pour laquelle je ne confonds pas l’opposition à cette réforme du collège qui relève d’une justification des inégalités scolaires visant à mieux permettre de dégager une élite

Exclamations sur les travées de l'UMP

Debut de section - Permalien
Un sénateur du groupe Ump

C’est inadmissible !

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

… et la vôtre, qui repose sur un certain nombre d’interrogations sur les modalités pratiques de mise en œuvre.

Oui, le collège a besoin de professeurs aux compétences disciplinaires solides, capables de renforcer l’apprentissage de chaque matière par les élèves. C’est la raison pour laquelle cette réforme ne porte nullement atteinte aux enseignements disciplinaires, dont les horaires ne baissent pas.

Oui, cette réforme introduit de nouveaux temps dits « d’interdisciplinarité ». Plusieurs enseignants seront ainsi amenés à travailler ensemble pour aider les élèves à s’approprier différemment les apprentissages, les cours magistraux, théoriques et cloisonnés ne convenant pas à tous.

En tout état de cause, ces enseignements pratiques interdisciplinaires seront bien assurés par les enseignants des différentes disciplines. Le professeur d’histoire-géographie, le professeur de français, le professeur de mathématiques, tous seront amenés à les prendre en charge, de même que l’accompagnement personnalisé.

C’est pourquoi, je le redis ici, aucun enseignant n’a à perdre à cette réforme du collège. Au contraire, celle-ci permettra aux élèves de mieux assimiler les différentes matières. Tel est bien l’objectif de cette réforme : que les élèves ne sortent pas du collège sans avoir compris ce qu’ils y ont appris.

Oui, madame la sénatrice, mettre en place la formation continue des enseignants est indéniablement nécessaire pour garantir la bonne mise en œuvre de cette réforme. C’est la raison pour laquelle le décret devait être publié. Il fallait en effet signifier une fois pour toutes que la réforme se fera, pour pouvoir ensuite discuter avec les organisations syndicales de ses modalités d’application, …

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … s’agissant notamment de l’accompagnement, par la formation continue, des établissements et des équipes pédagogiques. Cette démarche sera engagée très prochainement pour les cadres de l’éducation nationale, pour les chefs d’établissement, puis, à l’automne prochain, pour les enseignants de collège, afin que tous les acteurs puissent mettre en œuvre cette réforme dans les meilleures conditions possibles.

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

La France présidera la 21e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, qui se tiendra du 30 novembre au 11 décembre prochains. Cette échéance est cruciale : l’objectif est d’aboutir à l’adoption d’un premier accord universel et contraignant sur le climat, pour maintenir l’augmentation de la température globale en deçà de deux degrés Celsius. Il s’agit de prendre des mesures qui permettent de contenir le réchauffement global.

Avec 195 pays impliqués et 47 000 participants attendus, il s’agit là du plus grand événement diplomatique jamais organisé, tant par son ampleur que par l’importance de l’enjeu. La France, sur l’initiative du Président de la République

Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Mardi dernier, le Président de la République, François Hollande, et la chancelière allemande, Angela Merkel, ont donné à Berlin le coup d’envoi de la négociation internationale sur le climat. Le couple franco- allemand a décidé de donner un coup d’accélérateur aux travaux préparatoires de la conférence Paris Climat 2015.

À la fin du mois de février dernier, le Président de la République a lancé « l’appel de Manille »

Nouvelles exclamations ironiques sur les mêmes travées

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Roux

Aujourd’hui même se déroule à Paris, au siège de l’UNESCO, le sommet « Entreprises et climat », forum mondial des entreprises partenaires de la COP 21. Le secteur privé a répondu à l’appel du secrétaire général de l’ONU et assume un rôle plus actif dans le processus mondial de décarbonatation. Des réseaux d’entreprises de première ligne ont décidé d’unir leurs forces et de mobiliser des chefs d’entreprise du monde entier afin de lutter contre le réchauffement climatique.

Toutes les forces doivent être associées afin de permettre la réussite de la COP 21. Nous mesurons cette semaine encore l’engagement du Gouvernement dans la lutte contre le dérèglement climatique.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser quels moyens vous mettez en œuvre pour garantir autant que faire se peut le succès de la COP 21 et la réussite des négociations multilatérales ambitieuses que la France va présider ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Vous avez bien défini l’enjeu de la COP 21. Il faut toujours se méfier des épithètes excessives, mais, si nous réussissons à convaincre les 196 États parties, qui devront se prononcer à l’unanimité, …

Debut de section - Permalien
Laurent Fabius, ministre

… ce sera vraiment un succès pour le monde et, bien sûr, pour la France, hôte de cette conférence.

Cette conférence a quatre objectifs majeurs.

Le premier, le plus important, qui n’a jusqu’à présent jamais pu être atteint, est d’obtenir « un accord universel, différencié, juridiquement contraignant ». J’ajoute que cet accord devra aussi être durable et être maintenu au-delà de 2030. Les négociations avancent, mais elles sont très difficiles, car la matière elle-même est difficile. En outre, on comprend qu’il est ardu de mettre d’accord 196 pays…

Le deuxième objectif est de dresser le bilan des contributions nationales à la réduction des émissions de gaz à effet de serre que les pays doivent annoncer en principe avant la fin du mois d’octobre prochain. Pour l’heure, les contributions déjà annoncées portent sur 30 % à 40 % de la masse globale des émissions de gaz à effet de serre ; nous espérons avoir atteint, voire dépassé, le seuil de 90 % au moment de la COP 21. Nous aurons alors des indications précises sur les engagements de chacun des pays.

Le troisième objectif a trait aux financements et aux technologies. On peut imaginer qu’aucun pays n’est par principe opposé à la conclusion d’un accord sur le climat. Cependant, de nombreux pays, à commencer par les plus pauvres, s’interrogent sur les financements et les technologies.

Une série d’initiatives ont été prises. Je pense ainsi au Fonds vert, qui, notamment grâce à l’action de l’Allemagne et de la France, est doté d’un peu plus de 10 milliards de dollars, l’objectif étant de mobiliser 100 milliards de dollars à l’horizon de 2020. Un important travail reste à accomplir. Le Dialogue de Petersberg sur le climat, qui s’est achevé à Berlin voilà deux jours, s’inscrit dans cette perspective.

Enfin, le quatrième objectif vous concerne directement, mesdames, messieurs les sénateurs : il est d’associer les parlementaires, les régions, les collectivités locales, les entreprises à l’organisation de la COP 21, pour que celle-ci soit un succès et débouche sur la conclusion d’un accord bénéfique pour l’ensemble de la planète. À cet égard, je compte sur le soutien de chacune et de chacun d’entre vous.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Madame la ministre, vous admettrez qu’il n’est pas banal que des syndicats d’enseignants dits « réformistes » dénoncent une provocation du Gouvernement lorsqu’ils apprennent, via la presse, que le décret portant sur la réforme très contestée du collège a paru hier au Journal officiel, alors que de nombreux enseignants ont manifesté la veille.

Malgré le grand émoi suscité chez les enseignants, malgré la pétition de 234 parlementaires de la droite et du centre, malgré les propos très sévères d’intellectuels de tous bords – des intellectuels de grande renommée, et non des « pseudo intellectuels », comme vous les avez désignés –, …

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

C’est vrai, ce sont des intellectuels de tous horizons !

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

… vous refusez tout dialogue.

Promouvoir l’idéal politique de la réduction des inégalités est en soi fort estimable, mais, lorsque cela se fait au détriment de la qualité de l’instruction, c’est inacceptable. Or l’objectif que vous vous fixez, c’est bien le nivellement par le bas.

Protestations sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

En cela, madame la ministre, vous faites une terrible erreur d’analyse. Les parents des enfants des classes populaires n’attendent pas de vous que vous sabordiez l’élitisme ; ils attendent de vous que vous donniez à leurs enfants les moyens de l’atteindre.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Pour ce faire, il faut d’abord mettre en place un enseignement rénové de la lecture, qui permette à chaque élève de savoir lire comme nous lisons, vous et moi.

Or vous faites le choix de diminuer le nombre d’heures d’enseignement du français. Vous supprimez le latin et le grec, les classes bilangues et les sections européennes. Vous proposez l’enseignement dès la classe de cinquième d’une seconde langue vivante et vous diminuez l’horaire global de l’enseignement des langues, lequel, de ce fait, sera inefficace. Est-ce ainsi que vous allez restaurer l’égalité scolaire ?

Les heures d’accompagnement personnalisé seront prises sur le temps d’enseignement et ne correspondent en aucun cas au suivi individuel des élèves en difficulté. Est-ce ainsi que vous permettrez à chacun de progresser en adaptant le soutien à son niveau ?

Votre credo de la réduction des inégalités relève d’une vaste hypocrisie. Vous êtes en train d’abandonner les enfants des classes populaires et de dénaturer profondément notre système éducatif, notamment dans les zones urbaines sensibles.

Madame la ministre, allez-vous enfin écouter, mais surtout entendre et comprendre, ceux qui, d’où qu’ils viennent, pensent un véritable avenir pour notre jeunesse et pour notre pays ?

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Mme Colette Mélot. Allez-vous surseoir à cette réforme du collège et des programmes, ouvrir un vrai dialogue et une véritable concertation, qui seraient la marque d’une recherche sincère des moyens de permettre au collège de viser l’excellence pour le plus grand nombre des élèves ?

Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur quelques travées de l’UDI -UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Madame la sénatrice, voilà plusieurs semaines que j’entends parler de « nivellement par le bas ». Permettez-moi de vous donner ma définition de cette notion.

Le nivellement par le bas, c’est lorsque des familles craignent de mettre leur enfant dans un collège parce qu’elles savent que les difficultés scolaires de quelques élèves y sont si mal prises en charge que leur enfant risque d’en pâtir.

Le nivellement par le bas, c’est quand, pendant dix ans, on assiste sans rien faire, les bras ballants, à la dégradation du niveau de tous les élèves, les plus mauvais comme les meilleurs

Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem

Le nivellement par le bas, c’est quand le déterminisme social est si bien intériorisé que des enfants de familles populaires considèrent que la réussite n’est pas pour eux et s’autocensurent dans leur parcours scolaire, leurs choix et leurs ambitions.

Voilà ce qu’est le nivellement par le bas. C’est parce que nous ne l’acceptons pas que nous réformons le collège, afin de tirer tout le monde vers le haut.

Pour ce faire, nous renforçons l’acquisition des fondamentaux par les enfants, …

Debut de section - Permalien
Najat Vallaud-Belkacem, ministre

… qu’ils soient en difficulté ou en situation de réussite.

Nous entendons faire en sorte que les connaissances, les compétences et la culture que les enfants doivent avoir acquis à la fin du collège soient non seulement d’un niveau élevé, mais de même niveau pour tous les collégiens, quel que soit le territoire où ils vivent.

Nous entendons faire en sorte que les enfants soient stimulés, encouragés, aidés durant tout leur parcours au collège. Il s’agit de cultiver chez eux le goût du travail, de l’effort et du mérite, qui n’est pas inné, comme vous le prétendez.

Pour ce faire, il est nécessaire de mettre en œuvre des pratiques pédagogiques nouvelles au collège. Nous souhaitons que les enfants travaillent autrement durant les temps d’interdisciplinarité, avec des enseignants qui leur fassent conduire des projets, leur permettent d’exprimer leur potentiel, car chaque élève en a un.

Quand je parle d’égalité, madame la sénatrice, il s’agit de l’égalité des possibles pour tous les enfants : je refuse que l’on ferme des portes à certains en raison de leur milieu social.

Ne doutant pas que nous soyons tous d’accord sur ces questions, je vous remercie par avance, mesdames, messieurs les sénateurs, du soutien que vous apporterez à cette réforme.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Joyandet

Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Madame la ministre, le régime social des indépendants, le RSI, connaît de grandes difficultés. Le temps d’agir est venu. Depuis sa création, le recouvrement des cotisations auprès des travailleurs indépendants est effectué – je le rappelle parce qu’on ne le sait pas toujours – par le réseau des URSSAF.

Ce système particulièrement complexe a connu de graves défaillances techniques, qui ont affecté un grand nombre de cotisants : difficultés d’affiliation, erreurs dans les appels de cotisations, blocage des mises à jour des dossiers, taxation d’office, versement tardif des prestations, etc. Ces graves difficultés ont d’ailleurs été relevées par la Cour des comptes.

Je ne reviens pas sur les rappels de cotisations portant sur des sommes considérables, signifiés parfois de manière surprenante, pour ne pas dire brutale, à des travailleurs indépendants.

Si des efforts ont indéniablement été effectués par le RSl, les problèmes ne sont pas réglés pour autant.

Plusieurs mesures doivent être rapidement envisagées.

Tout d’abord, il est impératif que les cotisations provisionnelles des travailleurs indépendants soient calculées sur le fondement du revenu estimé de l’année en cours, et non sur celui des revenus de plusieurs années, compte tenu de la très grande variation des revenus des intéressés.

Ensuite, même si je n’oublie pas que le RSI a été créé en 2006, le gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre, a pris des mesures sur lesquelles il me semble nécessaire de revenir : déplafonnement des cotisations maladie, maternité et vieillesse, instauration d’une cotisation minimale forfaitaire, suppression de la déduction forfaitaire pour frais professionnels et élargissement de l’assujettissement des dividendes.

Ces mesures, inopportunes en période de crise économique, ont sensiblement augmenté les charges pesant sur les travailleurs indépendants, dont l’activité représente des millions d’emplois en France.

Enfin, eu égard au niveau des prélèvements, qui tend à s’aligner sur celui du régime général, alors que le RSI sert des prestations moindres, le temps n’est-il pas venu, pour faire suite aux propos tenus par le Premier ministre le 31 mars dernier dans différents médias, de laisser le choix aux travailleurs indépendants de rejoindre ou non le régime général ?

Telles sont les questions auxquelles, madame la ministre, je vous serais très reconnaissant de bien vouloir répondre devant la représentation nationale.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Monsieur le sénateur, il est vrai que le régime social des indépendants a connu, et connaît encore, mais dans une moindre mesure, de très grandes difficultés.

Puisque vous avez évoqué le rapport de la Cour des comptes, permettez-moi de préciser que celle-ci a qualifié de « catastrophe industrielle » la réforme mise en place en 2008 par la majorité de l’époque ! §Rappels de cotisations, impossibilité de joindre les services du RSI : toutes les difficultés que vous avez mentionnées ont découlé de cette réforme mal pensée, mal préparée et mal mise en œuvre.

Des mesures visant à remédier à cet état de choses ont été mises en place. Je veux saluer ici la très forte mobilisation des agents du RSI et des URSSAF. Un rapport remis l’an dernier par deux de vos collègues a montré que la situation s’est améliorée de manière très significative, même si cela demeure insuffisant.

Le Gouvernement a réduit les cotisations de 70 % des artisans, jusqu’à concurrence de 400 euros pour ceux dont le revenu s’établit à environ 20 000 euros par an.

Le régime de la micro-entreprise permettra également des progrès, mais il nous faut aller plus loin. Aussi le Gouvernement a-t-il demandé à deux députés, Mme Bulteau et M. Verdier, de formuler à échéance rapprochée des propositions pour faire évoluer ce régime afin de mieux répondre aux attentes des artisans.

(M. Alain Joyandet proteste.) Je sais, monsieur Joyandet, que vous n’avez pas, pour votre part, appelé à la désaffiliation, mais certains l’ont fait, profitant de la situation difficile que connaît une minorité d’artisans. C’est le plus mauvais des services à rendre à la sécurité sociale, en particulier au régime des artisans.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes

Permettez-moi de dire, en conclusion, que les difficultés rencontrées par des artisans ne sauraient en aucun cas légitimer les appels à la désaffiliation à la sécurité sociale lancés de manière inconsidérée et irresponsable par certains. La sécurité sociale est garante de la solidarité de tous. §

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Ma question s’adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.

« La Culture n’est pas un luxe, c’est une nécessité », disait le prix Nobel de littérature de 2000, Gao Xingjian.

Le Premier ministre vient d’affirmer haut et fort la sanctuarisation du budget de la culture jusqu’à la fin du quinquennat, qui était tant attendue par le monde de la culture, et l’attachement du Gouvernement à la culture.

Il s’agit là, il faut le souligner, d’un engagement tout à fait exceptionnel, d’un acte de confiance et de reconnaissance envers un secteur fragilisé en cette période difficile d’effort collectif pour redresser l’économie de notre pays. Le budget de la culture a pris sa part à cet effort, la baisse de ses crédits portant essentiellement sur les grands opérateurs de l’État, plutôt que sur la création, la production et la diffusion culturelle et l’éducation artistique.

Favoriser le développement de la création, des pratiques culturelles, lutter contre les inégalités, permettre à tous d’accéder à la culture est dans l’ADN de la gauche. L’article 27 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de l’UNESCO, qui érige les droits culturels en droits fondamentaux, ne dit d’ailleurs pas autre chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Je me réjouis donc de cette nouvelle étape, qui réaffirme la place essentielle de la culture dans notre société et l’importance de son apport au lien social et à l’économie de nos territoires.

Néanmoins, force est de constater que ce secteur a fait l’objet de coupes claires dans les derniers budgets des collectivités territoriales, alors que celles-ci en sont certes les principaux financeurs, mais aussi les principaux bénéficiaires.

C’est pourquoi je me félicite, madame la ministre, que vous ayez proposé la conclusion de « pactes » prévoyant le maintien des crédits de l’État destinés aux territoires pour les trois prochaines années, à condition que les collectivités territoriales acceptent, elles aussi, de stabiliser leurs financements du secteur culturel. Hier, à Matignon, plus d’une trentaine d’élus, de droite comme de gauche, qui tous croient en la culture, ont signé de tels pactes.

Madame la ministre, quels moyens allez-vous mettre en œuvre pour permettre la généralisation et la pérennisation de ces politiques culturelles conjointes de l’État et des collectivités, d’une part, et pour assurer une progression durable des moyens de votre ministère, d’autre part ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin

Madame la sénatrice, des choix courageux ont été faits en 2012 pour redresser nos comptes publics. Le budget de la culture a pris une part importante à cet effort, mais jamais les marqueurs auxquels nous sommes attachés n’ont été affectés : la création, la diffusion culturelle, l’éducation artistique et culturelle ont été protégées dans tous les budgets depuis 2012.

Pour autant, est-ce suffisant ? Bien sûr que non, et je comprends que le monde de la culture manifeste des signes d’impatience. Madame la sénatrice, nous ouvrons actuellement une page nouvelle du quinquennat en matière culturelle.

Ce n’est pas qu’une question budgétaire, un budget n’étant jamais qu’un moyen au service d’un projet, et un arbitrage budgétaire une décision prise sur la base de celui-ci ; c’est une offensive culturelle globale que je souhaite lancer.

Cette offensive culturelle consiste d’abord à signer dans toute la France des pactes culturels qui engagent l’État pour trois ans aux côtés des villes et des agglomérations faisant le choix de préserver leur budget de la culture. Ainsi, trente-cinq villes ont signé hier un tel pacte avec l’État, en présence du Premier ministre. Avant l’été, une soixantaine auront répondu à cet appel. Compte tenu de la réforme territoriale en cours, il faut amplifier et approfondir cette démarche partenariale.

Cette offensive culturelle exige ensuite d’écouter ce qui remonte des territoires, concernant par exemple les conservatoires de musique. J’ai ainsi décidé de réengager l’État auprès des conservatoires, pour en faire de véritables instruments de démocratisation. Il faut faire évoluer les pratiques pédagogiques, mettre l’accent sur les cours collectifs, faire entrer de nouvelles esthétiques dans les conservatoires, les ouvrir aux adultes.

Cette offensive culturelle consiste également à sécuriser et à pérenniser le statut des intermittents dans le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, porté par François Rebsamen. Sans les intermittents, il n’y aurait pas de singularité culturelle française, pas de culture au sens où nous l’entendons.

Cette offensive culturelle se concrétisera enfin par la présentation en conseil des ministres, dans le courant du mois de juin, d’un projet de loi ambitieux en faveur de la liberté de création, de l’architecture et du patrimoine. Ce texte, qui rappellera l’attachement de la nation à la création artistique, sera bâti sur le triptyque liberté, protection et partage.

Madame la sénatrice, vous avez cité Gao Xingjian ; c’est vrai, la culture n’est pas un luxe, elle est une nécessité. Les budgets de la culture seront en hausse en 2016 et en 2017. Ils soutiendront cette offensive culturelle à laquelle je vous invite à participer.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe UDI-UC, de la proposition de loi tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police, présentée par MM. Yves Pozzo di Borgo et plusieurs de ses collègues (proposition n° 391, texte de la commission n° 434, rapport n° 433)

Dans la discussion générale, la parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, auteur de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre assemblée représentant les collectivités territoriales, il nous incombe à nous, sénateurs, de les accompagner dans leur évolution et d’œuvrer pour moderniser leur gouvernance et leur bonne gestion.

C’est dans cet esprit que je vous propose de faire évoluer le statut de Paris, en étendant les pouvoirs de police du maire de Paris.

Cette proposition, cosignée par mes collègues Pierre Charon et Philippe Dominati, comme moi sénateurs de Paris, s’inscrit du reste dans la continuité d’un long processus de « normalisation » du statut de Paris, qui a commencé avec un premier texte en 1975, qui a induit l’élection d’un maire à Paris en 1977 et qui s’est poursuivi jusqu’en 2002, lorsque nous avons adopté, « petitement », l’élargissement des pouvoirs de police du maire de Paris à la police du stationnement et à la police de circulation.

C’est donc non une rupture radicale que je vous propose, mais la poursuite d’une modernisation, qui, il faut le dire, part de très loin.

En effet, si Paris est la seule municipalité en France dont le maire ne détient pas le pouvoir de police, c’est que l’Histoire a pu le justifier.

Oui, mes chers collègues, Paris est historiquement une des villes les plus denses du monde : en 1800, on comptait déjà 700 000 Parisiens répartis sur 3, 4 kilomètres carrés, ce qui représente une densité proche de celle que nous connaissons aujourd’hui, avec 2, 1 millions d’habitants sur 10 kilomètres carrés. Mais cette concentration humaine a souvent défié le pouvoir de l’État.

Louis XIV s’installa à Versailles pour fuir Paris, où menaçait la Fronde ! Un peu plus d’un siècle plus tard, la population parisienne, en pleine Révolution, ramenait la famille royale à Paris pour la juger. On peut penser que la défiance des Parisiens contre l’État a pu inciter Napoléon Bonaparte – il avait une certaine expérience à cet égard puisque, en 1795, il avait arrêté l’insurrection royaliste rue Saint-Honoré, devant l’église Saint-Roch, en faisant tirer au canon sur les partisans de la monarchie qui manifestaient, dont 300 furent tout de même tués : les moyens de l’époque avaient des effets beaucoup plus dévastateurs que les grenades lacrymogènes ! –, au lendemain de son coup d’État, à rattacher au pouvoir central les attributions de police générale qui dépendaient de la commune de Paris ; c’est le fameux arrêté du 12 messidor an VIII – c'est-à-dire le 1er juillet 1800 –, qui confie au préfet, représentant de l’État, les pouvoirs de police afin d’assurer le maintien de l’ordre public dans une capitale en proie aux soulèvements. C’est cet arrêté qui marque et structure encore aujourd’hui la police parisienne.

L’Histoire donna raison à Bonaparte. Lors de la révolution ouvrière de 1848, Ledru-Rollin disait des barricades qu’elles sont « la passion héréditaire de la population parisienne ».

Plus tard, pendant la Commune, en 1871, le chef du gouvernement, Adolphe Thiers, fit cette déclaration fracassante : « Paris sera soumis à la puissance de l’État, comme un hameau de cent habitants ! »

Paris l’insoumise, Paris qui défiait l’autorité de l’État devait être surveillée de près par la police nationale.

Une métropole aussi dense nécessitait par ailleurs une attention particulière en matière de lutte contre l’insalubrité : ce fut l’objet de la mission de police confiée en 1859 au préfet Hausmann.

Bref, en regardant l’histoire de Paris, on comprend que l’État ait voulu assurer l’ordre public et la salubrité à Paris, mater les révoltes, avec des moyens qu’il contrôle : une police nationale, sous l’autorité d’un préfet aux ordres du ministre de l’intérieur. D’ailleurs, jusqu’en 1975, Paris n’avait pas de maire, mais était gouvernée par un préfet. Et aujourd’hui encore, les pouvoirs de police du maire sont, à Paris, largement concentrés entre les mains du préfet, qui assiste à chaque conseil de Paris. Je le remercie d’ailleurs d’être présent aujourd'hui au Sénat.

La question que je pose avec mes collègues Pierre Charon et Philippe Dominati est la suivante : la confiscation des pouvoirs de police du maire de Paris par le préfet, héritée de Napoléon Bonaparte – un insulaire comme moi, à défaut d’être un modèle de démocratie ! – n’est-elle pas devenue obsolète ? Le temps des révolutions n’est plus, d’autres formes de contestation ayant désormais pris le relais, et si les réformes de 1975, de 1982 et de 2002 ont permis un élargissement progressif des pouvoirs de police du maire de Paris, ce dernier n’a toujours pas les moyens opérationnels d’exécuter ses propres décisions.

Un exemple : la maire de Paris peut bien décider de multiplier par trois le prix du stationnement, comme elle l’a fait récemment, les Parisiens savent que ni la verbalisation ni le recouvrement des contraventions ne sont une priorité pour la préfecture de police. Du coup, 85 % des Parisiens ne paient pas le stationnement, privant la ville d’une recette substantielle ! La loi peut bien confier au maire de Paris la responsabilité de fixer le montant des amendes, la Ville n’a pas les moyens humains d’en assurer le recouvrement !

En effet, les 1 848 agents de surveillance de Paris, les ASP, chargés d’assurer le respect de la police du stationnement – ce sont eux, chers collègues de province, qui mettent des contraventions –, comme les 4 127 agents administratifs de la Ville de Paris chargés de délivrer les licences de taxi et de gérer les formalités administratives sur les polices spéciales, ne sont pas placés sous l’autorité du maire, mais sous celle du préfet.

Or la Ville finance tout ce personnel : chaque année, 300 millions d’euros prélevés sur le budget de la Ville servent à financer ces 5 975 agents aux ordres du seul préfet !

Mes chers collègues, la mairie de Paris finance 41, 8 % du budget total d’une police qu’elle ne contrôle pas ! Qui d’entre vous accepterait une telle situation ?

La maire actuelle, Mme Anne Hidalgo, parle de « coproduction » entre la mairie et la préfecture de police. Voilà un concept surprenant : vous payez, et vous n’avez aucune autorité sur les gens que vous payez.

Quel est le maire de France, le président de conseil général – le Conseil de Paris est aussi conseil général – ou le président de région qui accepterait une telle situation ?

Et c’est sans compter que, en plus de ces 300 millions d’euros versés à la préfecture, la Ville finance déjà ses propres agents municipaux : 650 inspecteurs de sécurité, 900 agents d’accueil et de surveillance et 96 inspecteurs de salubrité, qui forment un embryon de police municipale fort de 1 646 agents. Pour créer une police municipale à Paris, il suffirait d’intégrer à cette équipe d’agents municipaux les 1 848 agents de surveillance de Paris. On aurait ainsi, sans que l’État ait à débourser le moindre centime, un effectif total de 3 494 agents, ce qui n’est pas négligeable ! Et cela peut se faire à budget constant puisque la mairie assure déjà le financement de ces agents.

Vous l’aurez compris, le statut actuel n’est pas cohérent en termes d’organisation, et il ne l’est pas non plus en termes d’efficacité !

Il n’est pas en phase avec l’évolution des usages et des mentalités.

En outre, cette dilution des responsabilités en matière de police pose un vrai problème en termes politiques. Nous avons voté il y a trois mois, au Conseil de Paris, un contrat parisien de prévention et de sécurité pour la période 2015-2020 : voilà 160 pages d’objectifs qui, comme ceux du précédent plan quinquennal, ne seront pas atteints. Pourquoi ? Parce que la maire de Paris n’est pas responsable devant les électeurs de l’exercice du pouvoir de police !

Quand on l’interroge sur les résultats, elle répond : « Ce n’est pas à moi, mais au préfet de rendre des comptes ! » Et le préfet n’a que faire de l’atteinte de ces objectifs, car lui n’est pas responsable politiquement ! Quant aux vingt maires d’arrondissement, qui recueillent quotidiennement les inquiétudes et les plaintes de leurs administrés, ils ne peuvent rien faire non plus ! Heureusement, les bonnes relations qu’entretient le préfet de police avec les commissaires de quartier permettent de régler quelques problèmes…

Ce petit jeu où personne n’est responsable a, au fond, toujours arrangé les maires de Paris, de droite comme de gauche, car la sécurité est un piège électoral pour le maire en place, surtout dans la capitale.

Par ailleurs, les ministres de l’intérieur successifs ont naturellement préféré conserver un pouvoir étendu sur la capitale. Voilà pourquoi les différentes propositions de réforme des pouvoirs de police du maire de Paris sont toujours restées lettres mortes : je pense aux propositions de loi de Pierre-Christian Taittinger et Dominique Pado en 1986, de Raymond Bourgine en 1990, de Laurent Dominati, Gilbert Gantier et Claude Goasguen en 1999, et à la mienne en 2012.

La chance souriant aux audacieux, la présente proposition sera peut-être la bonne ! Aujourd’hui, alors que la maire de Paris et le ministre de l’intérieur sont de la même couleur politique, j’espère que le Gouvernement profitera de notre initiative sénatoriale pour amorcer un dialogue avec la mairie de Paris, afin de réformer le statut archaïque de Paris en matière de police municipale.

Hélas, j’en doute, car il semble que le Gouvernement ne fasse pas franchement confiance à la capacité d’action de la maire de Paris. C’est du moins ce qu’a laissé entendre le Gouvernement lorsqu’il a émis un avis défavorable sur un amendement de mon collègue Olivier Cadic au projet de loi Macron prévoyant que le Conseil de Paris détermine le nombre de « dimanches du maire » pour l’ouverture des commerces le dimanche.

M. Macron a invoqué le fait que la dérogation au repos dominical relevait de « l’ordre public », dont le préfet de police est le gardien, pour priver la maire de Paris, seul maire de France dans ce cas, d’un pouvoir de décision sur ce point. En réalité, l’État est réticent à confier à la maire de Paris des décisions aussi importantes en matière d’ouverture de commerce comme il l’est en matière de police. On peut s’interroger sur les relations qui existent entre le Gouvernement et la maire de Paris, pourtant du même bord !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. Roger Karoutchi. Ça, ça ne veut rien dire…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Et pourtant, mes chers collègues, quelle que soit la compétence de la maire, l’absence totale de pouvoir de police de la municipalité parisienne en matière de sécurité est déstabilisante pour Paris ! Au-delà du stationnement, le climat d’insécurité à Paris est bien présent. Les incivilités quotidiennes sont devenues banales, les détritus laissés sur les trottoirs font partie du paysage parisien, une certaine mendicité qui pourrait être délictueuse a littéralement explosé.

Paris a besoin d’une police de proximité qui puisse accompagner les sans-abris et les Roms dans les structures d’accueil d’urgence, les toxicomanes dans les centres d’accueil, et œuvrer à la réduction des phénomènes de dépendance dans les quartiers.

À l’inverse, en l’absence d’une police de proximité, les vendeurs à la sauvette se sont installés dans de nombreux quartiers – Tour Eiffel, Château Rouge, Barbès, La Chapelle – et ne sont que partiellement combattus, car la police nationale, malgré toutes ses qualités et la bonne volonté de ses agents, est débordée par le quotidien de ses missions nationales.

M. Roger Karoutchi manifeste son approbation.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

C’est la raison pour laquelle nous proposons de renforcer les compétences et les responsabilités du maire de Paris, en alignant le régime de police de la capitale sur celui des communes à police d’État.

Il est indispensable, aujourd’hui, de lui permettre d’assurer, outre la salubrité publique et la résolution des troubles de voisinage, le bon ordre, la sûreté et la sécurité publique. En retrouvant une autorité sur les 1 848 agents de surveillance de Paris qu’elle paie déjà, auxquels on peut ajouter ses 1 646 agents municipaux, la maire de Paris pourra choisir d’affecter ces quelque 3 500 agents au contrôle du stationnement, à la lutte contre les incivilités ou encore aux nuisances sur la voie publique, en fonction des contingences : lutte contre le vol près des grands magasins à Noël, gestion des relations entre les noctambules des parcs et terrasses et les riverains l’été, sécurité à la sortie des écoles, assistance aux sans-abris l’hiver, etc.

Cela permettra à la préfecture de police, dont je salue au passage l’excellence – c’est peut-être même l’une des meilleures du monde ! – de se concentrer sur ses missions régaliennes de police judiciaire. À l’heure où les formes de criminalité se complexifient – terrorisme, cambriolages, problèmes de cybersécurité, délits et crimes – et où le plan Vigipirate nécessite une mobilisation continue des effectifs, elle doit effectivement concentrer ses forces sur des missions de sécurité nationale qu’elle seule peut assumer.

Je ne comprends pas que le Gouvernement et le ministre de l’intérieur hésitent à transférer à une police municipale des missions qui hypothèquent ces missions nationales.

Bien entendu, aux termes de notre proposition de loi, la police nationale reste compétente pour assurer la protection et la surveillance des institutions nationales et internationales présentes à Paris, qui est tout de même la capitale de la France, et des quelque 7 000 manifestations de rue qui se déroulent sur son territoire chaque année. Ce sont des missions qui n’ont pas d’équivalent dans les autres villes françaises et qui doivent continuer à relever de la police nationale, non de la police municipale. C’est en effet la police nationale qui possède les compétences et les qualités requises.

De même, la préfecture de police doit conserver les pouvoirs de police spéciale. C’est là une contribution majeure de notre rapporteur Alain Marc, un Aveyronnais – il y a, à Paris beaucoup d’Aveyronnais, et ils seront à la fois fiers et satisfaits du travail qu’il a accompli –, que je remercie très chaleureusement.

Ce ne sont donc pas tous les pouvoirs de police que je propose de transférer au maire de Paris. Pour que cette réforme soit réalisable dans de bonnes conditions, je soutiens l’initiative du rapporteur de circonscrire sa portée au pouvoir de police générale et à la police spéciale du stationnement et de la circulation. Il me semble en effet nécessaire de consolider le transfert du pouvoir de police générale avant de transférer progressivement la cinquantaine de polices spéciales aujourd’hui gérées par la préfecture de police, comme la police des édifices menaçant ruine, le secours et la défense contre l’incendie ou encore la police funéraire.

Je pense aussi que, à terme, il faudra que le maire de Paris puisse déléguer aux maires d’arrondissement la gestion des effectifs de la police municipale, car ce sont les maires d’arrondissement qui connaissent le mieux les problématiques spécifiques à leurs quartiers. Cependant, allons-y progressivement, en consolidant chaque étape de cette grande réforme pour Paris.

Je ne serai pas plus long, mes chers collègues, car je pense que vous aurez aisément compris que la création d’une police municipale à Paris constitue une réponse évidente au statut archaïque de Paris en matière de police et une avancée sans précédent dans la modernisation de l’administration de notre capitale.

Faisons mentir Adolphe Thiers : Paris n’est pas « un hameau de cent habitants » !

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de MM. Pozzo di Borgo, Charon et Dominati, qui vise à transférer au maire de Paris certaines compétences de police administrative aujourd’hui détenues par le préfet de police, soulève une question qui n’est pas récente. En effet, le 11 mai 1990, le Sénat adoptait en première lecture une proposition de loi comparable de Raymond Bourgine, mais ce texte n’a jamais été inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

L’objectif de la présente proposition de loi n’est pas de remettre en cause la qualité du travail du préfet de police, que nous avons auditionné et dont je salue l’action en faveur de la sécurité des Parisiens ; il est d’aligner la répartition des pouvoirs de police à Paris sur le droit commun afin d’accroître les prérogatives et les responsabilités du maire de la capitale.

Je veux tout d’abord rappeler les spécificités de la police administrative à Paris.

À la différence de ce qui se passe dans les autres communes de France, c’est le préfet de police et non le maire qui détient le pouvoir de police générale. Le préfet de police est ainsi responsable du bon ordre, de la sûreté et de la sécurité publique. Il exerce également plus de cinquante polices spéciales en lieu et place du maire – la police des animaux dangereux et errants, par exemple – ou du préfet de département – l’admission en soins de personnes souffrant de troubles mentaux, par exemple. À Paris, le préfet de police cumule donc les pouvoirs d’un préfet de département et d’un maire.

Ce régime de police dérogatoire remonte à la création de la lieutenance de police, en 1667, et a été renforcé sous Napoléon Bonaparte par l’arrêté du 12 messidor an VIII. Certes, les compétences de police du maire de Paris ont été renforcées depuis plusieurs décennies : il est désormais responsable de la salubrité publique, du bon ordre dans les foires, des troubles de voisinage et d’une grande partie de la police de la circulation et du stationnement. Toutefois, ces compétences demeurent restreintes au regard de celles du préfet de police.

Le régime dérogatoire de police appliqué à Paris présente aujourd’hui deux types de limites, qui ont motivé le dépôt de cette proposition de loi : des limites institutionnelles, d’une part, et des limites opérationnelles, d’autre part.

D’un point de vue institutionnel, la police administrative est exercée à Paris par un préfet de police nommé par le Président de la République, et non, comme sur le reste du territoire, par une personne élue au suffrage universel. Il existe donc un paradoxe singulier à l’heure de la décentralisation : alors que des lois successives ont renforcé les attributions du maire de Paris pour aligner ses prérogatives sur celles du droit commun, les pouvoirs de police continuent de lui échapper. Cela pose une vraie question de responsabilité politique : comme l’a souligné Yves Pozzo di Borgo, le maire n’est pas responsable devant ses électeurs de l’exercice du pouvoir de police.

D’un point de vue opérationnel, le dispositif de police administrative mis en œuvre à Paris semble perfectible. La préfecture de police gère en effet des tâches de police municipale alors qu’elle a vocation à se concentrer sur des missions régaliennes de sécurité. Ce sont, par exemple, des policiers nationaux qui assurent le « barriérage » des routes lors du marathon de Paris ou fournissent un soutien aux personnes sans abri.

De même, c’est la préfecture de police qui contrôle le respect des règles de circulation et de stationnement par l’intermédiaire des agents de surveillance de Paris- ce qu’on appelait autrefois les « pervenches ». Or ce système ne semble pas satisfaisant en pratique : environ 85 % des Parisiens ne paient pas leur stationnement, car ils savent qu’ils n’ont que peu de risques de devoir régler une amende.

Pour expliquer ce dysfonctionnement, l’une des hypothèses est que le contrôle de la circulation et du stationnement ne fait pas partie des priorités opérationnelles de la préfecture de police, ce qui semble logique au vu de l’étendue de ses compétences, parmi lesquelles la priorité est donnée aux missions régaliennes. En outre, la préfecture de police n’a aucune incitation financière à agir, à la différence de la Ville de Paris, qui perçoit une partie des recettes des procès-verbaux et pourra, à partir de 2016, fixer le montant de la redevance appelée à les remplacer dans le cadre de la dépénalisation du stationnement payant.

La dernière difficulté opérationnelle concerne la complexité du dispositif mis en œuvre pour prévenir et réprimer les petites incivilités à Paris. Outre les ASP et les policiers nationaux gérés par la préfecture de police, la mairie a recours à ses propres personnels de sécurité : les inspecteurs de sécurité et les agents d’accueil et de surveillance.

Il est difficile pour les Parisiens de comprendre les rôles et les responsabilités de chacun, d’autant que les différentes forces ne collaborent pas suffisamment : elles patrouillent sur des sites identiques mais ne coordonnent pas leurs actions et n’échangent que rarement des informations.

Face aux limites du système actuel, les auteurs de la proposition de loi souhaitent que le pouvoir de police générale soit transféré du préfet de police au maire. Ce dernier serait désormais compétent pour le bon ordre, la sûreté et la sécurité publique. Il disposerait ainsi d’un levier d’action supplémentaire pour traiter des problématiques intéressant le quotidien de ses administrés et devrait répondre de sa politique devant ses électeurs. Le maire de Paris pourrait, par exemple, interdire la consommation d’alcool sur la voie publique ou encore des spectacles causant un trouble à l’ordre public, alors qu’il ne peut pas le faire aujourd’hui. Les policiers nationaux exécuteraient directement les arrêtés du maire au titre de l’article L. 2214-3 du code des collectivités territoriales.

Pour assumer ses nouvelles compétences, le maire de Paris retrouverait sous son autorité les ASP, qui sont aujourd’hui mis à disposition de la préfecture de police, mais rémunérés par la mairie. Un vieil adage dit que qui paie commande ; or, en l’occurrence, ce n’est pas le cas ! Le maire de Paris pourrait confier aux ASP une mission identique à celle qu’ils exercent aujourd’hui – le contrôle du stationnement – ou profiter de la dépénalisation du stationnement payant pour confier cette mission à un prestataire extérieur et réorienter l’action des ASP vers la prévention et la répression des petites incivilités ; leur statut le permet déjà, mais, dans les faits, ces missions leur échappent actuellement.

La proposition de loi prévoit enfin une réforme en profondeur de la préfecture de police. Elle continuerait à assurer la coordination des forces de police nationale, mais ses compétences seraient réduites par rapport au droit en vigueur pour devenir comparables à celles des préfectures dans les villes à police étatisée. La préfecture de police pourrait ainsi se concentrer sur des tâches à caractère régalien, comme la protection des institutions de la République.

La commission des lois a souscrit à l’objectif du présent texte, car il lui a semblé nécessaire de renforcer les pouvoirs de police et donc les responsabilités du maire de Paris. Il s’agit de poursuivre la démarche entamée depuis 1975, afin d’aligner le droit applicable à Paris sur celui qui s’applique aux autres communes de France.

La commission a toutefois souhaité circonscrire précisément le champ de la proposition de loi à la police générale et à la police spéciale du stationnement et de la circulation, alors que sa rédaction initiale ouvrait la voie au transfert de certaines polices spéciales du code général des collectivités territoriales, comme la police des funérailles. La commission a en effet jugé préférable d’adopter une démarche progressive, consistant à confier d’abord, par cette proposition de loi, un pouvoir de police générale au maire, avant d’envisager, dans un second temps, un transfert de polices spéciales.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission vous invite à adopter le texte dans la rédaction qui vous est soumise.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat est saisi d’une proposition de loi tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police. Ce n’est pas tout à fait une surprise puisque cette question avait été abordée lors de la discussion du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, devenu la loi MAPTAM.

La proposition de loi a pour objectif d’accroître les pouvoirs de police du maire de Paris. Après avoir beaucoup discuté de cette question difficile avec le ministre de l’intérieur, je crains que la réponse que lui et moi nous sommes accordés à y apporter ne déçoive quelque peu les auteurs de la proposition de loi, ainsi que la commission.

La proposition de loi concède au préfet de police des pouvoirs assez résiduels en matière de circulation et de stationnement, pour lui permettre d’assurer la protection des institutions de la République et des représentations diplomatiques : c’était bien le moins !

Étant donné le bouleversement que vous proposez, vous comprendrez que le Gouvernement ait examiné le texte longuement et précisément, en prêtant une attention aiguë à chacune de ses dispositions.

Quel est l’état du droit ? Comme cela a été rappelé, depuis 1667, l’autorité de police exerce à Paris un bloc de compétences unifié en matière d’ordre public et de sécurité, concentrant et les compétences de l’État et celle de la police municipale. Cet héritage de l’Ancien régime a été confirmé par la loi du 28 pluviôse an VIII et par l’arrêté du 12 messidor an VIII, qui, dans un souci d’efficacité, a confié à une autorité unique l’intégralité des pouvoirs de police dans la capitale.

Depuis lors, plusieurs lois ont étendu la compétence du maire de Paris : la loi du 29 septembre 1986; la loi du 27 février 2002 et la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, notamment.

Avec cette proposition de loi, vous souhaitez aller beaucoup plus loin, en franchissant une marche considérable puisque le maire de Paris deviendrait le détenteur de droit commun des pouvoirs de police générale, tandis que le préfet de police n’exercerait plus qu’une compétence liée à la lutte contre les atteintes à la tranquillité publique et au respect du bon ordre à l’occasion des grands rassemblements.

Cela provoquerait un grand bouleversement, y compris pour les forces de police étatisées, qui seraient placées sous l’autorité du maire puisqu’elles devraient exécuter des arrêtés pris par lui – rien que cela !

Si j’en crois l’exposé des motifs, la question est de savoir si l’héritage ancien de la police parisienne est conforme à notre droit, s’il se justifie au titre de l’organisation administrative et s’il peut être comparé à ce qui existe dans les capitales de semblable importance.

J’avoue être assez dubitative. Contrairement à ce que vous avancez, le bloc de compétences dont dispose le préfet de police n’est pas attentatoire au principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales. C’est le sens de la décision du Conseil constitutionnel du 9 juillet 1970. En outre, dans sa décision Guyot du 10 octobre 2013, le Conseil d’État a estimé qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution des pouvoirs étendus en matière de circulation dont dispose le préfet de police. Il n’y a donc aucun problème juridique ; je pense que tout le monde finira par s’accorder sur ce point.

Vous insistez ensuite sur la singularité qui caractériserait la France. C’est oublier que bien d’autres pays connaissent une situation similaire. Je pense notamment aux États-Unis, dont la capitale, Washington, ne constitue pas un État de l’Union, mais un district fédéral, au sein duquel le pouvoir fédéral exerce des pouvoirs de police en lieu et place du maire. Il en est de même au Royaume-Uni : à Londres, les missions de la Metropolitan police sont très similaires à celles de la préfecture de police, et le responsable est nommé par le pouvoir central.

En aucun cas la France n’est donc isolée dans sa conception de la sécurité au sein de sa capitale.

Votre proposition de loi a aussi, certainement en toute bonne foi, un objet caché : pointer la responsabilité de la maire de Paris. Je veux m’inscrire en faux contre une telle démarche. Vous ne pouvez pas imaginer, ne serait-ce qu’un instant, que la maire de Paris et le préfet de police, lui-même placé sous l’autorité directe du ministre de l’intérieur, ne soient pas en permanence en relation, déterminés à assurer la sécurité des Parisiennes et des Parisiens.

La maire de Paris est parfaitement au fait des enjeux de sécurité à Paris. Elle interpelle le Gouvernement aussi souvent que nécessaire, lorsqu’il s’agit de défendre la sécurité de ses administrés. Du reste, le 21 avril dernier, le ministre de l’intérieur et la maire de Paris ont, ensemble, à la suite d’une décision concertée, pu inaugurer un commissariat de police à la gare du Nord, ce qui démontre la parfaite entente entre l’État et la Ville de Paris dans la défense de la sécurité des Français, et la capacité qui en résulte à prendre des initiatives fortes ; celle-ci en est une, à l’évidence.

Cette entente s’est également manifestée au moment des attentats des 7, 8 et 9 janvier dernier, avec la mise en œuvre du plan Vigipirate dans la capitale. Vous le savez bien, le ministre de l’intérieur, le préfet de police et la maire de Paris échangent régulièrement sur ces questions.

J’en arrive à la principale difficulté que soulève votre proposition de loi.

Dans votre exposé des motifs, vous évoquez des enjeux de visibilité, de responsabilité politique, d’organisation administrative du territoire, mais vous n’évoquez jamais, à bien y regarder, les enjeux de sécurité stricto sensu.

Si elle était adoptée, votre proposition de loi aurait pour effet de désorganiser profondément la préfecture de police et, partant, les forces de police, qui font un travail remarquable dans la capitale. C’est très exactement l’inverse de ce que recherche le Gouvernement, qui souhaite, au contraire, renforcer autant que possible la cohésion, l’intégration, l’échange d’informations et la coopération entre les différentes directions de la police, y compris à Paris.

La préfecture de police est un bloc. Elle tire son efficacité et sa réactivité de l’intégration des missions qui lui sont confiées, en matière de sécurité publique, d’ordre public et de polices administratives, concourant à la sécurité comme à la sûreté. Elle tire cette même efficacité d’une chaîne hiérarchique unique, qui permet de faire face aux défis d’une ville pas tout à fait comme les autres : Paris appartient, certes, aux Parisiens, mais elle appartient aussi à la communauté nationale ; elle accueille des millions de touristes étrangers ; elle est le siège de représentations diplomatiques nombreuses, d’institutions internationales ; elle concentre des points d’intérêts vitaux pour la Nation et pour le rayonnement de la France.

La gestion de sa sécurité, hautement sensible – vous en convenez –, appelle donc une organisation particulière qui, dans l’histoire contemporaine, a donné toutes les preuves de sa pertinence. Compromettre cet édifice d’une efficacité éprouvée serait, sans aucun doute, une erreur, peut-être même une faute.

Face aux défis nouveaux auxquels nous sommes désormais malheureusement confrontés – je pense naturellement à la lutte contre le terrorisme –, il me semble en effet inopportun de fragiliser cette organisation, qui, dans le cadre de la police d’agglomération, intègre depuis 2009 les départements de la petite couronne pour mieux prendre en compte la mobilité de la délinquance, comme le caractère diffus de la menace terroriste. À cet égard, il faut savoir que les départements qui sont un peu au-delà demandent parfois à intégrer ce système.

J’observe enfin que la proposition de loi, qui tend à banaliser l’organisation des pouvoirs de police à Paris, se garde bien de toucher, sans doute parce qu’elle ne le peut pas, à l’exception que constitue l’organisation du service public de secours et de lutte contre les incendies, lui aussi placé sous l’autorité du préfet de police. La logique d’alignement sur le droit commun qui inspire les auteurs de la proposition de loi n’est donc pas poussée à son terme sur le sujet primordial de la sécurité civile, ce qui ne laisse pas d’interroger.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, messieurs les auteurs de la proposition de loi, mesdames, messieurs les sénateurs, toutes les organisations gagnent à se moderniser, c’est vrai, à se réformer, sans doute, à renforcer leur efficience, c’est évident. La préfecture de police n’échappe pas à cette dynamique, elle n’est pas confinée dans l’immobilisme. Elle a mis et met en œuvre des réformes de structures importantes, sur le plan administratif comme en matière opérationnelle. Elle entretient avec la mairie de Paris et les élus parisiens une relation permanente, dense et confiante.

Selon nous, le présent texte remet en cause les fondamentaux de son organisation et remettra en cause, par là même, la solidité et la cohérence de l’édifice, parfaitement adaptée aux exigences particulières de la sécurité de notre capitale, qui intéresse les Parisiens et tous ceux qui passent par Paris, ne serait-ce que pour un court séjour.

C’est pourquoi, monsieur Pozzo di Borgo, je vous demande de retirer votre proposition de loi. Cependant, je tiens à vous dire que tout texte, même avec un avis aussi défavorable du Gouvernement, fait avancer les sujets. Sans doute, sur tel ou tel point, faut-il continuer à travailler, mais vous devez savoir que le ministre de l’intérieur et le préfet de police sont aussi soucieux de poursuivre ce travail. Néanmoins, à nos yeux, ce n’est pas cette option qui nous permettra d’être plus efficaces. Je crois que nos efforts en la matière ont été démontrés, même si, aujourd’hui, j’appelle chacun, en responsabilité, à faire preuve de beaucoup de vigilance.

Quoi qu'il en soit, je remercie les uns et les autres de nous avoir donné l’occasion de débattre de cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, en qualité de sénatrice de Paris, c’est avec une attention toute particulière que j’ai examiné ce texte puisqu’il concerne le territoire dont je suis l’élue.

Le groupe écologiste accueille favorablement cette proposition de loi, qui, au moment où la sécurité figure parmi les préoccupations premières des Parisiens, concourra à renforcer le nécessaire lien démocratique en la matière.

En plus de la salubrité publique et des troubles de voisinage, pour lesquels il est déjà compétent, le maire de Paris serait aussi chargé du bon ordre, de la sûreté et de la sécurité publique, ce qui constituerait un net rapprochement en direction du droit commun en la matière. Lui confier ces compétences le rendra alors -ci comptable devant les électeurs d’un bilan intégrant les différents leviers d’action.

Du point de vue démocratique, ce rapprochement vers le droit commun est préférable à la situation actuelle, où une grande partie de ces pouvoirs est exercée par le préfet de police, nommé par le Gouvernement, et qui est donc responsable devant lui seulement.

Il s’agit également d’une exigence démocratique au regard de la gestion des moyens, puisque la Ville de Paris participe au budget de la préfecture de police sans pouvoir, par définition, prendre de mesures dans ce domaine.

De plus, au regard de l’exigence du bon emploi des deniers publics, la situation actuelle est insatisfaisante, car source de difficultés et d’incohérences opérationnelles. Ainsi, la préfecture de police gère des tâches qui peuvent difficilement être considérées comme régaliennes, tel le « barriérage » des voies à l’occasion du marathon de Paris.

De même, les agents de surveillance de Paris, chargés de contrôler le stationnement et la surveillance, sont rémunérés par la mairie de Paris, mais celle-ci ne les contrôle pas. Placer ces agents sous l’autorité du maire de Paris serait donc une avancée logique.

Par ailleurs, ce régime dérogatoire au droit commun est source de complexité pour les électeurs, qui peinent à identifier qui fait quoi. Une telle dilution des responsabilités nuit sans conteste à la vivacité du lien démocratique.

Ce régime est d’autant plus daté que les pouvoirs de police du maire de Paris tendent à s’accroître depuis 1975. En effet, le maire de Paris s’est successivement vu confier : la salubrité sur la voie publique, le maintien du bon ordre dans les foires et marchés ainsi que la délivrance des permis de stationnement et des concessions d’emplacement sur la voie publique, en 1986 ; la police des troubles de voisinage, en 2002 ; une compétence générale en termes de circulation et de stationnement, depuis 2002.

À l’heure de la décentralisation, processus qui se caractérise par l’exigence de proximité dans la décision et de vitalité de la démocratie locale, il semble en effet anachronique et paradoxal de conserver un dispositif hérité du Consulat.

Pour ces différentes raisons, il convenait de changer le régime en place. L’exemple de la ville de Bruxelles montre bien qu’une gestion par les instances locales est parfaitement envisageable.

Pour autant, nous sommes conscients des spécificités parisiennes et reconnaissons que celles-ci peuvent justifier des adaptations et des dérogations au droit commun. Ainsi, l’examen du texte en commission a limité ce transfert aux pouvoirs de police générale et de la police spéciale du stationnement et de la circulation.

Les pouvoirs du préfet de police seront ainsi davantage circonscrits à ce qui est nécessaire, compte tenu de la spécificité du cadre parisien. Le préfet de police garderait par exemple des prérogatives importantes en matière de contrôle de la circulation et du stationnement pour la protection des institutions de la République et des représentations diplomatiques. Parallèlement, comme dans les communes à police étatisée, le préfet de police resterait compétent « quand il se fait occasionnellement de grands rassemblements d’hommes ».

En outre, comme c’est le cas dans le droit commun concernant les prérogatives du préfet, ce dernier conservera aussi un pouvoir de substitution en cas de carence du maire, ainsi que ses attributions en matière de contrôle de la légalité des actes municipaux.

La proposition de loi que nous examinons est ainsi un texte équilibré, s’inscrivant dans une démarche progressive, puisqu’elle contribue à renforcer le lien démocratique sur une question capitale dans la vie des Parisiens, sans pour autant préempter l’avenir.

En conséquence, le groupe écologiste votera cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP, ainsi qu’au banc de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en vertu de l’idée selon laquelle les pouvoirs de police du préfet de police de Paris seraient archaïques, cette proposition de loi, portée par une partie de la droite parisienne, vise en fait principalement à imposer une police municipale à Paris, contre l’avis de la majorité municipale.

Que la commission des lois en ait atténué la portée, en limitant son périmètre au transfert vers le maire de Paris de la police générale et de la police spéciale du stationnement et de la circulation, ne change rien à l’affaire. Nous le savons, une partie de la droite parisienne caresse le projet d’une police municipale à Paris depuis très longtemps. En 1990, déjà, elle avait fait adopter un texte comparable au Sénat, qui s’était heurté à l’opposition du gouvernement socialiste et ne fut donc pas discuté à l’Assemblée nationale.

Ce rappel historique étant fait, voyons maintenant dans quel contexte cette proposition de loi s’inscrit aujourd’hui.

En vérité, l’argumentaire n’est pas plus convaincant aujourd’hui qu’il ne l’était voilà vingt-cinq ans ! Ceux qui nous expliquent à quel point le statut de préfet de police est archaïque et inefficient sont les premiers responsables de la disparition de 1 500 postes de policier, rien qu’à Paris, sous la présidence Sarkozy. En fait, ils veulent que Paris prenne en charge aujourd’hui un ersatz de police de proximité, laquelle a été détruite par Nicolas Sarkozy sur tout le territoire national, et à Paris en particulier.

Notre collègue Yves Pozzo di Borgo se demandait tout à l’heure quel maire ou président de département accepterait de payer pour des personnels qui ne seraient pas placés sous sa responsabilité. Mais cette situation existe déjà : en matière de sécurité incendie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

… c’est la brigade des sapeurs-pompiers de Paris qui protège Paris et les trois départements de la petite couronne, à la satisfaction de tous les élus, avec des personnels payés par les départements.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Je ne souhaite surtout pas qu’on change quoi que ce soit à dispositif, qui nous convient parfaitement !

Pour notre part, nous sommes dans une logique complètement différente. Selon nous, en effet, il est urgent de rétablir les moyens d’une véritable police de proximité et des commissariats au cœur des quartiers, avec des policiers bien formés, bien encadrés, disposant de bonnes conditions de travail.

Le texte que nous examinons aujourd’hui va à l’encontre de cet objectif et donnerait un extraordinaire coup d’accélérateur au développement des polices municipales, dont chacun ici connaît l’efficacité limitée et le coût exorbitant pour les contribuables. Il faudrait, bien au contraire, renationaliser les polices municipales tout en harmonisant les statuts, les formations et les salaires, à partir de ce qu’ils sont au niveau de l’État.

Si ce texte entrait en vigueur, il pénaliserait également financièrement les citoyens puisqu’ils seraient taxés deux fois, d’abord par l’impôt sur le revenu, ensuite par l’impôt local, pour financer une même mission, la sécurité, qui doit, selon nous, demeurer une mission régalienne de l’État.

Je note d’ailleurs avec satisfaction que la majorité de gauche du Conseil de Paris et la maire de Paris, saisies en mars dernier par la droite de l’idée contenue dans cette proposition de loi, l’ont rejetée. C’était d’ailleurs logique, puisqu’elles ont été élues sur un programme qui ne proposait pas de créer une police municipale. À cette occasion, le groupe communiste du Conseil de Paris s’est prononcé pour la mise en place d’une véritable police de proximité et pour le retour à un système de police unique, avec des effectifs centrés sur l’échelon local.

Par ailleurs, le développement de Paris dans tous les domaines n’impose-t-il pas ce régime spécifique, adapté aux missions et aux objectifs de cette ville, qui est la capitale de notre pays, mais qui accueille aussi le siège de très nombreuses institutions internationales ? Paris est une capitale mondiale et n’appartient pas seulement aux Parisiens. Les terribles événements du début d’année sont là pour nous rappeler sa situation très particulière. Il faut également rappeler que Paris est le théâtre de plus de 7 000 manifestations par an.

Tous ces arguments ne signifient pas que nous souhaitions en rester au statu quo. La coordination des différents services de sécurité de la Ville de Paris avec la police nationale peut sans doute être améliorée. Un renforcement de cette coopération avec Paris et les autres territoires concernés est sans doute souhaitable, mais le rôle des collectivités locales en matière de tranquillité publique est avant un rôle de médiation et de prévention.

La présente proposition de loi va à l’encontre de cette logique. C’est la raison pour laquelle nous nous y opposerons.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – M. Roger Madec applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le sujet qui nous occupe aujourd’hui comporte une dimension éminemment historique. De la Révolution française aux journées de 1848, en passant par la sanglante Commune, qui a décimé la classe ouvrière, Paris, « ville laborieuse, ville dangereuse », a fait l’objet d’un régime de police spécifique, du fait de la centralisation, mais surtout de sa turbulence bien connue. L’exception parisienne a donc plus de deux siècles.

Renouant avec une vieille tradition monarchique, Napoléon Ier avait administré directement la capitale sans laisser aucune autorité politique ou administrative y jouer un rôle important. Celui du ministre de l’intérieur était contrebalancé par celui du ministre de la police, et l’influence du préfet de la Seine par celle du préfet de police. Ce système perdure depuis deux siècles. C’est le signe que les pouvoirs qui se sont succédé en France se sont bien trouvés de ce régime d’exception.

Entre la loi de 1794 et celle du 31 décembre 1975, Paris n’a plus eu de maire, à deux exceptions près : durant six mois sous la Révolution de 1848 et durant près d’un an, de la proclamation de la Troisième République jusqu’à deux mois après la fin de la Commune de Paris, en 1871. Il a fallu attendre les premières élections municipales en 1977, pour que les Parisiens élisent à nouveau un maire, et encore celui-ci n’a-t-il pas récupéré l’ensemble des prérogatives administratives de droit commun. L’exception parisienne a fait long feu.

Les auteurs de la présente proposition de loi nous invitent ainsi à libérer Paris d’un régime de police dérogatoire.

La commission des lois et son rapporteur ont fait un véritable travail d’orfèvre en choisissant de limiter le transfert des pouvoirs de police à la police générale, qui comprend la police des funérailles et des cimetières, et à la police spéciale du stationnement et de la circulation. Cette décision apparaît sage, au vu des grandes spécificités de la capitale.

Actuellement, à Paris, la police du stationnement et de la circulation est une compétence partagée entre le maire de Paris – la maire, aujourd'hui – et le préfet de police. Aussi celui-ci exerce-t-il une compétence d’attribution sur certaines voies de la capitale, telles que le boulevard périphérique, les voies sur berges, les quais de la Seine ou encore les axes structurants. Ce pouvoir serait transféré au maire, sans que cela pose de difficulté insurmontable. Il en va de même pour la police des funérailles et des cimetières.

Signe de l’actualité du débat sur la police municipale et ses évolutions, le Sénat avait débattu l’an dernier d’une proposition de loi relative à la police municipale. Déposé par François Pillet et René Vandierendonck, à la suite de leur rapport sur l’évolution des services de police municipale publié en septembre 2012, le texte tendait à fusionner dans un même cadre d’emplois les agents de police municipale et les gardes champêtres pour créer une police territoriale. Nous aurions pu faire d’une pierre deux coups en y intégrant les dispositions les plus consensuelles de la présente proposition de loi !

Madame la ministre, mes chers collègues, j’apporterai, à titre personnel, mon soutien à ce texte, tandis que la majorité des membres du RDSE votera contre.

Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l’UDI-UC. – MM. Philippe Dominati et Pierre Charon applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de David Rachline

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le politique, même dans une France à tradition centralisatrice, se doit, pour être efficace et rechercher le bien commun, de s’appuyer sur le principe de subsidiarité.

Ce principe doit prévaloir, y compris dans le domaine de la police, au sens de la sécurité des biens et des personnes et du maintien de l’ordre public. C’est de ce principe que sont nées les polices municipales, qui gèrent les questions de police au niveau communal.

C’est pourquoi les maires sont, dans presque toutes les communes de France, les responsables de la police administrative générale et disposent, dans un certain nombre de villes, d’une police municipale pour l’appliquer. C’est du suffrage universel qu’ils tirent cette part de pouvoirs et ils en sont donc comptables devant les citoyens. On connaît d’ailleurs la forte sensibilité des électeurs aux questions de sécurité, sensibilité fort légitime, car la sécurité est la première des libertés !

Ainsi, notre modèle de police dans les villes s’appuie sur une police nationale pour toutes les questions inhérentes aux fonctions régaliennes et une police municipale pour les autres questions de sécurité, nécessitant souvent une plus grande proximité avec la population.

En outre, toujours au nom de la subsidiarité, il me semble que celui qui paie doit avoir la maîtrise des missions qu’il finance. Comme le souligne le rapport de notre collègue Alain Marc, la Ville de Paris contribue très largement au financement de la préfecture de police et à son fonctionnement, avec la mise à disposition d'un personnel très nombreux.

La ville-capitale présente aujourd’hui une singularité dans le domaine de la police qui vient de son histoire et de la méfiance du pouvoir étatique vis-à-vis de la population parisienne, pour différentes raisons. Tout d’abord, si, dans l’histoire, le peuple parisien a souvent été à l’origine de remises en question du pouvoir en place, il a bien changé et je ne le vois guère être aujourd’hui le fer de lance d’un quelconque changement de régime !

Alors, si dans le passé cette exception de la ville capitale pouvait se justifier, l’explosion du nombre d’actions de police, répertoriées en annexe du rapport, doit nous amener à remettre en question ce modèle. Certes, la capitale est une ville à part et la sécurité de cette ville présente un caractère singulier, mais de nombreuses tâches de police ne relèvent clairement pas de la responsabilité ni du niveau de l’État, et il n’y a aucun risque à les transférer à la commune.

Nous sommes d’avis de suivre les propositions de la commission, qui prône un transfert progressif de ces nombreuses tâches de police qui ne méritent pas d’être exercées au niveau de l’État et pourraient donc relever de la commune.

Du fait que nous sommes fort attachés à la souveraineté des peuples et que, à l’échelle de Paris, c’est de l’expression de la souveraineté du peuple parisien que vient le pouvoir du maire, nous soutenons bien volontiers cette proposition de loi. Nous espérons qu’une police municipale parisienne verra bientôt le jour et que la préfecture de police pourra se concentrer davantage sur les missions régaliennes de sécurité, missions qui ne manquent pas aujourd’hui, c’est le moins que l’on puisse dire !

MM. Yves Pozzo di Borgo, Philippe Dominati et Pierre Charon applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Guerriau

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis que nous examinions aujourd’hui la proposition de loi déposée par mon collègue Yves Pozzo di Borgo, ainsi que par MM. Charon et Dominati.

C’est un texte qui est en prise directe sur la vie quotidienne des Parisiens et qui tend à transformer une situation qu’Yves Pozzo Di Borgo qualifie à juste titre d’« archaïque, incompréhensible et anachronique ».

Alors que l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales confie au maire l’exercice de la police administrative générale, Paris déroge à ce système de droit commun : il revient au préfet de police, et non au maire, d’y exercer les pouvoirs de police administrative générale. Voilà donc plus de deux siècles que la municipalité de Paris se voit confisquer le pouvoir de police administrative par le préfet !

Cette confiscation, qui répondait à une nécessité en 1800, ne se justifie plus aujourd’hui. Ce statut dérogatoire, né de l’arrêté du 12 messidor an VIII, vient dès lors contredire aujourd’hui sans raison le principe de libre administration des collectivités territoriales, consacré par les articles 1er et 72 de notre Constitution.

Cette particularité dans notre système décentralisé se heurte à un certain nombre de limites.

La première est la question du budget. Que Paris n’ait pas de police municipale à gérer est une dérogation de fait qui est contestable, mais que, chaque année, la Ville de Paris verse 300 millions d’euros à la préfecture de police, soit 42 % de ses ressources financières, est franchement discutable ! L’ordonnateur de ce budget, je le rappelle, est le préfet de police.

Un problème de responsabilité politique se pose aussi. Comment la police municipale de Paris peut-elle répondre à l’exigence de proximité que nos concitoyens expriment chaque jour davantage quand elle est gérée par le représentant de l’État, qui n’est pas élu et n’est donc pas directement responsable devant les citoyens ? On peut comprendre qu’il soit moins sensible à la gestion des problématiques quotidiennes des Parisiens.

Que les tâches relevant de la police municipale soient assurées par des services régaliens ne peut que nous surprendre. La préfecture de police n’aurait-elle pas davantage vocation à se concentrer sur des missions régaliennes de sécurité, surtout par les temps qui courent, où nous vivons dans la crainte, justifiée, d’actes de terrorisme ?

Peut-on se satisfaire du fait que les policiers nationaux exécutent des missions habituellement confiées à des policiers municipaux, comme le « barriérage » des voies à l’occasion du marathon de Paris ? On peut aussi difficilement considérer comme régaliennes les missions confiées à la brigade d’assistance aux personnes sans abri de Paris, qui mobilise 70 policiers nationaux ! La répartition des rôles, convenez-en, pourrait être améliorée.

On peut dresser le même constat en ce qui concerne le contrôle du stationnement et de la circulation qu’assurent les agents de surveillance de Paris, rémunérés par la mairie de Paris, mais échappant à son contrôle ! Ce mode de gestion est discutable et la chambre régionale des comptes d’Île-de-France a elle-même émis plusieurs réserves à cet égard. Selon ses chiffres, les verbalisations pour non-paiement du stationnement ont diminué de 10 % entre 2007 et 2009 et celles concernant la salubrité ont baissé de 74 %. Il a aussi été confirmé qu’environ 85 % des Parisiens ne payaient pas leur stationnement parce qu’ils savent que le risque de se voir infliger une amende est extrêmement faible.

Le manque d’incitations financières pour le contrôle du stationnement et de la circulation n’encourage pas la préfecture de police à agir. Si ces missions étaient gérées par la Ville de Paris, on pourrait penser qu’elles le seraient avec davantage de pertinence, dans le propre intérêt financier de la Ville, étant donné qu’elle perçoit une partie des recettes des procès-verbaux établis pour les infractions aux règles du stationnement et de la circulation constatées sur son territoire.

Permettre à la municipalité d’assumer ses nouveaux pouvoirs de police reviendrait aussi à lui permettre de déterminer la doctrine d’emploi des agents de surveillance de Paris. Elle pourrait choisir de les affecter soit à la police du stationnement, soit à la circulation, ou encore à la prévention et à la répression des petites incivilités ou des nuisances commises sur la voie publique, en fonction de son évaluation des besoins.

L’ancrage des agents de la police municipale dans chaque arrondissement favoriserait l’efficacité de leur action. Leur connaissance du quartier, de ses habitants et de ses particularités pourrait stimuler les synergies avec les services municipaux, sociaux et les milieux associatifs locaux. Dans ma commune, la police municipale effectue de nombreux signalements auprès des services sociaux et cette pratique présente une véritable utilité au quotidien.

À l’heure où les grandes villes françaises prennent leur envol métropolitain, où des capitales européennes comme Madrid, Berlin ou Bruxelles ne présentent aucun particularisme en matière de police, il est temps que Paris se modernise, entre dans ce mouvement et cesse d’être une ville qui finance une police qu’elle ne contrôle même pas !

Cette proposition de loi a été rédigée en ce sens. Elle vise à attribuer un pouvoir de police générale au maire de Paris. Outre la salubrité publique et les troubles de voisinage, pour lesquels le maire est déjà compétent, la sûreté, l’ordre et la sécurité publique lui sont aussi attribués.

La commission a fait le choix, que nous soutenons, d’aligner le régime de police de la capitale sur celui des communes à police d’État, tout en souhaitant la poursuite de la démarche engagée depuis la loi du 27 février 2002 visant à accorder au maire une compétence globale en matière de stationnement et de circulation.

Le texte initial prévoyait aussi de transférer au maire de Paris certaines polices spéciales, telles que la police du ramonage des cheminées ou l’ensemble de la police des funérailles et des cimetières. En commission, le champ de la proposition de loi a été limité à la police générale et à la police spéciale du stationnement et de la circulation, excluant les autres polices spéciales.

Nous nous rangeons à la position de la commission, qui a jugé plus réaliste d’adopter une démarche progressive, quitte à aller plus loin, le moment venu, en se fondant sur une analyse détaillée de la plus-value d’un transfert de ces compétences.

Pour autant, Paris doit composer avec des contraintes spécifiques, que la proposition de loi initiale n’ignorait d’ailleurs pas.

Les raisons d’intérêt national telles que la protection des institutions de la République, les représentations diplomatiques, ainsi que les manifestations de voie publique, nécessitent des mesures de protection qui doivent être du ressort d’une autorité représentant exclusivement l’État et qui relèvent, par conséquent, de la préfecture de police.

Les travaux de la commission ont permis de clarifier ce texte et nous estimons qu’ils vont dans le bon sens. C’est la raison pour laquelle le groupe UDI-UC votera en faveur de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l’UMP. – M. Gilbert Barbier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Madec

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons cet après-midi la proposition de loi, présentée par trois de nos collègues de l’UDI-UC et de l’UMP, MM. Pozzo di Borgo, Pierre Charon et Philippe Dominati, tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police.

Cette proposition de loi vise à transférer au maire – ou à la maire – de Paris les compétences de police attribuées au préfet de police. En effet, en l’état actuel du droit, le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police est dérogatoire du droit commun. Cette exception au régime général trouve son origine dans l’histoire de nos institutions, comme l’a très bien rappelé Mme la ministre.

Avant de vous faire part de la position de mon groupe sur les finalités de cette proposition de loi et les conséquences importantes, voire dangereuses, qu’induirait cette modification législative du point de vue de la sécurité des Parisiennes et des Parisiens, je souhaite revenir sur l’histoire de ce régime particulier.

Depuis 1667, l’autorité de police à Paris exerce un bloc de compétences unifié en matière d’ordre public et de sécurité, concentrant ainsi à la fois les compétences étatiques et les compétences municipales. La préfecture de police a été créée par Napoléon Bonaparte et exerce l’intégralité des pouvoirs de police sur la capitale dans le but de renforcer son efficacité pour la préservation de l’ordre public.

Ces particularités correspondent également aux contraintes spécifiques à Paris, qui est une capitale où siègent les institutions de la Républiques et de nombreuses représentations diplomatiques en même temps qu’elle constitue, avec sa couronne, la première agglomération de France et que, chaque année, elle accueille 29 millions de touristes et voit se dérouler environ 7 000 manifestations revendicatives.

Contrairement à ce qu’affirment les auteurs de la présente proposition de loi, cette répartition des compétences n’est pas attentatoire au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territorial. Mme la ministre a pertinemment rappelé qu’il existait des exemples similaires de police dans de grands pays, comme à Washington, capitale de l’État fédéral des États-Unis, ou, encore plus près de chez nous, à Londres.

Considérant le régime actuel comme archaïque, les auteurs de la proposition de loi entendent moderniser le dispositif en créant une police municipale. Cependant, ce texte entraînerait, s’il était adopté, des bouleversements majeurs de l’ordre juridique qui encadre l’action du préfet de police et du maire ou de la maire de Paris. En effet, celui-ci ou celle-ci deviendrait alors le détenteur de droit commun et le préfet de police n’exercerait plus qu’un pouvoir de police résiduel.

Cette situation conduirait à un démembrement de la préfecture auquel nous sommes opposés. Ce qui m’interpelle dans ce texte, c’est que, sous prétexte d’améliorer la sécurité des Parisiens, on casse ce qui fonctionne bien ! La droite républicaine s’est toujours voulue championne de la lutte contre la délinquance. Or, aujourd’hui, messieurs, vous jouez un peu avec la sécurité des Parisiens en prenant le risque d’affaiblir la préfecture de police. Là où vous vous placez dans le registre de la communication, la gauche démontre encore une fois son sérieux et agit !

J’ajoute que la Ville de Paris n’a jamais eu la volonté de créer de police municipale, qu’elle que soit l’étiquette politique de son maire, de Jacques Chirac à Anne Hidalgo. Pour avoir le privilège de siéger au Conseil de Paris depuis fort longtemps, je me rappelle les positions tranchées sur ce sujet de Jacques Chirac. Lors de la dernière élection municipale, la candidate de l’UMP à la mairie de Paris s’y était dans un premier temps montrée défavorable ; elle a ensuite changé de position et en a fait un de ses thèmes de campagne. Force est de constater que les Parisiennes et les Parisiens ont tranché ce débat en votant majoritairement pour les listes soutenues par Anne Hidalgo.

Cependant, en mars dernier, à l’occasion d’une séance du Conseil de Paris, les groupes UMP et UDI revenaient à la charge en proposant une délibération tendant à organiser un référendum local à Paris sur la création d’une police municipale. La majorité municipale a repoussé cette proposition. Anticipant ce rejet, notre collègue Yves Pozzo di Borgo avait déjà annoncé au Conseil de Paris qu’il déposerait une proposition de loi au Sénat pour, d’après le bulletin municipal, « que la police municipale soit au moins acceptée au Sénat, où nous sommes majoritaires ».

Je ne suis pas certain que ce procédé soit la meilleure façon de légiférer dans l’intérêt général… En effet, après avoir utilisé l’assemblée parisienne pour refaire le débat perdu des dernières élections municipales, voilà qu’on utilise le Sénat pour remettre la question sur le tapis ! Je considère que, comme l’a rappelé le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, ce texte constitue une intrusion dangereuse des débats du Conseil de Paris dans l’enceinte du Parlement et engendre des polémiques politiciennes inutiles.

La préfecture de police est une institution forte, qui fonctionne ; elle a d’ailleurs démontré son efficacité. Depuis sa création, elle a su se réformer et s’adapter pour garder sa valeur ajoutée au service de la sécurité des Parisiens. J’en veux pour preuve la réorganisation des services de la préfecture à l’échelon de l’agglomération parisienne, qui a ainsi anticipé en la création de la métropole du Grand Paris.

La proposition de loi qui nous est soumise prévoyait initialement le démantèlement de cette institution. En effet, l’amendement que vous avez introduit par la commission des lois sur votre initiative, monsieur le rapporteur, édulcore la proposition initiale. En étant un peu taquin, je dirai que l’on peut deviner, derrière cette modification, l’intervention d’un ancien ministre de l’intérieur, ancien Président de la République et président d’un parti représenté par un groupe majoritaire dans notre assemblée, qui n’aurait pas tout à fait apprécié le texte dans sa version initiale, vous amenant ainsi à trouver une solution de compromis.

Je considère que la remise en cause de l’équilibre actuel porte atteinte à la cohérence et, par là même, à l’efficience de l’action de la préfecture de police. Elle priverait les Parisiens des synergies et des économies d’échelle du modèle actuel. Au demeurant, le coût d’une telle réforme pour les finances publiques n’a pas été mesuré et aucune étude d’impact n’a été commandée pour en étudier les effets.

C’est la raison pour laquelle je ne partage pas l’avis de notre rapporteur, selon lequel il y a lieu de renforcer les responsabilités du maire ou de la maire de Paris et d’aligner le droit applicable sur celui des autres communes de France. Cet argument ne me paraît pas pertinent : Paris, capitale de la France, n’est pas n’importe quelle ville française !

Je rappelle qu’après avoir assumé la décision du gouvernement de François Fillon, aujourd’hui député de Paris, de supprimer près de 1 600 postes de policiers à Paris, les auteurs de ce texte souhaiteraient que la ville puisse compenser ces suppressions par la création d’une police municipale.

La majorité municipale parisienne ne souscrit pas à ce raisonnement. Elle considère que la sécurité des Parisiens doit rester une prérogative de l’État, et la maire de Paris et sa majorité travaillent étroitement avec le ministre de l’intérieur pour que Paris bénéficie davantage de police nationale, de plus de police de proximité, que vous avez d’ailleurs détruite. Je rappelle que c’est Nicolas Sarkozy, lui encore, qui, alors qu’il était ministre de l’intérieur, est revenu sur cette réforme, pourtant efficace, qui avait été mise en place par Jean-Pierre Chevènement.

Je me félicite que Paris ait été entendu par les différents ministres de l’intérieur qui ont exercé cette fonction depuis 2012 – d’abord Manuel Valls, aujourd’hui Premier ministre, puis Bernard Cazeneuve – et qui ont permis à Paris de retrouver un nombre de policiers plus conforme aux besoins.

Remplacer la police nationale par une police municipale n’est pas la solution, et vous le savez.

Face au risque terroriste de plus en plus pressant que connaissent notre pays et notamment sa capitale, le dispositif prévu par cette proposition de loi conduirait à affaiblir la préfecture de police à une période où elle doit faire face à des enjeux majeurs.

Incontestablement, dans le contexte actuel, nous avons besoin d’une police nationale républicaine solide, confortée dans ses effectifs et dans ses moyens. C’est le message que nous ont adressé les milliers de Parisiens qui se sont dressés contre le terrorisme le 11 janvier dernier.

Il est clair que votre proposition de loi constitue un très mauvais signal, voire une manifestation de défiance à l’égard des personnels de la préfecture de police, qui œuvrent au quotidien au service des Parisiens pour leur sécurité.

En conclusion, je voudrais dire à M. le rapporteur que l’argument selon lequel ce système ne serait pas efficace parce que l’argent des amendes ne rentrerait pas dans les caisses, n’est pas recevable. En effet, les automobilistes en infraction sont bel et bien verbalisés ; c’est au niveau du recouvrement des amendes que se situe le problème.

J’entends aussi dire que les fonctionnaires de police qui assurent le « barriérage » des voies, par exemple à l’occasion du marathon, seraient mieux employés s’ils étaient affectés à des missions de sécurité. Mais pensez-vous vraiment, chers collègues, qu’on pourra envoyer ces fonctionnaires-là assurer l’ordre dans les cités ou arrêter les dealers et les toxicomanes ? Ce n’est pas sérieux !

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe socialiste votera contre cette proposition de loi, même si le débat mérite d’être ouvert. Je pense toutefois qu’il doit l’être de manière sereine et non politicienne.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Charon

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, si nous avons déposé, avec mes collègues Yves Pozzo di Borgo et Philippe Dominati, une proposition de loi visant à faire du maire de Paris un maire de plein exercice en matière de police municipale, c’est en raison d’une exception aujourd’hui incompréhensible : Paris n’est pas dans le droit commun en matière de police municipale.

Tous mes collègues, notamment ceux qui sont ou ont été maires savent que le maire dispose d’une compétence en matière de police municipale. La gestion de l’ordre public, de la sécurité publique, de la salubrité publique et de la tranquillité publique sont des attributions spécifiques du maire. Cela paraît évident du petit village à la grande ville... C’est même un acquis du droit des collectivités locales. L’absence de police municipale violerait le principe de libre administration des collectivités territoriales, si l’on en croit la doctrine des juristes les plus sérieux.

Pourtant, à Paris, nous restons un peu les mal-aimés du droit des collectivités locales ! Le préfet de police dispose de la plupart des compétences en matière d’ordre public municipal, tandis que le maire de Paris ne dispose que d’une compétence qui reste résiduelle.

Pourquoi cette exception ? Il y a, bien sûr, tout le contexte insurrectionnel du XIXe siècle qui a conduit à ce que Paris ne soit pas une commune comme les autres. Le résultat de cette méfiance a été un statut donnant un grand nombre d’attributions au préfet de police, institution longtemps spécifique à Paris. Paris était alors sous surveillance, elle était une ville mineure. Pourtant, la charte des communes de 1884 dotait toutes les villes de France d’un statut ambitieux.

Les temps ont changé : les Parisiens ne sont pas des factieux ou des citoyens de seconde zone. À chaque élection, ils nous le rappellent, nous interpellent et nous interrogent ! Ils vivent le temps des élections municipales comme celui d’une élection à part entière, ni plus ni moins.

Malgré un statut spécifique, Paris exerce des compétences étendues depuis 1977. Le maire de Paris et le Conseil de Paris sont des institutions décisionnaires exerçant un grand nombre de compétences, sous le regard vigilant des citoyens.

Paris prend des décisions en matière économique, sociale ou culturelle : elle est bien une commune de plein exercice qui joue dans la cour des capitales mondiales, une ville qui agit comme toutes ses sœurs de province.

Le statut de Paris a beaucoup progressé, mais il reste un domaine sur lequel le législateur n’a pas été assez ambitieux : celui de la gestion de l’ordre public local. Plus rien ne justifie un dispositif aussi limité qu’incompréhensible !

La proposition de loi que nous avons déposée tend à attribuer la gestion de l’ordre public municipal au maire de Paris, comme c’est le cas partout en France. Cependant, aligner Paris sur le droit commun, ne revient pas à fuir les responsabilités.

Ainsi, comme dans toutes les communes de France, le pouvoir de substitution en cas de défaillance du maire en matière de pouvoirs de police reste prévu. À Paris, il serait naturellement attribué au préfet de police.

Nous respectons l’institution du préfet de police, nous n’en faisons pas le vestige d’un passé suranné : nous le considérons, au sens le plus fort du terme, comme un représentant de l’État, au même titre que le préfet de Paris.

De même, nous entendons respecter les compétences qui ne peuvent que relever de l’État : la protection des institutions de la République et des représentations diplomatiques continuerait à relever du préfet de police.

Vouloir être traité de la même manière que dans le reste de la France, c’est justement prendre à cœur tout ce qui relève de l’intérêt national. Nous savons que certaines compétences ne peuvent être exercées que par l’État, et lui seul.

Enfin, cette proposition de loi est à la fois ambitieuse et réaliste. Si elle vise à transférer au maire de Paris la police générale, elle reste prudente en matière de polices spéciales. Ainsi, au titre des polices spéciales, ne seraient donc transférés au maire de Paris que la circulation et le stationnement.

Mais, à terme, on peut prévoir le transfert d’autres polices spéciales : il faut donner le temps au temps ! Je suis persuadé que l’application de cette proposition de loi appellera le transfert d’autres polices spéciales. Avec l’expérience, nous aurons la possibilité d’évaluer ce qui pourra être transféré.

Cette proposition de loi peut imprimer un élan, qui sera, je l’espère, suivi.

Madame la ministre, mes chers collègues, nous vous demandons une chose : de l’audace ! Paris n’est plus une ville mineure : donnons-lui la plénitude de ses compétences !

Ce n’est qu’un début. Peut-être, un jour, le maire de Paris sera-t-il élu au suffrage universel direct. Ce sera sans doute pour plus tard et cette future loi PLM sera l’occasion de procéder à bien des changements.

Madame la ministre, soyez plus audacieuse que les collègues de votre majorité au Conseil de Paris. Je peine à comprendre pourquoi ils s’obstinent à vouloir maintenir un dispositif réactionnaire… Ils veulent, si j’ai bien compris, défendre à la fois la Commune de Paris et ceux qui l’ont réprimée ! On se revendique de Louise Michel tout en rassurant Thiers !

Sourires sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Charon

Si Paris, c’est la France, alors rendons-lui ses pouvoirs de police municipale, comme pour toutes les villes de France. Une ville monde comme Paris ne peut jouir de pouvoirs de police aussi limités… ou plutôt de pouvoirs aussi dérisoires.

Le Paris du XXIe siècle, c’est un Paris autonome et responsable, un Paris innovant, qui sait prendre des décisions pour tous ceux qui y vivent, un Paris qui assume ses obligations en matière de sécurité de ses citoyens.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l’UDI-UC. – M. Gilbert Barbier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je tiens à remercier les différents orateurs qui se sont exprimés. En effet, lorsque le Sénat aborde les problèmes institutionnels de la capitale, bien souvent, nous autres, élus parisiens, sommes un peu isolés tant ces questions peuvent sembler étrangères à un certain nombre de nos collègues.

Je remercie en particulier M. le rapporteur, qui a produit sur cette proposition de loi un rapport extrêmement complet. Il y a mis tout son sérieux et toute sa fougue.

Nous, les trois élus parisiens coauteurs de cette proposition de loi, avons, à la lecture de ce rapport, approfondi notre connaissance du sujet, en particulier sur la cinquantaine de polices spéciales qui restent dans les attributions du préfet de police.

Sur le plan technique, j’aurai peu de choses à ajouter à ce qu’ont dit les précédents orateurs, mais je voudrais rappeler le cheminement institutionnel de la mesure que nous proposons.

Durant des années, en raison des troubles politiques qu’a connus la capitale, le pouvoir, surtout après l’épisode de la Commune, mais déjà sous la royauté, s’est toujours montré frileux et a toujours voulu placer la Ville de Paris sous tutelle, voire lui mettre un carcan. De fait, Paris est la ville dont les habitants jouissent des droits communaux parmi les moins étendus des communes de France et dont les droits sont les plus récents.

De fait, cette évolution, est survenue récemment, en 1977, après l’élection du président Valéry Giscard d’Estaing. Déjà, la majorité de l’époque avait vu se confronter dans un débat d’idées les centralisateurs et les décentralisateurs.

Une fois de plus, je constate que, lorsqu’il s’agit de Paris et de la région capitale, l’innovation, les propositions de réforme viennent de la droite. Même si j’ai pu observer une évolution favorable chez certains de nos collègues de gauche, le discours reste bloqué à ce qu’il était quand il s’agissait de défendre le préfet au moment où la droite projetait l’élection d’un maire à Paris. Certains disaient alors qu’une telle élection entraînerait une révolution !

Cette évolution lente a ensuite été amplifiée sous François Mitterrand pour toucher un certain nombre d’agglomérations comme Lyon et Marseille.

Sur le plan opérationnel, on essaie de nous faire croire que nous serions irresponsables, que cette proposition de loi, si elle était adoptée, désorganiserait, démantèlerait la Ville de Paris.

Tout de même, ne sont ici en jeu que des pouvoirs de police municipale ! C’est là quelque chose d’extrêmement modeste : il n’est nullement question de terrorisme international ; il s’agit seulement de contraventions.

À ce sujet, certains de nos collègues ne s’effrayent pas de ce que 85 % des Parisiens ne payent pas leur stationnement. C’est là une façon particulière d’envisager la gestion des finances publiques ! Ce n’est pas la mienne : je fais partie de ceux qui ne peuvent voir là un signe de performance !

On me dit qu’il est nécessaire que des policiers soient soustraits à leur mission de sécurité publique pour s’occuper du marathon ou d’autres manifestations sportives ou réprimer la consommation d’alcool. Ah bon ?

Madame la ministre, vous avez évoqué certaines situations que l’on rencontre à l’étranger : Londres, mais aussi Washington, capitale d’un État fédéral… Est-ce le modèle que vous proposez pour la République française ? Moi, je vous parle de Berlin, de Madrid, de Bruxelles, capitale européenne, à proximité immédiate de nos frontières.

Ce débat qui anime les élus parisiens sous-tend la vision différente qu’ont longtemps eue les centralisateurs et les décentralisateurs de ce que devait être l’organisation municipale de Paris.

Je me tourne vers Roger Karoutchi pour évoquer Philippe Seguin. Celui-ci, qui avait pourtant une conception centralisatrice de la République, a su mettre fin à ce débat et concilier les points de vue des différents membres de la majorité municipale de l’époque – d’un côté l’UDF et le RPR et de l’autre certains gaullistes – en proposant la création d’une police municipale à Paris. Cela a constitué une avancée majeure.

Contrairement à ce qui a été dit, Jacques Chirac, au cours de son troisième mandat, agacé de cette dualité entre le préfet de police et le maire, a considéré qu’il fallait sans doute procéder à des réformes.

Pourquoi faut-il réformer ? D’abord, c’est une exigence démocratique, une question d’équité. Vous ne le savez peut-être pas, mes chers collègues, mais à quatre reprises, le titulaire du ministère de l’intérieur a été un conseiller de Paris. Connaissez-vous d’autres communes en France où le candidat à la mairie, ayant proposé un projet et ayant été battu par le suffrage universel, enverrait son représentant auprès du maire élu pour lui signifier que c’est lui qui dispose des pouvoirs propres à tous les autres maires de France, celui de Levallois-Perret, celui de Vincennes, etc. ?

De fait, M. Quilès, M. Joxe, M. Vaillant et, à droite, M. Debré ont été simultanément conseillers de Paris et ministres de l’intérieur, exerçant les pouvoirs du maire de Paris par l’intermédiaire du préfet.

Monsieur Favier, je pense que, au regard de votre conception du Grand Paris, vous accepterez très prochainement que le préfet de police de Paris, dont les pouvoirs seront étendus à votre département, vienne siéger à côté de vous pour exercer éventuellement certains pouvoirs dans les communes de votre département !

J’ai compris là votre inclination au maintien d’un pouvoir véritablement centralisé. C’est aujourd’hui une manière éminemment désuète, archaïque et antidémocratique de gérer une collectivité territoriale.

Madame la ministre, à l’occasion d’autres débats, vous nous avez souvent entretenus du projet du Grand Paris, projet éminemment complexe. Malheureusement, contrairement à la métropole de Lyon, qui a obtenu la suppression d’un échelon territorial, nous n’avons pas bénéficié de la même souplesse et du même pragmatisme. Donc, s’agissant du Grand Paris, soit vous avancez, soit vous reculez, mais vous ne pouvez pas à la fois refuser toute évolution pour Paris tout en maintenant la législation en vigueur dans les autres villes : soit vous étendez les pouvoirs du préfet de police à toutes les communes composant la métropole du Grand Paris, soit, au contraire, vous faites évoluer les pouvoirs de celui-ci en matière de pouvoirs de police.

On nous reproche d’être irresponsables en formulant cette proposition, pour des raisons liées à la sécurité. En quoi la réforme que nous proposons aurait-elle empêché les forces de la police nationale, lors des événements qui se sont déroulés récemment, d’intervenir d’abord dans le nord de Paris, puis hors des frontières de la capitale, dans les Hauts-de-Seine, puis à la limite du Val-de-Marne ?

Certains orateurs se plaisent à entretenir la confusion, à tenir des discours destinés à faire peur, à faire croire que nous voudrions démanteler un système qui fonctionne. Ce n’est pas acceptable ! Nous sommes des gens responsables ! Au contraire, nous considérons que l’adoption de cette proposition de loi permettrait de dégager des moyens, des effectifs pour la police nationale, qui n’a pas à s’occuper du marathon ni des amendes. Puisque la Ville perçoit le produit de celles-ci, eh bien, qu’elle gère le personnel qui les inflige !

Ce sont toutes ces raisons d’ordre politique qui fondent ma conviction, celle du rapporteur, celle de mes collègues, de régler ce problème à la fois institutionnel et opérationnel.

Madame la ministre, j’ai évoqué à plusieurs reprises la tutelle qu’exerce l’État centralisateur sur les institutions parisiennes. Dans le cadre de vos fonctions ministérielles, vous avez à cœur de dialoguer avec le Parlement. Mais nous n’avons pas de chance : chaque fois que vous parlez de Paris et des institutions parisiennes, vous vous montrez centralisatrice et exprimez une vision un peu trop jacobine.

Vous nous avez proposé de retirer cette proposition de loi. Moi, je vous propose de changer votre titre ministériel : plutôt que d’être la ministre de la décentralisation, vous pourriez en outre, en ce qui concerne Paris, être la ministre de la centralisation. §Cette vocation transparaît à la lecture des ordonnances relatives à la politique des transports, au Grand Paris, etc.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

M. Philippe Dominati. C’est une bonne journée, car nous avons consacré du temps à ce sujet et je constate qu’un certain nombre de forces politiques de tendances très diverses commencent à faire leur cette idée. Cette majorité d’idée, qui est celle d’une majorité de citoyens, est en train de se constituer.

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L. 2512-13 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2512-13. – Dans la commune de Paris, le maire de Paris exerce les pouvoirs de police qui sont conférés au maire par l’article L. 2212-2, dans les conditions fixées à l’article L. 2214-3 et aux deux premiers alinéas de l’article L. 2214-4.

« Les services correspondant aux missions de la police municipale en matière de salubrité sur la voie publique, de bruits de voisinage ainsi que de maintien du bon ordre dans les foires et les marchés demeurent mis à la disposition de la mairie de Paris par l’État.

« En outre, dans les conditions définies au présent code, au 3° de l’article L. 2215-1 et aux articles L. 3221-4 et L. 3221-5, le maire est chargé de la police de la conservation dans les dépendances domaniales incorporées au domaine public de la commune de Paris.

« Par ailleurs, le maire de Paris assure, dans les conditions définies par le présent code, les mesures de sûreté sur les monuments funéraires exigées en cas de danger grave ou imminent et prescrit, dans les conditions définies par l’article L. 511-4-1 du code de la construction et de l’habitation, la réparation ou la démolition des monuments funéraires menaçant ruine.

« Le pouvoir de substitution conféré au représentant de l'État dans le département est exercé, à Paris, par le préfet de police. » ;

2° L’article L. 2512-14 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Dans la commune de Paris, le préfet de police exerce les pouvoirs de police qui sont conférés au représentant de l’État dans les communes où la police est étatisée. » ;

b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « Pour les motifs d’ordre public ou liés à la sécurité des personnes et des biens ou » sont supprimés ;

c) Les troisième et quatrième alinéas sont ainsi rédigés :

« Pour l'application du présent article, le contrôle administratif et le pouvoir de substitution sont exercés, au nom de l'État, par le préfet de police.

« En outre, les pouvoirs conférés par le code de la route au représentant de l’État dans le département sont exercés à Paris par le préfet de police. » ;

d) Les cinquième et avant-dernier alinéas sont supprimés ;

e) Après le mot : « nationale », la fin du dernier alinéa est supprimée.

L'article 1 er est adopté.

Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° à la première phrase de l’article L. 131-1, les mots : « à Paris des dispositions de l’article L. 2512-13 du même code et » sont supprimés ;

2° L’article L. 131-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « À Paris, il s’exerce dans les conditions définies à la sous-section 1 de la section 2 du chapitre II du titre Ier du même livre. » ;

3° L’article L. 131-2 est abrogé ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 532-1, les mots : « sous l’autorité du préfet de police » sont remplacés par les mots : « sous l’autorité du maire de Paris ». –

Adopté.

À l’article L. 211-28 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « Conformément à l’article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales, » sont supprimés. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Roger Madec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Madec

Comme je l’ai souligné dans mon propos liminaire, le texte adopté par la commission des lois, sur l’initiative du rapporteur, dont je salue le travail, est certes plus équilibré que la proposition de loi telle qu’elle avait été déposée.

Néanmoins, cette manière de traiter un sujet d’une telle importance ne me paraît guère raisonnable. Les propositions formulées par la commission auraient dû être discutées bien en amont avec le ministre de l’intérieur, la mairie de Paris et la préfecture de police.

Aussi, le groupe socialiste ne votera pas cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble de la proposition de loi tendant à modifier le régime applicable à Paris en matière de pouvoirs de police.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2014-1539 du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon (projet n° 224, texte de la commission n° 416, rapport n° 415.)

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, deux mois après l’adoption par le Parlement de deux projets de loi concernant la métropole du Grand Lyon, votre assemblée entame cette après-midi l’examen d’un troisième projet de loi visant à ratifier l’ordonnance n° 2014-1539 du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon.

Les ordonnances portant sur les différents volets – institutionnel, budgétaire, financier et fiscal – de la création de cette collectivité territoriale à statut particulier ayant déjà été ratifiées, il s’agit aujourd’hui de franchir la dernière étape, en définissant le régime électoral de la métropole de Lyon.

Ce régime électoral, le Gouvernement était habilité à le fixer par voie d’ordonnance ; c’est ce que prévoyait la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, qui a transformé la communauté urbaine du Grand Lyon en métropole.

Cette ordonnance insère dans le code électoral un titre dédié à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon, après le titre consacré aux conseillers départementaux. Les dispositions étant celles qui définissent classiquement un scrutin de liste local, elles n’appellent pas d’observation particulière de nature à en modifier le contenu.

Comme le prévoyait expressément l’habilitation, l’ordonnance fixe un mode de scrutin très proche de celui qui s’applique aujourd’hui dans les communes de 1 000 habitants et plus lors des élections municipales. Il comporte donc les mêmes éléments caractéristiques : un scrutin de liste avec parité des candidatures dans chaque circonscription ; deux tours de scrutin avec possibilité de fusion de listes entre les deux tours ; une prime majoritaire de la moitié des sièges attribuée à la liste parvenue en tête.

Ce nouveau scrutin s’appliquera à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux, c’est-à-dire en 2020. Jusqu’à cette date, et afin d’assurer la transition, les conseillers métropolitains sont les personnes élues au sein de l’organe délibérant de la communauté urbaine de Lyon lors des conseils municipaux de mars 2014.

Ainsi, un équilibre a pu être trouvé entre la nécessaire élection au suffrage universel direct des représentants de la métropole et le caractère exceptionnel du changement de mandat au 1er janvier 2015.

À cet égard, je rappelle que, considérant son caractère limité dans le temps, le Conseil constitutionnel a jugé que ce dispositif était respectueux du principe de libre administration de la collectivité territoriale métropolitaine.

Le scrutin mis en place pour la métropole de Lyon sera organisé selon un système similaire à celui qui existe déjà pour la ville de Lyon, ainsi que pour Paris et Marseille ; je souligne d'ailleurs que nous avons toujours travaillé dans le cadre de la loi PLM, la loi relative à l’organisation administrative de Paris, Marseille, Lyon. Pour ce faire, il s’appuiera sur des circonscriptions électorales choisies en fonction de l’existant et du périmètre des territoires composant la métropole. L’effectif du conseil métropolitain est fixé à 166 membres, élus dans 14 circonscriptions métropolitaines.

Concernant les limites des circonscriptions – un sujet qui suscite toujours un vif intérêt chez les élus, mais aussi, parfois, de vastes et houleux débats !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu

Le territoire de la commune de Lyon est réparti en six circonscriptions métropolitaines. La ville de Villeurbanne constitue un cas particulier, puisqu’elle est composée d’une seule circonscription, d’une taille plus importante que les autres. Les sept autres circonscriptions regroupent entre quatre et neuf communes, à l’exception de la circonscription dénommée « Val de Saône », qui regroupe vingt-cinq communes situées au nord-est de la métropole et qui sont beaucoup moins peuplées que les autres.

Vous le savez également, chacune des cinquante-neuf communes de la métropole ne sera pas représentée au conseil métropolitain. Certains ont contesté ce point, qui n’est, toutefois, pas anormal, comme le relève la commission des lois.

En effet, la métropole est une collectivité territoriale de plein exercice. Elle entretient donc avec les communes regroupées sur son territoire des relations d’une nature différente de celles d’un EPCI avec ses communes membres.

Le Parlement avait logiquement accepté cette habilitation à définir un mode de suffrage universel direct pour une collectivité territoriale de plein exercice reprenant notamment les attributions d’un conseil départemental. Et le Conseil constitutionnel n’avait accepté cette innovation institutionnelle que, précisément, à cette condition.

La commission des lois, qui a été saisie de ce projet de loi de ratification, constatant que le Gouvernement avait respecté son habilitation, tant sur le fond que sur la forme, pour ce qui concerne les délais, n’a pas apporté de modifications substantielles au projet de loi déposé le 14 janvier dernier. Elle a simplement corrigé une erreur de dénomination pour une commune et introduit, dans un souci d’harmonisation avec le code électoral, des modifications rédactionnelles.

C’est un bon signe pour la métropole de Lyon, dont le processus de création conduit en étroite collaboration par l’État et les collectivités territoriales concernées doit pouvoir être rapidement parachevé.

C’est un pas supplémentaire vers la nouvelle organisation territoriale de la République ; une organisation qui, à l’image de la métropole lyonnaise, doit permettre la clarification des compétences, la mise en œuvre d’une action publique plus intégrée et le renforcement des solidarités. Les services publics doivent mieux répondre aux besoins de nos concitoyens, et la puissance publique doit les accompagner plus efficacement au quotidien.

C’est pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de ratifier cette ordonnance en l’état.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le 1er janvier 2015, la métropole de Lyon s’est substituée à la communauté urbaine de Lyon, dont elle a épousé les limites territoriales, et, sur ce territoire, au département du Rhône.

L’article 39 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », a habilité le Gouvernement à prendre une ordonnance « précisant les modalités d’élection des conseillers métropolitains ». Cette habilitation introduite par amendement gouvernemental devant l’Assemblée nationale en première lecture avait suscité quelques réserves de la part de notre commission en deuxième lecture, car il s’agissait de dispositions électorales.

Cependant, comme vous aviez excellemment défendu, madame la ministre, le principe de cette habilitation, le Sénat l’avait maintenue en raison, notamment, de son encadrement. La Haute Assemblée est donc saisie aujourd’hui d’un projet de loi ratifiant l’ordonnance du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon.

Le mode de scrutin instauré par l’ordonnance n’aura toutefois vocation à s’appliquer qu’en mars 2020. Jusqu’à cette date, les conseillers métropolitains seront les personnes élues au sein de l’organe délibérant de la communauté urbaine de Lyon lors du renouvellement des conseils municipaux de mars 2014. Au 1er janvier 2015, date de la création de la métropole de Lyon, les élus de l’organe délibérant de la communauté urbaine de Lyon, élus pour la première fois au suffrage direct, sont devenus de plein droit, en application de l’article 33 de la loi MAPTAM, des conseillers métropolitains.

Cette solution inédite a été validée par le Conseil constitutionnel, qui a pris ici en compte le caractère transitoire et exceptionnel de ce changement de mandat, repoussant ainsi en 2020 les élections qui auraient dû avoir lieu lors la création de la métropole du Lyon.

L’ordonnance crée un nouveau titre III bis au sein du livre 1er du code électoral pour déterminer le mode de scrutin des conseillers métropolitains de Lyon, ainsi que les règles électorales qui l’entourent : présentation des candidatures, inéligibilités, propagande électorale, opérations de vote, contentieux, etc. Je ne présenterai pas le contenu de l’ordonnance, car vous venez de l’exposer, madame la ministre.

Permettez-moi simplement de rappeler que le principe d’un scrutin de liste à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne avec une prime majoritaire de 50 % pour la liste arrivée en tête a été retenu. Cependant, relevons une particularité : l’élection aura lieu au sein de quatorze circonscriptions inframétropolitaines.

La commission des lois n’a pas souhaité remettre en cause ce découpage électoral, alors qu’il a son importance, puisque la prime majoritaire s’appliquera au sein de chacune d’entre elles. Voyez-y, madame la ministre, la marque du débat constructif qui a eu lieu au sein de notre commission.

La commission des lois s’est aussi penchée sur la question de la représentation des communes. Elle a été sensible à cette préoccupation, mais n’a pu garantir un siège par commune. En effet, la métropole de Lyon est une collectivité territoriale au sens de l’article 72 de la Constitution et non un EPCI, dont les communes seraient membres et au sein duquel elles pourraient avoir cette garantie.

L’examen de l’amendement de notre collègue François-Noël Buffet nous permettra d’évoquer une solution de substitution, qui pourrait répondre à une préoccupation locale quant à la représentation équitable des composantes du territoire de la métropole. En ma qualité de rapporteur, je proposerai un sous-amendement à cet amendement.

En effet, partant de la double volonté de réduire le nombre de conseillers métropolitains à 150 et d’accorder 14 élus à la circonscription du Val de Saône pour tenir compte du nombre élevé de communes comprises sur son territoire – vingt-cinq communes sur les cinquante-neuf que compte la métropole –, ce qu’a accepté la commission des lois, il m’est apparu nécessaire de trouver une répartition de nature à recueillir l’assentiment de tous.

En fait, après divers entretiens, je proposerai, par ce sous-amendement, de répartir les sièges entre les autres circonscriptions à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne en fonction de la population.

Après un examen attentif de l’ordonnance, la commission des lois a constaté que le Gouvernement avait respecté l’habilitation consentie par le Parlement à la fois sur les délais et au fond. C’est pourquoi elle a ratifié l’ordonnance. Sur mon initiative, elle a adopté deux amendements visant à corriger une erreur matérielle relative au nom d’une commune, ainsi qu’à apporter des modifications rédactionnelles mineures.

La commission des lois a, enfin, adopté un amendement tendant, si vous me permettez cette expression, mes chers collègues, à « rapatrier » dans le corps du projet de loi de ratification les articles 3 et 4 de l’ordonnance.

En effet, l’habilitation retenait des termes sans doute relativement restrictifs en ce qu’elle permettait de préciser les modalités d’élection des conseillers métropolitains. Le Gouvernement est donc allé jusqu’à préciser les incompatibilités qui s’appliqueront aux conseillers métropolitains, par définition, après leur élection.

Certes, les incompatibilités ont des répercussions électorales, car elles mettent fin au mandat. Cependant, il existe une différence entre le fait de prévoir les effets des incompatibilités – démission d’office, remplacement, etc. – et le contenu même de ces incompatibilités, en déterminant les fonctions professionnelles, ainsi que les mandats électoraux et les fonctions électorales incompatibles avec le mandat de conseiller métropolitain.

Sur le fond, ces incompatibilités sont néanmoins apparues justifiées à la commission des lois. C’est pourquoi elle les a reprises, en prévoyant leur entrée en vigueur en mars 2020.

Sous réserve de l’adoption de l’amendement sur lequel elle a donné un avis favorable et du sous-amendement que je vous présenterai, la commission des lois vous invite donc, mes chers collègues, à adopter le texte tel qu’il résulte de ses délibérations.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, vous le savez, le groupe CRC s’est longuement exprimé dans le cadre du débat sur la loi MAPTAM contre la création de la métropole de Lyon. Vous le savez également, notre groupe n’est pas favorable aux ordonnances. C’est donc sans surprise que nous voterons contre ce texte.

Sur le fond, l’élection par circonscription est un élément, constitutif de la métropole, de mise encause des communes. Elle consacre le caractère plein et entier de la métropole en tant que collectivité territoriale, cas unique en France. De fait, de nombreux maires de petites communes ne seront plus à la métropole, et le président de chaque conférence territoriale des maires sera le décideur métropolitain pour toutes les communes de sa circonscription.

Ce mode électoral renforce ce niveau supra-communal et inframétropolitain qui écrase les communes. Notons que l’on en rajoute une couche ! Voilà qui est surprenant de la part de ceux qui dénonçaient l’existence d’un millefeuille territorial copieux et même indigeste…

En revanche, nous sommes convaincus d’une chose : ce mode électoral ne favorisera pas le pluralisme, d’autant qu’il repose surun découpage forcément sujet à débats.

De facto, en 2020, un nouveau type de maire existera en France : le maire d’une commune de la métropole de Lyon, un maire aux pouvoirs restreints et limités ; un maire qui ne représentera pas les intérêts des populations de son territoire communal ; un maire qui, comme je l’ai dit, ne sera peut-être même pas élu comme conseiller métropolitain, certaines circonscriptions ayant plus de communes que de sièges à pourvoir. Néanmoins, ce maire aura un peu plus de pouvoirs que les maires des neuf arrondissements de la commune de Lyon. Bref, il sera un maire hybride.

De plus, nous le savons, ce curieux système, une « circonscription sur la base de plusieurs circonscriptions », ne disposant que d’une dizaine de sièges à pourvoir, renforcera le bipartisme et les petits arrangements. À l’heure où notre pays exige davantage de démocratie, notamment locale, ce dispositif apparaît comme un non-sens !

Par ailleurs, j’indique que nous ne voterons pas les divers amendements déposés sur le présent texte. L’un d’entre eux tend à réduire le nombre de conseillers métropolitains. Or, à nos yeux, ce n’est pas en réduisant le nombre d’élus que l’on renforcera la démocratie. Quant au dernier amendement, il ne nous convient pas, principalement du fait de l’esprit qui a présidé à sa rédaction. Le débat et le travail législatif ne peuvent être employés à des règlements de compte personnels !

Je le répète, notre collègue, Cécile Cukierman et l’ensemble des élus de notre groupe sont longuement intervenus, lors de la discussion de la loi MAPTAM, pour s’opposer à la création de telles métropoles et à de semblables concentrations des pouvoirs. Il est bien dommage que nous n’ayons pas, à l’époque, été suivis par les membres de l’actuelle majorité sénatoriale. Il est vrai que ce débat a eu lieu avant les élections municipales, donc avant les élections du président de la métropole.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Kern

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la réorganisation territoriale est un enjeu important, au sein duquel la métropolisation occupe une place majeure.

En effet, alors que nous nous apprêtons à débattre de nouveau du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou projet de loi NOTRe, qui vise à rationaliser notre mille-feuille territorial, l’enjeu de la métropolisation réside également dans une refonte de notre démocratie, vers plus de représentativité et donc plus de lisibilité.

Dès lors, j’attire votre attention sur l’extrême nécessité d’analyser ce texte au regard de ces exigences. L’ordonnance que le Gouvernement nous invite à ratifier organise, dans le cadre de la métropolisation de Lyon, l’élection des futurs conseillers métropolitains. Cette dernière répond parfaitement à la double exigence de représentativité et de lisibilité, et cela pour trois raisons.

Tout d’abord, ce texte instaure un mode de scrutin clair, déjà connu des citoyens.

Ensuite, ledit mode de scrutin assure la bonne représentation de tous les électeurs par les futurs conseillers métropolitains lyonnais.

Enfin, les incompatibilités de fonction instaurées via ce texte sont évidemment et incontestablement nécessaires à la crédibilité de notre action.

Bref, le mode de scrutin proposé pour élire les conseillers métropolitains de Lyon est le meilleur qui pouvait être suggéré par le Gouvernement.

En effet, le choix du scrutin de liste à deux tours, qui s’applique également aux élections municipales, paraît cohérent et pertinent au vu de la volonté du Gouvernement, à laquelle nous souscrivons : organiser les élections métropolitaines en même temps que les élections municipales.

Néanmoins, nous veillerons attentivement à ce que les modes de scrutin et l’ensemble des modalités qui les accompagnent restent strictement identiques pour ces deux élections. Dès lors que ces dernières auront lieu en même temps, le parallélisme des modes de scrutin sera le garant d’une lisibilité et d’une clarté dont on ne peut plus se passer aujourd’hui, tant elles conditionnent la crédibilité de notre action.

Par ailleurs – je tiens à le souligner –, nous considérons que le mode de scrutin proposé et la répartition du nombre de sièges selon les circonscriptions métropolitaines sont en mesure d’assurer une bonne représentation de tous les électeurs.

Certes, toutes les communes ne bénéficieront pas d’un représentant au sein de la métropole de Lyon. Toutefois, il importe de le rappeler : les communes n’étant pas juridiquement membres de la métropole, collectivité territoriale à part entière, elles n’ont pas à être représentées en son sein.

À nous de faire confiance au processus de métropolisation pour mener à bien un projet cohérent dans lequel chaque citoyen, quelle que soit sa commune d’origine, pourra se retrouver. C’est d’ailleurs cette conviction première qui nous a poussés à mettre en place les métropoles en France.

Quant aux incompatibilités de fonctions et de mandats proposées au travers du présent texte, nous les soutenons, car elles sont nécessaires en leur principe et, ainsi définies, proportionnées aux enjeux.

Pour toutes ces raisons, les sénateurs du groupe UDI-UC voteront en faveur de ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec ce dernier projet de loi ratifiant l’ordonnance électorale, nous nous apprêtons à clore le processus de création de la métropole de Lyon.

Vous le savez, cette métropole est devenue réalité le 1er janvier 2015. Depuis lors, nous sommes, sur le terrain, en train de lui donner un contenu : il s’agit de réunir les grandes compétences économiques et urbanistiques, qui étaient celles de l’ancienne communauté urbaine, et les compétences sociales, qui étaient celles de l’ancien conseil général.

Ainsi, selon une formule qui est maintenant souvent reprise à Lyon, nous avons voulu, avec cette métropole, « réunir l’urbain et l’humain ». Ce faisant, nous nous efforçons de considérer le développement de notre agglomération dans toutes ses dimensions, économiques, urbaines et sociales.

Avant la création de la métropole, un certain nombre de nos collègues disaient que la communauté urbaine, le Grand Lyon, se cantonnait au développement économique et aux grands projets urbains et, a contrario, n’assurait aucune prise en compte individualisée des publics.

Désormais, en assumant des compétences qui relevaient, auparavant, du conseil général, la métropole de Lyon prend également en charge les problèmes des publics les plus en difficulté. Elle gère le revenu de solidarité active, le RSA. Elle s’occupe de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH. Elle vient en aide aux personnes âgées. Avec cette structure, nous nous efforçons d’imbriquer toutes ces politiques, afin qu’elles soient menées le mieux possible.

Madame Gonthier-Maurin, j’ai bien entendu les interrogations que vous avez émises au nom du groupe CRC. Je tiens à rappeler que nous nous sommes efforcés d’assurer, par la loi MAPTAM, un équilibre entre les différentes instances. Certes, le conseil métropolitain, dont je parlerai de nouveau dans quelques instants, ne représente pas tous les maires, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

… car la métropole est devenue une collectivité de plein exercice. Néanmoins, nous avons tenu à ce que soit créée une conférence métropolitaine, qui, elle, rassemble tous les maires. J’ai réuni cette conférence, hier, pour la première fois : désormais, deux structures existent, une instance de proposition et une instance de délibération.

Nous avons précisé, dans la loi MAPTAM, qu’un pacte de cohérence territoriale devait être adopté par le conseil métropolitain, après proposition de la conférence métropolitaine des maires. Ainsi, chacun est désormais représenté.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Mes chers collègues, si ce chantier a pu avancer, c’est parce qu’il a bénéficié d’une volonté et d’une vision communes.

Michel Mercier et moi-même avons, tout d'abord, soutenu ce projet ; au-delà, ce dernier a fait l’objet d’un consensus, de convergences, de la part de nombre des membres des divers groupes politiques. Voilà pourquoi nous avons pu avancer ! Aujourd’hui, j’en suis persuadé, avec le présent projet de loi de ratification, portant sur les aspects électoraux, nous allons le prouver une nouvelle fois : en dépit des divergences d’appréciation politique, il est possible de se réunir autour d’un projet commun.

Madame la ministre, la loi MAPTAM a déjà fixé les grands principes devant guider la rédaction de l’ordonnance que vous avez élaborée et que, je l’espère, nous allons ratifier aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Vous l’avez souligné, son article 26 indique que « les conseillers métropolitains sont élus au suffrage universel direct dans les conditions prévues par notre code électoral ».

L’article 39, quant à lui, autorise le Gouvernement à « définir par voie d’ordonnance les modalités d’élection des conseillers métropolitains à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la métropole de Lyon », soit en 2020.

À l’origine, le projet d’ordonnance fixait à 166 le nombre des membres du conseil métropolitain. M. le rapporteur l’a indiqué : après débat, nous nous sommes accordés, au sein de la commission, pour porter ce nombre à 150, dans un souci de réduction de la dépense publique.

Parallèlement se posait un autre problème : la situation de l’une des circonscriptions, celle du Val-de-Saône, qui regroupe vingt-cinq des cinquante-neuf communes composant la métropole.

Nous sommes convenus qu’il était possible d’attribuer deux sièges supplémentaires à cette circonscription, qui, avec la transformation de la métropole en collectivité territoriale, voit diminuer le nombre de ses maires participant au conseil métropolitain. Tel est l’objet de l’amendement que M. Buffet présentera dans quelques instants et que M. le rapporteur proposera de sous-amender.

Pour ma part, j’indique d’ores et déjà que je retire mon propre sous-amendement, dans la mesure où il est identique à celui de la commission. Nous devons répondre à la volonté de représentation exprimée par les communes. Toutefois, dans un second temps, c’est la démographie qui guidera la répartition des sièges.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Collomb

Ainsi, en 2020, nul ne pourra contester la représentativité de celles et ceux qui seront élus au conseil métropolitain, au suffrage universel.

Mes chers collègues, madame la ministre, tels sont les sujets sur lesquels nous avons, ensemble, progressé. Je me félicite de la manière dont nous avons abordé, dès le début, ces débats : si nous pouvions obtenir les mêmes convergences sur un grand nombre de sujets, j’en serais personnellement très heureux !

M. le rapporteur applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la demande de ratification dont le Sénat est saisi à travers le présent texte appelle, de ma part, quelques observations.

Je ne reviendrai pas sur les conditions dans lesquelles s’est construite la métropole de Lyon : j’évoquerai simplement la manière dont le régime électoral de ses instances est en train de s’organiser.

Madame la ministre, lorsque vous avez présenté votre projet d’ordonnance à notre commission des lois, je vous ai fait part d’une certaine inquiétude.

Certes, je l’admets comme tout le monde : la métropole lyonnaise devenant une collectivité territoriale, elle ne peut conserver le régime électoral dont elle disposait lorsqu’elle était dotée du statut d’établissement public de coopération intercommunale, ou EPCI. Il faut bel et bien définir un nouveau mode d’élection.

Toutefois, force est de le constater, le critère démographique, prééminent en l’espèce, posait quelques difficultés, eu égard à la représentation de certains territoires de cette métropole, en particulier – M. Collomb vient de le rappeler – pour le Val-de-Saône.

Mes chers collègues, il me semblait par ailleurs intéressant de saisir cette occasion pour réduire le nombre de conseillers métropolitains. Bien sûr, nous ne prônons pas un hara-kiri systématique.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Tel est l’objet de l’amendement que j’ai déposé en commission. Cette dernière s’y est déclarée favorable lors de sa réunion d’hier. Elle a approuvé, tout d’abord, la réduction du nombre d’élus du conseil métropolitain, et, ensuite, le tableau de répartition qui en tire les conséquences.

Ces dispositions ont suscité une discussion, au cours de laquelle M. le rapporteur s’est efforcé de rapprocher les différents points de vue. Disons-le clairement : nous avons décidé de nous rallier au sous-amendement déposé par M. Courtois sur mon amendement. Bien entendu, je suis favorable à cette modification.

Dès lors, je vous l’indique d’ores et déjà, je retire l’amendement n° 2 que j’avais déposé, au profit de l’amendement n° 3 rectifié bis, qui a été adopté par la commission et que M. le rapporteur suggère de sous-amender.

Cette solution me satisfait : non seulement elle permet d’avancer dans la nouvelle logique électorale établie, mais elle assure la juste représentation de tous les territoires. Ainsi, le Val-de-Saône disposera de quatorze élus, ce qui est, à mon sens, parfaitement légitime.

J’ai également déposé un amendement ayant pour objet les incompatibilités. Un débat a eu lieu sur la compatibilité entre les mandats locaux de président de métropole et de maire d’une grande collectivité. Je considérais que, à partir de 2017, avec l’entrée en vigueur de la loi sur le cumul des mandats, il était cohérent d’y renoncer. Je le dis très volontiers à cette tribune, notamment à notre collègue maire de Lyon, il ne s’agissait en aucune manière d’une attaque ad hominem !

La discussion a été nourrie au sein de la commission des lois, où il a été décidé de s’en tenir à la décision du Conseil constitutionnel du mois de janvier 2014. Je me suis rallié à cette position. C’est pourquoi je retire également l’amendement n° 4 visant à introduire un article additionnel après l’article unique. Je tenais simplement à ce que le débat ait lieu, car il a tout son sens, me semble-t-il.

À cet instant, la ratification de l’ordonnance ne fait plus de doute, madame la ministre.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Je l’espère !

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Elle permet de réduire le nombre d’élus, ce qui constitue un signe fort et attendu à l’adresse de nos concitoyens, mais aussi de construire une répartition de la représentation territoriale appuyée à la fois sur un critère démographique et sur un critère territorial, notamment dans les secteurs où les communes sont importantes et où la population l’est un peu moins.

Telles sont donc les circonstances dans lesquelles ce texte nous est soumis. Je suis satisfait d’avoir été entendu !

Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous votons aujourd’hui la ratification d’une ordonnance instituant une élection au suffrage universel direct des conseillers de la métropole de Lyon.

Les écologistes considèrent – ils ont été bien seuls à tenir cette position – que la réalité des bassins de vie se situe aujourd’hui à l’échelle de l’intercommunalité. La plupart des politiques publiques stratégiques doivent désormais être pilotées à ce niveau, et nous considérons que le renforcement des compétences intercommunales contribue à rendre ces politiques plus efficaces.

Nous sommes donc toujours favorables à ce que les métropoles et les intercommunalités prennent les compétences des départements, en lien avec les régions, ce qui est le cas de la métropole lyonnaise, qui fait figure d’exemple de ce point de vue ; j’ai déjà eu l’occasion de le souligner.

Sur la base de ces considérations, il nous apparaît également pertinent que les agglomérations deviennent, à terme, des collectivités locales de plein exercice, donc que leurs représentants soient élus au suffrage universel.

Je suis convaincu que cette évolution va dans le sens de l’histoire, mais elle ne doit pas être entendue comme s’inscrivant en opposition aux communes ! Les maires des petites communes craignent toujours de disparaître dans la grande intercommunalité. C’est une inquiétude récurrente dans cet hémicycle.

Or nous pensons précisément le contraire ! Actuellement, les petites communes d’une agglomération peinent à se faire entendre, et le débat politique semble accaparé par la ville-centre, alimentant ainsi le sentiment de relégation des habitants des petites communes périphériques. Nous le vivons dans nos agglomérations.

L’élection directe intercommunale constitue donc bien un outil pour lutter contre la fracture territoriale, dans la mesure où elle institue, de fait, une égalité plus forte, tant en matière de représentation du territoire et de ses habitants qu’en termes de priorités politiques, qui émergent ainsi du débat et du vote d’agglomération.

Toujours est-il que nous sommes bien seuls à défendre ces positions. L’amendement visant l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct apparu dans la loi NOTRe n’aura pas survécu longtemps au retour du texte au Sénat : il a déjà été supprimé en commission ! Nous y reviendrons.

Nous devrions donc être satisfaits face à ce projet de loi, qui inscrit clairement dans la loi le suffrage direct. Pourtant, il nous reste tout de même quelques critiques à formuler.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il y en a toujours !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

L’enjeu d’une élection au niveau intercommunal correspond à la nécessité de donner naissance à un véritable débat à l’échelle de l’agglomération. Nous considérons donc qu’il aurait fallu aller au bout de la démarche et prévoir un scrutin proportionnel avec liste unique sur l’ensemble de l’agglomération. Cela aurait eu le mérite de renforcer la logique d’intégration métropolitaine.

Le découpage en quatorze circonscriptions crée en effet un morcellement important des territoires, qui n’est pas complémentaire avec cette ambition d’intégration.

Enfin, et surtout, il me revient de relayer ici les propos de nos amis politiques du Grand Lyon. Nous regrettons quelque peu l’absence de concertation qui a présidé à l’élaboration de ces nouvelles dispositions électorales.

Pourtant, des propositions ont été formulées par différentes forces politiques locales, Gérard Collomb peut en témoigner. Au vu du caractère extrêmement symbolique de ce premier scrutin métropolitain, la création d’un consensus local issu d’un débat approfondi aurait été plus que souhaitable !

Malgré toutes ces réserves, le groupe écologiste étant favorable à l’élection directe des conseillers métropolitains, il ne peut pas voter contre cette avancée et s’abstiendra sur le vote final. Nous aurions dû aller au bout de cette démarche !

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

I. – L’ordonnance n° 2014-1539 du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon est ratifiée.

II

1° L’article 1er est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du quatorzième alinéa et la dernière phrase du seizième alinéa sont complétées par les mots : « sous réserve de l’application du premier alinéa de l’article L. 224-6 » ;

b) Le dix-neuvième alinéa est complété par les mots : « sur chaque liste » ;

c) Aux quatre-vingt-quatrième et quatre-vingt-dix-septième alinéas, le mot : « mandature » est remplacé par le mot « mandat ».

2° Les articles 3 et 4 sont abrogés ;

3° À la onzième ligne de la deuxième colonne de l’annexe, le mot : « Moins » est remplacé par le mot : « Mions ».

III

IV

V

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 2, présenté par M. Buffet, Mmes di Folco et Lamure, MM. B. Fournier, Carle, Trillard et Mouiller, Mme Imbert et M. Milon, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au neuvième alinéa, les mots : « cent soixante-six » sont remplacés par les mots : « cent cinquante » ;

II. – Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

3° L’annexe est ainsi rédigée :

Dénomination des circonscriptions électorales

Délimitation des circonscriptions métropolitaines

Nombre de sièges à pourvoir

Lones et Coteaux

Charly, Givors, Grigny, Irigny, La Mulatière, Oullins, Pierre-Bénite, Saint-Genis-Laval, Vernaison

Lyon 1

1er arrondissement de Lyon

Lyon 2

2e arrondissement de Lyon

Lyon 3

3e arrondissement de Lyon

Lyon 4

4e arrondissement de Lyon

Lyon 5

5e arrondissement de Lyon

Lyon 6

6e arrondissement de Lyon

Lyon 7

7e arrondissement de Lyon

Lyon 8

8e arrondissement de Lyon

Lyon 9

9e arrondissement de Lyon

Ouest

Charbonnières-les-Bains, Craponne, Francheville, Marcy-l'Étoile, Saint-Genis-les-Ollières, Sainte-Foy-lès-Lyon, Tassin-la-Demi-Lune

Plateau Nord

Caluire-et-Cuire, Rillieux-la-Pape, Sathonay-Camp

Porte des Alpes

Bron, Chassieu, Mions, Saint-Priest

Portes du Sud

Corbas, Feyzin, Saint-Fons, Solaize, Vénissieux

Rhône Amont

Décines-Charpieu, Jonage, Meyzieu, Vaulx-en-Velin

Val de Saône

Albigny-sur-Saône, Cailloux-sur-Fontaines, Champagne-au-Mont-d'Or, Collonges-au-Mont-d'Or, Couzon-au-Mont-d'Or, Curis-au-Mont-d'Or, Dardilly, Ecully, Fleurieu-sur-Saône, Fontaines-Saint-Martin, Fontaines-sur-Saône, Genay, Limonest, Lissieu, Montanay, Neuville-sur-Saône, Poleymieux-au-Mont-d'Or, Quincieux, Rochetaillée-sur-Saône, Saint-Cyr-au-Mont-d'Or, Saint-Didier-au-Mont-d'Or, Saint-Germain-au-Mont-d'Or, Saint-Romain-au-Mont-d'Or, Sathonay-Village, La Tour-de-Salvagny

Villeurbanne

Villeurbanne

TOTAL

Cet amendement a été retiré.

L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par M. Buffet, Mmes di Folco et Lamure, MM. B. Fournier, Carle, Trillard et Mouiller, Mmes Imbert et Deromedi et M. Milon, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au neuvième alinéa, les mots : « cent soixante-six » sont remplacés par les mots : « cent cinquante » ;

II. – Après l'alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° La troisième colonne de l’annexe est ainsi rédigée :

Nombre de sièges à pourvoir

La parole est à M. François-Noël Buffet.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Cet amendement est assorti de deux sous-amendements identiques.

Le sous-amendement n° 5 est présenté par M. Collomb.

Le sous-amendement n° 6 est présenté par M. Courtois, au nom de la commission.

Tous deux sont ainsi libellés :

Amendement n° 3 rectifié bis, dernier alinéa, colonne

Rédiger ainsi cette colonne :

Nombre de sièges à pourvoir

Le sous-amendement n° 5 a été retiré.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Je livrerai tout d’abord, au sujet de l’amendement n° 3 rectifié bis, une explication juridique, qui sera utile un jour en cas de recours judiciaire. Cet amendement vise non pas à modifier les limites des circonscriptions, mais seulement à répercuter la baisse du nombre global d’élus, sauf en ce qui concerne la circonscription du Val de Saône, qui, à l’inverse, se voit attribuer un élu supplémentaire.

Cette modification améliore la représentation des habitants de ces communes. À circonscriptions constantes, donc, la commission a souhaité abaisser à 150 le nombre de conseillers métropolitains, ce qui correspond à la limite inférieure de la fourchette ouverte au Gouvernement dans l’habilitation.

En outre, elle a souhaité réserver un sort particulier à la circonscription du Val de Saône, qui présente une particularité notable : elle couvre le plus grand nombre de communes, soit vingt-cinq, ce qui représente plus de 40 % des communes du territoire de la métropole. Elle s’étend sur une région – le massif des Monts d’Or – moins urbanisée que le reste de la métropole, avec des populations communales plus faibles. Il existe donc un motif d’intérêt général à améliorer la représentation de sa population, sachant que ces modifications ne conduisent pas à franchir le seuil constitutionnel de 20 % d’écart à la moyenne métropolitaine.

Pour ces raisons, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 3 rectifié bis.

Toutefois, sans modifier ces éléments sur lesquels nous sommes d’accord, mes chers collègues, je vous propose un sous-amendement qui vise à répartir les autres conseillers métropolitains à la plus forte moyenne, en fonction de la population, ce qui permet également une répartition à la proportionnelle équitable pour tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L'amendement n° 1, présenté par Mmes Lamure et di Folco, n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 3 rectifié bis ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La commission a émis un avis favorable, sous réserve bien sûr de l’adoption du sous-amendement n° 6.

Debut de section - Permalien
Marylise Lebranchu, ministre

Le Gouvernement a soutenu une configuration du conseil de la métropole à 166 membres, qui a fait l’objet d’un large consensus au niveau local. Il n’est toutefois pas opposé, sur le principe, à une solution permettant de réduire à 150 le nombre de conseillers.

Encore faut-il, cependant, que cette solution respecte les règles applicables en matière d’égalité devant le suffrage, notamment d’écarts à la moyenne en termes de représentativité démographique et qu’elle réponde à l’intérêt du territoire.

Monsieur le rapporteur, au terme d’une discussion riche et transpartisane, vous nous proposez quelques corrections dans la distribution des sièges entre les circonscriptions. Je m’en remets sur ce point entièrement à la sagesse de la Haute Assemblée, qui fait un excellent travail !

Le sous-amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L'amendement n° 4, présenté par M. Buffet, Mmes di Folco et Lamure, MM. Forissier, B. Fournier, Carle, Trillard et Mouiller, Mmes Imbert et Deromedi et M. Milon, est ainsi libellé :

Après l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le mot : « régional », la fin du premier alinéa de l’article L. 3631-8 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigée : «, celle de président d'un conseil départemental et celle de maire. »

Cet amendement a été retiré.

Mes chers collègues, je vais mettre aux voix l’article unique, modifié, constituant l’ensemble du projet de loi.

Je rappelle que le vote sur l’article unique vaudra vote sur l’ensemble du projet de loi.

Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix, dans le texte de la commission modifié, l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2014-1539 du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon.

Le projet de loi est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 26 mai 2015 :

À neuf heures trente : dix-neuf questions orales.

À quatorze heures trente :

Explications de vote des groupes sur le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile ;

Rapport de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois (425, 2014 2015) ;

Texte de la commission (n° 426, 2014 2015) ;

Avis de M. Roger Karoutchi, fait au nom de la commission des finances (394, 2014 2015).

De quinze heures quinze à quinze heures quarante-cinq : vote par scrutin public sur le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile.

À quinze heures quarante-cinq : proclamation du résultat du scrutin public sur le projet de loi relatif à la réforme du droit d’asile.

À seize heures et le soir :

Deuxième lecture du projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, portant nouvelle organisation territoriale de la République (336, 2014 2015) ;

Rapport de MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois (450 tomes I et II, 2014 2015) ;

Texte de la commission (n° 451, 2014 2015) ;

Avis de Mme Catherine Morin-Desailly, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (438, 2014-2015).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à dix-huit heures vingt-cinq.