Nous avons à désigner un rapporteur sur le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral. J'ai reçu la candidature de M. Delebarre...
Ce texte est le plus important que nous ayons eu à examiner depuis des années. Compte tenu de ses conséquences, il serait opportun de commencer par un tour d'horizon au sein de la commission et de choisir le rapporteur parmi ceux qui représentent l'opinion majoritaire. Je n'ai rien contre M. Delebarre, mais le rapporteur doit refléter l'opinion de la majorité de la commission sur ce texte - à mon avis très pernicieux.
Nous avons toujours respecté la règle que le rapporteur rapporte l'opinion de la commission, quelles que soient ses opinions personnelles. Si nous ne votons pas le texte, M. Delebarre représentera l'opposition de la commission.
Sur un texte comme celui-là, il faut se donner le temps de la réflexion ; contre certaines instances qui voudraient que tout aille très vite, je suis un défenseur du temps parlementaire. Il a été acquis à la conférence des présidents que, même si ce texte est examiné en procédure accélérée, il fera l'objet de deux lectures devant chaque assemblée : c'est un engagement du Gouvernement. Ainsi, même si nous en faisons une première lecture en juillet, ce projet de loi reviendra devant nous en octobre ou novembre. Il serait d'ailleurs utile que les groupes en parlent, afin que les questions de cartes ne donnent pas lieu à un trop grand nombre d'amendements.
On prend le problème à l'envers : on commence par délimiter de grandes régions, en prévoyant que les départements disparaitront petit à petit...
Il n'est pas intéressant d'avoir de grandes régions - dont certaines aux contours bizarres - si on ne s'attaque pas d'abord aux compétences, sauf à avouer qu'il ne s'agit que de retarder de six mois les élections. Nos collègues Raffarin et Krattinger prônent dans leur rapport de grandes régions avec des compétences stratégiques il suffit de s'y reporter.
Nous ferions mieux d'en rester là, sinon nous allons avoir séance tenante le débat qui doit avoir lieu dans quinze jours ou trois semaines...
Nous avons obtenu, Monsieur Hyest, que deux lectures du projet aient lieu. En tant que rapporteur du texte sur les compétences, j'ai demandé que le débat à leur sujet ait lieu concomitamment.
Mon travail s'inscrit dans le droit fil du rapport Krattinger - Raffarin : je ne veux pas oeuvrer au dépérissement, à la dévitalisation ou à l'extinction des départements.
Confirmons donc la nomination de M. Delebarre ; l'important est que nous puissions rediscuter le texte en octobre ou novembre.
Quid de la période de comptes de campagne pour les prochaines élections régionales et cantonales ? Si en septembre ou octobre on décide de décaler les élections, le plan de financement s'étalera sur un an et demi. On marche sur la tête ; le Gouvernement, comme à son habitude, fait n'importe quoi. Nous devons débattre des incidences directes et indirectes de ce projet de loi.
Il y a des précédents : chaque fois que les élections ont été retardées, les comptes de campagne ont commencé un an avant la date effective.
M. Michel Delebarre est nommé rapporteur sur le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.
La commission examine ensuite le rapport de M. Alain Anziani sur la proposition de résolution n° 521 (2013-2014) de MM. Daniel Raoul et Raymond Vall tendant à modifier le Règlement du Sénat afin de rééquilibrer la composition des commissions permanentes.
Je donne la parole à M. Anziani, mais il est possible que les auteurs de la proposition de résolution décident au terme de notre réunion de la retirer.
Deux membres éminents de notre assemblée, MM. Daniel Raoul et Raymond Vall, ont déposé une proposition de résolution tendant à modifier le règlement du Sénat afin de rééquilibrer la composition des commissions permanentes. La réforme constitutionnelle de 2008 avait porté de six à huit le nombre maximal de nos commissions permanentes. Nous avons décidé en 2011 de créer la commission du développement durable par scission de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, ses soixante-dix-huit membres se répartissant à égalité entre les deux nouvelles commissions. L'expérience a montré que cet effectif de trente-neuf membres dans chacune n'était pas suffisant pour la charge de travail qui leur incombe, en particulier lorsqu'elles ont à examiner des textes complexes comme la loi dite « ALUR ». La proposition de résolution vise donc à changer le nombre de sénateurs par commission, sauf pour celles des lois et des finances, dont l'effectif resterait de quarante-neuf.
Les auditions que j'ai menées ont conduit à trois observations.
La première a trait au calendrier : certains de nos collègues se demandent en effet pourquoi examiner cette résolution juste avant le renouvellement du Sénat, plutôt que de laisser à la nouvelle majorité le choix de cette modification. Cette première objection en cache ou en recoupe une seconde : la scission de la commission de l'économie était-elle une bonne idée ? Certains posent la question de la réunification au nom de la connexité des sujets et de la rationalisation des moyens. Enfin, troisième observation, d'ordre pratique, si nous ne procédons pas à cette modification maintenant, nous devrons reconstituer en l'état nos commissions en octobre et nous devrons tout recommencer quelques mois plus tard.
Nous sommes l'une des commissions qui ont le plus de textes à examiner et nous n'avons que 49 membres ! La difficulté est de retirer des membres à certaines commissions, mais je ne vois pas en quoi diminuer le nombre des commissaires de certaines commissions pose problème. Certes, cette proposition n'est pas urgente, mais j'y suis favorable.
Lorsqu'on a tronçonné une commission pour en créer deux, j'étais perplexe : était-il pertinent de séparer les problèmes environnementaux des problèmes économiques ou industriels ? Mais les raisons qui ont motivé la scission n'étaient pas de cohérence... Je voterai contre la proposition : que ceux qui ont décidé la scission de la commission de l'économie en assument les conséquences.
Ce rééquilibrage est un cautère sur une jambe de bois : on retrouvera les mêmes problèmes de commissions qui se marchent sur les pieds. C'est ce que nous avions dit lors de la scission... Le système antérieur fonctionnait bien. Mieux vaut garder le système en l'état jusqu'après les élections sénatoriales et revenir ensuite aux six commissions. Nous voterons contre la proposition de résolution.
Nous n'étions pas favorables à l'augmentation du nombre des commissions lors de la révision constitutionnelle. On constate en lisant le règlement qu'il a fallu préciser à l'extrême les attributions de la commission du développement durable : elle traite des mêmes problèmes que celle des affaires économiques, mais d'un autre point de vue. Ayons le courage de reconnaître que la scission n'était pas une bonne idée, même si le développement durable est dans l'air du temps...
Le nombre de commissaires n'est pas en rapport avec le nombre de dossiers traités : les deux commissions qui ont le moins de membres, les lois et les finances, ne sont pas celles qui travaillent le moins !
On s'apercevra aussi que diminuer le nombre de commissaires dans certaines commissions posera problème.
Il y a deux débats différents sur cette proposition.
L'un, récurrent, sur la pertinence de la scission et l'opportunité de l'existence d'une commission du développement durable. À cet égard, je souligne que la commission créée s'intitule commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire. J'ai beaucoup insisté sur la présence du terme « aménagement » : selon moi, il faut beaucoup d'industrie et d'innovation pour faire un bon environnement. Je m'oppose à une écologie qui ne serait pas humaniste et oublierait qu'il n'y a d'environnement que par et pour l'homme.
Imagine-t-on un Président de la République qui formerait un Gouvernement sans ministre de l'environnement ? Et je ne suis pas sûr que la prochaine majorité, quel que soit le résultat des prochaines élections, supprime la commission du développement durable...
Daniel Raoul m'a dit toutefois qu'il retirerait sa proposition si ce matin une majorité se prononce contre.
L'autre problème concerne le nombre des commissaires par commission. Dès lors qu'il y a sept commissions, la proposition de résolution me paraît de parfait bon sens : toutes les commissions auraient le même nombre de membres. La commission de la culture et celle des affaires sociales se plaignent ? Mais si certains devaient se plaindre, ce serait nous qui avons à étudier la moitié des lois...
D'ailleurs, est-on plus efficace à soixante-dix qu'à cinquante ? Et encore faut-il que les commissaires soient présents aux réunions...
Le président a devancé mon propos : ce n'est pas en étant plus nombreux que l'on travaille mieux. Ainsi, le nombre des membres de la commission des lois est satisfaisant. Cette proposition de résolution est malvenue, puisqu'elle risque d'être refusée par la prochaine majorité. Laissons le nouveau Sénat décider !
Pour avoir siégé à la commission de l'économie avant la scission puis dans les deux commissions en question, je puis vous dire qu'à soixante-dix-huit il n'est pas facile de travailler. Quel sens y avait-il à scinder la commission de l'économie, alors que l'énergie, par exemple, continue à relever des affaires économiques tandis que son impact environnemental est étudié par la commission du développement durable ? Il en va de même du logement. L'aménagement est passé du côté du développement durable, mais l'urbanisme est resté aux affaires économiques. Puisque nous avons un ministère chargé de l'ensemble des questions d'énergie, pourquoi n'y aurait-il pas une commission correspondante ?
Il faudrait au reste que les commissions aient les moyens nécessaires à leur travail.
Le groupe UMP n'était pas favorable à la scission de la commission de l'économie en 2011. Il y a manifestement un problème d'absentéisme dans ces commissions.
La plupart des textes donnent lieu à la saisine de deux commissions, l'une au fond, l'autre pour avis, ce qui n'est guère valorisant.
Pourquoi nous précipiter sur cette résolution alors que nous sommes à quelques semaines d'un renouvellement du Sénat ? Le groupe UMP envisage la réunification des deux commissions, qui conduira aux réductions de dépenses qu'attendent nos concitoyens.
Il nous arrive souvent de demander l'avis des autres commissions !
En fait, les commissions sont trop nombreuses et pâtissent de l'absentéisme de leurs membres. De surcroît, la charge de travail est inégalement répartie entre les commissions.
Le problème n'est pas tant le nombre des commissions permanentes que celui des autres instances. Il n'y a pas grand monde à certaines réunions de délégations... À l'exception évidemment de la délégation à la décentralisation, n'est-ce pas, madame Gourault !
Et personne parfois dans certaines instances, comme la commission de contrôle de l'application des lois !
Cela rend parfois service d'avoir des places à proposer, en période d'élections...
La règle de l'équilibre du nombre de sénateurs par commission vient de l'Assemblée nationale : le nombre de députés est divisé par huit.
Quant à la création de la commission du développement durable, on n'imagine pas un Gouvernement qui ne comporterait pas de ministère consacré à ce domaine. Pourquoi en irait-il différemment ici ?
Il est vrai qu'il y a dans le travail des commissions un grand déséquilibre : les rapports législatifs sont fournis par la commission des lois à 42,16 % et par celle des affaires sociales à 25,37 % ; pour les rapports budgétaires et les rapports d'information, la commission des finances devance toutes les autres.
Dans l'ensemble, la commission des lois et celle des finances assument chacune quasiment le quart du travail législatif et de contrôle.
J'ai rapporté par ailleurs une proposition de résolution sur l'absentéisme dont je souhaite l'inscription à l'ordre du jour ; celle que nous examinons ce matin est, elle, inscrite en séance le 16 juin...
En ce qui concerne les moyens humains, trois administrateurs supplémentaires seront affectés aux commissions.
Nous proposons uniquement un amendement, de pure forme, qui modifie l'article 2.
L'amendement n° 1 est adopté.
La proposition de résolution n'est pas adoptée
Le sort de l'amendement examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Puis la commission examine le rapport de Mme Virginie Klès et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 553 (2012-2013) de MM. François Pillet et René Vandierendonck visant à créer des polices territoriales et portant dispositions diverses relatives à leur organisation et leur fonctionnement.
Nombre de personnalités éminentes se sont penchées sur le berceau de cette proposition de loi.
Les polices municipales ont été officialisées il y a vingt-cinq ans et continuent de se développer au fil des lois. Ce texte propose la fusion des corps de gardes champêtres et de policiers municipaux. Le nouveau corps serait celui des polices territoriales. La fusion se ferait à droits constants pour chacun des corps, l'ensemble des missions et des pouvoirs des gardes champêtres étant conservé : le texte prévoit bien de faire la somme des attributions des deux cadres d'emplois existants.
Le choix du nom de « policier territorial » répond au souci de créer une nouvelle entité, en allant dans le sens de l'intercommunalité et en ancrant ce corps de fonctionnaires dans les territoires. Il rappelle également que les policiers municipaux sont des fonctionnaires territoriaux, non des fonctionnaires d'État ou des supplétifs de fonctionnaires d'État. Certains ont, à l'inverse, défendu l'extension du titre de « policier municipal » afin de maintenir le lien entre les maires et ces fonctionnaires, et surtout d'éviter les coûts matériels d'un changement d'appellation. Étant pour ma part favorable au changement de dénomination, je vous présenterai les amendements nécessaires.
L'article 13 du texte propose de simplifier la rédaction des articles du code général des collectivités territoriales touchant le pouvoir de police générale des maires. Il est vrai qu'il donne en l'état l'impression d'un inventaire à la Prévert. Je propose toutefois de modifier cet article 13 en y remplaçant l'expression « moralité publique » par « prévention et surveillance du bon ordre », conformément à la rédaction du code de la sécurité intérieure. Il conviendrait également d'ajouter la police des campagnes aux missions générales des polices territoriales, afin de souligner que l'on conserve bien les missions spécifiques des gardes champêtres.
Ce texte comporte aussi un volet important sur les obligations de formation ; je proposerai, avec l'accord des auteurs, un amendement visant à y soumettre particulièrement les agents de surveillance de la voie publique (ASVP), pour lesquels aucune obligation de ce genre n'existe. Le texte prévoit également la formation des policiers municipaux et des gardes champêtres aux fonctions qu'ils n'exercent pas aujourd'hui.
Une école nationale de la police municipale est-elle pour autant nécessaire ? Elle aurait l'inconvénient de singulariser les policiers municipaux par rapport aux autres fonctionnaires territoriaux ; or, le Centre national de la fonction publique territoriale (Cnfpt) a souligné l'importance de formations communes pour développer une histoire et une culture communes, ainsi qu'une bonne connaissance réciproque de fonctionnaires qui seront amenés à travailler ensemble, notamment en matière de voirie, d'urbanisme, d'occupation de la voie publique. La formation commune n'empêche pas le Cnfpt d'améliorer ses formations, ni de passer des conventions avec la police et la gendarmerie nationales pour développer des formations techniques communes. Les policiers territoriaux sont des fonctionnaires territoriaux qui ont en plus une spécialité dans la sécurité.
Malgré des débats nourris avec l'administration, les auteurs du texte ont jugé bon que l'attestation de fin de formation initiale délivrée par le Cnfpt fasse partie intégrante du dossier d'agrément des policiers territoriaux. On a opposé une différence de nature entre l'agrément qui couvrirait le champ moral et l'attestation qui validerait des capacités professionnelles. Cette distinction n'est pas justifiée. Dans la pratique, la prise en compte des capacités professionnelles d'un candidat est plutôt favorable à son recrutement. En tant que maire, j'ai effectué un recrutement sur un poste d'animateur jeunesse. J'ai sélectionné un candidat sur ses capacités professionnelles. L'extrait de casier judiciaire que j'ai reçu plus tard indiquait qu'à 18 ans, ce jeune homme avait été interpellé pour conduite en état d'ivresse ayant provoqué un accident sans victime. Cela n'a pas empêché qu'il se rachète et développe les capacités professionnelles requises pour le poste. Si je n'avais pu considérer cette évolution, je ne l'aurais pas recruté. L'attestation complète le dossier d'agrément par des informations sur les capacités professionnelles et sur la personnalité du candidat. En cas de demande d'armement par le maire, elle jouera un rôle déterminant dans la décision du préfet. Parmi nos interlocuteurs, les procureurs se sont déclarés favorable à l'introduction de l'attestation dans le dossier ; les préfets y sont opposés ; le CNFPT y est favorable malgré un allongement probable du délai de titularisation des officiers territoriaux.
Un amendement prévoit que les agents de surveillance de la voie publique (ASVP) soient soumis à une formation avant d'assumer leurs fonctions sur le terrain.
Le texte favorise l'intercommunalité dans la mise en oeuvre des procédures. Il propose d'attribuer le titre d'officier de police judiciaire aux présidents d'EPCI. La fonction d'OPJ est peu utilisée par les maires ; il n'est pas utile de la généraliser.
La création d'un conseil intercommunal de sécurisation et de prévention de la délinquance n'empêchera pas la création de sous-commissions travaillant dans un cadre à géométrie variable : elles s'adapteront plus facilement aux évolutions de la délinquance.
Les conventions de coordination définiront les rapports de l'État avec les collectivités. Pratiquement tous les acteurs auditionnés se sont déclarés favorables à ce que ces conventions de coordination soient cosignées par le procureur, car son implication améliorera leur fonctionnement. La création d'un comité de suivi des conventions de coordination garantira qu'elles ne resteront pas une coquille vide. Les collectivités territoriales et leurs interlocuteurs étatiques sont remis sur un pied d'égalité de droits et de décisions, pour favoriser une action en partenariat. Si la généralisation des conventions de coordination est une bonne chose, les rendre obligatoires reste plus difficile, car cela représente beaucoup de changements en peu de temps pour les petites communes rurales. Les conventions de coordination préciseront les possibilités de consultation des fichiers administratifs et les modalités de communication entre les forces de sécurité étatiques et territoriales ; elles sont obligatoires pour le travail de nuit des policiers territoriaux ainsi que pour leur armement, et elles détermineront leur doctrine d'emploi. Avant de les rendre obligatoires, il serait bon que les maires des petites communes aient eu suffisamment de temps pour définir les missions de leurs agents territoriaux.
Un amendement propose d'encadrer les centres de surveillance urbains, d'y définir clairement les missions des différents agents qui y travaillent et d'introduire une obligation de formation pour certaines missions. Le texte n'aborde pas le volet social ; des négociations sont néanmoins en cours sur le sujet. On a constaté un mouvement de détachement d'un certain nombre de fonctionnaires de la sécurité - policiers ou gendarmes nationaux - vers les collectivités territoriales. À l'inverse, les policiers municipaux ont peu l'occasion de migrer vers les corps étatiques. Les fonctionnaires d'État qui intègrent la police municipale font souvent valoir leur statut et leur ancienneté pour obtenir des postes d'encadrement au détriment de leurs collègues locaux. Un sentiment d'injustice légitime se développe chez les policiers municipaux qui craignent que les contraintes budgétaires favorisent un mouvement de contingentement du nombre de chefs de service de police municipale pouvant se voir attribuer l'échelon sommital dans les communes de plus de 10 000 habitants. Le maire ou le président de l'Epci sait le niveau de responsabilité qu'il confie à ses agents territoriaux. Ce niveau n'a rien à voir avec le nombre d'habitants de la commune. La notion de contingentement n'apparaît pas légitime, même si cela ne relève pas de la loi.
Je laisserai Catherine Troendlé vous présenter ses amendements sur les brigades vertes et sur les mesures transitoires concernant les policiers municipaux recrutés dans le cadre des parcs naturels régionaux.
Le rapporteur a su trouver des justifications supplémentaires à cette proposition de loi. Je la remercie pour son exposé clair, malgré l'aspect parfois technique des modifications statutaires proposées. Le rapport que nous avons fait avec M. Vandierendonck a montré qu'un pragmatisme non partisan s'impose pour traiter des activités des polices municipales, qu'il s'agisse de leurs missions ou de l'utilisation de la vidéosurveillance. Derrière des mots différents, les situations étaient quasi identiques à Évry et à Nice. À Lille, à Cannes, Amiens, Dijon ou Nice, combien de caméras ? Le pragmatisme a lissé les divergences qui existaient encore il y a quelques années. La création de la police territoriale favorise la cohérence et l'homogénéité, en fusionnant les activités, notamment celles des gardes champêtres. La formation est un volet important de la proposition de loi. Les ASVP constituent un champ d'emplois non contrôlés, dont les activités sont parfois à la limite de la légalité. J'étais partisan d'imposer sans délai l'obligation des conventions de coordination. Toutefois, le rapporteur nous dit qu'elles restent indispensables pour toute modification de la doctrine d'emploi des policiers municipaux. Cet argument me convainc qu'un délai est possible avant de rendre le texte obligatoire.
Conformément à ce qu'avait demandé Mme Assassi, nous avons eu un débat avec le ministre de l'Intérieur, et nous avons mené au Sénat une concertation avec les directions des ministères concernés. La discussion reste ouverte sur la question de l'appellation. Les mesures proposées sur les conventions de coordination, sur l'accès aux moyens de radiocommunication, les conditions de légalité de la vidéoprotection, l'urgence et l'importance de la formation répondent aux demandes de l'AMF et font progresser le débat. Le Sénat a réussi à s'entendre au-delà des clivages habituels. Dans un dernier effort collégial, nous devons ouvrir l'accès aux fichiers administratifs : celui des immatriculations, des voitures volées... C'est indispensable.
Je salue le talent du rapporteur. Nous avons trouvé un consensus sur un sujet important pour nos concitoyens et pour les communes. En tant qu'élu de banlieue, je connais la réalité de la délinquance ! Je salue le pragmatisme des auteurs de la proposition de loi qui reconnaissent à la police municipale un rôle utile, distinct de celui de l'État.
J'ai un doute sur le changement de dénomination proposé : la symbolique compte pour le corps des officiers municipaux. L'adjectif « municipal » les distingue de la police nationale. Si on le change, il faudra aussi changer les logos sur les voitures, sur les uniformes, etc.
La formule retenue pour l'attestation de fin de formation initiale est intéressante. Elle ne doit pas pour autant allonger les délais. L'enquête du préfet dure six mois, pendant lesquels l'agent n'est pas habilité. Le dispositif des articles 14 et 15 est clair sur la question des délais. L'amendement du rapporteur va également dans le bon sens.
Dans les communes de plus de 10 000 habitants, la fonction de chef de service de police municipale doit pouvoir être acquise par un agent qui travaille dans la police municipale s'il en a les compétences. Je suis maire d'une ville de 15 000 habitants, dont le chef de la police municipale a décidé de partir pour être chef de service ailleurs. Le taux de délinquance atteignait les 95 pour mille, ramené à 65 pour mille grâce à la police municipale et la vidéosurveillance. Le rôle du chef de la police municipale est primordial ; il doit pouvoir être fidélisé.
Quand j'ai créé une police municipale dans ma commune, je l'ai armée sans en faire un débat. J'ai autorisé l'utilisation des flashballs par la police municipale sans en faire non plus un débat. J'ai eu raison, car lors d'une bataille rangée entre cités, les flashballs ont été une arme efficace pour la police municipale qui intervenait seule. Les conventions de coordination sont une bonne chose, tant qu'on laisse au maire une marge de décision sur le niveau d'armement qu'il souhaite donner à sa police. Le sujet n'a rien de politicien, il relève du pragmatisme.
Je m'associe aux louanges adressées au rapporteur. On ne pourra pas éluder la question de la reconnaissance d'un pouvoir de police générale au président de l'Epci, notamment dans les grandes agglomérations. La situation des polices municipales d'agglomération est abracadabrantesque. Les policiers sont sous l'autorité du maire et leur action s'arrête aux frontières de la commune, frontières que les délinquants ignorent. L'utilisation de la vidéoprotection varie d'une agglomération à l'autre. En prévision de l'Euro 2016, certaines collectivités s'inquiètent pour la surveillance des stades et des lieux de rassemblement. Mutualiser la vidéoprotection, le centre de surveillance urbain, la société en charge du transport serait une solution efficace d'un point de vue économique et financier. Il ne serait pas bon d'attendre la suppression des communes pour développer une compétence de police générale.
Je suis en désaccord avec l'article 18 qui supprime les conseils locaux. La taille des communes est un facteur important ; jusqu'à 40 000 habitants, la mesure ne serait pas gênante. Dans les communes de 200 à 250 000 habitants, les conseils intercommunaux sont des grand-messes qui durent toute la journée. Supprimer les conseils locaux mettrait fin au concept d'une police de proximité. Dans l'agglomération de Lille, il serait aberrant de gérer tout à la fois Lille-Roubaix-Tourcoing, Péronne-en-Mélantois, ville du président de Lille métropole, et Bouvines - 1214 ! - ville du vice-président.
Je suis d'accord sur le fond avec cette proposition de loi. Les différences qui séparent police rurale et police municipale s'amenuisent ; auparavant, les gardes champêtres avaient plus de compétences que les policiers municipaux : ce n'est plus le cas. L'ensemble du texte me paraît satisfaisant, à quelques détails près. Le diable est dans les détails... Je suis d'accord avec mon collègue Capo-Canellas sur le changement de dénomination. Des difficultés pratiques s'y opposent. Comment écrire « police territoriale » sur les voitures ? C'est deux lettres de plus ! Et la dénomination « police municipale » est passé dans l'usage.
J'ai lu avec intérêt l'amendement qui supprime la notion de moralité publique à l'article 13. C'est entièrement justifié. Comme M. Lecerf , je pense qu'il y a un problème au niveau intercommunal. Le vent est à la suppression des communes, mais on ne règlera pas le problème en attendant que les choses se fassent. Récemment, le tribunal administratif a mis en cause la responsabilité d'un maire pour ne pas avoir assuré la tranquillité aux abords d'équipements intercommunaux !
Les petites communes ont des problèmes à recruter. Imposer une formation initiale est de bon sens, mais pose problème. Souvent, les gardes champêtres sont débauchés chez les voisins. On pourrait améliorer le recrutement en permettant une embauche à charge dans un délai limité d'organiser une formation.
Je me félicite de ce texte qui est une co-production législative. Il a été porté par une majorité de l'opposition, travaillé avec le Gouvernement et les élus, et nous sommes parvenus à un consensus sur des questions complexes. L'évolution proposée est positive. Les gardes champêtres sont rassurés sur le maintien de leur spécificité. Les conventions de coordination doivent être renforcées. Le texte permet des avancées sur la codification des missions des centres chargés de la surveillance urbaine. La délivrance d'une attestation de fin de formation facilitera le recrutement. Nous nous félicitons du consensus dont ces mesures font l'objet. La dénomination est une question délicate. La dénomination de « police territoriale » est séduisante intellectuellement, car elle est en phase avec la réalité qui se dessine. Un changement de dénomination se heurterait néanmoins à des difficultés techniques et financières. L'accès aux fichiers est essentiel pour la police municipale. Il doit être encadré par un suivi et un contrôle.
Le groupe socialiste est favorable à ce texte. Les amendements corrigeront les points qui font débat.
En janvier 2013, le rapport de nos collègues Vandierendonck et Pillet montrait que la réflexion sur la police municipale avait évolué. Je reste convaincue que la sécurité n'est pas du ressort municipal, mais concerne l'État. Néanmoins, la proposition de loi fait avancer le débat. J'ai rencontré les syndicats de gardes champêtres et de policiers municipaux : ils approuvent les mesures proposées, même si des revendications persistent. Pour éviter le développement d'une sécurité à double vitesse, il faudrait à terme créer un grand service public regroupant la police municipale, la police nationale et la gendarmerie.
La dénomination a fait l'objet de remarques récurrentes. Le pragmatisme invite à conserver « police territoriale » par souci de clarté du texte. Il sera toujours temps en séance de revenir à « police municipale ». Je n'ai pas de chiffrage précis sur le coût que représenterait un changement de dénomination ; nous l'aurons lundi. Peut-être faudrait-il avancer de manière progressive sur un sujet qui ne donne lieu à aucune opposition dogmatique.
Des possibilités existent pour déléguer aux présidents d'Epci un certain nombre de pouvoirs en cas de manifestations sportives importantes et pour mutualiser les forces de sécurité. Rien n'empêche le Cispd de déléguer à un groupe local un certain nombre d'actions. Dans mon territoire, qui est petit et rural, le Cispd prend les grandes décisions, puis décline des fiches d'action qu'il confie à la police locale.
Monsieur Collombat, quand on recrute un candidat en le récupérant dans un autre département, l'agrément le suit, ne laissant place à aucun délai. Le Cnfpt travaille à améliorer sa réactivité sur la formation initiale.
Madame Assassi, la généralisation des conventions de coordination pourrait être la première étape menant à la création d'un grand service public de sécurité.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article 1er
Nous y sommes favorables compte tenu des précisions que vous avez données dans votre exposé.
L'amendement n° 6 est adopté.
Article additionnel après l'article 1er
L'amendement n° 2 garantit une période transitoire lorsque les gardes champêtres sont recrutés par des syndicats mixtes ou par des EPCI.
L'avis est favorable sous réserve de transférer l'article avant l'article 22 et de ne pas codifier la disposition proposée, car il s'agit de mesures transitoires. Il faudrait également préciser au deuxième alinéa que les gardes champêtres concernés sont recrutés « à la date de publication de la loi ».
L'amendement n° 2 est adopté sous réserve de ces modifications.
Article 3
L'amendement rédactionnel n° 7 est adopté.
Article additionnel après l'article 3
Article 5
L'amendement de cohérence rédactionnelle n° 12 est adopté.
L'amendement de précision n° 13 est adopté.
Article 6
L'amendement de cohérence rédactionnelle n° 15 est adopté.
Article 8
L'amendement de cohérence rédactionnelle n° 16 est adopté.
L'amendement rédactionnel n° 17 est adopté.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
L'article 9 est adopté.
Article 10
L'amendement de coordination n° 18 rectifié est adopté.
Article 12
L'amendement rédactionnel n° 19 est adopté.
Article 13
Article 14
L'amendement de coordination n° 27 est adopté.
Article 16
Article 17
Article 18
L'amendement rectifié de rédaction n° 30 est adopté.
Article 19
L'amendement n° 32 abaisse le seuil à partir duquel une convention de coordination est obligatoire à 4 agents, et non plus 5.
Je suis favorable à cet amendement en raison des précisions qui ont été apportées par le rapporteur.
Article 21
Je remercie mes collègues Vandierendonck, Pillet et Klès pour l'écoute attentive qu'ils m'ont accordée. Dans le Haut-Rhin, nous avons la brigade verte, syndicat mixte de gardes champêtres. La loi d'amélioration de la décentralisation du 5 janvier 1988 a prévu, grâce à l'amendement de MM. Goetschy, Schielé et Haenel, la mise en commun des gardes champêtres de collectivités réunies dans un syndicat mixte. Ces brigades vertes réunissent 58 gardes champêtres ainsi que des personnels administratifs et techniques bénéficiant d'un contrat unique d'insertion. Elles couvrent 308 communes. Les gardes champêtres sont répartis sur 10 postes et les patrouilles travaillent sept jours sur sept et 365 jours par an. La structure est financée pour moitié par le conseil général et pour moitié par les communes. Elle travaille en partenariat avec la région, le conseil général, la gendarmerie et la police. La brigade verte est un pilier de la sécurité et de la tranquillité des habitants. L'organisation répond aux besoins des petites communes et les coûts sont répartis. Au vu de sa parfaite efficacité, nous aurions pu envisager une généralisation de ce droit local spécifique. En tout cas, je ne souhaite pas que la situation des départements d'Alsace-Moselle soit modifiée. C'est pour cela que j'ai déposé l'amendement n° 4 qui propose de supprimer l'article 21.
L'existence du droit local dans les trois départements est un principe fondamental reconnu par les lois de la République. Le législateur doit néanmoins veiller à ce que le champ d'application de ce droit local ne s'accroisse pas. Je suis défavorable à l'amendement n° 4.
Cet amendement supprime l'article 21 qui soumet la nomination des futurs agents de police territoriale en Alsace Moselle au droit commun : nomination par le maire et agrément par le préfet et le procureur, puis assermentation. Tous les policiers territoriaux étant concernés et pas seulement les garde-champêtres, le droit local s'en trouverait étendu, ce qui n'est pas envisageable. Avis défavorable.
Je n'ai pas la même lecture de la décision du Conseil constitutionnel. Pour lui, une réforme législative ne doit pas se traduire par une extension des spécificités du droit local. Autrement dit, dans un secteur où il n'existe pas de spécificités, le législateur ne peut en créer. En revanche, il est tout à fait possible de modifier des dispositions dans un domaine où il en existe.
En outre, le dispositif prévu est assez utile pour tout le territoire, car les possibilités de coopération et de mutualisation intercommunales en matière de police municipale sont exagérément restrictives.
Une habitude mentale a été prise, de considérer que la mutualisation des moyens de police municipale n'est possible que dans le cadre d'un EPCI à fiscalité propre. Or la grande majorité de ces EPCI ne la souhaitent pas et les différences de situation entre grandes et petites communes la rendent très compliquée. Pourquoi ne pas permettre aux communes volontaires de passer par un syndicat pour mettre en commun certaines fonctions de police municipale ?
Moi aussi. Dans sa décision du 5 août 2011, le Conseil constitutionnel a considéré que les dispositions législatives et règlementaires particulières aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ne peuvent être aménagées que dans la mesure où les différences de traitement qui en résultent ne sont pas accrues et que leur champ d'application n'est pas élargi. Ici, il ne s'agit pas d'aménager des dispositions du droit local, mais de ne pas les supprimer.
Si à chaque fois que nous examinons un texte, on ne peut maintenir les dispositions locales pour éviter un écart trop important avec le droit général, le droit local est destiné à mourir. Or, les Alsaciens y sont attachés.
M. Pillet et moi-même avons relayé les préoccupations de nos collègues : un de nos amendements garantit l'originalité du système tout en ménageant une transition.
Il existe 13 400 syndicats intercommunaux dont 5 800 inclus dans le périmètre d'un EPCI à fiscalité propre : il n'est donc pas anormal de rechercher une cohérence spatiale.
Votons l'amendement de repli et ouvrons le débat sur le pouvoir règlementaire des régions et des collectivités territoriales.
Par cohérence, je m'abstiendrai. Si par hasard, l'analyse de la décision du Conseil constitutionnel qu'a fait notre collègue se révélait inexacte et que ce texte soit déclaré inconstitutionnel, la spécificité tomberait immédiatement.
Je reste défavorable à cet amendement, d'autant qu'il s'agit des policiers territoriaux qui seront recrutés demain et les garde-champêtres en feront partie. Or, ils ne répondraient pas aux mêmes conditions de nomination, d'agrément et d'assermentation que les autres policiers territoriaux de France.
L'amendement n° 4 est adopté et l'article 21 est en conséquence supprimé.
Article additionnel après l'article 21
L'amendement n° 1 propose d'encadrer les conditions d'emploi des agents de surveillance de la voie publique (ASVP).
Articles additionnels avant l'article 22
En cas de changement de collectivité de recrutement, l'amendement n° 37 prévoit la transmission au préfet et au procureur de la République du dossier d'agrément de l'agent.
L'amendement n° 37 est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n° 34 modifie le code de la route pour permettre un accès direct des policiers territoriaux au fichier national des permis de conduire.
L'amendement n° 34 est adopté et devient un article additionnel.
Je viens d'évoquer l'amendement n° 36 relatif aux ASVP, qui sont des agents communaux agréés par le procureur de la République et assermentés. Un décret en Conseil d'État précisera les conditions de leur emploi sur la voie publique et fixera leur équipement.
Ces personnels ont un rôle en matière de police assez limité : la formation qui est ici prévue va dissuader nombre de collectivités d'en recruter.
Cette formation initiale est prévue et budgetée par le CNFPT, et elle est assez courte.
Une formation est nécessaire, car parfois les ASVP sortent de leurs missions et sont incorporés dans des patrouilles. Pour autant, cette formation doit être courte. Si elle est vécue comme une obligation de plus, nous manquerons notre cible.
Pourquoi ne pas fixer un seuil de population pour imposer cette formation ?
Si l'amendement de notre rapporteur est voté, nombre de communes ne recruteront plus d'ASVP.
Plutôt que fixer un seuil, peut-être pourrions-nous viser la nature des missions.
Ne transigeons pas sur la formation. De nombreuses interventions d'ASVP sont totalement irrégulières.
N'exagérons pas non plus l'importance de cette contrainte qui est du reste, je le signale, de nature règlementaire...
En outre, les automobilistes sont de plus en plus procéduriers : nos ASVP doivent savoir qu'une partie de leurs actes sera contestée. Enfin, mieux vaut ne pas être trop rigides sur la délimitation des activités des ASVP et des policiers municipaux.
L'amendement n° 36 est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n° 33 traite des assistants temporaires des agents de police territoriale (ATPT) : aujourd'hui, ils ne sont pas armés mais relèvent tout de même d'un double agrément, procureur et préfet. Aux termes de l'amendement, un décret en Conseil d'État devra préciser leurs missions, pour qu'ils ne deviennent pas des supplétifs des policiers municipaux - et pour ne mettre personne en danger.
L'amendement n° 33 est adopté et devient un article additionnel.
L'amendement n° 35 traite des centres de surveillance urbains (CSU). Il a été envisagé de les raccorder aux forces de sécurité de l'État mais cela n'est pas possible par l'application de l'article 40 de la Constitution sur les irrecevabilités financières. Lors du débat en séance publique, nous interrogerons le ministre sur ce point.
Cet amendement est extrêmement restrictif par rapport à la pratique actuelle. En outre, il est contraire aux conventions de coordination qui déterminent les conditions dans lesquelles la police municipale et le CSU transmettent les images à la police nationale. Ici, il est écrit que les CSU participent aux tâches administratives des agents de la police territoriale. Dès lors, le CSU n'informera plus la police nationale de la commission des faits. Je souhaiterais que l'on rectifie l'amendement pour qu'il ne soit plus fait référence aux tâches de police administrative.
Ce nouvel article est-il vraiment utile ? Le droit des CSU est stabilisé et les gouvernements successifs n'ont pas souhaité y revenir. Or ce texte, même sous amendé, interdit toute utilisation en flagrance. Les agents de surveillance, qui ne sont pas tous des agents de police municipale, ne pourront alors transmettre les images. Il faut au moins les autoriser à passer un appel radio, ce qu'interdit cette rédaction. Où est l'intérêt de cet amendement ?
Je le maintiens car des dérives ont été relevées, notamment à cause de l'absence de formation juridique des opérateurs. Ils sont en outre tiraillés entre la loi informatique et liberté et le code de sécurité intérieure. Il convient donc de former ces personnels. En revanche, j'accepterai un amendement de M. Capo-Canellas.
Si votre souci est la formation, le premier alinéa de l'amendement n'est pas nécessaire.
Pourquoi règlementer à l'excès ? Il suffit de dire que ces agents doivent être formés ! De plus, les opérateurs affectés peuvent être des agents territoriaux s'ils visionnent des immeubles ou des établissements publics mais ils doivent être des agents de police territoriale s'ils visionnent la voie publique. Quelle complexité...
En outre, n'importe quel agent public doit aviser l'autorité judiciaire lorsqu'un délit est commis : que faites-vous de l'article 40 du code de procédure pénale ? Enfin, il est inconcevable de multiplier les structures territoriales alors que les commissariats devraient surveiller la voie publique et traiter les problèmes.
Compte tenu de ces remarques, je retire mon amendement et j'en rédigerai un autre d'ici lundi.
Article 22
L'amendement rédactionnel n° 38 est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
Puis la commission examine le rapport de M. Jean-Patrick Courtois et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 418 (2013-2014) de M. Jean-Claude Carle et plusieurs de ses collègues tendant à permettre aux candidats de se présenter aux élections municipales avec la nuance « sans étiquette » dans les communes de moins de 3 500 habitants.
M. Jean-Claude Carle a déposé une proposition de loi tendant à permettre aux candidats de se présenter aux élections municipales avec la nuance « sans étiquette » dans les communes de moins de 3 500 habitants.
Les élections municipales des 23 et 30 mars se sont déroulées sans dysfonctionnements majeurs malgré les innovations de la loi du 17 mai 2013. Les deux importantes transformations de ce scrutin municipal sont l'abaissement à 1 000 habitants du seuil démographique à partir duquel l'élection a lieu au scrutin de liste à la représentation proportionnelle et non au scrutin majoritaire plurinominal ; et l'obligation, pour l'ensemble des candidats dans toutes les communes, de déposer une déclaration de candidature.
Cette dernière modification a eu des répercussions sur la collecte des données personnelles révélant l'appartenance politique des candidats et des élus. Cette question a suscité une vive émotion que les associations d'élus - AMRF et AMF en tête - ont relayée. La proposition de loi répond aux réactions des candidats et des élus qui, dans les communes comprises entre 1 000 et 3 500 habitants ont mal vécu l'obligation d'indiquer une nuance politique lors du dépôt des candidatures en préfecture.
Il convient tout d'abord de distinguer l'étiquette politique de la nuance politique. Le candidat choisit librement d'adopter ou non une étiquette politique et son choix s'impose à l'administration. Un élu a du reste la faculté de modifier son étiquette au cours de son mandat. Parallèlement, l'administration attribue une nuance politique aux candidats puis aux élus en fonction d'une nomenclature fixée par le ministère de l'intérieur et présentée au candidat lors du dépôt de candidature. Elle se fonde sur plusieurs éléments : soit le candidat en déclare une et l'administration la reprend à son compte, soit elle estime que cette nuance ne correspond pas à la réalité et elle choisit celle qui lui semble la plus adéquate. En tout état de cause, il n'existe pas de nuance « sans étiquette » mais seulement une rubrique « autres » dans laquelle figure, par exemple, les partis anti-fiscalistes, les partis religieux, les partis socio-professionnels, les partis régionalistes, le parti Pirate et même... le parti d'en rire !
Jean-Claude Carle estime qu'il y a une différence fondamentale entre la plupart des listes des petites communes qui se définissent comme « sans étiquette » et des listes « divers ». Les premières n'ont pas de sensibilité politique revendiquée, les secondes en ont une, « même si elle est marginale, voire originale pour certaines d'entre elles ».
Dans les communes de moins de 1 000 habitants, les candidats ne font pas l'objet d'un « nuançage » et, parmi les élus, seul le maire se voit attribuer une nuance politique. Pour les autres communes, un mandataire dépose la déclaration de candidature avec, éventuellement, une étiquette politique. L'administration opère ensuite son nuançage politique à partir des déclarations et des indices qu'elle peut recueillir.
Les candidats découvrent alors, parfois dans la presse, la nuance politique qui leur a été attribuée et qui reste conservée au sein du fichier géré par le ministère de l'intérieur. Cette situation crée des incompréhensions, voire des divisions internes à une même liste quand des candidats découvrent qu'ils ont été affublés d'une nuance politique dans laquelle ils ne se reconnaissent pas. C'est le cas évidemment des nombreuses listes d'union communale rassemblant des candidats de toutes tendances politiques, qui parfois ne connaissent pas les préférences politiques de leurs colistiers. Voyez dans combien de communes on ne trouve qu'une seule liste de candidats, généralement transpartisane. Aux dernières élections municipales, c'était le cas dans 41 % des communes de 1 000 à 3 500 habitants et dans 46 % des communes de 1 000 à 2 000 habitants.
Le texte prévoit de limiter le travail de nuançage aux communes de plus de 3 500 habitants. D'abord, la nuance politique ne doit pas être imposée à des candidats dans les communes de moins de 3 500 habitants où la constitution de listes ne correspond pas forcément au jeu politique national. Si un candidat veut choisir une étiquette politique, une nuance pourra lui être attribuée. S'il n'en choisit pas, il sera « sans étiquette », donc sans nuance politique. Ensuite, il existe une marge d'erreur trop importante et ces informations qui sont utilisées le soir du scrutin pour donner des tendances nationales risquent de fausser l'exercice - des listes seront abusivement classées « divers gauche » ou « divers droite ».
Avant 2013, le travail de nuançage ne portait pas sur les communes de moins de 3 500 habitants ; le ministère de l'intérieur n'en était pas moins capable de dégager des tendances nationales.
Les deux amendements que je vous propose réécrivent formellement la proposition de loi, notamment en supprimant la codification proposée, en raison d'une mauvaise imputation dans le code électoral. Le premier amendement pose deux règles simples et claires : pour toute élection, un candidat ou un élu peut choisir son étiquette politique, ce qui est le droit actuel. S'agissant de la nuance politique, il faut distinguer deux situations : pour l'élection municipale dans les communes de moins de 3 500 habitants, aucune nuance politique ne serait attribuée si le candidat ou l'élu n'a pas lui-même fait connaître son étiquette politique. Pour les autres communes et les autres élections, le droit actuel demeurerait. Le second amendement assure l'application de ce texte dans les collectivités ultramarines régies par le principe de spécialité législative. Aucune disposition particulière n'est prévue pour les élections à l'étranger, notamment l'élection des conseillers consulaires, car je n'en ai pas perçu l'utilité. Nos collègues représentant les Français établis hors de France pourront susciter le débat par des amendements s'ils le souhaitent...
Je vous invite à adopter mes amendements et la proposition de loi ainsi modifiée.
Les dernières élections municipales ont profondément perturbé les maires, notamment dans les communes rurales. En revanche, je ne suis pas certain que ce problème bureaucratique relève de la loi.
Dans certains départements, les sous-préfets, parfois les préfets, ont obligé les candidats à déclarer une étiquette, voire les ont affublés d'une étiquette dont ils ne voulaient pas. Mais tout cela relève de la gestion des préfets et non pas de la loi. Le nuancier, c'est une facilité que se donne l'administration mais qui n'a rien d'obligatoire.
Nous avons été interpellés par nombre de candidats aux élections municipales qui ne comprenaient pas qu'on puisse leur imposer une étiquette dont ils ne se réclamaient pas.
Dans ma commune de 4 800 habitants, j'ai constitué une liste d'union et chaque candidat a déclaré être sans étiquette. Or, certains avaient la carte d'un parti, socialiste par exemple. Finalement, nous avons été catalogués « divers droite » !
Ce problème ne relève certes pas de la loi, mais ce texte nous offre l'occasion d'attirer l'attention du gouvernement sur ce problème.
Cette question ne relève pas de la loi.
En outre, on se réfère encore au seuil de 3 500 habitants, mais celui-ci n'a plus lieu d'être puisque c'est à 1 000 habitants que le scrutin majoritaire remplace le scrutin de liste. Pourquoi dès lors opérer une distinction entre les communes de plus de 3 500 habitants et les autres ?
Le Gouvernement et les administrations, enfin, doivent respecter la volonté des candidats, ce qui est la moindre des choses dans une démocratie.
Pour que le ministère de l'intérieur nous entende, nous n'avons d'autre voie qu'une proposition de loi. Les candidats ont été obligés de choisir un positionnement politique ; ils ne s'y reconnaissaient pas, mais certains partis politiques ne s'y sont pas non plus retrouvés. Ce système n'a eu que des conséquences négatives et le présent texte est donc bienvenu.
Le travail d'analyse du ministère de l'intérieur n'est pas de pure perversion, il sert la science politique. Cependant, on est sans doute allé trop loin. En 1982, nous avions fixé, un peu au jugé, la barre à 3 500 habitants : elle est aujourd'hui acceptée par tout le monde car elle correspond dans les faits au seuil où une confrontation plus politique s'engage.
Lors de la réforme constitutionnelle de 2008, une nouvelle procédure pour nous adresser au gouvernement a été instaurée : la résolution. Pourquoi ne pas en voter une ? J'ajoute que l'addition des voix, incluant les communes de 1 000 habitants, ne sert pas à grand-chose. L'addition des voix aux élections législatives, aux régionales, a un sens, pas au niveau communal.
Nous présenterons deux amendements pour, notamment, permettre aux candidats de se présenter avec l'étiquette « sans étiquette ».
Grâce au débat que nous aurons en séance, que la proposition de loi prospère ou non, le ministère de l'intérieur prendra conscience du problème et percevra l'écho de la violente protestation des élus locaux.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article 1er
J'ai déjà présenté mon amendement n° 4 rectifié.
L'amendement n° 4 rectifié est adopté et l'article est ainsi rédigé.
L'amendement n° 2 rectifié devient sans objet.
Article 2
L'amendement n° 5 étend cette loi outre-mer.
L'amendement n° 5 est adopté et l'article est ainsi rédigé.
L'amendement n° 1 rectifié devient sans objet.
Article additionnel après l'article 2
Cet amendement complète utilement les miens. Je suggère aux auteurs de l'amendement n° 3 de le rectifier pour le formuler ainsi :
Article 1er, compléter ainsi cet article :
III. Lors du dépôt de la déclaration de candidature, la liste des nuances politiques est portée à la connaissance de la personne qui procède à ce dépôt. Cette personne est également informée du droit d'accès et de rectification dont disposent les candidats.
J'accepte cette rectification.
L'amendement n° 3 rectifié est adopté.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La commission examine ensuite le rapport de M. Jacques Mézard et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 519 (2013-2014), modifiée par l'Assemblée nationale, permettant la création de sociétés d'économie mixte à opération unique.
Nous examinons en deuxième lecture la proposition de loi de M. Jean-Léonce Dupont permettant la création de sociétés d'économie mixte à opération unique. Deux propositions identiques ont été déposées, une de M. Daniel Raoul, une autre de M. Antoine Lefèvre ici présent.
En première lecture, ce texte a été adopté au Sénat à l'unanimité ; il a également été soutenu par les diverses sensibilités politiques à l'Assemblée nationale. Il vise à créer une nouvelle forme de partenariat public privé (PPP) institutionnalisé, dont l'objectif est d'optimiser le fonctionnement des services publics locaux en réintégrant leur gouvernance au sein des collectivités territoriales tout en exploitant le savoir-faire du secteur privé, chargée d'exécuter par contrat une opération unique, pouvant consister en la réalisation d'un ouvrage ou en la gestion d'un service public. Ce montage juridique a été validé par la Commission européenne et la Cour de justice des communautés européennes.
Nous avons prévu une seule procédure de mise en concurrence, non pour l'attribution du contrat mais pour choisir la personne privée participant à cette SEM - les candidats devant faire la preuve de leur expertise technique, opérationnelle et budgétaire.
Pour nous, il ne s'agit pas de remplacer les PPP ni d'abandonner les formules traditionnelles de gestion des services publics locaux telle que la délégation de service public, mais de créer un outil supplémentaire au service de nos collectivités, à l'image des sociétés publiques locales créées en 2010 et qui fonctionnent bien.
En première lecture, nous avons assuré la sécurité juridique du dispositif afin de respecter les exigences communautaires en matière d'égalité de traitement, de transparence, de publicité des procédures. Nous avons écarté la dénomination de SEM-contrat, pour retenir celle de SEM à opération unique ou Semop, en insistant sur le champ d'intervention, limité à l'exécution d'un contrat unique. Nous avons clarifié les différentes étapes de création d'une SEM à opération unique et de conclusion du contrat, ainsi que la procédure de mise en concurrence pour la sélection de l'actionnaire privé, dans le cadre d'un appel public à manifestation d'intérêt.
À l'Assemblée nationale, la commission des lois a conforté la simplification du dispositif en réaffirmant le caractère unique de la procédure. Elle a substitué à la notion d'actionnaire opérateur celle d'opérateur économique pour désigner la personne privée participant au capital de la Semop. Elle a précisé que celle-ci devrait garder le même objet social pendant toute la durée de la concession, ce qui est logique. Elle a également prévu que la dissolution de la société pourrait intervenir de plein droit dans le cas où le contrat conclu entre elle et la collectivité prendrait fin avant la réalisation de l'opération, par accord ou par résiliation pour faute. Elle a en outre souhaité que la sélection du partenaire opérateur s'organise dans le strict respect des procédures de mise en concurrence existantes. Elle a par ailleurs supprimé la possibilité d'attribuer des contrats connexes ou de sous-traitance simultanément au choix de l'actionnaire opérateur. Enfin, elle a préféré l'établissement d'un document de préfiguration prévoyant les caractéristiques, les modalités et le coût de la structure ainsi mise en place.
En séance publique, l'Assemblée a adopté six amendements, dont deux importants : plusieurs opérateurs économiques pourront être retenus pour créer une SEMOP s'ils constituent un groupement pour répondre à l'appel public de la collectivité. En outre, l'Assemblée a introduit un article 1er ter qui prévoit, à l'instar de l'obligation existante pour les délégations de service public à une société publique locale, l'intervention de l'organe délibérant pour se prononcer sur le principe et sur la pertinence du recours à une SEM à opération unique.
J'ai reçu deux organisations professionnelles : le conseil national de l'ordre des architectes et le syndicat national de second oeuvre. Certains comparent, à tort, la SEM à opération unique aux PPP qui ont été fortement critiqués en raison des risques financiers qu'ils engendrent parfois pour la collectivité publique et du poids de certains grands groupes dans ces montages. Pour la SEM à opération unique, des dispositions visent à protèger nos collectivités : la présidence de la SEM reviendra à la collectivité qui disposera aussi, au minimum, de la minorité de blocage. Enfin, les projets qui auront recours à un tel dispositif seront d'envergure plus modeste que ceux faisant l'objet de PPP. Certaines expériences ont conduit les collectivités à freiner la conclusion de tels partenariats.
Je vous propose donc d'approuver les modifications adoptées par l'Assemblée nationale et de voter ce texte conforme.
Les formes de SEM se multiplient. Cela marche bien, dites-vous : oui, jusqu'au jour où il y aura un problème. Soyons donc vigilants : j'approuve les modifications apportées par l'Assemblée.
Cependant, à quoi correspond juridiquement l'expression « opérateur économique » ? Quelle est cette catégorie ? Recouvre-t-elle une filiale de la Caisse des dépôts (CDC)°? Le terme inquiète un certain nombre d'opérateurs. Participer au capital d'une SEM, fort bien ; mais l'important, c'est le contrat...
Pour faire écho à ces remarques, je signale la réaction de l'Union nationale des services publics industriels et commerciaux (UNSPIC), qui réunit une grande partie des opérateurs économiques potentiels. Elle estime que la suppression par l'Assemblée nationale de la disposition qui permettait à l'actionnaire opérateur économique de joindre des projets de contrats de sous-traitance à son offre retire tout intérêt à la création de la SEM à opérateur unique. Désormais, l'actionnaire opérateur économique sera retenu sur la base d'une offre qui n'est pas engageante et de critères arbitraires dès lors que les conditions techniques et financières qui fondent son offre ne sont pas déterminées mais subordonnées à un appel d'offre dont on ignore par hypothèse quels seront les résultats.
Les opérateurs souhaitent s'engager dans un partage de risques avec le coactionnaire public. Mais sans contrat, ils ne pourront être solidaires du risque éventuellement créé. La disparition de cette disposition ne retire-t-elle pas beaucoup d'intérêt à une proposition de loi initialement novatrice ?
Elle reste néanmoins très intéressante. Je me réjouis que l'Assemblée nationale l'ait votée dans un quasi-consensus et sans apporter de modifications de fond. Je suis partisan d'un vote conforme, même si le texte n'est pas parfait.
La SEMOP va susciter des partenariats plus sécurisés et performants. Au moment où l'État réduit ses dotations aux collectivités, nous devons nous doter d'outils économiques innovants pour assurer le maintien de certains services publics de proximité.
Mon groupe partage cette approche. Les changements introduits par l'Assemblée nationale ne dénaturent pas le texte. Un vote conforme nous convient.
Des représentants des sous-traitants nous ont saisis : ils craignent, à tort, de voir ressurgir les inconvénients des PPP, sur lesquels M. Hugues Portelli et moi-même préparons un rapport. La version de l'Assemblée nationale prend davantage en compte les sous-traitants, me semble-t-il, avec la procédure qui leur est spécifique. Ou n'ai-je pas bien compris ?
M. Jean-Jacques Hyest cite les filiales de la CDC à juste titre. Je crois pourtant solide l'explication donnée lors du débat à l'Assemblée nationale : si la notion de personne privée est employée par le code général des collectivités territoriales, elle ne correspond pas au vocabulaire de la commande publique, qui utilise la notion d'opérateur économique. Cela ne préjuge pas de la forme juridique du co-contractant.
C'est une dégradation ! Le code des marchés publics l'emporte sur le code général des collectivités territoriales... et peut-être sur le code civil ?
Nous avions retenu la notion de personne privée ; l'Assemblée a préféré une notion englobant plus facilement un certain nombre de structures. Cela ne fragilise pas le système ni ne crée de véritables difficultés. Je préférais notre formulation mais ne crois pas qu'il y ait lieu de rouvrir le débat. L'Assemblée nationale affirme la maîtrise politique de la SEMOP d'entrée de jeu, avec un document de préfiguration. L'UNSPIC a l'habitude de s'agiter ; souvenons-nous de ses réactions lors du débat sur les sociétés publiques locales... L'ordre des architectes s'inquiète également de la difficulté à répondre en libéral à ces appels d'offres ; la possibilité de se présenter en groupement est néanmoins prévue. Les architectes demandent d'exclure du champ d'application le bâtiment et la construction... autant supprimer tout le texte ! Celui-ci n'est pas parfait, mais nous devrions, comme à notre habitude, faire confiance à l'intelligence des territoires.
La proposition de loi est adoptée sans modification.
Puis la commission examine le rapport de M. Jean-Pierre Michel et le texte qu'elle propose pour la proposition de loi n° 826 (2013-2013) tendant à moderniser diverses dispositions de la législation applicable dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.
Le droit local alsacien-mosellan, que la proposition déposée par M. André Reichardt et certains membres de son groupe propose de moderniser, est issu des trois conflits mondiaux qui ont opposé la France et l'Allemagne, en 1870, en 1914 et en 1940. Par la loi du 17 octobre 1919, il fut décidé que certaines dispositions issues du droit de l'empire allemand continueraient à s'appliquer. Deux lois de 1924 l'ont confirmé, puis l'ordonnance du 15 septembre 1944 a intégré ce droit local dans la légalité républicaine. En pratique, le droit général est la règle et le droit local l'exception ; l'aménagement de ce dernier ne doit pas étendre son champ d'application.
Nos concitoyens des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle sont très attachés à ces dispositions, certaines parce qu'elles sont plus favorables, comme pour les retraites, d'autres parce qu'elles sont traditionnelles comme le Concordat ou parce qu'elles correspondent à la structure des métiers dans ces départements. Les lois votées gomment tout possible conflit de constitutionnalité, qui ne manquerait pas d'exister sinon, entre le Concordat et la laïcité, entre le régime spécial des retraites et l'égalité devant la loi sur tout le territoire, par exemple.
La proposition de loi comporte cinq titres, d'inégale importance. De toute ma vie parlementaire je n'ai eu autant de doutes et d'interrogations que pour écrire ce rapport et me prononcer sur le texte. Je suis neutre, je n'ai aucun intérêt dans cette affaire, j'ai entendu le maximum de gens pendant le temps imparti : les ministères du travail, de l'économie, de la justice ; la direction générale des collectivités locales ; l'Institut du droit local alsacien-mosellan ; les chambres régionales des métiers de Lorraine et d'Alsace, la confédération de l'artisanat d'Alsace, la fédération française du bâtiment du Haut-Rhin, les unions des corporations artisanales du Bas-Rhin et du Haut-Rhin et l'établissement public d'exploitation du livre foncier informatisé (Epelfi). Les divergences entre eux sont nombreuses.
Les trois premiers articles concernent les corporations. L'organisation des métiers dans ces départements repose en effet sur des chambres des métiers, des syndicats patronaux, mais aussi sur des corporations qui regroupent par département ou par arrondissement les artisans qui exercent exactement le même métier. L'adhésion à certaines est facultative, mais obligatoire à d'autres. Elles présentent un grand intérêt car elles exercent une mission de service public, tendant à valoriser un métier. Pour l'emploi, elles jouent un rôle fondamental : dans ces départements, l'apprentissage est très développé, or les corporations aplanissent les conflits et ont un oeil sur les conventions d'apprentissage.
Hélas, elles ne semblent pas toujours reconnues. Ainsi un artisan contraint de cotiser auprès de deux corporations différentes a saisi le Conseil constitutionnel : celui-ci a estimé dans sa décision du 30 novembre 2012 que la cotisation obligatoire était contraire à la liberté d'entreprendre. Depuis, certaines corporations ont fait faillite, d'autres n'ont survécu qu'avec l'aide des chambres consulaires.
La proposition de loi met en place un nouveau dispositif de financement reposant sur une participation facultative des chambres des métiers et sur un système de redevance pour service rendu - qui pourrait ne pas être constitutionnel, puisque le Conseil interdit un financement qui ne serait pas volontaire. La réponse à M. Roland Ries de la ministre de l'artisanat est éloquente à ce propos. En outre, les acteurs locaux ne sont pas tous d'accord : si la Moselle voit cela de loin - les corporations ne doivent pas y être aussi prégnantes - le président de la fédération du bâtiment du Haut-Rhin, qui regroupe plusieurs corporations, a demandé à être reçu pour s'opposer au « retour à l'ancien régime », selon ses propos.
Le second point concerne l'extension des compétences de l'Etablissement public d'exploitation du livre foncier informatisé (Epelfi). La publicité foncière relève en Alsace-Moselle du juge du livre foncier qui est un juge d'instance. Les relevés cadastraux, faits à la main, sont dans un état lamentable parce qu'ils ont été beaucoup manipulés et compulsés. Ils doivent donc être numérisés. Certains ont pris de l'avance, comme la communauté urbaine de Strasbourg. Mais Bercy, compétent normalement pour ces questions, et le ministère de la justice dont relève la tutelle de l'EPELFI, se renvoient la responsabilité du financement. Voilà où nous en sommes.
Le troisième point est le maintien de la taxe de riverains ; depuis sa création par l'empereur Guillaume 1er - pour financer l'extension de Strasbourg - les communes d'Alsace-Moselle peuvent voter une telle taxe lorsqu'elles ouvrent ou viabilisent une nouvelle voie. Or, la loi de finances rectificative de 2010 a abrogé la taxe à compter du 1er janvier 2015 : la proposition de loi vise à le pérenniser. Cela nécessite réflexion : le ministère de l'intérieur est hostile au rétablissement et la suppression a été faite avec l'accord explicite du rapporteur général du budget d'alors, M. Philippe Marini.
Je n'ai rien à dire sur le quatrième point, qui simplifie le droit des associations coopératives. Le cinquième point modernise le repos dominical ; en effet ; la loi qui fut si difficile à voter ne s'applique pas en Alsace-Moselle. Les dimanches et le vendredi saint, tout est fermé... en principe. Si cela est vrai pour les grandes surfaces, chacun ferme les yeux sur les petits commerces ouverts le dimanche matin à Strasbourg. Une convention a été signée pour libéraliser l'ouverture des commerces le vendredi saint et trois dimanches, avant Noël. Tous, y compris dans le Bas-Rhin, estiment qu'il faut attendre la mise en oeuvre de l'accord du 6 janvier 2014 et la poursuite des négociations avec les organisations syndicales de salariés pour la détermination des compensations. Si les Alsaciens sont favorables à une extension de l'ouverture le dimanche, les Mosellans sont beaucoup plus réservés. Pour le président de la chambre de commerce de Lorraine, le dimanche est sacré.
Par respect pour le droit local et déférence envers la proposition de loi, je voulais proposer un renvoi en commission et la création d'un groupe de travail, à l'initiative de notre commission mais ouvert à d'autres parlementaires ; je découvre ce matin un amendement très complexe d'André Reichardt sur le droit de l'indivision avec trois pages d'exposés des motifs - c'est dire - afin de résoudre un conflit entre la doctrine alsacienne-mosellane et une jurisprudence de la Cour d'appel de Metz. Je doute fort que ces dispositions, même votées par le Sénat, prospéreraient face à l'opposition du gouvernement. Vous contenteriez-vous d'un vote au Sénat, pour des raisons qui m'échappent ou plutôt que je ne veux pas entendre ? Si vous n'êtes pas d'accord avec le renvoi en commission...
Je vous proposerai dès lors des amendements de suppression sur tous les articles sauf deux, ceux consacrés aux associations coopératives et à la prescription acquisitive en matière cadastrale.
Il est vrai qu'un gentlemen's agreement veut que les textes des propositions de loi émanant de l'opposition arrivent, sauf accord de leur auteur, intacts en séance publique.
Cet accord interdit le renvoi en commission des propositions de loi sauf accord de l'auteur, je remercie le président de le rappeler. Si nous créons un précédent dans ce domaine, cela n'aura plus de fin.
Je remercie sincèrement M. Jean-Pierre Michel de son travail sur ce dossier, complexe aux yeux de tous ceux qui ne pratiquent pas le droit alsacien-mosellan. Il est normal que M. Michel ait des doutes... La règle au Parlement semble être plutôt de ne pas toucher au droit local, faute d'y comprendre quelque chose. Notre vaillant rapporteur a cependant commis quelques erreurs, que je lui signalerai, dans son rapport.
Les corporations de droit local, à ne pas confondre avec celles condamnées par la loi Le Chapelier, ne sont pas contraires à la liberté d'entreprendre, bien au contraire ! Il faut seulement réorganiser leur financement, urgemment puisque le Conseil constitutionnel a jugé inconstitutionnelle l'obligation inscrite en droit local. Il est possible de retenir des modalités qui existent ailleurs en France, outre-Vosges, dans la France de l'intérieur, comme nous disons. Nous ne demandons rien de plus ! Lorsque vous parlez de dérogation au droit commun, c'est faux : les redevances pour service rendu existent dans le droit général. Cette disposition n'augmente pas la distance entre ce dernier et le droit local, elle la réduit.
Le financement de la numérisation du cadastre ne serait pas prévu ? Allons : les trois conseils généraux se sont engagés à le financer. C'est si vrai que la direction générale des finances publiques, en l'occurrence la sous-directrice, Mme Catherine Brigant, m'a transmis une proposition d'amendement que je déposerai si le gouvernement ne le fait pas : « L'Epelfi contribue également à la modernisation de l'archivage de la documentation cadastrale des département du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle dans des conditions déterminées par l'administration chargée du cadastre. » Cela me convient parfaitement ! Si tout le monde est d'accord, pourquoi ne pas le faire ?
Nous souhaitons maintenir la taxe de riverains qui doit être abrogée à partir du 1er janvier 2015, au motif qu'elle est remplacée par la taxe locale d'aménagement, alors qu'elle a une utilité spécifique. Ainsi la viabilisation, à des fins de lotissement, d'un chemin de terre qu'empruntent aujourd'hui deux exploitants agricoles ayant construit des habitations devrait pourvoir être financée non seulement par les futurs acheteurs du lotissement, mais aussi par ces deux riverains, ce que ne permet pas la taxe locale d'aménagement.
Si nous laissons passer le délai, il ne sera plus possible de restaurer la taxe. Je remercie le rapporteur de n'avoir formulé aucune remarque à propos des dispositions sur les associations coopératives, que nous modernisons. Il y a un consensus général sur le cinquième point, les règles applicables en matière de repos dominical. Cela fait deux ans que l'Institut du droit local travaille sur le sujet. J'ai les e-mails de toutes les parties, qui souhaitent que l'on intègre dans la loi l'accord de janvier 2014 sur l'indemnisation des salariés. J'ai répondu que je ne pouvais pas le faire : il a été présenté à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) pour extension ; laissons faire la procédure. Cela ne fait pas obstacle à son application dans les mois qui viennent. Vous proposez, monsieur Michel, de supprimer cet article 8 et écrivez que les différents acteurs considèrent pertinent d'attendre la mise en oeuvre de l'accord qui devrait être prochainement étendu : c'est faux. Pourquoi cet amendement de suppression ?
N'étant pas un ayatollah du droit local, je suis prêt à examiner tous les amendements. J'ignore pourquoi M. Roland Ries et Mme Patricia Schillinger ne s'engagent pas plus pour soutenir ces mesures, car tout le monde y a intérêt ! Après le 1er janvier 2015, ce sera trop tard pour la taxe : or, les maires l'attendent.
Contrairement à ce que vous laissez entendre, nous nous sommes souvent occupés de droit local : nous avions découvert à cette occasion la faillite civile, que nous avions conservée. Il s'agit ici d'établir le texte de la commission - ou de ne pas adopter de texte, permettant ainsi un débat en séance publique, au lieu de conserver seulement un ou deux articles ! Notre rapporteur présenterait ses amendements en séance. C'est ainsi que nous avions procédé pour la proposition de loi de Mme Dini.
Le rapport n'est pas superficiel, loin s'en faut. Notre rapporteur a effectué un travail de fond. Il y a un amendement intéressant sur le partage notarié. Il faut nous permettre de débattre en séance.
La proposition de loi vise aussi à régler cette question. Mon amendement n° 1 trouve sa source dans une étude de l'Institut de droit local et a reçu l'aval de la Commission d'harmonisation du droit local, dont je suis le président, et qui est constituée exclusivement de juristes. Mais s'il gêne, je peux le retirer.
Je ferai ce que veut la commission. Mettons le texte aux voix, il sera adopté et je le rapporterai comme tel. Ce qui est proposé sur les corporations ne rallie pas toutes les organisations, la fédération française du bâtiment du Haut-Rhin y est hostile et le gouvernement s'y oppose. La redevance s'apparente à une taxe supplémentaire sur les entreprises, qui ne semble pas pertinente au moment où nous voulons alléger leurs charges. Je n'ai, certes, pas entendu les conseils généraux ; je pourrais le faire si un renvoi en commission était décidé ! Sont-ils décidés à partager les frais de numérisation ? Je l'ignore. Ce que je sais, c'est que le ministère de la justice s'oppose absolument à l'extension en l'absence d'un accord avec Bercy. La pérennisation de la taxe de riverains pourrait être inconstitutionnelle : c'est une forme d'extension du droit local. Cette taxe a été supprimée au profit de la taxe locale d'aménagement sur tout le territoire.
Quant aux dimanches, les personnes auditionnées ont été très claires : elles ne veulent pas du texte en l'état. Nous comprenons bien pourquoi les chambres veulent ajouter la convention avec les salariés dans la loi : c'est pour être confortées par rapport aux salariés.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
Article premier
L'amendement n° 3 n'est pas adopté.
Article 2
L'amendement n° 4 n'est pas adopté.
Article 3
L'amendement n° 5 n'est pas adopté.
Article 4
L'amendement n° 6 n'est pas adopté.
Article 6
L'amendement n° 7 n'est pas adopté.
Article 8
L'amendement n° 8 n'est pas adopté.
Article additionnel après l'article 8
Je n'ai pas d'avis sur l'amendement n° 1, trois pages compactes que je découvre ce matin. La Cour de cassation a-t-elle été saisie de ce conflit de droit local ? Ce serait utile. Et si tel est le cas, attendons de connaître sa position. Le sujet est trop complexe : retrait, sinon avis défavorable.
Je maintiens l'amendement, afin que la discussion ait lieu également sur ce point en séance publique.
L'amendement n° 1 est adopté.
Tout cela est dû au fait que la loi de 2006 n'a pas supprimé la loi de 1924, et que le droit local présente parfois des obstacles dirimants.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La commission entend enfin une communication sur les autorités administratives indépendantes.
Avant d'aborder mon sujet, une remarque sur nos travaux. Nous venons de consacrer près de quatre heures à la discussion de propositions de loi dont certaines relèvent du domaine réglementaire et d'autres sont déposées à des fins de communication. Elles ne sont assorties d'aucune étude préalable. Elles n'aboutiront pas. Nous devrions être plus raisonnables dans notre règlement. Les propositions de loi sont naturellement utiles à la démocratie ; néanmoins les formations politiques devraient elles-mêmes opérer un tri. Alain Richard a mené une petite enquête pour savoir si tel ou tel texte avait des chances de prospérer au-delà du vote par le Sénat. Notre groupe devrait faire de même.
L'Office parlementaire d'évaluation de la législation m'a confié en 2005 une mission sur les autorités administratives indépendantes (AAI) ; le 15 juin 2006, j'ai remis un rapport dans lequel je présentais une trentaine de recommandations. René Dosière et Christian Vanneste ont travaillé en 2010 sur la question au sein du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale. Depuis lors, onze AAI supplémentaires ont été créées, soit une par an au minimum ; et ce n'est pas fini, puisqu'il y en a deux en préparation !
Leur origine se diversifie. Le Défenseur des droits est d'origine constitutionnelle. En Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, il faut une loi organique pour autoriser leur création au niveau local : une création a eu lieu selon cette procédure en Nouvelle-Calédonie cette année. D'autres AAI ont été créées en vertu d'obligations internationales, telles que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) ou la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil). À l'exception d'une seule créée par voie réglementaire, les autres sont des créations du législateur. Le Défenseur des droits est né de la fusion de quatre AAI, tout comme l'Autorité de contrôle prudentiel dont l'indépendance vis-à-vis de la Banque de France est à relativiser puisqu'elle est présidée par le gouverneur de la Banque de France et financée intégralement par celle-ci.
On assiste à certains rapprochements : une autorité peut siéger au sein d'une autre comme le Défenseur des droits qui siège à la Cnil, à la Cada et à la CNCDH ; les autorités concluent entre elles des conventions, comme le CGLPL avec le Défenseur des droits pour régler le partage de compétences ; des projets de fusion ou d'absorption ont été présentés, comme entre le CSA et l'Hadopi, le CSA et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) évoquée au Sénat en 2013, ou celle, curieuse, entre l'Autorité de régulation des jeux en ligne (Arjel), et l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD).
Le législateur n'a pas rempli sa mission. Deux AAI inutiles ont ainsi été créées. Le Médiateur du livre, sans aucun pouvoir, créé par un amendement gouvernemental que nous n'aurions jamais dû accepter, ne méritait pas le statut ; le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires, un collège d'experts qui détermine le statut de victime des essais, non plus.
Nous assistons à la création de la supercatégorie des autorités publiques indépendantes (API), dotées de la personnalité morale et donc d'une autonomie financière au moins nominale, et qui peuvent ester en justice - ce qui pourrait du reste les empêcher d'exercer certains de leurs pouvoirs sous peine d'être juge et partie au regard de la jurisprudence de Strasbourg.
Il faut constater certains aspects positifs : un contrôle parlementaire renforcé -depuis 2008, notre commission et ses rapporteurs ont ainsi entendu à 117 reprises des AAI, dont 21 fois la Cnil, 11 fois le Défenseur des droits et 17 fois le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le rapport annuel, qui n'est pas obligatoire pour les AAI, tend à se généraliser, au moins sous la forme d'auditions par les commissions compétente. À cela s'ajoute un contrôle de l'adéquation entre les moyens et les missions, comme le travail de la rapporteure budgétaire Virginie Klès l'a montré. Il y a enfin le contrôle sur les nominations, grâce à la révision constitutionnelle de 2008 et l'introduction de l'article 13 de la Constitution.
Qu'est-ce qu'une AAI, sinon un objet administratif non identifié, qui exerce des fonctions relevant de la compétence du gouvernement, et qui est donc issu d'un abandon de ses attributions par ce dernier ? Il n'existe pas de définition ; le législateur est hésitant : il y a des « autorités administratives » qui ne sont pas « indépendantes » et des « autorités indépendantes » pas « administratives ». Pourquoi certaines AAI sont-elles dotées de la personnalité morale et pas d'autres ? Mystère.
Nous constatons cependant le développement de règles transversales communes aux AAI : la création de la Haute Autorité de transparence de la vie publique (HATVP) a soumis les membres des autres autorités aux mêmes règles de prévention des conflits d'intérêt que les parlementaires. Dans le même ordre d'idées, les règles d'octroi de crédits et autres moyens aux AAI, comme l'a montré Virginie Klès, s'harmonisent ; le projet de regroupement sur le site Ségur-Fontenoy du Défenseur des droits et des autres AAI consacrées à la protection des droits et libertés ouvrirait la voie à une mutualisation des moyens.
À l'avenir, nous devrons harmoniser le fonctionnement de l'ensemble des AAI ; harmoniser les rémunérations des dirigeants, actuellement très variées ; unifier les règles de fonctionnement, la durée du mandat, la composition des organes dirigeants ; mettre en place un commissaire du gouvernement, non pour surveiller, mais pour rapporter ce qui se passe ; clarifier la notion de personnalité qualifiée, qui ne s'applique manifestement pas à toutes les nominations... L'autonomie de recrutement est intéressante, mais elle doit être normalisée. Il manque un corpus déontologique indispensable pour des institutions qui imposent des contraintes aux citoyens. Nous pourrions à cette fin adopter une loi organique pour compléter l'article 34 de la Constitution de manière à fixer la compétence de la loi pour déterminer le statut des AAI. C'est ce que nous proposions en 2006, sans avoir hélas été écoutés.
Il y a beaucoup plus d'AAI que je ne l'imaginais. Avant de prendre les dispositions que propose Patrice Gélard, pourquoi ne pas d'abord faire du tri ? Certaines AAI ne devraient-elles pas sortir de cette catégorie ou être intégrées dans une autre AAI ?
Je rejoins Yves Détraigne. La fin de l'intervention de Patrice Gélard n'incite pas à l'optimisme. Les AAI sont des démembrements de l'État qu'il convient d'éviter autant que possible. C'est parfois impossible, comme avec le Défenseur des droits, le Contrôleur général ou le CSA. Mais beaucoup ne se justifient que par la volonté de créer un Monsieur ceci ou un Monsieur cela, voire d'affecter telle responsabilité à telle personne que le chef de l'État souhaite promouvoir. Je me souviens d'avoir été pressé de finir mon rapport sur la Halde, car la personne promise à sa tête - qui finalement ne fut pas nommée - attendait... Ne peut-on imaginer une proposition de loi qui établirait, d'une part, une déontologie des AAI - pendant longtemps, un parlementaire pouvait en diriger une, ce qui n'a pas de sens puisqu'il n'est pas totalement indépendant de son groupe politique - et, d'autre part, en supprimerait un nombre important ? Certains parlent de supprimer le Sénat, il serait plus utile de supprimer certaines de ces structures coûteuses. Je me souviens d'une discussion avec Jean-Paul Delevoye qui, nommé Médiateur de la République, découvrait un bail tout juste renouvelé et qui consommait un quart de son budget de fonctionnement.
Je remercie le doyen Gélard pour sa constance : lorsque nous étions ses étudiants, il nous mettait déjà en garde contre les démembrements de l'État et la débudgétisation. On peut certainement supprimer des AAI.
Il y a un tri à faire. Il enclencherait utilement la réforme de l'État, qui a désormais un secrétaire d'État directement rattaché au Premier ministre. Les parlementaires devront avoir le courage de commencer le tri par ceux qui sont d'initiative parlementaire.
Je suis pleinement d'accord avec nos trois orateurs : la nécessité du tri découle de celle de mieux définir ce qu'est une autorité administrative indépendante. Certaines autorités administratives indépendantes ont trois collaborateurs, mais d'autres en ont une centaine.
Ce n'est que la partie visible de l'iceberg : l'État dispose de nombreux autres moyens de camouflage de ses délégations : les agences, les établissements publics... Lorsque l'État déclare abandonner une fonction, il en camoufle en réalité l'exécution dans un établissement public et conserve l'ensemble de ses attributions en se cachant.
Le doyen Gélard avait déjà manifesté ses remarquables qualités pédagogiques à l'université de Lille, dont je fus aussi étudiant en lettres.
La commission autorise la publication de la communication sous forme d'un rapport.
Seul le président de la commission a le pouvoir de demander qu'un texte soit retiré de l'ordre du jour. Au cas où les deux signataires de la proposition de résolution qui n'a pas été adoptée par la commission en demanderaient le retrait, vous pourriez m'autoriser à y procéder.
La réunion est levée à 13 h 20