Commission des affaires économiques

Réunion du 22 novembre 2016 à 17h50

Résumé de la réunion

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La réunion

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La réunion est ouverte à 17 h 50.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Nous sommes heureux d'accueillir Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable, qui vient nous présenter son premier budget. Voilà qui dément les propos de ceux qui affirment que le Sénat n'examinera pas le budget.

Debut de section - Permalien
Mm. Martial Bourquin et M. Yannick Vaugrenard

C'est pourtant vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Non, puisque la commission des finances comme les commissions saisies pour avis auront bien procédé à cet examen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Après plusieurs années de crise, le secteur du bâtiment semble connaître un regain de dynamisme.

Les crédits du projet de loi de finances pour 2017 consacrés à la mission « Égalité des territoires et logement » sont stables et atteignent 18 milliards d'euros, auxquels il faut ajouter 12 milliards d'euros de dépenses fiscales, qui correspondent notamment à l'application de taux réduits de TVA, aux dispositifs d'investissement locatif comme le dispositif Pinel, ou encore au prêt à taux zéro.

Le programme 109, qui concerne les APL (aides personnalisées au logement), est le plus important sur le plan budgétaire de cette mission, puisque 15 milliards d'euros y sont consacrés. Le gouvernement a engagé l'année dernière plusieurs réformes : prise en compte du patrimoine, mise en place de seuils de dégressivité et de suppression ou encore, plus symboliquement, suppression des APL pour les enfants rattachés au foyer fiscal de leurs parents redevables de l'impôt sur la fortune (ISF). Vous nous en direz quelques mots.

L'année 2016 a vu la mise en oeuvre d'une autre réforme d'importance, celle des aides à la pierre, avec la création du Fonds national des aides à la pierre (FNAP). Vous pourrez utilement nous rappeler les modalités de sa mise en oeuvre et nous indiquer dans quelle mesure l'Etat compte poursuivre son engagement dans le financement des aides à la pierre.

L'année 2016 a également été marquée par la crise migratoire, qui a nécessairement eu des incidences sur le parc généraliste d'hébergement d'urgence. Peut-être pourrez-vous nous présenter les mesures que vous avez mises en oeuvre dans ce domaine ?

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable

Le budget pour 2017 du ministère du logement et de l'habitat durable s'inscrit dans une triple logique, avec le souci d'accompagner et accélérer la reprise de la construction, de pérenniser le financement du logement social tout en favorisant l'accès du plus grand nombre à un logement décent et de ne laisser personne, enfin, sur le bord de la route.

Il est utile de rappeler quelques chiffres. La dynamique de la construction se confirme, mois après mois, puisque de juillet à septembre, 432 300 autorisations ont été délivrées, soit une progression de 6,3 %, tandis que sur un an, 367 000 logements ont été mis en chantier, soit une progression de plus de 8 %. Ces chiffres, très satisfaisants, et qui concernent tant le logement collectif et individuel que les locaux d'activité, sont le résultat des mesures engagées depuis plusieurs années : le prêt à taux zéro (PTZ), remanié en janvier 2016 ; le dispositif d'investissement locatif dit « Pinel », prolongé en 2017, qui contribue au dynamisme du marché du neuf ; l'encouragement à la construction de logements sociaux, qui sera poursuivi en 2017, et dont l'objectif, avec 140 000 agréments en 2016, a été tenu, y compris pour les constructions en zones tendues ; le lancement d'un fonds d'investissement et de gestion, pour la construction de 13 000 logements locatifs intermédiaires en cinq ans ; les prêts de haut de bilan octroyés aux bailleurs sociaux, destinés à accélérer les programmes de réhabilitation et de construction ; le soutien à la rénovation énergétique des logements, via le programme « Habiter mieux » porté par l'Agence nationale de l'habitat (Anah).

Alors que la conjoncture économique est favorable, nous avons voulu assurer, en 2017, une continuité budgétaire et fiscale, sachant que les à-coups fiscaux peuvent avoir de fortes répercussions. L'augmentation sensible des crédits de paiement, de l'ordre de 183 millions d'euros, se concentre sur le programme 177, relatif aux politiques d'hébergement et d'accompagnement vers le logement. En matière d'hébergement d'urgence, nous avons entrepris d'augmenter le nombre de places pérennes, qui atteint 118 000 aujourd'hui dont 92 000 en Ile-de-France contre 82 000 en 2012, avec la volonté de réduire de moitié le recours, onéreux, à l'hébergement hôtelier. Il convient d'ajouter les centres d'accueil et d'orientation (CAO), dans lesquels 9 000 places ont été ouvertes pour répondre à la crise migratoire.

Nous entendons également améliorer l'efficacité de l'action de l'Etat, avec la mise en place d'un plan de prévention des expulsions locatives. Nous avons également mobilisé les territoires afin que les publics en hébergement d'urgence puissent accéder à un logement social.

En matière d'aide à la construction, outre la prolongation des dispositifs fiscaux, nous sécurisons la contribution de l'Etat aux aides à la pierre, grâce à la création du FNAP, où siègent des représentants de l'Etat, des organismes sociaux, des collectivités territoriales, et, pour les parlementaires, MM. Daniel Goldberg, député, et Daniel Dubois, sénateur. Si le budget est voté par le Parlement, c'est néanmoins le Fonds qui discute des programmations régionales, avec l'objectif de programmer, comme en 2016, 140 000 logements.

Outre les prêts dits de haut de bilan, il convient également de mentionner la réforme d'Action Logement, qui n'est pas sans répercussions sur la mobilisation de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) en faveur du logement, au travers d'actions comme les aides à l'accession à la propriété, la garantie Visale, les aides aux apprentis. A quoi s'ajoute l'effort de la Foncière logement, autour de l'objectif de diversification du logement dans certains quartiers en rénovation urbaine.

Enfin, les aides personnelles aux logements restent, ainsi que vous l'avez souligné, la dépense principale de ce budget. Lors de la discussion budgétaire de l'an passé, un certain nombre d'économies ciblées ont été décidées, pour tenter de rétablir de l'équité. Ainsi de la dégressivité des APL en fonction du loyer, voire de leur suppression en cas de loyer manifestement excessif ou de l'obligation de déclaration de patrimoine, à compter du 1er octobre, pour les nouveaux demandeurs, afin que celui-ci soit pris en compte dans le calcul de l'APL - et je rappelle que les conditions retenues sont les mêmes que pour le revenu de solidarité active (RSA) et l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), qui ont été fixées par la loi. Je vous donnerai, si vous le souhaitez, des informations plus précises sur les premiers résultats de cette mesure. Autre disposition, la suppression des APL pour les enfants rattachés au foyer fiscal de leurs parents, lorsque ces derniers sont redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), sur les résultats de laquelle je pourrai vous donner plus d'éléments lorsque les caisses d'allocation familiale les auront fait remonter.

Nous voulons, au-delà, prendre le temps d'évaluer l'impact de ces mesures d'économie, et d'observer s'il y a eu des effets de seuil, des difficultés d'application, sur l'ensemble de l'année 2017. Je rappelle enfin que les personnes handicapées ne sont pas concernées par ces mesures, non plus que les personnes âgées logées en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), et que le projet de loi de finances rectificative apportera, à ce sujet, tous les éclaircissements requis.

L'Anah met en oeuvre plusieurs programmes comme « Habiter mieux » ou comme son programme en faveur des personnes en perte d'autonomie ou handicapées. La structure du budget de l'Anah est diverse. Une partie de son budget repose sur les quotas carbone qui connaissent des fluctuations tellement fortes que cela a des conséquences sur la prévisibilité de son budget. S'ajoutent à ces ressources la participation du Fonds de financement pour la transition énergétique, à hauteur de 70 millions d'euros - celle d'Action logement, et celle de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Les engagements pris dans le cadre du programme « Habiter mieux », pour la rénovation thermique de 100 000 logements - seront ainsi tenus. Asseoir le budget d'un tel organisme sur les quotas carbone est une idée intéressante, notamment pour développer des projets de rénovation énergétique en faveur des ménages les plus modestes et réduire ainsi la précarité énergétique, mais il faudra tenter de parer aux inconvénients que j'ai rappelés.

J'insiste sur le programme « Habiter mieux », qui permet d'aider les ménages les plus modestes à redonner valeur à leur patrimoine, à sortir de situations de grande précarité énergétique et à se maintenir à domicile. N'oublions pas que sans cette aide, bien des personnes âgées en situation précaire seraient obligées de quitter leur domicile pour un Ehpad, ce qui rendrait leur condition plus difficile encore. Il est pour nous essentiel de poursuivre cette action, et de la faire mieux connaître, comme je l'ai demandé aux préfets de région.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Les crédits du programme 177 consacrés à l'hébergement d'urgence sont effectivement en augmentation, mais comment comprendre qu'ils restent inférieurs à ceux qui ont été consommés en 2016 ?

Pouvez-vous nous en dire plus sur l'accueil des réfugiés ? Combien de CAO ont-ils été ouverts ? Je sais que votre ministère et celui de l'Intérieur sont en discussion, pour trancher du programme dont devraient relever ces CAO. La question est-elle résolue ?

Pourquoi avoir imposé un marché public pour la création de places d'hébergement d'urgence, et quel en sera le coût ? La Cour des comptes, sur ce même programme, a relevé que les services intégrés d'accueil et d'orientation étaient très mal outillés et n'assuraient pas toutes leurs missions, alors que ces services, faits pour intervenir au plus près du territoire, sont indispensables. Comment entendez-vous y remédier ? Ces services semblent ne pas avoir été consultés sur la création de places en CAO. Le confirmez-vous ?

Les APL sont une dépense de guichet qui continue d'augmenter. Disposez-vous de chiffres provisoires sur les effets des réformes engagées ? Combien de personnes sont concernées par chacune de ces réformes ?

Quel sera l'engagement de l'Etat en matière d'aide à la pierre pour 2017 ? J'observe que c'est la première fois que le projet de loi de finances n'inscrit aucun objectif en termes de construction.

L'Etat opère de nouveau une ponction sur les fonds de la Caisse de garantie du logement locatif social. N'est-ce pas la mettre en difficulté ?

L'aide aux maires bâtisseurs devait atteindre 2000 euros par logement, or, il semblerait que l'on soit plus proche, aujourd'hui, de 1320 euros. Comment comptez-vous combler cet écart ?

Comment, enfin, assurer à l'Anah des ressources stables, sachant que sa ressource principale, ainsi que vous l'avez mentionné, est assise sur les quotas carbones ou les certificats d'économie d'énergie, extrêmement volatils. La rénovation de logements est une question cruciale pour les élus locaux que nous sommes. Vous avez annoncé une aide du Fonds de financement de la transition énergétique, mais alors que les moyens de l'Anah diminuent et que son budget n'est pas encore arrêté, on est en droit de s'inquiéter du financement d'actions indispensables et attendues sur l'ensemble du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Une précision sur les enfants dont les parents sont assujettis à l'ISF. J'avais compris qu'ils ne toucheraient pas l'APL qu'ils soient ou non rattachés au foyer fiscal de leurs parents. Est-ce bien constitutionnel ?

Prise de remords, vous avez exempté des nouvelles règles relatives aux APL les adultes qui touchent l'allocation pour adultes handicapés (AAH). Pouvez-vous nous donner des précisions sur ce point ?

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Je m'inquiète de la dévitalisation commerciale des centres-villes où les fermetures de magasins se multiplient, particulièrement dans les villes moyennes. Le taux des vacances commerciales a ainsi atteint 10 % en 2015, contre 6 % en 2001. Dans mon département, Béziers en offre un exemple probant : 24 % des locaux commerciaux ont baissé le rideau. Et la dévitalisation entraîne la paupérisation.

Il est aujourd'hui plus facile de consommer des terres agricoles et de construire en dehors des centres historiques que de rénover ces derniers. Or, il faut savoir allier construction de logements sociaux et rénovation des coeurs de ville. Au-delà des villes moyennes, ce phénomène - et c'est nouveau - sévit aussi dans les villages ruraux. Quelles sont les mesures envisagées par le Gouvernement pour lutter contre ce fléau dévastateur, sachant que le coût de la rénovation est plus élevé que le coût de la construction ?

Autre question. Le projet de loi de finances pour 2017 prévoit la suppression du mécanisme d'allègement de la taxe foncière des propriétés bâties, qui contribue pourtant à produire des logements à loyer relativement bas. Ne craignez-vous pas que cette suppression ne ralentisse la construction de logements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Dubois

La solution de continuité dans les crédits de l'Anah a créé un réel problème sur le terrain. Il faut savoir que dans les territoires ruraux, ce sont les relais opérationnels qui permettent aux opérations de se concrétiser. Chez moi, quand la vanne des crédits de l'Anah s'est fermée, le moteur a calé. Et l'on sait qu'il ne suffit pas qu'elle se rouvre pour qu'il reparte.

Sur la construction en milieu rural, au sujet de laquelle je vous avais interrogé, j'ai mené une enquête avec mon président de département, la Somme, qui compte 782 communes - ce qui nous classe, de ce point de vue, au troisième rang des départements français. Nous avons posé quatre questions aux maires : la commune dispose-t-elle d'un document d'urbanisme valide ? Rencontre-t-elle des difficultés pour obtenir, auprès des services de l'Etat, les accords de constructibilité qu'elle sollicite ? A-t-elle essuyé récemment un refus de certificat d'urbanisme ? Estimez-vous qu'il y a, de la part de l'Etat, une volonté d'empêcher la construction en milieu rural ? En trois semaines, 50 % des maires ont répondu et 59 % d'entre eux estiment qu'ils sont délibérément empêchés de construire dans leur commune. Cela pose un vrai problème de cohérence. On ne peut pas demander aux territoires ruraux de se mettre à l'heure du numérique, de créer des maisons de santé, si on ne leur laisse pas la possibilité de renouveler leur population. Or, c'est ce qui est en train de se produire dans de nombreux départements. Et cela, alors même que la consommation de terres agricoles n'est pas imputable aux communes rurales, mais aux villes qui se trouvent à proximité. Il y a là un vrai problème d'équité et de cohérence. La commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers de la Somme en est à interdire les lotissements de plus de trois lots : c'est porter atteinte à l'autonomie des collectivités !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Je m'inquiète, moi aussi, des ressources de l'Anah, qui manquent de stabilité et dont le niveau reste insuffisant.

S'agissant du logement social, où en sont les prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI), qui correspondent à une demande forte, alors que deux millions de logements manquent ?

Quelle est l'évolution des expulsions locatives ? Les familles expulsées se voient-elles proposer une solution pour ne pas rester à la rue ?

Les aides à la pierre ont décru au fil des ans, ce que nous déplorons, non seulement parce que les organismes HLM s'en trouvent pénalisés, mais parce que cela n'est pas sans effet sur le niveau des APL, qui aurait été moins élevé, puisque les loyers auraient été plus bas. J'observe que les niches fiscales représentent une dépense largement supérieure à celle des aides à la pierre, comme nous avons eu l'occasion de le relever, en déposant une proposition de loi sur la question. Nous militons en faveur de plus de mixité sociale, et le renouvellement urbain constituait, à cette fin, un atout majeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Merci de votre présentation, madame la ministre, qui permet de mesurer l'ampleur de ce budget, essentiel pour soutenir la croissance et l'emploi, notamment dans le bâtiment.

Une question sur l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. Dans certains quartiers, si la rénovation a été réussie, il arrive, bien souvent, qu'un ou deux quartiers demeurent dégradés. Nous parvenons, parfois, à les rénover avec l'aide de crédits européens, ou de financements croisés. Mais il y faudrait une solution d'ensemble : on ne peut se contenter d'expédients, quand on sait la précarité de ceux qui vivent dans ces quartiers.

Deuxième observation, la reconduction du dispositif Pinel pour 2017 et du CITE me semble une bonne décision. C'est avec de tels dispositifs que l'on « fait de la ville ».

Sur la question de la ruralité, enfin, j'observe que la rénovation de l'habitat coûte beaucoup plus cher que la construction neuve. Comment trouver le moyen de rénover ces habitats dégradés, pour rendre vie à nos centres-villes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

La requalification de l'habitat en milieu rural représente un potentiel considérable ; comment comptez-vous l'exploiter ?

Vous avez évoqué les réductions significatives accordées pour les travaux de rénovation énergétique. Quel est le retour sur investissement pour les familles bénéficiaires, et pour les investisseurs, au regard des financements injectés dans cette économie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Avez-vous des éléments sur les effets du crédit d'impôt transition énergétique (CITE) sur le prix des travaux, qui doit faire l'objet d'un rapport ?

Confirmez-vous que la possibilité de cumuler le CITE et l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) sera maintenue sous condition de ressources ? C'est à mes yeux indispensable.

118 000 places sont ouvertes tous les soirs dans le cadre de l'hébergement d'urgence ; le programme 177 a bénéficié d'une hausse de 15 % de ses crédits. Vous avez annoncé un plan triennal 2015-2017 de substitution de dispositifs alternatifs aux nuitées hôtelières : allez-vous tenir cet objectif ambitieux ?

Enfin, ce budget est marqué par la continuité avec l'exercice précédent. L'objectif fixé pour 2016 de 140 000 logements sociaux programmé va être atteint ; les permis de construire sur les logements neufs sont en augmentation de plus de 17 % sur un an. Incontestablement, le dispositif Pinel, qui a considérablement modifié le dispositif Duflot, a eu des effets positifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

L'Assemblée nationale a introduit une disposition autorisant les communes ayant atteint le seuil de 25 % de logements sociaux à décider des suppressions d'exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour les organismes HLM. Le taux de 25 % n'est qu'un minimum... Or cette disposition aura des conséquences sur le prêt social location-accession (PSLA) qui est un élément essentiel de mixité sociale.

Les prêts de haut de bilan n'apparaissent pas dans ce budget, mais ils peuvent être considérés comme équivalant à une aide à la pierre. Il faut analyser l'aide à la pierre pour le logement social au regard de l'inscription budgétaire et de ces prêts de haut de bilan. Le mouvement HLM demandait quatre milliards d'euros pour ce dernier dispositif ; deux milliards ont été annoncés. Comment le Gouvernement souhaite-t-il inscrire cette initiative intéressante dans la durée ?

Pour ma part, je ne suis pas convaincue de la légitimité d'un nouveau prélèvement sur le fonds de roulement de la Caisse de garantie du logement locatif social, qui revient à ponctionner les organismes HLM.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Guillemot

Merci de votre investissement en faveur des communes qui ont accueilli des migrants. L'hébergement en centres d'accueil et d'orientation (CAO), soulignons-le, se déroule bien.

Les mesures relatives à la mixité sociale du projet de loi Égalité et citoyenneté, en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, réservent 25 % des attributions des logements sociaux hors quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), aux demandeurs ayant les ressources les plus faibles, ainsi que la moitié des logements sociaux dans les QPV aux autres catégories de demandeurs. Sur les 370 000 logements construits, combien l'ont été grâce à la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) ? J'ai recueilli le chiffre de 80 à 90 000.

Les suppressions d'exonérations de TFPB sont problématiques : le taux de compensation ne dépasse pas 40 %, et les offices HLM n'ont pas tous signé les conventions en contrepartie de l'abattement. Renoncer à la compensation serait dommageable aux offices, aux communes et à la politique du logement.

Je comprends les critères retenus pour la perception du RSA ; mais la prise en compte du livret A dans le calcul des droits à l'aide personnalisée au logement (APL) heurte certains élus et associations.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Létard

Merci de vos efforts menés en dépit des difficultés budgétaires. Comme Daniel Dubois l'a rappelé, l'effet stop and go de l'évolution des quotas carbone sur les ressources de l'Anah est désastreux. On passe d'un budget de 315 millions d'euros dans une bonne année où la tonne de carbone est à 7,70 euros à 45 % de moins l'année suivante, soit un manque à gagner de 100 millions d'euros. Cela oblige à stocker les dossiers, à modifier les critères d'éligibilité d'une année sur l'autre. Ainsi, l'abondance des ressources en 2015 avait incité le Gouvernement à fixer des objectifs ambitieux pour 2016 - après quoi les fluctuations à la baisse ont recommencé... La projection 2017 ne serait équilibrée qu'à un prix dont nous savons qu'il sera difficile à atteindre. Pour boucler l'année 2016, il manquait 50 millions d'euros. Il convient d'atténuer les effets de ce mécanisme pénalisant qui pourrait, à terme, tuer le système en dissuadant les bénéficiaires potentiels de déposer des dossiers.

Le budget des structures d'accueil et d'hébergement d'urgence et les efforts financiers du ministère de l'intérieur sur l'accueil sont-ils suffisants pour faire face à l'afflux de réfugiés sans opposer les publics ? Je songe notamment à l'accueil des femmes victimes de violence et aux personnes accueillies en centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS).

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Duran

Je voudrais aborder la question du logement des travailleurs saisonniers. Certains territoires de montagne utilisent l'intermédiation locative sur le parc de résidences secondaires peu utilisées ou déclassées pour disposer rapidement des logements à des prix raisonnables. C'est un outil très utile, mais les agents communaux qui conduisent les états des lieux et gèrent les réservations n'ont pas l'habilitation nécessaire pour cela. Une modification du code de la construction et de l'habitat serait nécessaire pour que les agents publics puissent réaliser ces missions. Qu'en pensez-vous ?

Quelle est votre position sur l'amendement introduit par l'Assemblée nationale à la loi Montagne en cours de discussion, qui autorise dans l'article 20A la construction d'annexes de taille limitée en zone de montagne sans condition de continuité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bosino

L'exonération de TFPB représente 200 millions d'euros pour les organismes HLM. C'est très important, en particulier dans les QPV. Comment peut-on laisser aux maires le soin de voter l'exonération ? C'est scandaleux. Les compensations se sont amenuisées au fil du temps. Sur le plafond de ressources pour accéder à un logement social, j'ai vu dans l'Oise, au cours d'une commission d'attribution, un maire de petite commune rurale expliquer qu'il ne pouvait attribuer un logement à un couple de sa commune - tous deux travaillant, pour un salaire très modeste - parce qu'il se trouvait au-dessus du plafond de ressources. Il estimait que dans ces conditions, il ne construirait plus de logements HLM.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Daunis

Le système de quotas carbone est intelligent et nécessaire, mais c'est la première ressource de l'Anah. Il est inconcevable de soumettre l'Agence à des fluctuations pareilles. Dans tous nos territoires, nous connaissons cette situation. Prenons un engagement collectif en faveur d'un dispositif de compensation.

L'action de ce gouvernement pour l'accession à la propriété a été remarquable : en témoigne le succès du PTZ qui est maintenu en 2017 à l'ensemble du territoire. Avez-vous des éléments de bilan sur ce dispositif ?

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Cosse, ministre

Merci de ces questions précises et pertinentes, qui témoignent de votre intérêt pour ce sujet essentiel.

L'augmentation du budget du programme 177 répond à une augmentation de la consommation des crédits : 1,6 milliard d'euros en 2015 et 1,75 milliard en 2016. C'est pourquoi nous avons obtenu que le budget pour 2017 soit porté à 1,73 milliard d'euros.

L'évolution de la consommation de crédits est liée à l'augmentation du nombre de prises en charge, mais aussi à une amélioration qualitative. Tout bénéficiaire du dispositif d'hébergement doit désormais faire l'objet d'une évaluation sociale ; plus personne n'est mis à la porte à huit heures du matin. Durant la période estivale, notamment pendant les périodes de forte chaleur, nous avons augmenté les maraudes sociales et ouvert l'accueil de jour.

Nous avons créé 450 CAO : une première vague de 160 CAO a permis d'ouvrir 3 000 places d'hébergement entre octobre 2015 et septembre 2016 ; la seconde vague a répondu au démantèlement de la jungle de Calais. À cela s'ajoutent les centres d'accueil et d'orientation pour les mineurs isolés (Caomi), dont le coût est provisoirement pris en charge par le programme 177.

Certes, ce dispositif a un coût ; mais les CAO, par nature, ne sont pas pérennes puisque les personnes hébergées passent, après le dépôt de leur demande d'asile, dans le dispositif relevant du programme 303 « Immigration et asile et intégration » affecté au ministère de l'intérieur. Il reste à déterminer si les CAO demeureront financés à long terme par le programme 177. Pour garantir la qualité de l'accueil et de l'encadrement, j'ai présidé à l'élaboration d'une charte de fonctionnement des PAO rendue nécessaire par la multiplicité des opérateurs de CAO qui sont spécialisés dans l'hébergement d'urgence, l'accueil des migrants ou encore la veille sociale ou l'accueil social.

Par conséquent, le budget des CAO, par nature transitoire, ne correspond pas au financement annuel de 9 000 places d'hébergement. Il m'est impossible, pour cette raison, de vous donner une estimation précise des dépenses, mais nous suivons leur évolution mois par mois.

Nous avons lancé un marché public pour accélérer la création de places d'hébergement d'urgence et arrêter ainsi le recours aux nuitées hôtelières qui est coûteux et peu propice à un suivi satisfaisant. Le volume de places à créer - 5 000 - nous obligeait à passer par cette procédure inhabituelle. Le marché est clos, et les résultats seront notifiés à la fin décembre. Dans les territoires où aucune offre ne sera présentée, il sera possible d'engager des discussions de gré à gré. À terme, ces rachats stabiliseront notre politique d'accueil.

Nous avons mis en place une évaluation harmonisée appliquée par les SIAO qui détermine notamment quel public est accueilli, d'où il vient, et quelles solutions sont trouvées à la fin de la prise en charge. Un logiciel de gestion lui aussi harmonisé a été mis en place et monte en puissance.

Le Parlement a voté en 2015 des mesures d'économies portant sur le dispositif d'APL, dont l'arrondi à l'euro inférieur de l'aide versée et une dégressivité à partir d'un seuil de loyer de 985 euros par mois à Paris pour une personne seule, puis une suppression pour les loyers supérieurs à 1 171 euros, à compter du 1er juillet.

Le volet relatif au patrimoine a été mis en oeuvre le 1er octobre 2016 : les allocataires doivent déclarer leur patrimoine mobilier et immobilier lorsque celui-ci n'apparaît pas dans le revenu fiscal de référence. Il est ainsi pris en compte dans le calcul des aides, comme pour le RSA, lorsqu'il dépasse 30 000 euros. Les bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et les personnes hébergées en établissement d'hébergement pour personnes âgées et dépendantes (Ehpad) ne sont pas concernés par cette mesure.

Enfin, depuis le 1er octobre également, les personnes dont les parents sont soumis à l'impôt sur la fortune et rattachées à leur foyer fiscal voient leur APL supprimée. Ces mesures sont par conséquent dans la continuité du dispositif voté l'année dernière et validé, dans ses aspects réglementaires, par le Conseil d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Pouvez-vous confirmer que l'APL n'est supprimée pour les enfants de personnes soumises à l'ISF que s'ils sont rattachés à leur foyer fiscal ?

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable

Je le confirme. Nous avons demandé aux caisses d'allocations familiales de prévenir les allocataires concernés et de nous transmettre l'ensemble des réclamations. 1 590 réclamations ont été envoyées - pour 6,5 millions de bénéficiaires au total - et 666 dérogations accordées. Sans surprise, les régions les plus concernées étaient l'Île-de-France et la Provence-Alpes-Côte d'Azur. Des dérogations ont notamment été demandées pour les personnes ayant des enfants en résidence alternée, les situations d'isolement avec ou sans enfant à charge - en particulier les parents divorcés qui n'ont pas la garde de leur enfant mais qui ont besoin d'une ou plusieurs chambres pour accueillir leurs enfants - ainsi que les familles d'accueil et assistantes maternelles. On peut néanmoins se demander s'il est pertinent que cette dernière activité soit financée par les APL. Les CAF ont également été saisies de demandes de dérogation pour les allocataires hébergeant un parent ou un enfant handicapé : leur situation sera clarifiée dans la loi de finances rectificative.

Pour l'instant, nous n'avons aucune remontée du nombre de réclamations d'allocataires à propos du critère de patrimoine ; mais il est vrai que la mesure est récente.

Le taux moyen d'encours du livret A est de 4 000 euros. Faisons le bilan de ces mesures d'économie en toute transparence, en considérant leurs effets sur les nouveaux locataires et les locataires actuels. Les cas dont j'ai été saisie par les associations de locataires concernaient principalement des locataires aux revenus modestes mais ayant un patrimoine immobilier important - j'insiste sur ce dernier mot. On peut se demander si le patrimoine n'est pas un élément d'aggravation des inégalités... 600 000 bénéficiaires de l'APL pourraient être concernés par les mesures d'économie, mais ce n'est qu'une projection de la Caisse nationale d'allocations familiales sans éléments sur la situation patrimoniale des bénéficiaires. Je suis tout à fait disposée à transmettre les données pertinentes au Parlement.

La loi ne prévoit pas d'objectifs chiffrés de construction, mais nous comptons maintenir le même niveau qu'en 2016, soit 140 000 nouveaux logements. L'objectif sera tenu, tout comme celui de réhaussement dans les zones tendues et celui relatif aux prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI).

Nous nous sommes assurés que la ponction opérée sur la CGLLS ne la mettrait pas en difficulté ; les ratios prudentiels ont été préservés.

L'aide aux maires bâtisseurs, conçue en 2015, fait l'objet d'une enveloppe cible de 80 millions d'euros pour 2017. Avec la relance de la construction, le montant moyen s'établit à environ 1 300 euros par logement, contre 2 000 euros prévus au départ. Des communes sont entrées en masse dans le dispositif après le blocage de 2014. Nous nous efforçons de mieux la cibler, tout en maintenant un montant significatif pour aider les territoires.

La part principale du budget de l'Anah est financée par la recette des quotas carbone. Les quotas ont varié cette année entre 4 et 7,60 euros. Nous avons fixé le prix de référence à 6 euros, sur la base de la moyenne constatée jusqu'au mois d'octobre. Le cours est fortement remonté depuis. Afin que l'Agence soit soutenue dans ses objectifs de rénovation, la ressource carbone est complétée par d'autres éléments de recettes : le produit de la taxe sur les logements vacants, dont le déplafonnement a été discuté à l'Assemblée nationale ; la contribution de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie ; la contribution d'Action Logement ; et enfin les certificats d'économie d'énergie qui sont en forte augmentation. La question de ressources plus pérenne est légitime, même s'il faut s'interroger plus largement sur l'utilisation des quotas carbone pour le financement de certaines missions.

Il est vrai que le stop and go a eu des effets très négatifs, concentrés sur la fin 2014, sur les programmes de l'Anah dans les territoires. J'ai pris mes fonctions en février 2016 ; nous avons annoncé dès la fin mars l'augmentation du budget et des objectifs de l'Anah. Nous n'avons pas toujours trouvé de répondant dans certain territoires. Après des changements de majorité, des collectivités ont ainsi mis plus d'un an à décider le maintien de leurs aides au programme Habiter mieux. Le stop and go n'est donc pas l'unique responsable. Nous avons des difficultés à engager une dynamique stable sur le terrain, peut-être parce que les publics modestes ont des difficultés à monter des dossiers et à obtenir des prêts. Notre priorité est de pérenniser l'action de l'Anah et de la rendre plus efficace. Nous avons d'ores et déjà mis en place la dématérialisation des dossiers. Nous essayons de mieux animer les territoires.

Vous m'alertez sur la dévitalisation commerciale et la construction en milieu rural, mais les permis de construire ne sont pas délivrés par le Gouvernement... Afin d'aider les territoires ruraux à établir leurs documents d'urbanisme, nous avons mis en place le club PLUi et des aides financières.

Le nombre de PTZ est passé de 40 000 en 2014 à plus de 60 000 aujourd'hui. La zone C est particulièrement représentée, ce qui n'était pas acquis au départ. La quotité de prêt a fortement augmenté. Le PTZ a aussi été ouvert dans l'ancien. Au 1er septembre, 77 051 PTZ avaient été accordés, pour un objectif de 120 000 à la fin de l'année qui devrait être tenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

L'immense majorité des communes relèvent du règlement national d'urbanisme... Ce sont les services de l'État qui instruisent les demandes de permis de construire, et le maire les délivre ou les refuse au nom de l'État.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Cosse, ministre

Nous avons encore eu ces débats, il y a peu de temps, au Sénat. Il faut doter ces territoires en pleine mutation institutionnelle de documents d'urbanisme leur garantissant davantage de stabilité. Le sujet de l'urbanisation des « dents creuses » que mentionne M. Le Scouarnec est intéressant. Les dispositions législatives sont d'autant plus difficiles à traduire dans les documents d'urbanisme qu'il existe des jurisprudences qui infirment ce qui a été dit dans le débat parlementaire, brouillant au final le sens de la loi. La solution de facilité consisterait à supprimer toutes les dispositions législatives. Cela ne résoudrait rien.

Il existe un lien entre la dévitalisation commerciale et la perte de qualité de l'habitat. D'où le développement des établissements publics fonciers d'Etat dans les territoires, et l'inscription de cette problématique dans leur programmation pluriannuelle. Dans certains territoires, les difficultés liées aux fermetures de commerces en cascade se cumulent avec le coût de la réhabilitation d'un habitat caractérisé par sa valeur patrimoniale. Nous attendons les conclusions du rapport d'Yves Dauge sur le sujet. À terme, il faudra moderniser les dispositifs Malraux. Devons-nous envisager d'étendre le dispositif à Pinel dans l'ancien ? Comment développer le dispositif du prêt social location-accession (PSLA) ? Vaut-il mieux réhabiliter ou démolir ce patrimoine ancien ? Ces enjeux sont prégnants dans des villes participant aux programmes nationaux de requalification de l'habitat dégradé, comme Annonay, où le patrimoine ancien qui était encore de qualité il y a deux siècles, est aujourd'hui dégradé. La requalification passe par une modulation fine entre réhabilitation et démolition. Rien ne serait possible sans les moyens financiers dégagés par les dispositifs fiscaux.

Sollicitée par l'Assemblée des communautés de France, je viens de lancer un réseau des collectivités pour la mobilisation contre la vacance de logements. Y figurent des collectivités locales de milieu urbain, périurbain et rural qui utilisent la taxe sur les logements vacants pour développer leur réflexion. Certains logements sont attachés aux commerces, de sorte que lorsque l'un s'en va, tout tombe. Le développement de l'urbanisme commercial en périphérie des villes a un coût social et politique pour les centres-bourgs, avec les enjeux d'aménagement qui s'ensuivent : comment relier la périphérie et le centre-bourg ? En Ile-de-France, les centres commerciaux sont pléthores. La politique du logement a toute sa pertinence dans les zones, dites détendues, qui se caractérisent par de petits volumes de logements sociaux, de résidences privées ou d'Ehpad. La planification territoriale en matière de logement est une nécessité absolue.

Le Gouvernement n'est pas à l'origine des dispositions sur la TFPB qui ont été votées à l'Assemblée nationale, vendredi dernier. J'ai repoussé plusieurs amendements à ce sujet, et j'ai encore écrit, hier, au Premier Ministre pour lui dire combien ces mesures étaient dangereuses pour la dynamique de la construction. On risque de perdre un levier efficace, puisque 50 000 logements sociaux seront concernés sur 140 000. Nous souhaitons revenir sur cette disposition.

Faudrait-il envisager un droit d'option sur l'abattement de 30 % dans les quartiers prioritaires de la ville ? Les élus demandent surtout plus de transparence sur les usages qui sont faits de cet abattement. Les conventions, le dialogue renforcé avec les territoires, une meilleure communication du ministère des Finances : tout cela devrait contribuer à ce que les élus locaux n'aient plus le sentiment de perdre quelque chose sans compensation aucune. Je suis très mobilisée sur ce sujet.

Les expulsions locatives sont exécutées pour moitié dans le parc social et pour l'autre dans le parc privé. D'après les données du ministère de l'Intérieur et du ministère de la Justice, le nombre des contentieux locatifs a diminué de 173 000 en 2014 à 167 000 en 2015, celui des décisions d'expulsion a augmenté de 132 016 à 132 196, et le nombre d'expulsions effectives avec concours de la force publique a considérablement augmenté de 11 000 à 14 127. Cette hausse de 22 % est liée à une augmentation notable des contentieux locatifs en 2014 (173 000 contre 159 000 en 2013). Désormais, chaque département doit mettre en place un plan national de prévention des expulsions.

Si le budget de l'Anru ne relève pas de mon ministère, le plan de rénovation urbaine prend en compte la question des propriétés dégradées. Nous avons développé les opérations de requalification des copropriétés dégradées d'intérêt national (ORCOD-IN), dispositif innovant issu de la loi Alur, à Clichy-sous-Bois, dans la copropriété du Chêne Pointu, confrontée à de graves difficultés urbaines et sociales, mais aussi à Grigny. Nous travaillons aussi en région parisienne et en Occitanie. Le rétablissement des copropriétés dégradées doit faire partie du programme de rénovation urbaine et bénéficier de financements particuliers, dont celui de l'Anah. Le registre des copropriétés devrait nous aider à suivre ce dossier.

Pour avoir suivi pendant six ans le dossier de Clichy-sous-Bois, je suis convaincue que rien ne serait possible sans des dispositifs comme celui des ORCOD-IN. Dans cette copropriété de 1 700 logements, un bâtiment a menacé péril au mois de mai dernier, alors qu'il n'était pas considéré comme problématique et qu'il est l'un des moins endetté de la copropriété. Il est en train de s'effondrer. On n'aurait rien pu faire sans les ORCOD-IN. Le cas n'est pas isolé. Ce genre de copropriété massive, datant des années 70, avec des difficultés de bâti, existe dans beaucoup de métropoles. Mobilisation de l'établissement public foncier, recours aux dispositifs du droit commun, mais aussi aux bailleurs sociaux qui relogent les propriétaires : telles sont les clefs de la réussite.

La définition des conditions de ressources applicables pour l'obtention du CITE ne relève pas de mon ministère. Si l'objectif est de massifier les rénovations pour répondre à des enjeux environnementaux et relancer la dynamique économique, mieux vaudrait élargir l'application du CITE. D'autres préfèrent réserver ce crédit d'impôt à un certain niveau de ressources pour cibler les ménages qui n'engageraient aucune rénovation sans cette aide. Les deux positions se tiennent. Rénover les logements les plus énergivores des ménages les plus modestes, mais aussi massifier le marché de la rénovation en rattrapant notre retard sur les autres pays européens, tels sont les deux objectifs à tenir. La ministre de l'Environnement et les députés Carrez et Goldberg ne sont pas d'accord sur l'encadrement du crédit d'impôt. Le débat mérite d'avoir lieu.

Quant à l'augmentation du CITE sur les prix des travaux, je vous communiquerai la réponse plus tard.

Monsieur Grémillet, sur le CITE, on a engagé 5 milliards d'euros de travaux pour un investissement fiscal d'1,4 milliard d'euros. Les certificats d'économies d'énergie ont un impact réel sur la facture des ménages.

Le plan pauvreté prévoyait la construction de logements très sociaux et mettait en place des prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI) et des super PLAI. Il devait également contribuer à la diminution du recours aux nuitées hôtelières grâce au développement des places d'hébergement pérennes, des places d'intermédiation locative et des places d'hébergement en logement adapté. Nous avons enrayé l'augmentation du recours aux nuitées hôtelières. L'effort doit être poursuivi. Le plan de mobilisation contre la pauvreté, en fixant des objectifs à la politique du logement, nous a aidés à exercer une pression sur les territoires qui cédaient trop souvent à la facilité en recourant aux nuitées hôtelières.

Quant aux prêts de haut de bilan, nous avions engagé une enveloppe de 2 milliards d'euros bonifiée à parité par la Caisse des dépôts et consignations et par Action logement, et nous avons reçu une demande de 6,5 milliards d'euros. Sur l'enveloppe engagée, 1,8 milliard d'euros ont été notifiés au bénéfice de 312 organismes et les demandes de 55 autres organismes sont en cours d'expertise. Les prêts portent aux trois quarts sur la rénovation et pour un quart sur la construction. Ils concernent des programmes à mettre en oeuvre jusqu'en 2018. La Banque européenne d'investissement (BEI) oeuvre à la mise en place des fonds.

Le Premier Ministre et le président de la République ont souhaité débloquer une enveloppe supplémentaire d'un milliard d'euros pour répondre à la demande très forte. Avec la Caisse des dépôts et Action logement, nous travaillons à définir les critères d'attribution de ces nouveaux prêts, en veillant à ce qu'ils prennent en compte des enjeux tels que la question de l'Anru, la mobilisation de certains territoires qui ont des besoins particuliers, mais aussi les difficultés de certains opérateurs.

Ce dispositif, très attendu par les opérateurs de logement social, est intéressant. La BEI a félicité la France pour cette action en matière d'investissement et s'est déclarée prête à accompagner durablement ses efforts. Des discussions sont en cours dans le cadre du plan Juncker. Les institutions européennes ont un intérêt particulier à nous aider dans ce domaine.

- Présidence de M. Bruno Sido, secrétaire -

Sur le logement des travailleurs saisonniers, votre collègue Joël Giraud m'a posé la même question à l'Assemblée nationale : peut-on agréer les CCAS en leur donnant la carte professionnelle d'agents immobiliers ? Je ne crois pas que ce soit possible en l'état. Je me suis engagée à trouver une solution dans le cadre de la loi Montagne. De bonnes pratiques existent dans des secteurs où il n'y a pas d'agence immobilière à vocation sociale. Cependant, il faut tenir compte de la loi Hoguet et le ministère de la Justice a son mot à dire.

Vous m'interrogez sur une autre partie du texte qui a été votée par amendement. Je préfère relire le texte avant de vous répondre.

Valérie Létard rappelait la nécessaire non concurrence des publics sur la question de l'hébergement. Il est clair que c'est la nette amélioration de nos capacités d'hébergement qui rend possible l'accueil des migrants. C'est en partie pour cette raison que le budget augmente. Nous avons établi des programmations régionales et départementales. Nous avons mis l'accent sur les zones tendues, mais aussi sur celles qui ne disposaient pas de centres d'hébergement pérennes. L'évolution des publics doit être prise en compte, car il faut parfois reloger des familles en urgence, ou bien des jeunes en rupture familiale, ou encore des travailleurs pauvres. Au moins 40 % du public hébergé en Ile-de-France répondent aux critères d'accès au logement social, sans pourtant y avoir accès. Il faut que les bailleurs sociaux s'investissent davantage dans la gestion de ce public.

Nous nous étions engagés à créer des places en foyer et des places d'urgence pour les femmes victimes de violences conjugales, et nous l'avons fait. Le plus souvent, ces femmes doivent quitter leur domicile, même quand le bail est à leur nom. Elles n'ont donc plus accès au logement, alors même qu'elles sont victimes. Une solution consiste à mobiliser le contingent de logements préfectoral pour les accueillir. Cependant, ces femmes souffrent davantage d'un problème de violence que d'un problème de logement. Il faudrait commencer par veiller à ce qu'elles conservent l'accès à leur logement. Il faut également renforcer la formation des représentants du logement social dans les commissions d'attribution : une femme victime de violence n'est pas forcément une femme à problèmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Guillemot

Dans certains jugements, on fait obligation aux femmes de quitter le domicile conjugal. Or, tant que la décision de séparation n'est pas prononcée, l'office HLM refuse de les reloger. Cela dure parfois huit ou neuf mois.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable

Je partage votre point de vue. Le maintien dans les lieux est essentiel, en veillant à garantir la sécurité des femmes.

Debut de section - Permalien
Emmanuelle Cosse, ministre du logement et de l'habitat durable

Quand la région ou le département parviennent à réserver un contingent de logements pour ce public particulier, avec des têtes de réseau local qui garantissent une fluidité et la possibilité pour ces femmes de changer de ville, la sécurité semble garantie. Nous continuerons à créer des places en foyer. Il faut également prévoir l'accueil des jeunes femmes en rupture familiale. Nous leur réservons des places dédiées dans les centres d'hébergement.

La commission demande à se saisir pour avis sur le projet de loi n° 19 (2016-2017) de programmation relatif à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique et nomme M. Michel Magras comme rapporteur pour avis sur ce texte.

La réunion est close à 19h35.