La commission examine tout d'abord le rapport pour avis de Mme Evelyne Didier et de MM. Michel Teston, Gérard Cornu et Pierre Hérisson, sur les crédits de la mission « Économie » du projet de loi de finances pour 2012
Après avoir effectué une brève présentation générale des crédits de la mission, je ferai un point plus précis sur les crédits relatifs à La Poste, aux télécoms et à la société de l'information, puis je passerai la parole à mes trois collègues rapporteurs pour avis : Gérard Cornu, sur le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC), Evelyne Didier, sur les missions et les moyens de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et Pierre Hérisson sur les moyens de la politique du tourisme.
Les crédits de la mission Économie, tous programmes confondus, reculent de 2,8 % en 2012. Encore cette baisse est-elle nominale. Si l'on ajoute l'inflation, estimée pour 2012 à 1,7 %, le recul réel des crédits est 4,5 %.
Le programme 134 Développement des entreprises et de l'emploi est particulièrement touché, avec un recul des crédits de plus de 8 %, presque 10 % en tenant compte de l'inflation.
L'action 2, consacrée aux actions en faveur des PME, du commerce et de l'artisanat, souffre particulièrement avec une baisse des moyens de près de 35 %. Le FISAC est la principale victime, avec des crédits ramenés à 41 millions d'euros, contre 64 millions en 2011 et 78 millions en 2010.
L'action 3, en faveur des entreprises industrielles, connaît elle aussi cette année une baisse de 6 millions d'euros à périmètre constant. Depuis 2010, les crédits finançant cette action ont connu un recul très marqué, puisqu'on est passé de 261 à 209 millions d'euros, soit une baisse d'environ 20 % en deux ans.
Les crédits destinés à financer une partie des charges de service public de La Poste sont également en recul, j'y reviendrai.
Le soutien au développement international des territoires, notamment à travers le financement d'Ubifrance, est la seule action à tirer à peu près son épingle du jeu : ses crédits progressent de 1 % en nominal, ce qui constitue néanmoins une baisse en termes réels.
Enfin pour finir sur le programme 134, les moyens de la DGCCRF sont une nouvelle fois sérieusement touchés avec une baisse des effectifs d'une centaine d'agents pour 2012. Depuis 2008, la DGCCRF a donc perdu environ 500 postes sur un effectif de 3 500. Concernant les crédits proprement dits, la régulation concurrentielle des marchés dans l'action 16 perd 3,4 % de son budget. Idem pour la protection économique des consommateurs à travers l'action 17. Les moyens consacrés à la sécurité du consommateur à l'action 18 reculent quant à eux de 1,1 %. Globalement, depuis 2010, la DGCCRF a ainsi perdu 27 millions d'euros, soit une baisse de 10 % - près de 15 % si on tient compte de l'inflation.
Pour finir ce tableau, le programme 225 consacré aux actions en faveur du tourisme enregistre de nouveau cette année une diminution de ses crédits : 43 millions contre 53 millions en 2011 et 58 millions en 2010.
Je vais à présent évoquer la partie « poste et communications électroniques » de la mission « Économie », en commençant par l'analyse budgétaire, qui porte sur les actions 4 et 13 du programme 134 :
- l'action est consacrée au « développement des télécommunications, des postes et de la société d'information ». Avec 202,35 millions d'euros, en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP), elle est en recul de 3,55 %. Sont en baisse la subvention à l'Agence nationale des fréquences (ANFR), de 1,59 %, mais surtout les dépenses de transfert de l'État à La Poste. En application du protocole d'accord entre l'État, la presse et La Poste, la compensation de la mission de transport de la presse est ainsi en recul de 4,4 %, ce qui interroge lorsque l'on connaît les difficultés du secteur de la presse écrite. Les autres dépenses de cette action sont globalement stables, mais portent sur des enveloppes limitées ;
- l'action 13 est consacrée à la « régulation des communications électroniques et des postes ». Elle contient les dotations publiques à l'autorité de régulation du secteur, l'ARCEP, qui sont en hausse de 1 % environ, après, il est vrai, une baisse de 5,5 % l'année passée.
J'en viens maintenant aux différents points d'actualité sur le secteur.
S'agissant d'abord de La Poste, je rappellerai d'abord que l'augmentation de capital du groupe, à hauteur de 2,7 milliards d'euros, doit être prise en charge pour 1,2 milliard par l'État et 1,5 milliard par la CDC. 1,05 milliard a été versé en avril dernier, la même somme devrait l'être en 2012 et 0,6 milliard en 2013. Nous attendons toutefois d'en avoir la confirmation.
Mais venons-en aux difficultés de financement des quatre missions de service public de La Poste :
- le service universel, en premier lieu, était précédemment financé en partie par le « secteur réservé », c'est-à-dire le monopole résiduel sur les plis de moins de 50 grammes dont bénéficiait La Poste. Or, ce monopole a été supprimé au 1er janvier de cette année. La loi du 9 février 2010 sur le changement de statut de La Poste prévoit la création d'un fonds de compensation qui serait alimenté par les opérateurs. Il n'est pas encore créé mais j'en conteste le principe. En effet, celui en place pour la téléphonie fixe n'est pas efficace. Un transfert de l'État, qui n'est a priori pas interdit par le droit européen, aurait été plus juste et opérationnel ;
- deuxième mission : le transport et la distribution de la presse, déjà abordée ;
- troisième mission : l'accessibilité bancaire. Le surcoût qu'elle représente pour La Poste est compensé par une « rémunération complémentaire » de l'État. Or, il est prévu qu'elle décroisse sur la période 2009-2014, et ce alors que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à rencontrer des difficultés financières ;
- enfin, la mission de présence territoriale. Elle est financée par un fonds de péréquation alimenté par l'allègement de fiscalité locale dont bénéficie La Poste. Certes, son montant annuel sera plus élevé entre 2011 et 2013 qu'auparavant, puisqu'il passe de 135 à 170 millions d'euros par an durant cette période. Cependant, l'État est absent d'un tel financement, qu'il fait reposer sur La Poste et les collectivités territoriales. De plus, le bouclage financier du dispositif n'est pas assuré, comme l'a relevé la Cour des Comptes.
Je ne peux parler de La Poste sans évoquer Dexia. Le groupe va être divisé en trois ensembles, dont l'un sera spécifiquement chargé du financement des collectivités. La Banque postale prendra 5 % de Dexia Municipal Agency (DMA), gérant les financements déjà accordés aux collectivités, et 65 % de la nouvelle banque des collectivités, qui en accordera de nouveaux. On peut dès lors se demander s'il n'y a pas un risque de contamination de La Banque postale par Dexia, mais également un risque d'assèchement du crédit pour les collectivités ...
S'agissant à présent de la téléphonie mobile, évoquons d'abord la 4G. Cette nouvelle génération de réseau mobile, bien plus performante, va utiliser la bande de fréquences des 2,6 GHz, ainsi que celle des 800 MHz, issue du « dividende numérique ». L'État a mis aux enchères cette année la bande des 2,6 GHz, ce qui lui a rapporté 936 millions d'euros pour quatre licences accordées sans surprise à Orange, SFR, Bouygues Telecom et Free. L'année prochaine seront attribuées les licences pour l'autre bande, celle des 800 MHz, qui est capitale pour la desserte des zones rurales. S'agissant justement de couverture territoriale, je m'interroge sur l'efficacité des prescriptions imposées aux opérateurs, qui disposeront de délais de respectivement 15 et 12 ans pour atteindre les objectifs de couverture qui leur sont fixés !
Ces interrogations s'étendent aux réseaux 2G et 3G : au-delà de taux de couverture communiqués par les opérateurs, la réalité de la desserte est bien moins flatteuse, notamment dans les « zones blanches », où une commune est considérée comme couverte dès lors que son bourg-centre l'est. Il faut donc s'accorder sur des critères de couverture cohérents en « zones blanches », et traiter les « zones grises ». Les rapports de nos collègues Bruno Sido et Hervé Maurey ont déjà largement mis en évidence ces enjeux.
J'en viens à présent à l'internet fixe :
- sous l'angle d'abord du haut débit. Là encore, les taux de couverture annoncés -98 % d'accès à l'ADSL - sont biaisés. Ils tombent en effet à 77 % à 2 Mbit/s, et moins de 50 % à 8 Mbit/s, seuil permettant de bénéficier du triple play. Des moyens de connexion alternatifs existent, mais ils sont moins performants ou plus chers. D'où l'idée, que j'ai déjà évoquée, d'un service public du haut débit à un niveau suffisamment élevé de débit, supérieur en tout cas aux 512 Kbit/s du plan « France numérique 2012 ».
Pour finir, je souhaite évoquer le plan national très haut débit (PNTHD). Afin d'atteindre les objectifs fixés par le Président de la République - 100 % de la population desservie en 2025 - 2 milliards d'euros lui ont été alloués au titre des « investissements d'avenir », et un fonds d'aménagement numérique du territoire (FANT) a été créé dans la loi du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique pour prendre le relais. Or, ce dispositif connaît plusieurs limites, bien mises en avant par notre collègue Hervé Maurey, dans son rapport d'ailleurs approuvé à l'unanimité par notre commission :
- les opérateurs privés peuvent déployer partout et ne sont en rien tenus par leurs engagements, alors que les collectivités locales ne peuvent intervenir qu'en zones peu peuplées et ne peuvent donc mettre en place un dispositif de péréquation avec des zones plus denses ;
- le financement n'est pas assuré : les collectivités ne bénéficient que de 900 millions d'euros pour un besoin de financement global estimé à 25 milliards d'euros, tandis que le FANT n'est toujours pas alimenté.
Pour conclure de façon plus globale, Monsieur le Président, mes chers collègues, je m'interroge sur la pertinence du maintien de niches fiscales en période de crise. Il me semble qu'il faudrait supprimer celles étant inefficaces ou injustes, et conserver celles soutenant les services essentiels apportés à la population. Or, le présent projet de budget n'est pas orienté en ce sens, ce qui me conduit à vous proposer d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie ».
Tout d'abord, je voudrais rappeler que le système de financement de l'aménagement territorial ainsi que de la présence postale territoriale est issu depuis toujours de la taxe professionnelle, aujourd'hui remplacée par une nouvelle fiscalité. De fait, les collectivités locales n'ont jamais bénéficié de la taxe versée par la Poste. Il s'agit de compenser les 132 millions d'euros, devenus 170 millions d'euros, par application d'un dégrèvement de 85 %. Nous avons tous avancé des chiffres, mais quel est le coût réel de la présence de La Poste dans des territoires déficitaires ? La Poste l'évalue à 280 millions d'euros et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) l'évalue, elle, à 268 millions d'euros. Les 170 millions évoqués plus haut ont été validés pour 2011, 2012 et 2013, c'est-à-dire la durée du contrat de plan. Une garantie est donc apportée à La Poste, qui est plutôt satisfaite des compensations proposées. En tant que président de l'Observatoire du service public postal chargé de répartir ces 170 millions d'euros, je souhaiterais souligner que, très récemment, nous avons décidé d'élargir les possibilités d'utilisation du fonds parce que les collectivités éligibles au fonds n'arrivent pas à consommer la totalité du fonds. Le système est par conséquent assoupli et j'invite les parlementaires qui disposent d'un mandat exécutif local à présider effectivement le comité départemental de présence postale (CDPP) afin d'identifier les besoins.
La réponse n'est pas aussi manichéenne que le laisse entendre Michel Teston. Nous savons tous que le projet du Président de la République est très volontariste ; 70 % de territoire équipé du très haut débit en 2020 puis 100 % en 2025, c'est ambitieux mais, au moins, nous osons faire bouger les lignes, comme le fait la loi du 17 décembre 2009 introduisant le schéma directeur d'aménagement du numérique (SDAN). Certes, cela représente un coût de 29 milliards d'euros pour les départements et l'argent n'est pas au rendez-vous. En Somme, par exemple, département engagé dans un SDAN, l'État participe à hauteur de 40 % du montant de la première phase du plan, à l'inverse de la région Picardie qui n'investit pas...
J'entends bien la demande de Pierre Hérisson de s'impliquer dans les CDPP, mais ceux-ci ne sont pas prescriptifs, mais consultatifs. Ainsi les élus sont-ils systématiquement mis devant le fait accompli. Les diminutions des horaires d'ouverture des bureaux concernent aussi bien les zones rurales que les zones urbaines sensibles pour lesquelles La Poste est d'une réelle importance. A mon sens, il faut rendre le CDPP prescriptif.
La question du numérique est une question essentielle, et nous n'avons pas attendu les objectifs du Président de la République pour agir dans nos territoires. A mes yeux, il faut insister sur la pertinence des efforts demandés et militer pour la clarté des budgets alloués. En effet, j'affirme, à l'inverse de mon collègue Daniel Dubois, que l'État n'apporte pas 80 % du financement ; ce sont les études que l'État finance et ce sont les collectivités qui vont apporter les fonds nécessaires.
Aujourd'hui, le projet est public. Il s'agit d'un plan de 120 millions d'euros sur 10 ans dont 5 millions apportés par les collectivités locales, à défaut de la Région Picardie.
Pierre Hérisson veut apparemment défendre le dispositif mis en place. Il a notamment indiqué que les collectivités n'avaient jamais perçu les sommes évoquées. Certes. Cependant, je voudrais faire remarquer que nous avons confié à La Poste quatre missions de services publics relevant de la solidarité nationale. A ce titre, je suis choqué que l'État n'y participe pas. Il faut impérativement convaincre le gouvernement d'y participer pour soutenir la présence postale.
Daniel Dubois, sur le plan national THD, vous avez trouvé ma réponse manichéenne. Je vous rappelle que le sénateur Hervé Maurey a rédigé un rapport intitulé « De la parole aux actes » qui en souligne les insuffisances en ce qui concerne son financement.
Alain Le Vern, je vous rejoins tout à fait à travers nos propositions. D'une part, abonder de 500 à 600 millions d'euros par an le fonds d'aménagement numérique du territoire pour prendre la relève des 2 milliards d'euros prévus par le grand emprunt. Par ailleurs, sur le plan réglementaire, le gouvernement devrait permettre la subvention des projets intégrés pour les zones peu denses. Il faudrait également faire participer les opérateurs privés pour la zone 3 la moins dense, en fonction de l'évolution de leurs recettes.
Gérard Cornu va maintenant présenter son rapport sur les moyens du FISAC.
Avant d'en venir au FISAC, je tiens à réagir aux propos de Michel Teston concernant la présentation des crédits de la mission. Le budget pour 2012 s'inscrit dans un contexte européen et international excessivement contraint et on ne peut pas égrener toutes les baisses de crédits sans considérer que, dans un tel contexte, la recherche d'économies budgétaires constitue une obligation.
Malheureusement, la question du financement du FISAC, qui a tendance à resurgir lors de l'examen de chaque projet de budget, se pose une nouvelle fois cette année.
Pour 2012, la loi de finances initiale prévoit en effet de doter le FISAC de 41 millions d'euros. Par rapport à 2011, cela représente une baisse de 22 millions d'euros, soit - 34%. Je ne sais pas si beaucoup de fonds d'intervention, de programmes ou d'opérateurs de l'État sont confrontés à une restriction de crédits aussi sévère et aussi forte que le FISAC.
Ces 40 millions d'euros de crédits proposés pour le FISAC en 2012 correspondent en fait, je vous le rappelle, à ce qui était déjà prévu par la loi de finances pour 2011 dans sa version initiale. Si le FISAC, en 2011, a pu finalement disposer de 64 millions d'euros au lieu des 43 millions initialement prévus, c'est parce que, l'année dernière, j'avais proposé un amendement pour limiter la baisse des moyens du FISAC. Nous nous étions mobilisés à l'unanimité, pour le faire adopter malgré l'avis contraire du Gouvernement. Nous avions ainsi obtenu qu'en 2011 le FISAC bénéficie d'une rallonge de 21 millions d'euros.
Les chiffres que j'ai pu recueillir auprès de la direction générale de la concurrence, de l'industrie et des services (DGCIS), concernant l'exécution des crédits du FISAC, prouvent a postériori que notre engagement était justifié. Ces 64 millions d'euros n'étaient en effet pas de trop. L'année qui vient risque de commencer déjà avec un volume de crédits reportés sur 2012 et donc « pré-engagés ».
Imaginons un peu ce qui se serait passé si nous n'avions pas obtenu en 2011 cette rallonge de 21 millions d'euros pour le FISAC. Avant que l'année commence, le FISAC aurait vraisemblablement obéré sa capacité d'intervention et les nouveaux projets déposés en 2012 ne pourraient pas être satisfaits.
Je crois que nous nous trouvons devant une situation absurde. Le FISAC est un outil utile pour soutenir le développement du commerce de proximité. La DGCIS dispose de plusieurs études qui le prouvent. L'argent investi dans le FISAC est de l'argent bien dépensé, car c'est de l'argent, qui génère de l'activité économique, de la cohésion sociale et des rentrées financières à travers la TVA.
Je rappelle d'ailleurs que le législateur, à l'initiative du Sénat, avait inscrit dans la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME) un renforcement des missions du FISAC et une sécurisation de ses crédits. C'est notre collègue Elisabeth Lamure, en tant que rapporteur de la LME, qui avait défendu des amendements allant dans ce sens. L'article 100 de la loi du 4 août 2008 prévoit ainsi que le FISAC reçoive 15 % des fonds collectés au titre de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), dans la limite de 100 millions d'euros. Depuis lors, par un effet collatéral de la réforme de la taxe professionnelle, le produit de la TASCOM a été affecté aux collectivités territoriales, de sorte que le FISAC n'en bénéficie plus. Ses crédits ne sont ainsi plus « sanctuarisés ».
Certes, aujourd'hui, le FISAC est sous-doté au regard de ses missions mais, fait positif, suite à la déconcentration de l'instruction des dossiers au niveau des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE), les délais de traitement des dossiers ont été raccourcis.
Compte tenu de la situation financière de la France, je ne proposerai pas, comme l'année dernière, un amendement pour abonder les crédits du FISAC. Cependant, lorsque l'effort de redressement des comptes publics aura porté ses fruits, il me semble que notre commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire devra rouvrir le dossier du FISAC, de ses missions et de ses moyens.
En effet, concernant ces missions, le FISAC est peut-être aujourd'hui victime de son succès et il faudrait sans doute réfléchir à recentrer son action prioritairement sur le soutien au commerce de proximité.
Plus largement, je crois qu'il faut penser le FISAC comme un outil intégré au service d'une politique plus globale, comme le Sénat avait tenté de le faire dans la LME. Il me semble donc impératif de doter le FISAC de ressources stables et suffisantes pour être le bras armé d'une politique faisant du commerce de proximité un atout au service à la fois du développement économique et de l'aménagement du territoire.
Je souhaite conclure en indiquant que, malgré la baisse des crédits du FISAC, baisse que je peux comprendre compte tenu du contexte économique, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Économie.
La baisse des crédits du FISAC est une tendance ancienne : 96 millions d'euros en 2005, 86 en 2006, 71 en 2007, 80 en 2008, 70 en 2009. On est très loin des 100 millions d'euros de crédits promis par la LME. Ces restrictions drastiques auront des conséquences dans les territoires- en milieu rural et dans les quartiers difficiles- tant en ce qui concerne la cohésion sociale qu'en matière de croissance et d'emploi.
Je rappelle qu'au moment de la LME nous avions beaucoup discuté avec le Gouvernement sur la question de l'affectation d'une partie de la TASCOM au FISAC et nous avions obtenu, contre l'avis du Gouvernement, que 15 % des recettes soit versé au FISAC, avec un plafond de 100 millions d'euros. Je constate que beaucoup ici regrettent de ne pas avoir voté la LME puisqu'ils regrettent les crédits que nous avions obtenus à l'époque !
Elisabeth Lamure, pas de provocation ! L'étranglement financier du FISAC résulte avant tout d'un effet pervers de la réforme de la taxe professionnelle.
On ne peut que s'inquiéter de la diminution des crédits. Il y a un certain nombre de collectivités qui n'ont pas reçu de financement du FISAC depuis deux ans. Elles voient des artisans et des commerçants qui se sont engagés dans des investissements après avoir reçu un avis favorable à leur projet, mais qui ensuite ne reçoivent pas les aides attendues parce que l'État ne débloque pas les fonds. Si l'enveloppe diminue en 2012 par rapport à 2011, tous ces problèmes vont s'aggraver. Il faut donc réévaluer les crédits du FISAC pour obtenir au moins le maintien des crédits au niveau de l'année dernière.
Je voudrais attirer l'attention sur la situation particulière des buralistes, singulièrement dans les départements frontaliers. L'État, en augmentant le prix du tabac, pénalise un type de commerce qui, en milieu rural, joue un rôle qui va bien au-delà de la seule vente du tabac. Ces commerces ont beaucoup diversifié leur offre et jouent un rôle éminemment social.
À six mois de l'élection présidentielle, nous devons éviter de jouer à des jeux de rôle. Nous avons un devoir de cohérence et de crédibilité. J'ai entendu notre collègue Daniel Dubois et je veux lui rappeler qu'une proposition de loi sur le numérique, signée par nos collègues Hervé Maurey et Philippe Leroy, doit être très prochainement déposée sur le bureau du Sénat. Elle part du constat que le compte n'y est pas et qu'il faut changer la position du Gouvernement qui attribue les zones rentables aux opérateurs privées et les autres zones, aux collectivités locales. Peut-être que la région Picardie, concernant non pas le déploiement du numérique mais le financement des études, n'est pas assez présente. Je n'en suis pas sûr mais au fond peu m'importe. Ce dont je suis sûr, c'est qu'en Rhône-Alpes, sur un budget de 123 millions d'euros, l'État a versé douze mille euros. Aujourd'hui, le fonds d'aménagement numérique du territoire n'est pas financé, c'est un fait.
À l'inverse, j'ai beaucoup apprécié l'intervention de notre rapporteur Gérard Cornu et je tiens à le remercier pour la cohérence de ses propos. Il est dans l'opposition sénatoriale et, c'est normal, il soutient le budget 2012 du Gouvernement ; mais, sur le FISAC, son attitude est constante et doit nous servir d'exemple. En période de crise, comme celle que nous traversons, nous comprenons tous bien qu'il ne peut pas y avoir autant de crédits qu'on pourrait le souhaiter. Mais quand il est question de La Poste, du numérique et du FISAC, de ces outils fondamentaux d'aménagement du territoire, la réduction des crédits frappe de plein fouet les zones rurales en déprise. Nous devons donc être capables de surmonter nos oppositions politiques pour défendre une structure comme le FISAC qui permet de lutter contre une France à deux vitesses.
Je veux illustrer ce qui vient d'être dit par un exemple concret. Je suis maire d'une ville de 9 000 habitants, qui a la chance d'offrir encore des services de proximité dont profite une zone rurale de 30 000 habitants. L'État nous accompagnait depuis plusieurs années à travers une convention FISAC, mais, alors que nous en sommes à la troisième phase, l'État a répondu présent certes, mais avec une diminution des crédits de 50 %. Je suis obligé désormais de faire l'avance des crédits de l'État pour que les actions collectives portées par l'association de commerçants disposent de la trésorerie nécessaire. Compte tenu du contexte, je suis prêt à discuter pour savoir si les aménagements collectifs doivent faire partie des priorités, mais on ne peut ignorer que ces aménagements sont au service de la desserte commerciale et sont parfois nécessaire à la viabilité d'un projet. Si l'État se retire de leur financement, les collectivités locales ne pourront se substituer à lui indéfiniment.
Je voudrais simplement demander au rapporteur pourquoi il qualifie les aménagements urbains de dévoiements des missions du FISAC.
Je veux répondre à notre collègue Didier Guillaume. Je le rejoins sur le devoir de cohérence mais je ne retire pas mes propos. Le FANT doit être doté, mais il y a bien deux milliards provenant du grand emprunt qui vont amorcer la pompe. Dans la Somme, l'État intervient dans le financement des travaux, et pas seulement des études, à hauteur de 39,9 %. Quand il existe des éléments positifs, il faut aussi le dire !
Je veux rendre hommage à l'état d'esprit et à la franchise du rapporteur pour avis. Mon expérience de maire d'une ville de 7000 habitants montre qu'il y a la nécessité de trouver un équilibre et de faire vivre ensemble le petit commerce et la moyenne distribution. Il faut que la grande distribution puisse alimenter le FISAC et nous pourrions présenter un amendement sur ce point. Si nous ne trouvons pas un moyen de renforcer les crédits du FISAC, c'est le tissu local des petites entreprises qui va en pâtir.
Nous devons réfléchir à un abondement des crédits du FISAC. Des projets validés techniquement ne peuvent pas être gardés sous le coude jusqu'en 2013 ou 2014, parce que quasiment tous les crédits 2012 seraient déjà pré-engagés par le stock de projets déjà validés et reportés.
Toutes vos observations vont finalement dans le sens de mon rapport. S'agissant de la taxe sur les grandes surfaces, elle existe avec la TASCOM, mais son produit va désormais aux collectivités locales. Évidemment chacun regrette que les recettes du FISAC soient insuffisantes au regard des besoins. J'ai moi-aussi apprécié l'intervention de Didier Guillaume : il y a un devoir de crédibilité. Il sera sans doute difficile de faire passer cette année un amendement semblable à celui de l'année dernière. S'agissant des opérations urbaines, je n'ai pas parlé de dévoiement. Simplement, dans un contexte de budget contraint, on est bien obligé d'opérer des choix. Or, pour les aménagements urbains, on peut trouver des subventions ailleurs qu'au FISAC, alors que, pour l'aide aux petits commerçants en zone rurale et en zone urbaine sensible, seul le FISAC intervient. Enfin, pour donner quelques chiffres, sur le premier semestre 2011, sur une dotation de 64 millions d'euros, le montant des engagements au titre du FISAC s'élève à 50 millions d'euros, dont 18,4 millions pour les opérations urbaines (128 opérations) et 20,2 millions pour les opérations réalisées en milieu rural (476 opérations).
J'ai choisi de m'intéresser cette année, au sein de la mission « Économie », au programme « Tourisme », qui regroupe une partie des moyens consacrés par l'État au développement de ce secteur essentiel pour notre économie nationale.
Afin de préparer ma communication, j'ai procédé à un certain nombre d'auditions et ainsi rencontré M. Thierry Baudier, ancien directeur de Maison de la France et aujourd'hui délégué général du club France Terre de Tourisme, qui réunit 150 députés et sénateurs. J'ai également auditionné M. Jacques Augustin, sous-directeur du tourisme, et je me suis entretenu avec notre collègue Jean Besson, qui est président du comité régional du tourisme de Rhône-Alpes.
En ce qui concerne les principales tendances de l'économie touristique, ce domaine se confirme comme étant un secteur résistant à la crise. La révision méthodologique des comptes satellites du tourisme, qui était en cours depuis plusieurs années, a enfin abouti. Elle conduit à réévaluer à la hausse l'importance économique du tourisme. L'indicateur mesurant traditionnellement la part du tourisme dans le PIB, qui s'élevait à 6,2 % pour la dernière année connue, c'est-à-dire 2007, s'établit à 7,1 % en 2010.
Quelques chiffres-clefs permettent de mesurer l'importance du tourisme dans l'économie française. Les recettes touristiques ont été de 35,1 milliards d'euros en 2010. Bien qu'en baisse de 1,1 % par rapport à 2009, elles dégagent un solde positif de 6,1 milliards d'euros, qui fait du tourisme le premier poste excédentaire de la balance des paiements. Le secteur du tourisme emploie 857 000 salariés au 31 décembre 2010, soit une création de 16 500 emplois sur l'année, en hausse de 1,7 % par rapport à 2009. Il convient d'ajouter à ce chiffre 140 400 emplois non salariés, soit un total de près d'un million d'emplois.
L'importance du tourisme dans l'économie française contraste avec la modicité des crédits qui lui sont consacrés. Le programme « Tourisme » est l'un des plus petits programmes budgétaires. Pour 2012, sa dotation est présentée en réduction marquée par rapport à 2011. Les autorisations d'engagement diminuent de 52,8 millions d'euros à 43,2 millions d'euros, soit une baisse de 18,3 %. Les crédits de paiement diminuent de 50,9 millions d'euros à 44,7 millions d'euros, en baisse de 12,3 %. La diminution était déjà de 9,6 % l'an dernier, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement.
Cette baisse s'explique, principalement, par l'achèvement de l'opération de participation à l'Exposition universelle de Shangaï, entre mai et novembre 2010, qui a été un grand succès. Le pavillon de la France a été le bâtiment le plus visité, avec 10,2 millions de visiteurs, devançant même le pavillon chinois. L'essentiel des 22,7 millions d'euros de subventions imputés sur le programme « Tourisme » a été versé en 2009 et 2010. Un reliquat de 3,7 millions d'euros était encore prévu en 2011, pour la déconstruction et le recyclage du pavillon, qui sera réduit à 880 000 euros pour 2012.
La baisse du montant du programme s'explique également par la réduction des crédits inscrits en 2012 au titre de la contribution de l'État au financement des volets « Tourisme » dans les contrats de projets État-régions (CPER). Les autorisations d'engagement prévues pour les CPER diminuent de 6,6 à 4,8 millions d'euros, et les crédits de paiement de 6,1 à 5, millions d'euros.
Toutefois, il faut souligner que le soutien de l'État à la politique du tourisme ne se limite pas aux seuls crédits du ministère en charge du tourisme. Nous disposons, pour la première fois cette année, d'un document de politique transversale qui recense les crédits consacrés par d'autres ministères à la politique de soutien de l'activité touristique. Le montant total des crédits, répartis entre 24 programmes relevant de 12 missions différentes, s'élève pour 2012 à 1,9 milliard d'euros en autorisations d'engagement et à 2 milliards d'euros en crédits de paiement. Le lien entre ces crédits et la politique du tourisme semblent parfois très indirect, comme dans le cas des crédits consacrés aux infrastructures et services de transport, ou à la politique d'aménagement du territoire. Mais plus que leur montant total, qui dépend inévitablement des conventions retenues, c'est leur évolution au cours des prochaines années qu'il sera intéressant de suivre.
Pour en revenir aux crédits du programme « Tourisme », ceux-ci sont répartis en trois actions d'importance très inégales. Un montant de 35,6 millions d'euros en crédits de paiement, soit 82,5 % du total du programme, est affecté à l'action 1 « Promotion de l'image de la France ». Elle correspond pour l'essentiel à la subvention pour charge de service public de l'opérateur public Atout France, qui s'élève à 34,1 millions d'euros. Il s'agit d'un groupement d'intérêt économique résultant de la fusion en 2009 de Maison de la France, chargée de la promotion de l'image de la France à l'étranger, et d'Odit France, chargé de l'ingénierie touristique. Atout France, qui dispose de 32 bureaux à l'étranger, doit réussir à prendre pied sur les marchés émergents du tourisme, les plus dynamiques, tout en conservant la part de la France dans les marchés matures.
Atout France a déployé en 2011 la nouvelle marque de destination de notre pays, baptisée « Rendez-vous en France ». L'agence a également mis en place cette année un nouveau site internet grand public faisant office de vitrine commerciale de la diversité de l'offre touristique française, qui sera progressivement enrichi grâce à l'apport direct des départements et des régions.
Je ferai une observation concernant le budget d'Atout France. Celui-ci fait largement recours au partenariat : sur un budget total de 76,4 millions d'euros pour 2011, la subvention pour charges de service public devrait s'élever à 34,7 millions d'euros et les ressources issues du partenariat à 36,1 millions d'euros. Cet effet multiplicateur est intéressant, mais suppose le maintien à un niveau suffisant de la subvention de l'État. Si celle-ci devait diminuer davantage, c'est la crédibilité même d'Atout France vis à vis de son millier de partenaires qui se trouverait compromise.
Je veux vous donner mon avis sur la décision récemment annoncée par le Gouvernement de relever de 5,5 % à 7 % le taux réduit de TVA, avec un certain nombre d'exceptions pour les biens et services de première nécessité. Cette mesure peut être acceptée, car elle ne remet pas en cause le bénéfice du taux réduit de TVA pour la restauration, qui a produit des effets en termes de création d'emplois. Surtout, par sa portée générale, elle évite de stigmatiser la profession concernée.
En revanche, je suis plus critique s'agissant la taxe de 2 % sur les nuitées de 200 euros ou plus, qui a été instaurée dans le cadre de la loi de finances rectificative du 19 septembre dernier. Cette taxe, initialement ciblée sur les hôtels de luxe des catégories 4 ou 5 étoiles, représentant 5 % du parc hôtelier mais 20 % du chiffre d'affaires, est désormais calée sur un seuil qui ne correspond pas forcément à la notion de luxe. A Paris, 70 % des nuitées seraient concernées. La presse s'est faite l'écho de l'intention du Gouvernement de supprimer cette taxe, afin qu'elle ne s'ajoute pas au relèvement du taux réduit de TVA. Je demanderai au Ministre de nous confirmer cette information, et de nous en préciser les modalités.
Je voudrais, pour finir, évoquer le problème du vieillissement du parc des hébergements touristiques. Le problème est particulièrement crucial pour les résidences de tourisme, à l'issue de la période de défiscalisation de 9 ou 18 ans qui a suivi leur construction. On se retrouve ainsi, dans les stations de tourisme, avec des hébergements disponibles, qui ne font plus l'objet d'aucune offre locative. Ces logements sont obsolescents, notamment au regard des normes environnementales, et leurs structures de propriété sont éclatées.
Un groupe de travail a été mis en place au mois de février dernier, associant des élus du littoral et de la montagne, afin de bâtir un plan d'action pour la rénovation de l'immobilier de loisir. Ce plan s'appuierait sur une boite à outils juridiques et financiers mise à la disposition des élus pour piloter la rénovation, en s'inspirant des techniques utilisées pour la rénovation urbaine. La création d'une nouvelle forme de contrat de location touristique et l'évolution du mode de gestion des copropriétés à vocation touristique sont à l'ordre du jour. La maîtrise d'ouvrage de cette réflexion a été confiée à Atout France. L'expérimentation dans certaines stations pilotes doit permettre de dégager une typologie des problématiques et des réponses pouvant être apportées.
En conclusion, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie ».
Serait-il possible d'avoir un bilan de l'action d'Atout France ? Les grandes collectivités territoriales font aussi souvent de la communication touristique, et il en résulte un certain manque de cohérence. L'exposition universelle de Shangaï est une illustration de cette absence de coordination dans la prospection des marchés étrangers.
Vous avez appelé à la suppression de la taxe de 2 % sur l'hôtellerie de luxe. Nous pourrions déposer un amendement en ce sens. Par ailleurs, beaucoup d'hôteliers ont des difficultés à réaliser les investissements nécessaires pour la mise aux normes de sécurité ou d'accessibilité. Nous avons besoin d'une étude poussée des conséquences économiques de ces exigences de mise aux normes. Je suis enfin favorable à l'audition par notre commission du président et du directeur général d'Atout France.
Vous avez évoqué la diminution de 12 % des crédits de paiement du programme « Tourisme », et celle de 18 % des autorisations d'engagement. Cette baisse très forte est préoccupante pour l'avenir. La France est encore la première destination touristique mondiale, mais ce n'est que la troisième en termes de recettes. Je m'inquiète, notamment, de l'absence d'une politique de soutien de l'État face à la disparition programmée de l'hôtellerie familiale et au vieillissement des résidences de tourisme. La baisse de 17 % des crédits consacrés à la politique du tourisme social est également préoccupante, alors que 3 millions de Français ne sont pas partis en vacances en 2011. Au final, je ne porte pas sur le programme « Tourisme » un regard aussi favorable que notre rapporteur pour avis, et je n'en voterai pas les crédits.
Le Gouvernement prévoit la mise en place de nouvelles normes de classement pour les offices de tourisme, qui excluraient les offices une étoile. Ceux-ci perdront en conséquence leur droit à subvention, alors qu'ils sont souvent animés par des bénévoles et situés dans des zones fragiles.
Le rapporteur pour avis a estimé que le secteur hôtellerie-restauration est capable de voler de ses propres ailes...
Quoiqu'il en soit, la mise en place d'une mesure comme la TVA à 5,5 % pour la restauration montre que cette émancipation a ses limites.
A ce propos, je serais curieux de connaître le bilan de la TVA à 5,5 % dans la restauration en matière de création d'emplois.
En ce qui concerne les activités d'Atout France, je vous indique que cette agence à l'obligation d'établir un rapport d'activité annuel. Je vous renvoie par ailleurs au rapport d'information sur l'action d'Atout France fait en juin dernier par notre collègue de la commission des finances André Ferrand, en association avec notre collègue Michel Bécot. Je souscris également à votre suggestion d'une audition des dirigeants d'Atout France par notre commission.
En ce qui concerne le classement des offices de tourisme, il y a effectivement un problème pour ceux qui sont les héritiers des syndicats d'initiative dans les petites communes. Je vais interpeller le ministre pour savoir ce qui est prévu pour eux en matière de liberté d'enseigne. Auront-ils le droit de continuer à utiliser l'appellation d'office de tourisme ?
Malgré la baisse des crédits, j'estime à titre personnel que l'économie du tourisme peut néanmoins trouver ses équilibres. Mais il existe des domaines où une politique volontariste est nécessaire, tels que la petite hôtellerie en milieu rural ou la rénovation des capacités d'accueil du tourisme social.
En ce qui concerne le bilan de la TVA à 5,5 % dans la restauration, je vous renvoie au rapport de notre collègue Michel Houel, qui concluait à un effet positif en termes d'emplois.
En guise de conclusion, j'insisterai sur les besoins en formation aux langues étrangères et à l'accueil des touristes en France, car notre pays souffre d'un véritable déficit en la matière. La parole est maintenant à Evelyne Didier.
J'ai souhaité porter mon attention, dans le cadre de ce rapport pour avis, sur les missions et les moyens de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), en abordant le sujet sous l'angle particulier de la protection des consommateurs. En effet, la relation de confiance entre les consommateurs et les professionnels traverse aujourd'hui une crise grave, qui se manifeste par un sentiment de vulnérabilité chez les consommateurs. Cela alimente une demande forte d'intervention des pouvoirs publics pour garantir leurs intérêts économiques et leur sécurité. Le Sénat va d'ailleurs examiner prochainement un projet de loi sur la protection du consommateur, qui prétend renforcer la DGCCRF, tant au niveau de ses champs d'intervention que de ses pouvoirs.
Ma question est donc simple : la DGCCRF, après cinq ans de RGPP, est-elle en état de remplir effectivement le rôle renforcé que la loi veut lui donner pour répondre à la demande de sécurité économique qu'expriment nos concitoyens ?
J'aurais aimé répondre « oui ». Malheureusement, mon sentiment est que la DGCCRF est aujourd'hui une administration sinistrée.
Tout d'abord, elle est face à ce qu'on pourrait appeler un « effet de ciseaux » entre ses missions et ses moyens.
D'un côté, loi après loi, directive européenne après directive, on charge un peu plus sa barque en lui confiant de nouvelles missions. Prenons l'exemple du projet de loi sur la protection des consommateurs dont je viens de parler. Ce texte crée de nouvelles règles pour encadrer les relations d'affiliation dans le domaine de la grande distribution entre les commerçants indépendants et la tête de réseau dont ils font partie. L'idée en soi est intéressante et ces règles, j'espère bien que le Sénat les durcira pour enfin s'attaquer aux monopoles locaux. C'est bien entendu la DGCCRF qui en contrôlera le respect. Le texte prévoit aussi d'étendre les indications géographiques protégées aux produits artisanaux et industriels. Pourquoi pas. Mais qui vérifiera que ces nouvelles indications d'origine sont bien respectées ? La DGCCRF encore une fois. Le texte propose également d'étendre les missions de contrôle aux activités de syndic de copropriété et à l'exercice de la profession de diagnostiqueur. Très bien. On sait qu'il s'agit de secteurs où les abus sont nombreux. Et c'est donc une nouvelle mission très lourde qui est ainsi donnée à la DGCCRF.
En résumé, si l'on met bout à bout toutes ces missions nouvelles, et qu'on se souvient qu'elles s'ajoutent à celles créées par la loi de modernisation de l'économie, puis par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, puis par la loi sur le crédit ; si l'on tient compte en outre que la législation européenne impose chaque année à la DGCCRF des contrôles sur un nombre croissant de produits alimentaires et non alimentaires, alors le tableau qu'on obtient est celui d'une DGCCRF qui croule littéralement sous les missions nouvelles.
Dans le même temps, et c'est la deuxième lame de l'effet de ciseaux, la DGCCRF voit, année après année, ses crédits et ses effectifs baisser. En 2012, elle perdra une centaine d'agents. Entre 2008 et 2012, ses effectifs seront passés de 3562 à 3053 agents, soit une baisse de 15 %.
Comment la DGCCRF fait-elle face à cet écart croissant entre le champ des contrôles qu'elle doit effectuer et les moyens dont elle dispose pour les mener à bien ?
Le discours officiel est que tout va bien, la réorganisation des services permettant de dégager des gains de productivité et d'adapter les moyens aux missions grâce à une efficacité accrue.
Je ne partage pas cet optimisme.
J'ai en effet pu constater, en premier lieu, que la DGCCRF a organisé son programme de contrôle des produits et des acteurs de marché de telle sorte que, par définition, les moyens soient toujours en quantité suffisante. Concrètement en effet, le programme de contrôle de la DGCCRF est défini chaque année sur la base d'une directive nationale d'orientation qui fixe les champs de contrôle prioritaires. Par exemple, en 2011, la DGCCRF a fait porter son effort de contrôle sur quelques thèmes comme la mise en oeuvre de la loi sur le crédit à la consommation, les services personnalisés, les nouvelles formes de marketing et de consommation numérique avec notamment la question de l'indépendance commerciale des comparateurs de prix ou encore la mise aux normes des ascenseurs. Avoir des priorités, c'est très bien, mais dans les faits des pans entiers des échanges échappent chaque année aux contrôles parce qu'ils ne sont pas prioritaires. Les moyens ne manquent donc jamais, puisque ce sont les missions qui s'adaptent aux moyens et non l'inverse.
De plus, il y a lieu de penser que la qualité des contrôles effectués a tendance à se dégrader et que cette baisse de qualité est masquée par des indicateurs de performances purement quantitatifs. Il est d'ailleurs intéressant de constater que l'économie de marché dérégulée développe un fétichisme de la performance chiffrée qui n'a d'équivalent que dans les régimes de planification économique les plus administrés ! La DGCCRF partage ce culte du chiffre et affiche ainsi des indicateurs de performance éblouissants, dont le ministre se félicite. En 2009, par exemple, 900 000 contrôles ont été effectués. Près de 150 000 anomalies ont été constatées.
Mais à quoi correspondent réellement ces contrôles ? Autrefois, les contrôles menés par la DGCCRF étaient de vraies enquêtes. Une enquête, c'est un contrôle approfondi, qui se donne les moyens de vérifier le respect des règles au-delà des simples apparences. Par exemple, un enquêteur de la DGCCRF va vérifier que les marchandises stockées par un restaurateur correspondent bien aux factures d'approvisionnement présentes dans la compatibilité et aux plats figurant sur la carte. De telles enquêtes ont aujourd'hui disparu car elles prennent du temps. Aujourd'hui, on demande de plus en plus aux agents de faire de simples inspections, c'est-à-dire de vérifier un certain nombre de points prédéfinis à partir d'une grille d'évaluation standardisée. On va leur demander, par exemple, de faire le tour des restaurants du secteur pour vérifier si les restaurateurs apposent bien sur leur vitrine la vitrophanie suivante : « la TVA baisse, les prix aussi ». En une heure, un agent peut ainsi contrôler quelques dizaines de restaurants, avec un effet marginal sur le bien-être des consommateurs, mais un impact très positif sur les statistiques de performances du ministère.
Mon sentiment est donc que la DGCCRF est en train de passer d'une activité de police économique dans le domaine de la concurrence et de la consommation à un simple travail d'audit et d'accompagnement des entreprises. Je ne suis pas certaine que cela constitue la réponse appropriée au sentiment de vulnérabilité des consommateurs et à la demande forte de protection que j'évoquais au début de mon intervention.
En conclusion, je vous propose d'émettre un avis défavorable aux crédits de la mission « Économie ».
L'examen du projet de loi sur la protection du consommateur sera l'occasion d'approfondir ce débat.
On ne peut pas augmenter les missions et baisser les crédits indéfiniment : il faudra bien le rappeler au ministre. Ceci étant, donner un avis défavorable aux crédits de la mission me paraît excessif.
Je partage le constat qui a été fait. Plus de missions, moins de moyens : on ne peut pas continuer indéfiniment ainsi.
Je suis persuadé non seulement que les missions nouvelles ne pourront être remplies, mais que les missions actuelles et anciennes ne pourront plus l'être non plus. C'est une application aveugle de la RGPP. Tant pis pour le consommateur !
Rationaliser la manière de travailler sur le terrain, c'est possible. En revanche, lors de l'examen du projet de loi sur la protection du consommateur, nous devrons demander à l'État de s'engager à mettre les moyens correspondant aux nouvelles missions.
Ces baisses de crédits signifient aussi qu'on met le personnel de la DGCCRF dans une situation impossible, avec du stress et malheureusement parfois des arrêts de travail.
Ne faisons pas croire aux consommateurs qu'ils sont moins bien protégés aujourd'hui qu'il y a vingt ans ! Sur les moyens, il y a encore des économies à faire. Suite à l'Encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) par exemple, on continue à faire encore aujourd'hui tous les tests sur tous les animaux qu'on abat !
Un commentaire d'ordre général : je constate que le contenu des rapports n'a pas tellement changé. Ce sont les avis et les conclusions qu'on en tire qui évoluent.
La principale chose à retenir de mon rapport, c'est qu'il y a un effet de ciseaux entre les moyens et les missions de la DGCCRF. Concernant les crédits, ils passent de 69 à 67 millions d'euros pour la régulation concurrentielle des marchés, de 120 à 115 millions pour la protection économique du consommateur et restent stables à 41 millions pour sa sécurité. Et cette baisse s'ajoute à celle des années précédentes. Or, la DGCCRF est un acteur essentiel, tant pour ses contrôles de terrain que pour activité de création normative. Il faudra bien que le ministre s'engage sur les moyens. Concernant les contrôles vétérinaires, c'est une mission des services vétérinaires et non de la DGCCRF. Enfin, je suis d'accord pour dire qu'il ne faut pas exagérer les risques : la France est un pays où les consommateurs sont plutôt bien protégés. Mais faisons attention à conserver ce niveau de sécurité ! Je voudrais d'ailleurs proposer que la commission mette en place un groupe ou une mission de contrôle pour approfondir la question des missions, des moyens et de l'organisation de la DGCCRF. Cela nous permettrait de nous prononcer en toute connaissance de cause.
Je souhaite vous présenter une proposition d'amendement visant à augmenter de 9 millions d'euros les crédits du FISAC, en prélevant cette somme sur les crédits du programme 305, qui bénéficie de 506 millions d'euros. C'est un message très fort que nous enverrions en faveur de l'aménagement du territoire.
L'action « stratégie économique et fiscale » ne devrait pas être trop affectée par cette ponction.
Peut-on imaginer que le soutien à cet amendement s'accompagne d'un non rejet des crédits du FISAC ?
Ce n'est pas possible. Le rejet ou l'acceptation porte sur l'ensemble des crédits de la mission.
L'amendement est mis au vote. Il est adopté à l'unanimité.
Puis, la commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie ».
La commission examine ensuite le rapport pour avis de MM. Ronan Dantec et Rémy Pointereau, sur les crédits de la mission « Politique des territoires » du projet de loi de finances pour 2012.
J'ai aujourd'hui l'honneur d'être le co-rapporteur pour avis de la mission « Politique des territoires » et c'est évidemment pour moi une première. Mon analyse débutera par un questionnement : comment, pour reprendre un terme entendu lors des auditions, « l'errance administrative » subie par l'aménagement du territoire au cours des dernières années pourrait-elle ne pas nuire à l'efficacité des politiques menées ? Au gré de la formation des gouvernements successifs depuis 15 ans, cette politique s'est trouvée rattachée à une grande diversité de ministères. Certaines options pouvaient se défendre, comme le rattachement au ministère de l'Intérieur ou à celui en charge du Développement durable, d'autres ont été plus surprenantes, comme par exemple le rattachement au ministère de la Fonction publique. La situation actuelle ne me paraît pas satisfaisante : la création en 2009 d'un ministère de l'Espace rural et de l'Aménagement du territoire, qui s'est trouvé fondu en 2010 dans un grand ministère de l'Agriculture, aboutit à tirer de fait la politique des territoires dans l'orbite principal de la ruralité. Il ne s'agit pas de nier qu'il y a un enjeu spécifique d'aménagement du territoire en zone rurale et, sur ce point, un certain succès des pôles d'excellence rurale (PER) est incontestable, mais il en résulte, me semble-t-il, un affaiblissement de la conduite politique et de la vision globale de l'aménagement du territoire. De fait, il apparaît bien qu'au vu de l'importance des enjeux agricoles en période de réforme de la PAC, l'aménagement du territoire a été considéré comme un enjeu plus secondaire, ce qui a d'ailleurs été illustré par les propos du ministre lors de son audition devant notre commission. Ayant interrogé M. Bruno Le Maire sur la pertinence du rattachement de l'aménagement du territoire à l'agriculture. Il m'a répondu qu'il ne verrait que des avantages à ce qu'un « puissant secrétaire d'État » soit placé à ses côtés pour s'en occuper, car la charge de travail afférente est lourde. Cette réponse spontanée se passe de commentaires.
Cette « ruralisation » de la politique des territoires ne me paraît pas répondre à la totalité des enjeux actuels. Nous sommes dans une nouvelle problématique de dialogue entre quatre types d'espaces : l'espace urbain, le périurbain influencé directement par le premier, les villes moyennes au rôle structurant majeur et l'espace rural proprement dit. Sans politique d'aménagement du territoire volontariste, nous assistons impuissants à l'étalement urbain, à la consommation de ressources foncières, à la dévitalisation des pôles urbains secondaires, et à un déséquilibre général du territoire avec d'un côté une grande région d'Île-de-France et des régions littorales en développement, notamment sur la façade atlantique, mais de l'autre côté, toujours autant de déserts français et de territoires en souffrance. Il faudrait aujourd'hui davantage de dialogues entre territoires, de vision partagée, et probablement définir de nouveaux outils de planification. C'est un enjeu majeur en période de crise. Or, à travers cette politique des territoires, l'État ne l'affirme ni politiquement, ni budgétairement.
Initialement, on pouvait observer dans le projet de loi de finances pour 2012 une certaine stabilité des crédits de la mission « Politique des territoires » : moins en autorisations d'engagement, qui diminuent de 4,6 % pour s'établir à 334 millions d'euros, mais plus en crédits de paiement, qui augmentent de 5,9 % pour atteindre 340,8 millions d'euros, ce qui correspondait à un rééquilibrage par rapport aux années précédentes. Mais un amendement adopté par l'Assemblée nationale a réduit les crédits de la mission de 3 millions, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, cette réduction s'imputant sur les moyens consacrés aux pôles de compétitivité et aux grappes d'entreprises. Il paraît pour le moins discutable, en période de crise, d'affaiblir d'abord notre capacité de réponse industrielle pour demain.
Cette absence d'ambition se confirme à propos des moyens de fonctionnement de la DATAR, dont je tiens à souligner l'importance en tant qu'administration de réflexion et de coordination. Il s'agit d'un organisme stratégique, et ce n'est donc pas là où l'on devrait prioritairement chercher à faire des économies. Or, la DATAR subit une diminution de 5 emplois pour 2012, qui s'ajoute à celle de 7 emplois cette année. Ses effectifs se trouvent ainsi ramenés à 136 équivalents temps plein, soit une baisse d'effectifs de 8 % en 2 ans. Permettez-moi de qualifier cette évolution de non-sens stratégique. Avec des moyens en diminution, la DATAR s'efforce néanmoins d'assumer son rôle de réflexion. C'est ainsi qu'elle a engagé depuis un an une mission de prospective baptisée « territoires 2040 », qui devrait déboucher en 2012. La première étape de cette démarche a consisté à problématiser sept systèmes spatiaux caractérisant la France. Nous sommes actuellement dans la deuxième phase, qui consiste à confronter les hypothèses dégagées avec les acteurs de terrain, sous l'égide des secrétaires généraux aux affaires régionales. Je serai particulièrement attentif aux propositions qui seront avancées dans le rapport final. Parmi les avancées conceptuelles justement imaginées par la DATAR, notons la mise en place des pôles métropolitains. Défendue par les associations d'élus et reprise par un amendement consensuel dans la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, cette notion de pôle métropolitain commence à trouver des concrétisations sur le terrain. Par exemple, la mise en réseau d'Angers, Brest, Nantes et Rennes au sein du pôle métropolitain Loire-Bretagne vient d'être votée dans les collectivités concernées. Je m'inquiète donc d'un certain affaiblissement de l'action de la DATAR au cours de l'année écoulée. Ainsi, aucun comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT), dont la DATAR assure le secrétariat, n'a été réuni depuis celui du 11 mai 2010. De même, je regrette qu'aucun lien organique n'ait été établi entre la DATAR et le Commissariat général aux investissements, directement rattaché au Premier ministre.
L'aménagement du territoire fait l'objet d'un document de politique transversale, qui rappelle que les crédits mobilisés vont bien au-delà de ceux de la seule mission « Politique des territoires ». En tout, c'est un montant de plus de 5 milliards d'euros en autorisations d'engagement qui est inscrit pour 2012 dans 34 programmes relevant de 16 missions budgétaires différentes. Les blocs les plus importants, en volumes de crédits, sont ceux relatifs à l'agriculture, à l'accompagnement des mutations économiques et au développement de l'emploi, à la formation supérieure et à la recherche universitaire, aux conditions de vie et à l'emploi outre-mer, aux concours financiers de l'État aux communes, et à la politique de la ville. La tendance générale est une forte baisse : le total des autorisations d'engagement est passé de 5,870 milliards d'euros en 2010 à 5,373 milliards d'euros pour 2012, soit une diminution de 8,5 % en trois ans. J'ai essayé d'identifier les baisses de crédits les plus marquées, même s'il n'était pas possible de reprendre toutes les lignes dans le détail. Je regrette, notamment, que le document de politique transversale, qui est censé nous éclairer, ne donne en fait guère d'explications aux baisses, parfois très sensibles, enregistrées pour certaines lignes. Elle est par exemple de l'ordre de 15 % pour le développement des entreprises et de l'emploi, et de 30 % pour les formations supérieures et la recherche universitaire. J'attire aussi l'attention, même si les volumes financiers sont plus faibles, sur l'effondrement des crédits alloués à la culture. Pour prendre un seul exemple, l'action 4 du programme 224, qui correspond à l'aide au développement culturel des territoires les moins favorisés (bibliothèque, résidences d'artistes), voit ses crédits s'effondrer de 50 % en autorisations d'engagement et de 74 % en crédits de paiement. Parallèlement, les crédits consacrés à la culture dans les contrats de programme État - régions CPER sont aussi en chute libre. Quand on connaît l'enjeu que représente la culture pour la cohésion sociale et l'attractivité des territoires les moins développés ou en mutation, il y a de quoi être inquiets, et nous attendons sur ce point les explications de la part du ministère de la Culture qui ne se trouvent pas dans le document de politique transversale.
Je souhaite aussi souligner la faiblesse de la réflexion sur les leviers fiscaux de l'aménagement du territoire, alors que nous devrions examiner les conséquences de la suppression de la taxe professionnelle. Nous pouvons penser, notamment, que l'une des conséquences de cette réforme sera de pénaliser les territoires en situation de rattrapage économique. Alors que certains d'entre eux, après des années 80 et 90 très difficiles, engrangeaient des recettes croissantes de taxe professionnelle, ils se verront désormais figés au niveau atteint en 2009, et ne pourront donc poursuivre leur rattrapage. Il est regrettable que la DATAR n'ait engagé aucun programme d'étude pour mesurer les conséquences de cette réforme, qui n'est pas d'intérêt secondaire.
Au sein de la mission « Politique des territoires », je me suis attaché à analyser plus particulièrement le programme 162, consacré aux « interventions territoriales de l'État », ou PITE. Le PITE a été créé à titre expérimental en 2006, pour regrouper un certain nombre d'actions qui présentaient un caractère interministériel marqué et avaient une dimension territoriale. Par exception aux principes de la LOLF, les règles de gestion du PITE sont fondées sur la fongibilité des crédits entre ses différentes composantes. C'est un programme qui présente donc une certaine souplesse, liée à un volontarisme affiché de l'État pour des actions ancrées sur des territoires spécifiques, avec souvent des enjeux environnementaux importants. Avant de détailler ces actions, je voudrais souligner, comme l'a aussi fait la rapporteure spéciale de la commission des Finances, Frédérique Espagnac, la faiblesse des indicateurs choisis, qui sont conçus davantage pour mesurer l'engagement des crédits que pour vérifier l'efficacité de l'action engagée. Il serait souhaitable et logique de déterminer d'autres critères d'évaluation à l'avenir, portant par exemple sur la mesure des améliorations environnementales.
L'action la plus importante du PITE, soit 28,6 millions d'euros en autorisations d'engagement, est constituée par le Programme Exceptionnel d'Investissement pour la Corse. D'un montant total d'un milliard d'euros sur la période 2007-2013, le PEI, qui est aussi abondé par d'autres crédits d'État, avance au rythme prévu, avec un taux de programmation de 46 % au 1er juillet 2011, et les échanges que j'ai pu avoir avec mes interlocuteurs corses comme avec les services du ministère de l'Intérieur confirment un assez bon déroulement de ce programme. Après avoir d'abord porté surtout sur les infrastructures de transport, l'effort est aujourd'hui accentué sur la distribution de l'eau et l'assainissement. Notons cependant que les petites collectivités territoriales de Corse ont du mal à fournir leur quote-part du financement des projets et qu'il y aura sans nul doute une réflexion complémentaire à mener quant à leurs ressources et à leurs moyens d'ingénierie.
La deuxième action du PITE est la reconquête de la qualité de l'eau en Bretagne, à laquelle sont consacrés 10,7 millions d'euros. D'un point de vue formel, les objectifs ont été atteints pour les 9 points de captage hors normes au regard de la concentration en nitrates, qui avaient entraîné une condamnation de la France par la Commission européenne : 5 d'entre eux ont été mis aux normes et les 4 autres fermés. Mais ces résultats immédiats ont été atteints principalement par une reconfiguration des réseaux de distribution et non par la reconquête de la qualité de l'eau. L'action a donc d'abord consisté à faire disparaître les atteintes environnementales les plus visibles. Maintenant étendu au plan de lutte contre les algues vertes, le PITE finance notamment les frais de ramassage des algues, pour un montant atteignant 700 000 euros pour 2012, correspondant à la part de 50 % de l'État, les 50 % restant étant à la charge des communes. Ce ramassage se heurte à des difficultés de stockage des algues, comme cela a été le cas à Fouesnant il y a quelques jours. Le plan de reconquête de la qualité de l'eau en Bretagne repose sur la mise en place de bassins d'action, définis par une contractualisation avec les acteurs. Deux projets ont été signés en 2011 pour la baie de Lannion, à la fin du mois de juin, et la baie de Saint-Brieuc, au mois d'octobre. Les contrats concernant les six autres baies devraient être signés en 2012. En tant que rapporteur pour avis, je m'interroge sur les indicateurs de performance qui seront demain adossés à cette action : taux de nitrates et de phosphore dans l'eau, quantités d'algues vertes ramassées... Nous devrons être vigilants quant à l'évaluation d'un plan mobilisant de la part de l'État, des collectivités territoriales, des agences de l'eau et de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) un montant total de 134 millions d'euros sur cinq ans.
La troisième action du PITE est constituée par le plan de sauvegarde du Marais Poitevin, auquel sont consacrés 4,8 millions d'euros. Cette politique engagée en 2002 avec un plan décennal pour le Marais Poitevin qui avait pour objet d'éviter une nouvelle condamnation de la France par la Commission européenne, à la suite de la condamnation intervenue en 1999 pour manquement aux directives Oiseaux et Natura 2000, est désormais institutionnalisée, avec la création de l'établissement public pour la gestion de l'eau et de la biodiversité du Marais Poitevin, créé par la loi du 12 juillet 2010 dite Grenelle II et constitué par décret le 29 juillet dernier. Il est doté de ressources propres par l'article 51 du projet de loi de finances. A terme, l'établissement public aura évidemment vocation à se substituer au PITE dans la conduite financière des opérations. Pour l'heure, j'ai toutefois le regret de constater que cette action du PITE, par la priorité qu'elle donne notamment à la construction de nouvelles « retenues de substitution », ne soutient guère l'opportunité d'une reconversion de l'agriculture vers des pratiques différentes : 1,6 million d'euros sont prévus en autorisations d'engagement pour les bassins, contre seulement 200 000 euros pour l'accompagnement des exploitants souhaitant limiter leurs prélèvements en eau. Autre exemple, la très faible progression de l'indicateur relatif à la « surface des prairies dans la zone du Marais Poitevin », qui passe de 35 250 ha en 2010 à 36 100 ha en 2012, montre les limites de l'action développée aujourd'hui.
La quatrième action du PITE est constituée par la mise en oeuvre du plan chlordécone en Martinique et en Guadeloupe, à laquelle sont consacrés 2,9 millions d'euros. Cette politique se trouve encore dans la première phase de constitution de la connaissance scientifique sur cette grave pollution des sols et des eaux par un pesticide très persistant. Elle a été étendue récemment à la surveillance des ressources halieutiques, également contaminées. Les chiffres fournis dans l'évaluation 2011 sont à ce titre très inquiétants avec des taux de non-conformité des analyses effectuées de près de 8 % pour les denrées animales d'origine terrestre et de près de 25 % pour la production halieutique Nous sommes donc en présence d'un enjeu central de santé publique, qui nécessite un suivi étroit de la contamination des populations, et un suivi prioritaire des travailleurs agricoles qui ont été exposés au chlordécone. La réponse à apporter à des populations pauvres se nourrissant dans leurs propres jardins familiaux, aujourd'hui contaminés, est un enjeu social très important, qui nécessitera l'engagement de l'État. Les associations locales font aujourd'hui de nombreuses prospectives de phytoextraction des sols pollués.
Enfin, je voudrais pour conclure évoquer la réforme prochaine de la politique européenne de cohésion. La Commission européenne a proposé de lui consacrer 336 milliards d'euros pour la période 2014-2020, soit 36 % du budget de l'Union européenne. Dans ses propositions législatives présentées le 5 octobre dernier, la Commission confirme sa proposition de créer une catégorie de régions en transition, dont le PIB par habitant serait compris entre 75 % et 90 % de la moyenne communautaire. Cette proposition est a priori intéressante pour la France, dont 9 régions seraient concernées. Mais l'accueil qui lui est fait par le Gouvernement français est mitigé car, tout en étant d'abord soucieux de contenir la progression du budget européen, il privilégie le maintien du budget de la PAC. Il me semble que l'on ne peut pas se satisfaire d'une approche aussi défensive. Nous analyserons avec attention les réponses de l'État aux nouvelles propositions formulées par la Commission européenne. Dans le contexte actuel, il est important de se demander en quoi la politique de cohésion peut participer à la résolution de la crise économique européenne. Les interventions des fonds structurels doivent être utilisées au service de l'efficience et de la modernisation des services publics de certains États, dont on voit à quel point leur faiblesse d'organisation peut avoir de très graves conséquences, par exemple dans la collecte de l'impôt. Il ne s'agit pas de s'inscrire dans des logiques purement punitives et de conditionnalités d'octroi des aides européennes, mais bien d'avoir une stratégie forte d'utilisation des fonds structurels pour participer à la résolution de la crise actuelle. C'est un enjeu majeur, et le fait que le Gouvernement ait donné la priorité à la défense du budget de la PAC n'est pas satisfaisant. Nous retrouvons justement, sur ce point, la difficulté découlant du fait d'adosser l'aménagement du territoire à l'agriculture, évoquée au début de mon propos.
Afin de marquer notre désaccord avec ce manque d'ambition et de cohérence du Gouvernement en matière d'aménagement du territoire, je vous propose, chers collègues, d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ».
En complément de la présentation de Ronan Dantec, j'axerai mon propos autour du programme 112 de la mission « Politique des territoires », qui est intitulé « Impulsion et coordination de la politique des territoires ». Le programme 112, avec un montant pour 2012 de 287,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 304,7 millions d'euros en crédits de paiement, constitue 85,9 % du total de la mission « Politique des territoires ». Ces montants sont en diminution de 5 % en autorisations d'engagement, mais en augmentation de 6 % en crédits de paiement. Toutefois, ces crédits du projet de loi de finances initial ont été réduits à l'Assemblée nationale par un « coup de rabot » à hauteur de 3 millions d'euros, portant pour 1 million d'euros sur les dotations des contrats de projets État-régions et pour 2 millions d'euros sur les dotations des grappes d'entreprises. En outre, le plan d'austérité annoncé par le Premier ministre comporte une réduction supplémentaire de 500 millions d'euros sur la totalité des programmes de l'État. La part revenant au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique des territoires » devrait s'élever à 1,5 million d'euros, portant vraisemblablement sur les crédits du fonds national d'aménagement et de développement des territoires (FNADT). Enfin, le périmètre de la mission « Politique des territoires » perd en 2012 la subvention à la Société du Grand Paris, d'un montant de 6 millions d'euros, qui lui avait été rattachée l'an dernier et qui se trouve désormais inscrite sur les crédits de la mission « Politique de la ville ».
Ces crédits en réduction permettent néanmoins la poursuite des politiques engagées. Les pôles de compétitivité fonctionnent bien. Depuis leur lancement en 2005, 71 pôles ont été labellisés. A l'issue de l'évaluation conduite en 2008, 6 d'entre eux ont été jugés insuffisamment performants et déclassées. Mais, en compensation, 6 nouveaux pôles de compétitivité ont été labellisés dans le domaine des écotechnologies. L'enveloppe prévue pour la période 2009-2012 s'élève à 1,5 milliards d'euros.
La politique des pôles de compétitivité est articulée avec celle des grappes d'entreprises. Alors que les pôles ont un positionnement axé sur la recherche-développement et l'innovation technologique, les grappes d'entreprises se positionnent sur des actions plus proches du marché. Un total de 126 grappes d'entreprises a été sélectionné à l'issue de deux appels à projets. Une enveloppe de 24 millions d'euros sur deux ans est mobilisée par le FNADT. Certaines grappes d'entreprises s'appuient sur des pôles de compétitivité, mais ce n'est pas le cas de toutes. Alors que dans le cas des pôles, l'aide publique peut financer de l'investissement, dans le cas des grappes, elle accompagne seulement l'animation des entreprises autour d'un champ thématique commun.
D'une manière générale, j'estime que les politiques d'appels à projets donnent de meilleurs résultats, grâce à l'émulation qu'elles favorisent, que les politiques de « guichets ». C'est cette procédure d'appels à projets qui a permis de sélectionner les pôles d'excellence rurale, en deux vagues successives de 379, puis 263 PER. Toutefois, 31 PER de la première vague ont été abandonnés, alors que les conventions des PER de la deuxième vague sont actuellement en cours de signature. L'enveloppe globale ayant été reconduite au niveau de 235 millions d'euros d'une génération à l'autre, le montant moyen d'aide par PER devrait être accru de 620 000 à 890 000 euros.
Cette année, je me suis intéressé à l'action de l'Agence Française pour les Investissements Internationaux (AFII). En effet, l'AFII se trouve sous la double tutelle du ministre chargé de l'aménagement du territoire et du ministre chargé de l'économie et des finances. A ce titre, elle reçoit pour 2012 une subvention de 7 millions d'euros inscrits au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », et de 14,8 millions d'euros inscrits au programme 134 « Développement des entreprises et de l'emploi ».
L'AFII apparaît comme une agence très dynamique. L'évaluation de ses actions qui a été faite au printemps 2011 montre qu'elle parvient à de bons résultats même en période de crise : 782 projets d'investissements étrangers en France ont été annoncés en 2010 contre 639 en 2009, soit une hausse de 22 %. Le nombre d'emplois induits s'élève à 31 815. Cette bonne performance s'explique largement par l'ensemble des mesures prises au cours des dernières années pour renforcer l'attractivité de notre pays : réforme du crédit d'impôt recherche en 2008, lancement du Grand Paris en 2009, réforme de la taxe professionnelle et lancement du programme national des investissements d'avenir en 2010. Ainsi, on dénombre en 2010 51 projets d'installations de centres de recherche-développement et 40 projets d'installations de quartiers généraux d'entreprises.
Toutefois, les investissements étrangers apparaissent relativement concentrés sur le territoire. Quatre régions accueillent 61 % des projets : l'Île-de-France (31 % du total des projets), Rhône-Alpes (16 %), Midi-Pyrénées (7 %) et Provence-Alpes-Côte d'Azur (7 %). Afin d'atténuer cette concentration géographique des investissements étrangers, la convention d'objectifs et de moyens de l'AFII lui assigne comme priorité la promotion des pôles de compétitivité et le soutien aux zones en mutations économiques. L'AFII, qui a désormais une notoriété bien établie, identifie les investisseurs étrangers et les rapproche ensuite du circuit des chambres de commerce et d'industrie et des collectivités territoriales.
Je souhaite aussi appeler votre attention sur le dispositif de la prime d'aménagement du territoire (PAT), qui s'inscrit dans le cadre communautaire des aides à l'investissement à finalité régionale (AFR). La carte française des zones AFR a été autorisée par la Commission européenne pour la période 2007-2013. Elle a fait l'objet d'une révision à mi-parcours en 2010, mais qui a maintenu constant son taux de couverture, soit 15,5 % de la population française.
Le dispositif de la PAT est financé pour 2012 par une dotation de 38,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 33 millions d'euros en crédits de paiement, soit des niveaux stables depuis 2010. Il a fait l'objet de critiques de la part de la Cour des Comptes, qui s'est interrogée sur le caractère réellement incitatif de cette aide. En effet, le montant de la prime peut paraître modique au regard du volume des investissements aidés. Mais c'est un élément de persuasion de la part de l'État, qui peut faire la différence dans la dernière ligne droite de la négociation de dossiers délicats. On estime que le dispositif PAT a permis en 2010 de créer 3 000 emplois et d'en maintenir 8 400.
C'est aussi dans le cadre de ce programme que le Gouvernement soutient des politiques indispensables à l'attractivité des territoires ruraux. L'accent est mis cette année sur l'amélioration de l'offre de soins en milieu rural. Le programme national de financement des maisons de santé pluridisciplinaires prévoit d'en financer 250 sur la période 2010-2013, à hauteur de 25 millions d'euros par an. Environ 200 maisons de santé ont été labellisées, mais elles sont encore loin d'être toutes en fonctionnement.
L'accord national « Plus de services au public », signé en septembre 2010 entre l'État et 9 opérateurs, est dans un premier temps expérimenté dans 23 départements. Les conventions départementales sont en cours de finalisation. Le principe consiste à trouver un montage opérationnel pour mutualiser les coûts, qui sera financé par la Caisse des dépôts et consignations et par les opérateurs eux-mêmes. L'expérimentation devrait permettre d'élaborer un cahier des charges en vue d'une généralisation en 2012.
Enfin, le programme national du très haut débit (PNTHD) présenté par le Gouvernement en juin 2010 a pour objectif de parvenir à une couverture de 100 % des foyers en 2025, avec un objectif intermédiaire de couverture de 70 % en 2020. Un appel à projets pilotes a débouché sur la sélection de 7 expérimentations associant collectivités et opérateurs. Un appel à manifestation d'intentions d'investissements a permis de connaître les intentions des opérateurs privés en ce qui concerne le déploiement de réseaux locaux à très haut débit : 3 400 communes sont concernées, regroupant, avec les 148 communes correspondant aux zones très denses, près de 57 % des ménages. Les schémas directeurs territoriaux d'aménagement numérique sont en cours d'élaboration, soit au niveau départemental, soit au niveau régional.
Une enveloppe de 2 milliards d'euros est prévue au sein du programme des investissements d'avenir, répartie entre 1 milliard de prêts pour les opérateurs, 900 millions de subventions pour les collectivités territoriales, et 100 millions d'euros pour l'offre satellitaire. Toutefois, cette enveloppe de départ ne permettra de financer que les premières années du programme national du très haut débit, dont le coût total est évalué entre 25 et 35 milliards d'euros. Il faudra donc trouver un financement pérenne pour le fonds d'aménagement numérique des territoires appelé à prendre le relais.
Globalement, le budget de la mission « Politique des territoires » se situe dans une perspective de contrainte budgétaire, à laquelle plus aucune action de l'État ne peut aujourd'hui échapper. Mais je crois qu'il a réussi à préserver les marges de manoeuvre permettant d'assurer la continuité de la politique de soutien aux territoires. Je vous propose en conséquent d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ».
L'absence de vision stratégique concernant l'aménagement du territoire se reflète dans l'évolution de la DATAR. Transformée en délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT) dans un premier temps, elle a retrouvé par la suite sa dénomination d'origine, mais ses moyens n'ont pas été rétablis. Il nous manque un véritable lieu de réflexion sur l'aménagement du territoire. Je rappelle, concernant le projet de schéma national des infrastructures de territoire sur lequel nous avons donné un avis, que la DATAR avait fait des propositions en 2003, concernant notamment les territoires fragiles.
S'agissant du chlordécone, pourquoi ne pas mettre en place un dispositif d'accompagnement des exploitants agricoles pour la reconversion des terres polluées ? Je suggère également de réaliser une cartographie affinée de la pollution des sols et des milieux marins, car des études semblent montrer que la contamination les atteint également.
Quelle est l'évolution du FNADT et de la dotation d'équipement des territoires ruraux, qui facilite les investissements des collectivités ?
Il ne faut pas oublier les effets négatifs que peut avoir une agriculture exagérément intensive : c'est ce qui a fait perdre au Marais Poitevin son label de parc naturel régional. Concernant le plan nitrates, la volonté de maintenir la capacité de production peut relever d'une vision de court terme : songeons aux sommes dépensées pour restaurer la qualité des eaux !
L'Agence française pour les investissements internationaux mène un travail efficace, par exemple pour trouver des repreneurs d'entreprises. Ils collaborent utilement avec Ubifrance. Pouvez-vous indiquer quels sont les effets de son action sur les investissements et la création d'emplois ?
S'agissant du chlordécone, il est prévu que la cartographie des contaminations soit réalisée. Certains terrains contaminés, notamment des jardins familiaux, risquent de rester incultes : il faudra trouver des alternatives. C'est également un problème de santé publique. Enfin, le FNADT dispose de 228 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 251 millions d'euros en crédits de paiement.
Je constate que, depuis quelques années, la DATAR tend à retrouver son rôle antérieur, mais je souhaiterais qu'elle puisse à nouveau présenter des perspectives sur dix à trente ans. Le FNADT connaît une baisse de 6,3 % de ses autorisations d'engagement et une hausse de 7,6 % de ses crédits de paiement. S'agissant de l'AFII, elle a permis la création ou le maintien de 31 932 emplois en 2008, 29 889 en 2010 et 31 815 en 2010.
Malgré l'omniprésence de l'aménagement des territoires dans les discours, les crédits sont faibles et relèvent du saupoudrage. Considérons la politique de santé : on est en train de laisser se constituer des déserts médicaux. Les primes financières ne sont pas suffisantes pour faire venir les étudiants en médecine dans les zones rurales. Quant aux maisons de santé, quel intérêt les élus ont-ils à les financer s'ils ne sont pas sûrs que des médecins viendront les occuper ? S'agissant du très haut débit, l'échéance de son déploiement en 2025 risque d'arriver trop tard, le territoire s'étant déjà désertifié d'ici là. Les crédits interministériels sont certes supérieurs à ceux de la mission, mais la politique d'aménagement du territoire manque de visibilité.
Je vous indique que les opérateurs télécoms se sont mis d'accord pour déployer de manière coordonnée un réseau commun dans les zones peu denses. On a pris l'habitude de prévoir un financement sur fonds publics pour ces zones, mais il est aussi utile de mettre la pression sur les opérateurs afin de les amener à agir en milieu rural, dans le cadre de conventions de partenariat.
On assiste à une dilution des responsabilités en matière de maîtrise d'ouvrage : l'État met les collectivités territoriales devant le fait accompli. Ainsi, celles-ci devront consacrer des sommes considérables aux nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse alors que les premières lignes ont bénéficié du financement de l'État. De la même manière, l'État a annoncé une contribution de 37 millions d'euros seulement pour le canal du Midi, alors que sa simple remise en état coûtera 200 millions d'euros. Enfin, les maisons de santé sont un leurre, car un médecin n'ira pas s'installer sur un site s'il ne dispose pas des moyens techniques qui lui donnent les moyens d'exercer son travail.
Avec la concentration des habitants dans les grandes villes et la fermeture des services publics dans les zones rurales, des pans entiers de nos campagnes se désertifient, même si certains lieux se régénèrent à proximité des grands centres. Le maintien des transports publics, des écoles, des bureaux de poste joue un rôle essentiel. S'agissant des médecins, on veut maintenir leur liberté d'installation alors que, comme les entreprises et les particuliers, ils ont bénéficié des aménagements et des services publics financés par l'État et que leur formation est financée sur les deniers publics : chacun doit-il dans notre société faire ce qu'il veut, sans se soucier des autres ? Nous devrions mieux prendre en compte l'intérêt général.
La DATAR devrait à nouveau jouer le rôle de chef de file de la politique d'aménagement du territoire : on en est loin. S'agissant de la fracture numérique, je rappelle que, lors de l'examen de la proposition de loi qui lui était consacrée, nous avons fait des propositions, malheureusement rejetées, tendant à permettre l'orientation vers l'équipement des zones rurales d'une partie des bénéfices réalisés en zones denses par les opérateurs. Enfin, les instituteurs sont nommés, même si c'est parfois difficile, dans les endroits où le besoin s'en fait ressentir : pourquoi ne pourrait-on pas faire de même avec les médecins, qui ont également été formés grâce à l'argent public ?
S'agissant du crédit d'impôt recherche, dont je soutiens le principe, il a été multiplié par trois depuis 2008 mais la recherche et développement n'a progressé que de 20 % dans le même temps. Je regrette profondément que le groupe PSA Peugeot Citroën, après avoir bénéficié du dispositif financé par des fonds publics, délocalise à présent sa recherche et développement.
L'enjeu du positionnement de la DATAR dans l'organisation de l'État est important. Nous devons aussi avoir une réflexion sur les outils les plus efficaces pour l'aménagement du territoire. Comment utiliser la fiscalité des entreprises pour en faire un outil d'aménagement du territoire, notamment au profit des villes moyennes ? Les grandes métropoles ont émergé, mais en asséchant relativement les ressources des villes moyennes situées dans leur orbite. La DATAR devrait travailler sur les mécanismes de péréquation qui doivent accompagner la suppression de la taxe professionnelle.
Tout n'est pas qu'une question de moyens financiers. Par exemple, les difficultés des services de santé en zone rurale sont aussi liées au numerus clausus, qui a été diminué il y a vingt ans. Je suis assez d'accord avec Evelyne Didier et Mireille Schurch sur l'intérêt de mettre en place des mesures coercitives pour l'installation des médecins. On planifie bien l'implantation des pharmacies, et j'estime que les étudiants en médecine sont redevables à leur pays.
La commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Politique des territoires ».